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No 2771

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 mai 2015

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur la révision de la politique européenne de voisinage,

ET PRÉSENTÉ

par M. Joaquim Pueyo et Mme Marie-Louise Fort,

Députés

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; M. Christophe CARESCHE, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; M. Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, MM. Arnaud LEROY, André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, MM. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Rémi PAUVROS, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.

SOMMAIRE

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Pages

SYNTHÈSE DU RAPPORT 9

INTRODUCTION 13

I. LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE, UNE FORMULE INTERMÉDIAIRE ENTRE DÉVELOPPEMENT SÉPARÉ ET INTÉGRATION TOTALE, POUR PROMOUVOIR LA PAIX ET LA PROSPÉRITÉ AUX FRONTIÈRES DE L’UNION EUROPÉENNE 17

A. FONDEMENTS ET GRANDS PRINCIPES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE 17

1. Une base juridique confortée par le Traité de Lisbonne 17

2. Quatre catégories d’objectifs et quatre cibles 18

3. Un périmètre géographique bien circonscrit 19

B. MÉTHODE ET OUTILS INSTITUTIONNELS 20

1. Un process itératif fondé sur des actes bilatéraux 20

a. Accords bilatéraux 20

i. Les Accords euro-méditerranéens établissant une association 21

ii. Les Accords de partenariat et de coopération 22

iii. Les Accords d’association créant une zone de libre-échange approfondi et complet 23

b. Plans d’action bilatéraux 25

2. Vecteurs de coopération 27

a. Coopération sectorielle 27

b. Coopération transfrontalière 28

c. Participation aux agences et aux programmes communautaires 28

i. Agences communautaires 28

ii. Programmes communautaires 29

iii. Programmes d’assistance technique 30

3. La réorientation stratégique de 2011 31

a. Quatre nouveaux axes d’action 31

b. Soutenir la démocratie 31

c. Promouvoir une croissance durable et inclusive 32

d. Approfondir certaines coopérations sectorielles 32

C. DOTATIONS FINANCIÈRES 33

1. L’Instrument européen de voisinage et de partenariat (2007-2013) 33

2. L’Instrument européen de voisinage (2014-2020) 36

a. « More for more » 36

b. Simplification 36

c. Meilleur ciblage du champ d’application 37

d. Réaménagement des Programmes de coopération transfrontalière 37

e. Meilleure incitation à la participation aux programmes européens 37

3. Les financements connexes 37

II. LES SEIZE PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE : UNE VOCATION COMMUNE À SE RAPPROCHER DE L’UNION EUROPÉENNE MAIS DES DISPARITÉS IMPOSANT DES APPROCHES VARIÉES ET DES RYTHMES DIFFÉRENCIÉS 39

A. L’AFRIQUE DU NORD ET LE PROCHE-ORIENT 39

1. Algérie 41

a. Profil 41

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 41

c. Actions à conduire en priorité 42

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 42

2. Égypte 42

a. Profil 42

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 43

c. Actions à conduire en priorité 43

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 44

3. Israël 44

a. Profil 44

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 45

c. Actions à conduire en priorité 46

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 46

4. Jordanie 47

a. Profil 47

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 47

c. Actions à conduire en priorité 48

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 48

5. Liban 49

a. Profil 49

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 49

c. Actions à conduire en priorité 50

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 50

6. Libye 51

a. Profil 51

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 51

c. Actions à conduire en priorité 52

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 52

7. Maroc 53

a. Profil 53

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 53

c. Actions à conduire en priorité 54

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 54

8. Territoires palestiniens 55

a. Profil 55

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 56

c. Actions à conduire en priorité 56

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 57

9. Syrie 57

a. Profil 57

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 58

c. Actions à conduire en priorité 58

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 59

10. Tunisie 59

a. Profil 59

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 60

c. Actions à conduire en priorité 60

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 61

B. L’EUROPE ORIENTALE ET LE CAUCASE DU SUD 62

1. Arménie 64

a. Profil 64

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 64

c. Actions à conduire en priorité 65

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 65

2. Azerbaïdjan 66

a. Profil 66

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 66

c. Actions à conduire en priorité 67

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 68

3. Biélorussie 68

a. Profil 68

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 69

c. Actions à conduire en priorité 69

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 70

4. Géorgie 70

a. Profil 70

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 71

c. Actions à conduire en priorité 71

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 72

5. Moldavie 73

a. Profil 73

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 74

c. Actions à conduire en priorité 74

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 74

6. Ukraine 75

a. Profil 75

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne 76

c. Actions à conduire en priorité 77

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage 78

III. LES PROFONDES ÉVOLUTIONS GÉOPOLITIQUES EN COURS AUX FRONTIÈRES MÉRIDIONALES ET ORIENTALES DE L’UNION EUROPÉENNE LA CONTRAIGNENT À REVOIR DE NOUVEAU SA POLITIQUE DE VOISINAGE 81

A. UN PROCESSUS À L’ORIGINE DE NOMBREUSES INITIATIVES DE CONCERTATION, QUI FONT DÉJÀ ÉMERGER DES PISTES DE RÉORIENTATION 81

1. La réforme de la Politique européenne de voisinage en préparation 81

a. Une révision motivée par les bouleversements de l’environnement politique de l’Union européenne… 81

b. … et la nécessité de clarifier les objectifs et les méthodes de la Politique européenne de voisinage 82

c. Le groupe de travail de la Commission européenne et du Service européen pour l’action extérieure 82

d. Une consultation publique objective et ouverte 83

2. Une réflexion collective très dense 84

a. Les contributions préalables des États membres 84

b. Les réunions interparlementaires 85

i. La Conférence interparlementaire pour la Politique étrangère et de sécurité commune et la Politique de sécurité et de défense commune 85

ii. La réunion interparlementaire de la commission des Affaires étrangères du Parlement européen 85

c. Le rapport d’initiative du Parlement européen 86

d. La réunion ministérielle de Barcelone avec les pays du voisinage Sud 86

e. Le futur sommet de Riga du Partenariat oriental 87

B. LES PROPOSITIONS INSPIRÉES PAR LES TRAVAUX DES RAPPORTEURS D’INFORMATION DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES 88

1. Les travaux préparatoires 88

a. Une table ronde « retour d’expérience » 88

b. Une série d’auditions d’acteurs européens 89

2. Les propositions des rapporteurs 89

a. Conserver le périmètre actuel 89

b. Ouvrir l’Europe sur les « voisins des voisins » 90

i. Créer des synergies politiques 90

ii. Dialoguer avec les organisations régionales et subrégionales 91

c. Distinguer clairement partenariat et élargissement 92

i. Organiser la politique de proximité de l’Union européenne selon trois cercles concentriques 92

ii. Tenir un discours de vérité 92

iii. Viser l’objectif « tout sauf les institutions » 93

d. Maintenir la physionomie unitaire du dispositif 94

e. Adopter une approche pragmatique de la conditionnalité 95

i. Principes 95

ii. Constat 95

iii. Rester ferme sur les principes en promouvant des politiques favorables au développement économique et à l’essor de la société civile 96

f. Accentuer la différenciation politique pays par pays 97

i. Tenir compte des ambitions et des choix stratégiques des partenaires 97

ii. Enrichir le contenu du statut avancé 97

iii. Ne pas opérer de discrimination entre les pays des deux zones de voisinage 98

g. Rendre les instruments de soutien financier un peu plus flexibles 98

h. Ne pas retoucher l’économie générale de l’Instrument européen de voisinage 99

i. Les 10 % fléchés « more for more » 99

ii. Deux tiers pour le Sud, un tiers pour l’Est 100

i. Améliorer le taux d’exécution des crédits engagés 100

j. Revoir la procédure des plans d’action et des rapports annuels de suivi 103

k. Encourager l’appropriation par les partenaires 103

l. Recentrer sur des priorités plus restreintes 104

i. Les propositions de la Commission européenne 104

ii. La question des flux migratoires 105

iii. La question de l’énergie 105

m. Renforcer le volet sécurité 106

TRAVAUX DE LA COMMISSION 109

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE 111

DRAFT EUROPEAN RESOLUTION 115

ANNEXES 119

ANNEXE Nº 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 121

ANNEXE Nº 2 : ÉCHANGES COMMERCIAUX ENTRE L’UNION EUROPÉENNE ET LES PAYS PARTENAIRES DE SA POLITIQUE DE VOISINAGE EN 2014 123

ANNEXE Nº 3 : INDICATEURS DÉMOGRAPHIQUES DES PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE EN 2014 125

ANNEXE Nº 4 : INDICATEURS DE RICHESSE DES PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE EN 2014 127

ANNEXE Nº 5 : CORRUPTION ET LIBERTÉ DE LA PRESSE, INDICES COMPARÉS EN 2014 129

SYNTHÈSE DU RAPPORT

La Politique européenne de voisinage, créée en 2004, s’appuie sur deux plateformes régionales : l’Union pour la Méditerranée, qui s’adresse à dix pays du Proche-Orient et de la rive Sud de la Méditerranée ; le Partenariat oriental, qui couvre six pays d’Europe de l’Est et du Caucase Sud. Elle a pour base juridique l’article 8 du Traité sur l’Union européenne.

Son but est d’encourager des relations plus étroites avec les pays limitrophes de l’Union européenne non engagés dans un processus de négociations d’adhésion et ainsi d’y promouvoir des réformes politiques et économiques de nature à enraciner la prospérité, la stabilité et la sécurité, dans l’intérêt mutuel des deux parties.

Elle se déploie par l’intermédiaire d’accords bilatéraux signés entre l’Union européenne et ses partenaires, qui sont de trois natures : les Accords euro-méditerranéens établissant une association ; les Accords de partenariat et de coopération ; les Accords d’association créant une zone de libre-échange approfondi et complet.

Les pays souhaitant renforcer leurs relations avec l’Union européenne et se rapprocher des standards communautaires concluent en outre à cet effet, pour une durée de trois à cinq ans, des plans d’action bilatéraux, prévoyant un programme de réformes politiques et économiques. Le Service européen pour l’action extérieure et la Commission européenne publient annuellement, pour chaque pays partenaire, un rapport de suivi analysant les progrès déjà réalisés et décrivant les actions restant à mettre en œuvre afin de se conformer au plan d’action bilatéral.

La Politique européenne de voisinage est actionnée par le biais de plusieurs leviers concrets : la coopération sectorielle ; la coopération transfrontalière ; la participation aux agences et programmes communautaires ainsi qu’à des programmes d’assistance technique ad hoc.

En 2011, l’Union européenne a réaffirmé l’importance de ses relations de voisinage à travers une nouvelle approche, encore en vigueur aujourd’hui, fondée sur quatre réorientations : une plus grande différenciation, pays par pays, des objectifs de coopération ; l’accroissement de la conditionnalité de l’aide financière ; le soutien au développement d’une économie solidaire ; le renforcement des synergies régionales.


En 2007, un mécanisme unique de financement a été créé pour l’ensemble de la Politique européenne de voisinage : l’Instrument européen de voisinage et de partenariat, crédité à hauteur de 13,4 milliards d’euros pour la période 2007-2013.

Ce mécanisme est remplacé, depuis le 1er janvier 2014, par l’Instrument européen de voisinage, qui s’intègre dans le paquet de programmation budgétaire du cadre financier pluriannuel 2014-2020. Doté d’un budget de 15,4 milliards d’euros pour cette période septennale, il se caractérise notamment par l’application du principe « more for more », c’est-à-dire l’intégration d’un certain degré de conditionnalité en fonction des progrès réalisés en matière de respect de la démocratie et des droits de l’homme.

Les seize pays partenaires ont une vocation commune à se rapprocher de l’Union européenne mais se caractérisent aussi par des disparités imposant des approches variées et des rythmes différenciés.

L’Union pour la Méditerranée est née en 2008, durant la présidence française de l’Union européenne, sur les fondements du partenariat EuroMed, dit « processus de Barcelone ». Inspirée des principes de réciprocité, de solidarité et de codéveloppement, elle a jeté les bases d’une nouvelle forme de coopération régionale, visant à promouvoir la paix, la stabilité et la croissance dans les pays partenaires.

Ne participent à la Politique européenne de voisinage que les dix pays du pourtour méridional de la Méditerranée non reconnus comme candidats à l’adhésion à l’Union européenne, c’est-à-dire neuf pays arabes – l’Algérie, l’Égypte, la Jordanie, le Liban, le Maroc, les Territoires palestiniens et la Tunisie, ainsi que la Libye et la Syrie, aujourd’hui inactifs dans l’organisation compte tenu de leur situation domestique – plus Israël.

Cette coexistence a été conçue par l’Union européenne comme un moyen de peser pour avancer vers une résolution du conflit israélo-palestinien, longtemps le principal point noir sécuritaire de la région. La détérioration de la situation au Sahel, en Libye et en Syrie a considérablement compliqué la donne en Méditerranée et au Proche-Orient, et justifie plus que jamais que l’Union européenne y déploie sa politique de voisinage.

Parmi ces dix pays, la coopération politique, culturelle, économique et commerciale est particulièrement fructueuse avec le Maroc et la Tunisie, qui bénéficient d’un statut de « partenaire avancé » ouvrant la voie à la possible constitution d’une zone de libre-échange approfondi et complet dans les années prochaines.



Le Partenariat oriental est une institution très jeune : imaginée par la Pologne, qui s’est ensuite fait l’avocate de l’initiative en compagnie de la Suède, elle n’a vu le jour qu’en 2009, sous présidence tchèque de l’Union européenne – la première à avoir été exercée par un pays d’Europe centrale issu de l’ancien bloc socialiste. Elle est axée sur trois priorités : accélérer l’association politique ; approfondir l’intégration économique ; organiser la mobilité des citoyens.

Quoi qu’il ne possède pas le statut d’organisation internationale, le Partenariat oriental s’est avéré dynamique, grâce, d’une part, au volontarisme marqué de la part de plusieurs des États y participant et, d’autre part, du leadership politique fort manifesté à son égard par le Service européen pour l’action extérieure.

Son fonctionnement est cependant handicapé par le fait que quatre de ses six pays sont amputés d’une partie de leur territoire à la suite d’opérations de séparatisme agressif et que deux d’entre eux, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, s’affrontent directement.

La Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine ont signé avec l’Union européenne, le 27 juin 2014, des accords d’association instituant des zones de libre-échange approfondi et complet. Pour ce qui concerne les deux premiers bénéficiaires, ils sont effectifs de manière provisoire depuis le 1er septembre 2014, en attendant leur ratification par tous les États membres. Pour ce qui concerne l’Ukraine, dans un souci d’apaisement avec la Russie, l’entrée en vigueur du texte, initialement prévue le 1er novembre 2014, a été repoussée au 1er janvier 2016 et des consultations trilatérales relatives à sa mise en œuvre ont été ouvertes.

La décennie qui s’est écoulée depuis la création de la Politique européenne de voisinage a été marquée par des bouleversements politiques profonds aux frontières méridionales et orientales de l’Union européenne, et la plupart des États y ont perdu en stabilité ; le mouvement centrifuge s’est même considérablement accéléré depuis 2011, année de sa première révision.

La Politique européenne de voisinage n’a pas toujours permis d’apporter des réponses adéquates à ces situations nouvelles ni à l’évolution des aspirations des partenaires de l’Union européenne. Dès lors, elle n’a pas non plus entièrement satisfait les intérêts européens, d’autant qu’elle n’est pas exempte de critiques : elle souffre d’un certain flou conceptuel, de la tension perpétuelle entre valeurs politiques et intérêts économiques, de la modestie des crédits au regard des enjeux, de lourdeurs bureaucratiques, mais aussi des différences de positionnement stratégique et des divergences politiques – voire des conflits – entre les seize pays partenaires.


Cet outil institutionnel constitue toutefois un vecteur permanent efficace pour faire avancer, à ses frontières, les valeurs politiques et économiques de l’Union européenne. C’est pourquoi la Commission européenne et le Service européen pour l’action extérieure ont décidé de la réviser et ont publié, à cet effet, un Livre vert ouvrant une consultation publique jusqu’au 30 juin 2015.

L’exercice a d’ores et déjà donné lieu à une multiplicité d’initiatives qui nourrissent la réflexion collective : trois groupes d’États membres de l’Union européenne ont communiqué des contributions écrites ; des réunions interparlementaires ont été organisées à ce sujet par la présidence lettone de l’Union européenne et par le Parlement européen ; celui-ci devrait adopter, début juin, un rapport d’initiative parlementaire ; les ministres des Affaires étrangères des pays de l’Union pour la Méditerranée se sont réunis à Barcelone le mois dernier ; un sommet du Partenariat oriental se tiendra à Riga dans quelques jours.

La commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale a souhaité, elle aussi, participer à la consultation publique. Sa contribution, qui prendra la forme d’une proposition de résolution européenne, a été préparée à la suite de deux initiatives : une table ronde avec des représentants des ambassades de sept pays participant à la Politique européenne de voisinage ; une série d’auditions menées à Bruxelles.

Elle propose donc que l’Assemblée nationale se prononce en faveur des orientations suivantes : conserver le périmètre actuel de la Politique européenne de voisinage ; ouvrir l’Europe sur les « voisins des voisins » ; distinguer clairement partenariat et élargissement ; maintenir la physionomie unitaire du dispositif ; adopter une approche pragmatique de la conditionnalité ; accentuer la différenciation politique pays par pays ; rendre les instruments de soutien financier un peu plus flexibles ; ne pas retoucher l’économie générale de l’Instrument européen de voisinage ; améliorer le taux d’exécution des crédits engagés ; revoir la procédure des plans d’action et des rapports annuels de suivi ; encourager l’appropriation par les partenaires ; recentrer sur des priorités plus restreintes ; renforcer le volet sécurité.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La Politique européenne de voisinage (PEV) s’appuie sur deux plateformes régionales structurant les partenaires de l’Union européenne à ses frontières méridionales et orientales, créées à peu près concomitamment et proposant des coopérations bilatérales et régionales :

– l’Union pour la Méditerranée (UpM) ;

– le Partenariat oriental.

Sans doute souffre-t-elle d’un certain flou conceptuel, de la tension perpétuelle entre valeurs politiques et intérêts économiques, de la modestie des crédits au regard des enjeux, de lourdeurs bureaucratiques, mais aussi des différences de positionnement stratégique et des divergences politiques – voire des conflits – entre les seize pays partenaires. Au final, après une décennie d’existence, elle ne s’est pas imposée comme antidote à la multiplicité de problèmes institutionnels, politiques, économiques, sociaux, environnementaux, migratoires et sécuritaires dont souffrent les pays de notre voisinage et dont l’Union européenne subit le contrecoup direct. Finalement, seuls quatre pays – la Géorgie, le Maroc, la Moldavie et la Tunisie – peuvent faire état de progrès notables pour atteindre les objectifs fixés par l’Union européenne, quand les autres ont stagné ou peu avancé, voire régressé pour certains d’entre eux.

Cet outil institutionnel constitue toutefois un vecteur permanent efficace pour faire avancer, à ses frontières, les valeurs politiques et économiques de l’Union européenne, selon la doctrine suivante : « plus que l’association, moins que l’adhésion ». Le processus contractuel auquel obéit la PEV, appuyé sur des groupes d’experts et des documents d’étape, incite les participants les plus demandeurs d’Europe à penser leurs politiques publiques en fonction d’objectifs communs.

Des résultats tangibles, dans de nombreux domaines, peuvent d’ailleurs être mis au crédit de cette politique. En voici quelques illustrations :

– sur la période 2007-2013, l’Union européenne a subventionné ses partenaires du voisinage à hauteur de plus de 12 milliards d’euros pour accompagner la mise en œuvre de la PEV ;

– en 2012, l’Union européenne a délivré 3,2 millions de visas Schengen aux ressortissants des seize pays partenaires ;

– en 2012, plus de 3 250 bourses européennes ont été octroyées à des étudiants et membres du personnel universitaire des pays de la PEV.

Surtout, sur le plan commercial, les flux d’échange totaux entre l’Union européenne et ses partenaires du voisinage ont dépassé les 250 milliards d’euros en 20142. L’Union européenne à vingt-huit est devenue le premier partenaire commercial de presque tous les pays partenaires de la PEV – à l’exception de la Biélorussie, de la Jordanie, du Liban et des Territoires palestiniens, pour lesquels elle arrive en deuxième position, sans oublier la Syrie, aujourd’hui coupée des circuits d’échanges mondiaux.

Le bilan commercial de la PEV reste cependant perfectible : si l’on considère l’ensemble du marché constitué par ses trente-quatre États actifs, 7 à 8 % seulement du volume des transactions s’effectue entre les Vingt-huit et leurs voisins et 2 à 3 % seulement entre les douze pays partenaires.

*

L’Union européenne ne saurait être tenue pour responsable ni des choix souverains de ses partenaires, ni de leurs difficultés domestiques, ni de l’action délétère d’acteurs extérieurs concurrents, qui entravent parfois les progrès de sa PEV. Quoi qu’il en soit, le contexte politique et économique actuel l’invite à revisiter la manière dont elle traite la question du voisinage.

La crise économique d’une ampleur inédite qu’elle traverse depuis 2008 réduit ses marges de manœuvre budgétaires et l’empêche de déployer une politique extérieure aussi dynamique qu’elle le souhaiterait, ce qui impacte au premier chef les relations avec les pays entrés dans des négociations d’adhésion comme ceux participant à la PEV. De leur côté, les pays du voisinage, pour la plupart confrontés à la problématique du développement et eux aussi frappés par la crise mondiale, évaluent les avantages à court terme et à long terme que leurs procurent leurs relations avec l’Union européenne dans le cadre de la PEV et les soupèsent en comparaison du coût politique et économique à payer pour intégrer les normes communautaires.

Or celui-ci peut leur paraître lourd à supporter, dès lors qu’aucune perspective d’adhésion tangible ne leur est offerte et que les aides financières dont ils bénéficient sont sans commune mesure avec celles versées aux nouveaux États membres et aux pays reconnus comme candidats à l’adhésion. L’Union européenne, qui prétend s’imposer dans le jeu politique régional et exporter son modèle démocratique et libre-échangiste, se voit parfois reprocher de ne pas se donner les moyens de ses ambitions.

Surtout, le paysage régional, au Sud de la Méditerranée et au Proche-Orient comme en Europe orientale et dans le Caucase Sud, a été sérieusement remodelé depuis la création de la PEV et même depuis sa première révision, en 2011 : à l’Est, le projet russe d’Union économique eurasiatique (UEEA) est présenté aux anciennes Républiques soviétiques aujourd’hui indépendantes comme une alternative à l’Union européenne ; au Sud, les printemps arabes ont libéré les énergies populaires, parfois positivement, en donnant la parole à la société civile dans sa diversité, mais souvent négativement, en encourageant la radicalisation de la jeunesse et en suscitant l’émergence de mouvements islamistes belliqueux.

*

Il en résulte deux phénomènes.

D’abord, plusieurs crises politiques ont débouché sur l’apparition ou l’aggravation de conflits violents à nos frontières, qui créent des zones de grande instabilité et sont source d’inquiétude pour l’Union européenne : l’accroissement des flux d’immigration clandestine remet en cause les règles de fonctionnement de l’espace Schengen et les États membres qui se trouvent en première ligne de par leur situation géographique appellent à un meilleur partage de la charge de l’accueil des migrants ; quant à l’apparition de nouvelles menaces sécuritaires plus ou moins conventionnelles, elle nécessite, d’une part, le rehaussement des mesures de protection des populations et, d’autre part, l’adoption de dispositions de réassurance de la part de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) pour garantir l’intégrité territoriale de tous les États membres.

Ensuite, les pays éligibles à la PEV ont divergé dans leur approche de la relation à établir avec l’Union européenne : certains partenaires ont choisi de s’engager résolument sur la voie d’une association privilégiée, tandis que d’autres préfèrent manifestement suivre d’autres orientations, sans pour autant toujours renoncer à tous les liens qu’ils ont déjà tissés.

Il n’en demeure pas moins que, comme pour toutes les politiques européennes, ce succès relatif et non abouti de la PEV doit être mesuré à l’aune de la situation dans laquelle nous nous trouverions aujourd’hui en son absence. Cette constatation justifie que l’Union européenne s’investisse pour penser une PEV renouvelée, adaptée au contexte géopolitique et répondant plus efficacement à l’enjeu identifié dès 2003 : constituer une zone de prospérité, de stabilité et de sécurité incluant l’Union européenne et les pays mitoyens.

I. LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE, UNE FORMULE INTERMÉDIAIRE ENTRE DÉVELOPPEMENT SÉPARÉ ET INTÉGRATION TOTALE, POUR PROMOUVOIR LA PAIX ET LA PROSPÉRITÉ AUX FRONTIÈRES DE L’UNION EUROPÉENNE

A. FONDEMENTS ET GRANDS PRINCIPES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE

1. Une base juridique confortée par le Traité de Lisbonne

La PEV a été mise en place en 20043, après la vague d’adhésions historique de dix pays centre-européens, baltes et méditerranéens, dans le cadre du cinquième et du sixième élargissements, le 13 mars 1998 et le 15 février 2000. Elle s’adresse aux États qui partagent une frontière terrestre ou maritime avec l’Union européenne mais ne possèdent pas le statut de candidat officiel ou de candidat potentiel à l’adhésion.

Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, la PEV reposait sur un ensemble d’accords conclus entre l’Union européenne et ses États membres d’une part, les pays voisins d’autre part, consécutivement à des décisions du Conseil adoptées à l’unanimité sur proposition de la Commission européenne et après avis conforme du Parlement européen.

Le Traité de Lisbonne a conforté la base juridique de la PEV. Depuis son entrée en vigueur, le 1er décembre 2009, elle a pour base juridique l’article 8 du Traité sur l’Union européenne (TUE), qui dispose en effet :

« 1. L’Union développe avec les pays de son voisinage des relations privilégiées, en vue d’établir un espace de prospérité et de bon voisinage, fondé sur les valeurs de l’Union et caractérisé par des relations étroites et pacifiques reposant sur la coopération.

« 2. Aux fins du paragraphe 1, l’Union peut conclure des accords spécifiques avec les pays concernés. Ces accords peuvent comporter des droits et obligations réciproques ainsi que la possibilité de conduire des actions en commun. Leur mise en œuvre fait l’objet d’une concertation périodique. »

La PEV s’inscrit dans le cadre plus large de l’action extérieure de l’Union européenne, qui obéit à des dispositions générales fixées aux articles 21 et 22 du TUE.

En vertu des articles 208 à 213 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), consacrés à la « coopération au développement » et à la « coopération économique, financière et techniques avec les pays tiers » autres que les pays en développement, la procédure législative ordinaire s’applique pour tous les aspects de la PEV. Il y est en outre spécifié que « les actions de l’Union et des États membres se complètent et se renforcent mutuellement ».

2. Quatre catégories d’objectifs et quatre cibles

La PEV a pour but d’encourager des relations plus étroites avec les pays limitrophes de l’Union européenne non engagés dans un processus de négociations d’adhésion et ainsi d’y promouvoir des réformes politiques et économiques de nature à enraciner la prospérité, la stabilité et la sécurité, dans l’intérêt mutuel des deux parties. Quelques années seulement après la fin de la Guerre froide, il s’agissait de repousser le spectre de l’apparition de nouvelles lignes de division aux marches de notre continent.

Elle implique un engagement mutuel en faveur de valeurs communes : démocratie, droits de l’homme, État de droit, bonne gouvernance, économie de marché et développement durable. Outre la mise en place d’accords de coopération politique, économique et commerciale, elle ouvre des perspectives d’association politique, d’intensification de l’intégration économique, d’amélioration de la mobilité et de renforcement des contacts entre les peuples.

Ses objectifs peuvent être classés en quatre catégories :

– raffermir les liens politiques ;

– aider à répondre aux critères politiques de l’Union européenne ;

– entamer une intégration économique partielle ;

– soutenir les réformes économiques, sociales et environnementales.

