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arianne

PROJET DE LOI POUR LA CROISSANCE ET L’ACTIVITÉ

Étude d’impact

Tome 1

NOR : EINX1426821L/Bleue-1

10 décembre 2014

Sommaire

TITRE IER – LIBÉRER L’ACTIVITÉ 4

Chapitre IER – MOBILITÉ 4

Article 1 4

Création de l’ARAFER reprenant et élargissant les compétences de l’ARAF 4

Articles 2 à 4 et 7 7

Ouverture à l’initiative privée des services réguliers de transport public routier non urbain de personnes 7

Articles 5, 6 et 7 34

Gouvernance des péages autoroutiers et régulation des marchés sur le réseau autoroutier 34

Article 8 45

Stationnement sur la voie ouverte à la circulation publique à l'abord des gares et des aérogares des véhicules de transport public de particulier 45

Article 9 47

Externalisation de l’épreuve théorique générale du permis de conduire et des épreuves pratiques des diplômes professionnels poids-lourds 47

Chapitre II – Commerce 53

Article 10 53

Urbanisme commercial 53

Article 11 60

Injonction structurelle 60

Chapitre III – CONDITIONS D’EXERCICE DES PROFESSIONS JURIDIQUES RÉGLEMENTÉ 66

Article 12 66

Orientation des tarifs réglementés vers les coûts 66

Article 13 (1° à 3° et 5° du I et II) 73

Postulation et tarifs des avocats 73

Article 13 (4° du I) 77

Simplifier l’ouverture de bureaux secondaires par les avocats 77

Article 14 79

Liberté d’installation des notaires 79

Article 15 79

Liberté d’installation des huissiers de justice 79

Article 16 79

Liberté d’installation des commissaires-priseurs judiciaires 79

Article 17 79

Présence de proximité des offices publics et ministériels 79

Article 18 90

Simplifier le recours au salariat dans les offices publics et ministériels 90

Article 19 94

Habilitation Ouverture et partage gratuit des données du RNCS 94

Article 20 (I) 98

Habilitation Simplifier l’accès aux professions d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire 98

Article 20 (1° du II) 103

Habilitation Création de la profession de commissaire de justice 103

Article 20 (2° du II) 107

Habilitation Clarifier les règles régissant l’activité de ventes judiciaires de meubles 107

Article 20 (III) 111

Habilitation Accès à la profession de greffier de tribunal de commerce 111

Article 21 (1°) 114

Habilitation Définir les conditions d’exercice de la profession d’avocat en entreprise 114

Article 21 (2°) 116

Habilitation Réduire le champ des incompatibilités d'exercice pour la profession d’expert-comptable 116

Article 21 (3°) 118

Habilitation Structures d’exercice pluridisciplinaires de professionnels appartenant à des professions libérales différentes : permettre la constitution de structures d’exercice interprofessionnelles associant des professions juridiques entre elles et des professions juridiques et du chiffre 118

Article 21 (4°) 121

Habilitation Faciliter le recours à la forme de la société pour l’exercice des professions réglementées du droit 121

Chapitre IV – Capital des sociÉtÉs d’exercice libÉral 124

Article 22 124

Habilitation Capital des sociétés d’exercice libéral et des sociétés de participations financières de professions libérales 124

Chapitre V – Urbanisme 129

Article 23 129

Rapport sur la mobilité dans le parc social 129

Article 24 131

Zone de majoration de constructibilité 131

Article 25 (2°) 143

Habilitation Clarifier les mesures sur les rapports locatifs pour soutenir l’investissement 143

TITRE IER – LIBÉRER L’ACTIVITÉ

CHAPITRE IER – MOBILITÉ

Article 1

Création de l’ARAFER reprenant et élargissant les compétences de l’ARAF

1. État des lieux

L’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires (ARAF) « concourt au suivi et au bon fonctionnement, dans ses dimensions techniques, économiques et financières, du système de transport ferroviaire national, notamment du service public et des activités concurrentielles, au bénéfice des usagers et clients des services de transport ferroviaire ». Ses missions, son organisation et ses pouvoirs sont définis au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code des transports, consacrée aux transports ferroviaires et guidés.

Elle assure une mission générale d'observation des conditions d'accès au réseau ferroviaire et s'assure de la cohérence des dispositions économiques, contractuelles et techniques mises en œuvre par les gestionnaires d'infrastructure et les entreprises ferroviaires avec leurs contraintes propres.

Entre autre, l’ARAF :

- émet des avis sur les dispositions régissant le fonctionnement du secteur ferroviaire ainsi que sur le Document de Référence du Réseau (DRR) établi par Réseau ferré de France (RFF). Elle émet un avis conforme sur la fixation des redevances d’infrastructure (les péages) liées à l’utilisation du réseau ferré national. Son avis peut enfin être sollicité sur les décisions de l'Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) ;

- est chargée du règlement des différends qui peuvent apparaître à l'occasion de l'exercice du droit d'accès au réseau et aux prestations associées, notamment entre les entreprises ferroviaires et les gestionnaires d'infrastructure ;

- peut instruire des plaintes en cas de manquements aux règles d’accès au réseau, mener des enquêtes et infliger des sanctions1 ;

- se prononce sur l’impact économique des services ferroviaires d’initiative privée effectués en cabotage sur les services publics organisés par les Autorité Organisatrices de Transports (AOT). C’est sur la base de cette analyse que les AOT peuvent limiter ou interdire le service privé.

Le collège de l’ARAF comprend sept membres dont un président et deux vice-présidents. Les compétences suivantes sont représentées en son sein :

- compétence économique ;

- compétence juridique ;

- compétence technique dans le domaine ferroviaire ou expertise en matière de concurrence.

2. Description des objectifs poursuivis

Le présent projet de loi entend confier trois missions complémentaires à l’ARAF dans le domaine des transports terrestres :

- analyser l’impact des services interurbains réguliers de transport public routier de personnes et proposer des mesures d’interdiction ou de limitation de ces services auprès des AOT ;

- rendre un avis sur les contrats de plan autoroutier afin d’assister l’État dans le cadre de ses négociations avec les sociétés concessionnaires d’autoroute ;

- réguler les marchés passés par les sociétés concessionnaires d’autoroutes en raison de la position de monopole de ces sociétés.

L’enjeu de cette mesure est donc d’adapter l’ARAF à ses nouvelles missions : nom, collège, pouvoirs, enquêtes etc.

Par ailleurs, il s’agit d’un premier pas vers la création d’une autorité multimodale des transports qui contribuerait à l’unification croissante de l’action publique en matière de transports. Cette évolution est cohérente avec des réseaux de transports de plus en plus multimodaux, avec des acteurs toujours plus intégrés.

Elle a été appelée de ses vœux par l’Autorité de la concurrence dans ses avis n° 14-A-05 du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar et n° 14-A-13 du 17 septembre 2014 sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires.

Les justifications de l’intervention sont très directement liées à la nécessité de moderniser le cadre juridique de la régulation des autoroutes, ainsi que celui du transport de personnes par autocar.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La décision de confier de nouvelles missions à une autorité administrative indépendante, ainsi que de la doter de nouveaux pouvoirs est de niveau législatif.

Les caractéristiques du dispositif retenu sont les suivantes :

- modification de l’intitulé de l’autorité, qui devient l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) ;

- modification des règles définissant la composition du collège de l’autorité ;

- extension de la compétence sectorielle de l’Autorité, au-delà du seul secteur ferroviaire, aux domaines : i) autoroutier ii) du transport régulier routier de personnes ;

- octroi à l’Autorité d’une compétence consultative en matière de contrats de plan ou d’avenant ayant une incidence sur la hausse des tarifs de péages ;

- extension des compétences d’enquête, de contrôle et d’intervention de l’Autorité (marchés des SCA, transport régulier routier de personnes).

Toutefois, le dispositif de règlement des différents et la possibilité de prononcer des sanctions administratives resteront spécifiques au secteur ferroviaire.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les particuliers et les entreprises

En ce qui concerne l’impact de la création de l’ARAFER sur les particuliers et les entreprises, il est lié aux nouvelles compétences de cette autorité et à leur exercice vis-à-vis des particuliers et des entreprises.

Plus spécifiquement, les impacts de la création de l’ARAFER dans le cadre de la réforme de la gouvernance des péages autoroutiers et de la régulation des marchés sur le réseau autoroutier, ainsi que dans le cadre de l’ouverture à l’initiative privée du transport public routier non urbain de personnes, sont détaillés au niveau des études d’impact de ces mesures.

Impacts pour les administrations

L’évaluation de la charge de travail induite par l’extension des compétences de l’ARAF pour cette dernière est estimée à 6 équivalents temps plein de catégorie A pour chacun des deux secteurs supplémentaires considérés (autocars et autoroutes).

5. Consultations menées

Il a été procédé formellement aux consultations suivantes :

- Haut Comité de la Qualité de Service dans les Transports (HCQST) ;

- Groupement des Autorités Responsables de Transport (GART) ;

- Association des Régions de France (ARF) ;

- Assemblée des Départements de France (ADF) ;

- Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires (ARAF).

6. Textes d’application et outre-mer

Il est prévu une entrée en vigueur différée de 6 mois après la promulgation de la loi de l’extension du champ de compétence de l’ARAF.

Les adaptations financières nécessité par cette réforme (ressources budgétaires, taxes, redevances, etc.) seront étudiées dans le cadre d’un prochain projet de loi de finances.

Articles 2 à 4 et 7

Ouverture à l’initiative privée des services réguliers de transport public routier non urbain de personnes

1. État des lieux

1.1 Le cadre réglementaire et législatif

1.1.1 Autocars et autobus

La directive 97/27/CE2, définit les autocars et les autobus comme des véhicules de catégorie M2 ou M3 (plus de huit places assises, outre le conducteur3) conçus et construits pour transporter des passagers assis ou des passagers assis et debout. La directive définit 5 classes d’autocars et d’autobus (I, II, III, A et B) en fonction de leur capacité et de la possibilité ou non de transporter des personnes debout.

Le code de la route précise que les autocars sont une catégorie particulière autobus4 : ceux répondant à des caractéristiques définies par arrêté du ministre chargé des transports, affectés au transport de personnes sur de longues distances et permettant le transport des occupants du véhicule principalement en places assises. Toutefois, l’arrêté du 2 juillet 1982 relatif aux transports en commun de personnes, à son article 2, adopte une approche légèrement différente en réservant la dénomination d’autobus au transport urbain :

- les « autobus » sont des véhicules à moteur conçus et aménagés pour être exploités principalement en agglomération. Ils sont équipés de sièges et comportent des espaces destinés à des passagers debout. Ils sont agencés pour permettre les déplacements des passagers correspondant à des arrêts fréquents. Au sens des textes européens, ces véhicules sont dits « de classe I » ;

- les « autocars » sont des véhicules à moteur conçus et aménagés pour le transport en commun de personnes principalement assises. Au sens des textes européens, ces véhicules sont « de classe III », ou « de classe II » lorsqu'ils disposent de places destinées à des passagers debout.

Cet arrêté définit également les autobus et autocars dits « de faible capacité » qui sont ceux qui comprennent entre 8 et 22 places (conducteur non compris) et qui correspondent respectivement aux classes communautaires A et B.

1.1.2 Les services réguliers routiers

La loi d’orientation des transports intérieurs5, désormais codifiée au sein du code des transports, dispose que les services de transport sont organisés par les pouvoirs publics. Ce n’est que par exception, sur des périmètres de services bien définis, que l’initiative privée est autorisée.

S’agissant des services réguliers, qui désignent des services de transport collectif, offerts à la place, et dont le ou les itinéraires, les points d'arrêt, les fréquences, les horaires et les tarifs sont fixés et publiés à l'avance6, les articles L.1221-1 et L.1221-2 du code des transports établissent ainsi un monopole d’institution et d’organisation de l’État et des collectivités territoriales. Les services routiers sont plus spécifiquement décrits en divers endroits du code et par un décret non codifié :

- L’article L. 1231-1 établit le monopole des communes, de leurs groupements ou des syndicats mixtes de transport, dans le périmètre urbain ;

- En dehors de ce périmètre, l’article L. 3111-1 établit un monopole de premier rang au profit des départements ;

- L’article L. 3111-2 précise que les lignes dites « d’intérêt régional » sont du ressort de la région (TER routiers) ;

- L’article L. 3111-3 précise également que les lignes dites « d’intérêt régional » sont du ressort de l’État ;

- Le décret n° 85-897 regroupe les dispositions réglementaires relatives à l’organisation et l’accès au marché du transport routier de personnes (à l’exception du transport public particulier – taxis, VTC).

En première approche, les services interrégionaux sont de la compétence du ministère des transports, les services interdépartementaux à l’intérieure d’une région de la compétence de cette région, les autres services interurbains de la compétence du département et les services urbains du ressort des communes. L’autorité responsable d’un service est dénommée Autorité Organisatrice de Transport (AOT). Toutefois, certaines particularités viennent nuancer cette première approche :

- En Île-de-France, l’article L. 3111-14 rappelle que tous les services réguliers, y compris les services urbains et infra-départementaux, sont organisés par un unique établissement public sui generis, le syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF), qui regroupe les élus régionaux et départementaux mais pas les élus municipaux ;

- Les transports scolaires sont en tout état de cause de la compétence du département, et plus marginalement des autorités urbaines, comme le rappelle l’article L. 3111-7 ;

- L’article L. 2121-3 précise que les services routiers en substitution8 des services ferroviaires sont de la compétence de la région, y compris en dehors de leur ressort9 ; l’article 29 du décret n° 85-891 précité précise d’ailleurs que de tels services de substitution peuvent être d’intérêt régional même s’ils sont infra-départementaux10.

Ces services sont concrètement exécutés, selon les modalités définies par AOT, par des entreprises de transport public de personnes, c’est-à-dire des entreprises disposant d’une licence de transport intérieure dont les conditions d’attribution sont fixées par le décret n° 85-89111 précité.

Par ailleurs, conformément au règlement n° 1073/200912, les transports internationaux peuvent être assurés par des autocaristes privés, à leur propre initiative et indépendamment de toute organisation des pouvoirs publics.

Cet assouplissement du cadre engagé en 1992 a été progressivement renforcé et étendu dans le cadre de la politique communautaire des transports13. En particulier, le chapitre V du règlement susmentionné a remis en cause le principe de non-intervention des acteurs privés en matière d’institution et d’organisation des services réguliers routiers nationaux : il a ouvert à l’initiative privée les services effectués « en cabotage ». En application de ce règlement, depuis le 9 décembre 2009, l’article L. 3421-2 du code des transports14, permet aux autocaristes disposant d’une licence communautaire de transporteur d’assurer des services intérieurs à l’occasion d’un trajet international. Cette possibilité est subordonnée à trois conditions :

1. Le transport national reste accessoire par rapport au transport international, ce qui se caractérise par :

a) L’intégration de la desserte au sein d’un trajet international : en particulier l’autorisation d’une desserte de cabotage est subordonnée à la détention d’une autorisation préalable pour le trajet au sein duquel elle est insérée ;

b) La fixation de seuils maximaux en termes de chiffre d’affaire et de nombre de passagers (article 31-3 du décret n° 85-891 précité).

2. La desserte nationale ne compromet pas l’équilibre économique d’un contrat de service public de transport (routier ou ferroviaire) ;

3. La desserte est « d’intérêt national », dans un sens toutefois légèrement différent de celui utilisé pour définir la compétence de l’État en matière de transport routier : il s’agit15 d’un service concernant au moins deux régions, c’est-à-dire d’une desserte interrégionale. Cette troisième condition n’est pas mentionnée par le règlement n° 1073/2009 ce qui pose la question de sa solidité juridique.

1.1.3 Les services réguliers ferroviaires

Parallèlement aux transports routiers, les transports ferroviaires sur le réseau national16 font l’objet d’une répartition des compétences différente :

- L’article L. 2121-1 dispose que l'État veille à l'organisation des services de transport ferroviaire de personnes d'intérêt national : concrètement, l’État organise ainsi les Trains d’Équilibre du Territoire (TET) et la SNCF organise, sous le contrôle de l’État, les services par TGV ;

- L’article L. 2121-3 dispose que la région organise notamment tous les services ferroviaires, à l’exception de ceux mentionnés ci-dessus17 ; au contraire des services routiers (hors substitution), les régions disposent toutefois d’un cadre juridique leur permettant d’organiser des services ferroviaires interrégionaux (TER ferroviaires) ;

- L’article L. 2121-9 rappelle la compétence générale du STIF en matière d’organisation des transports collectifs en Ile-de-France.

Ces services sont nécessairement exécutés par la SNCF, le cas échéant selon les modalités définies par l’AOT, selon un processus encadré par la loi.

Comme pour le transport routier, le cadre communautaire18 a libéralisé les transports ferroviaires internationaux de voyageurs avec possibilité de cabotage, c’est-à-dire de desserte nationale insérée dans un trajet international. Ainsi, depuis le 8 décembre 2009, l’article L. 2121-1219, au sein d’une section du code des transports intitulée « Services librement organisés », permet, aux entreprises ferroviaires d’assurer des liaisons intérieures. Les conditions d’accès20 sont proches de celles prévues pour le cabotage routier :

- Le transport national reste accessoire par rapport au transport international ;

- La desserte nationale ne compromet pas l’équilibre économique d’un contrat de service public de transport (routier ou ferroviaire).

Ce régime est toutefois différent de celui applicable au cabotage routier : les liaisons infrarégionales sont permises, le professionnel n’est pas soumis à un dispositif d’autorisation administrative spécifique à la liaison nationale et l’analyse de l’impact économique est effectuée par une autorité administrative indépendante (ARAF), non par le ministère des transports21.

1) La situation du marché des services réguliers non urbains de transport de personnes

1° La mobilité intérieure en 2013 (comptes des transports)

La mobilité en France représente, en 2013, près de 990 milliards voyageurs-kilomètres (vg-km), soit une augmentation de 11 % depuis 2000. 83 % de cette mobilité est assurée par les véhicules particuliers22, le solde étant assuré par les transports collectifs.

Au sein des seuls transports collectifs (170 milliards vg-km), une part correspond à des services sur des distances manifestement inadaptées aux autocars. Il s’agit :

- Du transport collectif urbain23 (23 milliards de vg-km) ;

- Du transport scolaire routier (4,2 milliards vg-km) ;

- Du transport privé routier c’est-à-dire « pour compte propre » (1,6 milliards vg-km).

Le solde correspond à des services de portée plus proche de celle des autocars :

- Les TGV (54 milliards vg-km) ;

- Les services occasionnels routiers (25 milliards vg-km) qui correspondent à une offre assez différente des services réguliers24 ;

- Les services d’Ile-de-France non urbains25, d’une longueur typique de 50 km et en tout état de cause inférieure à 150 km (17 milliards vg-km) ;

- Les transports aériens (14,5 milliards vg-km) ;

- Les TER (14 milliards vg-km) ;

- Les services publics par autocars hors Ile-de-France (9 milliards vg-km) ;

- Les TET (7,5 milliards vg-km).

Ainsi, la mobilité intérieure par transport collectif se décompose-elle de la manière suivante : 44 % pour les services organisés par les AOT, 32 % pour le TGV et 24 % pour les services libéralisés (transport privé routier, services occasionnels routier et transport aérien). Le graphique ci-dessous détaille l’évolution des parts modales pour chacune des catégories de transport collectif.


La mobilité via les services réguliers par autocar d’initiative privée, exécutés dans le cadre du cabotage international, n’est pas connue précisément ; elle est en tout état de cause très faible (inférieure à 0,05 %26). Par ailleurs, il n’existe pas, à ce jour, de services intérieurs librement organisés dans le cadre cabotage ferroviaire.

2° Comparaisons internationales

La France, si on la compare aux autres pays européens de grande superficie, se caractérise par une forte mobilité de la population par rapport à son PIB. En particulier, à l’exception de la France et de la Pologne, les seuls pays au-dessus de la moyenne européenne sont de petite taille.

graph2

Ratio mobilité sur PIB en 2012 (indice sans unité)27

Cette mobilité accrue s’accompagne d’un fort recours à la voiture individuelle, supérieure à la moyenne européenne, et significativement plus élevé qu’en Espagne ou en Italie qui disposent de services collectifs routiers très développés. On observe le même phénomène dans une moindre mesure concernant la Suède et la Pologne qui, de longue date, ont dérèglementé ces services.

 

Train

Autocar, autobus

Voiture individuelle

Norvège

4,7%

5,6%

89,7%

Royaume-Uni

8,2%

5,8%

86,0%

Allemagne

9,0%

5,7%

85,4%

France

9,5%

5,4%

85,1%

Finlande

5,3%

9,8%

84,9%

Pologne

4,8%

10,7%

84,6%

Suède

9,1%

6,7%

84,3%

Moyenne UE

7,4%

9,2%

83,3%

Espagne

5,6%

13,7%

80,7%

Italie

6,1%

15,0%

78,9%

Parts modales en 2012 (transport urbain et interurbain)28

3° L’état du marché

L’accès au marché du transport par autocar est réservé aux entreprises de transports publics routiers disposant d’une licence de transport intérieur ou, s’agissant du transport international d’une licence communautaire. Comme précisé ci-dessus, ces entreprises peuvent :

1. Signer une convention avec un département, une région ou l’État afin d’assurer une ligne régulière à des horaires et selon un tarif fixés par les pouvoirs publics. Le service est généralement subventionné. Il existe ainsi en France 371 lignes d’autocars assurées par la SNCF et par des PME françaises29. Ces lignes représentent environ 0,9 % de part modale.

2. Ouvrir, à leur propre initiative, une ligne internationale après avoir reçu l’autorisation, valable 5 ans, du pays du point de départ ou du point d’arrivée. Cette autorisation est accordée pour un service précis (itinéraire, point de départ et d’arrivée, arrêts et horaires). Elle est de droit, ne peut être refusée qu’à des conditions très restrictives30 et est accordée au bout d’un délai de 4 mois31. Quatre acteurs sont présents en France sur ce segment :

a) Le service Megabus (groupe Stagecoach), caractérisé par des prix bas et un service low-cost, présent principalement sur l’axe Londres – Boulogne sur mer/Paris ;

b) Le service Starshipper (PME françaises au sein du groupement Réunir) desservant l’Italie et l’Espagne depuis Lyon ;

c) Le service Eurolines (groupe Transdev), leader européen du marché, qui dessert une soixante de villes française ;

d) Le service iDbus (groupe SNCF), lancé le 23 juillet 2012, positionné sur un segment relativement haut de gamme.

3. Ouvrir, à leur propre initiative, une desserte au sein d’une ligne internationale pour laquelle ils ont déjà obtenu une autorisation (cf. point 2. supra). Il s’agit concrètement de permettre à un autocar qui traverse une frontière de faire monter puis descendre des passagers à des arrêts situés dans un même État-membre, à l’exclusion de tout autre mode d’exploitation plus souple32. L’ouverture de cette desserte est soumise à une autorisation délivrée par le ministère des transports qui est soumise à des conditions restrictives :

a) La desserte est interrégionale ;

b) L’autocariste doit refuser les passagers pour des trajets nationaux si leur nombre, calculé sur l’année, dépasse 50 % du nombre total de passagers33, ; cette règle peut conduire l’autocariste à refuser des passagers en fin d’année ;

c) Elle ne doit pas affecter l’équilibre économique d’un train express régional, d’un train d’équilibre du territoire ou d’une ligne routière subventionnée. Dans la pratique, l’AdlC a estimé que l’appréciation de ce critère était largement discrétionnaire34.

Le délai de délivrance théorique est de 3 mois Dans son avis relatif au secteur35, l’Autorité de la Concurrence (AdlC) cite l’exemple d’un total de 18 mois pour obtenir l’autorisation36 ; il s’agit toutefois d’une situation exceptionnelles, les délais étant souvent bien respectés. Elle souligne également que les décisions de refus sont peu ou mal motivées.

Parmi les quatre acteurs théoriquement possibles, seuls Transdev (Eurolines) et la SNCF (iDbus) proposent de telles dessertes intérieures. Les deux acteurs sont de taille comparable pour un nombre total de voyageurs transportés en 2013 compris entre 600 000 et 800 000. Toutefois, l’activité d’iDbus est quasi exclusivement concentrée sur l’axe Lille-Paris-Lyon quand le service Eurolines dessert une soixantaine de villes. La part modale correspondante est inférieure à 0,05 %.

4° Les entreprises de transport public routier de personnes

Les entreprises de transport public routier de personnes en place, disposant d’une licence37, sont celles qui sont le plus susceptibles d’intervenir en cas d’ouverture du marché des services réguliers interurbains.

À ce jour, le transport de voyageurs par autocar et autobus est dominé par trois groupes français d’envergure internationale qui regroupent environ 50 % du chiffre d’affaire du secteur : Transdev, Keolis et RATP Dev. Ces groupes sont principalement présents dans les métropoles nationales et interviennent également sur le segment ferroviaire (métro, tram, RER).

Aux côtés des majors du transport, figurent également des groupes familiaux de moindre envergure. Lacroix, Faure SAVAC ou encore Philibert sont ainsi présents à l’échelle régionale avec des liaisons régulières entre les espaces ruraux ou périurbains et les zones urbaines. Ils complètent leur activité avec des services occasionnels et assurent généralement un service de ramassage scolaire. Ces groupes coexistent avec un tissu important de près de 5 000 petites structures locales38.

Le secteur représente un chiffre d’affaire (CA) de 5,8 Md€ milliards d’euros et près de 90 000 salariés en 2013, dont près de 75 000 conducteurs. Ces chiffres se répartissent en 2/3 pour les services réguliers, organisés par les AOT, et 1/3 pour les services occasionnels, d’initiative privée et à visée essentiellement touristique. Ces deux segments suivent des évolutions différentes.

L’impact de la crise économique s’est davantage fait sentir dans les transports réguliers (- 7,8 % de CA entre 2011 et 2013) du fait d’une baisse des prix, conséquence de l’augmentation de personnes

Au contraire, les services occasionnels sont en croissance constante, à la fois s’agissant du chiffre d’affaire (+ 1,3 % entre 2011 et 2013) ou du nombre d’entreprises (+ 18 % entre 2008 et 2012).

Au-delà des aspects conjoncturels, le transport routier interurbain de voyageurs bénéficie de solides facteurs sociodémographiques qui soutiennent la demande. Le vieillissement de la population, conjugué à l’amélioration de la santé des seniors, favorise en effet les déplacements en autocars, tant pour les lignes régulières (en milieu rural principalement) que pour le tourisme. En parallèle, le phénomène de « rurbanisation » (installation de ménages autrefois citadins dans des zones rurales ou périurbaines) observé depuis plusieurs années favorise les déplacements interurbains avec une substitution de la voiture vers l’autocar. Ces éléments expliquent la création constante d’emplois dans ce secteur (750 par an pour les services réguliers et 2 000 par an pour les services occasionnels).

Plusieurs travaux ont d’ores et déjà souligné les limitations importantes du cadre réglementaire actuel applicable aux services réguliers par autocar, en contradiction avec le fort intérêt socio-économique de leur développement :

- travaux de la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs39 ;

- rapport final du Contrat d’Études Prospectives des transports routiers, maritimes et fluviaux ;

- avis de l’Autorité de la concurrence n° 14-A-05 du 27 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar ;

- rapport de la Cour des comptes relatif à la grande vitesse – octobre 2014.

Les enjeux du développement des services par autocar apparaissent en effet considérables en matière de :

- développement de la mobilité ;

- report modal de la voiture individuelle vers les transports publics collectifs ;

- développement économique.

Parallèlement, ces derniers devront évoluer en complémentarité des services publics existants, notamment ferroviaires, afin d’éviter toute remise en cause de leur équilibre économique qui pénaliserait in fine les contribuables.

1° Un maillage accru du territoire

Le réseau actuel des dessertes de transport attestent ainsi d’un véritable déficit de l’offre sur les liaisons entre villes moyennes et importantes. Ce déficit résulte à la fois d’un réseau de lignes à grande vitesse relativement peu-dense (cf. carte ci-dessous), du transfert aux régions des services de TET40 et du faible nombre de lignes routières conventionnées par l’État41

TGV – Source : SNCF

De nombreuses liaisons à fort potentiel, comme Lyon-Bordeaux, sont ainsi très mal desservies et imposent quasi systématiquement un passage par Paris.

Exemples de liaisons mal desservies par le train

Liaisons

Distance routière

Service ferroviaire le plus court

Clermont-Ferrand

Périgueux

252 km

Un seul train par jour ayant moins de 2 correspondances (5h00 de trajet et une correspondance).

Clermont-Ferrand

Toulouse

379 km

Tous les trajets prennent au moins 6h00.

Caen

Toulouse

761 km

Passage quasi obligé à Paris avec changement de gare.

Caen

Rennes

185 km

Un seul direct par jour (3h00 de trajet). Flux d’étudiants important entre les deux villes.