En outre, quatre cibles sont clairement identifiées :

– les personnes, à travers la promotion de l’emploi, de la cohésion sociale, du bien-être et de la mobilité ;

– la paix, par le biais des actions contre le terrorisme et en faveur du dialogue régional ;

– la démocratie, appuyée sur la consolidation de l’État de droit et le respect des droits humains ;

– le marché, grâce à l’approfondissement des réformes économiques structurelles et le développement des échanges commerciaux.

3. Un périmètre géographique bien circonscrit

La PEV se décompose en deux volets géographiques4 :

– au Sud, dix pays du Maghreb, du Machrek et du Proche-Orient appartenant à l’UpM, créée à Paris en juillet 2008 sur la base du Partenariat Euro-méditerranéen (EuroMed), en vert sur la carte de la page suivante :

• l’Algérie ;

• l’Égypte ;

• Israël ;

• la Jordanie ;

• le Liban ;

• la Libye ;

• le Maroc ;

• les Territoires palestiniens occupés ;

• la Syrie ;

• la Tunisie ;

– à l’Est, le Partenariat oriental, lancé à Prague en mai 2009, qui concerne six anciennes Républiques soviétiques, trois en Europe orientale, trois dans le Caucase Sud, en orange sur la carte de la page suivante :

• l’Arménie ;

• l’Azerbaïdjan ;

• la Biélorussie ;

• la Géorgie ;

• la Moldavie ;

• l’Ukraine.

La PEV s’adresse donc à près de 300 millions de personnes : quelque 220 millions au Sud et 75 millions à l’Est5.

Il convient d’emblée d’insister sur le fait que les pays avec lesquels des négociations d’adhésion ont été ouvertes – Albanie, Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), Monténégro, Serbie et Turquie, reconnus comme candidats officiels, ainsi que Bosnie-Herzégovine et Kosovo, reconnus comme candidats potentiels – sont exclus du champ de la PEV. Celle-ci doit donc être envisagée comme une politique intermédiaire entre développement séparé et intégration totale, destinée à promouvoir la paix et la prospérité aux frontières de l’Union européenne.

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Source : Parlement européen

B. MÉTHODE ET OUTILS INSTITUTIONNELS

1. Un process itératif fondé sur des actes bilatéraux

a. Accords bilatéraux

La PEV s’appuie sur les accords bilatéraux signés entre l’Union européenne et ses partenaires, qui sont de trois natures.

i. Les Accords euro-méditerranéens établissant une association

Entre 1998 et 2006, dans le cadre du partenariat dit « processus de Barcelone »6, l’Union européenne a conclu des accords euro-méditerranéens établissant une association (AEMEA) avec sept pays du sud de la Méditerranée, successivement :

– la Tunisie en 19987 ;

– le Maroc en 20008 ;

– Israël en 20009 ;

– la Jordanie en 200210 ;

– l’Égypte en 200411 ;

– l’Algérie en 200512 ;

– le Liban en 200613.

Un accord intérimaire a également été signé en 1997 avec l’Autorité palestinienne.

Les AEMEA fournissent un cadre approprié au dialogue politique Nord-Sud, servent de base à la libéralisation progressive des échanges dans l’espace méditerranéen et fixent les conditions de la coopération entre l’Union européenne et chaque pays partenaire dans les domaines économique, social et culturel. Ils se substituent aux accords dits « de première génération », à savoir les accords de coopération établis dans les années 1970.

Au-delà de leur nature bilatérale et des spécificités propres à chaque État partenaire, les AEMEA répondent à un schéma similaire. Ils ont pour but de promouvoir :

– le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux ;

– le dialogue régulier en matière politique et sécuritaire, afin de favoriser la compréhension mutuelle, la coopération et les initiatives communes ;

– la coopération économique, commerciale et financière, visant notamment la libéralisation progressive des échanges, le développement durable de la région et les investissements ;

– la coopération sociale, culturelle et en matière d’éducation, particulièrement à travers le dialogue interculturel, l’organisation d’une migration circulaire, le développement des qualifications, la promotion du droit du travail ou l’égalité hommes-femmes.

De plus, les accords encouragent la coopération intra-régionale des pays méditerranéens, en tant que facteur de paix, de stabilité, de développement économique et social.

Ils prévoient l’établissement progressif d’une zone de libre-échange en Méditerranée, dans le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Des structures institutionnelles sont établies dans le cadre de chaque AEMEA :

– un Conseil d’association, organisé au niveau ministériel, arrête les décisions et formule des recommandations pour la réalisation des objectifs fixés ;

– un Comité d’association assure la gestion de l’accord et le règlement des différends.

ii. Les Accords de partenariat et de coopération

À partir de 1997, l’Union européenne a conclu dix Accords de partenariat et de coopération (APC), avec cinq des six pays du Partenariat oriental – seule la Biélorussie n’en a pas souscrit –, mais aussi avec la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, l’Ouzbékistan et le Tadjikistan, dans l’optique de :

– consolider leur démocratie ;

– développer leur économie et accompagner leur transition vers l’économie de marché, grâce à la promotion des échanges et des investissements, ainsi qu’à une coopération dans un large éventail de domaines ;

– établir un dialogue politique.

Les APC ont été conclus pour une durée initiale de dix ans mais sont reconduits automatiquement d’année en année après cette période, sauf si l’une des parties s’y oppose.

Un Conseil de coopération a été constitué avec chacun des dix partenaires, afin de superviser la mise en œuvre des APC. Il se réunit au niveau ministériel une fois par an et est assisté par une commission parlementaire de coopération.

Lors de la mise en place de la PEV, les APC ont été identifiés comme le cadre de la mise en œuvre de la PEV avec les pays partenaires d’Europe orientale et du Caucase sud. Cinq accords avaient d’ores et déjà été signés :

– avec l’Ukraine en 199814 ;

– avec la Moldavie en 199815 ;

– avec l’Arménie en 199916 ;

– avec l’Azerbaïdjan en 199917 ;

– avec la Géorgie en 199918.

iii. Les Accords d’association créant une zone de libre-échange approfondi et complet

Le 27 juin 2014, l’Union européenne a signé trois Accords d’association (AA) d’un nouveau type avec la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine19, les trois pays qui, au sein du Partenariat oriental, manifestent l’intérêt le plus marqué vis-à-vis de l’Union européenne. Ils sont destinés à approfondir les relations politiques et économiques, en offrant aux signataires une perspective à long terme de plus grande association politique et intégration économique , il s’agit donc du modèle le plus abouti d’accord juridique de partenariat international proposé par l’Union européenne.

Ces accords, tout comme les AEMEA et les APC, tendent à diffuser les valeurs européennes chez nos voisins, afin de repousser les limites géographiques de l’aire de paix dans laquelle nous vivons :

– renforcement des institutions démocratiques, de la bonne gouvernance et de la primauté du droit ;

– avancement des réformes judiciaires ;

– lutte contre la corruption ;

– respect des droits humains et des libertés fondamentales ;

– soutien au développement économique et social durable ;

– protection de l’environnement et des consommateurs ;

– promotion de l’éducation, de la jeunesse et de la culture.

Même si, en une décennie, la sensibilisation constante sur ces sujets a eu des effets positifs, dans les esprits comme dans la pratique, nombre de nos partenaires de la PEV doivent encore accomplir de gros progrès pour se conformer aux standards communautaires.

Sur le plan commercial, chaque AA prévoit l’établissement d’une zone de libre-échange approfondi et complet (ZLEAC), qui constitue une nouvelle étape vers l’intégration des économies de nos voisins au marché intérieur : alors qu’une zone de libre-échange classique se contente d’ouvrir le marché en supprimant les droits de douane et les quotas, la ZLEAC traite également des questions de compétitivité et des mesures à prendre pour harmoniser les normes européennes et ainsi créer les conditions d’une concurrence équitable et optimale.

Le marché intérieur européen est déjà la plus grande aire commerciale intégrée au monde. L’insertion progressive des pays mitoyens aura pour effet de l’étendre encore et ainsi d’améliorer le degré de prospérité économique, dans l’Union européenne comme chez nos partenaires les plus proches. Ainsi, en plus de contribuer à la stabilisation et à la démocratisation de notre voisinage, les AA profiteront aux entreprises de l’Union européenne comme des cosignataires, en leur ouvrant de nouveaux marchés et en leur offrant un environnement commercial plus sûr lorsqu’elles investiront de l’autre côté de la frontière.

Les politiques de voisinage en direction de l’Est et du Sud ayant chacune leur origine historique, elles ont été instituées dans des cadres distincts ; c’est pourquoi les accords d’association de première génération – AEMEA et APC – ont des intitulés différents. Les AA, au contraire, sont ouverts aux partenaires de l’Est comme du Sud, ce qui traduit la volonté d’unification de la PEV, l’enjeu de la coopération y étant identique.

Si, pour l’instant, seuls des États du voisinage oriental en ont signé un, des négociations allant en ce sens ont été ouvertes avec le Maroc en 2013 et d’autres devraient l’être prochainement avec la Jordanie et la Tunisie20.

b. Plans d’action bilatéraux

Les pays souhaitant renforcer leurs relations avec l’Union européenne et se rapprocher des standards communautaires concluent à cet effet, pour une durée de trois à cinq ans, des plans d’action bilatéraux. Ces derniers, qui contribuent à répondre aux objectifs et dispositions des accords bilatéraux avec l’Union européenne, prévoient un programme de réformes politiques et économiques à moyen terme, assorti d’objectifs à court et moyen terme dans les domaines de l’intégration économique, de la circulation des personnes, de l’assistance financière et de la coopération technique. À ce jour, des plans d’action ont déjà été conclus avec douze pays.

La PEV n’est en revanche pas encore entièrement activée pour l’Algérie, pays pour lequel le plan d’action est en cours de négociation. La dérive autoritaire de la Biélorussie l’a de facto exclue du dispositif. Quant à la Libye et la Syrie, leur situation intérieure empêche évidemment toute coopération.

Les plans d’action signés depuis 2011, dits « de deuxième génération », reflètent les réorientations décidées lors de la première révision de la PEV21. En outre, les plans d’action comprenant aussi un volet de coopération en matière de Politique étrangère et de sécurité commune (PESC), ces documents mis à jour tiennent compte des développements politiques et économiques les plus récents. Cette catégorie de documents a permis de donner un nouveau souffle à la PEV et d’offrir des perspectives intéressantes aux pays les plus proactifs pour se rapprocher de l’Union européenne.

 

Plan d’action

(date de signature)

Commentaires

Algérie

 

Plan d’action en cours de négociation

Arménie

2006

Pays adhérent à l’Union économique eurasiatique

Azerbaïdjan

2006

 

Biélorussie

 

Pays adhérent à l’Union économique eurasiatique

Égypte

2007

Plan d’action caduque depuis le 6 mars 2015

Géorgie

2014

Agenda d’association, valable trois ans

Israël

2005

Plan d’action prolongé jusqu’à fin 2015

Jordanie

2011

Plan d’action de 2e génération, en vigueur jusqu’à fin 2016

Liban

2014

Plan d’action de 2e génération, en vigueur jusqu’à fin 2015

Libye

   

Maroc

2013

Plan d’action de 2e génération, en vigueur jusqu’à fin 2017

Moldavie

2014

Agenda d’association, valable trois ans

Territoires palestiniens occupés

2013

Plan d’action de 2e génération, en vigueur jusqu’à fin 2018

Syrie

   

Tunisie

2013

Plan d’action de 2e génération, en vigueur jusqu’à fin 2017

Ukraine

2014

Agenda d’association, valable trois ans

En outre, pour les trois pays du Partenariat oriental ayant souscrit un AA avec l’Union européenne, des agendas d’association, valables jusqu’à 2017, se sont substitués aux plans d’action classiques. Plus détaillés que ces derniers, ils servent à opérer un suivi des dispositions très avancées contenues dans les AA.

Le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et la Commission européenne publient annuellement, pour chaque pays partenaire, un rapport de suivi analysant les progrès déjà réalisés et décrivant les actions restant à mettre en œuvre afin de se conformer au plan d’action. Les évaluations et recommandations contenues dans ces rapports annuels fondent la politique de l’Union européenne en direction de chaque partenaire.

Ce processus itératif crée les conditions d’un suivi continu et effectif de la part des autorités communautaires, ce qui incite les États participants à implémenter progressivement l’acquis communautaire.

2. Vecteurs de coopération

a. Coopération sectorielle

Les autorités européennes veillent en particulier à une bonne coopération dans des secteurs spécifiques, afin d’améliorer sensiblement les conditions de vie quotidienne des citoyens.

Pour commencer, ces coopérations sectorielles mises en œuvre dans le cadre de la PEV tendent à favoriser le respect des droits humains, notamment des principes fondamentaux de dignité, d’égalité et de justice sociale et économique. Ces principes doivent être garantis par un État de droit et s’incarner dans un système juridique démocratique, doté de tribunaux indépendants, efficaces et accessibles, protégeant les citoyens contre l’arbitraire. La réforme judiciaire et la lutte contre la corruption constituent l’un des domaines de coopération prioritaires de la PEV.

La PEV relie les pays partenaires au marché intérieur de l’Union européenne et à son modèle économique et social. Il en résulte qu’ils doivent adopter des règles de base relatives à l’égalité des chances, à la participation économique et à la concurrence loyale, ce qui suppose des institutions bien gouvernées et l’accès aux services sociaux pour tous les citoyens. Ce volet de coopération inclut la promotion des normes de protection de l’environnement et des consommateurs, de sécurité alimentaire et de conditions de travail saines et sûres. Ainsi, la PEV crée des conditions propices à la croissance économique et à la création d’emplois.

En outre, la PEV connecte l’Union européenne avec ses voisins, à travers la facilitation des échanges commerciaux, la construction de réseaux d’énergie et de transport, ou encore l’essor du tourisme. Elle construit des ponts entre les peuples, facilite la mobilité et favorise la compréhension interculturelle. Elle accorde une attention particulière aux échanges pour les étudiants et les jeunes, dans le but de favoriser le développement du capital humain et d’une société forte, responsable et à haut niveau de qualification.

b. Coopération transfrontalière

Les Programmes de coopération transfrontalière (PCT), portés conjointement par la PEV et la politique régionale de l’Union européenne, ont pour objectif de renforcer la coopération entre les États membres et les pays partenaires le long des frontières extérieures de l’Union européenne. Ils visent à relever les défis communs inhérents à la gestion efficace des frontières et ainsi à promouvoir le développement économique et social des régions frontalières et à faciliter la coopération entre les peuples.

Dix-sept PCT sont opérationnels à ce jour :

– douze programmes terrestres, avec la Biélorussie, la Moldavie, la Russie et l’Ukraine ;

– cinq programmes marins, dont :

• un avec la Tunisie ;

• quatre de dimension régionale, autour de la mer Baltique, de la mer Noire, de la mer Méditerranée et de l’Atlantique centre.

c. Participation aux agences et aux programmes communautaires

La participation des partenaires de la PEV aux agences et programmes de l’Union européenne constitue un moyen de promouvoir les réformes et la modernisation dans notre voisinage tout en renforçant la convergence administrative et réglementaire.

i. Agences communautaires

Un programme interrégional financé dans le cadre de la PEV a pour objet d’inciter les pays voisins de l’Union européenne à participer au travail de ses agences. Ce programme d’une durée de deux ans – 2014-2016 –, adopté à la suite d’une communication de la Commission européenne22 et doté de 3,7 millions d’euros, comporte sept projets, visant huit agences :

– l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA23) ;

– le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC24) ;

– l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA25;

– l’Agence européenne pour l’environnement (EEA26) ;

– le Bureau européen d’appui pour l’asile (EASO27) et l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (FRONTEX) ;

– l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA28) ;

– l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA29).

ii. Programmes communautaires

La pleine participation d’un pays de la PEV aux nouveaux programmes communautaires adoptés parallèlement au cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2014-2020 exige, entre autres :

– la signature d’un protocole additionnel (FPP30) à l’AEMEA, à l’APC ou à l’AA qui le lie à l’Union européenne ;

– la conclusion d’un accord de participation définissant la cotisation annuelle et le calendrier de paiement.

Tous les pays du Partenariat oriental, à l’exception de la Biélorussie, ont signé un FPP. En ce qui concerne le voisinage Sud, Israël, la Jordanie, le Liban, le Maroc et la Tunisie en ont fait de même et une décision de principe allant dans ce sens a été prise avec l’Algérie fin 2014.

Ensuite, quand un pays souhaite rejoindre un programme communautaire spécifique et remplit les conditions établies dans son règlement, le service de la Commission européenne chargé de sa gestion mène les négociations bilatérales en vue de trouver un accord.

Le SEAE et la direction générale du développement et de la coopération de la Commission européenne ont organisé une réunion d’information, à Bruxelles, le 3 décembre 2013. Quelques jours avant l’entrée en vigueur du CFP 2014-2020, l’objet était de donner aux pays partenaires un aperçu du contenu des nouveaux programmes auxquels ils sont éligibles et de leur expliquer les conditions de participation.

Mais adhérer à un programme ne suffit pas, encore faut-il être en mesure d’y participer réellement et de contribuer à un processus de bénéfices réciproques, ce qui, pour certains pays dotés d’un appareil administratif, d’un système éducatif et d’un maillage industriel peu performants, constitue un fardeau trop lourd. La participation active au programme-cadre de recherche et d’innovation (PCRI) Horizon 2020, au programme pour la compétitivité des entreprises et des PME (COSME31) ou au programme Europe créative – en faveur du secteur culturel –, par exemple, n’est envisageable que pour une minorité de pays de la PEV, comme Israël et l’Ukraine.

iii. Programmes d’assistance technique

Enfin, les administrations publiques des pays partenaires de la PEV – au même titre que celles des pays candidats à l’adhésion – bénéficient de programmes d’assistance technique pour transposer et mettre en œuvre l’acquis communautaire, à travers deux outils.

Le programme Assistance technique et échange d’information (TAIEX32), à vocation de court terme, répond aux besoins spécifiques d’expertise sur la législation européenne exprimés par les administrations publiques des pays partenaires, grâce à des études sur mesure, dans les secteurs suivants :

– agriculture et sécurité alimentaire ;

– liberté, sécurité et justice ;

– environnement, énergie, transports et télécommunications ;

– marché intérieur.

Quant au programme Twinning33, il institue des jumelages dans la durée – de douze à trente-six mois – avec une administration publique d’un État membre ou des administrations publiques de plusieurs États membres, réunies sous forme de consortium. Pour chaque jumelage, un expert européen est détaché auprès de l’administration du pays bénéficiaire.

3. La réorientation stratégique de 2011

a. Quatre nouveaux axes d’action

En mai 2011, l’Union européenne a réaffirmé l’importance de ses relations de voisinage en s’engageant à renforcer son partenariat avec les pays éligibles à la PEV à travers une nouvelle approche34, portée par Mme Catherine Ashton et M. Štefan Füle, alors respectivement haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et commissaire chargé de l’élargissement et de la PEV. Cette approche, encore en vigueur aujourd’hui, est fondée sur quatre réorientations :

– une plus grande différenciation, pays par pays, des objectifs de coopération, notamment à travers les plans d’action nationaux, qui doivent dorénavant être plus ciblés sur les spécificités de chaque partenaire et adaptables, le cas échéant, à de nouvelles priorités financières ;

– l’accroissement de la conditionnalité de l’aide financière, désormais susceptible d’être revue à la hausse ou à la baisse en fonction des progrès accomplis en faveur de la démocratie et des droits de l’homme, concept résumé par l’expression « more for more », que l’on peut traduire par « donner davantage pour recevoir davantage » ;

– le soutien au développement d’une économie solidaire, favorable au commerce, aux investissements, à la réduction du chômage et au développement durable ;

– le renforcement des synergies régionales entre les partenaires, au sein du Partenariat oriental et de l’UpM, notamment dans les domaines du commerce, de l’énergie, des transports, des migrations et de la mobilité.

b. Soutenir la démocratie

La stratégie de 2011 a aussi créé de nouveaux outils financiers en faveur de la démocratie et des droits de l’homme :

– un fonds européen pour la démocratie, destiné aux partis politiques démocratiques représentatifs de la diversité d’opinion, aux organisations non gouvernementales et aux partenaires sociaux ;

– une facilité de soutien à la société civile, dont le rôle est essentiel dans toute société démocratique.

Au-delà de ces outils ciblés, l’établissement de démocraties solides et durables nécessite d’approfondir le partenariat en matière de coopération politique et de sécurité. Les partenaires doivent conduire un dialogue politique plus régulier au niveau bilatéral et au sein des instances régionales. La nouvelle stratégie de 2011 insiste sur la nécessité de consolider l’action conjointe au plan international.

c. Promouvoir une croissance durable et inclusive

Les pays partenaires sont de surcroît encouragés à adopter des politiques favorables à la croissance économique, à l’environnement des entreprises, aux investissements et à la réduction des écarts de développement régional.

La croissance économique doit profiter à la hausse des niveaux d’emploi et à l’inclusion sociale. La nouvelle stratégie de PEV prévoit ainsi la conduite d’un dialogue politique pour les réformes macroéconomiques, l’emploi et les affaires sociales. La Commission européenne suggère également de lancer des projets de développement agricole et rural permettant de lutter contre la pauvreté.

Enfin, la mise en place de zones de libre-échange doit être encouragée pour renforcer les liens commerciaux des partenaires et l’intégration régionale. L’Union européenne est le premier marché d’importation et d’exportation des partenaires de la PEV. Dans ce contexte, les pays qui ne souhaitent pas engager de négociation pour la libéralisation des échanges peuvent tout de même bénéficier de concessions commerciales et d’accords de reconnaissance mutuelle de conformité des produits industriels.

d. Approfondir certaines coopérations sectorielles

Certains domaines de coopération sectorielle doivent être approfondis, en particulier pour :

– la connaissance, la recherche et l’innovation, y compris à travers la mobilité des étudiants et des enseignants universitaires ;

– la participation des partenaires aux programmes et aux travaux des agences de l’Union européenne.

Les coopérations approfondies de ce type sont notamment axées sur la sécurité énergétique, la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement, les réseaux de transport et les technologies de communication.

Enfin, les partenaires dont les réformes sont les plus avancées peuvent entamer un processus d’assouplissement des régimes de visa.

C. DOTATIONS FINANCIÈRES

1. L’Instrument européen de voisinage et de partenariat (2007-2013)

Le 1er janvier 2007, un mécanisme unique de financement a été créé pour l’ensemble de la PEV35 : l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP), conçu pour favoriser le développement durable et l’alignement sur les normes et politiques européennes, en soutenant les priorités convenues dans les plans d’action PEV – ainsi que le partenariat stratégique avec la Russie.

L’IEVP s’est substitué à plusieurs dispositifs :

– les Mesures d’ajustement (MEDA) de l’ancien Partenariat Euro-Med, préfiguration de l’UpM ;

– l’Assistance technique à la Communauté des États indépendants (TACIS36), programme en faveur des voisins post-soviétiques ;

– d’autres mécanismes financiers secondaires.

Pour la période budgétaire 2007-2013, le financement communautaire mis à disposition des partenaires de la PEV afin de soutenir leurs réformes s’est élevé à 13,4 milliards d’euros en crédits d’engagement, dont 95 % ont porté sur les programmes nationaux et multinationaux, et 5 % sur les programmes de coopération transfrontalière, soit une augmentation de 75 % en valeur réelle par rapport à la période septennale de programmation précédente 2000-2006. Un aperçu des montants alloués pays par pays est présenté en page suivante.

La révision de 2011 de la PEV a eu pour conséquence financière l’application du principe « more for more » à toutes les incitations proposées par l’Union européenne pour accompagner l’évolution des politiques – à l’exclusion de l’aide humanitaire et du soutien à la société civile.

Dans ce contexte, la Commission européenne a mis sur pied deux programmes spécifiques en faveur des seuls voisins prenant des mesures claires et concrètes de réforme politique :

– Intégration et coopération du Partenariat oriental (EAPIC37) en direction des pays orientaux ;

– Soutien au partenariat, aux réformes et à la croissance inclusive (SPRING38) en direction des pays méridionaux.

Aperçu des montants alloués aux partenaires de la PEV
dans le cadre de l’IEVP (2007-2013)

(en millions d’euros)

:\Gilles VEYRADIER\DIVERS\Demandes diverses\DAC\Aperçu financier de l’IEVP 2007-2013 Tableau ANNEX 1 p73.png

Source : Commission européenne

Subventions allouées par l’Union européenne
à ses partenaires de la PEV
dans le cadre de l’IEV
en 2014

(en millions d’euros)

PAYS/PROGRAMMES

Crédits d’engagement

Crédits
de paiement

Pays méditerranéens

   

Algérie

26,3

33,0

Égypte

115,0

91,1

Israël

4,4

Jordanie

174,5

56,3

Liban

146,1

78,2

Libye

8,0

11,0

Maroc

218,0

76,2

Territoires palestiniens

309,5

303,7

Syrie

61,3

2,0

Tunisie

169,0

178,5

Sous-total programmes bilatéraux

1 227,7

834,5

Programmes régionaux

229,1

92,8

Total pays méditerranéens

1 456,8

927,3

     

Partenariat oriental

   

Arménie

34,0

23,2

Azerbaïdjan

21,0

6,8

Biélorussie

19,0

22,3

Géorgie

131,0

41,1

Moldavie

131,0

93,7

Ukraine

242,0

314,1

Sous-total programmes bilatéraux

578,0

501,1

Programmes régionaux

152,4

47,0

Total Partenariat oriental

730,4

548,1

     

Coopération transfrontalière

6,9

113,0

     

Erasmus +

102,9

99,9

     

TOTAL GÉNÉRAL IEV

2 297,0

1 623,7

Source : Commission européenne

2. L’Instrument européen de voisinage (2014-2020)

L’IEVP est remplacé, depuis le 1er janvier 2014, par l’Instrument européen de voisinage39 (IEV), qui s’intègre dans le paquet de programmation budgétaire du CFP 2014-2020. Pour le septennat 2014-2020, l’IEV se voit doté d’un budget de 15,4 milliards d’euros, soit 1,5 % du plafond des dépenses cumulées de l’Union européenne – sachant que les crédits finançant l’ensemble des actions qu’elle conduit en tant qu’« acteur global » sont limités à 6 % de ce total.

L’IEV a été conçu comme le prolongement du dispositif précédent puisqu’il constitue toujours le vecteur de l’essentiel du financement accordé aux pays mitoyens dans le cadre de la PEV, surtout par le biais de programmes de coopération bilatéraux, régionaux et transfrontaliers. Toujours destiné à promouvoir les réformes politiques, économiques et sociales, et à encourager l’harmonisation des politiques et l’intégration des normes européennes, il prend également en considération le soutien à la croissance durable et inclusive, ainsi que l’avancement sur la voie de la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

En 2014, au titre de l’IEV, 2,3 milliards d’euros de crédits ont été engagés et 1,6 milliard d’euros ont été versés, selon la répartition figurant en page précédente.

L’IEV se caractérise en outre par plusieurs évolutions sensibles.

a. « More for more »

Premièrement, l’application du principe « more for more », c’est-à-dire d’une certaine différenciation, permet à l’Union européenne d’accroître, à la marge, son soutien en faveur de ceux qui, parmi les seize partenaires de la PEV, mettent en œuvre un réel processus de démocratisation, dans deux directions :

– engagement vis-à-vis des valeurs universelles des droits de l’homme ;

– progrès dans la transition démocratique.

Sur le total de l’enveloppe de l’IEV, 90 % sont versés selon les besoins des partenaires et les intérêts de l’Union européenne et 10 % obéissent au principe « more for more ». Cette seconde fraction est répartie par la Commission européenne en fonction des progrès identifiés pour chaque pays partenaire dans le rapport de suivi annuel le concernant.

b. Simplification

Deuxièmement, la complexité et la lenteur du processus de programmation sont réduites.

c. Meilleur ciblage du champ d’application

Troisièmement, le champ d’application de l’instrument est mieux ciblé : la coopération est concentrée sur des objectifs stratégiques clés, établis dans les plans d’action de la PEV, en concertation avec les partenaires, le but étant d’améliorer la pertinence et l’efficacité du soutien de l’Union européenne. Ces objectifs incluent :

– la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

– l’action en faveur d’une croissance forte et inclusive ;

– le soutien à l’intégration économique progressive dans le marché unique ;

– les efforts pour instaurer un climat de confiance et d’autres mesures contribuant à la sécurité ainsi qu’à la prévention et à la résolution des conflits ;

– le renforcement des contacts interpersonnels ;

– l’approfondissement de la coopération sectorielle, par exemple dans les domaines de l’énergie et du changement climatique ;

– le soutien aux organisations de la société civile.

d. Réaménagement des Programmes de coopération transfrontalière

Quatrièmement, les dispositions des PCT sont modifiées, afin, là aussi, de les rendre plus efficaces et de les mettre en œuvre plus rapidement.

e. Meilleure incitation à la participation aux programmes européens

Cinquièmement, des mécanismes sont créés pour mieux mettre en commun les fonds des instruments internes et externes du budget de l’Union européenne. Les pays partenaires et leurs citoyens peuvent ainsi participer davantage à des programmes communautaires, dans les domaines de :

– la mobilité des étudiants ;

– la jeunesse ;

– le soutien à la société civile.

3. Les financements connexes

En plus de l’IEV, les pays de son voisinage continuent de bénéficier d’une gamme d’autres instruments et programmes de l’Union européenne. Les plus important d’entre eux sont des programmes mondiaux ou thématiques mis en œuvre au titre de l’Instrument de coopération au développement (ICP), de l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH) et de l’Instrument de stabilité (IdS). Les pays du voisinage peuvent également bénéficier d’interventions au titre de la PESC et de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC).

Le subventionnement apporté par la Commission européenne s’accompagne en outre de soutiens financiers, sous forme de prêts, de la part de la Banque européenne d’investissement (BEI) et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). La nouvelle stratégie de la PEV adoptée en 2011 préconise au demeurant l’augmentation de ces possibilités de crédit et insiste sur la nécessité de les mettre en synergie afin de financer des opérations lourdes comme de grands projets d’infrastructure ou d’interconnexion.

Les projets financés par les banques internationales sont éligibles à des prêts supplémentaires de la Commission européenne, versés dans le cadre de la Facilité d’investissement pour le voisinage (FIV). Le 24 avril 2015, la Commission européenne a décidé d’augmenter de 295 millions d’euros sa dotation à la FIV au titre de l’exercice 2015, la portant à plus de 3 milliards d’euros.

II. LES SEIZE PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE : UNE VOCATION COMMUNE À SE RAPPROCHER DE L’UNION EUROPÉENNE MAIS DES DISPARITÉS IMPOSANT DES APPROCHES VARIÉES ET DES RYTHMES DIFFÉRENCIÉS

A. L’AFRIQUE DU NORD ET LE PROCHE-ORIENT

Le partenariat EuroMed, dit « processus de Barcelone », a été lancé lors de la conférence ministérielle euro-méditerranéenne des 27 et 28 novembre 1995, qui a réuni l’Union européenne et dix de ses voisins du Sud de la Méditerranée – Algérie, Autorité palestinienne, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie et Turquie –, plus la Libye et l’Irak, au titre d’observateurs. Fondé sur les principes de réciprocité, de solidarité et de codéveloppement, il a jeté les bases d’une nouvelle forme de coopération régionale, visant à promouvoir la paix, la stabilité et la croissance dans les pays partenaires.

La coopération a ainsi été renforcée dans trois domaines stratégiques :

– le dialogue politique et de sécurité ;

– le partenariat économique et financier ;

– le partenariat social, culturel et humain.

Le 13 juillet 2008, durant la présidence française de l’Union européenne, ce Partenariat a été renouvelé et rebaptisé « Union pour la Méditerranée », sur la base d’une communication de la Commission européenne40.

Fruit du volontarisme politique de la France, il bénéficie alors d’un nouvel élan grâce à l’intégration de l’ensemble des quarante-trois États de la zone méditerranéenne – plus la Libye, toujours sous le statut d’observatrice –, qui en font une véritable organisation internationale à vocation régionale, et à la création de projets stratégiques concrets. Outre les Vingt-huit et les pays participant à la PEV, y siègent également quatre candidats à l’adhésion – l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et la Turquie – ainsi que Monaco et la Mauritanie.

Le partenariat est approfondi dans un souci d’équilibre et de co-appropriation, grâce à :

– des sommets bisannuels des chefs d’État et de gouvernement ;

– une coprésidence, assurée par un représentant de l’Union européenne et d’un pays membre méditerranéen ;

– un Comité permanent conjoint pour la gouvernance institutionnelle, constitué de représentants des États membres de l’Union européenne, des partenaires méditerranéens et de la Commission européenne ;

– un secrétariat paritaire, composé de fonctionnaires détachés, chargés de l’identification, de l’examen et du suivi des projets ;

– une Assemblée parlementaire (AP-UpM), cadre de dialogue parlementaire et instance consultative sur la mise en œuvre du partenariat41, au sein de laquelle siègent :

• 49 membres du Parlement européen ;

• 83 parlementaires nationaux des États membres de l’Union européenne ;

• 148 parlementaires nationaux des quinze autres pays.

En 2014, l’UpM a labellisé cinq projets supplémentaires, portant leur nombre total à vingt-neuf, dans six domaines prioritaires :

– développement des entreprises ;

– transports et développement urbain ;

– énergie, avec notamment le Plan solaire méditerranéen (PSM) ;

– eau et environnement, avec en particulier le programme Gouvernance et financement du secteur de l’eau en Méditerranée et la construction d’une usine de dessalement d’eau de mer pour la bande de Gaza ;

– enseignement supérieur et recherche, avec l’Université euro-méditerranéenne de Fès et des programmes de développement des échanges de niveau master et doctorat ;

– affaires civiles et sociales.

Ne participent à la PEV que les dix pays du pourtour méditerranéen de l’UpM non reconnus comme candidats à l’adhésion à l’Union européenne, c’est-à-dire neuf pays arabes plus Israël. Cette coexistence a été conçue par l’Union européenne comme un moyen de peser pour avancer vers une résolution du conflit israélo-palestinien, longtemps le principal point noir sécuritaire de la région. La détérioration de la situation au Sahel, en Libye et en Syrie a considérablement compliqué la donne en Méditerranée et au Proche-Orient, et justifie plus que jamais que l’Union européenne y déploie sa PEV.

1. Algérie

a. Profil

Avec près de 37,9 millions d’habitants, l’Algérie est le troisième pays le plus peuplé du voisinage. En 2014, la croissance a atteint 4 % et le PIB par habitant s’est établi à 4 094 euros. L’indice de développement humain (IDH), de 0,717, témoigne d’un degré de développement moyen.

La production d’énergies fossiles occupe une place centrale dans l’économie nationale, cette faible diversification expliquant l’important taux de chômage structurel, qui frôle les 10 %.

La richesse de l’Algérie en hydrocarbures explique aussi l’excédent commercial de 6 milliards d’euros avec l’Union européenne, le pays étant l’un de nos principaux fournisseurs de gaz. Au total, parmi les seize bénéficiaires de la PEV, l’Algérie s’impose comme le premier partenaire commercial de l’Union européenne. Réciproquement, l’Union européenne est le premier partenaire commercial du pays : elle capte plus de la moitié de ses transactions extérieures, du côté des exportations comme des importations.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Nonobstant l’ampleur de ces relations commerciales, sa position de producteur d’énergie fossile a toujours conduit l’Algérie à se montrer réticente vis-à-vis d’un rapprochement significatif avec l’Union européenne. C’est pourquoi elle demeure, avec la Libye et la Syrie, le dernier voisin méditerranéen à ne pas faire l’objet d’un plan d’action bilatéral dans le cadre de la PEV : la relation entre les deux parties reste régie par l’AEMEA souscrit en 2005, seulement complété par une feuille de route, approuvée en 2008.

Ce document consiste en un paquet d’actions bilatérales dans des secteurs d’intérêt commun, visant à exploiter le potentiel de l’AEMEA, en particulier sur les questions migratoires, énergétiques et commerciales.

L’Union européenne et l’Algérie entretiennent en outre des relations en ce qui concerne la diversification de l’économie, le changement climatique, auquel le pays est très vulnérable, et surtout la sécurité dans le Sahel et la lutte contre le terrorisme en général, problématique sur laquelle il se situe en première ligne.

Même si la relation entre les deux parties n’est que faiblement institutionnalisée, l’adoption de la feuille de route de 2008 a marqué la volonté des autorités algériennes de la développer davantage. À cet effet, des pourparlers en vue de l’élaboration d’un plan d’action ont été engagés avec l’Union européenne en 2012 et les négociations formelles ont débuté en 2013. L’adoption d’un plan d’action permettrait d’effectuer un suivi détaillé des progrès réalisés par l’Algérie mais le pays exclut toute signature d’un document de ce type avant que la révision de la PEV ne devienne effective, estimant que le système actuel n’autorise pas des discussions d’égal à égal.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’IEV, la contribution financière de l’Union européenne doit se concentrer, pour la période 2014-2017, sur les domaines suivants :

– la réforme de la justice et le renforcement de la participation citoyenne à la vie publique ;

– la réforme du marché du travail et la création d’emplois ;

– le soutien à la gestion et la diversification de l’économie.

Au cours de cette période quadriennale, l’enveloppe des crédits à engager est plafonnée à 148 millions d’euros. En 2014, un total de 33 millions a été versé, au titre de la coopération bilatérale et des programmes de coopération régionaux, un peu plus que les 26,3 millions engagés.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Faute de plan d’action bilatéral, il n’existe pas de procédure de suivi annuel de la part de la Commission européenne et du SEAE.

2. Égypte

a. Profil

Avec une population de près de 86,8 millions d’habitants, l’Égypte est, de loin, le pays le plus peuplé du voisinage. Il est aussi le quatrième plus pauvre, puisque son PIB par habitant n’est que de 2 503 euros. La croissance économique – 2,2 % en 2014 – s’avère insuffisante au vu de la croissance démographique. Le pays connait de ce fait un chômage important, de l’ordre de 13,4 % de la population active, avec un pic de 34,2 % parmi les 15-24 ans. Avec un IDH de 0,682, il se situe dans la catégorie intermédiaire en termes de développement humain.

L’Égypte entretient des liens étroits avec l’Union européenne, qui est son premier partenaire commercial. Le pays joue un rôle de première importance en matière de politique étrangère dans la région : il est régulièrement amené, en particulier, à intervenir comme médiateur dans le conflit israélo-palestinien et est activement engagé dans la lutte contre le terrorisme.

L’incertitude politique consécutive au printemps arabe de 2011 et au changement de régime qui s’en est suivi a eu pour conséquence la suspension du dialogue formel institué dans le cadre de la PEV. Le retour à la stabilité, sous l’autorité du général Abdel Fattah al-Sissi, tend toutefois à redonner à l’Égypte son statut d’acteur régional majeur.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Les relations bilatérales sont régies par l’AEMEA, entré en vigueur en 2004, et par un plan d’action, adopté en 2007. Ce dernier, qui devait initialement expirer en 2012, a été prolongé tel quel jusqu’en mars 2015 en raison de la situation politique du pays, mais il est désormais bien caduque. Il englobe les domaines politique, économique, commercial, scientifique, technologique, culturel et sécuritaire. Sa mise en œuvre se fonde sur des programmations annuelles, destinées à identifier au mieux les besoins du pays, spécialement dans le contexte de transition qu’il connait.

L’Union européenne apporte par ailleurs un soutien financier d’urgence en raison de la présence de réfugiés syriens sur le territoire égyptien.

Avec l’Égypte, pays lui aussi réticent à l’exercice de suivi itératif imposé par les plans d’action mais crucial pour l’équilibre régional, il est dans l’intérêt de l’Union européenne de trouver un mode de dialogue adapté, tout en continuant de promouvoir les droits de l’homme.

c. Actions à conduire en priorité

Pour la période 2014-2015, les deux partenaires ont identifié trois thématiques sur lesquelles doivent se concentrer en priorité les actions du gouvernement égyptien ainsi que la contribution financière accordée dans le cadre de l’IEV.

La première est relative à la lutte contre la pauvreté, au développement socioéconomique et à la protection sociale. Les objectifs sont :

– de soutenir la croissance économique inclusive en améliorant la fourniture des services de base comme l’éducation ;

– de favoriser la création d’emplois en mettant l’accent sur les jeunes, les femmes et en valorisant l’esprit d’entreprise ;

– d’améliorer les systèmes et les instruments de protection sociale.

La seconde concerne la gouvernance, la transparence et l’environnement des entreprises. Cette priorité vise principalement à renforcer l’accès aux services publics, à accentuer la lutte contre la corruption et à améliorer le cadre règlementaire relatif à l’exercice des activités commerciales et à la réalisation des investissements.

La troisième, qui concerne la qualité de vie et l’environnement, tend à améliorer les conditions d’hygiène, notamment à travers l’optimisation de la gestion des eaux usées et le développement de la fourniture d’énergie propre.

Pour la période bisannuelle en cours, l’allocation financière de l’Union européenne a été fixée dans une fourchette de 210 à 257 millions d’euros. En 2014, 91,1 millions ont été payés, auxquels s’ajoutent 1,5 million d’euros versés par l’intermédiaire de l’IEDDH.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Dans l’ensemble, l’année 2014 n’a pas été marquée par des avancées significatives dans la mise en œuvre du plan d’action. Le rapport de suivi42 souligne la nécessité d’œuvrer davantage en faveur de la démocratie, des libertés fondamentales – notamment la liberté de la presse et la liberté d’association – et des marges d’action de la société civile. Il déplore le recours massif par la justice à la condamnation à mort, sentence qui a frappé pas moins de 1 200 personnes en mars et avril 2014.

L’Égypte est toujours dans une phase de transition délicate, après l’approbation de la nouvelle Constitution en mars 2014 et l’élection du nouveau Président en mai 2014 ; le Parlement n’a ainsi pas encore été renouvelé, le scrutin prévu en mars 2015 ayant été reporté. Les autorités doivent par ailleurs faire face à la présence de groupes islamistes armés, qui attaquent régulièrement les forces de sécurité, ainsi qu’à l’effondrement de la Libye voisine et à l’afflux de migrants qui en découle.

L’Égypte reste un partenaire stratégique de l’Union européenne dans sa volonté de paix et de prospérité, en particulier pour établir un cessez-le-feu à Gaza. Dans ce contexte, la reprise du dialogue entre les deux partenaires, intervenue en février et décembre 2014, qui s’est conclue par un accord pour relancer progressivement leur coopération dans le cadre de l’AEMEA, ne peut qu’être saluée.

3. Israël

a. Profil

Israël, dont la population atteint 8,1 millions d’habitants, est de loin le pays le plus développé de la PEV : avec un IDH de 0,888 et un PIB par habitant de 28 507 euros, il se situe dans les standards européens. En 2014, le pays a bénéficié d’une croissance d’environ 2,7 %. Le taux de chômage y est maintenu à 5,7 %, dans un contexte régional difficile.

La relation entre l’Union européenne et Israël est donc de facto d’un autre ordre que celle entretenue avec ses autres partenaires de la PEV. Elle est en outre marquée par la persistance du conflit israélo-palestinien et les problèmes sécuritaires de la région.

Parmi les pays de la PEV, Israël est le troisième partenaire commercial de l’Union européenne, qui s’impose comme son premier fournisseur et dégage un solde bilatéral excédentaire de l’ordre de 4 milliards d’euros.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Les relations bilatérales, ouvertes en 1975, sont aujourd’hui régies par l’AEMEA, entré en vigueur le 1er juin 2000, auquel est jointe une déclaration relative à la lutte contre la xénophobie, l’antisémitisme et le racisme. Dans le cadre de la PEV, Israël fut l’un des premier pays à adopter un plan d’action : adopté en 2005 pour trois ans, il n’a pas été mis à jour depuis lors et a fait l’objet d’une prolongation, valable jusqu’à décembre 2015.

En complément de l’AEMEA, les deux parties ont signé plusieurs accords sectoriels, associant Israël au marché intérieur, qui portent sur :

– la coopération scientifique et technique ;

– l’agriculture ;

– les produits industriels ;

– les bonnes pratiques de laboratoire ;

– les télécommunications ;

– l’aviation.

Israël participe en outre activement à des programmes scientifiques européens comme Horizon 2020 ou, dans le domaine satellitaire, Galileo.

Dans les années 2000, des processus de dialogue spécifiques ont aussi été instaurés en matière de terrorisme et de lutte contre le racisme.

Israël, évidemment très soucieux de la stabilité dans la région, manifeste des attentes fortes vis-à-vis de l’Union européenne, qui fait partie, avec les États-Unis, la Russie et les Nations unies, du quartet international chargé de la médiation avec l’Autorité palestinienne. L’Union européenne dispose également d’un représentant spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, poste occupé par M. Fernando Gentilini depuis le 15 avril 2015.

Toutefois, le 29 mars 2015, dans le cadre du processus de consultation sur la révision de la PEV43, le ministre des Affaires étrangères israélien, M. Avigdor Liberman, a adressé un courrier à la haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini, et au commissaire chargé de la PEV et des négociations d’adhésion, M. Johannes Hahn, dans lequel il regrette que le plan d’action, vieux d’un peu plus de dix ans, ne puisse toujours pas être mis à jour, à cause de l’approche européenne conditionnant le dynamisme des relations bilatérales à l’avancée du processus de paix.

Dans un souci de réciprocité, Israël se propose notamment de partager davantage son savoir-faire en matière de technologies ou d’entreprenariat ainsi que son expérience dans les domaines de l’éducation et de la culture. Lors de la table ronde organisée par les rapporteurs pour recueillir le retour d’expérience des États participant à la PEV44, le ministre plénipotentiaire de l’ambassade d’Israël a souligné l’intérêt de son pays envers « une coopération fondée sur des contributions mutuelles afin d’améliorer les résultats de la PEV ».

c. Actions à conduire en priorité

De fait, en dépit de son cadre institutionnel développé, la relation entre l’Union européenne et Israël est donc paralysée par l’absence d’avancées concernant le règlement du conflit avec la Palestine et la poursuite de l’occupation de territoires palestiniens.

Faute de programmation annuelle ou pluriannuelle dans le cadre de l’IEV, la contribution financière de l’Union européenne est donc quasi nulle : 4,4 millions d’euros en 2014, au titre de l’IEDDH, du Programme de partenariat pour la paix (PPP) et de Twinning.

Dans la même logique, le Conseil d’association et le Comité d’association ne se sont plus réunis depuis 2012, empêchant l’identification des secteurs d’action prioritaires.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Les rapports de suivi se réduisent dès lors à une description de l’état de la démocratie et du respect des droits de l’homme au sein des territoires occupés et vis-à-vis des Palestiniens.

L’année 2014 a été marquée par l’opération « Bordure protectrice », lancée en juillet, qui a fait 72 victimes côté israélien, dont 6 civils, et plus de 2 100 côté palestinien, dont près de 70 % de civils. Si l’Union européenne reconnait à Israël le droit de se défendre, le rapport de suivi45 fait état de préoccupations quant à la situation des droits de l’homme dans les territoires occupés.

L’année écoulée offre ainsi peu de perspectives de résolution du conflit et de coexistence entre deux États. La nouvelle haute représentante a toutefois manifesté son intérêt pour la question en réservant sa première visite officielle à un déplacement en Israël et dans les Territoires palestiniens, afin de rencontrer des responsables des deux camps. Un regain de volontarisme de l’Union européenne est donc espéré.

4. Jordanie

a. Profil

Le Royaume de Jordanie est peuplé de 6,7 millions de personnes. Le PIB par habitant y atteint 4 520 euros et la croissance est stable, autour de 3 % par an. Le chômage est cependant élevé puisqu’il touche 12,6 % de la population active ; il est préoccupant surtout pour la tranche d’âge des 15-24 ans, avec un taux de 34,1 %. Fort d’un IDH de 0,745, le pays affiche toutefois un niveau de développement humain relativement élevé.

La persistance du conflit israélo-palestinien amène depuis longtemps la Jordanie à accueillir un grand nombre de réfugiés palestiniens, auxquels s’ajoutent désormais les réfugiés syriens, dont le nombre est estimé à plus de 600 000. Le pays subit le contrecoup des conflits en Syrie et en Irak, avec un risque de déstabilisation et des conséquences économiques, commerciales et énergétiques lourdes.

Les relations commerciales – surtout les importations européennes – restent modestes mais l’Union européenne est tout de même le second partenaire de la Jordanie.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Dans ce contexte régional extrêmement instable et difficile, le développement d’une Jordanie démocratique, pacifique, stable et prospère revêt pour l’Union européenne un intérêt majeur, d’autant que le pays, qui a lancé des réformes internes au moment des printemps arabes, est aussi engagé pleinement dans la lutte contre le terrorisme et l’islamisme radical, notamment en participant à la coalition internationale contre Daesh.

La relation entre l’Union européenne et la Jordanie est régie par un AEMEA, entré en vigueur en mai 2002. La Jordanie s’est en outre vue accorder, en 2010, un statut de « partenaire avancé ». C’est sur ces fondements que les deux parties ont adopté un plan d’action de deuxième génération, en 2011, pour une période de cinq ans. De plus, l’établissement d’une ZLEAC est actuellement en préparation.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de l’IEV, il a été décidé que, pour la période 2014-2017, le financement de la coopération bilatérale se concentrerait sur les domaines suivants :

– renforcement de l’État de droit ;

– emploi et développement du secteur privé ;

– énergies renouvelables et efficacité énergétique.

La contribution financière indicative de l’Union européenne pour cette période de quatre ans doit être comprise entre 312 et 382 millions d’euros ; 56,3 millions d’euros ont d’ores et déjà été attribués en 2014, comprenant une allocation au titre du principe « more for more ».

En addition des fonds alloués au titre de l’IEV, l’Union européenne a aussi adopté des mesures d’assistance macro-financière en 2014, pour un montant de 180 millions d’euros, sous forme de prêts et de bourses.

Par ailleurs, elle verse une aide humanitaire complémentaire, destinée à aider la Jordanie à faire face à l’afflux de réfugiés en provenance de Syrie : 320 millions d’euros ont été alloués à ce titre depuis le début du conflit syrien, dont 70 millions en 2014.

Enfin, la Jordanie bénéficie de financements au moyen de l’IEDDH et de l’IdS.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

La Jordanie réalise des progrès significatifs dans la mise en œuvre de son plan d’action. Le rapport de suivi pour l’année 201446 fait ainsi état de progrès continus en matière de renforcement de la démocratie, avec par exemple la mise en place d’un nouveau cadre légal concernant les partis politiques et le renforcement de l’impartialité du système judiciaire.

Le pays obtient cependant des résultats mitigés concernant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le rapport annuel de suivi constate en effet le peu de changements en termes de liberté de la presse et de liberté d’association. Il déplore par ailleurs la levée du moratoire sur la peine de mort, intervenue en décembre.

L’année 2014 a aussi été marquée par des avancées concernant la relation bilatérale entre l’Union européenne et la Jordanie. Lors du dernier Conseil d’association, le 9 octobre 2014, les deux parties ont signé un partenariat pour la mobilité et se sont entendues à propos de la mise en place d’un dialogue concernant le futur de la relation bilatérale et l’établissement de priorités dans la perspective d’un nouveau plan d’action.

5. Liban

a. Profil

Le Liban, pays frontalier de la Syrie et d’Israël, compte 3,8 millions de d’habitants ; il est donc le troisième plus petit pays de la PEV sur le plan démographique. Le PIB par habitant s’est établi, en 2014, à 7 917 euros – c’est donc le deuxième plus élevé des pays partenaires de la PEV – et la croissance a atteint 1,8 %, un taux bien inférieur à ceux d’avant 2011, le pays subissant lui aussi le contrecoup du conflit syrien. En termes de développement humain, un indice de 0,765 le place dans la moyenne haute des pays de la PEV.

Les relations commerciales bilatérales sont modestes et déséquilibrées : le Liban exporte très peu vers l’Union européenne et affiche une balance commerciale déficitaire de plus de 6 milliards d’euros. L’Union européenne a longtemps été le premier partenaire commercial du pays mais a été détrôné, au premier trimestre 2014, par le Brésil.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Davantage qu’économique, l’enjeu d’une coopération avec le Liban, pour l’Union européenne, est avant tout politique et sécuritaire. En effet, le pays, situé dans une zone géographique explosive, est aussi une véritable mosaïque confessionnelle, avec au total dix-huit communautés religieuse reconnues. Il est ainsi en proie à un risque constant de déstabilisation politique, que vient renforcer aujourd’hui le conflit syrien, en exacerbant la polarisation de la scène politique libanaise et en provoquant un afflux massif de réfugiés venant s’ajouter aux réfugiés palestiniens déjà présents sur le territoire. L’objectif pour l’Union européenne est donc de parvenir à soutenir le pays dans une démarche de stabilisation politique et de développement.

Le partenariat entre l’Union européenne et le Liban remonte à 1977, avec la signature d’un Accord de coopération économique, technique et financière. Il repose aujourd’hui sur l’AEMEA, signé en 2002 et en vigueur depuis 2006.

Le Liban a négocié un plan d’action de deuxième génération, entré en application dès 2013, sur la base d’un accord mutuel, avant d’être formellement adopté par les deux parties en 2014.

c. Actions à conduire en priorité

L’objectif de la coopération pour la période 2014-2016 est axé sur trois secteurs prioritaires, fixés dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’IEV :

– soutien aux réformes de la justice et du système de sécurité ;

– renforcement de la cohésion sociale, promotion d’un développement économique durable, amélioration des infrastructures et des services de bases, et protection des groupes vulnérables ;

– promotion d’une gestion durable et transparente de l’énergie et des ressources naturelles, notamment de l’eau.

Durant cette période triennale, une dotation d’un montant maximum de 159 millions d’euros est prévue, 146,1 millions pouvant être engagés en 2014. Néanmoins, les crédits de paiement pour cette année n’ont été que de 78,2 millions d’euros.

Le Liban a en outre bénéficié, entre 2012 et 2014, d’une aide financière supplémentaire de 450 millions d’euros, destinée à faire face à l’afflux des quelques 1,1 million de réfugiés venus de Syrie.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Dans l’ensemble, au cours de l’année 2014, le Liban a réalisé des progrès limités en ce qui concerne la mise en œuvre du plan d’action, en témoigne le faible taux d’exécution des crédits, limité à 53,2 %.

Le dernier rapport de suivi47 fait état, pour 2014, d’avancées en matière de droits de l’homme, particulièrement concernant les droits des femmes, et souligne le succès des politiques de sécurité, qui ont garanti la stabilité du pays.

Il soulève cependant le problème de la persistance des difficultés économiques – chômage, pauvreté, fort déficit public, réduction de la fourniture en eau et énergie –, expliquées par la faiblesse structurelle des institutions nationales.

Il constate, enfin, la difficile situation politique, due à l’incapacité des députés libanais à élire un nouveau Président, depuis mai 2014.

6. Libye

a. Profil

La population de la Libye est d’environ 6 millions d’habitants. Son économie se structure principalement autour du secteur de l’énergie, qui génère près de 95 % des revenus à l’exportation, 80 % du PIB et 99 % des ressources publiques. L’importance des revenus retirés de l’exploitation des hydrocarbures, couplée au faible nombre d’habitants, semble porter le pays au premier rang de tout le continent africain en matière de PIB par habitant. En raison de la situation politique et sécuritaire troublée qu’elle connaît, il est cependant difficile d’établir de manière précise ses performances économiques actuelles de la Libye – cette remarque vaut également pour les échanges commerciaux, même s’il semble que l’Union européenne demeure son premier partenaire dans ce domaine.