Rennes

Rouen

312 km

Passage obligé à Paris avec changement de gare.

Brest

Perpignan

1084 km

Passage obligé à Paris avec changement de gare (ou au moins deux correspondances).

Cherbourg

Nantes

339 km

Trajet de 5h30 avec 2 correspondances ou de 6h30 avec 1 correspondance.

Bordeaux

Lyon

436 km

Passage obligé par Paris (sans changement de gare). Potentiel économique important.

Besançon

Metz

264 km

Minimum 4h00 et une correspondance.

Or, les services réguliers par autocar offrent de réels atouts par rapport aux services ferroviaires en matière de couverture du territoire42 :

- le réseau d’infrastructure (autoroutes, routes nationales et départementales) est dix fois plus long que le réseau ferroviaire, ce qui permet un nombre accru de liaisons ;

- des flux de trafic de bien plus faible densité peuvent suffire à soutenir une exploitation financièrement rentable 43 ;

- la flexibilité d’exploitation des autocars est plus élevée : l’offre peu évoluer plus facilement à la hausse ou à la baisse en fonction des besoins de la clientèle, y compris afin de prendre en compte les variations infra-annuelles.

Les autocars constituent donc un levier puissant de resserrement du maillage des transports collectifs terrestres. Ainsi, l’exemple allemand atteste-t-il non seulement d’une densification des services sur les lignes déjà exploitées mais également de nombreuses créations de dessertes (cf. carte ci-dessous).


Source OCDE44

2° Un élargissement de l’accès au transport

L’article L.1111-2 du code des transports dispose que : « La mise en œuvre progressive du droit au transport permet à l'usager de se déplacer dans des conditions raisonnables d'accès, de qualité, de prix et de coût pour la collectivité, notamment, par l'utilisation d'un moyen de transport ouvert au public. »  

Or, comme le montre le graphique ci-dessous, la mobilité reste très fortement dépendante du niveau de revenu, même si on la limite aux voyages effectués à titre personnel.

Nombre de kilomètres parcourus par personne lors de voyages à longue distance (plus de 80 km) suivant le décile de revenu par unité de consommation (données ENTD 200845)

Un tel constat est cohérent avec l’absence d’une réelle offre bon marché sur les longues distances. En effet, si la tarification des TER reste relativement abordable, tel n’est pas le cas de celle des TGV46. En particulier, l’étude de leur clientèle atteste ainsi d’une réelle segmentation des voyageurs en fonction de leur niveau de revenu et du mode de transport utilisé.

Répartition des déplacements en train (TGV, autres trains et ensemble des trains) suivant le décile de revenu par unité de consommation (Données: ENTD 200847)

En revanche, l’autocar permet, en contrepartie d’un temps de parcours plus long, des prix significativement moins élevés que le TGV.

 

Autocar

Train

AR. Lille-Paris – 4 personnes – Réservation en été 2 jours à l’avance – Arrivée à 19h00 pour l’aller et à 20h00 pour le retour – 2ème classe hors cartes de réductions

Durée d’un trajet

3h00

1h00

Prix total

114€

396€

AR. Lyon-Paris – 4 personnes – Réservation en été 2 jours à l’avance – Arrivée à 23h00 pour l’aller et pour le retour – 2ème classe hors cartes de réductions

Durée d’un trajet

6h30

2h00

Prix total

204€

272€

Autres : accessibilité, confort et flexibilité

- Accessibilité au PMR de tous les véhicules

- Wifi et prises électriques à chaque place

- Échangeable jusqu’à 30 minutes avant le départ

- Prix invariants avec la date de réservation

- Toilettes

- Accessibilité aux PMR selon rame (en cours de déploiement)

- Prises électriques uniquement aux plateformes

- Non échangeable

- Prix très variable en fonction de la date de réservation

- Toilettes

Au-delà de ces exemples, les différences de prix entre les modes de transport ont fait l’objet d’une étude plus systématique de la part de l’Autorité de la concurrence aux paragraphes 133 à 139 de son avis qui confirme ce constat.

L’analyse des profils de clientèles des services routiers existants, en France dans le périmètre du cabotage, ou dans les autres pays d’Europe où ce mode de transport est développé renforce ces conclusions : clientèle jeune ou âgée, à revenus moyens ou modestes (paragraphes 149 et suivants de l’avis de l’AdlC).

Le report modal vers les transports collectifs

Comme précisé ci-dessus, les français utilisent moins les transports collectifs que leurs voisins européens (part modale de 14,9 % en France contre 16,7 % en moyenne). Or l’utilisation excessive des véhicules individuels représente un coût significatif pour la collectivité par rapport aux transports collectifs en termes d’aménagement48, d’environnement et de sécurité.

L’enjeu principal de la mobilité en France est donc l’organisation d’un report modal fondé sur une moindre utilisation des véhicules individuels. À l’échelle urbaine, comme l’a souligné le rapport « Un taxi pour l’avenir, des emplois pour la France », le développement des transports particuliers (taxis, VTC, motos-pros) participe de ce report À l’échelle interurbaine, le développement parallèle des services ferroviaires et routiers permet de réduire significativement l’impact environnemental des transports et d’améliorer la sécurité des personnes.

Les transports collectifs, qu’il s’agisse des autocars ou des trains ont un impact environnemental (émissions de gaz à effet de serre, émissions de particules, bruit) bien moindre que les véhicules individuels.

La comparaison entre l’autocar et le train49 reste beaucoup plus délicate et a fait l’objet de nombreuses études et rapports plus ou moins contradictoires :

- Conférence de l’OMT sur les déplacements écologiques ;

- Étude de l’ADEME50 sur l’efficacité énergétique et environnementale des modes de transports 2008 ;

- Guide méthodologique relatif à l’information CO2 des prestations de transport51 ;

- Analyse économique effectuée par le Commissariat général au développement durable (CGDD) qui évalue le coût pour la collectivité des différentes externalités négatives des transports (Compte des transports en 2011, tome 2).

Ainsi, s’agissant des émissions de gaz à effet de serre, la première étude (OMT) conclut à une très bonne performance de l’autocar (cf. graphique ci-dessus). De même, l’Autorité de la concurrence constate52 que l’étude de l’ADEME rend compte des bonnes performances énergétiques du transport par autocar au regard des TER.

Source : FNTV

A contrario, la SNCF avance les chiffres suivants :

Type de matériel

Émissions d’un voyageur parcourant 1 km

Intercités

10,2 gCO2

TGV, Lyria, iDTGV,OUIGO

3,4 gCO2

TER

30 gCO2

Autocars iDBUS

41,7 gCO2

Enfin, le guide méthodologique relatif à l’information CO2 des prestations de transport mentionne enfin, s’agissant du transport interurbain routier la valeur de 171 gCO2 soit un niveau très supérieur à celui des autocars iDBUS. En effet, ce guide prend en compte l’état du parc actuel, par définition beaucoup plus ancien que celui des d’iDBUS, service lancé en 2012, ou que celui des nouveaux autocars qui interviendraient dans le cadre de l’ouverture du marché.

En définitive, il est vraisemblable que la forte dépendance des résultats avec le taux de remplissage rend toute comparaison hasardeuse, même si on semble pouvoir conclure, s’agissant des émissions de gaz à effet de serre, que :

- à part dans des situations extrêmes, le TGV a un impact environnemental moindre que l’autocar ;

- s’agissant des autres trains, en fonction de la liaison considérée et du taux de remplissage, l’avantage peut aller soit aux autocars soit au mode ferré ;

- en tout état de cause, l’autocar apporte des bénéfices considérables par rapport au transport par voiture individuelle.

Ce constat est d’ailleurs largement confirmé par l’étude des coûts induits effectués par le CGDD et la DG Trésor issue des Comptes de transports susmentionnés. Cette étude valorise financièrement les impacts environnementaux des modes de transport (externalités négatives) ; il s’agit non seulement de l’émission des gaz à effet de serre mais également des autres polluants émis et du bruit induit.

 

TGV

TER

VL53

VL diesel

Autocar

 

Pour 50 passagers

Pour 25 véhicules

Pour 1 véhicule

Environnement

5,5

67,0

34,0

49,0

11,8

CO2

0,5

6,0

16,3

16,3

3,2

Pollution

1,5

57,0

12,5

27,5

7,6

Bruit

3,5

3,5

5,3

5,3

1,0

Équivalence avec un autocar de 50 passagers – Unité : c€/km

La sécurité

Les transports collectifs sont, de manière générale, beaucoup plus sûrs que les véhicules individuels.

S’agissant des autocars, la présence au volant de professionnels de la conduite, dûment formés et dont le temps travail est strictement encadré pour limiter les défaillances liées à la fatigue, est une garantie importante. En effet, outre le permis D, les conducteurs d’autocars sont astreints à une formation initiale particulière et une formation continue qui découle du cadre communautaire54 complétée par des examens médicaux réguliers. En outre, ils ne peuvent conduire plus de 4h30 d’affilée et la durée journalière de conduite ne peut excéder 9h0055. Enfin, ils sont astreints à des limitations de vitesse particulières (90km/h hors agglomération et 100km/h sur autoroute ou voie rapide56).

Ces règles sont vérifiées par des équipements obligatoires à bord du véhicule dont notamment :

- Chronotachygraphe ;

- Limiteur de vitesse .

Il n’existe pas d’étude récente relative comparant la sécurité de l’ensemble des modes de transports. La dernière étude extensive à ce sujet a été menée par le Conseil Européen de la sécurité dans les transports (ETSC), avant le renforcement des règles de sécurité à bord des autocars. Elle atteste d’un taux de décès via les transports terrestres (autocars, autobus et trains) plus de dix fois moindre que pour les véhicules individuels :

Moyen de transport

Passagers tués
par 100 millions de passagers-heures

1999

2001-2002

Motocyclette/cyclomoteur

500

440

Bicyclette

90

75

Déplacement pédestre

30

25

Voiture

30

25

Air (aviation civile)

36,5

16

Navire transbordeur

10,5

8

Autobus et autocar

2

2

Train

2

2

Les éléments chiffrés plus récents, relatifs uniquement aux transports terrestres, ne remettent pas en cause ce constat. Au contraire, les écarts semblent s’être creusés à l’avantage des autocars et des autobus57 :

Source FNTV (d’après la base européenne des accidents de la route).

Enfin, l’analyse économique effectuée par le CGDD (Compte des transports en 2011, tome 2) qui évalue le coût pour la collectivité des différentes externalités négatives des transports fournit des chiffres cohérents avec ce constat. Ce rapport évalue le coût de l’insécurité pour la collectivité aux valeurs suivantes :

 

Train

VL

Autocar

 

50 passagers

25 véhicules

1 véhicule

Sécurité

6,0

72,5

7,4

Équivalence avec un autocar de 50 passagers – Unité : c€/km

Ce tableau confirme l’appréciation initiale, à savoir un niveau faible d’insécurité des transports collectifs terrestres par rapport aux véhicules individuels, sans différences déterminantes entre le train et l’autocar.

L’interaction avec les services publics et les services exploités selon les principes du service public

Les services libéralisés par autocar interviendront dans un contexte où des services publics sont organisés en réseaux par les AOT. Ces services publics sont financés non seulement par le prix du billet mais également par des subventions. Ainsi, des passagers qui délaisseraient les services publics au profit des services de libre initiative conduiraient à une baisse de revenus desdits services au risque de compromettre leur équilibre économique.

Un tel risque est d’ailleurs envisagé par le cadre communautaire qui permet de limiter les services internationaux libéralisés. Le d) du 4 de l’article 8 du règlement  n° 1073/2009 précité permet en effet à un État-membre d’interdire l’ouverture d’une ligne internationale par autocar :

« Sur la base d’une analyse détaillée, le service concerné affecterait sérieusement, sur les tronçons directs concernés, la viabilité d’un service comparable couvert par un ou plusieurs contrats de service public conformes au droit communautaire en vigueur. Dans ce cas, l’État membre établit des critères non discriminatoires permettant de déterminer si le service qui fait l’objet de la demande affecterait sérieusement la viabilité du service comparable susvisé et les communique à la Commission à la demande de celle-ci ».

L’Autorité de la concurrence, dans son avis n° 14-A-05 précité estime également que, du point de vue des passagers, la substituabilité entre les services publics et les services d’initiative privée est réelle. L’appréciation de cette substituabilité conduit à une analyse différenciée en fonction des situations.

1° La concurrence entre autocars publics et autocars d’initiative privée

Comme précisé ci-dessus, les AOT peuvent instituer des services réguliers routiers. Ces derniers, souvent organisés par les régions, interviennent en complément des services ferroviaires. Ils peuvent également constituer un réseau autonome organisé par le département, de manière intégrée avec les transports scolaires58.

Dans ces situations, l’identité du mode d’exploitation entre les services publics et les services privés rend particulièrement prégnante la question de la substituabilité.

Il convient de rappeler que les services publics de transport fonctionnent sur un principe de péréquation entre les lignes, ou sur une même ligne entre les trajets. Aussi, est-il tout à fait envisageable que sur un trajet économiquement rentable, un autocariste privé vienne perturber l’équilibre économique d’autres liaisons, bénéficiant de la péréquation, en venant faire diminuer le trafic sur ce trajet.

2° La concurrence entre services publics ferroviaires et autocars d’initiative privée

La substituabilité entre les services ferroviaires et les services routiers s’établit essentiellement au regard de deux critères :

- Le prix mis en correspondance avec le temps de parcours et les attentes des passagers ;

- La capacité propre à chaque mode.

Les premiers critères sont ceux qui sont classiquement retenus dans les analyses concurrentielles et s’appuient sur les notions de voyageurs « time-sensitive » et « non time-sensitive »59.

Les services par TER et par TET sont exécutés à des vitesses comparables aux services exécutés par autocar. En effet, la plus grande vitesse potentielle des trains60 est largement compensée par un plus grand nombre d’arrêts61, conséquence mécanique du plus grand nombre de passagers pouvant être transportés. Il convient toutefois de noter qu’ils sont moins sensibles aux éventuels aléas sur l’heure d’arrivée, propres à la circulation routière, ce qui peut également être un critère de choix, en particulier pour les trajets professionnels.

L’importance du critère temporel, s’il conduit à une forte substituabilité entre les services par autocars et les services par TER et TET, permet également de conclure à une importance déterminante des points précis de la desserte (départ ou arrivée) : dans une ville de taille moyenne ou importante, le temps de parcours entre la gare ferroviaire et la gare routière, en lien avec la qualité du réseau de transport collectif urbain, est fondamental pour comparer les deux services de transports.

Toutefois, le mode collectif routier est davantage contraint en capacité que le mode ferroviaire, à la fois du fait du nombre de places62 et de la congestion routière. Sur les liaisons à forte densité de trafic ferroviaire, a priori plus intéressantes économiquement pour les autocaristes car elles attestent d’une forte demande en mobilité, l’autocar est peu susceptible de capter une part significative du trafic. A contrario, en cas de moindre densité de trafic, la liaison sera vraisemblablement moins intéressante pour les autocaristes mais l’impact potentiel plus élevé.

En définitive, les conséquences des services d’initiative privée par autocar sur les services publics ferroviaires organisés par les AOT peuvent être ou ne pas être significatives. Seule une analyse liaison par liaison permet d’apporter une appréciation plus fine.

3° La concurrence entre le TGV et les autocars d’initiative privée

Si l’exploitation du TGV est bien soumise aux principes du service public63, les services TGV ne constituent pas des « services couverts par un ou plusieurs contrats de service public » au sens du droit communautaire. En particulier, la France ne pourrait opposer l’atteinte à l’équilibre économique du TGV pour refuser l’ouverture d’une liaison internationale, ou en cabotage, par autocar.

Par ailleurs, le TGV est déjà largement en concurrence avec le transport aérien libéralisé.

Enfin, comme le soulignent tant la SNCF que l’Autorité de la concurrence, ses performances en termes de temps de parcours, la typologie des passagers et sa capacité à transporter simultanément un nombre considérable de passagers le rendent insensible aux services par autocar. Cette appréciation est cohérente avec les choix commerciaux de la SNCF de développer les services d’iDBUS en parallèle de ceux du TGV sur les lignes les plus fréquentées (axe Lille-Paris-Lyon).

En définitive, ces éléments viennent corroborer le constat d’une demande de mobilité à longue distance insatisfaite pour des raisons de coûts.

Le développement économique

Comme décrit ci-dessus, le tissu entrepreneurial du transport routier de personnes est particulièrement complet : il comprend à la fois des leaders mondiaux comme la SNCF ou Transdev, des groupes de moyenne importance, et un tissu très dense de PME. Le contrat d’Étude Prospective des transports routiers, maritimes et fluviaux, a d’ailleurs souligné les impacts positifs en termes d’emploi de l’ouverture du transport interurbain de passagers dans un secteur déjà très dynamique (2750 emplois créés chaque année).

Fort de ses 90 000 emplois et de leur diversité, les entreprises françaises sont particulièrement bien positionnées à la fois afin de répondre à une demande significative de mobilité entre les métropoles nationales mais également à une meilleure desserte des territoires, qui ne peut être assurée qu’avec une connaissance locale des besoins en transport.

Le renforcement de ces acteurs sur le territoire national leur permettra également de mieux se positionner sur le segment des transports internationaux en vue du développement de la mobilité communautaire mais également sur les segments nationaux à l’étranger.

Egalité femmes-hommes

La réforme peut avoir un effet positif sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Les femmes sont les principales usagères des transports en commun, cette mesure sera fortement bénéfique afin de favoriser leurs déplacements, et notamment de celles pouvant avoir des freins à la mobilité.

Au sein de tous les pays d’Europe, les femmes sont moins nombreuses que les hommes à posséder ou utiliser une voiture. En France, 60 % des hommes qui vivent en dehors de la région parisienne ne se déplacent qu'en voiture. Les hommes français n'utilisent les transports en commun que pour 10 % de leurs déplacements, et deux tiers des voyageurs empruntant les transports en commun sont des femmes64.

Les femmes ont plus souvent recours que les hommes aux transports en commun et à la marche65. En tout état de cause, les conditions d’exercice de la mobilité sont très différentes entre femmes et hommes. Au sein des pays développés, les études sur les déplacements comparés des hommes et des femmes tendent à montrer que des différences perdurent puisque les femmes ont des programmes d’activités plus complexes. Elles font plus de déplacements, avec des chaînes plus complexes que les hommes, notamment du fait qu’elles réalisent plus de déplacements qui ne sont pas liés au travail. Dans le même temps, leurs déplacements domicile-travail sont plus courts, leur aire d’accès aux emplois étant souvent plus réduite du fait de leurs contraintes de temps et de leur moindre accès à la voiture individuelle. Cependant, lorsque la contrainte de temps leur permet, elles utilisent plus les transports publics et la marche que les hommes pour des trajets équivalents66. L’accès à des transports en commun avec un panel de choix plus large avec l’autocar devrait donc avoir un impact positif sur l’égalité entre les femmes et les hommes.

Par ailleurs, l’autocar est un moyen de transport privilégié quand on a du temps devant soi, donc qui peut potentiellement bénéficier à la population retraitée. Cette mesure pourrait donc avoir un effet supplémentaire dans la double discrimination constatée concernant l’accès aux moyens de transport des femmes âgées. La majorité des personnes âgées sont des femmes, et les études sur la mobilité des personnes âgées, déjà peu nombreuses, intègrent rarement ces deux variables. Il apparaît des différences entre la mobilité des hommes âgés et des femmes âgées, dans leurs comportements de déplacements, notamment concernant la possession du permis de conduire et l’accès à la voiture. Les différences quant à l’accès à la voiture sont plus marquées pour des générations où l’accès à la voiture des femmes était moins répandu qu’aujourd’hui, si bien que l’utilisation par les femmes de la voiture se fait le plus souvent en tant que passagère. Lorsqu’elles n’ont pas ou plus à leur côté d’homme pour conduire une voiture, elles en sont le plus souvent privées : cela accroît l’isolement des femmes notamment dans les zones rurales et périurbaines.67 Les effets de cette mesure pourront donc aussi se décliner en prenant en compte la variable de l’âge des utilisatrices et utilisateurs.

2. Description des objectifs poursuivis

L’objet de la réforme envisagée est de permettre à des entreprises de pouvoir, de leur propre initiative, assurer des dessertes entre villes françaises et de moderniser et clarifier le cadre juridique applicable aux gares routières.

Cette ouverture du marché vise tout d’abord à développer la mobilité sur le territoire national en complémentarité des services publics existants :

- Renforcement de la mobilité sur les grands axes nationaux déjà desservis, par le développement d’offres alternatives de transport, moins chères que le TGV mais également moins qualitatives (temps de parcours plus long) ;

- Renforcement de la mobilité entre des villes actuellement peu ou mal desservies par les services ferroviaires ;

- Renforcement de la mobilité des classes moyennes et des classes moins favorisées, notamment des plus jeunes et des plus âgés, qui ne disposent pas à ce jour d’offre de transport longue distance adaptée au-delà du périmètre régional ;

- Renforcement de la mobilité par une diversification des horaires de transport proposés, notamment le développement du transport de nuit.

Elle vise également à l’augmentation de la part modale des transports collectifs terrestres dans la mobilité. Ces derniers, qu’ils soient routiers ou ferroviaires, offrent, par rapport à l’utilisation des véhicules individuels mais également des transports non terrestres, des avantages socio-économiques considérables, en termes de sécurité, d’environnement ou de congestion routière.

Par ailleurs, la réforme poursuit un objectif stratégique de développement et de renforcement des acteurs nationaux du transport routier de personnes, particulièrement bien positionnés pour répondre rapidement et efficacement au défi d’une augmentation de la mobilité nationale. Cette croissance permettra à la fois une création d’emplois sur le territoire national et un positionnement renforcé des entreprises françaises sur un marché européen de plus en plus ouvert.

La réforme vise enfin à préserver un haut niveau de qualité des services de transport actuellement organisés par les pouvoirs publics. Il s’agit, en tout état de cause, de donner une priorité à ces derniers par rapport aux services d’initiative privée en interdisant toute remise en cause d’un contrat de service public existant. Cette possibilité d’interdire sera strictement limitée aux cas pertinents, selon un processus administratif qui soit le plus efficace et le plus transparent possible en cohérence avec les engagements du gouvernement en matière de simplification de la vie des entreprises.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Le monopole des pouvoirs publics en matière de transport est établi par la partie législative du code des transports. L’ouverture du marché à l’initiative privée relève donc de la loi.

Le dispositif retenu consiste à permettre à l’ensemble des entreprises de transports public routier de personnes, inscrites au registre national des transports, de pouvoir, sans autorisation ni déclaration administrative, ouvrir un service régulier interurbain. Un régime d’opposition, à l’initiative des Autorités organisatrices de transports (AOT), viendra toutefois tempérer cette liberté. Ce régime sera limité à un objectif de préservation de l’équilibre économique d’un contrat de service public institué par ladite AOT, qui pourrait être affecté par une concurrence frontale du service privé. Les interdictions seront prononcées après avis conforme d’une autorité administrative indépendante, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires, et in fine du juge administratif.

3.1 La définition du périmètre de l’ouverture à l’initiative privée

Le périmètre de l’ouverture du marché est l’ensemble des liaisons interurbaines, à savoir l’ensemble des liaisons nationales possibles à l’exclusion de celle à l’intérieur du périmètre de transport urbain tel que définie à l’article L. 1231-3 du code des transports. Il ne s’agit donc en aucun cas d’intervenir en matière de mobilité urbaine. Afin de prendre en compte la spécificité de l’Île-de-France, au sein de laquelle la notion de services de transport interurbain peut être ambigüe en l’absence d’un périmètre de transport urbain, il est envisagé de préciser que dans cette région, ce seront les lignes supérieures à une distance fixée par décret qui seront dans le champ de l’ouverture ; une distance possible pourrait être 50 kilomètres par analogie avec d’autres pays.

Cette approche se distingue de celle retenue en Allemagne par exemple, qui consistait à ouvrir toutes les lignes d’une distance supérieure à 50 kilomètres. Une telle option aurait défavorisé sans raisons les petites liaisons, pour lesquelles des autorisations sont d’ores et déjà accordées dans le cadre du cabotage.

Il n’a pas non plus été envisagé d’exclure les transports infrarégionaux pour les raisons suivantes :

- Comme précisé ci-dessus, il ne peut être préjugé que les services par autocars auront systématiquement un impact négatif sur les services ferroviaires infrarégionaux ; une telle restriction n’existe d’ailleurs pas dans le cadre du cabotage ferroviaire ;

- Si un potentiel important du développement de l’autocar se situe sur des distances comprises entre 300 et 600 km, qui vont au-delà des distances régionales actuelles, l’optimisation du taux de remplissage des autocars que permettent des dessertes plus courtes peut s’avérer critique pour l’équilibre de la réforme ;

- Une interdiction des dessertes infrarégionales dans le périmètre étendu des nouvelles régions priverait la réforme d’une partie significative de son impact.

 

Anciennes régions

Nouvelles régions

Île-de-France

145

145

Haute-Normandie

154

267

Basse-Normandie

257

Bretagne

274

274

Pays de la Loire

261

261

Poitou-Charentes

211

457

Limousin

166

Aquitaine

327

Midi-Pyrénées

329

432

Languedoc-Roussillon

297

PACA

267

267

Rhône-Alpes

311

404

Auvergne

245

Franche-Comté

196

307

Bourgogne

263

Alsace

180

361

Lorraine

224

Champagne-Ardenne

274

Plus grande distance à vol d’oiseau au sein d’une région (km)

3.2 La définition du périmètre de protection des services publics

La définition de ce périmètre résulte d’un point d’équilibre entre :

1. La nécessaire protection des services publics existants qui comprennent

- des services de compétence régionale ou départementale dans le ressort des anciennes régions, dont les distances typiques sont significativement inférieures à celles figurant dans le tableau ci-dessus68,

- des services interrégionaux de compétences régionales (TER entre régions), de distance comparable69,

- des services interrégionaux de compétence étatique (TET) également de distance comparable70 ;

2. La cohérence avec la répartition des compétences entre AOT, qui peut s’avérer complexe ;

3. La répartition de la mobilité par autocar telle qu’elle peut être estimée71 :

- 7 % entre 50 km et 200 km,

- 13 % entre 200 km et 300 km,

- 10 % entre 300 km et 400 km,

- 12 % entre 400 km et 500 km,

- 58 % au-delà de 500 km.

Compte tenu de ces différents éléments, et dans le contexte d’un changement de périmètre du ressort des régions, le choix d’une protection ciblée pour l’ensemble des dessertes infrarégionales permet de concilier une protection effective des services régionaux, actuels et futurs, sans entraver significativement les impacts positifs de l’ouverture du marché.

Trois possibilités ont alors été examinées :

1. Un régime d’autorisation, qui correspond au régime actuel ;

2. Un régime déclaratif avec une possibilité d’opposition à l’ouverture, qui n’existe pas à ce jour dans le secteur des transports réguliers ;

3. Un régime d’interdiction et de limitation de l’activité ligne par ligne, proche de celui existant pour le cabotage ferroviaire.

Le régime d’autorisation serait source de coûts administratifs inutiles et d’une rigidité excessive dans l’exploitation des lignes. En effet, l’autorisation devrait être incessible et à durée limitée72, ce qui nécessiterait un processus de renouvellement. En outre, tout changement significatif du service (augmentation de fréquence, changement d’horaires), même temporaire, devrait être validé par l’administration. Enfin, il ne permet pas non plus d’appréhender globalement l’ensemble des services d’initiative privée intervenant sur une liaison donnée ce qui peut poser des difficultés : à partir du moment où une entreprise a été autorisée, il est difficile de s’opposer à l’entrée d’une seconde entreprise sur le marché alors même que c’est le cumul d’activité de plusieurs autocaristes qui est le plus susceptible d’affecter le service public.

Dans le contexte du principe du « Silence vaut acceptation », le régime déclaratif se distingue peu du régime d’autorisation dans ses impacts concrets. Au cas d’espèce, il ne permet pas réellement d’en atténuer les inconvénients.

Il a donc été privilégié de s’inspirer du dispositif proche de celui existant en matière de cabotage ferroviaire. Il s’agit de permettre à l’AOT de prendre des décisions d’interdiction ou de limitation des services d’initiatives privée. Ces décisions constitueront un outil efficace aux mains des AOT afin de préserver les services publics. De portée générale, elles permettront de gérer les interventions, successives ou simultanées, de plusieurs entreprises sur une même liaison.

3.3 La mise en œuvre du test économique d’atteinte à l’équilibre d’un service public

La mise en œuvre d’un tel test requiert une certaine technicité et une bonne connaissance à la fois du mode routier et du mode ferroviaire. Il doit par ailleurs être soumis à une exigence d’objectivité et de transparence que ne peuvent assurer les AOT qui sont par définition, « juge et partie ». Par ailleurs, il y a un fort intérêt à ce que cette analyse soit menée de manière cohérente sur l’ensemble du territoire national. La mise en œuvre d’une doctrine claire et prévisible se fera dans l’intérêt de l’ensemble des parties, AOT comme autocaristes.

Dans ces conditions, le recours à une autorité administrative indépendante apparaît adapté. Les compétences ferroviaires de l’ARAF, et la circonstance qu’elle mène d’ores et déjà de tels tests dans le cadre du cabotage ferroviaire, ont motivé le choix de la proposer comme Autorité compétente.

Toutefois, des aspects du processus en vigueur pour le cabotage ferroviaire pourraient poser des difficultés dans le cadre de la réforme en cours. En effet, ce processus consiste, après un test économique de l’ARAF, à interdire un service donné, sur la base d’un projet d’horaires prédéterminés, sans se prononcer sur d’autres conditions d’accès à la ligne.

Il ne donne donc aucune visibilité juridique aux futurs acteurs sur des conditions d’accès qui ne seraient pas dommageables pour les services publics. En outre, comme précisé dans l’analyse de substituabilité supra, il peut y avoir des situations où une interdiction pure et simple de l’autocar serait excessive. L’autocar pourrait tout à fait intervenir en parallèle d’un service public sans dommage, notamment en :

- limitant le service à certains horaires ou certains jours ;

- limitant la capacité maximale (fréquence de passages et nombre de passagers) ;

- combinant les deux limitations ci-dessus.

De telles limitations soulèvent la question de l’absence de discrimination entre autocaristes ; en particulier, si un seuil de capacité maximal est fixé, il sera nécessaire que les règles de limitations soient transparentes, objectives et non discriminatoires.

Pour toutes ces raisons, il est envisagé que les mesures de protection d’un service public sur un tronçon donné soit prononcée après avis conforme de l’ARAF. L’AOT gardera la liberté de mettre en œuvre de telles interdictions : notamment, elle pourra prendre la décision de supporter l’impact économique sur le service qu’elle organise si elle estime qu’il est compensé par l’intérêt pour les usagers que confèrent les services d’initiative privée.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les particuliers

Les particuliers bénéficieront d’une offre de transport collectif plus complète et ils utiliseront moins leur véhicule individuel, avec les bénéfices attendus en termes de sécurité et d’impact environnemental.

En effet, l’évolution constatée de la part modale des services ferroviaires dans d’autres pays européens qui ont déjà libéralisé le marché interurbain par autocar ne permet pas de conclure à une quelconque incompatibilité de l’évolution parallèle de ces deux modes de transports collectifs73:

La comparaison avec la Suède apparaît particulièrement pertinente en raison de la forte part modale du ferroviaire et d’une libéralisation selon des mécanismes proches à ceux qui sont envisagés pour la France.

Compte tenu du niveau de développement des services collectifs routiers dans les pays limitrophes, l’hypothèse d’une part modale à terme de 5 %74 pour les futurs autocars libéralisés parait optimiste mais réaliste. Un simple maintien de la part modale du ferroviaire, sans augmentation, conduirait ainsi à une part des transports collectifs voisine de celle de l’Espagne ou de l’Italie, soit 20 % (10 % ferroviaire, 4 % routier urbain, 1 % routier interurbain public, 5 % routier interurbain privé).

Le gain en termes de pouvoir d’achat pour les ménages pourrait alors être de l’ordre de 800 M€ par an.

L’effet en termes de mobilité additionnelle peut être évalué à 1,25 % si on considère que 25 %75 des passagers par autocar n’auraient pas voyagé en l’absence de ce mode de transport.

Impact pour les entreprises

S’agissant des entreprises exécutant déjà des services publics routiers de personnes, c’est-à-dire des entreprises ayant conclu une convention avec une AOT, elles ne seront affectées qu’à la condition d’une AOT décide de ne pas mettre en œuvre sa capacité à interdire ou limiter les services d’initiative privée en cause. Dans une telle situation, il appartient à l’AOT, conformément aux stipulations de la convention, de compenser l’entreprise.

Ces entreprises, de même que celles qui exercent déjà dans le cadre du cabotage routier, bénéficieront en tout état de cause de la possibilité d’ouvrir de nouveaux services à leur initiative et des débouchés économiques y afférent.

Le groupe SNCF bénéficiera d’une offre de transport complémentaire dans le contexte du développement de sa stratégie intermodale.

Le développement du marché français favorisera significativement l’emploi et le positionnement des entreprises sur le marché international.

Impacts pour les administrations

L’ARAF devra être dotée de nouvelles ressources (cf. étude d’impact relative à l’extension des missions de l’ARAF).

Les AOT locales (régions, voire départements) devront suivre l’évolution des services afin de pouvoir, le cas échéant saisir l’ARAF pour évaluer l’impact sur les services publics dont ils ont la charge.

En revanche, aucune économie substantielle en termes de moyens humains n’est à anticiper au niveau de la Direction générale des infrastructures, du transport et de la mer, ses services continuant d’assurer la délivrance des autorisations internationales (en cabotage ou non).

Impacts juridiques

La réforme envisagée consiste à faire coexister en parallèle des services jusqu’alors sous monopole public et des services d’initiative privée. Elle ne remet pas en cause la compétence d’institution et d’organisation de nouveaux services de transport par les AOT. Au contraire, elle fournit les outils juridiques à ces dernières afin de pouvoir protéger leurs services.

La réforme envisagée va au-delà des obligations du règlement n° 1073/2009 précité en ouvrant à l’initiative privée les services réguliers au-delà du simple cabotage.

Toutefois, il n’est pas envisagé de supprimer l’obligation d’établissement s’imposant actuellement aux entreprises souhaitant exercer la profession de transporteurs publics routiers de personnes en France. En effet, en application des articles 58 et 90 du TFUE76, la liberté de prestation de service en matière de transport s’inscrit dans le cadre d’une politique commune. Cette politique permet aux États-membres de prévoir l’inscription à un registre national pour exercer, sous réserve de ne pas porter atteinte au principe de non-discrimination.

S’agissant des services réguliers routiers, le règlement précité, à ses articles 3 et 14, pose le principe d’un libre accès aux détenteurs d’une licence communautaire aux seuls services suivants :

- Services internationaux ;

- Services en cabotage, c’est-à-dire, les services nationaux intégrés à titre accessoire dans un service international.

Le même règlement précise également, à son article 16 (lecture combinée des paragraphes 2 et 4), qu’aucune discrimination fondée sur le lieu d’établissement ne peut être maintenue concernant les liaisons à desservir. Aussi, le projet de réforme prévoit que les détenteurs d’une licence communautaire pourront, dans le cadre du cabotage, accéder aux mêmes liaisons que les détenteurs d’une licence nationale, et selon les mêmes modalités que ces derniers sous réserve que le service national reste accessoire par rapport au service international.

Les services libéralisés exécutés par autocar seront notamment régis :

- En termes de protection des consommateurs et d’accessibilité : par le règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 concernant les droits des passagers dans le transport par autobus et autocar et modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004, les articles
L.3115-1 à L.3115-3 du code des transports et le code de la consommation ;

- En termes de sécurité des passagers et d’équipements des véhicules : par les dispositions du code de la route et l’arrêté du 2 juillet 1982 relatif aux transports en commun de personnes, transposant les directives 92/6/CEE du Conseil, du 10 février 1992, relative à l'installation et à l'utilisation, dans la Communauté, de limiteurs de vitesse sur certaines catégories de véhicules à moteur et 96/53/CE du Conseil, du 25 juillet 1996 fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international ;

- En termes de réglementation sociale : par le Règlement (CE) n° 561/2006 du Parlement et du Conseil du 15 mars 2006 modifié, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route et les dispositions nationales du code des transports et du code du travail en la matière ;

- En termes d’accès à la profession : par les articles L. 3113-1 à L. 3113-3 du code des transports et le décret n° 85-891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes ;

- En termes de formation des conducteurs : par le décret n° 2007-1340 du 11 septembre 2007 relatif à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules affectés aux transports routiers de marchandises ou de voyageurs transposant la directive 2003/59/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2003 relative à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules routiers affectés aux transports de marchandises ou de voyageurs.

5. Consultations menées

Il a été procédé à la consultation du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN).

Il a également été procédé aux consultations suivantes :

- Haut Comité de la Qualité de Service dans les Transports (HCQST) ;

- Groupement des Autorités Responsables de Transport (GART) ;

- Association des Régions de France (ARF) ;

- Assemblée des Départements de France (ADF) ;

- Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires (ARAF).

6. Textes d’application et outre-mer

Il est prévu une mise en œuvre immédiate pour toutes les mesures qui ne nécessitent par une intervention de la future ARAFER. Dans le cas contraire, l’entrée en vigueur sera différée de six mois après la promulgation de la loi afin de pouvoir doter cette nouvelle autorité des moyens nécessaires à ses nouvelles missions.

7. Conditions d’application Outre-Mer

L’application de la partie du code des transports consacrée au transport routier est précisée aux articles L. 3500-1 et suivants de code.

S’agissant des autres collectivités où le droit métropolitain est applicable de plein droit :

- Les articles L. 3531-1 et L. 3545-1 prévoient une dérogation générale de l’application de cette partie du code des transports à Saint Barthelemy et à Saint-Martin ;

- Les articles L. 3521-5 et L. 3551-5 précisent que les dispositions relatives au cabotage routier, notamment pour le transport de personnes par autocar, ne sont pas applicables à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

S’agissant enfin des collectivités qui n’ont pas fait le choix de cette applicabilité, le code des transports ne prévoit pas de mesure d’extension concernant l’accès du marché par les autocaristes.

La disposition du projet de loi relative à l’ouverture du marché ne modifie pas cette répartition. Ainsi, l’ouverture à l’initiative privée du transport par autocar est-elle envisagée dans l’ensemble des collectivités pour lesquelles le transport par cabotage est d’ores et déjà autorisé c’est-à-dire les départements et régions d’outre-mer à l’exception de Mayotte77.

Mesures d’application

Les mesures d’application seront prises par décret en Conseil d’État, après avis de l’ARAF (article L. 3111-27 du code des transports créés par l’article 18 du projet de loi).

Dispositions du code des transports

Délais d’entrée en vigueur

Mesures d’application

Transport par autocar

L. 3111-17

(ouverture des lignes interrégionales)

Immédiate

Aucune

L. 3111-17

(ouverture des lignes infrarégionales)

Six mois

Définition des termes suivants :

1°/ Liaisons directement desservies par un service régulier

2°/ Compromettre l’équilibre économique

3°/ Limiter ou interdire

L. 3111-18

(saisine de l’ARAF par les AOT et les autocaristes)

1°/ Précisions en termes de procédures

2°/ Précisions sur le contenu des saisines

L. 3111-19

(application en Île-de-France)

Immédiate

Aucune

L. 3111-20

(mission de l’ARAF en matière de transport par autocar)

Six mois

Aucune

L. 3111-21

(rapport de l’ARAF en matière de transport par autocar)

Aucune

L. 3111-22

(Encadrement au test économique)

1°/ Précisions sur la méthodologie à adopter78.

2°/ Précisions sur les motifs.

L. 3111-23

(Encadrement des règles de limitation)

Détail éventuel des règles possibles de limitation. Information des AOT par les autocaristes des services exécutés.

L. 3111-24 à L.3111-26

(renvoi aux dispositions transversales relatives à l’ARAF)

Aucune

Diverses adaptations du code des transports

L. 3421-2

(ouverture des lignes interrégionales en cabotage, après autorisation)

Immédiate

Aucune

L. 3421-2

(ouverture des lignes infrarégionales pour le cabotage, après autorisation)

Six mois

Révision des règles applicables pour contrôler le caractère accessoire du service en cabotage par rapport au service international.

L. 3452-6

(sanctions pénales en cas de manquement par un autocariste aux règles d’interdiction ou de limitation)

Aucune

Articles 5, 6 et 7

Gouvernance des péages autoroutiers et régulation des marchés sur le réseau autoroutier

1. Etat des lieux

Le réseau autoroutier est essentiellement79 fondé sur le principe de la concession de la construction et de l’exploitation des autoroutes, organisé par l’article L. 122-4 du code de la voirie routière et par l’ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics.

1.1. État du droit applicable pour les péages

Le droit des sociétés concessionnaires à percevoir le péage en contrepartie de la construction, de l’extension, de l’entretien et de l’exploitation de leur réseau constitue le fondement du contrat de concession autoroutière. Les péages constituent la quasi-totalité des ressources des sociétés concessionnaires d’autoroute (SCA). Aux termes de l’article L.122-4 du code de la voirie publique, ils visent à assurer la couverture totale ou partielle des dépenses de toute nature liées à la construction, à l’exploitation, à l’entretien, à l’aménagement ou à l’extension de l’infrastructure, ainsi que, dans le cas des délégations de missions du service public autoroutier, la rémunération et l’amortissement des capitaux investis par le délégataire.

Les règles applicables à la fixation des péages autoroutiers découlent des dispositions croisées des cahiers des charges annexés aux conventions de concession et du décret n° 95-8180 et peuvent différer selon qu’un contrat de plan quinquennal a été signé ou pas :

- de manière générale, les tarifs de péage sont fixés par la SCA, dans le respect des dispositions du cahier des charges annexées à sa convention de concession. Ils sont soumis préalablement à leur entrée en vigueur aux ministres chargés de la voirie nationale et de l’économie, qui ont la responsabilité de contrôler le respect des dispositions contractuelles par ces tarifs. En cas de non-respect d’une disposition contractuelle, ils peuvent mettre en demeure les SCA de modifier leurs tarifs ; 

- en l’absence de contrat de plan et dans le cas où la loi d’évolution des tarifs de péage est définie de manière univoque dans le cahier des charges, les tarifs de péage sont publiés par arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de la voirie nationale ;

- en l’absence de contrat de plan et dans le silence du contrat en ce qui concerne la loi d’évolution des tarifs de péage, ceux-ci sont fixés par arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de la voirie nationale, la SCA ayant droit à une hausse minimale de 70% de l’inflation ;

- lorsqu’un contrat de plan a été signé81, les tarifs des péages ne font l’objet d’aucune publication de la part du Gouvernement ;

- lorsque les tarifs de péage ne respectent pas les dispositions du cahier des charges annexées à sa convention de concession sont fixés par arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de la voirie nationale, dans le respect de la loi d’évolution des tarifs inscrite au cahier des charges.

En ce qui concerne les sociétés concessionnaires historiques, les hausses tarifaires des péages autoroutiers résultent ainsi, d’une part d’un principe de revalorisation des tarifs de péage à un niveau au moins égal à 70 % de l’inflation afin d’assurer l’équilibre économique de la concession et d’autre part d’un complément négocié périodiquement entre l’État et les SCA en contrepartie de la réalisation d’aménagements et d’ouvrages complémentaires non prévus à la convention de concession.

1.2. État du droit application pour les marchés des SCA

Les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) sont soumises à trois types d’obligations en ce qui concerne leurs marchés de travaux, de fournitures et de services :

- les dispositions du chapitre 3 du titre II du décret n° 2010-406 du 26 avril 2010 relatif aux contrats de concession de travaux publics et portant diverses dispositions en matière de commande publique (en application du 3° du II de l'article 12 de l'ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics), qui s’appliquent à l’ensemble des SCA privées ;

- les dispositions de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics et du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 modifié pris pour l’application de son article 3, qui s’appliquent aux SCA publiques ;

- certaines dispositions contractuelles (article 6 du cahier des charges des concessions), qui renforcent les obligations de mise en concurrence et de publicité en ce qui concerne les anciennes SEMCA ou qui précisent les modalités d’application des dispositions réglementaires en ce qui concerne ATMB et SFTRF.

Régime juridique

Sociétés concernées

Chapitre 3 du titre II du décret n° 2010-406

(publicité et mise en concurrence des marchés de travaux d'un montant égal ou supérieur à 4.845.000 € HT, sauf si passés avec une entreprise liée)

COFIROUTE : 12 % du réseau, 14 % du CA du secteur

ADELAC, ALBEA, ALICORNE, A’LIENOR, ALIS, ARCOUR, ATLANDES, CEVM : 6 % du réseau, 6 % du CA du secteur

Ordonnance n° 2005-649

(publicité et mise en concurrence des marchés de travaux, de fournitures et de services au-delà de certains seuils)

ATMB, SFTRF : 12 % du réseau, 3 % du CA du secteur

Dispositions contractuelles dérogatoires au décret n° 2010-406

(publicité et mise en concurrence des marchés de travaux dépassant le seuil de 2 millions d’euros HT et pour les marchés de fournitures et services dépassant le seuil de 240.000 € HT)

APRR, AREA, ASF, ESCOTA, SANEF, SAPN : 80 % du réseau, 77 % du CA du secteur

À l’exception de COFIROUTE, l’article 6 du cahier des charges des SCA fait référence au décret n° 2005-174282 dont les règles sont donc applicables aux marchés de travaux, de fournitures et de services passés par les SCA. Les obligations de ce décret sont applicables pour leurs marchés de travaux d’un montant supérieur au égal à 2 M€ millions d’euros HT et pour leurs marchés de fournitures et de services d’un montant supérieur ou égal à 240. 000 € euros HT. Bien que définies par référence à un décret, ces règles sont d’origine contractuelle ; en particulier, une modification du décret serait sans effet sur les obligations pesant sur les SCA83.Le décret n° 93-58484 a par ailleurs institué au sein de chaque SEMCA une commission d’appel d’offres devenue en 2001 commission consultative des marchés du concessionnaire (CCMC). Lors de la privatisation, le principe de ces commissions a été introduit dans le cahier des charges annexé au contrat de concessions des SEMCA devenues SCA privées, ainsi que pour les SCA publiques.

La Commission Nationale des Marchés des sociétés concessionnaires d’autoroutes et d’ouvrage d’art (CNM) a été instaurée par le décret n° 2004-8685. La CNM est chargée du contrôle des marchés de huit sociétés concessionnaires d’autoroutes ou d’ouvrages d’arts. Il s’agit des six sociétés privatisées : APRR, AREA, Sanef, SAPN, ASF et ESCOTA ainsi que des deux sociétés à capitaux majoritairement publics : ATMB et SFTRF. Le secrétariat de la CNM est assuré par la Direction des Infrastructures de Transport. La CNM a vu ses missions élargies depuis la privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes, par le décret n° 2007-94086. Elle contrôle désormais :

- la composition et le fonctionnement des commissions des marchés instituées par les sociétés concessionnaires ;

- les règles définies par celles-ci pour la passation et l’exécution des marchés de travaux, de fournitures et de services ;

- le respect des règles qui leur sont applicables pour la passation et l’exécution de leurs marchés.

La CNM peut désormais, après accord des ministres chargés de la voirie nationale et de l’économie rendre publics les avis qu’elle émet et les recommandations qu’elle formule. Elle peut également examiner tout marché passé par les sociétés, entendre leurs dirigeants et faire appel à des experts. Enfin, la CNM établit un rapport annuel, pouvant lui-même être rendu public.

Les enjeux d’une bonne régulation du secteur autoroutier sont à la mesure de son poids économique. Ce secteur, qui réunit au total 17 entreprises pour un effectif salarié d’environ 15 000 personnes, représente un chiffre d’affaire cumulé de 8,8 Md € HT87, dont la répartition par SCA est rappelée dans le tableau ci-dessous.

GROUPES

SOCIÉTÉ CONCESSIONNAIRE D’AUTOROUTE

NATURE

CA 2013 (M€)

FIN DE CONCESSION

CONTRAT de PLAN

VINCI

ARCOUR (SA 2005)

Privée

43,5

31/12/2070

n

ASF (SA 1957)*

Privée

2628,2

31/12/2033

2012-2016

ESCOTA (SA 1956)*

Privée

680,6

21/21/2027

2012-2016

COFIROUTE*

Privée

1241,4

31/12/2031

2010-2014

Tunnel Duplex A86 (COFIROUTE)

Privée

-

31/12/2086

n

ABERTIS

SANEF (SA 1963)*

Privée

1100,1

31/12/2029

2010-2014

SAPN (SA 1963) *

Privée

367,0

31/12/2028

n

ALIS (SA 2001)

Privée

57,9

31/12/2067

n

A’LIENOR (SAS 2006)

Privée (65% Eiffage / 35% SANEF)

42,7

18/12/2066

n

EIFFAGE

Viaduc de Millau (CEVM)

Privée

38,3

31/12/2079

n

APRR (SA 1961)*

Privée

1579,3

31/12/2032

2014-2018

AREA (SA 1970)*

Privée (APRR)

521,4

31/12/2032

2014-2018

ADELAC (SAS 2005)

Privée

(49,90 % AREA)

41,3

31/12/2063

n

Autres

ALICORNE (SAS 2008)

Privée

11,7

23/08/2063

n

ATLANDES

Privée

256,4 

21/01/2051

n

ATMB (SA 1956)

Publique

172,1

31/12/2050

2010-2014

Projet 2015-2019

SFTRF (SA 1962)

Publique

110,8

31/12/2050

2012-2016

ALBEA (A 150 – mise en service prévue au printemps 2015)

Privée

-

55 ans à compter de la mise en service

-

1° Les négociations entre l’État et les SCA

Les règles d’évolution des tarifs de péage sur la durée de la concession sont fixées par les cahiers des charges annexés aux conventions de concession. En ce qui concerne les sociétés concessionnaires historiques, l’État et les sociétés concessionnaires d’autoroute négocient tous les cinq ans des hausses des tarifs de péages plus dynamiques en contrepartie de la réalisation d’aménagements et d’ouvrages complémentaires, non prévus à l’origine dans le contrat de concession ou hors de leurs obligations normales.. Cette négociation se matérialise par un contrat de plan quinquennal et par un avenant à la convention de concession (approuvé par un décret en Conseil d’Etat contresigné par les ministres chargés du budget, de l’économie et de la voirie nationale).

L’équilibre du modèle financier hausse tarifaire / travaux à réaliser dépend des éléments suivants :

- hypothèses sur l’évolution future de l’inflation, du coût des travaux publics et du trafic ;

- estimation préalable du coût des travaux à réaliser ;

- niveau de rémunération des investissements attendu par la société.

La Cour des Comptes et l’Autorité de la concurrence ont fait le constat commun d’une négociation systématiquement effectuée dans l’intérêt des SCA. L’analyse du processus décisionnel par la Cour des Comptes l’a conduite à interroger l’opportunité des contrats de plans de manière générale et des opérations concernées de manière plus spécifique, ainsi que la légitimité de la compensation par voie tarifaire de certaines opérations, dans un contexte de rapports déséquilibrés au bénéfice des sociétés concessionnaires et de hausse constante et continue des tarifs de péage.

La Cour des Comptes considère ainsi que la conclusion des contrats de plan repose sur un processus de négociation peu adapté qui ne garantit pas une défense efficace de l’intérêt des usagers. En particulier, la légitimité de l’enchaînement systématique des contrats de plan et le volume de l’enveloppe tarifaire négociée lui paraissent discutables.

L’enjeu est de définir des procédures permettant de rééquilibrer les différentes composantes de l’intérêt général, notamment dans ses aspects économiques.

2° La situation concurrentielle des marchés de travaux

Les SCA sont en situation de monopole compte tenu du droit exclusif qui leur est attribué par le contrat de concession. Si l’octroi d’un tel droit exclusif n’est pas critiquable en lui-même s’agissant d’une délégation de service public, il n’en reste pas moins qu’il contribue à créer une situation insatisfaisante sous l’angle de la concurrence sur le marché aval des travaux réalisés sur le réseau. Cette préoccupation est particulièrement aigüe dans la mesure où les SCA sont contrôlées par des groupes de BTP (Vinci, Eiffage). Or, le dispositif de régulation concurrentielle en place, fondé sur une base contractuelle, a montré ses limites :

- impossibilité pour les pouvoirs publics d’y apporter facilement des modifications unilatérales ;

- des pouvoirs de la CNM qui sont particulièrement limités par rapport à ceux qui sont usuellement octroyés à des régulateurs ;

- applicabilité partielle des procédures de recours applicables aux contrats de la commande aux marchés passés par les SCA.

L’enjeu est donc de proposer un mécanisme de régulation de ces droits exclusifs qui soit comparable dans son ampleur à celui qui existe dans d’autres secteurs (communications électroniques, transport ferroviaire).

Dans son rapport de juillet 2013 relatif au contrôle des services en charge des relations avec les sociétés d’autoroutes, la Cour des comptes a formulé de vives critiques sur ce processus et appelé de ses vœux une modification du processus décisionnel.

L’avis n° A-14-13 du 17 septembre 2014 de l’Autorité de la concurrence sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires (SCA) confirme la nécessité d’une refonte en profondeur du dispositif :

- la rémunération des SCA est excessive au regard des coûts et des risques supportés ;

- la compensation illégitime de certains investissements d’exploitation sur autoroutes en service88 ;

- le constat d’une défaillance de régulation de l’État et la mise en évidence du fait que les contrats de plan sont systématiquement négociés à l’avantage des sociétés concessionnaires ;

- des règles de mise en concurrence lors de la passation des marchés de travaux très largement insuffisantes.

S’agissant du premier point, l’Autorité de la concurrence décrit une stratégie de surendettement massive, soutenue par un coût de la dette très faible compte tenu du faible risque supporté par les SCA et les bénéfices liés à un mécanisme de déductibilité fiscale dérogatoire au droit commun89, qui conduit à une rémunération excessive des actionnaires. L’Autorité de la concurrence conclut que la charge de la dette des SCA est plus que couverte par les dividendes versés par ces sociétés.

2. Description des objectifs poursuivis

L’objectif général poursuivi est de renforcer le positionnement de l’État face aux sociétés concessionnaires d’autoroutes. Cet objectif général se décline en deux objectifs spécifiques :

ð Le premier est de garantir un meilleur paramétrage et un meilleur cadrage financier des investissements autoroutiers compensés par des hausses de péages, afin d’éviter que les SCA ne perçoivent une rémunération excessive pour ces investissements ; il convient notamment de réinterroger dans le cadre des contrats de plan l’équilibre entre la gestion et le développement du réseau autoroutier concédé et le pouvoir d’achat des consommateurs.

ð Le second objectif est d’apporter une réponse plus efficace aux enjeux concurrentiels de ce secteur, liés à l’appartenance de la plupart des SCA à des groupes de travaux publics90, qui ont été identifiés et analysés dès 2005 par le Conseil de la Concurrence dans son avis n°05-A-22, par la mise en place d’un réel cadre de régulation des marchés des SCA.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Des mesures législatives sont nécessaires pour étendre les compétences de l’ARAF, qui devient l’ARAFER, mais également pour mettre en place une régulation effective nonobstant les clauses contractuelles des contrats de concessions qui visent actuellement à la prévenir91.

Les caractéristiques du dispositif envisagé sont les suivantes.

Associer l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routière (ARAFER) à la négociation des contrats de plan ayant une incidence sur la hausse des tarifs de péages

L’ARAFER sera chargée de veiller au bon fonctionnement du cadre de définition et de mise en œuvre des tarifs de péages autoroutiers.

Elle sera consultée sur les projets de modifications des contrats de concession et les projets de contrats de plan dès lors qu’ils auront une incidence sur les tarifs de péage. Elle adressera aux ministres concernés un avis, qui portera notamment sur le champ des dépenses qui, relevant des obligations ordinaires du concédant, ne peuvent pas être couvertes par une augmentation des tarifs de péages, sur le taux de rentabilité interne et sur les impacts sur les usagers. Cet avis sera rendu public au plus tard à la date de conclusion du projet.

Harmoniser et renforcer les obligations de publicité et de mise en concurrence des marchés applicables aux sociétés concessionnaires d’autoroutes.

Le principe de l’assujettissement des SCA privées à des règles de publicité et de mise en concurrence sera inscrit dans la loi de manière uniforme pour toutes les concessions. Il s’agit de règles très proches, voire identique, de celles de l’ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 ; toutefois, les modalités de mise en œuvre pourront être différentes. En particuliers, les seuils minimaux de mise en concurrence pourront être différents et la gestion des avenants aux contrats pourra être renforcée, comme proposé par l’Autorité de la concurrence.

S’agissant des SEMCA privatisée, de telles règles ne seront plus de niveau contractuel, par définition négociées dans un cadre bilatéral mais relèveront du pouvoir unilatéral de décision propre au législateur et au règlement et s’appliqueront à tous..

S’agissant de Cofiroute, ces règles lui seront ainsi étendues.

S’agissant des autres concessionnaires privés, les règles de mise en concurrence leur seront également étendus sous réserve de la prise en compte de leur spécificité d’avoir été attribuée après une mise en concurrence.

Les SCA publiques restent quant à elles pleinement soumises à l’ordonnance n°2005 du 6 juin 2005, conformément au cadre communautaire.