Cette situation fait suite au soulèvement populaire de 2011 et à la chute du régime du colonel Mouammar Kadhafi. Depuis lors, la situation est particulièrement instable.

Les élections législatives du 25 juin 2014 ont été invalidées par la Cour suprême libyenne le 6 novembre suivant. Le Parlement, contesté par les milices islamistes, refuse ce verdict et continue à siéger. Au final, deux gouvernements revendiquent le pouvoir – le premier, à Tripoli, est structuré autour d’un groupe islamiste radical, tandis que le second, à Tobrouk, s’appuie sur l’autorité des tribus – sans qu’aucun d’eux puisse aujourd’hui prétendre à incarner une quelconque autorité étatique.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

La montée des tensions, les défis sécuritaires et l’effondrement de l’État – desquels découlent aussi le problème de l’afflux massif de migrants sur les côtes italiennes et ses conséquences humanitaires extrêmement préoccupantes – sont les défis majeurs qui se posent à l’Union européenne dans sa relation avec la Libye.

Compte tenu de la difficulté à établir un dialogue avec les autorités gouvernementales sous Kadhafi puis du trouble politique majeur actuel, il n’existe pas de cadre légal qui régisse la relation entre le pays et l’Union européenne. Les négociations en vue de l’adoption d’un accord-cadre, initiées dans un contexte de tentative de normalisation des relations bilatérales, ont été interrompues en février 2011. De ce fait, la Libye demeure en dehors de la plupart des structures de la PEV et ne possède qu’un statut d’État observateur au sein de l’UpM.

Cela ne signifie pas pour autant que l’Union européenne soit absente de Libye ; Mme Mogherini s’est ainsi rendue personnellement à la rencontre des parties, le 23 avril 2014, à l’occasion d’une rencontre organisée en Tunisie.

c. Actions à conduire en priorité

La priorité de l’Union européenne est d’apporter une aide dans les domaines liés à la sécurité – contrôle et gestion des frontières, maitrise des armements, lutte contre la traite des êtres humains, la contrebande et la criminalité organisée – et de créer les conditions de la réconciliation et de la constitution d’un gouvernement d’unité nationale, ce qui passe notamment par l’aide à la reconstruction, la promotion des valeurs démocratiques et le soutien à la société civile.

En mai 2013, dans le cadre de la PSDC, a été lancée une Mission de l’Union européenne d’assistance aux frontières (EUBAM48), qui s’appuie non pas sur des dotations financières mais sur des transferts de savoir-faire, avec deux objectifs :

– aider les autorités libyennes à développer leurs capacités de gestion de la sécurité sur leurs frontières terrestres, maritimes et aériennes ;

– élaborer une stratégie à long terme de gestion des frontières.

Dans le cadre de l’IEV, pour la période 2014-2015, il est prévu que l’allocation financière de l’Union européenne se concentre sur les domaines de la gouvernance démocratique, de l’inclusion de la jeunesse et de la santé, avec des crédits d’engagements plafonnés à 44 millions d’euros, plus un appui à la société civile. En 2014, 11 millions d’euros ont été effectivement versés, un peu plus que les 8 millions inscrits en crédits d’engagement.

Par ailleurs, un certain nombre de programmes engagés dans le cadre de l’IEVP continuent de s’appliquer, particulièrement dans les domaines de l’administration publique, de la justice, de la formation professionnelle, de l’éducation et surtout de l’aide aux migrants. De plus, l’Union européenne participe au financement d’un programme de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) apportant un soutien humanitaire aux migrants.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Faute de plan d’action bilatéral, la Commission européenne et le SEAE ne publient pas de rapport annuel à propos de la Libye. L’instabilité politique empêcherait au demeurant d’assurer un suivi précis des actions conduites au titre de la PEV.

7. Maroc

a. Profil

Avec 33,3 millions d’habitants, le Maroc est le quatrième pays le plus peuplé parmi les pays de la PEV. Il présente un PIB par habitant de seulement 2 550 euros, l’un des plus bas du voisinage Sud, et son IDH, de 0,617, est faible. En 2014, il a cependant connu un taux de croissance de l’ordre de 3 %, ce qui le situe dans la moyenne haute des pays du voisinage Sud.

Le pays entretient une relation commerciale de premier ordre avec l’Union européenne : en 2014, le montant des échanges entre les deux partenaires a dépassé 29 milliards d’euros, avec un déficit de près de 7,3 milliards pour le Maroc ; plus de la moitié des exportations et des importations du Royaume s’effectuent avec l’Union européenne.

Dès le début du printemps arabe, en février 2011, le roi du Maroc annonçait une série de réformes politiques et économiques, articulées autour d’une nouvelle Constitution, adoptée par référendum le 1er juillet 2011. Celle-ci renforce les prérogatives du gouvernement par rapport au Palais, accentue la séparation des pouvoirs et élargit le champ des libertés individuelles et collectives.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Les relations bilatérales vont bien au-delà du dynamisme commercial : de par sa stabilité institutionnelle et son esprit d’ouverture vis-à-vis de la rive Nord de la Méditerranée, le Maroc s’impose comme le partenaire politique principal de l’Union européenne dans le Maghreb, voire dans l’ensemble du monde arabo-musulman. L’importance stratégique de la relation entre les deux parties a été consacrée au Sommet UE-Maroc de Grenade, le 7 mars 2010.

Lors d’une visite à Rabat, en mai dernier, M. Štefan Füle, qui était alors commissaire européen chargé de l’élargissement, est allé jusqu’à parler de « success story » à propos de la relation entre l’Union européenne et le Maroc, et a salué les réformes politiques engagées par le Royaume depuis 2011. Le travail en commun est facilité par le fait que les autorités politiques et l’administration du Maroc ont compris et intégré le mode de fonctionnement communautaire par consensus.

La relation bilatérale entre l’Union européenne et le Maroc repose sur l’AEMEA signé dès 1996 et entré en vigueur en 2000. Depuis octobre 2008, le Maroc bénéficie de plus d’un statut de « partenaire avancé », ce qui témoigne de sa forte volonté de s’ancrer à l’Europe.

Dans ce cadre, les Épartenaires négocient depuis 2013 les modalités de mise en place d’une ZLEAC. Le Maroc est le seul pays du voisinage Sud avec lequel les discussions en vue de parvenir à un tel accord ont bien avancé, mais elles sont suspendues sine die depuis l’été 2015, sous la pression des milieux économiques marocains, qui redoutent la compétitivité des biens et services européens, et l’impact potentiel de l’ouverture des marchés sur une économie relativement fragile.

c. Actions à conduire en priorité

Le Royaume du Maroc est le premier récipiendaire des dotations distribuées dans le cadre de la PEV au moyen de l’IEV. Au titre du premier plan d’action, sur la période 2007-2013, il a perçu près d’1,3 milliard d’euros. Il est prévu, dans le cadre du second plan d’action, sur la période 2014-2020, de lui verser une assistance financière comprise entre 1,323 et 1,617 milliard d’euros.

Outre les objectifs traditionnels que sont la promotion de la démocratie et des droits de l’homme, la programmation pluriannuelle pour la période 2014-2017 vise à appuyer les réformes structurelles et à renforcer les politiques déjà amorcées dans les secteurs suivants :

– l’accès équitable aux services sociaux de base, par l’appui à l’élaboration et à la mise en œuvre de réformes dans le secteur de la santé, de l’éducation, de l’eau et de la justice ;

– la gestion des flux migratoires et l’amélioration de la mobilité ;

– l’emploi et la croissance inclusive et durable par la stimulation de la compétitivité des PME, la modernisation du système de formation professionnelle et l’intégration des considérations environnementales et climatiques dans la vie économique.

En complément de l’IEV, le Maroc bénéficie aussi largement des programmes de jumelage de l’Union européenne dans secteurs variés comme le droit de la propriété intellectuelle, la gestion des finances publiques ou la sécurité maritime.

Le pays reçoit enfin des financements au moyen de l’IEDDH et du programme thématique Organisation de la société civile et autorités locales.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

En ce qui concerne la mise en œuvre du plan d’action, le bilan pour l’année 2014 est mitigé. À titre indicatif, le Maroc n’a perçu que 76,2 millions d’euros de crédits de paiement, bien loin des 218 millions engagés dans le cadre de l’IEV. Le rapport de suivi pour 201449 fait état d’avancées positives tout en soulignant la persistance de nombreux défis.

Des développements encourageants sont notifiés en matière de dialogue politique et de réformes démocratiques. Dans l’optique de mettre en œuvre la nouvelle Constitution, le Maroc a déjà adopté huit lois organiques sur les dix-neuf programmées, concernant notamment l’instauration de la Cour constitutionnelle et les commissions d’enquête parlementaires. Dans le domaine de la justice, le projet de nouveau code de procédure pénale et le projet de loi relatif à la justice militaire sont présentés comme des avancées significatives en matière de renforcement des droits de la défense et de respect du principe de procès équitable. Le Maroc a de surcroît déposé, en novembre 2014, ses instruments de ratification de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Il a aussi mis en œuvre une politique migratoire ambitieuse, incluant un processus de régularisation et d’intégration des migrants irréguliers et des réfugiés. Il a notamment été décidé, en juillet 2014, de procéder sans condition à la régularisation systématique de toutes les femmes et les enfants ayant déposé une demande. Cette politique inédite pour un pays du Sud s’est traduite, en 2014, par la régularisation de 18 000 clandestins – essentiellement originaires d’Afrique sub-saharienne – sur 26 000 demandes.

Le rapport de suivi fait néanmoins aussi état d’un certain nombre de limites et de lacunes. Il regrette le caractère régressif du projet de loi sur l’accès à l’information et la lutte contre la corruption. De plus, en dépit des projets législatifs engagés, les rédacteurs du rapport enjoignent au gouvernement marocain d’intensifier sa lutte contre les discriminations, d’associer davantage la société civile à l’action publique et d’accélérer les réformes concernant la liberté d’association, de rassemblement et d’expression.

Des défis persistent enfin dans le domaine économique et social puisqu’il existe encore des disparités sociales et régionales fortes, et un taux de pauvreté élevé. Le chômage touche 9,9 % de la population active et surtout 20,1 % des 15-24 ans, ce qui appelle un renforcement de l’action gouvernementale dans la formation professionnelle.

8. Territoires palestiniens

a. Profil

Les Territoires palestiniens, composés de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, comptent 4,6 millions d’habitants, pour un PIB per capita de 1 832 euros, ce qui en fait le deuxième partenaire le plus pauvre du voisinage européen. La Palestine doit faire face à un chômage structurel de l’ordre de 30 %, qui atteint même 41 % chez les jeunes de 15 à 24 ans. En termes de développement humain, avec un indice de 0,686, elle se situe à un rang moyen.

Ces données doivent être appréciées à la lumière du conflit avec Israël, qui occupe une partie du territoire palestinien et impose des restrictions en Cisjordanie. L’opération « Bordure protectrice » menée par l’armée israélienne, en 2014, en réponse aux tirs de roquettes en provenance de Gaza, a ainsi eu d’importantes conséquences économiques, le pays entrant en récession – -3,7 % – alors qu’il avait connu, les années précédentes, un taux de croissance oscillant entre 6 et 12 %.

Cette situation de conflit permanent et d’occupation territoriale présente un sérieux obstacle à la réalisation du partenariat avec l’Union européenne. Tout comme pour Israël, l’approfondissement de la relation avec la Palestine est conditionné à la résolution du conflit, sur la base de la reconnaissance mutuelle entre les deux États.

Sur les seize pays partenaires de la PEV, les Territoires palestiniens, dont l’activité productive domestique est fortement contrainte, sont le partenaire commercial le moins actif de l’Union européenne, qui est toutefois son second fournisseur, derrière Israël.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Le partenariat entre l’Union européenne et les Territoires palestiniens repose sur un Accord d’association intérimaire relatif aux échanges et à la coopération (AAI), signé en 1997 entre l’Union européenne et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Celui-ci a été complété, en 2005, par un accord relatif aux mesures de libre-échange réciproque puis, en 2012, par un accord visant à un libre-échange plus poussé pour les produits agricoles, halieutiques et agroalimentaires.

Sur la base de l’AAI, le cadre de la relation entre les deux parties est aujourd’hui encadré par un plan d’action de deuxième génération, signé en 2013 pour une période de trois à cinq ans, qui reprend en grande partie les engagements adoptés dans le programme national de réforme de l’Autorité palestinienne.

c. Actions à conduire en priorité

Parmi ces engagements, trois axes de soutien prioritaire ont été retenus, dans le cadre de l’IEV, pour la période 2014-2015, en faveur :

– des réformes de gouvernance locale et nationale ;

– du secteur privé et du développement économique durable ;

– de la gestion et de la fourniture de l’eau, d’une part, et du développement du territoire, d’autre part.

Néanmoins, le plus gros de l’assistance financière de l’Union européenne au titre de l’IEV – 85 % – est consacré à l’aide humanitaire, à travers le mécanisme Palestino-européen de gestion et d’aide socio-économique (PEGASE), le Programme pour Jérusalem-Est et la contribution à l’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient.

Au total, 309,5 millions d’euros ont été engagés pour l’année 2014, pour 303,7 millions effectivement versés.

S’ajoutent les fonds reçus par les Territoires palestiniens au titre de la coopération régionale et des instruments thématiques, comme le PPP ou l’IEDDH.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Du fait de la situation politique difficile de ces territoires, les progrès réalisés dans la mise en œuvre du plan d’action sont limités. Le rapport de suivi pour 201450 salue cependant la signature, intervenue en avril, de l’accord de réconciliation entre l’OLP et le Hamas, qui marque une avancée significative vers la réunification politique de la bande de Gaza et de la Cisjordanie. Le gouvernement de consensus national constitué dans la foulée de l’accord s’engage à œuvrer pour la paix, sur la base du principe de coexistence entre deux États.

Les rédacteurs du rapport soulignent de plus l’avancée constituée par la nouvelle loi sur l’eau ainsi que les progrès réalisés concernant la réforme du secteur de l’énergie.

Ils critiquent toutefois les reculs observés en Cisjordanie en matière de démocratie et de libertés fondamentales, notamment les pressions exercées sur la presse. Ils constatent aussi la persistance des discriminations à l’encontre des femmes ainsi que la tenue d’exécutions capitales, en dépit du moratoire prononcé par l’Autorité palestinienne.

9. Syrie

a. Profil

La Syrie est le pays du voisinage qui connait la situation politique et humanitaire la plus dramatique : la guerre civile totale entamée en mars 2011 a abouti à une crise humanitaire aiguë. Sur quelque 22 millions d’habitants avant le conflit, près de 12 millions de Syriens dépendent aujourd’hui de l’aide humanitaire, dont 4,8 millions vivent dans des zones assiégées ou difficiles d’accès, et 3,9 millions ont trouvé refuge dans les pays voisins, au Liban, en Turquie, en Jordanie, en Irak ou en Égypte.

Selon les sources, le nombre total de victimes – civils et combattants nationaux et étrangers – est estimé entre 100 000 et 220 000 personnes. La plupart des infrastructures du pays ont été détruites, notamment dans des zones densément peuplées.

En outre, le conflit a créé les conditions de l’essor de l’organisation terroriste Daesh, qui commet d’innombrables violations des droits de l’homme et fait peser une menace sécuritaire sérieuse sur l’Europe.

Dans ce contexte, la Syrie a été rétrogradée au rang de dernier partenaire commercial de l’Union européenne parmi les seize pays de la PEV et ses exportations sont tombées à un niveau proche de zéro.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Au vu de la situation, dès le mois de mai 2011, l’Union européenne suspendait sa coopération bilatérale avec le gouvernement syrien dans le cadre de la PEV. Celle-ci était auparavant régie, depuis 1977, par un Accord de coopération. La participation de la Syrie aux programmes régionaux dans le cadre de l’UpM est également interrompue.

L’Union européenne a de plus mis en place des mesures restrictives, progressivement renforcées, à l’encontre du gouvernement syrien, dans les domaines énergétique, bancaire et commercial, ainsi que concernant les livraisons d’armes. Un certain nombre de dignitaires du régime sont aussi frappés d’interdictions de séjour.

L’Union européenne conditionne la reprise de la coopération à la mise en œuvre d’un processus de transition politique susceptible de répondre aux aspirations de l’ensemble de la population syrienne.

c. Actions à conduire en priorité

L’engagement de l’Union européenne au profit de la Syrie s’effectue dès lors exclusivement en faveur de la population. Elle est d’ailleurs un donateur de premier plan, avec une mobilisation de ses États membres et de la Commission européenne d’environ 3,6 milliards d’euros en :

– aide humanitaire ;

– aide au développement ;

– aide économique ;

– aide à la stabilisation.

L’IEV est notamment mobilisé au moyen de mesures spéciales annuelles en faveur de la population, complétées par un soutien additionnel alloué à la Jordanie et au Liban pour faire face à l’afflux de réfugiés sur leur territoire. De plus, toujours dans le cadre de l’IEV, un fonds fiduciaire a été mis sur pied afin de fournir, à l’échelle régionale, une réponse cohérente et renforcée à la crise syrienne.

Pour l’exercice 2014, un total de 61 millions d’euros ont été prévus au titre des crédits d’engagement.

Compte tenu de l’absence d’avancée vers un processus de paix, la Commission européenne a décidé, en mars 2015, d’accroitre son aide humanitaire à la Syrie de 136 millions d’euros supplémentaires. La moitié de cette somme servira à répondre aux besoins à l’intérieur du pays, l’autre à aider les réfugiés syriens dans les pays voisins. Une nouvelle stratégie globale de l’Union européenne, élaborée en février 2015 pour la gestion des crises en Syrie mais aussi en Irak, prévoit en outre un nouveau financement d’1 milliard d’euros pour les deux prochaines années.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Tout comme pour la Libye, la Commission européenne et le SEAE ne sont pas en mesure de publier un rapport annuel à propos de la Syrie.

10. Tunisie

a. Profil

Peuplée de 11 millions d’habitants, la Tunisie a connu, en 2014, une croissance de 2,4 % et son PIB par habitant s’élève à 3 277 euros, ce qui la situe dans la moyenne basse des pays du voisinage Sud. Le chômage est élevé : 15,3 % de la population active est sans emploi et le taux s’élève même à 34,7 % en ce qui concerne la tranche d’âge des 15-24 ans. Avec un IDH de 0,721, le pays présente cependant d’un niveau de développement humain considéré comme élevé.

Sur le plan commercial, la Tunisie est le cinquième partenaire de l’Union européenne, avec des flux d’échanges totaux dépassant les 20 milliards d’euros et une balance commerciale excédentaire de 1,68 milliard d’euros. L’Union européenne est de loin le premier partenaire du pays : 63,9 % de ses importations et 71,6 % de ses exportations s’effectuent avec elle, ce qui en fait le pays de la PEV le plus dépendant du marché intérieur.

Ces statistiques économiques encourageantes s’expliquent par la difficile transition politique en cours, qui connait désormais une trajectoire positive. Une nouvelle Constitution a été adoptée le 26 janvier 2014 et le pays a mis en place un processus électoral pacifique, pluraliste et transparent, pour le suivi duquel l’Union européenne a déployé une mission d’observation. Le succès de la Tunisie, à cet égard, est vivement salué par l’Union européenne comme un modèle de bon fonctionnement de la PEV. Bien qu’il soit difficile d’évaluer exactement la contribution de la PEV à la transition amorcée en Tunisie, la relation entre l’Union européenne et le pays a indiscutablement joué un rôle.

Lors de la table ronde organisée par les rapporteurs, le représentant de l’ambassade de Tunisie a fait observer que la prévention des dérives radicales passe aussi par de meilleures perspectives d’inclusion économique et social de la jeunesse, et a appelé à un renforcement significatif de la copération avec l’Union européenne en la matière.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

La relation bilatérale trouve son fondement dans un partenariat de coopération, signé dès 1969. Elle est aujourd’hui régie par un AEMEA datant de 1998, qui pourrait être complété, dans le futur, par la mise en place d’une ZLEAC, conformément au statut de « partenaire avancé », accordé en 2012 ; des négociations seront prochainement lancées en ce sens.

De plus, à travers la déclaration sur le partenariat et la mobilité signée le 3 mars 2014, l’Union européenne et la Tunisie se sont engagées à travailler étroitement sur les questions de migrations et ont ouvert la voie à l’assouplissement du régime des visas. La Tunisie participe de surcroit à plusieurs programmes européens :

– Horizon 2020 dans le domaine de la recherche ;

– Erasmus mundus et TEMPUS51 dans le domaine de l’enseignement supérieur.

Dans le cadre de la PEV, le pays a négocié un plan d’action de deuxième génération pour la période 2014-2020, qui prévoit le déploiement d’un large éventail d’actions dans les domaines correspondant au champ d’application de l’AEMEA. La programmation pluriannuelle de sa mise en œuvre doit se faire en deux étapes, la première couvrant la période 2014-2015, la seconde la période 2016-2020.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de l’IEV, la programmation 2014-2015 identifie trois secteurs d’intervention, pour lesquels l’allocation financière indicative maximum est établie à 246 millions d’euros.

Le premier est relatif au soutien aux réformes socio-économiques, dont l’objectif est de favoriser la stabilisation macroéconomique et la reprise économique, identifiées comme des éléments clés du processus de transition. Cela suppose la création d’emplois, l’amélioration de la gouvernance économique et la transparence de la gestion des finances publiques.

Le second secteur d’intervention est le renforcement des éléments fondamentaux de la démocratie, avec des projets concernant la réforme de la justice, le renforcement du secteur des médias audiovisuels ainsi que la promotion de l’égalité hommes-femmes.

Le dernier secteur visé est celui de l’appui au développement plus équilibré et durable dans l’ensemble des régions. Dans cette optique, l’accent est mis sur l’amélioration de l’accès et la fourniture des services, mais aussi sur la gouvernance environnementale et climatique afin, entre autres, de préserver les ressources naturelle tunisiennes et de développer une croissance verte sobre en carbone.

Par ailleurs, dans chacun de ces secteurs d’intervention, une grande importance est accordée au soutien à la société civile. Des appuis sont prévus afin de renforcer la participation des organisations de la société civile à la formulation et à la mise en œuvre des politiques publiques. De plus, la programmation financière pour 2014-2015 prévoit une ligne de budget supplémentaire destinée à l’accompagnement à la consolidation de la société civile.

Au total, pour l’exercice 2014, l’appui de l’Union européenne à la Tunisie a mobilisé 178,5 millions d’euros, soit davantage que l’enveloppe indicative fixée, qui était limitée à 169 millions d’euros. Ce montant comprend les allocations au titre du programme d’action bilatérale mais aussi celles au titre de l’approche incitative « more for more », qui a permis de débloquer 50 millions d’euros supplémentaires – eu égard à ses performances, la Tunisie s’est imposée comme le principal bénéficiaire de cette politique fondée sur la conditionnalité.

Les dotations pour la période 2014-2020 seront comprises entre 725 millions et 886 millions d’euros.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Le montant des dotations effectivement déboursées en 2014 est supérieur aux crédits d’engagement. Ce phénomène témoigne du succès tunisien dans la mise en œuvre de la PEV, comme le souligne le rapport de suivi pour l’année 201452. L’ampleur du soutien européen résulte des « avancées remarquables » accomplies en matière de transition démocratique, mais aussi des progrès constants réalisés en matière de gouvernance économique et financière :

– évaluation des politiques ;

– transparence des passations de marchés publics ;

– soutien aux PME ;

– modernisation des secteurs des transports et des énergies renouvelables.

Enfin, l’attentat terroriste perpétré le 18 mars au musée du Bardo a souligné combien la coopération avec la Tunisie en matière de lutte contre le terrorisme et de consolidation de la sécurité collective est devenue cruciale. L’instabilité en Libye et le nombre élevé de Tunisiens ayant rejoint des groupes terroristes constituent une menace importante pour la sécurité du pays mais aussi, par contrecoup, pour ses voisins européens. L’Union européenne se dit donc résolue à renforcer sa coopération dans la lutte contre le terrorisme avec la Tunisie au moyen d’un dialogue politique mais aussi de projets concrets.

B. L’EUROPE ORIENTALE ET LE CAUCASE DU SUD

Le Partenariat oriental est une institution très jeune puisqu’elle n’a vu le jour que le 7 mai 2009, à Prague, sous présidence tchèque de l’Union européenne – la première à avoir été exercée par un pays d’Europe centrale issu de l’ancien bloc socialiste –, à travers une déclaration commune des chefs d’État et de gouvernement des vingt-sept États membres de l’époque et des six États partenaires53, axée sur trois priorités :

– accélérer l’association politique ;

– approfondir l’intégration économique ;

– organiser la mobilité des citoyens.

Elle a été imaginée par la Pologne, qui s’est ensuite fait l’avocate de l’initiative en compagnie de la Suède : elle porte donc la marque du tropisme oriental des États membres du Nord et de l’Est de l’Union européenne. Les élargissements successifs avaient en effet rapproché les six pays visés des limites territoriales de l’Union européenne, au point que leur sécurité, leur stabilité et leur prospérité devenaient cruciales pour cette dernière. En outre, ces six pays, à des degrés divers, avaient déjà mis en œuvre des réformes politiques, sociales et économiques influencées par le modèle communautaire et exprimé leur souhait de se rapprocher de l’Union européenne.

Avec le Partenariat oriental, l’Union européenne vise à apporter un soutien aux réformes suivantes :

– conformation au droit international ;

– enracinement des institutions démocratiques et engagement en faveur des valeurs fondamentales de primauté du droit et de respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

– mise en place d’une économie de marché solidaire et durable, dans un cadre de bonne gouvernance.

Parallèlement aux relations bilatérales, le volet multilatéral du Partenariat oriental confère à l’Union européenne un levier supplémentaire pour favoriser ces réformes, par le biais d’un forum réunissant les six pays partenaires. Des échanges d’expériences y sont organisés dans le cadre de quatre plates-formes :

– démocratie, bonne gouvernance et stabilité ;

– contacts interpersonnels ;

– sécurité énergétique et réseaux de transport ;

– intégration économique et convergence avec les politiques communautaires.

La Commission européenne joue un rôle crucial dans l’animation de ce volet multilatéral. Sous son autorité, chaque plate-forme installe des groupes d’experts afin de soutenir ses travaux dans des domaines spécifiques et d’alimenter des réunions semestrielles de hauts fonctionnaires des trente-quatre pays impliqués.

Des réunions ministérielles sectorielles sont organisées en tant que de besoin et les ministres des Affaires étrangères se réunissent chaque année afin d’examiner les progrès réalisés et de formuler des orientations politiques plus détaillées.

Un sommet des chefs d’État et de gouvernement des vingt-huit États membres de l’Union européenne et des six États partenaires se tient à un rythme bisannuel.

Enfin, le Partenariat oriental dispose aussi de son enceinte interparlementaire, baptisée EuroNest, assemblée paritaire constituée de :

– soixante membres du Parlement européen, nombre réduit à cinquante depuis que la participation de la Biélorussie a été suspendue ;

– dix membres de chaque pays bénéficiaire du Partenariat oriental.

Quoi que, contrairement à l’UpM, il ne possède pas le statut d’organisation internationale, le Partenariat oriental s’est avéré plus dynamique, grâce, d’une part, au volontarisme plus marqué de la part de plusieurs des pays y participant et, d’autre part, du leadership politique fort manifesté à son égard par le SEAE, soutenu par les présidences tournantes des États membres centre-européens, scandinaves et baltes.

Le fonctionnement du Partenariat oriental est cependant handicapé par le fait que quatre de ses six pays sont amputés d’une partie de leur territoire à la suite d’opérations de séparatisme agressif et que deux d’entre eux, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, s’affrontent directement. Le paradoxe est que les cinq pays du Partenariat oriental impliqués dans des conflits armés non résolus à ce jour sont tous membres du Conseil de l’Europe – seule la Biélorussie n’a pas été admise dans cette enceinte.