Prévoir le cas spécifique des concessions attribuées après mise en concurrence

Les huit sociétés concessionnaires soumises aux seules dispositions du chapitre 3 du titre II du décret n° 2010-406, sont celles qui sont ont été attribuées à partir de 2001. Elles ne gèrent qu’une section d’autoroute « isolée », ont été désignées à l’issue d’une procédure de publicité et de mise en concurrence européenne.

Dans le cadre des procédures actuelles d’appel d’offres des concessions autoroutières, les groupements candidats, qui comprennent en général une entreprise de BTP, doivent présenter une offre ferme qui permet à l’Etat de signer les contrats sur la base d’un prix ferme et forfaitaire de la construction des ouvrages et un financement assuré. Ces offres s’appuient sur un sous-contrat de « conception-construction », auquel sont parties l’entreprise de BTP actionnaire ou des entreprises liées, et un sous-contrat « d’exploitation-maintenance ». Ces deux sous-contrats sont de fait mis en concurrence en même temps que l’attributaire du contrat. Ils reprennent toutes les obligations contractuelles du concessionnaire et sont indispensables à la mise en place du financement.

Ces sous-contrats prennent en compte aujourd’hui une obligation de sous-traitance des marchés de travaux à des tiers à hauteur de 30 % sur la durée de la concession, obligation imposée par l’Etat92 de manière volontaire au futur concessionnaire dans le cadre de l’appel d’offres et contrôlée par les services de l’Etat dans le cadre de leurs missions de contrôle général des sociétés concessionnaires.

La réalisation de 70 % des travaux par des entreprises liées à l’entreprise de BTP actionnaire de la société concessionnaire fait ainsi partie des clauses essentielles à la conclusion du contrat par la société concessionnaire. En particulier, l’offre soumise par les candidats au moment de l’appel d’offres, notamment en ce qui concerne l’équilibre économique et financier de cette offre, repose sur la certitude des coûts de construction et d’exploitation des ouvrages supportés par la société concessionnaire, puisque les sous-contrats de « conception-construction » et « d’exploitation-maintenance » seront conclus simultanément au contrat de concession.

Compte tenu des éléments, notamment l’existence d’une mise en concurrence initiale et le souhait de limiter tout risque indemnitaire consécutif de la remise en cause de l’équilibre économique du contrat, il est envisagé que le nouveau dispositif ne s’applique pas aux marchés ainsi concernés.

Il est ainsi proposé de neutraliser la période de construction des ouvrages et aménagements prévus initialement au cahier des charges du contrat de concession, lorsque la concession a été attribuée à l’issue d’une procédure de publicité et de mise en concurrence. Cela permettra :

- De ne pas remettre en cause les conditions dans lesquelles les nouvelles sociétés concessionnaires et l'Etat ont contracté, c'est à dire sur la base d'une réalisation de la majorité des travaux de construction par le groupement constructeur, actionnaire de la société concessionnaire, et de l'exploitation de l'autoroute par le groupement exploitant, actionnaire de la société concessionnaire. L'objectif est ainsi d'éviter tout risque de contentieux indemnitaire sur les contrats de concession en cours, en raison d'une modification d'une clause de paysage déterminante à la conclusion du contrat et à son équilibre économique ;

- De ne pas remettre en cause les appels d'offre de nouvelles concessions en cours, qui reposent sur un tel schéma (c’est-à-dire un regroupement de trois actionnaires constructeur – exploitant – financeur) et plus précisément sur l'absence de mise en concurrence des marchés de travaux passés avec les entreprises liées et de l'ensemble des marchés de fournitures et services ;

- Enfin, en opportunité, de permettre la poursuite pour l'avenir du modèle concessif.

Elle est strictement limitée aux marchés nécessaires à l’accomplissement des objectifs fixés par le cahier des charges initiales de la concession, faisant suite à la procédure de passation. L’ensemble des marchés complémentaires, effectués après la conclusion d’un avenant avec l’État et passés après la mise en service des ouvrages et aménagement initiaux, sera soumis au nouveau dispositif du code de la voirie routière.

Donner de nouvelles compétences à l’ARAFER afin de contrôler ces dispositions.

L’ARAFER veillera au respect, par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, de leurs obligations en matière de passation des marchés de travaux, de fournitures et de services sur le réseau autoroutier concédé.

La loi fixe le principe d’une information de l’ARAFER préalablement à la conclusion de chaque contrat soumis à des obligations de mise en concurrence. À ce jour, l’information de l’État est assurée par les commissions internes de marchés instituées par les SCA conformément à leurs obligations contractuelles. Ce dispositif sera revu en cohérence avec les nouvelles compétences de l’ARAFER.

L’ARAFER pourra procéder à des expertises, mener des études, recueillir des données et mener toutes actions d'information nécessaires dans ce secteur, ainsi qu’y exercer les compétences de contrôle, d’enquête et d’intervention dont elle dispose dans le secteur ferroviaire (compétences transversales prévues dans le projet de loi).

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et pour les particuliers

Les consommateurs bénéficieront des dispositions envisagées via une moindre hausse des tarifs des péages autoroutiers. Le gain annuel de pouvoir d’achat peut être évalué dans une fourchette de 100 à 200 M€.

Impacts pour les entreprises

Les entreprises du secteur du BTP, notamment les PME, bénéficieront d’un meilleur accès aux marchés des SCA grâce à un élargissement des obligations de mise en concurrence de ces marchés.

Les entreprises utilisatrices des services des SCA, en particulier les entreprises de transport routier de marchandises, bénéficieront également de la modération tarifaire des péages

Les SCA continueront à percevoir une rémunération raisonnable pour leurs investissements. Dès lors, l’objectif d’une telle rémunération ne pourra pas justifier de leur part des réductions d’emplois93. Par ailleurs, s’agissant de celles qui ne sont pas intégrées avec des groupes de BTP, elles pourront bénéficier d’un cadre concurrentiel des marchés de travaux plus favorable.

L’institution de commissions internes des marchés par les SCA aura un coût nul, pour les SCA qui en dispose déjà d’une, en application de leur contrat de concession, ou un coût très faible pour les autres.

Impacts pour les administrations

La mesure impliquera l’allocation de ressources à l’ARAF dans sa nouvelle configuration : voir, sur ce point, l’étude d’impact relative à la reconfiguration de cette Autorité.

Impacts juridiques

Les mesures spécifiquement visées par la présente étude d’impact nécessitent de modifier le chapitre II du titre II du code de la voirie routière.

Les mesures relatives aux marchés de travaux autoroutiers s’appliqueront en lieu et place des dispositions de l’ordonnance n° 2009-86494 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics qui, à son titre III, prévoit essentiellement des règles de publicité pour les concessionnaires de travaux publics. Il convient de noter que ce titre III n’impacte aujourd’hui que Cofiroute et les nouvelles sociétés concessionnaires, les autres SCA historiques étant soumises à des règles plus strictes (obligation de mise en concurrence), en application notamment de leurs contrats de concessions.

L’ordonnance n° 2005-64995 est applicable aux travaux passés par les sociétés d’autoroute qui sont des pouvoirs adjudicateurs, c’est-à-dire aux SCA à capitaux publics (ATMB, SFTRF). Les dispositions qu’elle prévoit sont d’origine communautaire96 et il ne saurait y être dérogé ; c’est la raison pour laquelle, les dispositions envisagées ne visent que les SCA à capitaux privés.

Par ailleurs, les dispositions réglementaires d’application de cette ordonnance97 sont celles qui sont actuellement insérées dans les contrats de concessions des anciennes SEMCA, selon toutefois des modalités particulières98. Il s’agit de ces stipulations contractuelles auxquelles il est proposé de subroger unilatéralement et expressément (II de l’article 17). Elles seront remplacées par les nouvelles règles du code de la voirie routière envisagées par le projet de loi.

Il convient de noter que ces nouvelles règles sont très largement inspirées de celles de l’ordonnance n° 2005-649 même si elles répondent à des problématiques différentes : les outils de mise en œuvre des principes d’égal accès à la commande publique et de bonne utilisation de l’agent public se trouvent être pertinents pour remplir un objectif plus ciblé de régulation concurrentielle. Leurs modalités réglementaires de mise en œuvre pourront toutefois être adaptées, notamment s’agissant des seuils et des règles relatives aux avenants.

5. Consultations menées

Les consultations suivantes ont été menées :

- Haut Comité de la Qualité de Service dans les Transports (HCQST) ;

- Association des Sociétés Française d’Autoroutes (ASFA) ;

- L’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires (ARAF).

6. Textes d’application et outre-mer

L’entrée en vigueur des nouvelles dispositions sera différée de 6 mois après la promulgation de la loi afin de permettre aux SCA de mettre en place les procédures internes nécessaires et de pouvoir doter l’ARAF des moyens nécessaires à ses nouvelles missions (article 17 du projet de loi).

Les nouvelles dispositions de publicité et de mise en concurrence des marchés sur le réseau autoroutier s’appliqueront à tous les marchés pour lesquels une procédure n’aura pas été engagée le premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la loi.

Dispositions du code de la voirie routière

Entrée en vigueur

Mesures d’application

Gouvernance des péages autoroutiers et régulation des marchés sur le réseau autoroutier

L. 122-12 à L.122-14

(consultation de l’ARAF sur les contrats de plan)

Six mois

Précision du processus de consultation et sur les éléments devant figurer dans l’avis de l’ARAF.

L. 122-15 et L.122-16

(mission ARAF et champ d’application)

Aucune

L. 122-17

(principe de publicité)

Définition des règles de publicité et des exceptions. Le cas échéant, précisions sur la nature des marchés concernés. Modalités d’information de l’ARAF avant la conclusion d’un contrat de marché de travaux, fournitures et services.

L. 122-18

(règles de mise en concurrence)

Définition des règles de recours aux différents types de procédure et leurs modalités de mise en œuvre.

L.122-19

(information aux candidats non retenus)

Définition des modalités de mise en œuvre.

L. 122-20

(possibilité de saisine du juge administratif par l’ARAF)

 

Aucune

L.122-21

(exclusions et interdictions de soumissionner)

 

Aucune

L. 122-22 et L.122-23

(rapport et dispositions d’application)

 

Aucune

L. 122-23 à L. 122-25

(renvoi aux dispositions transversales relatives à l’ARAF)

 

Aucune

Avis de l’ARAF sur les nouvelles concessions

L. 122-4

(insertion de l’avis de l’ARAF)

Six mois

Précision du processus de consultation et sur les éléments devant figurer dans l’avis de l’ARAF en ce qui concerne l’attribution des nouvelles concessions

Article 8

Stationnement sur la voie ouverte à la circulation publique
à l'abord des gares et des aérogares
des véhicules de transport public de particulier

1. État des lieux

La loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur (VTC) a procédé à la création dans le code des transports d’un chapitre préliminaire prévoyant des dispositions générales, aux articles L.3120-1 à L.3120-5, applicables à l’ensemble des transports publics particuliers.

L’article L.3120-2 du code des transports a donc été créé par loi du 1er octobre 2014 susmentionnée. Le 3° du II de cet article prévoit que le conducteur d’un véhicule de transport public particulier ne peut « stationner sur la voie ouverte à la circulation publique, à l'abord des gares et des aérogares ou, le cas échéant, dans l'enceinte de celles-ci, au-delà d'une durée, fixée par décret, précédant la prise en charge de clients, sauf s'il justifie d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final ».

La loi n° 2014-344 du 17 mars  014 relative à la consommation a introduit dans le code des transports et le code du tourisme l’interdiction pour les conducteurs de transports publics particuliers de stationner à l'abord des gares et aérogares, à moins que le conducteur ne puisse justifier d’une réservation préalable. Ces conducteurs ne peuvent en outre stationner à l'abord des gares et des aérogares ou, le cas échéant, dans l'enceinte de celles-ci au-delà d'une durée précédant la prise en charge de leur clientèle.

Le décret n° 2014-371 du 26 mars 2014 relatif à la durée maximale de stationnement des taxis, des véhicules de transport motorisés à deux ou trois roues utilisés pour le transport de personnes et des voitures de tourisme avec chauffeur dans les gares et aérogares a fixé cette durée à une heure. Cette durée sera prochainement intégrée dans la partie réglementaire du code des transports par le projet de décret relatif au transport public particulier.

La durée maximum de stationnement avant la prise en charge de la clientèle ayant préalablement réservé leur service a été limitée afin de prévenir les comportements de stationnement prolongé en quête de clients et d'améliorer la gestion des flux de circulation à l'abord des gares et aérogares ou dans l'enceinte de celles-ci. Cette durée est applicable à tous les transports publics particuliers, y compris aux taxis intervenant en dehors de leur zone de rattachement et disposant d’une réservation préalable. La durée d’une heure permet aux véhicules concernés de stationner dans l'attente du client les ayant réservés dans des conditions juridiques claires leur garantissant un laps de temps suffisant pour s'organiser. Le respect de cette durée est d’autant plus important à l’abord ou dans l’enceinte des gares et aérogares au vu du nombre de clients potentiels pour ces transports.

Or, l’expression « sauf s'il justifie d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final », prévue au 3° du II de l’article L.3120-2 précité, tend à rendre inopérante la durée limitée de stationnement à l’abord ou dans l’enceinte des gares et aérogares, fixée à une heure, précédant la prise en charge de clients ayant préalablement réservé un transport dès lors que cette expression prévoit la possibilité de stationner sur la voie publique au-delà de cette durée si le conducteur peut justifier d’une réservation préalable ou d’un contrat avec un client final.

Il convient enfin de préciser que l’article L.3122-9 du code des transports prévoit que le conducteur d'une VTC, après l'achèvement de la prestation commandée au moyen d'une réservation préalable, est tenu de retourner au lieu d'établissement de l'exploitant de cette voiture ou dans un lieu, hors de la chaussée, où le stationnement est autorisé, sauf s'il justifie d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final.

La limitation de la durée de stationnement avant la prise en charge de la clientèle ayant préalablement réservé leur service doit demeurer le principe sur le domaine public des gares et aérogares en matière de transport public particulier pour les taxis intervenant en dehors de leur zone de rattachement, les véhicules de transport motorisés à deux ou trois roues utilisés pour le transport de personnes et les VTC.

1. Description des objectifs poursuivis

Le maintien de l’expression «sauf s'il justifie d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final » est donc susceptible de laisser persister la confusion quant aux règles applicables à l’abord ou dans l’enceinte des gares et aérogares, en matière de police de la circulation et du stationnement, composantes de l’ordre public. La suppression de ces mots est ainsi nécessaire. La disposition est toutefois complétée d’une mention rendant explicite le fait que la durée de stationnement autorisée pour les VTC s’apprécie nécessairement au regard de l’heure prévue de chargement du client ayant effectué une réservation préalable.

L’objectif est également de préserver la distinction entre les activités de maraude et de réservation préalable, rappelée par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2014-422 QPC 17 octobre 2014. Le Conseil a considéré « qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a distingué, d'une part, l'activité consistant à stationner et à circuler sur la voie publique en quête de clients en vue de leur transport et, d'autre part, l'activité de transport individuel de personnes sur réservation préalable ; que, poursuivant des objectifs d'ordre public, notamment de police de la circulation et du stationnement sur la voie publique, le législateur a réservé la première activité aux taxis qui l'exercent dans un cadre réglementé particulier ; que la seconde activité peut être exercée non seulement par les taxis mais également par d'autres professions, notamment celle de voitures de tourisme avec chauffeur ; que le principe d'égalité n'imposait pas que les taxis et les voitures de tourisme avec chauffeur soient traités différemment au regard de cette seconde activité ; que le droit reconnu par les dispositions contestées aux voitures de tourisme avec chauffeur d'exercer l'activité de transport public de personnes sur réservation préalable ne porte aucune atteinte au principe d'égalité devant la loi ».

2. Options possibles et nécessité de légiférer

Le code des transports fixe, depuis la loi du 1er octobre 2014 susmentionnée, les dispositions applicables à l’ensemble de ces transports. La modification de la partie législative relève donc du domaine de la loi.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La suppression des mots « sauf s'il justifie d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final » permet donc de prévenir certains troubles potentiels à l’occupation du domaine public, à l’abord ou dans l’enceinte des gares et aérogares, liés aux comportements de certains conducteurs de véhicules de transports publics particuliers en cas de stationnement d’une durée déraisonnable. En outre, des améliorations concernant la gestion des flux de circulation à l'abord des gares et aérogares ou dans l'enceinte de celles-ci sont espérées.

Article 9

Externalisation de l’épreuve théorique générale du permis de conduire et des épreuves pratiques des diplômes professionnels poids-lourds

1. État des lieux

Les règles relatives à la délivrance du permis de conduire sont prévues au Chapitre Ier du Titre II du livre II du code de la route.

L’organisation des épreuves est définie dans la partie réglementaire de ce chapitre, plus spécifiquement aux articles D. 221-3 et D. 221-3-1 du même code. Les autres articles précisent les conditions additionnelles à la réussite des examens nécessaires pour l’obtention du permis (âge, visites médicales. Ces dispositions sont précisées par un arrêté du 20 avril 201299.

Ainsi, en application du cadre réglementaire, l’organisation des épreuves du permis de conduire est assurée par les préfectures et la fonction d’examinateur est confiée à des agents publics (inspecteurs du permis de conduite et de la sécurité routière - IPCSR).

En pratique, 1300 IPCSR répartis dans 700 centres font passer des examens (théoriques et pratiques)100.

Répartition du temps consacré aux examens en 2014


En bleu : permis A (11%)

En rouge : permis B (66%)

En vert : permis et examens du groupe lourd (17%)

En mauve : ETG (6%)

Source : Dossier de presse « RÉFORME DU PERMIS DE CONDUIRE : PRIORITÉ JEUNESSE » présenté le 13 juin 2014

L’insuffisance du nombre d’IPCSR et le dispositif d’attribution des places aux examens mis en place depuis 2006101 génèrent, en cas d’échec, un engorgement des centres d’examen et des délais d’attente de passage des épreuves particulièrement longs et disparates du fait du nombre plus ou moins importants de candidats au permis et du nombre d’IPSCR affectés dans chaque département.

De 98 jours (trois mois en moyenne en 2013 au niveau national, l’attente peut atteindre une moyenne de 5 mois dans certains départements, notamment en Île-de-France. Dans les autres pays européens, les délais sont en moyenne d’un mois et demi.

En France, plus d’un million de candidats présentent le permis B chaque année.

L’inscription au passage du permis de conduire y est gratuite (cas unique en Europe).

Le prix d’un forfait « 20h », en moyenne de 1.000 €, peut varier entre 800 € et 1600 €

Peu de candidats sont susceptibles d’être correctement formés au bout de seulement 20h de conduite ; la moyenne nécessaire constatée se situe davantage autour de 35h. À ce coût, s’ajoute le « prix de l’échec » pour 40% des candidats qui présentent l’examen pratique pour la première fois : au-delà des nécessaires heures de conduites additionnelles, s’ajoutent celles prises pour se maintenir à niveau dans l’attente d’une nouvelle date d’examen.

Ces montants sont élevés au regard du pouvoir d’achat des jeunes et de leur famille, et, malgré certaines aides financières de l’État102. À titre d’illustration, la moitié des personnes sous le seuil de pauvreté n’a pas le permis.

Le permis de conduire est un élément essentiel de l’insertion sociale et professionnelle, en particulier pour les jeunes. La détention du permis de conduire est un critère d’embauche pour 65% des employeurs103. Rendre le permis de conduire accessible au plus grand nombre, et notamment aux plus jeunes pour leur permettre une mobilité encore très largement indispensable pour entrer dans le monde du travail, est donc un enjeu majeur.

Il s’agit également d’un enjeu fort de sécurité dans un contexte où à l’accès à l’emploi est critique et le prix élevé de la formation au permis peut inciter à conduire sans ce dernier.

Compte tenu de ce contexte, le gouvernement a annoncé le 13 juin  2014 une réforme d’ensemble du permis de conduire de façon à le rendre à la fois plus accessible, plus moderne et plus transparent.

Le permis sera plus accessible en réduisant significativement les délais d’attente pour se représenter après un échec et en baisser ainsi le coût. Ces délais doivent être ramenés d’ici à deux ans à 45 jours. Atteindre cet objectif ambitieux implique que les IPCSR se consacrent en priorité au passage de l’épreuve pratique du permis B afin de satisfaire aux besoins exprimés par les usagers. La situation place l’administration dans une urgence qu’aucune campagne de recrutement d’inspecteurs ne saurait résoudre, notamment par les délais inhérents à leur recrutement et à leur nécessaire formation initiale.

L’un des leviers de la diminution du coût de la formation est la réduction des délais d’attente pour passer ou repasser l’examen. Chaque mois de délai gagné représente en moyenne 200 euros d’économie sur le coût total du permis de conduire aujourd’hui.

Le choix a été effectué de réduire les délais, c’est-à-dire d’augmenter le nombre des places disponibles, en recentrant les examinateurs (IPSCR) sur le passage du permis B. Ainsi, la réforme engagée par le gouvernement à l’été 2014, consistant à confier dans un premier temps à des réservistes de la police et de la gendarmerie nationales, puis depuis novembre 2014 à des agents publics désignés par les préfets la surveillance de l’épreuve théorique, commence déjà à produire des effets sur les délais de passage des examens.

Cette solution n’est toutefois pas pérenne. La prochaine étape est le transfert au secteur privé de l’organisation et la surveillance de l’ETG à partir de l’été 2015. En outre, il a été décidé de renforcer les effets de la réforme en confiant également au secteur privé l’organisation des épreuves pratiques des diplômes professionnels des conducteurs de véhicules des catégories poids-lourds. L’ensemble de ces mesures génèrera en année pleine  170 000 places d’examen au permis B supplémentaires.

Si on ajoute les mesures prises cet été consistant à réduire la durée de l’épreuve pratique de l’examen B de 3 minutes permettant ainsi aux inspecteurs de réaliser 13 examens au lieu de 12 par jour, la réforme va dégager l’équivalent de 280 000 places d’examens soit l’équivalent de 115 emplois d’inspecteurs.

1. Description des objectifs poursuivis

Pour rétablir l’égalité sur le territoire national et atteindre le délai moyen de passage des permis de conduire fixé à 45 jours d’ici l’été 2016, l’État souhaite recentrer l’activité des IPSCR sur le cœur de leur mission de service public, à savoir sur le passage de l’examen pratique de la conduite pour l’obtention du permis B.

Ce recentrage, au service de la jeunesse permettra d’ouvrir plus de places aux examens, de réduire les délais d’attente du passage du permis de conduire et ainsi de participer à la diminution du coût du permis.

Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement souhaite recourir au secteur privé pour l’organisation de l’épreuve théorique et celle des épreuves pratiques des diplômes professionnels concernant les poids-lourds. Les modalités de recours seront définies pour garantir l’impartialité et le niveau de compétence requis et également assurer la couverture du territoire.

2. Options possibles et nécessité de légiférer

L’organisation du passage des épreuves des permis de conduire est à ce jour de la compétence exclusive de l’État. Si l’externalisation en tant que telle ne relève pas des prérogatives du législateur, la création d’une nouvelle profession réglementée, celle d’organisateur des épreuves du permis de conduire, impose de recourir à la loi.

Il est envisagé de créer une nouvelle profession d’organisateur des épreuves théoriques du permis de conduire ainsi que des épreuves pratiques des diplômes professionnels du groupe lourd (permis C et D relatifs aux transports de marchandises et de voyageurs). L’accès à la profession sera libre sous réserve de remplir les conditions d’agrément fixées par l’administration.

Les organisateurs agréés devront être en mesure de justifier de leur capacité matérielle à organiser les épreuves, de leur impartialité à l’égard des candidats et de leur indépendance à l’égard des personnes dispensant ou commercialisant des prestations d’enseignement de la conduite.

Ils organiseront les épreuves conformément au programme établi par l’administration en recourant à des examinateurs répondant à un niveau de formation minimum et à des conditions strictes d’honorabilité. Les frais facturés pour le passage de l’examen par les organismes agréés seront réglementés par décret pris après avis de l’Autorité de la concurrence.

L’agrément pourra être retiré ou suspendu en cas de manquement à ces obligations.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les particuliers

Les candidats au permis de conduire verront les délais d’attente diminuer, ce qui leur garantira un coût du permis de conduire moins élevé qu’à ce jour, chaque mois de délai gagné représentant en moyenne 200 euros d’économie.

L’accès au permis de conduire sera facilité pour un plus grand nombre de personnes, notamment les plus jeunes et les consommateurs les plus défavorisés.

Cette situation devrait significativement accroitre leur mobilité et, par voie de conséquence, faciliter leur accès à l’emploi.

Impacts pour les entreprises

La mesure entraînera la création de sociétés dans une activité nouvellement ouverte au secteur privé. Toutefois, s’agissant d’une activité nouvelle, le chiffrage de ces créations ne peut être estimé.

Ces nouvelles sociétés devront investir dans des équipements nécessaires au passage de l’ETG. Il leur appartiendra de développer un logiciel de tirage aléatoire des diapositives qui seront fournies par l’État et d’acquérir ou de louer les moyens nécessaires au passage de l’examen (le coût de ces locations diffère bien entendu selon la localisation géographique et le moyen utilisé : certains opérateurs pourraient par exemple proposer de faire passer les épreuves dans un bus circulant dans des régions rurales).

S’agissant des écoles de conduite, la réduction des délais et du coût du permis améliorera considérablement leur relation avec les élèves, au bénéfice des deux parties. Elle pourra également contribuer à une augmentation de la clientèle du fait d’un moindre coût global du permis.

Impacts pour les administrations

Les gains financiers liés au transfert de l’organisation des épreuves de l’ETG vers le secteur privé sont estimés à environ 250.000 € correspondant aux frais de location de salle aujourd’hui nécessaires à la tenue de l’examen de l’ETG et supportés par l’État.

Les frais liés aux IPCSR, salaires et déplacements, resteront inchangés car ils seront réorientés sur le passage des examens du permis B et les missions de contrôle.

Impacts juridiques

Le dispositif envisagé n’aura pas d’impact sous l’angle de l’ordre juridique de l’Union européenne.

Il convient de noter que ce n’est pas la délivrance du permis de conduire qui est externalisée mais seulement l’organisation des épreuves et de l’examen. La délivrance du permis, qui résulte de la réussite à ces examens mais pas uniquement, est une mesure de police relevant des prérogatives de l’État (article R. 221-1 du code de la route).

Enfin, comme l’organisation des examens sera ouverte à toute personne remplissant les conditions de l’agrément, sans possibilité d’appréciation de l’administration, l’externalisation ne relèvera pas la réglementation applicable en matière de marchés publics ou de délégation de service public.

4. Consultations menées

Il a été procédé le 26 novembre 2014 à la consultation obligatoire du Groupement Interministériel Permanent de la Sécurité Routière (GIPSR).

L’hypothèse d’une externalisation de l’épreuve théorique générale et la possibilité de confier les épreuves pratiques des diplômes professionnels des permis poids lourds à des organismes agréés ont été discutées dans le groupe de travail lancé par le Gouvernement104 concernant les délais d’attente à l’examen du permis de conduire. Ce groupe a rendu son rapport en avril 2014 et a conduit aux réformes déjà engagées en janvier 2014 et poursuivies avec la mesure objet de cette étude.

Ce groupe de travail comprenait notamment les représentants des établissements d’enseignement de la conduite automobile, les organisations syndicales des inspecteurs du permis de conduire.

Les organisations syndicales ont également été reçues par le ministre de l’intérieur en particulier à plusieurs reprises pour aborder ce point.

5. Textes d’application et outre-mer

Le régime législatif et réglementaire applicable dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution est celui de « l'identité législative ». Les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Aucune mesure d’adaptation n’y est prévue.

Dans les collectivités d’outre-mer régies par les articles 72, 74, 76 et 77 de la Constitution, les règles relatives à la circulation routière diffèrent selon qu’elles relèvent de leur compétence exclusive ou de celle de l’État:

- Le statut de Saint-Pierre-et-Miquelon prévoit l’application de plein droit des dispositions du droit national relatives à la circulation routière (article LO 6414-1 CGCT). La mesure s’y appliquera sans qu’il soit besoin de prévoir des mesures d’adaptation.

- Les statuts de Saint-Martin (article LO 6314-3 CGCT) et de Saint Barthélemy (article LO 6214-3 CGCT) prévoient que les règles relatives à la circulation routière relèvent de leur compétence exclusive. La mesure ne s’y appliquera donc pas.

- À Wallis-et-Futuna (article 4 de loi n°61-814 du 29 juillet 1961), dans les TAAF et à Clipperton (article 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955), les règles relatives à la circulation routière relèvent de la compétence de l’État mais aucune mention expresse d’applicabilité n’existe actuellement. Le projet n’entend pas modifier cette situation. La mesure ne s’y appliquera donc pas.