1. Arménie

a. Profil

Avec une population d’à peine plus de 3 millions d’habitants, l’Arménie est le pays le moins peuplé de la PEV. En 2014, elle a connu une croissance de 2,6 % et son PIB par habitant s’établissait à 2 744 euros, pour un IDH relativement élevé de 0,717. Elle doit pourtant faire face à un fort taux de chômage, de l’ordre de 17 % de la population active, qui monte même à 36 % pour la jeunesse.

Si l’Union européenne est le premier partenaire commercial du pays, les échanges entre les deux partenaires sont peu importants : nous sommes certes son premier fournisseur et acheteur mais l’Arménie est notre troisième plus petit partenaire, le volume total des échanges étant réduit à moins d’1 milliard d’euros. Il faut dire que, à la suite des conflits qui l’ont opposée à ses voisins turcs et azerbaïdjanais, l’essentiel de ses frontières sont fermées, ce qui la condamne à vivre pratiquement en autarcie et interdit tout essor commercial.

Les flux commerciaux avec l’Union européenne risquent de surcroît d’être encore amenés à diminuer après le choix de l’Arménie de rejoindre l’UEEA, effectif depuis le 9 octobre 2014, conformément à une décision inopinée prise quelques semaines seulement avant le sommet de Vilnius du Partenariat oriental.

Rappelons enfin que l’Arménie est actrice d’un conflit gelé ancien puisqu’elle occupe illégalement un cinquième environ de l’Azerbaïdjan – le Haut-Karabakh et le corridor de Latchin – depuis le début des années 1990, sous couvert de la République du Haut-Karabagh autoproclamée, non reconnue par la communauté internationale.

L’Arménie étant dépendante de la Russie sur les plans économique et commercial mais aussi sur les plans diplomatique et militaire, son investissement dans le sommet de Riga – notamment la présence du Président Serge Sarkissian – constituera un indice des perspectives de copération avec l’Union européenne.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

La relation entre les deux partenaires est régie par un APC, entré en vigueur en 1999. Un plan d’action a été adopté en 2006 et prolongé en 2011. Il était prévu que les deux partenaires paraphent un AA créant une ZLEAC mais l’Arménie a fait volte-face au dernier moment, préférant rejoindre l’UEEA.

Outre les objectifs généraux – promotion des droits de l’homme et de l’État de droit, développement économique inclusif et durable –, le plan d’action définit deux objectifs stratégiques :

– l’élaboration d’une stratégie énergétique comprenant en particulier la fermeture de l’unique centrale nucléaire du pays, qui n’est pas aux normes européennes ;

– la recherche d’une résolution pacifique du conflit du Haut-Karabagh.

c. Actions à conduire en priorité

La programmation pluriannuelle entrant dans le cadre de l’IEV identifie trois actions prioritaires pour la période 2014-2017 :

– le développement du secteur privé, l’augmentation du nombre d’emplois et l’incitation à la création d’entreprise, dans une optique de réduction des disparités socioéconomiques et de l’économie informelle ;

– la modernisation de l’administration publique, afin d’assainir les finances publiques et de renforcer l’efficacité de la fonction publique ;

– la réforme de la justice, en vue de garantir son indépendance et la bonne exécution des lois, mais aussi de lutter contre la corruption.

Pour venir appuyer ces réformes, l’Union européenne s’est engagée à contribuer financièrement à hauteur de 170 millions d’euros maximum durant ces trois années. Pour 2014, 34 millions ont été octroyés au titre des crédits d’engagement, mais seulement 23,2 millions ont été effectivement déboursés.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Selon le rapport de suivi pour 201454, l’Arménie a fait montre de progrès mitigés dans la mise en œuvre du plan d’action. Le projet de transition d’un régime présidentiel vers un régime parlementaire, présenté en avril 2014, est salué, même si l’absence de consensus politique sur la question empêche aujourd’hui sa mise en œuvre. Les progrès réalisés en matière d’indépendance du secteur judiciaire sont également soulignés, même si la méfiance de la population à l’égard du pouvoir judiciaire persiste. Les rédacteurs du rapport déplorent en outre l’absence de progrès dans le renforcement des droits de l’homme et de lutte contre la corruption, deux défis majeurs pour le pays.

Si elle modifie les relations que le pays entretient avec l’Union européenne, l’adhésion de l’Arménie à l’UEEA ne signifie pas pour autant l’arrêt de la coopération entre les deux parties, puisque celles-ci ont lancé, en novembre 2014, un travail de réflexion sur l’identification des champs de coopération possibles, notamment matière de mobilité. À ce titre, des accords relatifs à la facilitation de la délivrance des visas et à la réadmission des personnes en séjour irrégulier sont entrés en vigueur en janvier 2014.

À terme, l’Arménie pourrait même jouer un rôle de passerelle entre la Russie et l’Union européenne.

2. Azerbaïdjan

a. Profil

L’Azerbaïdjan, peuplé de 9,4 millions de personnes, affiche un PIB par habitant de 6 510 euros – le plus élevé des pays du Partenariat oriental et le quatrième de l’aire couverte par la PEV – et la croissance y a atteint 2,8 % en 2014. L’activité économique est tirée par les ressources en énergies fossiles. Le taux de chômage s’établit à 6,1 % pour l’ensemble de la population active et à 13,7 % pour les jeunes. Un IDH de 0,747 témoigne d’un niveau de développement humain élevé.

L’Union européenne est le premier partenaire commerciale du pays mais cette relation est déséquilibrée : en 2014, l’excédent bilatéral de l’Azerbaïdjan approchait les 10 milliards d’euros et l’Union européenne absorbait plus de la moitié des exportations azerbaïdjanaises. Le pays est en effet un producteur majeur sur le marché des hydrocarbures, ce qui en fait un partenaire stratégique de l’Union européenne, désireuse de diversifier ses sources d’approvisionnement.

Le pays est traumatisé par le conflit territorial avec son voisin arménien. L’Union européenne cherche à contribuer à un règlement pacifique de ce conflit entre deux de ses partenaires au sein de la PEV.

Sur le plan diplomatique, l’Azerbaïdjan défend une ligne pro-occidentale mesurée : il affirme un ancrage atlantiste tout en souhaitant entretenir des relations stables avec la Russie.

Les marges de manœuvre financières dont jouit l’Azerbaïdjan grâce à sa richesse en ressources naturelles le rendent modérément intéressé par l’intégration de l’acquis communautaire, qui serait incompatible avec la préservation de son avantage comparatif dans le secteur énergétique ; dans cette même logique, il se montre indifférent au dessein russe de confédération eurasiatique.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Au lendemain de son accès à l’indépendance, l’Azerbaïdjan manifestait la volonté de se rapprocher de l’Union européenne, qui fut concrétisée par la signature d’un APC, entré en vigueur en 1999. Depuis, l’approfondissement institutionnel des relations entre les deux partenaires a été modeste. Ainsi, les négociations en vue de la conclusion d’un AA, entamées en 2010, sont au point mort depuis 2012, l’Azerbaïdjan ayant pratiqué la politique de la chaise vide au cours des discussions préalables au sommet de Vilnius.

Son cadre de coopération avec l’Union européenne reste donc l’APC, dont la mise en pratique des dispositions est assurée par un plan d’action adopté en 2006. Les actions prioritaires suivantes y sont listées :

– règlement du conflit du Haut-Karabakh ;

– échanges énergétiques ;

– diversification de l’économie ;

– éducation ;

– protection des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de l’État de droit ;

– lutte contre la corruption.

Les deux parties ont également signé trois accords concernant la gestion de la migration légale et illégale :

– pour faciliter la délivrance des visas en novembre 2013 ;

– pour promouvoir la mobilité en décembre 2013 ;

– pour organiser la réadmission des personnes en séjour irrégulier en février 2014.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de l’IEV, la programmation pour la période 2014-2017 identifie trois domaines devant faire l’objet d’actions prioritaires :

– l’agriculture et le développement rural, afin de soutenir la diversification de l’économie tout en réduisant les disparités entre les régions, par une aide financière et l’apport de conseils stratégiques ;

– la justice, afin de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire ;

– l’éducation et les compétences, dans l’optique de répondre au besoin urgent du pays de se doter d’une main-d’œuvre qualifiée, 40 % des salariés étant aujourd’hui dépourvus de qualification.

L’assistance financière de l’Union européenne à l’Azerbaïdjan est parmi les plus faibles de celles dispensées dans le cadre de la PEV : pour la période 2014-2017, elle est plafonnée à 94 millions d’euros et, sur les 21 millions programmés pour l’exercice 2014, seuls 6,8 millions ont effectivement été alloués.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Le rapport de suivi pour 201455 fait état de régressions dans le processus démocratique et au regard des libertés fondamentales, perceptibles dans le traitement réservé aux organisations non gouvernementales et aux défenseurs des droits de hommes en général.

Ces résultats décevants illustrent le désintérêt de l’Azerbaïdjan vis-à-vis des financements européens, qui supposent, en contrepartie, un engagement politique solide.

Dans ces circonstances, la relation entre l’Union européenne et l’Azerbaïdjan s’exerce presque exclusivement dans le domaine de l’énergie, ce qui n’est déjà pas négligeable. L’année 2014 a ainsi vu la réalisation d’importants progrès dans la mise en œuvre du corridor gazier sud, incluant la réalisation du gazoduc transanatolien (TANAP56) à l’horizon 2019, qui permettra d’acheminer le gaz à la frontière de la Grèce et de la Bulgarie via la Turquie. Lors de la table ronde « retour d’expérience », l’ambassadeur d’Azerbaïdjan et sa collaboratrice ont souligné le caractère stratégique de ce projet d’infrastructure énergétique.

3. Biélorussie

a. Profil

La Biélorussie compte 9,5 millions d’habitants. Le taux de chômage y est officiellement quasi nul – 0,5 % en 2014 – et le PIB par habitant s’y élève à 6 162 euros. Avec un IDH de 0,786, la Biélorussie serait le deuxième pays le plus avancé de la PEV en termes de développement humain. Elle a cependant connu une croissance de seulement 1,6 % en 2014, à cause, d’une part, de l’étroitesse de ses relations économiques avec une Russie en crise et, d’autre part, des sanctions européennes.

En effet, prenant acte des violations constantes des droits de l’homme perpétrées par le régime autocratique du Président Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994 et qui exerce une répression systématique vis-à-vis des opposants politiques, l’Union européenne a adopté dès 2004 des mesures restrictives, sous forme d’interdictions de territoire et de gels d’avoirs bancaires. Renforcées à la suite d’atteintes aux normes électorales, de répressions de manifestations et d’emprisonnements de candidats aux élections, ces mesures font l’objet de mises à jour annuelles.

La Biélorussie étant mise au ban de la communauté internationale, l’opportunité d’accepter la présence du chef de l’État au sommet de Vilnius se pose.

Les échanges commerciaux restent cependant assez soutenus, dans la moyenne des pays couverts par la PEV : le volume des transactions avoisine les 11 milliards d’euros, avec un déficit de plus de 4 milliards en défaveur de la Biélorussie, dont nous sommes le premier acheteur et le premier fournisseur, derrière la Russie.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

En raison de cette situation, la ratification de l’APC avec l’Union européenne signé en 1995 est suspendue depuis 1997. Il n’existe pas non plus de plan d’action pour la Biélorussie dans le cadre de la PEV. La relation avec l’Union européenne est de ce fait régie par les conclusions régulièrement prises en Conseil Affaires étrangères.

Bien que la Biélorussie soit membre de Partenariat oriental, elle ne participe qu’à son volet multilatéral, dans les domaines de :

– la gestion des frontières ;

– l’environnement ;

– l’énergie ;

– les transports.

Elle a été également admise à participer aux programmes entrant dans la coopération transfrontalière et à signer, à ce titre, des accords locaux avec la Lettonie, la Lituanie et la Pologne.

De plus, dans le domaine de l’éducation, elle participe aux programmes Tempus et Erasmus mundus.

c. Actions à conduire en priorité

Sur le plan bilatéral, l’Union européenne apporte un soutien financier à la Biélorussie en se fondant sur des documents stratégiques. Pour la période 2014-2017, il est prévu que son intervention se concentre sur les thèmes de :

– l’inclusion sociale ;

– l’environnement ;

– le développement économique local et régional.

Une assistance complémentaire est prévue pour le soutien à la société civile, afin de couvrir des mesures additionnelles. D’une manière générale, tous les programmes financés par l’Union européenne en faveur de la Biélorussie doivent bénéficier exclusivement à la société civile. Cette préoccupation constante a aussi poussé l’Union européenne à entamer, en 2014, des négociations sur l’établissement d’accords de réadmission des personnes en séjour irrégulier et d’assouplissement des formalités de délivrance des visas.

En 2014, 22,3 millions d’euros ont été versés dans le cadre de l’IEV, au titre du document de stratégie, soit un peu plus que les 19 millions engagés, sur un total de 89 millions programmés sur la période quadriennale 2014-2017.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

En l’absence de plan d’action, aucun rapport de suivi ne peut être établi avec la Biélorussie.

4. Géorgie

a. Profil

La Géorgie est peuplée de 4,5 millions d’habitants et le PIB par habitant s’y élève à 2 712 euros. En 2014, la croissance a atteint 4,7 %, le meilleur taux des seize pays partenaires de la PEV. Avec un IDH de 0,744, la Géorgie est classée parmi les pays à bon niveau de développement. Le chômage reste cependant très élevé, avec un taux de 16,9 % pour l’ensemble de la population active et qui culmine même à 35,6 % chez les 15-24 ans.

Dans l’ensemble, l’économie géorgienne a pourtant bien résisté au conflit d’août 2008 avec la Russie mettant en jeu les régions séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud. Ces territoires représentant environ 20 % de la superficie de la Géorgie, majoritairement peuplés de russophones, ont en effet obtenu leur indépendance de fait il y a sept ans et viennent même de signer avec la Fédération de Russie, respectivement le 24 novembre 2014 et le 18 mars 2015, des « traités d’alliance et d’intégration », ce qui constitue une nouvelle étape dans la violation de la souveraineté géorgienne.

L’Union européenne, extrêmement attentive à un retour à la légalité, a créé la fonction de représentant spécial pour le Caucase Sud et la crise en Géorgie, poste occupé par M. Herbert Salber.

Ces événements ont poussé la Géorgie à se tourner résolument vers l’Union européenne, qui est son premier partenaire commercial. Les flux de biens et services demeurent toutefois faibles : un peu plus de 2,5 milliards d’euros, les trois quarts étant constitués par des exportations européennes. Il faut dire que la Géorgie souffre de l’embargo russe, qui inclut la fermeture des frontières et complique la circulation des biens.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

Jusqu’à juin 2014, la relation entre l’Union européenne et la Géorgie était régie par un APC, souscrit en 1999, complété, en 2006, par un plan d’action dans le cadre de la PEV. Elle s’est intensifiée à partir de 2003, avec la « Révolution des roses », et est aujourd’hui structurée par un AA créant une ZLEAC, signé le 27 juin 2014. Comme l’a indiqué le représentant de la Géorgie lors de leur table ronde consacré au retour d’expérience des pays partenaires de la PEV, cet AA est considéré par son pays comme « un point de non-retour pour faire reconnaître le fait qu’il est européen ».

La mise en œuvre des dispositions de cet accord, sur une base annuelle, définit dorénavant le cadre de la coopération entre l’Union européenne et la Géorgie. Un agenda d’association, adopté en juin 2014 et programmé jusqu’en 2017, remplace le plan d’action pour ce qui est de l’identification pluriannuelle des objectifs.

Par ailleurs, la Géorgie coopère à la PSDC à travers un accord-cadre, effectif depuis mars 2014, qui l’a amenée à participer :

– à l’opération militaire de l’Union européenne en République centrafricaine (EUFOR RCA), en tant que deuxième contributeur, avec 150 soldats d’infanterie légère en 2014 ;

– à la mission de formation des forces armées maliennes (EUTM57 Mali).

La Géorgie ambitionne et revendique d’adhérer à l’Union européenne.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de l’IEV, il est prévu que la coopération entre les deux parties, pour la période 2014-2017, se concentre en priorité sur trois secteurs.

Premièrement, des réformes dans le domaine de l’administration publique doivent permettre de professionnaliser la fonction publique, dans un souci d’efficience, d’accessibilité et de transparence. Elles visent aussi à mettre en place une décentralisation effective d’une partie des compétences exécutives et budgétaires vers les administrations publiques locales.

Deuxièmement, dans le domaine agricole, qui occupe plus de la moitié des actifs du pays, le but est de mettre un terme au dépeuplement progressif des zones rurales et d’y faire reculer la pauvreté. La réalisation de cet objectif passe par une modernisation de l’agriculture et une réduction de la dépendance du pays vis-à-vis du secteur primaire. Une attention particulière doit par ailleurs être portée aux problèmes du maintien de la surface de terres arables et de la gestion intégrée de l’eau.

Troisièmement, dans le domaine de la justice, il s’agit d’œuvrer dans la continuité des efforts entrepris jusqu’à maintenant en matière pénale, en adoptant une réforme plus vaste du secteur de la justice, pour remédier aux insuffisances constatées concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire.

La dotation quadriennale a été fixée dans une fourchette de 335 à 410 millions d’euros. Au titre de l’année 2014, la Géorgie a effectivement perçu 41,1 millions d’euros, soit un peu plus de 31 % du montant prévu initialement, qui était de 131 millions.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

En 2014, d’après le rapport de suivi de la mise en œuvre de la PEV58, la Géorgie a dans l’ensemble réalisé des progrès significatifs dans la mise en œuvre de son agenda d’association :

– initiation de la révision constitutionnelle, qui doit notamment mener au renforcement du rôle du Parlement ;

– réforme du bureau du procureur, dans le but d’accroitre l’indépendance de la justice ;

– sécurisation des documents officiels ;

– modernisation des procédures d’asile ;

– satisfaction de 90 % des demandes de réadmission émises par les États membres de l’Union européenne ;

– lutte contre la corruption et le blanchiment ;

– protection des données à caractère personnel ;

– réduction des discriminations ;

Ces progrès substantiels ont permis, fin 2014, de passer à la seconde phase du plan d’action, qui prévoit un accord de libéralisation totale du régime des visas.

L’Union européenne réaffirme son soutien à l’intégrité territoriale de la Géorgie au sein de ses frontières internationalement reconnues et se déclare déterminée à chercher une résolution pacifique.

5. Moldavie

a. Profil

Avec 3,6 millions d’habitants, la République de Moldavie est le deuxième pays le moins peuplé de la PEV. Avec un PIB par habitant de seulement 1 636 euros et un IDH de seulement 0,663, c’est aussi le plus pauvre. Le pays a connu un taux de croissance de 2 % en 2014. Si le chômage s’est stabilisé à un niveau relativement bas – 6 % de la population active depuis 2009 –, c’est au prix d’une émigration économique dramatique d’un quart de ses habitants, dans les strates de population les plus jeunes et les plus dynamiques.

L’Union européenne est le principal partenaire commercial du pays – elle concentre 36,8 % de ses importations et 58,1 % de ses exportations –, mais pour un volume total modeste.

Pour la Moldavie, la relation avec l’Union européenne revêt donc une grande importance et elle ne cesse de réclamer une adhésion rapide à l’Union européenne. Lors de la table ronde organisée par les rapporteurs, le représentant de l’ambassade moldave a insisté sur l’importance de la procédure de révision de la PEV et a annoncé que son pays s’apprêtait à présenter des propositions concrètes portant sur :

– la migration circulaire ;

– le système européen de surveillance des frontières (EUROSUR) ;

– le système bancaire.

Du côté de l’Union européenne, cette relation répond avant tout à des considérations politiques : il s’agit de s’atteler aux problèmes de la criminalité organisée et de l’émigration – la Moldavie est frontalière avec la Roumanie – mais aussi d’assurer la stabilité.

La Moldavie, tout comme les trois pays du Caucase Sud, est en effet le théâtre d’un conflit gelé dans sa province orientale de Transnistrie, où un gouvernement indépendant autoproclamé a pris le pouvoir en 1991, sous la pression militaire de la Russie ; or cette région, qui ne représente que 8 % du territoire moldave et où vivent 550 000 personnes, était le poumon économique du pays, avec l’essentiel des équipements industriels et surtout l’unique unité de production d’électricité hydraulique.

La région autonome de Gagaouzie est également l’objet de déstabilisations.

L’enjeu, pour l’Union européenne, est donc d’apporter une réponse adaptée à l’envie d’Europe, tout en évitant une escalade avec la Russie, qui a d’ores et déjà manifesté, en imposant un embargo sur certains produits moldaves, sa réprobation à la signature de l’AA.

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

La relation entre les deux parties est en effet régie par un accord instituant une ZLEAC, signé le 27 juin 2014, simultanément à ceux avec la Géorgie et l’Ukraine, et mis en œuvre de manière provisoire depuis le 1er septembre 2014, en attendant la ratification par tous les États membres. Elle était auparavant régie par un APC souscrit en 1994.

Un agenda d’association, adopté en juin 2014 et programmé jusqu’en 2017, remplace le plan d’action pour ce qui est de l’identification pluriannuelle des objectifs. La réalisation pratique des objectifs fixés dans l’AA s’effectue toujours au moyen de l’élaboration de programmes d’action, sur une base annuelle.

c. Actions à conduire en priorité

Dans le cadre de l’IEV, outre la mise en œuvre des dispositions contenues dans l’AA, il est prévu, pour la période 2014-2017, que le financement de la coopération bilatérale se concentre en priorité sur la réforme de l’administration publique, le soutien à l’agriculture et au développement rural ainsi que les réformes de la police et la gestion des frontières.

L’objectif d’ensemble est de mettre en œuvre une association politique et une intégration économique effectives, ce qui passe par :

– la réforme de l’administration publique ;

– le développement rural ;

– le renforcement des moyens répressifs pour lutter contre la criminalité organisée, la contrebande et la corruption, dans le respect du droit.

Pour 2014, au titre de l’IEV, il était prévu que la Moldavie perçoivent jusqu’à 131 millions d’euros, comprenant 30 millions d’euros alloués au titre du principe « more for more ». Le pays n’a toutefois perçu que 72 % de ces crédits d’engagement, soit 93,7 millions d’euros.

De plus, par le biais de l’instrument FIV, la coopération entre les deux partenaires s’exerce aussi dans les domaines du transport, de l’eau et de l’énergie.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Le rapport de suivi annuel pour 201459 souligne le degré de coopération avancé en matière de mobilité et de migration, dans la mesure où les deux parties ont signé, le 28 avril 2014, un accord sur la libéralisation des visas de moins de trois mois – 360 000 personnes en auraient profité en 2014.

L’inauguration d’un gazoduc et l’étude de faisabilité d’un prolongement vers la capitale Chisinau marquent une étape importante dans l’objectif de diversification de la fourniture énergétique.

Malgré ces progrès non négligeables, le rapport de suivi fait état de la persistance de défis.

Si, au cours de la campagne des élections législatives du 30 novembre 2014, les électeurs ont eu accès à un large éventail d’options politiques, les conditions de participation à la compétition électorale ont été contestables.

Le caractère oligopolistique du secteur des médias et le manque de transparence qui y règne soulève également des critiques.

Surtout, le système judiciaire souffre d’une corruption généralisée.

Par ailleurs, les dysfonctionnements du secteur financier présentent un risque pour la stabilité de l’économie du pays : la Banque nationale de Moldavie (BNM) a dû placer sous « administration spéciale » trois banques majeures, représentant 30 % des avoirs bancaires du pays, qui avaient laissé se volatiliser 1 milliard de dollars – soit 12,9 % de la richesse nationale – dans des opérations de crédit frauduleuses.

Enfin, peu d’avancées ont été notées à propos du règlement du conflit en Transnistrie et de la redéfinition de la relation entre les autorités centrales et la région autonome de Gagaouzie, amorcée sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

6. Ukraine

a. Profil

La population de l’Ukraine, avec 45,2 millions d’habitants, est la deuxième de la PEV. Considérée comme un pays avancé grâce à un IDH de 0,73, elle présente pourtant le troisième plus faible PIB par habitant de la PEV : 2 275 euros en 2014. Sa situation économique est effectivement préoccupante : le pays a subi une récession de plus de 7 % l’an dernier. Les échanges commerciaux avec l’Union européenne accusent aussi une chute : à peine 31 milliards d’euros, contre 37 milliards en 2013 – année où nous avions doublé la Russie comme premiers partenaires commerciaux de l’Ukraine.

Cette situation économique est imputable au conflit entre Kiev et les séparatistes pro-russes soutenus par Moscou. L’Union européenne a joué un rôle de premier plan pour parvenir à une désescalade, en soutenant unanimement la démarche franco-allemande conduite dans un format dit « Normandie », c’est-à-dire avec la Russie et l’Ukraine. L’accord de Minsk 2, signé le 12 février 2015, a ainsi posé les principes de cessez-le-feu et de retrait progressif des combattants et des armes, mesures plus ou moins respectées, sous le contrôle des observateurs de l’OSCE.

Une politique de sanctions, valables au moins jusqu’au 31 juillet 2015 – terme du calendrier de mise en œuvre de l’accord de Minsk 2 – a également été entreprise.

Il n’en demeure pas moins que le pays se trouve amputé de sa péninsule orientale de Crimée et de ses provinces orientales du Donbass, avec le risque d’un gel du conflit, comme en Azerbaïdjan, en Moldavie et en Géorgie.

L’enjeu, pour l’Union européenne, est de répondre à la volonté d’ancrage européen exprimée par la population lors des manifestations de Maïdan. Mais les attentes – ouverture de réelles perspectives d’adhésion, achèvement de la ratification de l’AA et abolition des visas – ne pourront pas être intégralement suivies d’effets dans l’immédiat

b. Cadre institutionnel de la relation bilatérale avec l’Union européenne

La relation entre l’Union européenne et l’Ukraine s’est fondée sur un APC, à partir de 1998. Depuis le 27 juin 2014, elle s’est trouvée renforcée par la signature d’un AA créant une ZLEAC, ratifié concomitamment, le 16 septembre 2014, par la Rada ukrainienne et le Parlement européen.

Selon les prévisions de la Commission européenne, cet accord tendra à accroître les revenus du pays de près d’1,2 milliard d’euros par an. Les exportations ukrainiennes devraient en outre rapporter 1 milliard d’euros supplémentaire par an. Quant aux nouvelles opportunités ouvertes dans le marché intérieur et à la modification des normes de production, elles favoriseront l’investissement, stimuleront la modernisation de l’agriculture et amélioreront les conditions de travail.

L’explosion du conflit ukrainien est due à la menace ressentie par les Russes vis-à-vis du Partenariat oriental et des perspectives ouvertes par la signature des AA. Dans un souci d’apaisement avec la Russie, l’entrée en vigueur de l’AA, initialement prévu le 1er novembre 2014, a donc été repoussée au 1er janvier 2016 et des consultations trilatérales relatives à sa mise en œuvre ont été ouvertes à deux niveaux – technique et politique.

L’agenda d’association de 2014 constitue désormais le cadre de la de la mise en œuvre des dispositions de l’AA. Il comprend de nombreux secteurs d’action, correspondant à la grande diversité des domaines couverts par l’AA. Il prévoit notamment des réformes et une coopération dans les domaines suivants :

– lutte contre la corruption ;

– réformes constitutionnelles ;

– administration publique ;

– législation électorale ;

– justice ;

– transports ;

– énergie ;

– développement des petites et moyennes entreprises ;

– politique étrangère ;

– environnement ;

– mobilité.

c. Actions à conduire en priorité

En raison des circonstances exceptionnelles auxquelles fait face l’Ukraine, le cadre d’action du soutien de l’Union européenne dans la mise en œuvre de l’accord prend la forme de « mesures spéciales » annuelles. Pour l’année 2014, celles-ci ont compris deux actions.