- La réglementation relative à la circulation routière relève de la compétence exclusive de La Polynésie française (articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004) et de la Nouvelle Calédonie (l’article 22,12° de la loi organique 99-209 du 19 mars 1999). La mesure ne s’y appliquera donc pas.

Aucune mesure d’extension n’est envisagée

Si l’entrée en vigueur des dispositions prévues est immédiate, elles ne produiront des effets qu’à compter de la prise des décrets d’application puis de la décision administrative d’externalisation des épreuves du permis considérées.

Les mesures d’application seront précisées par décret en Conseil d’État (nouvel article L. 215-6 du code de la route).

Dispositions du code de la route

Entrée en vigueur

Mesures d’application

Externalisation de l’épreuve du code et des permis poids lourds

 

Immédiate

 

L. 214-1

(possibilité de recourir à des professionnels agréés)

1° Précision sur les épreuves concernées

2° Fixation des frais d’examen.

L. 214-2

(conditions dont doivent justifier les organismes agréés)

Précision des conditions de capacité, d’impartialité et d’indépendance.

L. 214-3

(respect du programme des examens)

Définition du programme

L. 214-4

(Examinateur)

Précision des conditions de compétences.

L. 214-6

(sanction administrative)

Aucune

CHAPITRE II – COMMERCE

Article 10

Urbanisme commercial

1. État des lieux

1.1. Le secteur du commerce de détail est un secteur majeur pour l’économie dans lequel les grandes enseignes occupent un poids très important.

Le secteur du commerce dans son ensemble est un secteur majeur pour l’économie du pays, avec 1.400Md € de chiffre d’affaires (CA), près de 3 millions de salariés (source Insee) et de l’ordre de 400 000 non-salariés (estimation). Il a contribué en 2011 pour 192 Md € à la valeur ajoutée de l’économie, ce qui représente 11 % du PIB national.

Le secteur de distribution est un maillon incontournable du fonctionnement de l’économie moderne, qui sert d’intermédiaire entre les milliers de fournisseurs de produits locaux ou internationaux, et des consommateurs dont les comportements sont en pleine évolution.

Le secteur du commerce de détail (par opposition au commerce de gros – 770 Md€ - et de réparation automobile – 170 Md€) pèse quant à lui de l’ordre de 450 Md€ et emploie environ 1,6 millions de salariés, auxquels il convient d’ajouter de nombreux artisans-commerçants indépendants.

Le CA du commerce de détail se répartit entre 241 Md€ de CA pour le commerce alimentaire et 209 Md€ de CA pour le non alimentaire (équipement de la personne, équipement du foyer, culture loisir, multimédia, carburant)

Les grandes surfaces alimentaires constituent le principal circuit de distribution de produits alimentaires (plus de 60 % des ventes totales du commerce alimentaire en magasins et près de 45 % des ventes toutes taxes comprises en volume du commerce de détail et de l’artisanat commercial en 2012), mais leur poids dans le non alimentaire reste modeste (plus de 15 % de part de marché). Il existait plus de 12 300 grandes surfaces alimentaires en France au 1er juillet 2012.

La grande distribution alimentaire en France est dominée par les groupes Carrefour, premier distributeur alimentaire (numéro 2 de la grande distribution dans le monde), devant E. Leclerc : ces opérateurs représentent, en moyenne à eux deux, sur le territoire français près de 40 % des ventes des grandes surfaces alimentaires en 2011. Ils sont concurrencés par des groupements d’indépendants comme Système U, Intermarché (ITM) et des opérateurs intégrés à l’image des Groupes Casino, Auchan, Aldi et Lidl. Les sept première enseignes de la grande distribution font environ 190 Md€ de CA dont 150 Md€ dans l’alimentaire.

Cependant derrière ces moyennes se cachent des disparités importantes, par exemple dans les départements d’outre-mer (DOM) et en Corse, mais aussi à Paris ou dans certains territoires très marqués par une ou deux grandes enseignes de la distribution.

Paris par exemple se caractérise par une densité commerciale (tous commerces compris) d’environ 280 commerces pour 10 000 habitants, deux fois plus importante que dans les principales villes de provinces ou les principales capitales européennes, et par la diversité de son tissu commercial.

Selon les données de la ville de Paris, sur 8 447 locaux affectés au commerce de détail en 2011, 12 % sont des magasins d’alimentation générale d’une surface de vente inférieure à 120 m² et 9 % seulement des supermarchés ou supérettes de plus de 120 m². Par ailleurs, 14 % sont des commerces alimentaires spécialisés tels que des boucheries, charcuteries, poissonneries, crèmeries-fromageries ou primeurs, et 16 % sont des boulangeries ou pâtisseries.

Cependant si l’on se limite à la grande distribution alimentaire, la part de marché du groupe du principal groupe de distribution (Casino, sous les enseignes Casino, Monoprix, Franprix, Leader price, le marché d’à côté, etc.) est ainsi supérieure à 50 % dans plus de la moitié des quartiers, et supérieure à 80 % dans 10 des 80 quartiers. Le second groupe (Carrefour, sous les enseignes Carrefour, Shopi, Huit à Huit, Proxi etc.) a quant à lui une part de marché supérieure à 40 % dans 4 quartiers, mais elle est inférieure à 30 % dans 67 quartiers sur 80.

Une telle concentration autour de deux enseignes risquerait de peser sur la diversité de l’offre proposée aux consommateurs et de pousser les prix à la hausse.

Parmi les facteurs identifiés, qui limitent la concurrence intra-muros entre les enseignes en particulier dans Paris figurent l’absence et le prix du foncier, les coûts logistiques qui écrasent les marges des distributeurs, et la volonté des élus de protéger leurs petits commerces indépendants, ce qui se traduit dans les documents d’urbanisme opposables aux enseignes.

1.2. Le rôle des documents de planification urbanistique

Les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les plans locaux d'urbanisme (PLU) ont été institués par la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) n° 2000-1208 du 13 décembre 2000. Ils sont élaborés par les élus du territoire concerné, en concertation avec les acteurs institutionnels et la société civile, selon des modalités prévues dans le Code de l’Urbanisme.

Le SCOT est l’outil de conception et de mise en œuvre de la planification intercommunale ; il est destiné à servir de cadre de référence pour les différentes politiques notamment sur l’habitat, les déplacements, le développement commercial, l’environnement, et l’organisation de l’espace. Il oriente le développement d’un territoire dans le cadre d’un projet d’aménagement et de développement durable, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, équipements commerciaux services, etc., de diminution des obligations de déplacements motorisés et de développement des transports alternatifs à l'usage individuel de l'automobile  ;

A l’heure actuelle, 220 SCOT sont opposables couvrant environ 1/3 du territoire et 234 SCOT sont en cours d’élaboration, pour une surface de territoire sensiblement équivalente.

La procédure d’élaboration d’un Scot se déroule en 6 étapes

1 - La délibération de l’établissement public (EP) prescrivant l’élaboration du schéma fixant les modalités de la concertation et les objectifs poursuivis : Cette phase permet de lancer la procédure de concertation avec la population qui aura lieu tout au long de la procédure d’élaboration.

2 – L’association des personnes publiques

Les services de l’État sont associés à la procédure d’établissement d’un SCOT, à l’initiative du Président de l’Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) ou sur demande du Préfet.

Sont consultées à leur demande les autres collectivités territoriales concernées : Présidents du Conseil Régional, du Conseil Général, des Groupements Intercommunaux, Maires des communes voisines et organismes consulaires (Chambre de Commerce et d’Industrie et

Chambre de Métiers, Chambre d’Agriculture).

3 - Le débat

Un débat a lieu au sein de l’organisme délibérant de l’EPCI sur les orientations générales du

Projet d’Aménagement et de Développement Durable, au plus tard quatre mois avant l’arrêt du projet de Schéma.

4 – L’arrêt du projet de Schéma

Le projet de Schéma est arrêté par délibération de l’établissement public.

Cette délibération est affichée pendant un mois au siège de l’EPCI et dans les Mairies concernées.

Le projet est ensuite transmis pour avis aux personnes publiques associées à son élaboration.

Faute de réponse expresse, leur avis est réfuté favorable à l’expiration d’un délai de 3 mois.

Les associations d’usagers sont consultées à leur demande.

5 – L’enquête publique

Le projet de Schéma doit être soumis à enquête publique par le Président de l’EPCI pendant une période de 2 mois.

6 – L’approbation définitive

Après l’enquête publique, le projet est éventuellement modifié (sans qu’il soit porté atteinte à son économie générale) puis approuvé par délibération de l’établissement public. Il est ensuite transmis aux personnes publiques associées et tenu à la disposition du public.

Le SCOT devient opposable deux mois après sa transmission au préfet, à moins que, dans ce délai, le préfet demande des modifications par courrier motivé, dans le cas de problèmes de compatibilité avec des normes supérieures ou d’atteinte grave aux principes de l’article L.110 et de l’article L.121-1 (en particulier le principe de diversité des fonctions urbaines en prévoyant des capacité de construction suffisantes pour la satisfaction des besoins présents et futurs de l’ensemble des modes d’habitat, d’activités économiques, etc.)

Au terme d’un délai de 6 ans à compter de la dernière délibération approuvant le SCOT ou portant sa mise en révision, l’EPCI compétent devra procéder à une analyse des résultats de l’application du SCOT et délibérer sur son maintien ou sa mise en révision.

Le PLU définit les orientations et stratégies d’aménagement de la commune pour les années à venir. Il constitue un document de synthèse entre l’urbanisme purement réglementaire qui fixe les règles encadrant l’acte de construire et l’urbanisme opérationnel traduisant un projet de vie pour la ville de demain en terme de développement économique, social, environnemental...

Les objectifs de ces documents en matière de commerce privilégient : la lutte contre l’étalement urbain, là où le commerce est à la recherche de foncier moins cher qu’en centre-ville ; la priorité au commerce de centre-ville, dans le but de densifier les zones urbaines et limiter les déplacements motorisés ; la qualité architecturale et paysagère des entrées de ville, visant particulièrement les ensembles commerciaux

À l’heure actuelle environ 1/3 du territoire national est couvert par des SCOT, et de nombreux autres sont en cours d’élaboration : certains de ces documents conçus de façon excessivement prescriptive constituent potentiellement des entraves à la liberté d’établissement du commerce et à la concurrence loyale dans le secteur du commerce au bénéfice des consommateurs.

La procédure d’élaboration d’un PLU se déroule en 5 étapes

1. Un diagnostic du territoire de l’EPCI ou de la commune permettant d’opérer les choix d’orientations qui seront retenues dans le Projet d'aménagement et de développement durable (PADD) et déclinées dans l’ensemble des pièces opposables aux tiers doit être effectué au début de la procédure ;

2. Un débat organisé au sein de l’organe délibérant de l’EPCI ou du conseil communautaire, au plus tard deux mois avant l’arrêt du projet, sur les orientations générales du PADD ;

3. L’arrêt du projet de PLU par l’organe délibérant ou le conseil municipal, qui est soumis pour avis aux personnes publiques associées, ainsi, qu’à leur demande, aux communes limitrophes, aux EPCI directement intéressés, etc. (L. 123-9). Celles-ci formulent leurs observations dans un délai de trois mois.

4. L’enquête publique,

5. L’ approbation définitive

Environ 18 000 PLU sont actuellement opposables mais ce sont essentiellement les PLU valant SCOT là où il n’y a pas de SCOT, qui sont le plus susceptibles d’être soumis à l’autorité de la concurrence.

1.3. Enjeux

Le pouvoir d’achat des ménages étant sous forte tension (il a diminué en 2012 de 0,9 % et de 1,5 % par unité de consommation) ils sont contraints à des arbitrages dans leurs dépenses et ont par conséquent tendance à délaisser certains produits alimentaires jugés non essentiels ou trop chers.

Vis-à-vis des consommateurs, offrir un maximum de diversité de l’offre commerciale constitue un gage de concurrence, donc de baisse des prix et de gain de pouvoir d’achat. L’UFC-Que Choisir a illustré l’effet de la concurrence sur les prix en comparant la situation de deux magasins d’un même groupe situés à Marseille. Le premier n’est pas à proximité d’un autre hypermarché et le prix de son panier moyen est supérieur de 3,5 % à la moyenne constatée au sein du groupe. À l’inverse, un second magasin de ce même groupe à proximité de deux hypermarchés concurrents propose un panier inférieur de 1,9 % à la moyenne du groupe. L’écart de prix entre les deux magasins du même groupe est de 5,4 %.

Vis-à-vis des commerçants, faciliter l’installation de nouveaux acteurs peut engendrer des gains de productivité, et permettre de dégager d’importantes économies d’échelle (en particulier sur les très grandes surfaces). L’augmentation de la productivité en Europe est inférieure aux gains constatés aux États-Unis. Cela s’explique notamment par des règles américaines plus adaptées qui ont entraîné des gains d’efficacité et d’innovation.

Vis-à-vis des fournisseurs, la multiplication des linéaires de vente pourrait être de nature à favoriser l’accès d’un plus grand nombre de fournisseurs de proximité notamment à la grande distribution.

2. Description des objectifs poursuivis

La législation en matière d’aménagement et d’urbanisme commercial, a pour objectif de préserver les principes de liberté d’établissement, de prestation de service, et de concurrence au bénéfice du consommateur, tout en veillant à ce que les équipements commerciaux n’engendrent pas des nuisances disproportionnées en terme d’aménagement harmonieux du territoire, d’embouteillages, de dégradation des paysages notamment en entrée de villes, etc.

Cette législation vise à trouver le point d’équilibre entre économie, urbanisme et aménagement du territoire. Elle est mise en œuvre par les Commissions départementales et la Commission Nationale d’Aménagement Commercial.

Il appartient au document d’urbanisme d’arbitrer entre les différents enjeux des politiques publiques (habitat, protection de la biodiversité, développement économique, besoin en déplacement, etc.) en tenant compte de l’impératif de réduction de la consommation d’espace, de limitation des déplacements automobiles, du coût des infrastructures nécessaires, des compensations environnementales, de la qualité du cadre de vie, etc.. Il convient donc de s’assurer que la manière dont les documents d’urbanisme ont procédé à cette mise en cohérence des politiques publiques est équilibrée et qu’elle ne s’est pas faite au détriment du développement économique.

C’est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit que l’autorité de la concurrence puisse être consultée sur les documents d’urbanisme en cours d’élaboration ou d’évolution, c’est-à-dire avant leur validation formelle, voire qu’elle puisse s’auto saisir dans certains cas dans le but de veiller à ce que ces documents ne comportent pas de dispositions contrevenant au principe au libre jeu de la concurrence dans le secteur de la distribution.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Les dispositions relatives aux attributions de l’autorité de la concurrence et celles régissant l’aménagement commercial relevant du code du commerce (partie législative), les documents d’urbanisme figurant quant à eux dans le code de l’urbanisme (partie législative également) il est nécessaire de passer par la voie législative pour adapter ces règles.

Les documents d’urbanisme peuvent être déférés par le préfet devant le juge administratif dans le cadre du contrôle de légalité. Cependant la prise en compte des critères économiques et de respect de la concurrence n’étant pas au cœur du dispositif des documents d’urbanisme il peut s’avérer opportun pour le préfet ou pour le ministre de l’économie de solliciter l’avis de l’Autorité de la Concurrence sur les SCOT ou du PLU en cours d’élaboration ou de modification pour en vérifier la compatibilité. L’autorité de la concurrence pourra également s’autosaisir

L’Autorité de la Concurrence est le seul organisme compétent pour se prononcer sur cet aspect précis des documents d’urbanisme.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts sur l’économie

Le potentiel économique et le dynamisme du secteur du commerce seront renforcés par la suppression des règles anticoncurrentielles non justifiées. Elle permettra l’arrivée de nouveaux entrants dans un secteur en profonde mutation notamment du fait du développement du commerce électronique et la modernisation du secteur.

Impacts sur les entreprises

La suppression d’entrave non justifiée à l’ouverture de nouvelle surface commerciale accélèrera la réalisation des projets commerciaux, la réalisation de gains de productivité et la création d’emplois.

Impacts sur les particuliers, notamment les jeunes et les handicapés

La développement d’ouvertures de commerces, renforcera la concurrence et augmentera le pouvoir d’achat des consommateurs. Le commerce est par ailleurs un secteur reconnu pour être fortement employeur de jeunes salariés voire d’étudiants. Le concept des magasins de la grande distribution est particulièrement adapté à l’accessibilité pour les personnes handicapées (parking, places réservées aux personnes handicapés, allées larges adaptées au passage des fauteuils roulants).

Impacts sur les finances publiques

Un plus grand nombre de surfaces commerciales pourrait alourdir la charge des finances publique en entrainant le versement de plus de crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), puisqu’il s’agit de l’un des plus gros secteurs bénéficiaires, et sous réserve En contrepartie, plus de compétitivité produira plus de recettes fiscales.

Impacts sur les administrations

Cette mesure représentera une faible charge supplémentaire pour le préfet qui devra transmettre les documents d’urbanisme adoptés à l’Autorité de la Concurrence. L’essentiel de la charge supplémentaire incombera à l’Autorité de la Concurrence en fonction du nombre d’avis sollicités.

Impacts sur les collectivités locales

Un secteur du commerce plus dynamique contribuera plus fortement au versement de ressources fiscales au bénéfice des collectivités locales (impôts locaux, taxe sur les surfaces commerciales, taxe locale sur la publicité extérieure, etc.). La mesure permettra également de sécuriser juridiquement leurs schémas d’urbanisme.

Impacts juridiques

L’avis de l’Autorité de la Concurrence, s’il est disponible, sera utilisé par le juge administratif s’il est saisi par le préfet d’un document d‘urbanisme dans le cadre du contrôle de légalité.

Impacts sociaux et environnementaux

L’impact social sera positif dans la mesure où le secteur du commerce est de façon générale fortement créateur d’emplois de tous niveaux. Du point de vue environnemental les enseignes déjà présentes sur le territoire ont déjà entrepris au cours des dernières années des efforts importants.

5. Présentation des consultations menées

L’Autorité de la Concurrence, et les grandes enseignes de la distribution à dominante alimentaires ont été consultées en particulier (notamment Casino et Leclerc).

Le Conseil national d’évaluation des normes ainsi que les fédérations professionnelles (conseil du commerce de France, UPA et CGPME) ont été consultés.

6. Présentation de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation de l’intervention

L’évaluation sera réalisée en concertation avec l’Autorité de la concurrence, sur la base du nombre de saisines enregistrées et de l’analyse de l’évolution des prix dans les territoires concernés, suite aux avis rendus.

Il conviendra de prévoir une règle d’exclusion pour Mayotte

Article 11

Injonction structurelle

1. État des lieux

La loi de modernisation de l’économie de 2008 a confié à l’Autorité de la concurrence un pouvoir d’imposer des injonctions structurelles dans le secteur du commerce de détail. Cependant, celui-ci est subordonné à des conditions difficiles à satisfaire : d’une part, la constatation d’un abus de position dominante ou de dépendance économique, d’autre part la persistance de l’abus malgré une décision de l’Autorité condamnant ce dernier. Ce cas de figure ne s’est jamais produit. Ces mesures sont donc quasiment inapplicables en pratique.

En revanche, l’abaissement des seuils de notification des opérations de concentration dans le secteur du commerce de détail dans la même loi a permis d’éviter un renforcement des positions dominantes dans certaines zones de chalandise.

Cependant, pour d’autres zones déjà très concentrées, peuvent être observées des situations de concurrence particulières dans lesquelles différents types d’obstacles à l’entrée de nouveaux concurrents existent. C’est notamment le cas quand le foncier commercial disponible est rare ou encore quand des problèmes logistiques existent, ce qui rend difficile de créer une concurrence sans disposer d’un grand nombre de magasins pour rentabiliser les circuits logistiques à mettre en place. Dans ces zones, la position détenue par le leader du marché ne peut être remise en cause ni par l’ouverture de nouveaux magasins, rendue en pratique impossible, ni par un contrôle des concentrations renforcé, la situation étant déjà acquise. Ces situations peuvent concerner à la fois le commerce à dominante alimentaire et non alimentaire tel que le bricolage et l’ameublement.

Sur ces marchés de commerce de détail, l'exercice d'un pouvoir de marché par un opérateur dominant a une incidence directe sur le pouvoir d'achat, à la fois parce que le client est le consommateur lui-même mais également parce que ce dernier ne dispose pas du même pouvoir de négociation qu'une entreprise. Par ailleurs, le consommateur est doublement contraint par sa faible mobilité et par la nature incontournable d'un certain nombre de dépenses de nourriture, boissons, hygiène et entretien, habillement, bricolage.

2. Description des objectifs poursuivis

L’octroi à l’Autorité de la concurrence d’un pouvoir d’injonction structurelle renforcé pour agir spécifiquement sur le secteur du commerce de détail répond à la problématique spécifique du commerce de détail : un manque de concurrence identifié à plusieurs reprises (notamment par l’Autorité de la concurrence105 et la BCE106) prenant la forme d’une trop forte concentration de certaines zones de chalandise. C’est en effet au plan local que la concentration du secteur du commerce de détail doit s’apprécier, et non au plan national, du fait des coûts de transport subis par le consommateur pour accéder à un opérateur107.

Une action spécifique au marché local prenant la forme d’une « riposte graduée » pouvant aller jusqu’à toucher les structures de marché pourra permettre l’entrée, à un rythme plus important que celui constaté jusqu’à présent, de nouvelles enseignes dans la zone de chalandise et, parallèlement, réduire le poids des opérateurs déjà installés sur ces zones de chalandise.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Au regard de l’état des lieux décrits précédemment et de l’objectif de stimulation de la concurrence dans le secteur du commerce de détail présenté ci-dessus, il apparaît nécessaire de renforcer le pouvoir d’injonction structurelle de l’Autorité de la concurrence dans le commerce de détail. En effet, les outils dont disposent l’Autorité de la concurrence (contrôle des concentrations, répression des pratiques anticoncurrentielles, en particulier des abus de position dominante) ne permettent pas d’empêcher l’ensemble des situations inefficaces au plan économique.

Ainsi, certains marchés locaux présentent un niveau de concentration tel qu’il constitue, en soi, un obstacle à la concurrence. Le verrouillage de la concurrence sur ces marchés locaux est en outre renforcé par les phénomènes de rareté du foncier commercial, de faiblesse intrinsèque de la demande locale rapportée aux coûts fixes d’installation et de barrières contractuelles empêchant, lorsqu’ils le souhaitent, la sortie des magasins indépendants de leur réseau d’origine. Ces situations sont difficilement réversibles, sauf à pouvoir agir directement sur la structure du marché et la répartition des magasins.

C’est la situation du commerce alimentaire à Paris, analysée dans le cadre d’un avis rendu début 2012 par l’Autorité de la concurrence, qui a en premier mis en lumière la nécessité d’un tel pouvoir d’injonction structurelle. Avec 60% de parts de marché en moyenne à Paris et plus de 80% dans 11 zones de chalandise, le groupe Casino était en mesure de pratiquer durablement des prix supérieurs à la moyenne nationale [+13,39% selon UFC Que Choisir, 2011] et à ceux de ses concurrents également établis à Paris [écarts de prix de 5 à 12%].

Le constat de l’existence de zones de chalandises excessivement concentrées au plan local n’est pas propre à la région parisienne. Ainsi, la BCE, dans son étude précitée de 2011, montre que la France a les zones de chalandise parmi les plus concentrées de la zone euro (cf. tableau ci-dessous).

Comparaison de l’IHH108 local dans la zone euro

(Source : BCE, données 2010109)

Il est donc proposé d’étendre le dispositif d’injonction structurelle prévu par la loi « Lurel » (loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer) à la métropole, en renforçant néanmoins les conditions d’application via l’introduction d’un seuil de 50 % de parts de marché détenu par l’opérateur dominant.

L’option consistant à durcir le standard de niveau de prix mis en œuvre par l’opérateur dominant (retenir un critère de prix abusivement élevé et non de « de prix ou de marges élevés » comme actuellement prévu dans le projet de loi) n’a pas été retenue car elle ne permettrait pas d’atteindre l’objectif poursuivi, dans la mesure où le dispositif serait alors rendu inapplicable :

o depuis 1986, ni le Conseil de la concurrence ni l’Autorité n’ont sanctionné une entreprise pour abus de position dominante sur le terrain du prix abusif, ce standard est donc en pratique très difficile à prouver.

o Il en va de même au niveau européen : la caractérisation d’un abus de position dominante pour prix ou marges excessifs est particulièrement rare : la seule affaire dans laquelle la Cour de justice a validé une décision de la Commission fondée sur un tel grief est British Leyland110. Dans cette affaire, qui remonte à 1984, la Commission avait relevé que les prix avaient augmenté de 100% sur la période considérée, et ces pratiques se combinaient avec la fixation de prix discriminatoires visant à décourager les importations parallèles.

Au niveau européen, un tel dispositif existe au Royaume-Uni et en Grèce. Le premier exemple est détaillé ci-après.

Au Royaume-Uni

En vertu de l’Enterprise Act de 2002 puis des dispositions reprises dans l’Enterprise and Regulatory Reform Act 2013, depuis l’installation de la Competition and Markets authority (CMA) en avril 2014, l’autorité britannique de concurrence peut, au terme d’investigations approfondies, prononcer différents types de mesures (« remedies ») pour modifier la structure du marché lorsque celle-ci est la cause d’un déficit de concurrence ou d’une perte de bien-être pour les consommateurs (« adverse effects »). Parmi ces mesures figure notamment la cession d’activités ou d’avoirs à des concurrents, permettant ainsi « un changement immédiat et significatif de la structure du marché » (cf. Guidelines for market investigations : their role, procedures, assessment and remedies, May 2013; cf. également Market studies and market investigations: supplemental guidance on the CMA’s approach, January 2014). Ces lignes directrices encadrent l’utilisation par la CMA de ses pouvoirs d’intervention et prévoient une procédure contradictoire avec les parties concernées, tout en soulignant la nécessité de prendre en compte les bénéfices pour les consommateurs des mesures envisagées, les coûts de ces remèdes, ainsi que la proportionnalité et l’effectivité des mesures prévues.

L’autorité britannique a ainsi exercé son pouvoir d’injonction structurelle en obtenant des trois principaux cimentiers installés au Royaume-Uni une série de remèdes visant à réduire les facteurs structurels facilitant le maintien d’une collusion tacite sur les marchés du ciment, des granulats et du béton prêt à l’emploi. En particulier, l’entreprise commune des groupes Lafarge et Tarmac, d’une part, le cimentier Hanson, d’autre part, sont chacun tenus de céder un site de production en vue de faciliter l’entrée d’un nouvel acteur, conformément aux engagements acceptés le 21 août 2014 qui clôt la procédure ouverte en 2012.

L’autorité britannique a également exercé son pouvoir d’injonction structurelle dans le secteur des services aéroportuaires. Dans le cadre du système institutionnel dual qui prévalait avant l’installation de la CMA, la Competition Commission, saisie par l’OFT en mars 2007, a identifié, dans un rapport publié en août 2008, différents obstacles à la concurrence préjudiciables au bien-être des consommateurs. Après avoir pris en compte, d’une part, l’effectivité des différents remèdes possibles et, d’autre part, leurs coûts et bénéfices respectifs, la Competition Commission a ordonné à BAA, opérateur aéroportuaire qui possède plusieurs aéroports britanniques (London Heathrow, London Stansted, Southampton, Glasgow, notamment) de céder certaines de ses infrastructures. BAA a ainsi vendu les aéroports de London Gatwick, Edinburgh (décembre 2011) et Stansted (2013).

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact pour l’économie

De manière générale, la stimulation de la concurrence dans un secteur est bénéfique pour l’ensemble de l’économie : elle permet d’augmenter l’activité car elle restitue du pouvoir d’achat aux consommateurs du secteur, et a ainsi, à moyen-long terme, un effet positif en matière d’emploi.

La mesure vise un secteur incontournable de l’économie française : en 2010, la valeur ajoutée du commerce représentait environ 15 % du PIB et ce secteur employait près de 3,3 millions de personnes. Le commerce de détail pèse pour environ la moitié du secteur, l’essentiel des ventes de détail étant réalisée par les grandes surfaces111.

Au regard de la taille du secteur concerné, et de l’importance du manque de concurrence observée dans certaines zones de chalandise, l’impact de la mesure proposée peut s’avérer particulièrement important. En effet, plusieurs études économiques démontrent l’impact à la hausse sur les prix d’une concentration élevée dans certaines zones de chalandise. Berger [2004]112 trouve des prix de 2,0 % plus faibles dans les zones de chalandise avec une forte concurrence que dans les zones sans forte concurrence113. L’UFC-que-Choisir [2008]114 constate des écarts de prix de 1,31 % en moyenne entre des zones de chalandise identifiées comme non concurrentielle et concurrentielle115. Biscourp, Boutin et Vergé [2008]116, dans une analyse économétrique régressant le niveau des prix sur un indice de concentration, estiment qu’une hausse de 1 000 points de l’IHH (indice mesurant la concentration d’un marché) local aboutit à une hausse des prix de 1,5 %. En outre, ces écarts de prix n’intègrent pas les effets de la concurrence sur la qualité et la diversité de l’offre, ainsi que sur l’innovation (cf. infra impacts pour les particuliers et les entreprises): il s’agit donc d’un minorant de l’effet attendu d’une stimulation plus grande de la concurrence sur les zones de chalandise concernées.