La première repose sur un « contrat d’appui à la consolidation de l’État », appui budgétaire destiné à accompagner le processus de transition. Son objectif général est d’aider les autorités à résoudre les problèmes économiques dans le but de se préparer aux réformes prévues par l’agenda d’association.

La seconde consiste en un soutien à la société civile, avec pour objectif de favoriser et de suivre les réformes démocratiques et le développement socio-économique inclusif du pays. Il doit être mis en œuvre au moyen d’appels à propositions et comprend un soutien financier aux actions menées par les organisations non gouvernementales, ainsi qu’une assistance technique.

Au titre de ces mesures spéciales, pour l’exercice 2014, l’Union européenne a soutenu l’Ukraine à hauteur de 314,1 millions d’euros. Ce montant a résulté de l’agrégation de l’enveloppe allouée dans le cadre de l’IEV et des crédits d’engagement ouverts en 2013 sous le régime de l’IEVP mais gelés, qui ont été payés en 2014. L’Ukraine est le seul pays de la PEV à avoir bénéficié de cet arrangement comptable, afin de tenir compte de sa situation exceptionnelle. Il en résulte des versements effectifs supérieurs de près de 70 millions d’euros au montant des crédits prévus pour 2014.

Ces mesures spéciales font partie intégrante de l’effort de soutien global de près de 11 milliards d’euros annoncé par la Commission européenne le 5 mars 2014. Celui-ci englobe en outre :

– une application provisoire de composantes clés de l’AA ;

– une assistance macrofinancière ;

– des prêts accordés par la BEI et la BERD.

L’application provisoire des composantes clés de l’AA a débuté le 1er novembre 2014, dans les domaines :

– du respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de l’État de droit ;

– du dialogue et de la réforme politique ;

– de la justice, de la liberté et de la sécurité ;

– de la coopération économique et financière.

Parallèlement, dans l’attente de l’entrée en vigueur de ZLEAC, l’Union européenne continuera, jusqu’à la fin de l’année 2015, à appliquer des mesures commerciales autonomes au profit de l’Ukraine, comprenant l’élimination ou la réduction temporaire de droits de douanes, selon la liste des concessions figurant dans l’AA.

d. Bilan 2014 de la Politique européenne de voisinage

Dans l’ensemble, en 2014, malgré sa situation exceptionnelle, le pays a réalisé des progrès notables dans la mise en œuvre des objectifs définis dans l’agenda d’association. Le rapport de suivi pour 201460 fait ainsi état d’accomplissements substantiels dans la mise en œuvre durable de la démocratie. La situation s’est aussi améliorée concernant la liberté de la presse et la liberté de rassemblement. L’association de la société civile aux affaires publiques a continué de s’améliorer. S’agissant des visas, l’Ukraine a adopté une nouvelle législation visant à satisfaire le cahier des charges fixé par le plan d’action pour la libéralisation des visas de court-séjour, ce qui lui a permis d’accéder à la seconde phase de mise en œuvre.

Néanmoins, outre la détérioration de la situation économique et du respect des droits de l’homme dans les régions contrôlées par les séparatistes, le rapport de suivi souligne le besoin de renforcer le contrôle sur les forces de police, régulièrement accusées de mauvais traitement. La Mission de conseil de l’Union européenne pour la réforme du secteur des services de sécurité en Ukraine (EUAM Ukraine61), mise en place en juillet 2014, répond à cet objectif.

III. LES PROFONDES ÉVOLUTIONS GÉOPOLITIQUES EN COURS AUX FRONTIÈRES MÉRIDIONALES ET ORIENTALES DE L’UNION EUROPÉENNE LA CONTRAIGNENT À REVOIR DE NOUVEAU SA POLITIQUE DE VOISINAGE

A. UN PROCESSUS À L’ORIGINE DE NOMBREUSES INITIATIVES DE CONCERTATION, QUI FONT DÉJÀ ÉMERGER DES PISTES DE RÉORIENTATION

1. La réforme de la Politique européenne de voisinage en préparation

a. Une révision motivée par les bouleversements de l’environnement politique de l’Union européenne…

La décennie qui s’est écoulée depuis la création de la PEV a été marquée par des bouleversements politiques profonds dans les pays du voisinage européen, qui, pour la plupart, ont perdu en stabilité. Le mouvement centrifuge s’est même considérablement accéléré depuis 2011, année de la première révision de la PEV. En mars dernier, M. Carl Bildt, ancien ministre des Affaires étrangères suédois, a illustré cette situation critique en déplorant que l’Union européenne soit aujourd’hui entourée d’un « cercle de feu », alors que sa politique de voisinage est destinée à constituer un « cercle d’amitié ».

À l’Est, la politique étrangère de plus en plus affirmée de la Russie, qui se manifeste par un regain de prétentions territoriales, une diplomatie énergétique de plus en plus agressive et un dessein d’organisation économique et politique dans le cadre de l’UEEA, a causé des difficultés croissantes dans la plupart des pays du Partenariat oriental, avec notamment la crise géorgienne de 2008, le renoncement de l’Arménie et de la Biélorussie à signer un AA avec l’Union européenne, l’annexion de la Crimée et enfin le conflit actuel dans le bassin du Donbass, à l’Est de l’Ukraine. Dans ce contexte, il est compliqué d’avancer dans le règlement des vieux conflits gelés de la Transnistrie et du Haut-Karabakh. En outre, le fait que la Russie cherche à priver les anciennes Républiques soviétiques aujourd’hui indépendantes de leur libre arbitre en vue d’opter pour un partenariat approfondi avec l’Union européenne tend évidemment à tendre le dialogue entre les deux parties.

Au Sud, la guerre civile à laquelle la Syrie est en proie depuis 2011 perturbe gravement les pays mitoyens : le conflit a tendance à s’y propager car chacune des communautés ethniques et religieuses qui y cohabitent prend parti pour les autorités syriennes légales ou pour l’une ou l’autre des factions rebelles ; l’afflux massif de réfugiés y aggrave les déséquilibres socio-économiques. De même, outre qu’elle prive la communauté internationale d’interlocuteur indiscutable dans ce pays, la partition de fait de la Libye en deux entités étatiques et le fait que les groupes djihadistes y prospèrent met en péril la sécurité de toute la région. Les printemps arabes ont considérablement modifié la situation politique au Maroc et surtout en Égypte et en Tunisie. Enfin, en dépit d’efforts considérables, le processus de paix au Moyen-Orient est toujours au point mort et les hostilités ont repris plusieurs fois, notamment à Gaza.

Ces événements ont contribué à amplifier les défis auxquels sont confrontés l’Union européenne et ses partenaires, en aggravant les pressions économiques et sociales, en accroissant les flux d’émigrés clandestins et de réfugiés, en accentuant les menaces sécuritaires et en faisant diverger les aspirations des différents pays mitoyens.

b. … et la nécessité de clarifier les objectifs et les méthodes de la Politique européenne de voisinage

La PEV n’a pas toujours permis d’apporter des réponses adéquates à ces situations nouvelles ni à l’évolution des aspirations des partenaires de l’Union européenne. Dès lors, elle n’a pas non plus entièrement satisfait les intérêts européens. D’autant que cette politique n’est pas exempte de critiques. Elle traverse par conséquent une crise profonde.

D’abord, elle pâtit d’une ambiguïté conceptuelle : elle est née de bonnes intentions mais ne répond pas à des objectifs clairement définis, ce qui complique sa gestion. Dès sa création, le flou institutionnel entre partenariat et adhésion a été entretenu, en particulier pour les pays du voisinage Est.

Ensuite, elle pâtit de l’absence de réflexion géopolitique sous-jacente : elle a été construite sans réelle prise en considération du contexte géopolitique de 2003-2004 et a continué d’être gérée de façon relativement imperméable à des événements comme la guerre en Géorgie ou les printemps arabes.

Elle est en réalité menée « à la Bruxelloise », c’est-à-dire organisée en fonction de rapports bureaucratiques de la Commission européenne, avec un faible pilotage politique. Elle dépend dans une large mesure du leadership des États membres les plus impliqués sur la scène diplomatique et stratégique, et non des institutions bruxelloises, ce qui n’est pas sain pour une politique commune.

Enfin, les pays partenaires sont insuffisamment impliqués et la baisse tendancielle de l’attractivité européenne parmi leur population n’est pas interrogée par la partie européenne, alors qu’elle est susceptible de mettre en péril le dessein d’approfondissement de la coopération.

c. Le groupe de travail de la Commission européenne et du Service européen pour l’action extérieure

Eu égard à tous ces bouleversements, tant au Sud qu’à l’Est, et au constat des limites de la PEV sous sa forme actuelle, il est devenu essentiel de procéder à une refonte des principes sur lesquels repose la PEV, ainsi que de sa portée et de ses instruments. Le Président de la Commission européenne, M. Jean-Claude Juncker, a indiqué que cet exercice devrait être achevé dans la première année de son mandat.

La haute représentante Federica Mogherini et le commissaire Johannes Hahn doivent donc présenter, à l’automne 2015 – vraisemblablement en octobre ou novembre –, une réforme du dispositif, actuellement préparée par un groupe de travail ad hoc composé :

– de représentants du SEAE :

• le secrétaire général exécutif ;

• le directeur général Europe non communautaire ;

• les directeurs géographiques Sud et Est ;

• le chef d’unité PEV ;

– de représentants de la direction générale pour le voisinage et les négociations d’élargissement (NEAR) de la Commission européenne :

• le directeur général ;

• le directeur Stratégie et Turquie ;

• le chef de l’unité stratégie, politique et planification ;

– des cabinets de la haute représentante et du commissaire.

d. Une consultation publique objective et ouverte

Dans cette perspective, la Commission européenne et le SEAE viennent de lancer une consultation publique. Appuyée sur un Livre vert62, elle court jusqu’au 30 juin 2015 et s’adresse à toutes les parties prenantes, dans les États membres comme dans les pays partenaires, où le recueil des contributions sera coordonné par les délégations locales de l’Union européenne :

– administrations publiques ;

– think tanks ;

– partenaires sociaux ;

– citoyens.

Mme Mogherini a expliqué : « Il est dans l’intérêt vital de l’Union européenne d’établir de puissants partenariats avec ses voisins. L’évolution récente de la situation régionale a eu pour effet d’amplifier les défis qui se posent à nous tous, qu’il s’agisse de pressions économiques, de migrations clandestines ou de menaces pour notre sécurité. Nous avons besoin d’une politique forte pour être à même de résoudre ces problèmes. Nous avons également besoin de mieux comprendre les différents intérêts, aspirations et valeurs de nos partenaires. C’est l’objectif qui doit être assigné à ce réexamen si nous entendons nouer de solides relations politiques avec nos voisins. »

M. Hahn a ajouté : « L’Union européenne a tout intérêt à favoriser la paix, la stabilité et la prospérité à ses frontières. Le réexamen nous aidera à travailler plus efficacement en vue d’atteindre ces objectifs. Je veux un partenariat qui soit davantage d’égal à égal, un partenariat qui porte ses fruits. »

De fait, contrairement à la plupart des consultations publiques ouvertes par la Commission européenne, celle-ci se caractérise par son objectivité et son ouverture : objective parce qu’elle se montre sans concession sur les faiblesses de la PEV actuelle et parce qu’identifie les enjeux avec clairvoyance ; ouverte car, tout en guidant la réflexion, elle n’est pas organisée sous la forme d’un questionnaire à choix multiples orienté et elle laisse la place à de nombreuses options.

2. Une réflexion collective très dense

a. Les contributions préalables des États membres

Avant même l’ouverture de la consultation publique, le débat était sorti de la bulle bruxelloise et les États membres s’en étaient emparés, à travers des contributions écrites informelles, ou « non-papiers », de trois groupes :

– le premier, signé par l’Allemagne, la France et la Pologne, s’appuie sur l’appel en faveur du renouvellement de la PEV lancé le 1er avril 2014 par les ministres des Affaires étrangères de ces trois pays lors d’une réunion du triangle de Weimar ;

– le deuxième émane des « amis de la Méditerranée », à savoir huit pays du Sud de l’Union européenne : Chypre, l’Espagne, la France, la Grèce, l’Italie, Malte, le Portugal et la Slovénie ;

– le troisième a été émargé par un regroupement de dix pays d’Europe du Nord et de l’Est, conduit par le Royaume-Uni, associés à la Belgique, au Danemark, à la Finlande, à la Hongrie, à la Suède, à la Lettonie, à la Lituanie, aux Pays-Bas et à la République tchèque.

La France est donc cosignataire de deux d’entre eux, qui correspondent aux deux types d’alliances sur lesquelles elle s’appuie traditionnellement pour promouvoir sa politique européenne.

Quatre grands axes de proposition émergent de ces contributions :

– différenciation ;

– priorisation ;

– flexibilité ;

– appropriation.

Repris par la Commission européenne dans son Livre vert, ils seront analysés plus bas63.

b. Les réunions interparlementaires

i. La Conférence interparlementaire pour la Politique étrangère et de sécurité commune et la Politique de sécurité et de défense commune

Lors de la Conférence interparlementaire semestrielle pour la Politique étrangère et de sécurité commune et la Politique de sécurité et de défense commune, dite CIP PESC/PSDC, qui s’est tenue à Riga du 4 au 6 mars 2015, la présidence lettone de l’Union européenne a choisi de consacrer l’une de ses trois séances plénières à la révision de la PEV. La présidence lettone avait pris soin de confier l’une des interventions liminaires à M. Fathallah Sijilmassi, secrétaire général de l’UpM, afin de signifier que les pays baltes, bien que plus sensibles au volet oriental du voisinage européen du fait de leur histoire et de leur géographie, ne sont pas non plus indifférents à son volet méridional.

Cette problématique était également au cœur de deux ateliers thématiques, relatifs, d’une part, à la préparation du sommet de Riga du Partenariat oriental et, d’autre part, à l’instabilité et aux menaces dans la région du Sud de la Méditerranée et au Proche-Orient.

ii. La réunion interparlementaire de la commission des Affaires étrangères du Parlement européen

La commission des Affaires étrangères du Parlement européen a organisé, le 5 mai 2005, une réunion interparlementaire dont la matinée a été consacrée à la PEV, en présence du commissaire Johannes Hahn.

L’Assemblée nationale y était représentée par M. Guy-Michel Chauveau (SRC), membre de la Commission des Affaires étrangères.

M. Hahn a insisté, en particulier, sur les points suivants :

– la nécessité de bâtir un « partenariat entre égaux », conçu et porté par les deux parties ;

– le caractère non négociable des valeurs européennes, par exemple le refus absolu de la peine de mort ;

– l’intangibilité de l’absence de différenciation entre voisinage Sud et voisinage Est ;

– l’importance de l’essor des sociétés civiles ;

– la complexité du sujet, qui exige de ne pas prendre d’initiatives éparses.

c. Le rapport d’initiative du Parlement européen

Lors de cette réunion interparlementaire, a également été présenté le projet de rapport d’initiative du Parlement européen64, qui doit être adopté en commission des Affaires étrangères le 9 ou le 10 juin 2015 et en séance plénière le 8 juillet 2015. Outre celles relatives à l’appropriation, à la différenciation, à la flexibilité et à la fixation de priorités, le rapporteur, M. Eduard Kukan (PPE, Slovaquie), a mis en avant plusieurs recommandations :

– revenir aux fondamentaux de la PEV, dont l’objectif initial était la création d’un environnement stable, sûr et prospère ;

– instituer un leadership politique, avec deux envoyés spéciaux, respectivement chargés de l’espace oriental et de l’espace méridional ;

– améliorer la coopération avec les autres donateurs et les institutions financières internationales ;

– renforcer la dimension sécurité, en coordonnant davantage la PEV avec la PESC et la PSDC, afin de doter l’Union européenne d’une stratégie géopolitique d’ensemble ;

– distinguer les politiques d’élargissement et de voisinage ;

– mettre la démocratie, l’État de droit et les droits de l’homme au cœur du dispositif, notamment en s’appuyant sur la société civile ;

– promouvoir l’intégration régionale ;

– bâtir des partenariats solides avec les « voisins des voisins ».

d. La réunion ministérielle de Barcelone avec les pays du voisinage Sud

Une réunion informelle des ministres des Affaires étrangères des Vingt-Huit et des huit pays partenaires du voisinage Sud actifs – la Libye et la Syrie étant actuellement hors-jeu compte tenu de leur situation domestique – s’est tenue le 13 avril 2015 à Barcelone, à l’initiative de Mme Federica Mogherini, de M. Johannes Hahn, de la présidence lettone, du ministre des Affaires étrangères et de la coopération espagnol, M. José Manuel Garcia Margallo, ainsi que des secrétaires généraux de la Ligue arabe et de l’Union du Maghreb arabe (UMA). Les ministres des Affaires étrangères de presque tous les pays participants se sont déplacés, excepté Israël, qui était représentée par un secrétaire d’État, afin de ne pas donner prise au mécontentement qu’aurait suscité la présence de M. Avigdor Liberman.

Cette réunion – la première sous ce format depuis 2008 – s’est avérée très utile, à trois égards.

D’abord, elle a donné une visibilité internationale à la thématique de la révision de la PEV.

Ensuite, elle a clarifié les convergences d’intérêt entre les partenaires de l’Union européenne, au point qu’ils envisagent de produire une contribution commune dans le cadre de la consultation publique de la Commission européenne et du SEAE – si aucune déclaration conjointe finale n’a été formulée, c’est que les organisateurs, par crainte d’un échec des discussions, avaient préféré ne pas en prévoir une. Les sept pays arabes ont prévu de se revoir, à Beyrouth, à cet effet, dans un premier temps au niveau technique.

Enfin, en marge de ce sujet prospectif, les participants ont eu des échanges à propos de questions urgentes :

– la coordination dans la lutte contre le terrorisme ;

– la stabilisation politique en Afrique du Nord et au Proche-Orient ;

– la gestion des flux illégaux de migrants en provenance des pays du voisinage Sud ou transitant par leur territoire.

Mme Federica Mogherini a suggéré que de telles réunions soient rééditées chaque année afin de conforter le dialogue euro-méditerranéen.

e. Le futur sommet de Riga du Partenariat oriental

Compte tenu de sa sensibilité aux problèmes des pays ayant acquis leur indépendance à la suite de l’effondrement de l’Union soviétique et n’ayant pas intégré l’Union européenne, la Lettonie a tenu à organiser, durant son semestre de présidence tournante, un sommet du Partenariat oriental, un an et demi après celui de Vilnius des 28 et 29 novembre 2013.

Le sommet de Riga, qui se tiendra les 21 et 22 mai 2015, sera la première réunion de cette dimension intervenant après la signature par l’Union européenne de ses AA avec la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine, mais aussi après la mise sur orbite de l’UEEA. Ce sera, en quelque sorte, le pendant de la réunion ministérielle de Barcelone, pour prendre le pouls des pays du Partenariat oriental à propos de la révision de la PEV.

Ce sommet, dont la préparation a fait l’objet d’un échange de vues à la fin du Conseil Affaires étrangères du 20 avril 2015, sera l’occasion d’évaluer les progrès réalisés dans les relations entre l’Union européenne et ses partenaires orientaux depuis le sommet de Vilnius, ainsi que de définir la marche à suivre et d’esquisser de nouvelles orientations stratégiques à cet égard. Il permettra également, d’une part, de procéder à un premier échange de vues à propos des résultats de l’application provisoire des trois AA et, d’autre part, de renforcer les liens avec l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Biélorussie. De nouveaux projets d’intérêt commun, notamment la création d’un espace économique européen commun, pourraient faire l’objet de discussions.

Lors de la CIP de Riga, le Président de la commission des Affaires européennes de la Saeima, le Parlement monocaméral de la République de Lettonie, a précisé que ce sommet « ne sera pas dirigé contre qui que ce soit, car nous ne pouvons pas adopter une mentalité fondée sur une opposition, nous ne formulerons jamais de déclaration d’hostilité et personne ne pourra utiliser le sommet à ces fins ».

B. LES PROPOSITIONS INSPIRÉES PAR LES TRAVAUX DES RAPPORTEURS D’INFORMATION DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

1. Les travaux préparatoires

La commission des Affaires européennes, depuis le début de la XIVe législature, s’efforce de s’insérer dans les débats européens le plus en amont possible de la prise de décision, en participant à un maximum de consultations publiques de la Commission européenne. Elle a par conséquent jugé essentiel de s’emparer de ce sujet stratégique pour l’avenir de l’Union européenne.

Les rapporteurs ont organisé leurs travaux autour de deux initiatives65.

a. Une table ronde « retour d’expérience »

Premièrement, le 14 avril 2015, une table ronde s’est tenue à l’Assemblée nationale avec des représentants des ambassades de sept pays participant à la PEV, dans deux optiques :

– recueillir des retours d’expérience nationaux à propos des résultats de la PEV déjà engrangés ;

– prendre connaissance des pistes d’améliorations préconisées par les partenaires de l’Union européenne.

Sept ambassades y ont participé, celles de :

– quatre pays du voisinage oriental :

• Azerbaïdjan ;

• Géorgie ;

• Moldavie ;

• Ukraine ;

– trois pays du voisinage méridional :

• Israël ;

• Maroc ;

• Tunisie.

b. Une série d’auditions d’acteurs européens

Deuxièmement, le 16 avril 2015, une série d’auditions a été organisée à Bruxelles, avec :

– trois autorités de l’exécutif européen :

• le secrétaire général exécutif du SEAE ;

• le directeur chargé de la politique d’élargissement et de la stratégie à la direction générale NEAR ;

• la cheffe de cabinet adjointe du commissaire Johannes Hahn ;

– deux fonctionnaires de la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne (RPUE) ;

– deux experts représentant des think tanks.

2. Les propositions des rapporteurs

a. Conserver le périmètre actuel

La première question à se poser est celle du périmètre des pays couverts par la PEV. Une décennie après son découpage, force est de constater qu’il conserve toute sa validité et sa cohérence, dans la mesure où il couvre :

– à l’Est, tous les pays possédant une frontière terrestre ou maritime soit avec l’Union européenne, soit avec un pays reconnu comme candidat à l’adhésion, hormis évidemment la Russie ;

– au Sud, tous les pays côtiers des bordures méridionale et orientale de la Méditerranée, plus la Jordanie, dont le destin est intriqué à celui du reste du Proche-Orient.

L’ambition de resserrer les relations politiques et économiques avec tous nos voisins confrontés au défi du développement et/ou de la démocratisation passe donc par le maintien de ce périmètre. Même la Libye et la Syrie, aujourd’hui en marge de la communauté internationale – pour des raisons différentes66 – ont vocation à réintégrer les institutions de la PEV lorsqu’elles se seront dotées à nouveau d’un pouvoir central ouvert au dialogue diplomatique et adossé sur des structures étatiques stables.

Quant à un élargissement du champ géographique des pays éligibles, il poserait deux difficultés pratiques. S’agissant des moyens, les ressources étant limitées, à enveloppe d’IEV constante – figée dans le CFP 2014-2020 –, le soutien financier, administratif et humain devrait être partagé, donc dispersé, avec le risque de ne plus faire suffisamment levier. Sur le plan institutionnel, l’approfondissement de la PEV serait handicapé par la nécessité de commencer par faire en sorte que les nouveaux entrants rattrapent les étapes précédentes.

La question s’est posée, en particulier, pour la Mauritanie, seul État membre de l’UpM – avec Monaco – à ne relever ni de la politique d’élargissement ni de la politique de voisinage de l’Union européenne, alors que, historiquement, il fait partie du Maghreb. Mais la Mauritanie n’est pas riveraine de la Méditerranée et doit plutôt être, en réalité, rattachée à l’espace sahélien – avec le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad, elle a d’ailleurs créé, le 16 février 2014, une nouvelle association régionale, baptisée « G5 du Sahel ». L’écart de développement avec ce pays est tel que son intégration à la PEV nécessiterait un travail de fond très long et que l’effort financier à son profit limiterait d’autant les ressources à allouer à des pays plus proches. Elle ouvrirait en outre la porte à des demandes similaires de la part d’autres pays du Sahel et la PEV perdrait tout son sens : celle-ci ne doit pas être confondue avec la politique de développement de l’Union européenne, qui relève d’une autre logique et possède un agenda et des outils stratégiques et financiers propres.

b. Ouvrir l’Europe sur les « voisins des voisins »

i. Créer des synergies politiques

Il n’en demeure pas moins que l’Union européenne, sans leur donner d’illusion quant à d’éventuelles perspectives d’éligibilité à la PEV, doit aussi se garder de donner l’impression d’ériger un nouveau mur et s’adresser aux « voisins des voisins ».

Sont concernés non seulement la Russie, sur laquelle se focalise l’intérêt de nos partenaires du Partenariat oriental, mais également les pays d’Asie centrale, du golfe Persique et de la ceinture sahélienne, zones sensibles au regard des défis énergétiques, sécuritaires et migratoires auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés.

Si nombre de ces pays, que l’on pourrait qualifier de « partenaires de second rang » de l’Union européenne, se tiennent très éloignés des standards communautaires, particulièrement en matière de démocratie et de droits humains, ils partagent de multiples intérêts avec l’Europe et certains d’entre eux disposent d’un niveau de ressources financières élevé, dû à la manne des hydrocarbures, et/ou aspirent à jouer un rôle politique régional. Il serait donc utile d’approfondir les synergies politiques avec eux, au cas par cas, en impliquant les pays de la PEV, dans les domaines suivants :

– sécurité ;

– aide au développement ;

– gestion des flux migratoires et de l’accompagnement humanitaire des réfugiés ;

– sécurisation et diversification des approvisionnements énergétiques ;

– développement des échanges commerciaux.

ii. Dialoguer avec les organisations régionales et subrégionales

Cette politique peut également être construite en prenant appui sur les regroupements régionaux ou subrégionaux incluant les États membres de l’Union européenne ou actifs à sa périphérie – surtout lorsqu’ils confédèrent des pays parties prenantes à la PEV et des pays tiers –, qui sont légion :

– Conseil de l’Europe ;

– OSCE ;

– Union africaine (UA) ;

– UMA ;

– G5 du Sahel ;

– Ligue arabe ;

– Conseil de coopération du Golfe (CCG) ;

– Organisation de coopération de Shanghai (OCS) ;

– UEEA.

c. Distinguer clairement partenariat et élargissement

i. Organiser la politique de proximité de l’Union européenne selon trois cercles concentriques

Politiques de voisinage et d’élargissement ont parfois tendance à être mélangées, d’abord par esprit d’escalier administratif, parce qu’elles sont placées sous la responsabilité du même commissaire européen et intégrées dans la même direction générale de la Commission européenne, mais aussi parce que, par le passé, la confusion a été entretenue politiquement. Cela pose surtout problème aujourd’hui pour le Partenariat oriental : la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine, qui ont démontré leur soif d’Europe en paraphant les AA, revendiquent haut et fort leur accession immédiate au statut de candidat à l’adhésion ; les rapporteurs l’ont encore constaté lors de la table ronde « retour d’expérience », à laquelle ces trois pays étaient représentés.

Il faut rappeler le fait qu’un partenariat approfondi avec l’Union européenne n’équivaut pas à un passeport pour l’adhésion. Au demeurant, le Président Juncker a d’ailleurs déclaré à plusieurs reprises qu’aucun nouvel élargissement n’interviendrait durant son mandat, c’est-à-dire dans les cinq prochaines années : le seul rehaussement de statut envisageable est le passage du statut de candidat potentiel à celui de candidat officiel.

La politique de proximité de l’Union européenne doit donc être construite par cercles concentriques, avec des degrés d’intensivité croissants :

– coopération avec les « voisins des voisins » ;

– PEV ;

– négociations d’adhésion avec les pays candidats.

ii. Tenir un discours de vérité

C’est du reste un discours de vérité vis-à-vis de nos partenaires du Partenariat oriental, car les conditions ne sont évidemment pas remplies pour leur adhésion :

– d’abord, ces pays ont encore des efforts à accomplir pour respecter les critères politiques, juridiques et économiques requis ;

– ensuite, cela entérinerait le passage à une PEV à deux vitesses, dans la mesure où, pour sa part, l’opposition à toute perspective d’adhésion des partenaires méditerranéens non européens fait consensus ;

– en outre, dans la période de crise que nous traversons :

• les opinions publiques européennes ne serait pas prêtes à absorber un nouveau choc économique et psychologique consécutif à une adhésion ;

• le budget européen ne serait pas en mesure d’assumer le basculement de ces pays de l’IEV vers l’Instrument d’aide de préadhésion (IAP), qui implique le versement d’aides financières beaucoup plus importantes ;

– enfin, priorité doit être donnée aux pays ayant déjà obtenu le statut de candidat officiel ou potentiel – notamment ceux des Balkans occidentaux –, pour lesquels les négociations s’avèrent déjà délicates.

L’intérêt stratégique de l’Ukraine pour l’Union européenne est certes incontestable ; mais est-il supérieur à celui du Maroc ou de la Tunisie ? De plus, à budget constant, figé par le CFP 2014-2020, une augmentation du soutien financier à l’Ukraine obligerait à verser moins au Maroc ou à la Tunisie.

iii. Viser l’objectif « tout sauf les institutions »

Avant même la redéfinition de la PEV, le sommet de Riga du Partenariat oriental devra être l’occasion de clarifier ce point. L’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie souhaitent que la déclaration finale du sommet soit en retrait de celle adoptée en 2013 à Vilnius, qui avait donné quelques espoirs d’adhésion aux pays les plus volontaires : ils préconisent de ne pas aller au-delà de la lettre des AA, que l’on peut résumer en une formule : « tout sauf les institutions ». Les États membres du Nord et de l’Est veulent au contraire donner de nouvelles perspectives d’adhésion, en introduisant l’idée que les AA ne constituent qu’une étape vers une intégration plus complète et en faisant référence aux « aspirations » – sous-entendu « aspirations à l’adhésion » – des pays du Partenariat oriental. À la veille du sommet, il semble que la position française doive avoir gain de cause, car elle est soutenue par quatre des grands pays de l’Union européenne.

L’article 49 du TUE dispose certes que : « Tout État européen qui respecte les valeurs visées à l’article 267 et s’engage à les promouvoir peut devenir membre de l’Union. » De surcroît, les négociations d’élargissement sont indiscutablement l’instrument de politique étrangère le plus efficace de l’Union européenne car la perspective d’adhésion constitue un puissant moteur de réforme. L’accession au statut de candidat a toujours catalysé le mouvement de démocratisation :

– en Espagne, en Grèce et au Portugal après la chute des régimes militaires fascistes ;

– dans les anciens pays socialistes d’Europe centrale après la levée du rideau de fer ;

– plus récemment dans les jeunes États issus de la Yougoslavie.

Il n’est donc pas question de décourager les peuples des pays du Partenariat oriental en leur fermant définitivement la porte de l’adhésion mais tout milite pour n’envisager une telle perspective qu’à l’horizon de plusieurs décennies. C’est dans ce sens que, lors de la table ronde organisée par les rapporteurs pour prendre connaissance du ressenti des pays participant à la PEV, le représentant de l’ambassade d’Ukraine a déploré un « partenariat sans perspectives » et a appelé de ses vœux la mise sur pied d’une « association prospective ».

d. Maintenir la physionomie unitaire du dispositif

La PEV a été imaginée comme un tout, dont la vocation est de rayonner sur tous les pays du voisinage immédiat de l’Union européenne et ne s’étant pas encore vu accorder le statut de candidat à l’adhésion. L’UpM et le Partenariat oriental ont d’ailleurs vu le jour à la même période, à la fin des années 2000. Il s’agit cependant de deux structures séparées, nées de deux volontés distinctes, correspondant à deux inclinations régionales : celle de la France envers la Méditerranée d’une part ; celle des États membres du Nord et de l’Est de l’Union européenne envers la sphère d’influence russe.

La PEV, comme c’est souvent le cas pour les politiques européennes, procède d’un consensus : en l’occurrence, ne pas opposer le voisinage Sud et le voisinage Est mais au contraire les faire bénéficier de la même attention politique et des mêmes mécanismes de financement et d’accompagnement juridique et administratif. Telle est la doctrine sous-tendant la PEV : il n’y a pas deux voisinages mais un seul.

Il est absolument essentiel de maintenir cette approche unifiée du voisinage, non pas parce que les deux zones régionales qu’elle couvre formeraient un tout homogène – ce n’est d’ailleurs pas vrai non plus au sein de chacune de ces deux zones, notamment en ce qui concerne les niveaux de richesse nationale68 –, mais parce que, de par leur contiguïté avec l’Union européenne, elles méritent le même degré d’intérêt de sa part. Par-delà les accès de fièvre conjoncturels qui mettent tel ou tel pays sous les feux de l’actualité et pourraient inciter à saupoudrer le soutien européen au coup par coup, cette approche, sous le chapeau unique de la PEV, est la plus sage, car elle structure et stabilise la coopération.

Pour la France, très attachée au voisinage Sud, il s’agit d’une question de principe, d’une ligne jaune. Elle n’est pas majoritaire au Conseil ; alliée aux autres États membres méditerranéens de l’Union européenne – Chypre, Croatie, Espagne, Grèce, Italie, Malte et Slovénie, groupe auquel se rattache le Portugal, quoique n’étant pas bordé par la Méditerranée –, elle dispose toutefois d’une minorité de blocage.

Cette unicité de la PEV n’empêche au demeurant pas la Commission européenne de mobiliser sa machine administrative et de doper son aide en faveur d’un pays traversant une crise aigüe, comme elle le fait, à juste titre, avec l’Ukraine69.

Lors de la table ronde organisée par les rapporteurs, les ministres-conseillers des ambassades du Maroc et de la Tunisie ont beaucoup insisté sur cette unicité de la PEV et ont regretté que la Commission européenne ne se soit pas investie avec autant de détermination, dans leurs pays, à la suite des printemps arabes.

e. Adopter une approche pragmatique de la conditionnalité

i. Principes

Les traités enjoignent à l’Union européenne de faire reposer son action extérieure « sur les principes qui ont présidé à sa création, à son développement et à son élargissement et qu’elle vise à promouvoir dans le reste du monde : la démocratie, l’État de droit, l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine, les principes d’égalité et de solidarité et le respect des principes de la charte des Nations unies et du droit international ». Parmi les institutions communautaires, le Parlement européen, surtout, est extrêmement attaché à cette conditionnalité « coopération contre démocratie », systématiquement prônée dans les résolutions à vocation internationale qu’il adopte.

L’Union européenne reste indéfectiblement attachée à la démocratie et au développement de l’État de droit mais elle doit appréhender sa politique de voisinage avec pragmatisme, y compris, d’ailleurs, pour atteindre au final l’objectif d’exportation de ses valeurs. Car les pays du voisinage ont certes besoin de l’Union européenne, mais l’Union européenne a aussi besoin d’eux, en particulier pour assurer sa sécurité et organiser des flux maîtrisés de migration circulaire. Refuser la coopération avec nos voisins les plus en retard du point de vue de l’État de droit et du respect des droits humains mettrait en péril sa stabilité et empêcherait tout dialogue : par conséquent, cette méthode ne fonctionnerait pas et serait même contreproductive à tous égards.

ii. Constat

Pour comparer la situation en matière d’État de droit et de droits de l’homme, dans l’Union européenne d’une part et chez les seize pays partenaires de la PEV d’autre part, les rapporteurs suggèrent de se référer à deux indices d’organisations non gouvernementales :

– l’indice de perception de la corruption de Transparency International ;

– le classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières.

L’examen du meilleur résultat national, du résultat médian et du résultat le moins bon dans chacune des deux zones met en lumière l’ampleur des efforts restant à réaliser chez nos voisins70.

Il convient en outre de rappeler que la peine de mort :

– n’est que suspendue au Liban, au Maroc et en Tunisie ;

– reste en vigueur sans être appliquée en Algérie ;

– reste en vigueur sans être appliquée uniquement pour des faits de crime contre l’humanité et de haute trahison en Israël ;

– reste pratiquée plus ou moins couramment en Biélorussie, en Égypte, en Jordanie, en Libye, dans les Territoires palestiniens et en Syrie.

Quant au statut de Rome, qui définit les règles de fonctionnement élémentaire de la Cour pénale internationale (CPI), à ce jour :

– seules la Géorgie, la Jordanie et la Moldavie l’ont ratifié ;

– la Palestine et la Tunisie y ont adhéré ;

– l’Algérie, l’Arménie, l’Égypte, Israël, le Maroc et l’Ukraine se sont pour l’instant contentés de le signer ;

– l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, le Liban, la Libye et la Syrie ne l’ont pas même signé.

iii. Rester ferme sur les principes en promouvant des politiques favorables au développement économique et à l’essor de la société civile

Pour l’Union européenne, il convient plutôt, dans le cadre de la PEV, de créer les conditions pour être entendue, en promouvant des politiques favorables au développement économique et à l’essor de la société civile. Une piste à explorer est la « spécialisation intelligente », sur le modèle des actions imaginées par l’Union européenne dans le cadre de ses politiques régionales : il s’agit de mettre en adéquation les besoins en emplois et les ressources humaines d’un pays, en investissant dans la formation initiale et professionnelle pour satisfaire les offres de travail de secteurs de niche, par exemple dans le tourisme ou l’agriculture. Seul ce mode de coopération innovant peut enclencher un cercle vertueux entre développement économique et social d’une part, enracinement de l’État de droit de l’autre.

Pour autant, l’Union européenne et ses États membres ne doivent jamais cesser, dans leurs relations avec les pays voisins, de souligner l’importance du partage de leurs principes fondateurs, mais le degré de conditionnalité à leur imposer n’a pas à être aussi élevé que pour les pays candidats à l’adhésion.

f. Accentuer la différenciation politique pays par pays

i. Tenir compte des ambitions et des choix stratégiques des partenaires

La diversité des seize pays partenaires, au sein même des deux blocs géographiques de la PEV, impose cependant une plus grande différenciation.

Depuis la création de la PEV, dans tous les documents stratégiques y afférents, la différenciation politique a d’ailleurs toujours été identifiée comme un enjeu important. Dans la réforme de 2011, la Commission européenne en a fait un de ses trois axes de réorientation, jugeant nécessaire de mieux définir, pays par pays, des objectifs de coopération, notamment à travers les plans d’action nationaux. Les résultats n’ont cependant pas été à la hauteur, parce que la mise en œuvre de ce principe a été effectuée sur seul fondement des performances réalisées : les pays considérés comme les plus méritants au regard des standards communautaires ont reçu davantage.

Sans remettre totalement en cause cette conditionnalité, il convient de dépasser ce système un peu infantilisant et de prendre également en considération les attentes manifestées par chaque partenaire vis-à-vis de l’Union européenne, en respectant leurs ambitions et leurs choix stratégiques souverains, qu’ils soient pris de leur propre chef ou sous la pression d’une autre puissance voisine. Comme l’a très justement fait remarquer l’ambassadeur d’Azerbaïdjan lors de la table ronde organisée par les rapporteurs, « la formule “one size fits all”71 ne convient pas à la PEV ».

ii. Enrichir le contenu du statut avancé

Ce recalibrage de la PEV est essentiel pour que l’Union européenne cesse d’organiser son offre en fonction des espoirs de 2003 : elle doit s’adapter au monde réel de 2015.

Certains pays réclament davantage d’intégration : la Géorgie, le Maroc, la Moldavie, la Tunisie ou l’Ukraine. D’autres désireraient en faire autant mais leur action publique est freinée par les conflits régionaux, qui débordent sur leur territoire : Jordanie ou Liban. D’autres encore veulent continuer de travailler avec l’Union européenne mais sur un pied d’égalité : l’Algérie, l’Azerbaïdjan, l’Égypte ou Israël. D’autres enfin se sont orientés vers une autre affiliation confédérale, qui n’empêche toutefois pas d’envisager certaines formes de coopération : l’Arménie ou la Biélorussie.

Face à cette variété de postures, une relation spécifique doit être instaurée avec chacun de nos voisins. En particulier, le statut avancé dont jouissent les cinq pays de la première catégorie doit être enrichi.

Le commissaire Hahn semble vouloir privilégier cette approche pragmatique et transactionnelle, inspirée par les enjeux économiques – notamment commerciaux et énergétiques – et les intérêts stratégiques de l’Union européenne.

iii. Ne pas opérer de discrimination entre les pays des deux zones de voisinage

La différenciation politique revêt néanmoins deux acceptions différentes selon les États membre de l’Union et les pays partenaires.

Certains y voient le moyen d’établir une discrimination régionale entre pays des deux zones de voisinage, avec d’un côté les pays est-européens, considérés comme nos « voisins européens », et, de l’autre, les pays moyen-orientaux et nord-africains, qui ne seraient que les « voisins de l’Europe ». L’arrière-pensée tactique sous-jacente à cette position idéologique est claire : il s’agit d’établir une ligne de fracture entre les deux aires géographiques afin de légitimer l’adhésion de certains et de faire glisser vers l’Est le barycentre de l’Union européenne.

Selon l’expression employée par le ministre-conseiller de l’ambassade du Maroc lors de la table ronde « retour d’expérience », nos partenaires du Sud déplorent d’être parfois considérés comme « l’autre » par les Européens.

La France défend au contraire une différenciation pays par pays, pour deux raisons, déjà développées :

– premièrement, négliger un flanc de notre voisinage constituerait une erreur stratégique, car les deux constituent des prolongements du territoire de l’Union européenne ;

– deuxièmement, les pays éligibles à la PEV se caractérisent par une très grande hétérogénéité politique et économique au sein même des deux zones géographiques, laquelle s’est d’ailleurs significativement accrue depuis la conception de cette politique, en 2004, et même depuis les prémices de la négociation de l’IEV, en 2010.

g. Rendre les instruments de soutien financier un peu plus flexibles

En corollaire à la différenciation politique, la Commission européenne doit disposer d’une certaine marge de souplesse dans l’utilisation des instruments financiers de la PEV – à commencer par l’IEV – pour répondre à l’évolution dans le temps des besoins manifestés par les pays partenaires, notamment pour se montrer réactive dans son soutien aux pays en proie à une situation politique, économique ou sociale critique, comparable au printemps arabe ou au conflit ukrainien.

Compte tenu de la rigidité du CFP 2014-2020, l’exercice n’est certes pas aisé. La revue à mi-parcours du CFP, d’ores et déjà programmée, pourrait être mise à profit pour adapter l’outil IEV aux besoins. Dans l’intervalle, la Commission européenne semble privilégier une approche médiane consistant à interpréter autant que possible le règlement financier de 2014 et surtout à mobiliser d’autres fonds en parallèle, afin de construire des solutions pratiques en tant que de besoin ; un tel arrangement a surtout été mis sur pied au bénéfice de l’Ukraine72.

Car la prévisibilité budgétaire ne doit pas être sacrifiée sur l’autel de la flexibilité : la conduite de la PEV sur le long terme requiert de suivre de grandes orientations stables et de ne pas transformer l’IEV en outil de réponse aux crises, car ce n’est pas sa vocation première. Pour ce faire, l’Union européenne dispose, rappelons-le, de structures ad hoc comme l’Office humanitaire de la Commission européenne (ECHO73).

h. Ne pas retoucher l’économie générale de l’Instrument européen de voisinage

L’IEV est un outil de financement bien conçu, qui procède d’un compromis subtil obtenu après deux ans et demi de négociations en trilogue dans le cadre de la programmation pluriannuelle 2014-2020. Son réexamen nécessiterait des négociations interminables, ce qui n’est pas dans l’intérêt de l’Union européenne : la révision de la PEV doit donc s’inscrire dans le CFP.

Outre l’équilibre entre subventions accordées au titre d’actions bilatérales et régionales, l’IEV est régi par la combinaison de deux clés de répartition quantitative.

i. Les 10 % fléchés « more for more »

Premièrement, 10 % des crédits sont alloués en fonction du principe « more for more »74.

En 2014, premier exercice budgétaire sous le régime de l’IEV, sur 1,8 milliard d’euros de crédits d’engagement dans le cadre des programmes bilatéraux, 200 millions d’allocations additionnelles ont été attribuées aux pays partenaires au titre de ce fléchage, soit un peu plus du taux théorique de 10 %. Ces sommes ont permis de lancer de nouveaux programmes ou d’étendre le champ et/ou la durée de programmes existants, en phase avec les priorités de l’assistance bilatérale.

Seuls sept pays de la PEV en ont bénéficié, selon la répartition nationale suivante :

– 50 millions pour la Tunisie;

– 40 millions pour l’Ukraine ;

– 30 millions pour la Géorgie ;

– 30 millions pour la Moldavie ;

– 20 millions pour le Maroc ;

– 15 millions pour la Jordanie ;

– 15 millions pour le Liban.

Il est à noter que les crédits « more for more » sont répartis paritairement entre les pays du voisinage oriental et ceux du voisinage méridional.

ii. Deux tiers pour le Sud, un tiers pour l’Est

Deuxièmement, en ce qui concerne la fraction de 90 % restante des programmes bilatéraux et la totalité des programmes régionaux, deux tiers des crédits sont affectés au voisinage Sud et un tiers au voisinage Est, afin de prendre partiellement en compte l’écart démographique entre les deux zones – près des trois quarts de la population des pays partenaires habite l’Afrique du Nord et le Proche-Orient75.

Cette seconde clé de répartition ne figure expressément dans aucun document juridique contraignant de l’Union européenne mais seulement dans un compte rendu de réunion d’un Comité des représentants permanents (COREPER), sous présidence française, en 2008. À l’occasion de la négociation de l’IEV, une bonne partie des États membres et le Parlement européen préconisaient son abandon, au profit d’une conditionnalité plus soutenue ; la minorité de blocage dont disposent les « amis de la Méditerranée » au Conseil en a décidé autrement. Elle est maintenant gravée dans le marbre jusqu’en 2020.

i. Améliorer le taux d’exécution des crédits engagés

Les crédits d’engagement de l’exercice budgétaire 2014 font apparaître une assez bonne application de cette règle des deux tiers / un tiers76 :

– la totalité des sommes engagées au titre des programmes bilatéraux respecte scrupuleusement ces taux ;

– les pays du Sud bénéficient même de 70 % de ce premier sous-total après défalcation des 10 % fléchés « more for more » ;

– par contre, sur le second sous-ensemble, celui des programmes régionaux, ils ne touchent que 60 % des subventions ;

– au total, ils perçoivent 68,3 % des crédits, c’est-à-dire un peu plus que les deux tiers prévus.

Mais les cartes sont rebattues au terme de l’exécution des dépenses. Le tableau de la page suivante met en évidence ce phénomène de déperdition des crédits votés, qui est d’ailleurs à déplorer dans chacune des deux zones de la PEV :

– 63,65 % au Sud ;

– 75,04 % à l’Est.

Celui-ci s’explique par la faiblesse des structures administratives de la plupart des pays partenaires, qui rend difficile la mise en œuvre des crédits. Il ne doit aucunement conduire à revoir le principe ou le mode de répartition de l’aide que l’Union européenne leur apporte, mais au contraire l’inciter à mieux accompagner leur appareil d’État dans la conduite des réformes de bonne gouvernance.

Taux d’exécution budgétaire des crédits de l’IEV
en 2014

(en pourcentage)

PAYS/PROGRAMMES

Taux d’exécution
(en %)

Pays méditerranéens

 

Algérie

125,47

Égypte

79,22

Israël

non significatif

Jordanie

32,26

Liban

53,52

Libye

137,50

Maroc

34,95

Territoires palestiniens

98,13

Syrie

3,26

Tunisie

105,62

Sous-total programmes bilatéraux

67,97

Programmes régionaux

40,51

Total pays méditerranéens

63,65

   

Partenariat oriental

 

Arménie

68,24

Azerbaïdjan

32,38

Biélorussie

117,37

Géorgie

31,37

Moldavie

71,53

Ukraine

129,79

Sous-total programmes bilatéraux

86,70

Programmes régionaux

30,84

Total Partenariat oriental

75,04

   

Coopération transfrontalière

1637,68

   

Erasmus +

97,08

   

TOTAL GÉNÉRAL IEV

70,69

Source : Commission européenne

j. Revoir la procédure des plans d’action et des rapports annuels de suivi

La méthode itérative des plans d’action et des rapports annuels de suivi ne suscite pas l’enthousiasme des pays partenaires de la PEV : ceux-ci jugent qu’elle n’apporte guère de valeur ajoutée par rapport aux accords bilatéraux mais qu’elle induit une conditionnalité politique accrue pesante et des pressions excessives pour l’ouverture des marchés de biens et services. De fait, elle exige de dépenser beaucoup d’énergie bureaucratique et elle manque d’efficacité.

Deux autres axes de réformes préconisées par vos rapporteurs – l’adoption d’une approche pragmatique de la conditionnalité et l’accentuation de la différenciation politique pays par pays – auraient pour conséquence de revoir cette procédure.

Quatre options sont ouvertes :

– abandonner purement et simplement ce système ;

– ne le conserver que pour les pays choisissant de jouer complètement le jeu de la transposition de l’acquis communautaire et y renoncer pour les autres ;

– appliquer des systèmes à géométrie variable selon les choix des partenaires ;

– alléger la procédure pour tous.

k. Encourager l’appropriation par les partenaires

Dans les pays partenaires, la population ignore ce que l’Union européenne investit chez eux, alors qu’elle est souvent le premier bailleur. Pire, ils se montrent généralement critiques : l’Union européenne n’agirait pas pour le développement et voudrait seulement imposer ses valeurs et pénétrer le marché local, sans rien offrir en échange.

La PEV ne peut plus être perçue comme une contrainte extérieure : pour commencer, un travail de communication doit être mené, afin de défendre le bilan de la PEV et surtout d’expliquer la communauté d’intérêt qui lie les peuples de l’Union européenne et de son voisinage.

Ensuite, pour que nos voisins aient moins le sentiment de ne pas avoir prise sur la PEV, il convient de mieux les associer à la définition de ses objectifs et à la conception de ses priorités. C’est du reste ce que la Commission européenne et la haute représentante ont amorcé en les incitant à participer à la consultation publique. C’est aussi la logique des deux initiatives régionales prises sous présidence lettone : le nouveau processus de Barcelone initié le 13 avril 2015 et le futur sommet de Riga des 21 et 22 mai 2015. Et c’est dans cet esprit que vos rapporteurs ont organisé la table ronde avec les représentants des ambassades, au cours de laquelle le ministre plénipotentiaire israélien est allé jusqu’à parler de « nécessité d’une propriété conjointe » à propos de la PEV.

Surtout, la perception de l’Union européenne en général et de la PEV en particulier par les pays de notre voisinage dépend de la capacité à prodiguer des bénéfices rapides et tangibles.

Il n’en reste pas moins que, d’un point de vue institutionnel, l’Union européenne ne traite pas sur un pied d’égalité avec ses partenaires de la PEV, dans la mesure où celle-ci est une politique européenne.

l. Recentrer sur des priorités plus restreintes

i. Les propositions de la Commission européenne

L’appropriation de la PEV par les partenaires passe également par la fixation de priorités générales correspondant à des enjeux communs. Dans leur Livre vert, la Commission européenne et la haute représentante citent une série de thématiques clés, sur lesquelles une coopération est susceptible d’apporter des bénéfices aux deux parties :

– promotion du commerce et du développement économique inclusif et durable, et amélioration des possibilités d’emploi ;

– progrès de la connectivité, notamment dans les domaines des transports et des énergies durables ;

– stabilisation de la situation politique et sécuritaire, à travers la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, et le développement de capacités de gestion conjointe des crises et des catastrophes ;

– renforcement de l’État de droit et de la sécurité juridique, par le biais de la lutte contre la corruption et la fraude, et optimisation de la gestion des finances publiques ;

– amélioration de la mobilité, notamment à des fins éducatives, scientifiques, culturelles, de formation et professionnelles, et lutte contre le trafic d’êtres humains et l’immigration clandestine ;

– action pour la sécurité sanitaire, l’environnement et le climat ;

– renforcement des liens avec les jeunes, y compris au moyen d’échanges dans le domaine de l’éducation et d’autres réseaux.

Parmi ces priorités, outre la question de l’emploi et du développement économique, cheval de bataille central de la PEV, vos rapporteurs considèrent que deux points sont particulièrement cruciaux.

ii. La question des flux migratoires

Lors du Conseil européen extraordinaire organisé le 23 avril 2015 en réaction à la multiplication des naufrages meurtriers de navires chargés de réfugiés dans la Méditerranée, les chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à :

– « tripler au moins » les ressources financières affectées en 2015 et 2016 à leurs opérations de contrôle et de sauvetage coordonnées par l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures FRONTEX, à travers les opérations Triton et Poséidon, conduites respectivement au large de l’Italie et de la Grèce ;

– faire jouer la solidarité européenne vis-à-vis des États membres touchés directement de par leur situation géographique.

En outre, la haute représentante a été chargée de proposer des mesures pour lutter contre l’industrie des passeurs.

La difficulté à traiter cette question met en évidence l’importance d’une meilleure gestion des flux migratoires en direction de l’Union européenne, notamment par le biais de la PEV, nos partenaires du voisinage étant à la fois pays d’origine et pays de transit pour les migrants. Elle inclut les questions de la coopération policière, notamment pour organiser les retours de migrants clandestins, mais aussi celle de la politique des visas à adopter vis-à-vis de chaque pays, qui doit obéir à une méthodologie stricte.

iii. La question de l’énergie

Tous les participants à la table ronde organisée par les rapporteurs avec des représentants des ambassades ont également souligné l’importance des problématiques énergétiques, dans une optique de gestion durable des ressources.

Alors que l’Union européenne commence enfin à réfléchir sérieusement à la construction d’une union de l’énergie afin de sécuriser son approvisionnement et d’améliorer ses interconnexions, elle se doit d’intégrer les pays de la PEV à son schéma. De ce point de vue, les pays du Partenariat oriental comme ceux de l’UpM ont beaucoup à apporter, à travers la montée en puissance du gazoduc transanatolien TANAP ou le développement de l’énergie solaire au Sud.

Par ailleurs, s’agissant de l’action pour le climat, des synergies doivent être mises en place par l’Union européenne dans le cadre de sa PEV. La Conférence Paris Climat 2015, 21e Conférence des parties (CdP 21) à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui se tiendra à Paris du 30 novembre au 15 décembre 2015, sera essentielle pour fixer de nouveaux objectifs contraignants à la communauté internationale en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce qui exige de trouver des convergences entre pays partageant une communauté d’intérêt. Il convient aussi de tirer profit du fait que le Royaume du Maroc s’est vu confier l’organisation de la CdP 22 de 2016 et que le succès des deux événements est lié. Le développement de la collaboration sur ce sujet de l’action pour le climat doit donc constituer un nouveau point fort de la PEV.

m. Renforcer le volet sécurité

M. Javier Solana, qui était le haut-représentant pour la PESC lorsque fut inventée la PEV, ne voulait pas que ces deux politiques soient intégrées. Cinq ans après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et l’abolition du système des piliers, la conception de la nouvelle haute représentante est beaucoup plus intéressante : il n’y a qu’une seule Union européenne ; la dichotomie entre union économique et union diplomatique n’a pas lieu d’être.

Il est indispensable de la refonder sur une réflexion stratégique plus soutenue :

– à l’Est, elle est indissociable du positionnement de l’Union européenne à l’égard de la Russie, l’enjeu consistant à ne pas la laisser se transformer en une « politique anti-Poutine » stérile et risquée ;

– au Sud, elle doit reposer sur une bonne appréciation des défis sécuritaires.