Impacts pour les consommateurs et pour les particuliers

Les études mentionnées ci-dessus mettent en évidence l’ampleur des gains pouvant être attendus par les consommateurs résidant dans des zones de chalandise excessivement concentrées à l’heure actuelle. Dans son avis 10-A-26 du 7 décembre 2010, l’Autorité avait relevé que :

- sur le format des hypermarchés : au moins 30 % des zones de chalandises ne voient se concurrencer que quatre opérateurs ou moins. Dans 10 % de ces cas, la situation est même plus critique puisqu’il n’y a même qu’un seul ou deux opérateurs qui se font face ;

- en ce qui concerne les supermarchés : la concurrence est plus forte et ce chiffre diminue à 14 %.

A titre illustratif, les grandes surfaces d’alimentation générale ont réalisé en 2012 un chiffre d’affaires d’environ 180 milliards d’euros. Si 10% d’entre elles117 voyaient, du fait de cette mesure, leur prix baisser de 1 % (hypothèse conservatrice au regard des résultats des études économiques), les consommateurs de ces zones économiseraient 180 millions d’euros sur une année.

Cette mesure s’appliquera également à l’équipement du foyer, tel que le bricolage, ce qui en augmentera l’effet pour les consommateurs.

Enfin, en permettant à des consommateurs, qui ne disposent pour l’instant que d’une offre relativement restreinte en termes d’enseigne, d’avoir accès à une plus grande diversité de choix, cette mesure augmentera leur bien-être et pourra même, dans certains cas, contribuer à diminuer leur temps de transport en leur évitant d’aller plus loin pour trouver les biens/enseignes qu’ils souhaitent.

Impacts pour les entreprises

Une stimulation de la concurrence a pour effet, et pour objet, de dissiper les rentes injustifiées au plan économique des acteurs en place. Dès lors, parmi les effets à attendre pour les entreprises figurera nécessairement la baisse de profit des opérateurs des zones trop concentrées. Ainsi, dans le secteur de la distribution alimentaire à Paris, l’Autorité de la concurrence a estimé que l’impact de l’entrée d’une nouvelle enseigne dans une zone de chalandise réduisait de 18% la marge nette réalisée par l’opérateur en place (via des baisses de prix, des baisses de volume liées à la diversion de clientèle et surtout l’engagement de dépenses supplémentaires aux fins de rénovation et d’extension des horaires d’ouverture)118.

Les entreprises du secteur, soumises à une nouvelle pression concurrentielle, seront ainsi incitées à se différencier et à innover afin de mieux satisfaire leur clientèle. La mesure prévue dans le projet de loi contribuera en ce sens à ce que des gains de productivité soient réalisés par les entreprises du secteur.

Le dispositif retenu ne remet pas en cause la sécurité juridique des entreprises, dès lors qu’il est rigoureusement encadré :

o par la précision des conditions d’engagement d’une procédure : notification de préoccupations de concurrence précises à la suite d’une enquête de l’Autorité sur les obstacles à la concurrence au cas par cas en fonction du territoire concerné, de la position [dominante] et du comportement de chaque acteur [prix ou marges élevés par rapport à la moyenne du secteur] ;

o par le déroulement de la procédure : phase préalable d’engagements et respect des droits de la défense assuré ;

o par les principes de nécessité et de proportionnalité : l’injonction doit être le seul moyen de restaurer la concurrence, le juge exerçant un contrôle de pleine juridiction. En outre, l’Autorité devra, si elle s’oriente vers le prononcé d’une injonction structurelle, démontrer qu’une action sur les accords et actes en cours, notamment le relâchement des conditions contractuelles qui lient un magasin à sa tête de réseau pour changer d’enseigne, faire jouer la concurrence sur les conditions d’approvisionnement, ou libérer sa politique commerciale, ne suffit pas à remédier aux préoccupations de concurrence identifiées

Le dispositif retenu constitue un équilibre entre l’exigence d’efficacité et la mise en place de garanties qui limitent la remise en cause de situations acquises par une concurrence sur les mérites à des cas exceptionnels et d’une particulière gravité.

CHAPITRE III – CONDITIONS D’EXERCICE DES PROFESSIONS JURIDIQUES RÉGLEMENTÉES

Article 12

Orientation des tarifs réglementés vers les coûts

1. État des lieux

Le prix des prestations de certaines professions juridiques, notamment celles des administrateurs judiciaires, commissaires-priseurs judiciaires, greffiers de tribunaux de commerce, huissiers de justice, mandataires judiciaires, et notaires, font l’objet d’une tarification réglementée par l’État.

Les textes applicables à ces professions ne prévoient pas, en général, de périodicité de révision des barèmes tarifaires. En pratique, les révisions tarifaires sont assez rares.

Pour les notaires, par exemple, le barème établi en 1978 a été réévalué en 1981, 1985, 1994, 2006 et 2011. Pour les huissiers de justice, le taux de base fixé à l’équivalent de 1,60 € en 1988, montant repris dans le décret de 1996, n’a été revalorisé qu’une seule fois en 2007 (soit une fois tous les quinze ans en moyenne). Pour les administrateurs et mandataires judiciaires, les barèmes définis en 1985 n’ont été principalement revus qu’en 2004 et 2006. Pour les commissaires-priseurs judiciaires, le barème établi en 1985 a été réévalué en 1993.

Par ailleurs, ces barèmes tarifaires sont souvent fixés à des niveaux élevés. Ainsi, dans le cas des tarifs proportionnels à la valeur mentionnée dans l’acte, la contrepartie financière demandée à l’usager est sans lien avec la complexité du dossier ou le temps passé par le professionnel.

À l’origine, cette construction tarifaire était justifiée par un système de péréquation : les recettes générées par les transactions importantes compensaient les pertes générées par les petites transactions (dont le coût n’était pas couvert par le tarif) et les activités rendues à titre gratuit par le professionnel (comme le conseil). Toutefois, les valeurs figurant dans les actes à partir desquelles sont calculés les tarifs ont crû beaucoup plus vite que les coûts encourus par les professionnels.

Pour les notaires par exemple, selon l’Inspection générale des finances, il ressort des statistiques du Conseil supérieur du notariat (sur l’évolution du prix des biens constatés dans les actes de vente) qu’en 2000, la vente d’un appartement parisien de 60 m² (prix médian en euros courant : 172 603 euros) générait des émoluments proportionnels de 1715 euros. En 2012, les émoluments proportionnels perçus pour la vente du même appartement (prix médian en euros courant : 504 000 euros) étaient de 4569 euros. L’Inspection générale des finances estime la hausse du tarif perçu par le notaire à 159 %. Dans les autres régions de France, où la hausse des prix de l’immobilier, bien qu’importante, a été moindre qu’à Paris, la hausse des tarifs perçus par les notaires n’en reste pas moins significative : les émoluments perçus pour la vente d’une maison de 100 m² à Clermont-Ferrand, par exemple, sont passés de 1039 euros en 2002 (prix médian en euros courant : 90 686 euros) à 1 938 euros (prix médian en euros courant : 185 000euros). La hausse du tarif perçu par le notaire est estimée à 77 % d’augmentation par l’Inspection générale des finances.

De même, dans le cas des greffiers de tribunaux de commerce, le taux de base, qui constitue l’unité de valeur des actes, a cru de 7,5 % en euros constants entre 2000 et 2012, en raison notamment d’une revalorisation des tarifs intervenue en 2004 (+ 29 %) malgré les gains de productivité réalisés grâce à l’informatique. Pour la mission d’administration d’entreprises en difficulté des administrateurs judiciaires, les taux des tranches ont augmenté de 50 % à 500 % à la suite des réévaluations de 2004 et 2006 (augmentation variable selon le chiffre d’affaires de l’entreprise). Pour les huissiers, la revalorisation de 2007 a permis une croissance des revenus de + 30,2 % entre 2006 et 2010 (pour une inflation de + 6,4%). Entre 1996 et 2012, l’augmentation des tarifs des huissiers reste supérieure de 9 points à l’inflation. À titre de comparaison, selon les statistiques de l’INSEE, l’évolution du salaire moyen en France entre 2000 et 2011 n’a été que de + 6,7 %.

Les trajectoires respectivement suivies par les coûts supportés et les revenus générés ayant fortement divergé au cours du temps, la péréquation initiale est désormais établie à un niveau élevé : par exemple, dans le cas des notaires, l’Inspection générale des finances estime que l’équilibre financier est actuellement établi pour un acte de transaction immobilière de 50 000 euros, alors que le montant moyen d’une transaction immobilière était de 235 500 euros en 2011. Il en résulte que les professionnels concernés, tous frais déduits, réalisent en moyenne des taux de marge particulièrement élevés, de l’ordre de 30 à 40%, soit quatre fois plus que la moyenne des entreprises françaises.

Une autre méthode d’évaluation de cette « surcompensation » consiste à observer les rémunérations moyennes de ces professionnels, qui sont très importantes. Il ressort des études disponibles que les revenus mensuels médians des professions concernées sont proches de six fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel pour les huissiers de justice, douze fois pour les notaires, et vingt-huit fois pour les greffiers de tribunaux de commerce. En 2010, d’après les revenus déclarés fiscalement, les rémunérations annuelles moyennes nettes des professions juridiques visées par la réforme peuvent être estimées de la façon suivante :

- 348.178 € euros par an (soit 29014 euros par mois) pour un administrateur judiciaire titulaire d’une structure unipersonnelle ;

- 340 695 euros par an (soit 28391 euros par mois) pour un mandataire judiciaire titulaire d’une structure unipersonnelle ;

- 326 630 euros par an (soit 27 219 euros par mois) pour un greffier de tribunal de commerce d’une structure unipersonnelle ;

- 190812 euros par an (soit 15901 euros par mois) pour un notaire titulaire exerçant sous forme individuelle :

- 162 373 euros par an (soit 13531 euros par mois) pour un huissier de justice titulaire ou associé.

L’accomplissement par les officiers publics et ministériels et les mandataires de justice d’une mission de service public déléguée par l’État justifie l’existence de ces tarifs réglementés par la puissance publique.

La « redevance » perçue par ces professionnels au titre de leur mission doit donc être réexaminée au regard de l’étendue de cette mission.

C’est pourquoi, il est nécessaire de revoir les niveaux tarifaires actuels, qui sont déconnectés des coûts réellement encourus par les professionnels et de redéfinir le système de péréquation afin d’éviter qu’il aboutisse à sur-rémunérer le service rendu aux usagers. Au-delà, pour éviter qu’un déséquilibre important ne se reproduise à l’avenir, la méthode de fixation et de révision des barèmes doit être revue en profondeur.

Finalement, l’enjeu est de construire un dispositif de régulation qui garantisse efficacement que les tarifs perçus par ces professionnels n’excéderont pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par les obligations de service public, tout en permettant d’octroyer une juste rémunération aux professionnels concernés, définie sur la base de critères objectifs, et d’intégrer un niveau de « confort tarifaire » dans un objectif de péréquation. L’autre objectif est de faire en sorte que la profession soit incitée à utiliser des techniques de production toujours plus efficaces résultant de ses investissements et de son organisation.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi vise à définir de nouveaux principes de fixation et de révision des tarifs réglementés par la puissance publique.

À l’avenir, ces tarifs devront être « orientés vers les coûts » réels de production. En pratique, cela signifie qu’un principe d’équivalence préludera à leur élaboration, entre le coût du service rendu par le professionnel et la contrepartie financière perçue de l’usager au titre du service rendu.

En outre, les tarifs prendront en compte une contribution au titre d’une péréquation tarifaire (entre différentes prestations). Pour les actes notariés par exemple, les tarifs réglementés seront encadrés, pour la plupart, hors les grosses transactions immobilières, par un « corridor » tarifaire sous un seuil de la valeur du bien traité, à déterminer. Il ne s’agira plus d’un prix imposé à tous les professionnels, mais d’un intervalle au sein duquel ces derniers seront libres de facturer leurs prestations, entre un prix-plancher et un prix-plafond. Cette liberté tarifaire ainsi encadrée incitera à la recherche de gains de productivité par des investissements et des innovations. Cependant, le prix facturé à l’usager ne pourra être inférieur à un minimum réglementaire, de façon à assurer une certaine standardisation de la qualité du service rendu à l'usager sur les actes de la vie courante. Au-delà d’un seuil à déterminer en fonction des besoins de la péréquation, le tarif proportionnel continuera à être appliqué, après avoir été lui aussi révisé.

Pour conseiller le Gouvernement dans l’établissement des tarifs les plus adaptés, l’Autorité de la concurrence verra ses attributions consultatives élargies. Elle pourra formuler des avis sur ces tarifs réglementés à la demande du ministre chargé de l’économie ou de sa propre initiative, et fournir des éclairages économiques sur la meilleure façon d’obtenir les équilibres souhaités.

Par ailleurs, le projet prévoit une révision périodique des barèmes tarifaires. Cette évolution est nécessaire pour éviter une déconnexion à terme entre le tarif perçu et les coûts des professionnels. La révision ne se limitera pas à une simple indexation : elle devra tenir compte des évolutions des fondamentaux économiques sur la période considérée. Enfin, un principe général de transparence des prix facturés par ces professionnels verra ses modalités précisées par voie réglementaire.

Mutatis mutandis, des principes analogues d’orientation vers les coûts et de rémunération raisonnable sont prévus pour les prix réglementés en application de l’article L.410-2 du code de commerce, dans des secteurs ou des zones où la concurrence est limitée en raison de situations de monopole, de difficultés durables d'approvisionnement, ou de dispositions législatives ou réglementaires.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’objectif poursuivi par le projet de loi vise à instaurer de nouveaux principes de fixation et de révision de la tarification applicable à certains officiers publics et ministériels et mandataires de justice, ainsi que des prix réglementés dans les secteurs ou des zones où la concurrence est limitée. Cela entre pleinement dans les dispositions de l’article 34 de la Constitution qui prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales. Par conséquent, l’encadrement de l’exercice des fonctions d’officier public et ministériel et des mandats de justice relève du seul niveau législatif. Un décret en Conseil d’État sera pris pour notamment définir les modalités de fixation et de révision de ces tarifs.

Le projet de loi insère de nouvelles dispositions dans le code de commerce, selon lesquelles les professions juridiques concernées sont autorisées, sous un seuil à déterminer, à pratiquer des prix inférieurs à des tarifs maxima réglementés sur la base de critères objectifs. Ces tarifs seront fixés par un arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de l’économie. Ils pourront également prévoir des minima, de façon à déterminer un corridor de tarifs. Le dispositif sera précisé par décret en Conseil d’État, après avis de l’Autorité de la concurrence.

Il est à noter que l’article 1er de la loi du 29 mars 1944 relative aux tarifs des émoluments alloués aux officiers publics ministériels sera abrogé à une date fixée par décret et au plus tard six mois après la promulgation de la loi.

Les nouveaux principes d’orientation vers les coûts et de rémunération raisonnable sont étendus aux prix réglementés par le deuxième alinéa de l'article L.410-2 du code de commerce. Le projet élargit aussi les attributions consultatives de l’Autorité de la concurrence pour lui permettre, de sa propre initiative ou à la demande du ministre chargé de l’économie, d’éclairer le gouvernement sur la fixation et la révision des tarifs et des prix réglementés.

Enfin, le projet étend également le champ d’application du premier alinéa de l’article L.113-3 du code de la consommation aux tarifs réglementés régis par le nouveau titre IV bis du code de commerce. Le ministre chargé de l’économie pourra désormais adopter des mesures de transparence tarifaire au bénéfice des usagers.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et les particuliers

L’Impacts pour les particuliers et les entreprises usagers de ces services sera substantiel. Il se traduira par un gain de pouvoir d’achat.

Pour mémoire, selon l’INSEE119 et une étude Xerfi, le chiffre d’affaires généré (19,7 Md€ en 2010) se répartit de la façon suivante dans le secteur des professions juridiques : 32 % pour les notaires, 7 % pour les huissiers, 2,5 % pour les administrateurs et mandataires judiciaires, et 0,5 % pour tous les autres (dont commissaires-priseurs judiciaires, hors avocats). De façon cumulée, les professions concernées par le projet représenteraient donc environ 42 % du chiffre d’affaires des professions juridiques, soit 8,3 Md€.

Ces chiffres sont concordants avec les données fiscales utilisées par la mission de l’Inspection générale des finances : en 2010, les notaires ont réalisé un chiffre d’affaires d’environ 5,6 milliards d’euros ; les huissiers de justice 1,0 Md€ ; les greffiers de tribunaux de commerce 219 M€ ; les commissaires-priseurs judiciaires 105 M€ ; les administrateurs judiciaires 100 M€ et les mandataires judiciaires 228 M€. Soit au total : 7,2 Md€.

Le chiffrage exact du gain de pouvoir d’achat dépendra de l’expertise des coûts qui sera réalisée dans le cadre de la définition par les autorités compétentes du nouveau dispositif.

Impacts pour les entreprises

En tant qu’usager des officiers publics et ministériels ou des administrateurs et mandataires judiciaires, les entreprises bénéficieront également des baisses de tarifs que pourra induire le nouveau dispositif de régulation.

S’agissant des professionnels concernés, ils bénéficieront d’un tarif fondé sur les coûts. Les tarifs prévoiront une péréquation entre différents types de prestations de façon à garantir l’équilibre interne aux études. Le système de prix permettra également la compensation d’éventuelles charges imputables à des obligations imposées au titre de la continuité du service public de la justice.

Impacts pour les administrations 

La charge de travail qui sera induite par le nouveau dispositif ne devrait pas nécessiter une dépense budgétaire additionnelle. Une redéfinition de l’ensemble des tarifs sera nécessaire dans un premier temps. Elle pourra être étalée dans le temps. Les administrations concernées et les services de l’Autorité de la Concurrence seront donc en mesure de prendre en charge ces travaux à effectifs constants.

Une fois franchie cette première étape, et définie une nouvelle méthodologie de tarification, les expertises nécessaires pour les révisions périodiques de tarifs représenteront une charge de travail moins lourde. En tout état de cause, la périodicité des révisions tarifaires sera définie de façon réaliste en tenant compte des charges administratives induites pour les services de l’État.

Impacts juridiques

Le dispositif envisagé est de nature à garantir une meilleure conformité de la régulation des tarifs des officiers publics et ministériels aux principes généraux du droit interne applicables aux redevances pour services rendus.

Les tarifs réglementés perçus en contrepartie d’une prestation de service public peuvent, pour autant qu’ils ne relèvent pas des « taxes de toutes nature », s’apparenter à des « redevances pour service rendu »120, selon la définition qu’en a donné le Conseil d’État dans l’arrêt Syndicat national des transporteurs aériens121 de 1958 : « toute redevance demandée à des usagers en vue de couvrir les charges d’un service public déterminé […], et qui trouve sa contrepartie directe dans les prestations fournies par le service […]. » Le fait que le service public soit délégué à des personnes privées ne fait pas un obstacle à ce qu’une taxe ou une redevance le finance. Pour le Conseil d’État122, elles peuvent être perçues au bénéfice d'une personne autre que l'État, notamment par une « personne privée chargée d'un service public ».

Il ressort des grands principes de tarification du service public qu’une telle « redevance pour service rendu » ne doit pas, en principe, dépasser le coût du service public (en ce compris une rémunération raisonnable du professionnel auquel il est délégué). C’est précisément cette idée de contreparties et d’équivalence que le projet rétablit. Comme le souligne le Conseil d’État dans un rapport de 2002 : « il paraît naturel de rapprocher le produit de ces redevances du coût des services qu’elles financent. »123 Le projet vise donc à mettre en conformité la tarification des officiers publics et ministériels et des mandataires de justice avec les principes de financement du service public : les tarifs réglementés doivent refléter la valeur du service rendu aux usagers.

Ce dispositif est a priori conforme à l’ordre juridique de l’UE dans la mesure où les activités en cause échappent au droit européen car elles relèvent de l’exercice de l’autorité publique. Dans l’hypothèse où interviendrait une évolution jurisprudentielle qui soumettrait ces activités aux règles applicables aux SIEG (services d’intérêt économique général), le dispositif envisagé garantirait la pleine conformité de la régulation tarifaire de ces activités au droit européen124.

Depuis son arrêt du 24 mai 2011, la Cour de Justice considère que les notaires ne disposent pas de prérogatives de puissance publique. Dans le cadre de leurs missions d’intérêt général, ces officiers publics et ministériels doivent donc être qualifiés d’ « entreprises » au sens du droit de l’Union. Leurs activités d’intérêt général peuvent le cas échéant constituer des SIEG. En effet, le droit européen (cf. jurisprudence Altmark125) exige que les compensations dont bénéficient les SIEG ne dépassent ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes et d'un bénéfice raisonnable.

5. Consultations menées

Cette mesure a fait l’objet d’une présentation aux organisations professionnelles concernées. Ces dernières ont ensuite été consultées formellement sur la base du dispositif envisagé. A également été consultée l’Autorité de la Concurrence, qui avait en outre été préalablement saisie à titre consultatif au sujet de la régulation de ces tarifs réglementés.

Enfin, l’Assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna doit être consultée.

6. Textes d’application et outre-mer

La mise en œuvre du dispositif prévu au nouveau titre IV bis du code de commerce nécessitera l’adoption d’un décret en Conseil d’État, sur le rapport du ministre chargé de la justice et du ministre chargé de l’économie, après avis de l’Autorité de la Concurrence. Ce décret en Conseil d’État précisera les modalités d’application du dispositif, notamment :

- les méthodes d’identification et d’évaluation des coûts du service rendu, et de définition de la rémunération raisonnable ;

- la fréquence de révision des minima et maxima tarifaires ;

- la prise en compte de la péréquation entre prestations.

Sur cette base, les différents tarifs de chaque profession seront encadrés par un arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de l’économie. Enfin, la mise en œuvre du dispositif nécessitera l’adoption de six arrêtés d’information tarifaire, pour chacune des professions concernées sur la base de l’article L. 113-3 du code de la consommation modifié.

Les dispositions du code de commerce seront applicables aux collectivités d’outre-mer dans les conditions suivantes :

- applicables en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion et à Mayotte (identité législative), sans qu’il soit requis d’en faire mention expresse, ni de prévoir d’adaptations spécifiques ;

- applicables à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les Terres australes et antarctiques françaises et l'île de Clipperton (spécialité législative, mais applicabilité de plein droit prévue dans les statuts), sans qu’il soit requis d’en faire mention expresse, ni de prévoir d’adaptations spécifiques ;

- applicables à Wallis-et-Futuna (compétence de l’État), sous réserve d’en faire la mention expresse dans le projet, mais sans qu’il soit besoin de prévoir de mesure d’application ;

- non-applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française (compétence exclusive des collectivités d’outre-mer concernées).

Concernant l’introduction de dispositions particulières dans cette collectivité à l’outre-mer, il est nécessaire de consulter préalablement l’Assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna.

L’article L.113-3 du code de la consommation est applicable dans tous les départements d’outre-mer, ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les Terres australes et antarctiques françaises et l'île de Clipperton (spécialité législative, mais applicabilité de plein droit prévue dans les statuts). La nouvelle disposition est applicable à ces territoires sans mention expresse. L’article L.113-3 du code de la consommation n’est pas applicable à Wallis-et-Futuna et le Gouvernement n’entend pas modifier cette situation. En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, les matières concernées relèvent de la compétence exclusive de ces collectivités d’outre-mer en vertu de leurs statuts.

Article 13 (1° à 3° et 5° du I et II)

Postulation et tarifs des avocats

1. État des lieux

La profession d’avocat est régie par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, et par trois décrets d’application (décret n° 91-1197 des 27 novembre 1991, décret n° 92-680 20 juillet 1992 et décret n° 93-492 25 mars 1993).

L’article 5 de la loi du 31 décembre 1971 dispose que les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale devant toutes les juridictions et organismes juridictionnels ou disciplinaires. En revanche, ils ne peuvent exercer leur activité de représentation (postulation) que devant les tribunaux de grande instance près desquels leur barreau est constitué et devant la cour d’appel dont ce tribunal dépend, depuis la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 qui a supprimé la profession d’avoué.

Cette contrainte induit un monopole territorial de la postulation des avocats. Ce principe général connaît une exception appelée multipostulation, qui autorise les avocats inscrits au barreau de l’un des tribunaux de grande instance d’une même zone géographique à postuler devant chacune des juridictions. Cette faculté est actuellement limitée à trois régions : Bordeaux / Libourne, Nîmes / Alès et Paris / Bobigny / Créteil / Nanterre.

Les honoraires des avocats sont déterminés librement avec le client, à l’exception des tarifs applicables aux bénéficiaires de l’aide juridictionnelle et du tarif de postulation. Le tarif réglementé de postulation repose sur un système de droits fixes et de droits proportionnels calculés sur le montant, non pas du litige défini ex post par le juge, mais des demandes formulées au juge ex ante.

Dans le ressort d’une même cour d’appel, la taille extrêmement réduite de l’échelon du monopole territorial de postulation conduit à un problème de lisibilité de l’action de l’avocat vis-à-vis de son client et à un renchérissement du coût de son intervention dans un autre tribunal de grande instance que celui de son barreau de rattachement. Cette limitation territoriale de la postulation résulte d’héritages historiques qui ne sont plus justifiés aujourd’hui. Deux périmètres différents, un lié au tribunal de grande instance, l’autre à la Cour d’appel, créent des complexités inutiles. Ils supposent l’intervention obligatoire d’un représentant local pour les clients dont l’avocat est rattaché à un autre tribunal de grande instance du ressort de la même cour d’appel. Dans le département des Bouches-du-Rhône, par exemple, un avocat du barreau de Marseille est libre de postuler devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence. En revanche, il devra avoir recours à un avocat du barreau d’Aix-en-Provence pour une affaire traitée par le tribunal de grande instance de cette même ville.

Le caractère inadapté de ce dispositif rigide est de plus en plus évident dans le contexte de développement de l’économie numérique. Les procédures sont en effet gérées de façon croissante par voie électronique, à distance. Il sera possible de conserver un rôle aux avocats locaux tant que l’informatisation ne sera pas complète, mais sans que cela nécessite le maintien du caractère territorial de la postulation dans le périmètre défini aujourd’hui.

Aujourd’hui, il n’existe plus de motifs d’intérêt général de maintenir le monopole territorial de postulation des avocats dans le ressort du tribunal de grande instance, source de complexité des relations de l’avocat à son client, défendu par un professionnel différent selon le ressort géographique du tribunal de grande instance ou de la Cour d’appel et de renchérissement du coût des procédures, sans qu’un surcroît de qualité lié à la postulation elle-même, soit nécessairement indentifiable dans le ressort d’une Cour d’appel.

Compte tenu de l’intensification de la concurrence des activités de postulation des avocats (désormais possibles devant l’ensemble des tribunaux de grande instance d’une même cour d’appel), le maintien d’un tarif réglementé de postulation ne paraît plus nécessaire.

2. Description des objectifs poursuivis

Le dispositif envisagé vise à simplifier et moderniser les règles de représentation devant les juridictions en permettant aux justiciables d'être représentés par un seul auxiliaire de justice devant tous les tribunaux de grande instance du ressort d’une même cour d’appel ; le dispositif entend également limiter les frais de procédure devant ces juridictions ; il poursuit ainsi un but d'intérêt général d’accès moins cher et plus simple au service public de la justice. Les exceptions actuelles sont maintenues dans la région Ile-de-France.

Par ailleurs, il est envisagé de renforcer la protection des consommateurs en habilitant les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à contrôler le respect par les avocats des règles spécifiques qui leur sont applicables en matière de loyauté de l’information tarifaire.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales. L’encadrement des fonctions d’avocats relève donc de la loi.

L’objectif poursuivi par le projet vise à élargir la territorialité du monopole de postulation des avocats à l’ensemble des tribunaux de grande instance du ressort d’une même cour d’appel, sous réserve qu’ils soient inscrits dans l’un des barreaux de ce ressort, et un principe de liberté tarifaire des prix de postulation.