C’est à cette condition que le renforcement du volet sécurité sera envisageable. L’Union européenne, dans son voisinage, sera alors présente sur le front du développement et sur celui de la sécurité, celui-ci étant aujourd’hui essentiellement assumé par les États membres. Elle a en effet vocation à occuper un rôle majeur sur la scène internationale et à intervenir plus efficacement pour contribuer à la résolution pacifique des crises qui enflamment l’aire méditerranéenne et l’espace post-soviétique, qu’il s’agisse :

– de la confrontation israélo-palestinienne ;

– de la montée du péril islamiste dans tout le pourtour méditerranéen ;

– de l’effondrement des structures étatiques dans plusieurs de ses pays ;

– des conflits gelés de Transnistrie, du Haut-Karabakh, d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud ;

– de la sécession illégale de la Crimée ;

– ou de la guerre dans le Donbass.

La plupart de ces crises mettent aux prises des protagonistes pourtant censés être partenaires au sein de la PEV. Rappelons que l’Union européenne est née de la volonté de tourner définitivement la page des conflits de plus en plus violents qui meurtrissaient le continent depuis des siècles. Elle doit s’appuyer sur cette expérience pour aider ses voisins à entrer dans une nouvelle ère de paix, de stabilité et de prospérité.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 19 mai 2015, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé des rapporteurs a été suivi d’un débat.

M. Pierre Lequiller. La politique de voisinage devrait être un instrument politique, permettant de traiter avec flexibilité les problèmes lorsqu’ils surviennent. Je pense par exemple au problème des migrants. L’une des difficultés capitales de la Libye est que deux gouvernements y coexistent, malgré les efforts de rapprochements entrepris par la communauté internationale. N’est-ce pas l’occasion de pratiquer une politique de flexibilité, selon le principe du bâton et de la carotte, en proposant davantage d’aide contre davantage d’efforts, afin d’obtenir une entente entre les deux camps ? Il en va de même pour l’Ukraine : même si la Russie exerce une politique inadmissible à son encontre, ce pays doit se donner les moyens de progresser sur les plans de la démocratie et de la lutte contre la corruption. N’y a-t-il pas matière, là aussi, à une forme de conditionnalité de l’aide, alors que celle-ci donne actuellement l’impression d’être allouée de façon automatique ?

La Présidente Danielle Auroi. Ce sont nos voisins du Sud qui accueillent la majorité des migrants, personnes en grande difficulté et réfugiés ; n’oublions pas que ces pays paient le plus fort tribut à ces déséquilibres.

S’agissant de votre proposition de résolution, à la fin du point 3. k), je suggère que nous ajoutions les mots : « y compris dans sa dimension approfondissement de la démocratie et des droits humains », ce qui irait dans le sens de la remarque de Pierre Lequiller à propos de l’Ukraine.

M. Joaquim Pueyo, co-rapporteur. Je suis tout à fait d’accord avec cet amendement car il ne faut pas oublier la démocratie – dans le corps de notre rapport d’information, nous y consacrons d’ailleurs de longs développements. Mais il convient de se montrer pragmatique et de promouvoir, à cet effet, une politique favorable au développement économique et à l’essor de la société civile.

Les Marocains, notamment, avec lesquels l’Union européenne travaille étroitement, se montrent très intéressés par les questions de développement économique et de maîtrise concertée des flux migratoires, et se disent attachés à la démocratie, sans pourtant en donner la même définition que nous. Dans nos débats avec les partenaires de la PEV, il convient d’être attentifs à cette problématique. Avec des États où les institutions fonctionnent bien, comme le Maroc, la Tunisie ou l’Algérie, il est plus facile de mettre en place une politique de voisinage tout en rappelant en permanence nos valeurs de démocratie et de respect des droits humains ; là où ce n’est pas le cas, comme en Libye, c’est beaucoup plus difficile. Quant à l’Ukraine, il est tout à fait possible de conditionner notre aide en sa faveur car elle vient de signer un Accord d’association avec l’Union européenne.

La Présidente Danielle Auroi. Mon second amendement porte sur le point 3. l) : après le mot : « notamment », remplacer les mots : « sur la question du contrôle des flux migratoires et sur celle de la gestion durable des ressources énergétiques » par les mots : « sur les questions de l’emploi et du développement économique, des flux migratoires et de la mobilité, et de la gestion durable des ressources énergétiques ».

Mme Marie-Louise Fort, co-rapporteure. Cet amendement me semble enrichir utilement la proposition de résolution. Pour aller dans le sens de notre collègue Pierre Lequiller, j’ajoute qu’il est nécessaire de donner à la PEV une dimension plus politique ; nous serions alors moins désarmés en matière de gestion des flux migratoires.

M. Joaquim Pueyo, co-rapporteur. La haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini, se trouve manifestement dans la même disposition d’esprit que nous : à la fois pragmatique et attachée aux valeurs de l’Union européenne comme ligne de conduite.

La Commission a ensuite adopté, à l’unanimité, la proposition de résolution européenne ci-après.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 8, 21 et 22 du Traité sur l’Union européenne (TUE),

Vu les articles 208 à 213 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE),

Vu la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen COM(2003) 104 du 11 mars 2003 : « L’Europe élargie – Voisinage : vers un nouveau cadre pour les relations avec nos voisins de l’Est et du Sud »,

Vu la communication conjointe de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions COM(2011) 303 du 25 mai 2011 : « Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation »,

Vu le règlement (UE) nº 232/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 instituant un instrument européen de voisinage,

Vu le document de consultation conjoint de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité JOIN(2015) 6 du 4 mars 2015 : « Vers une nouvelle politique européenne de voisinage »,

Considérant que la Politique européenne de voisinage souffre d’un certain flou conceptuel, de la tension perpétuelle entre valeurs politiques et intérêts économiques, de la modestie des crédits au regard des enjeux et de lourdeurs bureaucratiques,

Considérant que, après une décennie d’existence, elle ne s’est pas imposée comme antidote à la multiplicité de problèmes institutionnels, politiques, économiques, sociaux, environnementaux, migratoires et sécuritaires dont souffrent les pays de notre voisinage et dont l’Union européenne subit le contrecoup direct,

Considérant qu’elle constitue toutefois un vecteur permanent efficace pour faire avancer, à ses frontières, les valeurs politiques et économiques de l’Union européenne,

Considérant que la crise économique d’une ampleur inédite que celle-ci traverse depuis 2008 réduit ses marges de manœuvre budgétaires et lui donne obligation d’optimiser l’ensemble de ses politiques,

Considérant que les bouleversements politiques récents à nos frontières, dans le Maghreb, dans le Machrek, au Proche-Orient, en Europe orientale et dans le Caucase Sud, à l’origine de l’apparition ou de l’aggravation de plusieurs conflits violents, créent des zones de grande instabilité et sont source d’inquiétude pour l’Union européenne,

1. Estime que l’Union européenne doit s’investir pour penser une Politique européenne de voisinage renouvelée, adaptée au contexte géopolitique et répondant plus efficacement à l’enjeu identifié dès 2003, à savoir la constitution d’une zone de prospérité, de stabilité et de sécurité incluant l’Union européenne et les pays mitoyens ;

2. Prend acte de la consultation publique ouverte par la Commission européenne et la haute représentante, et salue la qualité de leur Livre vert, qui présente un état des lieux clairvoyant de la Politique européenne de voisinage et propose des orientations intéressantes sans fermer la porte à aucune piste de réflexion ;

3. Recommande :

a) que le périmètre géographique actuel de la Politique européenne de voisinage, dont la pertinence est avérée, soit conservé ;

b) que l’Union européenne approfondisse néanmoins, dans des domaines d’intérêt commun, les synergies politiques avec les « voisins des voisins », c’est-à-dire la Russie ainsi que les pays du golfe Persique, du Sahel et d’Asie centrale ;

c) que la distinction entre partenariat et élargissement soit clairement affirmée en toutes circonstances, sans pour autant fermer définitivement à certains pays du voisinage la perspective d’adhésion à l’Union européenne ;

d) que soit maintenue l’unicité de la stratégie de voisinage pour l’ensemble des pays des deux zones, à savoir le flanc méridional et le flanc oriental de l’Union européenne ;

e) que l’Union européenne et ses États membres adoptent une approche pragmatique de la conditionnalité, en misant sur la « spécialisation intelligente » pour mieux faire entendre ses messages relatifs à la question de la démocratie et des droits humains ;

f) qu’une plus grande différenciation politique, pays partenaire par pays partenaire, soit possible, en tenant compte non seulement de leurs performances mais aussi de leurs attentes, afin de tirer le meilleur parti des potentialités de coopération, notamment en enrichissant le contenu du statut avancé ;

g) que l’ensemble des instruments financiers mobilisés dans le cadre de la Politique européenne de voisinage soient relativement flexibles, afin de répondre au mieux aux besoins de chaque pays partenaire, notamment en cas de situation politique, économique ou sociale critique ;

h) que l’économie générale de l’Instrument européen de voisinage, outil de financement bien conçu combinant équilibre entre subventions accordées au titre d’actions bilatérales et régionales, valorisation des progrès réalisés par chaque pays et juste répartition des allocations entre les deux zones géographiques couvertes, ne soit pas pour autant réexaminée ;

i) que l’Union européenne accompagne mieux l’appareil d’État des pays partenaires dans la conduite de leurs réformes de bonne gouvernance, afin d’améliorer le taux d’exécution des crédits engagés ;

j) que la procédure contestée des plans d’action et des rapports annuels de suivi, qui n’a pas fait la preuve de son efficacité, soit revue, voire abandonnée ;

k) que la Commission européenne prenne des dispositions pour promouvoir l’appropriation de la Politique européenne de voisinage par les pays partenaires et leur société civile, y compris dans sa dimension approfondissement de la démocratie et des droits humains ;

l) que la Politique européenne de voisinage soit recentrée sur des priorités plus restreintes, susceptibles d’apporter des bénéfices aux deux parties, notamment sur les questions de l’emploi et du développement économique, des flux migratoires et de la mobilité, et de la gestion durable des ressources énergétiques ;

m) que le volet sécurité de la Politique européenne de voisinage soit renforcé, en s’appuyant sur une refondation de la réflexion stratégique.

DRAFT EUROPEAN RESOLUTION

The National Assembly,

Having regard to article 88-4 of the Constitution,

Having regard to articles 8, 21 and 22 of the Treaty on the European Union (TEU),

Having regard to articles 208 to 213 of the Treaty on the Functioning of the European Union (TFEU),

Having regard to the Communication from the Commission to the Council and to the European Parliament COM(2003) 104 of 11 March 2003: ‘Wider Europe – Neighbourhood: A New Framework for Relations with our Eastern and Southern Neighbours’,

Having regard to the Joint Communication from the European Commission and the High Representative of the European Union for Foreign Affairs and Security Policy to the European Parliament, the Council, the European Economic and Social Committee and the Committee of the Regions COM(2011) 303 of 25 May 2011: ‘A New Response to a Changing Neighbourhood’,

Having regard to the Regulation (EU) nº 232/2014 of the European Parliament and of the Council of 11 March 2014 establishing a European Neighbourhood Instrument,

Having regard to the Joint Consultation Paper of the European Commission and of the High Representative of the European Union for Foreign Affairs and Security Policy JOIN(2015) 6 of 4 March 2015: ‘Towards a New European Neighbourhood Policy’,

In view of the fact that European Neighbourhood Policy suffers from a certain conceptual vagueness, from the ever-present tension between political values and economic interests, from the weakness of the allocations with regard to the issues, and from red-tape,

In view of the fact that after a decade of existence, it has not yet established itself as the solution to the huge number of institutional, political, economic, social, environmental, migratory and security problems facing our neighbouring countries which have a direct impact upon the European Union,

In view of the fact that it nonetheless represents an efficient means to promote, at the boundaries of the European Union, its political and economic values,

In view of the fact that the unprecedented economic crisis which the European Union has gone through since 2008, has reduced its budgetary leeway and has forced it to optimize all its policies,

In view of the fact that the recent political upheavals close to our borders, in the Maghreb, the Mashriq, the Near East, Eastern Europe and the Southern Caucasus, at the origin of the emergence or the worsening of several conflicts, have created hugely unstable areas and are a source of worry for the European Union,

1. Considers that the European Union must make an effort to formulate a new European Neighbourhood Policy which is adapted to the geopolitical context and which provides answers, in a more efficient manner, to the issues which have been identified since 2003, i.e. the setting-up of a zone of prosperity, stability and security which includes the European Union and its neighbouring countries;

2. Notes the public consultation process engaged by the European Commission and the High Representative of the European Union for Foreign Affairs and Security Policy, and salutes the quality of their Green Paper, which sets down a clear-sighted overview of European Neighbourhood Policy and which puts forward useful guidelines without shutting the door on any other avenues of reflection;

3. Recommends that:

a) the current geographical boundaries of European Neighbourhood Policy, which have proved relevant, be maintained;

b) the European Union nonetheless extend its political synergies with ‘the neighbours of our neighbours’, i.e. Russia as well as the countries of the Persian Gulf, the Sahel and Central Asia;

c) the distinction between partnership and enlargement be clearly defined in all circumstances without, at the same time, definitively shutting the doors of membership of the European Union to certain neighbouring countries;

d) a single neighbourhood strategy be maintained for all the countries of the two zones, i.e. the southern side and the eastern side of the European Union;

e) the European Union and its member states adopt a pragmatic approach to conditionality by building on ‘smart specialisation’ in order to better transmit its message in the fields of democracy and human rights;

f) a broader political differentiation, partner country by partner country, be made possible, taking into account not only their performance but also their expectations, in order to take advantage of the potential for cooperation, in particular by enrinching the content of advanced status;

g) the full range of financial instruments mobilized by the European Neighbourhood Policy be relatively flexible so as to answer the needs of each partner country as best as possible, especially in the case of a politically, economically or socially critical situation;

h) the overall scope of the European Neighbourhood Instrument, as a well-constructed financial tool combining the balance between the grants provided on account of bilateral and regional action, the rewarding of the progress made by each country and the correct distribution of allowances given to the two geographical areas concerned, however not be reexamined;

i) the European Union give greater support to the state institutions of the partner countries in the field of reforms concerning better governance so as to enhance the implementation rate of the funds invested;

j) the controversial procedure concerning action plans and annual follow-up reports, which has not proved its efficiency, be reviewed and even dropped;

k) the European Commission take measures to promote the ownership of European Neighbourhood Policy by partner countries and their civil societies, including the deepening of democracy and human rights;

l) European Neighbourhood Policy be recentred on more limited priorities which would be more likely to benefit each of the two parties, especially regarding employment and economic development, migratory flows and mobility, and the sustainable management of energy resources;

m) the security dimension of European Neighbourhood Policy be strengthened, in particular through the rethinking of strategic reflection.

ANNEXES

ANNEXE Nº 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

Service européen pour l’action extérieure (SEAE)

M. Alain Le Roy, secrétaire général exécutif

Commission européenne

M. Simon Mordue, directeur chargé de la politique d’élargissement et de la stratégie, direction générale voisinage et négociations d’élargissement (NEAR)

Mme Emma Udwin, chef de cabinet adjoint du commissaire chargé de la politique européenne de voisinage et des négociations d’élargissement

Mme Lucile Josse, stagiaire ÉNA au cabinet du commissaire chargé de la politique européenne de voisinage et des négociations d’élargissement

Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne

M. Damien Cristofari, conseiller Méditerranée, EuroMed, Proche et Moyen-Orient

Mme Caroline Vinot, conseillère Europe orientale, Asie centrale, OSCE

Diplomates étrangers

• Azerbaïdjan

S.E.M. Elchin Amirbayov, ambassadeur

Mme Nigar Huseynova, conseillère politique

• Géorgie

M. Bessarion Jghenti, premier conseiller

• Israël

M. Zvi Tal, ministre plénipotentiaire

• Maroc

M. Adil Embarch, ministre conseiller

M. Souhail Bouslikhane, conseiller

• Moldavie

M. Lilian Moraru, conseiller

• Tunisie

M. Lotfi Mellouli, ministre conseiller

• Ukraine

M. Roman Toder, conseiller

Think tank

M. Paul Ivan, analyste politique au European Policy Centre (EPC)

M. Vivien Pertusot, responsable du bureau bruxellois de l’Institut français des relations internationales (IFRI)

ANNEXE Nº 2 :
ÉCHANGES COMMERCIAUX ENTRE L’UNION EUROPÉENNE
ET LES PAYS PARTENAIRES DE SA POLITIQUE DE VOISINAGE
EN 2014

Pays

Importations de l’UE
(en millions d’euros)

Exportations de l’UE
(en millions d’euros)

Balance commerciale de l’UE
(en millions d’euros)

Part de l’UE dans les importations*
(en %)

Part de l’UE dans les exportations*
(en %)

Algérie

29 357

23 414

- 5 943

53,4

62,2

Arménie

276

716

440

27,2

32,5

Azerbaïdjan

13 159

3 495

- 9 664

29,5

54,8

Biélorussie

3 430

7 473

4 043

24,1

30,5

Égypte

8 566

16 966

8 400

32,1

32,5

Géorgie

657

1 915

1 259

28,0

20,3

Israël

13 060

17 024

3 964

32,9

28,7

Jordanie

330

3 695

3 365

18,2

3,6

Liban

328

6 563

6 235

12,6

12,0

Libye

12 478

5 330

- 7 148

38,0

73,7

Moldavie

1 160

2 357

1 197

36,8

58,1

Maroc

11 004

18 250

7 246

50,3

63,8

Territoires palestiniens

14

141

127

8,8

1,5

Syrie

89

688

600

4,8

0,7

Tunisie

9 343

11 020

1 677

63,9

71,6

Ukraine

13 758

17 169

3 411

36,2

32,6

Total

117 009

136 218

19 209

   

Source : direction générale Commerce de la Commission européenne

* sur la période janvier-juillet 2014 (sauf Territoires palestiniens : 2013)

ANNEXE Nº 3 :
INDICATEURS DÉMOGRAPHIQUES DES PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE
EN 2014

Pays

Population
(en milliers d’habitants)

Taux de croissance démographique annuel moyen depuis 2000
(en %)

Algérie

37 894

1,8

Arménie

3 017

- 0,5

Azerbaïdjan

9 356

1,2

Biélorussie

9 468

- 0,4

Égypte

86 814

2,2

Géorgie

4 490

0,1

Israël

8 134

1,9

Jordanie

6 675

2,5

Liban

3 780

0,1

Libye*

:

:

Moldavie

3 558

- 0,2

Maroc

33 305

1,2

Territoires palestiniens

4 550

2,9

Syrie*

:

:

Tunisie

11 015

1,0

Ukraine

45 246

- 0,6

Source : Eurostat

* données non disponibles pour la Libye et la Syrie

ANNEXE Nº 4 :
INDICATEURS DE RICHESSE DES PAYS PARTENAIRES DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE VOISINAGE
EN 2014

Pays

PIB par habitant
(en euros)

Taux de croissance du PIB
(en %)

Algérie

4 094

4,0

Arménie

2 744

2,6

Azerbaïdjan

6 510

2,8

Biélorussie

6 162

1,6

Égypte

2 503

2,2

Géorgie

2 712

4,7

Israël

28 507

2,9

Jordanie

4 520

3,2

Liban

7 917

1,8

Libye

6 617

- 19,7

Moldavie

1 636

2,0

Maroc

2 550

3,0

Territoires palestiniens

1 832

- 3,7

Syrie*

:

:

Tunisie

3 277

2,4

Ukraine

2 275

- 7,1

Source : Eurostat

* données non disponibles pour la Syrie

ANNEXE Nº 5 :
CORRUPTION ET LIBERTÉ DE LA PRESSE,
INDICES COMPARÉS
EN 2014

Indice de perception de la corruption
de Transparency International

(notes de 0 à 100, 100 représentant la meilleur note,
et, entre parenthèses, le rang mondial sur 175 pays classés)

 

États membres

UE à 28

Pays partenaires

PEV à 17*

Meilleur indice national

92

(1er)

60

(37e)

Indice national médian

62

(31e)

36

(100e)

Moins bon indice national

43

(69e)

18

(166e)

* données non disponibles pour les Territoires palestiniens

Classement mondial de la liberté de la presse
de Reporters sans frontières

(notes de 0 à 100, 0 représentant la meilleur note,
et, entre parenthèses, le rang mondial sur 180 pays classés)

 

États membres

UE à 28

Pays partenaires

PEV à 18

Meilleur indice national

6,4

(1er)

25,35

(56e)

Indice national médian

16,09

(26e)

39,92

(135e)

Moins bon indice national

31,42

(100e)

77,04

(177e)

1 () La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

2  Voir, en annexe nº 2, le détail des échanges commerciaux de l’Union européenne avec ses partenaires de la PEV.

3  Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen COM(2003) 104 du 11 mars 2003 : « L’Europe élargie – Voisinage : vers un nouveau cadre pour les relations avec nos voisins de l’Est et du Sud ».

4  Voir le II.

5  Voir, en annexe nº 3, la population et le taux de croissance démographique par pays.

6  Voir la section A du II.

7  Décision du Conseil et de la Commission 98/238/CE-CECA du 26 janvier 1998 relative à la conclusion de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République tunisienne, d’autre part (Journal officiel L 97 du 30 mars 1998).

8  Décision du Conseil et de la Commission 2000/204/CE-CECA du 24 janvier 2000 relative à la conclusion de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et le Royaume du Maroc, d’autre part (Journal officiel L 70 du 18 mars 2000).

9  Décision du Conseil et de la Commission 2000/384/CE-CECA du 19 avril 2000 relative à la conclusion d’un accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’État d’Israël, d’autre part (Journal officiel L 147 du 21 juin 2000).

10  Décision du Conseil et de la Commission 2002/357/CE-CECA du 26 mars 2002 relative à la conclusion de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et le Royaume hachémite de Jordanie, d’autre part (Journal officiel L 129 du 15 mai 2002).

11  Décision du Conseil 2004/635/CE du 21 avril 2004 concernant la conclusion d’un accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République arabe d’Égypte, d’autre part (Journal officiel L 304 du 30 septembre 2004).

12  Décision du Conseil 2005/690/CE du 18 juillet 2005 concernant la conclusion de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d’autre part (Journal officiel L 265 du 10 octobre 2005).

13  Décision du Conseil 2006/356/CE du 14 février 2006 concernant la conclusion d’un accord euro-méditerranéen instituant une association entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la République libanaise, d’autre part (Journal officiel L 143 du 30 mai 2006).

14  Décision du Conseil et de la Commission 98/149/CE-CECA-Euratom du 26 janvier 1998 relative à la conclusion de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’Ukraine, d’autre part (Journal officiel L 49 du 19 février 1998).

15  Décision du Conseil et de la Commission 98/401/CE-CECA-Euratom du 28 mai 1998 relative à la conclusion de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldova, d’autre part (Journal officiel L 181 du 24 juin 1998).

16  Décision du Conseil et de la Commission 1999/602/CE-CECA-Euratom du 31 mai 1999 relative à la conclusion de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République d’Arménie, d’autre part (Journal officiel L 239 du 9 septembre 1999).

17  Décision du Conseil et de la Commission 99/614/CE-CECA- Euratom du 31 mai 1999 relative à la conclusion de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République d’Azerbaïdjan, d’autre part (Journal officiel L 246 du 17 septembre 1999).

18  Décision du Conseil et de la Commission 99/515/CE-CECA-Euratom du 31 mai 1999 relative à la conclusion de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part (Journal officiel L 205 du 4 août 1999).

19  Voir le rapport d’information nº 2011 du 10 juin 2014 déposé par la commission des Affaires européennes sur les accords d’association avec l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie et présenté par Mmes Danielle Auroi, Chantal Guittet et M. Jean-Louis Roumegas.

20  Voir les développements consacrés à ces pays dans la section A du II.

21  Voir le 3. de la présente section.

22  Communication COM(2006) 724 du 4 décembre 2006 de la Commission au Conseil et au Parlement européen concernant l’approche générale visant à permettre aux pays partenaires PEV de participer aux travaux des agences communautaires et aux programmes communautaires.

23  European Food Safety Agency.

24  European Centre for Disease Control.

25  European Union Occupational Safety and Health Agency.

26  European Environment Agency.

27  European Asylum Support Office.

28  European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction.

29  European Aviation Safety Agency.

30  Country Framework Protocol for Participation in European Union Programmes.

31  Competitiveness of Enterprises and Small and Medium-sized Enterprises.

32  Technical Assistance and Information Exchange.

33  Jumelage.

34  Communication conjointe de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions COM(2011) 303 du 25 mai 2011 : « Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation ».

35  Règlement (CE) nº 1638/2006 du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 2006 arrêtant des dispositions générales instituant un instrument européen de voisinage et de partenariat (Journal officiel L 310 du 9 novembre 2006).

36  Technical Assistance to the Commonwealth of Independent States.

37  Eastern Partnership Integration and Cooperation.

38  Support to Partnership, Reforms and Inclusive Growth.

39  Règlement (UE) nº 232/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 instituant un instrument européen de voisinage (Journal officiel L 77 du 11 mars 2014).

40  Communication COM(2008) 319/4 du 20 mai 2008 de la Commission au Parlement européen et au Conseil : « Le processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée ».

41  La XIe session plénière de l’AP-UpM vient de se tenir à Lisbonne, les 11 et 12 mai 2015. L’Assemblée nationale y était représentée par M. Bernard Deflesselles (UMP).

42  Joint staff working document SWD(2015) 65 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Egypt: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

43  Voir la section A du III.

44  Voir le 1. a. de la section B du III.

45  Joint staff working document SWD(2015) 72 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Israel: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

46  Joint staff working document SWD(2015) 67 of 25 march 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Jordan: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

47  Joint staff working document SWD(2015) 68 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Lebanon: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

48  European Union Border Assistance Mission.

49  Document de travail conjoint des services SWD(2015) 70 du 25 mars 2015 sur la mise en œuvre de la politique européenne de voisinage au Maroc : les progrès réalisés en 2014 ainsi que les actions à mettre en œuvre.

50  Joint staff working document SWD(2015) 71 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Palestine: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

51  Trans European Mobility Program for University Studies.

52  Document de travail conjoint des services SWD(2015) 73 du 25 mars 2015 sur la mise en œuvre de la politique européenne de voisinage en Tunisie : progrès réalisés en 2014 et actions à mettre en œuvre.

53  Document 8435/09 du Conseil de l’Union européenne.

54  Joint staff working document SWD(2015) 63 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Armenia: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

55  Joint staff working document SWD(2015) 64 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Azerbaijan: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

56  Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline.

57  European Union Training Mission

58  Joint staff working document SWD(2015) 66 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Georgia: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

59  Joint staff working document SWD(2015) 69 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in the Republic of Moldova: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

60  Joint staff working document SWD(2015) 74 of 25 March 2015 on the implementation of the European Neighbourhood Policy in Ukraine: Progress in 2014 and recommendations for actions (document disponible en anglais uniquement).

61  European Union Advisory Mission for Civilian Security Sector Reform.

62  Document de consultation conjoint JOIN(2015) 6 du 4 mars 2015 de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité : « Vers une nouvelle politique européenne de voisinage ».

63  Voir le 2. de la section B.

64  Projet de rapport 2015/2002(INI) du 22 avril 2015 sur la révision de la Politique européenne de voisinage.

65  Voir, en annexe nº 1, la liste complète des personnes entendues.

66  Voir les développements consacrés à ces deux pays dans la section A du II.

67  Respect de la dignité humaine, liberté, démocratie, égalité, État de droit, respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités.

68  Voir, en annexe nº 4, le tableau comparatif des PIB par habitant et des taux de croissance en 2014.

69  Voir les développements consacrés à ce pays dans la section B du II.

70  Voir les tableaux en annexe nº 5.

71  « Une taille unique va à tout le monde ».

72  Voir les développements consacrés à ce pays dans la section B du II.

73  European Commission Humanitarian Office.

74  Voir la section C du I, consacrée aux dotations financières de la PEV.

75  Voir annexe 3.

76  Voir le tableau du 2. de la section C du I.