Le dispositif retenu consistera à :

- autoriser les avocats à postuler devant l’ensemble des tribunaux de grande instance du ressort de la cour d’appel au sein de laquelle ils ont établi leur résidence professionnelle, et devant ladite cour d’appel ;

- supprimer l’encadrement règlementaire des tarifs de postulation des avocats, en instaurant un principe de liberté tarifaire ;

- habiliter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à contrôler le respect par les avocats des règles spécifiques qui leur sont applicables en matière de loyauté de l’information tarifaire.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et pour les particuliers

Compte tenu de l’intensification de la concurrence qui en résultera, la mesure entraînera une réduction sensible du coût de la postulation pour les consommateurs-clients des avocats. L’Annuaire Statistique de la Justice (édition 2011-2012) dénombre 1,2 million d’affaires nouvelles devant les cours d’appel et devant les tribunaux de grande instance : en retenant l’hypothèse d’un montant de litige moyen de 10 000 €, soit 120 € de frais de litige, le total des frais de postulation pour ces 1,2 million de litiges serait de 144 millions €.

La mesure renforcera la protection économique des consommateurs grâce à la garantie d’une meilleure effectivité des règles relatives à la loyauté de l’information tarifaire applicables aux avocats.

Impacts pour les entreprises

S’agissant de l’Impacts sur les avocats, les travaux de consultations réalisés dans le cadre de l’élaboration du projet ont montré qu’une partie des professionnels y étaient favorables. D’autres, en revanche, redoutent que la suppression de la territorialité de la postulation ne réduise l’intérêt à ouvrir des bureaux secondaires, et qu’il en résulte des inconvénients, par exemple pour les permanences pénales et les aides juridictionnelles dans certaines régions. Cependant, les professionnels qui ont exprimé ces préoccupations n’ont pas été en mesure d’illustrer les cas où la réforme aurait un Impacts négatif. Enfin, d’autres professionnels ont suggéré la suppression du tarif réglementé de postulation en maintenant le principe du monopole territorial restreint à un seul tribunal de grande instance.

L’extension de la territorialité du monopole de postulation au ressort de la cour d’appel bénéficiera aux avocats dans la mesure où elle leur permettra de proposer à leur client une prestation complète devant un plus grand nombre de tribunaux de grande instance, prestation dont ils définiront par ailleurs intégralement le tarif. Elle leur permettra de tirer pleinement profit du développement des nouvelles technologies de numérisation des procédures judiciaires qui est en cours.

Impacts pour les administrations

L’extension du ressort de la territorialité de la postulation permettra au système judiciaire de bénéficier également des gains d’efficience générés par un recours accru aux nouvelles technologies de numérisation des procédures judiciaires, dans la mesure où cette suppression est un facteur de simplification des procédures (réduction du nombre d’interlocuteurs).

Impacts juridiques

En droit interne, la mesure nécessitera la modification de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ainsi que de l’article L. 141-1, III, du code de la consommation.

5. Consultations menées

- collectivités territoriales d’outre-mer de Saint Pierre et Miquelon, Polynésie Française, Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna ;

- département d’outre-mer de Mayotte ;

- Conseil National des Barreaux ;

- Conférence des Bâtonniers.

6. Textes d’application et outre-mer

Le dispositif retenu entend modifier la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, notamment ses articles 1er, 5, 8 et 10, et insérer à l’article L 141-1, III, du code de la consommation la référence à l’article 10 de la loi de 1971 précitée, afin d’habiliter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à rechercher, constater et poursuivre les manquements aux obligations fixées à cet article.

6.1. Sur la modification du code de la consommation

La mesure entend modifier l’article L 141-1, III, du code de la consommation afin d’habiliter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à rechercher, constater et à sanctionner les manquements aux obligations figurant à l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1970 relative aux avocats. Dans la mesure où cette habilitation constitue une loi de souveraineté, cette disposition est applicable de plein droit dans toutes les collectivités d’outre-mer, quel que soit leur statut, sans mention expresse.

6.2. Sur la modification de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1970 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques

Le régime applicable aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution est celui de « l'identité législative ». Les lois et règlements y sont applicables de plein droit sauf mention expresse d’inapplicabilité, ce qui est le cas actuellement pour Mayotte, en vertu de l’article 81 de la loi de 1971 précitée. Le Gouvernement n’entend pas modifier cette situation.

Les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint Pierre et Miquelon126 prévoient l’application de plein droit des dispositions du droit national relatives à la profession d’avocat, sauf mention expresse d’inapplicabilité, ce qui est le cas actuellement pour Saint-Pierre-et-Miquelon, en vertu de l’article 81 de la loi de 1971 précitée. Le Gouvernement n’entend pas modifier cette situation.

Dans les collectivités d’outre-mer régies par les articles 72, 74, 76 et 77 de la Constitution, les règles applicables à la profession d’avocat relèvent de la compétence de l’État avec mention expresse : l’article 81 de la loi de 1971 précitée prévoit une mention expresse d’applicabilité pour la Polynésie Française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna. Le Gouvernement n’entend pas modifier cette situation.

Enfin, les textes actuels applicables aux avocats n’ont pas été étendus aux TAAF et l’île de Clipperton. Aussi, il n’est pas prévu que la présente mesure s’y applique.

6.3. Mesures d’adaptation prévue dans le projet de loi

La mesure entend modifier certains articles de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 qui, actuellement, sont applicables ou non à certains territoires ultra-marins. Aussi, en application de la jurisprudence du Conseil d’État (CE, 9 février 1990, Commune de Lifou), le dispositif retenu prévoit de conserver ces modalités d’application en outre-mer, qui figurent actuellement à l’article 81 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.

Article 13 (4° du I)

Simplifier l’ouverture de bureaux secondaires par les avocats

1. État des lieux

Les avocats sont tenus de fixer leur domicile professionnel dans le ressort du tribunal de grande instance auprès duquel ils sont établis (décret du 27 novembre 1991, article 165). Cette question du domicile est importante car, si les avocats peuvent plaider sans limitation territoriale devant toutes les juridictions et organes juridictionnels, ils exercent exclusivement la postulation - c'est-à-dire les activités antérieurement dévolues au ministère obligatoire de l’avoué - devant le seul tribunal où ils ont leur résidence professionnelle (loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, article 5).

En vertu de l’article 8-1 de la loi du 31 décembre 1971, les avocats disposent de la faculté d’établir un ou plusieurs bureaux secondaires après déclaration au conseil de l’ordre du barreau auquel ils appartiennent. Lorsque le barreau secondaire est situé dans le ressort d’un barreau différent de celui où est établie sa résidence professionnelle, l’avocat doit en outre demander l’autorisation du Conseil de l’ordre du barreau dans le ressort duquel il envisage d’établir le bureau secondaire.

Les articles 166 à 169 du décret du 27 novembre 1991 précisent les règles à suivre :

a) la décision d'autorisation est notifiée au procureur général qui peut relever appel devant la cour dans les quinze jours ; elle est également portée pour information à la connaissance du bâtonnier dont relève l'avocat, lequel en informe son propre procureur général (article 166 et 167, alinéa 1er) ;

b) la décision de refus est notifiée à l'intéressé et au procureur général qui peuvent relever appel devant la cour dans les quinze jours également (article 166) ;

c) la décision implicite d'autorisation résultant du silence du conseil de l'ordre oblige l'avocat qui en bénéficie à informer de l'ouverture effective de son bureau son propre bâtonnier, qui en informe le procureur général compétent et le bâtonnier du barreau d'accueil ; il doit aussi en prévenir le procureur général du ressort dont dépend le bureau secondaire, lequel peut relever appel dans les conditions de l'article 16 du décret.

Il faut noter que des dispositions dérogatoires existent en région parisienne où les avocats des barreaux de Paris, Bobigny, Créteil et Nanterre peuvent librement postuler dans les 4 ressorts à la triple condition d'être avocat plaidant, de ne pas intervenir au titre de l'aide juridictionnelle et de ne pas mener hors de leur barreau une procédure de saisie immobilière, partage ou licitation (loi du 31 décembre 1971, article 1er, III).

Les avocats de ces barreaux peuvent par dérogation au droit commun : garder leur domicile professionnel principal en dehors du ressort de leur barreau de rattachement, si ce domicile a été établi avant le 16 septembre 1972 (article 1er, III, dernier alinéa) ; n'ouvrir un bureau secondaire dans la circonscription formée par ces quatre tribunaux de grande instance que dans le seul ressort du barreau auquel ils appartiennent (article 8-2).

Le nombre de bureaux secondaires ouverts dans le ressort des barreaux par des avocats non-inscrits à ces barreaux a augmenté de 56% entre 2002 et 2012, passant de 699 à 1 088127, preuve qu’il y a une véritable demande de la part des professionnels.

2. Description des objectifs poursuivis

Il est prévu de remplacer l’actuelle procédure d’autorisation administrative, qui contraint la création et le développement de l’activité des professionnels avocats, par un régime déclaratif, source d’une plus grande souplesse pour les professionnels.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Cette adaptation permettra de réaliser des économies de formalités pour les autorités compétentes comme pour les professionnels.

S’agissant des professionnels, la transformation d’un régime d’autorisation en simple déclaration permet un allègement de charges administratives (constitution du dossier de demande d’autorisation, compléments apportés pour répondre aux exigences de l’administration qui l’instruit). La formalité de déclaration est plus légère et peut parfois se résumer au fait de remplir un simple formulaire de type Cerfa et de l’adresser à l’administration compétente.

Cette transformation est également un facteur d’accélération de la vie économique puisqu’elle permet un démarrage de l’activité ou du projet plus rapide, dès le dépôt de la déclaration, et ce sans attendre la délivrance éventuelle d’une autorisation d’exercer. Ce gain peut être apprécié par le chiffre d’affaires anticipé perçu grâce à la réduction de ces délais.

D’autres bénéfices résultent de ce que l’activité parviendra plus tôt à son régime de profitabilité et de la possibilité de lever les incertitudes sur l’obtention finale de l’autorisation, donc sur un éventuel blocage du projet. Ce supplément d’activité économique se traduira aussi par des investissements et des dépenses qui peuvent avoir, au niveau de la collectivité, un effet d’entraînement favorable (anticipation de croissance du PIB et d’emploi) et un effet positif sur la trésorerie de l’État ou des collectivités territoriales (perception anticipées de taxes).

Pour les autorités compétentes, la substitution d’une simple déclaration à une autorisation permet d’économiser le temps et les ressources qui étaient préalablement consacrés à l’instruction des dossiers et à la préparation de la décision. L’estimation de l’économie nette doit néanmoins prendre en compte les interventions possibles pour traiter la déclaration (contrôle de validité, accusé de réception, enregistrement ou classement, etc.).

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Article 14

Liberté d’installation des notaires

Article 15

Liberté d’installation des huissiers de justice

Article 16

Liberté d’installation des commissaires-priseurs judiciaires

Article 17

Présence de proximité des offices publics et ministériels

1. État des lieux

1.1. Conditions de titularisation des officiers publics et ministériels

Les officiers « ministériels » sont titulaires d'un office conféré par l'État. Ils sont nommés par une décision des pouvoirs publics. Certains d'entre eux sont également officiers « publics » en raison du pouvoir que l’État leur confère d'authentifier des actes juridiques ou judiciaires et de procéder à l'exécution des décisions de justice.

Quatre professions cumulent les qualités d’officiers publics et ministériels. Il s’agit des commissaires-priseurs judiciaires, des greffiers de tribunaux de commerce, des huissiers de justice et des notaires.

L’exercice de ces fonctions d’officier public et ministériel n’est actuellement possible que dans le cadre d'un régime de numerus clausus. Cela signifie que le nombre des offices est, pour chacune des professions concernées, limité en principe à l'existant. Aussi, le principe d'une libre installation n'existe pas dans ces professions, la seule exception étant les créations d'office, très rares, décidées par le garde des sceaux, ministre de la justice.

Lorsqu’ils cessent leurs fonctions, les officiers publics et ministériels disposent du droit de présenter leur successeur à l’agrément du garde des sceaux, ministre de la justice. L’article 91 de la loi du 28 avril 1816 dispose, à cet égard, que « les avocats à la Cour de cassation, notaires, greffiers, huissiers, agents de change, courtiers, commissaires-priseurs pourront présenter à l'agrément de sa Majesté des successeurs, pourvu qu'ils réunissent les qualités exigées par les lois. Cette faculté n'aura pas lieu pour les titulaires destitués. Les successeurs présentés à l'agrément, en application du présent alinéa, peuvent être des personnes physiques ou des sociétés civiles professionnelles ».

Ce droit de présentation est un droit personnel, au sens où il est attaché à la personne du titulaire de l'office. En tant que tel, et parce qu'il est étroitement lié à la souveraineté étatique et à l'intérêt public, le droit de présentation est un droit mobilier incorporel qui se situe « hors commerce » (Cour d’appel de Riom, 10 février 1845). Il en résulte qu’il ne peut pas être cédé à un tiers.

Cependant, la jurisprudence reconnaît la patrimonialité de la « finance » de l’office : les conventions à titre onéreux par lesquelles les titulaires d'offices présentent un successeur à l'agrément du garde des sceaux, ministre de la justice, sont validées (Cass. 1re civ. 16 juill. 1985). La présentation n'a pas nécessairement pour bénéficiaire une personne physique : il est admis qu'elle puisse être opérée au profit d'une personne morale, telle qu'une société civile professionnelle ou une société d'exercice libéral.ce128e

Ainsi, il faut distinguer le titre d'officier de la finance de l’office, qui renvoie à sa valeur patrimoniale : strictement, il s’agit de la contrepartie financière de l'exercice du droit de présentation par le titulaire de l'office.

La succession au sein de l'office public et ministériel s'opère au moyen d'une convention appelée « traité de cession ». Elle est conclue entre le titulaire de l'office et son successeur. Elle doit être jointe à la lettre de présentation du successeur. Aux termes de cette convention, le titulaire prend l'engagement de démissionner et de présenter son cocontractant à l'agrément du garde des sceaux, ministre de la justice, pour lui succéder.

Les parties au traité de cession sont libres de déterminer le « prix » de l'office. La jurisprudence précise que les règles du droit commun de la vente mobilière s'appliquent aux cessions d'offices publics et ministériels, notamment l’impossibilité d’introduire une action en révision de prix. Pour autant, le garde des sceaux, ministre de la justice, est en droit de refuser son agrément s'il lui apparait que le prix stipulé n'est pas conforme aux usages de la profession ou aux considérations économiques locales.

Dans les départements du Bas Rhin, du Haut Rhin et de la Moselle, le droit de présentation n’existe pas. Dans ces départements, les officiers publics et ministériels sont nommés en fonction du mérite. Les candidats à la nomination doivent réussir les épreuves d’un examen ou d’un concours professionnel, qui vise notamment à contrôler leurs aptitudes en droit local. Au terme de ces épreuves, une commission de classement formule des propositions au garde des sceaux, ministre de la justice, en vue de la nomination des candidats (cet avis ne lie par le ministre). Les nouveaux officiers publics et ministériels, nommés par arrêtés, ne disposent pas du droit de présenter leurs successeurs. Leur départ en retraite ou leur décès emporte la vacance de l’office dont ils étaient titulaires, et sa réattribution par concours.

1.2. Répartition des offices publics et ministériels sur le territoire national

Actuellement, pour être titularisé en tant qu’officier public et ministériel par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, plusieurs voies sont possibles, selon qu’il s’agit d’un office existant (ou vacant) ou d’un office nouvellement créé.

En ce qui concerne plus spécifiquement les offices créés, leur nombre est décidé par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur proposition d’une commission :

- pour les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice, il s’agit de la commission prévue au chapitre V du titre II du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics et ministériels ;

- pour les notaires, il s’agit de la commission prévue au titre I du décret n°71-942 du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires. 

Ces commissions sont composées pour moitié de représentants des professionnels déjà installés. Elles sont chargées d’émettre des recommandations au garde des sceaux, ministre de la justice, sur la localisation des offices en fonction des besoins du public et de la situation géographique, démographique et économique. Elles établissent des prévisions quinquennales sur le nombre des titulaires d’offices et leur localisation. Leurs avis ne lient pas le garde des sceaux, ministre de la justice.

1.3. Difficultés d’accès aux titularisations

Au regard des prérogatives de puissance publique dont jouissent les officiers publics et ministériels, un contrôle administratif de leurs nominations semble justifié.

En revanche, la limitation du nombre des offices disponibles (numerus clausus) conduit à des conséquences économiques dommageables.

D’une part, le système actuel limite l’offre de services, qui ne correspond plus aux besoins. A titre d’exemple, depuis 1980, le nombre des notaires (titulaires et salariés) nommés par le garde des sceaux, ministre de la justice, n’a augmenté que de 30 %, alors que dans le même temps, le nombre annuel de transactions immobilières a crû de +100%129. Depuis 1980, le nombre d’études d’huissiers de justice a baissé de 18 %, les suppressions d’offices dans les zones rurales ne s’étant pas accompagnées de créations équivalentes dans les zones urbaines.

D’autre part, les nouveaux entrants ne sont pas favorisés, faute de créations suffisantes.

1.4. Inégalités territoriales d’accès aux missions assurées par les officiers publics et ministériels

En raison du système actuel de numerus clausus et des restrictions à l’installation, le maillage territorial des offices publics et ministériels n’est plus assuré convenablement aujourd’hui sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, il apparaît que dans les zones densément peuplées, la présence d’officiers publics et ministériels est inférieure à la densité habituelle.

À titre d’exemple, on compte 89 notaires pour 1,5 million d’habitants (soit un notaire pour 17 000 habitants) dans le département de la Seine-Saint-Denis alors que, dans le même temps, un département rural comme celui de l’Aveyron compte 60 notaires pour 275 000 habitants (soit 1 notaire pour 4 500 habitants).

Carte – Densité départementale des notaires (par 100 000 habitants)

Le constat est le même pour les huissiers de justice : alors qu’il n’y a que 3 à 4 huissiers pour 100 000 habitants dans la grande couronne parisienne, on en dénombre entre 6 et 8 en Lozère ou dans les Alpes-de-Haute-Provence.

Carte – Densité départementale des huissiers de justice (par 100 000 habitants)

Pour les commissaires-priseurs judicaires, alors que la densité est particulièrement forte à Paris intramuros, en Normandie, et en Bourgogne, elle est faible dans la grande couronne parisienne, en Languedoc-Roussillon ou en Rhône-Alpes.

Carte – Densité départementale des commissaires-priseurs judiciaires (par million d’habitants)

Ce déséquilibre territorial s’explique par les difficultés d’accès à ces professions résultant de leur mode de régulation actuel. Pour les huissiers de justice, par exemple, le nombre d’offices a baissé de 18% entre 1982 et 2012. Les recommandations de la commission de localisation ont conduit à acter la suppression d’études d’huissiers en milieu rural, sans création au même niveau dans les territoires urbains plus densément peuplés. Les titulaires installés dans ces zones urbaines ont par conséquent bénéficié d’un accroissement de leur activité en l’absence de liberté d’installation de nouveaux entrants. De même, pour les notaires, le nombre d’offices a baissé de 11% entre 1980 et 2012, soit par fusion d’offices lors d’un passage en société, soit par disparition de structures non compensées. Au cours des cinq dernières années, seulement 17 offices de notaires ont été créés chaque année en moyenne, soit à peine 0,4 % du nombre d’offices existants. Pour les commissaires-priseurs judiciaires enfin, le nombre d’offices a également décru de façon continue depuis 2000.

1.5. Justification de l’intervention étatique

1.5.1. Promouvoir l’égalité des chances pour l’accès aux fonctions d’officiers publics et ministériels

Le cadre juridique actuel a des conséquences économiques dommageables : il aboutit à une limitation de l’offre de services et une allocation sous-optimale de professionnels qualifiés et compétents désirant s’installer.

Au vu du faible nombre de création d’offices, les salariés de ces offices n’ont jamais pu constituer un vivier pour l’installation.

Le nombre des offices disponibles a évolué moins vite que celui des diplômés susceptibles d’être titularisés130.

À qualification égale, des inégalités salariales très importantes en résultent selon que les officiers publics et ministériels salariés sont en mesure d’être titularisés ou contraints à demeurer salariés. Alors que la rémunération d’un notaire salarié est de 3 075 euros mensuels bruts (en intégrant le 13ème mois) en début de carrière, et de 3 773 euros après quatre ans d’expérience, celle d’un notaire titulaire s’élève à 15 901 euros par mois en 2010 (soit près de 4 fois plus) pour les structures unipersonnelles imposées à l’impôt sur le revenu (38%), et à 21 325 euros par mois (soit plus de 5,5 fois plus) pour les structures pluripersonnelles imposées à l’impôt sur le revenu (60%).

Ces inégalités affectent plus particulièrement les femmes et les jeunes, dont l’emploi dans les fonctions d’officiers publics et ministériels résulte essentiellement du recours au salariat. Le niveau de revenu est, de fait, très inférieur à celui des titulaires des offices. De plus, ces jeunes et ces femmes ont peu accès ensuite à la titularisation dans les offices. Ainsi :

- 71 % des notaires titulaires d’offices sont des hommes (moyenne d’âge : 49 ans), tandis que 80 % des salariés sont des femmes ;

- 81 % des commissaires-priseurs titulaires sont des hommes (moyenne d’âge : 53 ans), tandis que 56 % des salariés sont des femmes ;

- 73 % des huissiers de justice titulaires sont des hommes (moyenne d’âge : 49 ans), tandis que 72 % des salariés sont des femmes.

La persistance d’inégalités fortes, en raison du statut, du sexe ou de de l’âge, s’explique par des restrictions à l’installation. Le cadre juridique actuel doit être modernisé. Le dé-contingentement du nombre d’offices publics et ministériels, permettra un réajustement automatique de l’offre de services aux besoins de la population et des entreprises, et améliorera les perspectives de carrière professionnelle d’un grand nombre d’officiers publics et ministériels salariés, notamment les plus jeunes et les femmes.

1.5.2. Assurer l’égalité des territoires dans l’accès aux services rendus par les offices publics et ministériels

L’implantation géographique des offices n’est plus en phase avec les besoins de l’économie et des populations. Une densité d’officiers publics et ministériels deux à trois fois moindre dans les zones urbaines que dans les zones rurales ne constitue pas un maillage territorial satisfaisant, ni ne permet d’assurer l’égalité des chances économiques entre les territoires. Or, le système actuel repose sur une carte des implantations d’offices qui n’a pas assez tenu compte des évolutions démographiques.

Aussi convient-il de substituer à l’actuelle gestion entièrement planifiée du nombre des offices publics et ministériels, un système plus souple de mise en adéquation de l’offre de services juridiques aux besoins de la population et des entreprises : la liberté d’installation. Cette mesure vise donc à corriger les défauts de répartition actuels des offices publics et ministériels.

Afin d’assurer un service public homogène sur le territoire national, il est également proposé de confier à une autorité indépendante un rôle clé dans l’identification des équilibres nécessaires au bon fonctionnement et à la cohésion territoriale des offices publics et ministériels au moyen d’une carte qui sera proposée aux Ministres de la Justice et de l’Economie, chargés de l’arrêter.

1. Description des objectifs poursuivis

La procédure actuelle de création de nouveaux offices publics et ministériels par le garde des sceaux, ministre de la justice, sera réformée afin qu'un plus grand nombre de candidats à l’installation puissent être titularisés.

La mesure envisagée vise à supprimer le contingentement et à instaurer un principe de liberté d’installation pour l’exercice des fonctions de certains officiers publics et ministériels. Ce nouveau cadre permettra une meilleure allocation des ressources de façon à mieux répondre aux besoins.

Compte tenu des spécificités de leur activité, il ne semble pas techniquement possible d’appliquer la mesure envisagée aux greffiers de tribunaux de commerce. En effet, ces derniers sont attachés à une juridiction commerciale. Leur résidence est donc fixée par la carte judiciaire. Le principe de liberté d’installation ne saurait leur être appliqué. Ainsi, la mesure s’appliquera à trois professions uniquement : les commissaires-priseurs judiciaires, les huissiers de justice et les notaires.

Les créations de nouveaux offices seront désormais régies par les principes suivants : l’implantation d’offices sera libre sur la base cependant d’une cartographie qui inclut une montée en charge progressive du nombre de zones où l’implantation d’offices est libre, de manière à ne pas causer de préjudice anormal aux offices installés.

. Le ministre de la justice pourra s’opposer à la création d’un office :

- Sur des critères liés à la qualité de la personne, avec des conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience, et d’assurance ;

- Dans les zones où l’autorité de la concurrence aura donné un avis défavorable à l’installation de nouveaux professionnels. Ces zones seront celles où l’implantation d’un office supplémentaire pourrait porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices déjà installés et risquerait de compromettre la qualité du service rendu. Le ministre de la justice pourra refuser l’octroi d’un office notamment en tenant compte des caractéristiques du territoire et du niveau d’activité économique des professionnels concernés. Les zones géographiques sont définies de manière détaillée sur la base d’une analyse démographique de l’évolution prévisible du nombre de professionnels installés. La cartographie comporte les recommandations sur le rythme d’installation compatible avec une évolution progressive de la présence des professionnels sur le territoire concerné.

Dans les zones où un manque de professionnels sera identifié, le ministre de la justice pourra également lancer un appel à candidature sur la création de nouveaux offices.

Un mécanisme d’indemnisation réel et efficace est prévu pour les professionnels installés. Ainsi, lorsque l'installation porte atteinte à la valeur patrimoniale d’un office existant, son titulaire est dédommagé, à sa demande, par le ou les titulaires des nouveaux offices dont la création a causé cette perte. Le juge de l’expropriation sera le juge de ce contentieux. Le professionnel alléguant un préjudice aura 6 ans pour lancer son action, le paiement de l’indemnité pouvant être étalé sur 10 ans par le juge.

Les conditions d’accès aux professions seront définies par décret en Conseil d’État, sur le rapport du ministre chargé de la justice et du ministre chargé de l’économie.

Les activités réservées de chacune des professions seront pleinement préservées.

Il est à noter que la mesure envisagée vise à confier à l’Autorité de la concurrence une nouvelle mission. Celle-ci consiste à proposer aux ministres de l’économie et de la justice une cartographie des zones où l’implantation d’offices est libres et celles où l’implantation d’offices supplémentaires serait de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants ou à compromettre la qualité du service rendu. La présence des offices publics et ministériels sur l’ensemble du territoire national, et à émettre des recommandations sur les moyens d’améliorer l’accès au service et la cohésion territoriale des offices publics et ministériels.

La cartographie établie par les ministres de l’économie et de la justice inclut une montée en charge progressive du nombre de zones où l’implantation d’offices est libre, de manière à ne pas causer de préjudice anormal aux offices installés.

2. Options possibles et nécessité de légiférer

L’objectif poursuivi par le projet vise à remplacer le dispositif actuel d’autorisation préalable par un principe de liberté d’installation encadrée, notamment pour permettre aux officiers publics et ministériels salariés d’accéder plus facilement qu’aujourd’hui à la titularisation dans de nouveaux offices. Il vise également à assurer la continuité de l’exploitation des offices existants et la cohésion territoriale des missions assurées par les commissaires-priseurs judiciaires, les huissiers de justice et les notaires.

L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales. L’encadrement des fonctions d’officier public et ministériel relève du seul niveau législatif.

Un décret en Conseil d’État, sur le rapport du ministre chargé de la justice et du ministre chargé de l’économie, sera pris pour définir les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience, et d’assurance pour l’exercice de ces professions.

3.1. Dispositif relatif à la liberté d’installation

Le projet vise à simplifier les procédures de titularisation et de création de nouveaux offices :

- le candidat à la titularisation transmet un dossier au garde des sceaux, ministre de la justice, avec l'ensemble des justificatifs permettant de vérifier qu’il remplit bien les conditions d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience, et d’assurance requises ;

- si le lieu d’implantation proposé par le candidat répond aux recommandations émises par l’Autorité de la concurrence, le garde des sceaux, ministre de la justice, nomme le candidat dans le lieu de son choix ;

- dans le cas contraire, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut refuser de procéder à la titularisation demandée.

3.2. Dispositif relatif à la présence de proximité des officiers publics et ministériels

Afin d’assurer une présence de proximité des offices publics et ministériels, le projet vise à insérer dans le livre Ier du code de l’organisation judiciaire un nouveau titre III.

Ce titre confère à l’Autorité de la concurrence une nouvelle mission consistant à rendre un avis sur la liberté d’installation des officiers publics et ministériels

L’Autorité identifie les zones géographiques dans lesquelles l’implantation d’offices publics et ministériels supplémentaires serait de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants et risquerait de compromettre la qualité du service rendu, ainsi que les zones géographiques où l’implantation des offices apparaît insuffisante. L’Autorité fait toutes recommandations en vue d’améliorer l’accès aux offices publics et ministériels et dans la perspective de renforcer la cohésion territoriale des prestations et de développer de façon progressive le nombre d’offices sur le territoire. Ces recommandations et la cartographie dont elles sont assorties sont rendues publiques tous les deux ans..

1. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et pour les particuliers

En facilitant l’installation de nouveaux entrants, le projet permettra davantage d’innovation. Cette mesure permettra d’améliorer la compétitivité des entreprises et de restituer du pouvoir d’achat aux ménages usagers de services juridiques.

Ce dé-contingentement et le libre choix par le professionnel de la localisation géographique de son office, sous le contrôle de l’Autorité de la concurrence et du garde des sceaux, ministre de la justice, permettront de mieux répondre aux besoins des entreprises et de la population.

La mesure permettra également de réduire les inégalités en facilitant la titularisation rapide des actuels officiers publics ministériels salariés, en grande majorité jeunes ou femmes.

Impacts pour les entreprises

Le dispositif actuel freine, à long terme, le développement de l’offre des services juridiques, à la fois quantitativement (moins d’installations) et qualitativement (moins de gains de productivité).

Le mécanisme d’indemnisation prévu par le projet reprend le principe actuellement en vigueur (ordonnance du 26 juin 1816 pour les commissaires-priseurs judiciaires, décret n°75-770 du 14 août 1975 pour les huissiers, et décret n°71-942 du 26 novembre 1971 pour les notaires) qui prévoit que les nouveaux entrants indemnisent les titulaires d’offices déjà installés si ces derniers subissent un préjudice du fait de leur arrivée. Les professionnels déjà installés seront le cas échéant indemnisés, dans les conditions fixées par la loi et l’Autorité de la concurrence.

Impacts pour les administrations

Compte tenu des nouvelles missions confiées à l’Autorité de la concurrence, le projet conduira à la suppression des commissions de localisation actuelles, dont le secrétariat est assuré par la Chancellerie. Les moyens mis en œuvre pour le fonctionnement de ces commissions pourront donc être réallouées à d’autres missions assurées par le ministère de la justice.

S’agissant des moyens de l’Autorité de la concurrence, compte tenu des missions qui lui sont confiées, l’évaluation de la charge de travail conduit à estimer qu’elle pourra être supportée par elle.

Impacts juridiques

Ce dispositif est a priori conforme au droit de l’Union Européenne. Les activités des officiers publics et ministériels échappent aux directives en vigueur. Dans l’hypothèse où interviendrait une évolution jurisprudentielle qui soumettrait ces activités aux règles applicables aux SIEG (services d’intérêt économique général), le dispositif envisagé serait également en pleine conformité avec le droit européen131.

Outre les modifications législatives auxquelles elle procède, la mesure n’affectera pas l’ordre juridique interne. Elle vise à modifier la loi du 25 ventôse an XI s’agissant des notaires, l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers et l’ordonnance du 26 juin 1816 relative aux commissaires-priseurs judiciaires.

Impacts sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Les femmes représentaient 42,8 % des 751 323 professionnels libéraux recensés en 2011. Ce pourcentage a augmenté en 2012 puisqu’elles représentaient 44% des professionnels libéraux. Cette statistique est relativement similaire au taux de salariées dans la population active (48%). L’observatoire de l’activité libérale fournit une répartition par sexe pour chacune des 86 professions répertoriées dans ce secteur. Le domaine de la santé apparaît le plus féminisé, avec 53,6 % de femmes, suivi de près par celui du droit (47,4 %), tandis que les secteurs techniques connaissent une sous-représentation des femmes (26,1 %).

Les professions réglementées du droit, concernées par ce projet de loi, ont une composition sexuée qui ne dénote pas d’inégalités en termes sexuées132. On observe une proportionnalité parfaite entre le pourcentage global de professionnelles libérales dans la branche du droit et de salariées féminines tous secteurs confondus. Il est ainsi possible d’émettre l’hypothèse que les mesures d’orientation des tarifs vers les coûts pour toutes les professions réglementées de droit, ne supposera pas une paupérisation d’une branche particulièrement féminisée, puisqu’elle l’est tout autant que le reste de la population salariée.

On constate toutefois des pourcentages plus différenciés quand l’analyse est faite entre les professions. Toujours selon les statistiques de l’Observatoire de l’activité libérale, le nombre de femmes par profession en 2012 est le suivant: 72 % de mandataires judiciaires à la protection des majeurs, 53% d’avocates, 36% de greffières des tribunaux de commerce, 29% de huissières de justice, 29% de mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises, 28% de notaires, 21% de commissaires-priseurs judiciaires, 17% d’administratrices judiciaires, 15% d’expertes auprès des tribunaux. Ces statistiques sexuées pourront être utilisées par la suite afin d’éclairer de façon plus précise les Impacts de ce texte sur chacune des branches du droit, au cas où on constaterait une différence entre les professions plus ou moins féminisées.

2. Consultations menées

Les dispositions envisagées ont été soumises aux organismes consultatifs suivants :

- Conseil supérieur du notariat 

- Chambre nationale des huissiers de justice 

- Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires

- Collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon

- Département d’outre-mer de Mayotte

3. Textes d’application et outre-mer

Les dispositions prévues conduisent à modifier :

- la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat : modification des articles 4 et 68 et abrogation des articles 31, 32 et 52 ;

- l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers : modification de l’article 3 et création d’un nouveau chapitre I bis ;

- l’ordonnance du 26 juin 1816 relative aux commissaires-priseurs judiciaires : modification des articles 1-1, 3 et 12, création d’un article 1-1-1, suppression des alinéas 1 et 2 de l’article 1-2, abrogation des articles 1-3 et 2.

Les modalités des nouvelles prérogatives de l’Autorité de la concurrence seront précisées par voie règlementaire.

Le régime législatif et réglementaire applicable dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution est celui de « l'identité législative ». Les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Aucune mesure d’adaptation n’y est prévue.

Dans les collectivités d’outre-mer régies par les articles 72, 74, 76 et 77 de la Constitution, les règles applicables aux officiers publics et ministériels diffèrent selon qu’elles relèvent de leur compétence exclusive ou de celle de l’Etat :

- les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint Pierre et Miquelon133 prévoient l’application de plein droit des dispositions du droit national relatives aux officiers publics et ministériels. Aucune mesure d’adaptation n’y est prévue ;

- à Wallis-et-Futuna (article 4 de loi n°61-814 du 29 juillet 1961), dans les TAAF et à Clipperton (article 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955), les règles applicables aux officiers publics et ministériels relèvent de la compétence de l’Etat mais aucune mention expresse d’applicabilité n’existe actuellement. Le projet n’entend pas modifier cette situation. La mesure ne s’y appliquera donc pas ;

- la règlementation des officiers publics et ministériels relève de la compétence exclusive de La Polynésie française (articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004) et de la Nouvelle-Calédonie (l’article 22,15° de la loi organique 99-209 du 19 mars 1999) 134. La mesure ne s’y appliquera donc pas ;

- la mesure entend modifier certains articles de la loi du 25 ventôse an XI et de l’ordonnance du 26 juin 1816 qui prévoient actuellement une mention expresse d’application à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. Le gouvernement entend procéder à des aménagements rédactionnels des textes précités, afin qu’ils prennent en compte les récentes évolutions statutaires de ces deux territoires : Mayotte est devenue un département (application de plein droit des règles nationales) et Saint-Pierre-et-Miquelon applique le principe d’assimilation législative (application de plein droit des règles nationales). Il n’y a donc plus lieu aujourd’hui de prévoir de mention expresse d’applicabilité.

Mesure / code concerné

Proposition

Article(s) du projet de loi

Article 3 de l’ordonnance du 26 juin 1816 relative aux commissaires-priseurs judiciaires

Suppression de la référence à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte (« aménagement rédactionnel »)

Art. 5, 5°

Article 68, alinéa 1 de la loi du 25 ventôse an XI relative aux notaires

Suppression de l’alinéa 1 de l’article 68 en ce qu’il se réfère à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte (« aménagement rédactionnel »)

Art. 3, 3°

Article 18

Simplifier le recours au salariat dans les offices publics et ministériels

1. État des lieux

La possibilité d'exercice salarié dans les officiers publics et ministériels a été introduite par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 pour les notaires, avant d'être étendue aux huissiers de justice et aux greffiers de tribunaux de commerce (loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010), ainsi qu’aux commissaires-priseurs judicaires en 2011 (loi n° 2011-850 du 20 juillet 2011).

Cependant, la possibilité de recruter des officiers publics ministériels salariés fait l'objet de restrictions. Au sein de chaque étude ou greffe, la proportion de salariés est fonction du nombre de titulaires de l'office :

- pour les huissiers de justice, commissaires-priseurs judiciaires et greffiers de tribunaux de commerce, s’applique la règle dite du « 1 pour 1 », c’est-à-dire qu’une étude peut compter un officier salarié pour un officier à statut libéral ;

- pour les notaires, cette limite a récemment été portée à « 2 pour 1 » (au 1er mars 2014) par l'ordonnance n°2014-239 du 27 février 2014135.

Selon le rapport de l’Inspection générale des finances, on dénombrait, en décembre 2012, environ 900 notaires salariés, contre seulement 43 huissiers de justice salariés (sur 3234), 1 greffier de tribunal de commerce salarié (sur 234) et aucun commissaire-priseur judiciaire salarié.

S'agissant des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, la possibilité d'un exercice salarié de ces professions n'est pas encore prévue par le droit en vigueur.

Or, les exemples du notariat et ceux des autres officiers publics et ministériels montrent que l’introduction du salariat est un facteur de dynamisation des professions juridiques.

En effet, le salariat a rencontré un succès marqué dans le secteur du notariat, dont l’évolution ces dernières années montre que ce nouveau statut a permis l’amorce d’un renouvellement de la profession, que l’ouverture à la titularisation viendra parfaire, grâce à une augmentation de ses effectifs. Les salariés représentent déjà 10% du total des notaires et 30% des nominations entre 2012 et 2014 ont concerné des notaires salariés.

Le développement du salariat dans ces professions n’a pas induit une dévalorisation des fonctions, mais constitue un facteur de souplesse, en permettant l’exercice temporaire avant l’accession à l’association. Cette analyse paraît pleinement transposable aux administrateurs et mandataires judiciaires.

Dès lors qu'il est envisagé par ailleurs de moderniser les modes d'exercice des officiers publics ministériels et des mandats de justice136, la présente mesure vise à ouvrir à toutes les personnes répondant à des conditions de compétence, d'expérience, et d'honorabilité l'exercice salarié des fonctions de notaire, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, greffier de tribunal de commerce, administrateur judiciaire ou mandataire judiciaire.

Le salariat permettra aux candidats à l'exercice libéral de ces professions de préparer leur installation. Dans la mesure où les conditions d'installation des professions juridiques réglementées seront par ailleurs assouplies, il semble impératif de ne plus contingenter le nombre de places de salariés dans les structures existantes.

2. Description des objectifs poursuivis

L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales.

Les règles applicables au recours au salariat dans les offices publics et ministériels et dans les études d’administrateurs et mandataires judiciaires sont de nature législative.

Est ainsi prévue une habilitation à prendre par ordonnance les mesures envisagées.

Le nombre de salariés par structure d'exercice ne sera plus limité. Les professionnels concernés pourront donc bénéficier de deux modes d'exercice : l'exercice libéral et l'exercice salarié.

Dans les deux cas de figure, cet exercice s'effectuera sous le contrôle vigilant des chambres, conseils et ordres compétents, qui assureront un respect rigoureux des règles déontologiques ou professionnelles. À ce titre, les conditions de travail des salariés ne pourront en aucune façon porter atteinte à ces règles. Chaque salarié pourra continuer, comme aujourd’hui, de refuser à son employeur d'accomplir une mission lorsque celle-ci lui paraîtra contraire à sa conscience ou susceptible de porter atteinte à son indépendance.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et les particuliers

Cette mesure permettra aux usagers, particuliers ou entreprises, de bénéficier des services de professionnels plus nombreux, disposant du même niveau de compétence et de formation qu'actuellement.

En termes d’emploi, la mesure permettra à davantage de diplômés, notamment des jeunes diplômés, d’exercer en tant que salariés, avant de s’installer éventuellement à leur compte, les métiers d’administrateur judiciaire, de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d’huissier de justice, de mandataire judiciaire et de notaire.

Impacts pour les entreprises

La mesure devrait conduire à une modification de la politique de recrutement de salariés par les offices publics et ministériels et les personnes chargées d'un mandat de justice. Elle permettra, notamment aux plus dynamiques d'entre eux, de recruter davantage de salariés pour préparer l’accroissement du nombre d’associés, à terme. Cette nouvelle faculté offerte aux professionnels permettra de mieux accompagner le développement de leur activité. L'augmentation du nombre de places de salariés dans les structures existantes permettra à un plus grand nombre de candidats d'acquérir l'expérience nécessaire pour envisager sereinement une installation et un exercice libéral de ces professions.

Impacts juridiques

La mesure envisagée doit conduire à l’abrogation des dispositions suivantes :

- premier alinéa de l’article 1 ter de l’ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat ;

- deuxième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs ;

- deuxième alinéa de l'article 3 ter de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers ;

- premier alinéa de l'article L. 743-12-1 du code de commerce.

Elle consistera par ailleurs à introduire des dispositions permettant l'exercice salarié dans les parties du code de commerce relatives à l'exercice des professions d'administrateur judiciaire (articles L. 811-7 et suivants du même code) et de mandataire judiciaire (articles L. 812-5 et suivants du même code).

Pour les offices publics et ministériels, ce dispositif est a priori sans incidence sur l’ordre juridique de l’Union Européenne dans la mesure où les activités des officiers publics et ministériels échappent au droit européen car elles relèvent de l’exercice de l’autorité publique. Pour les administrateurs et mandataires judiciaires, la mesure envisagée sera applicable tant aux nationaux qu’aux ressortissants d’autres États membres. Dans ces conditions, elle est pleinement compatible avec les exigences du droit de l’UE.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

4. Consultations menées

- Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires ;

- Conseil supérieur du notariat ;

- Chambre nationale des huissiers de justice ;

- Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires ;

- Commission d'harmonisation du droit privé d'Alsace-Moselle ;

- Assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna.

5. Textes d’application et outre-mer

Le dispositif retenu consistera à introduire des dispositions permettant l'exercice salarié dans les parties du code de commerce relatives à l'exercice des professions d'administrateur judiciaire (art. L 811-7 et s.) et de mandataire judiciaire (art. L 812-5 et s.). Pour ces deux professions, pour lesquels la possibilité de recourir au salariat sera introduite, les règles applicables au règlement des litiges, au licenciement et à la cessation des fonctions de ces salariés seront précisées par voie réglementaire.

Le régime législatif et réglementaire applicable dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution est celui de « l'identité législative ». Les lois et règlements y sont applicables de plein droit, sans qu’il soit besoin de prévoir de mesures d’adaptation particulière.

5.1. S’agissant des officiers publics et ministériels

Les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint Pierre et Miquelon137 prévoient que les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Aucune mesure d’adaptation n’est en outre prévue.

A Wallis-et-Futuna (article 4 de loi n°61-814 du 29 juillet 1961), dans les TAAF et à Clipperton (article 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955), les règles applicables aux officiers publics et ministériels relèvent de la compétence de l’Etat mais aucune mention expresse d’applicabilité n’existe actuellement. Le projet n’entend pas modifier cette situation. La mesure ne s’y appliquera donc pas.

La règlementation des officiers publics et ministériels relève de la compétence exclusive de La Polynésie française (articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004) et de la Nouvelle-Calédonie (l’article 22,15° de la loi organique 99-209 du 19 mars 1999) 138. La mesure ne s’y appliquera donc pas.

5.2. S’agissant des administrateurs et mandataires judiciaires

Dans les collectivités d’outre-mer régies par les articles 72, 74, 76 et 77 de la Constitution, les règles relatives aux administrateurs et mandataires judiciaires relèvent de la compétence de l’Etat et y sont applicables avec mention expresse :

- les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre et Miquelon prévoient que les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Aucune mesure d’adaptation n’est en outre prévue ;

- dans les TAAF et l'île de Clipperton, les dispositions législatives relatives au « droit commercial » sont applicables de plein droit (article 1-1, 7° de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955). Aucune mesure d’adaptation n’est prévue ;

- en Polynésie française et en Nouvelle Calédonie, aucune disposition ne prévoit l’applicabilité du livre VIII du code de commerce (sauf le titre II, mais non affecté par le projet). Le gouvernement n’entend pas modifier cette situation, la mesure ne s’y appliquera donc pas.

- à Wallis-et-Futuna, l’article L. 950-1, 8° du code de commerce prévoit que les dispositions du livre VIII dudit code sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, à l'exception « des articles L. 812-1 à L. 813-1 ». Il en résulte que le dispositif relatif aux administrateurs judiciaires est applicable, mais pas celui concernant les mandataires judiciaire. Le gouvernement n’entend pas modifier cette situation : la mesure devra donc être applicable aux administrateurs judiciaires.

Article 19

Habilitation
Ouverture et partage gratuit des données du RNCS

1. Difficultés à résoudre

L’article L.123-1 du code de commerce dispose que les personnes physiques ayant la qualité de commerçants et certaines catégories de personnes morales (sociétés civiles ou commerciales, groupements d'intérêt économique, établissements publics à caractère industriel ou commercial, etc.) sont tenues de s’immatriculer au registre du commerce et des sociétés (RCS).

Dans la plupart des départements métropolitains, ce registre est tenu par un greffier du tribunal de commerce, sous la surveillance du président ou d'un juge. Contrairement aux juridictions civiles et pénales, dont les greffes sont opérés par des agents de l’État depuis 1965, les greffes des tribunaux de commerce sont confiés à des officiers publics et ministériels nommés par le garde des sceaux, ministre de la justice. Bien que chargés d’une mission de service public, ils exercent sous statut privé.

Sur le reste du territoire national, il en va différemment : les greffes des chambres commerciales des tribunaux de grande instance des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, de même que ceux des tribunaux mixtes de commerce des départements et régions d'outre-mer sont confiés à des greffiers fonctionnaires de l’État.

Les données de chaque RCS sont transmises par voie électronique à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) qui les centralise pour constituer le registre national du commerce et des sociétés (RNCS). En volume, les déclarations collectées par les greffiers des tribunaux de commerce représentent environ 95 % du total des données transmises à l’INPI. Elles sont alors agrégées à celles des tribunaux mixtes d’Alsace-Moselle et des départements d’outre-mer (5 % du total). L’INPI dispose ainsi de l’ensemble des informations sur les sociétés immatriculées en France. Il a alors pour mission de diffuser les informations techniques, commerciales et financières contenues dans le registre centralisé (article L.411-1, 2° du code de la propriété intellectuelle).

Actuellement, les modalités de transmission des informations des RCS des greffiers des tribunaux de commerce vers l’INPI sont régies par des dispositions réglementaires (article A123-30 du code de commerce). Les délais réglementaires de transmission à l’INPI sont de quinze jours maximum à partir de la date du dépôt d’acte au greffe. Ces informations publiques sont particulièrement utiles à la vie des affaires. Les entreprises les utilisent abondamment, soit pour leur usage interne, soit pour les rediffuser en y apportant, le cas échéant, une valeur ajoutée. Pour le moment, l’accès aux données du RNCS suppose d’acquérir une licence de diffusion après avis du « Comité des licences ».

Depuis 1986, les greffiers des tribunaux de commerce se sont regroupés au sein d’un groupement d’intérêt économique (GIE), dénommé « Infogreffe », comme les articles L.251-1 et suivants du code de commerce le leur permettent. Lancé sur Minitel, puis sur Internet, Infogreffe assure à titre onéreux une diffusion dématérialisée de l’information juridique et économique sur les entreprises collectée par les greffes. Le succès commercial d’Infogreffe repose notamment sur sa maîtrise technique de la diffusion de masse des données informatisées. Selon le CNCGT, le site internet www.infogreffe.fr a enregistré plus de 12 millions de visiteurs uniques en 2011. Ces derniers ont commandé plus de 10 millions de documents et d’actes (dont 59 % d’extraits K-bis).

À la suite d’un accord intervenu en 2009, le GIE Infogreffe assure la diffusion technique du RNCS, par voie électronique, auprès des licenciés de l’INPI. Cet accord a permis la réalisation d’économies d’échelle importantes en évitant des redondances inutiles en matière de saisie de données et de diffusion des informations au public. Toutefois, il a rendu le GIE Infogreffe incontournable pour l’accès aux données légales des 3,5 millions d'entreprises françaises.

Pour financer cette prestation technique d’Infogreffe, l’accord prévoit un partage des recettes tirées des licences de rediffusion. Le tarif annuel de cette licence est de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Ce prix limite le nombre des entreprises qui ont accès à cette rediffusion. Plus encore, il apparait139

Directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public, JO n° L 345, 31/12/2003, p. 9, considérant 14 : « les États membres devraient inciter lesdits organismes à proposer les documents à des prix qui n'excèdent pas les coûts marginaux de reproduction et de diffusion.. À l’heure du numérique, les coûts de duplication et de diffusion sont de plus en plus réduits, de sorte que le coût marginal141 d’usage d’une information déjà produite tend vers la gratuité.

Une politique d’ouverture tend à favoriser des innovations de rupture, en permettant l’émergence de nouveaux usages des données, ou des améliorations de la qualité des services rendus.

Au-delà de la seule question du coût d’accès, il convient de veiller à la qualité des données publiques mises à disposition. Cette qualité joue sur le taux de dissémination auprès des ré-utilisateurs. A contrario, la simple mise à disposition d’informations brutes, non traitées, peut poser des difficultés de valorisation et freiner la rediffusion des données. Une politique d’ouverture des données publiques doit donc s’attacher à définir le format informatique de ces données, permettant de préciser le contenu et la contextualisation des données, qui conditionneront en partie leur rediffusion.

Le projet s’inscrit dans la politique d’open data menée depuis 2011 : sous l’autorité du Premier ministre142, la mission Etalab veille à ouvrir largement, librement et gratuitement les données publiques pour les mettre à la disposition du plus grand nombre. Cette stratégie est particulièrement bénéfique pour les données à fort Impacts sociétal ou potentiel d’innovation. Elle participe également de la modernisation de l’action publique.

Le cadre contractuel actuel entre l'Institut national de la propriété industrielle et son prestataire technique pour la diffusion du RNCS n’est plus adapté. Le gouvernement souhaite confier à l'INPI une nouvelle mission d'ouverture et de partage gratuit des données de ce registre.

Par ailleurs, le monopole de fait des greffiers de tribunaux de commerce pour la diffusion électronique des données du RNCS auprès des licenciés de l'INPI, qui vient s’ajouter au monopole des activités que leur réserve le code de commerce pour la délivrance de copies d’actes officiels, ne parait pas justifié économiquement.

2. Objectifs poursuivis

La mesure vise à améliorer la diffusion et la réutilisation des informations légales d’entreprises contenues dans le RNCS par une politique de diffusion libre, facile et gratuite.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales.

Les modifications portées à la centralisation et à la diffusion des données légales du RNCS relèvent des seules prérogatives du législateur, de même que la définition des missions confiées dans ce domaine à l’INPI.

Dans le nouveau dispositif, les greffiers pourraient transmettre sans frais et « par voie électronique » :

- des originaux des inscriptions effectuées au greffe, et des actes et pièces qui y sont déposés. Ces documents électroniques vaudraient originaux ;

- les résultats des retraitements des informations contenues dans les inscriptions, actes et pièces mentionnés à l’alinéa précédent. Cette transmission permettrait d’alimenter en temps réel une base de données nationale, dans un format informatique ouvert et compatible avec le RNCS pour favoriser l’interopérabilité et la réutilisation des données qu’il contient. Cette transmission sera réalisée sans délai pour permettre une actualisation en temps réels des données du RNCS.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

S’agissant de la « diffusion » des données légales d’entreprises auprès du public, le projet pourrait conforter la mission de l'Institut national de la propriété industrielle consistant à centraliser le RNCS, en lui confiant une nouvelle mission visant à assurer la diffusion et la mise à disposition gratuite du public, à des fins de réutilisation, des informations techniques, commerciales et financières contenues dans le RNCS.

Les activités réservées des greffiers de tribunaux de commerce en matière de collecte et de traitement de données locales du RCS seraient préservées : dans le cadre de leur mission d’intérêt général, ces officiers publics et ministériels continueraient à contrôler et apprécier la validité des demandes d’inscription, modification et radiation au RCS déposées par les entreprises. De même, les contestations entre assujettis et greffiers resteraient de la compétence du juge commis à la surveillance.

La mission consistant à transmettre les données légales d’entreprises aux fins de centralisation du RNCS par l’Institut national de la propriété industrielle est déjà assurée par les greffiers des tribunaux de commerce. Elle constitue le prolongement de leur mission de service public de tenue des registres locaux, pour laquelle ils perçoivent des redevances auprès des personnes tenues de s’immatriculer. Un projet d’orientation des tarifs de ces redevances vers les coûts ne nécessiterait pas de prévoir de rémunération supplémentaire au titre de cette mission, le coût des transmissions électroniques à l'Institut national de la propriété industrielle étant alors dûment pris en compte dans la détermination du tarif à percevoir par les greffiers de tribunaux de commerce.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Article 20 (I)

Habilitation
Simplifier l’accès aux professions d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire

1. Difficultés à résoudre

Les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires interviennent pour traiter les difficultés des entreprises dans les procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaire. Sur décision de justice, les administrateurs judiciaires sont chargés d’administrer les biens de l’entreprise en difficulté ou d’exercer des fonctions d’assistance ou de surveillance de ces biens ; les mandataires judiciaires sont mandatés pour représenter les créanciers de l’entreprise et procéder s’il y a lieu à sa liquidation.

Les fonctions d’administrateur judiciaire (article L. 811-2 du code de commerce) ou de mandataire judiciaire (article L. 812-2) ne peuvent être exercées, à titre professionnel et habituel, que par les personnes inscrites sur une liste établie par une commission nationale. La compétence territoriale des administrateurs judiciaires / mandataires judiciaires est nationale, mais en pratique le juge désigne généralement un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire dans le ressort territorial de sa cour d’appel.

Le code de commerce fixe les conditions requises pour être inscrit sur les listes : avoir subi avec succès l’examen d’accès au stage professionnel, accompli ce stage et réussi l’examen d’aptitude aux fonctions d’administrateur judiciaire (5° de l’article L. 811-5) ou de mandataire judiciaire (5° de l’article L. 812-3).

Des dispenses existent déjà pour certaines professions, dans des conditions variables : dispense totale de l’examen d’accès au stage professionnel, dispense possible d’une partie du stage professionnel et dispense partielle (à l'exception de la déontologie par exemple) ou totale de l’examen d’aptitude aux fonctions d’administrateur judiciaire (article R. 811-26) ou de mandataire judiciaire (article R. 812-14). C’est le cas des administrateurs judiciaires / mandataires judiciaires ayant exercé l’autre des deux professions pendant 3 ans au moins, des avocats, des notaires, des huissiers de justice, des greffiers des tribunaux de commerce, des experts comptables ou des commissaires aux comptes ayant exercé pendant 5 ans au moins leur profession et les juristes d’entreprise titulaires de certains titres ou diplômes et justifiant de 15 ans au moins de pratique professionnelle.

Enfin, le tribunal peut désigner « hors liste » des personnes justifiant d’une expérience ou d’une qualification particulière au regard de la nature de l’affaire et remplissant certaines conditions. Ces désignations sont en pratique exceptionnelles.

Le nombre des administrateurs et mandataires judiciaires a stagné sur la période récente : 118 administrateurs judiciaires en 2012 (contre 114 en 2005) ; 313 mandataires judiciaires en 2012 (contre 307 en 2005).

Toute chose étant égale par ailleurs, cette situation ne peut évoluer sensiblement même si à un nombre plus important de candidats à l’examen d’accès au stage que de professionnels obtenant leur retrait de la liste peut être espéré eu égard au nombre de stagiaires en légère augmentation, mais cette évolution peut apparaître encore insuffisante. En effet, la durée du stage est longue (trois ans), eu égard aux compétences pratiques requises, le nombre de candidats se présentant limité é, malgré l’existence de diplômes universitaires dans certaines universités, et, accessoirement, le nombre de places de stagiaires par structure est limité (à deux) par les règles professionnelles,. Dans ces conditions, le nombre de personnes susceptibles d’être intégrées sur les listes est très limité à court terme.

S’ajoute à ces effets un vieillissement de la population des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires : la moyenne d’âge des professionnels est actuellement d’environ 53,5 ans pour les deux professions..

En 2012, il y avait en France 431 administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires inscrits, dont la répartition par âge est la suivante :

Répartition des administrateurs et mandataires judiciaires par tranche d'âge (2012)

Les administrateurs judiciaires / mandataires judiciaires âgés de plus de 50 ans sont au nombre de 280. À l’horizon de dix ans, il sera donc nécessaire de procéder à un renouvellement. De plus, il est estimé qu’une centaine d’administrateurs judiciaires / mandataires judiciaires supplémentaires permettrait de mieux répondre aux besoins des entreprises, Conjugués, ces éléments renforcent le monopole territorial dont les administrateurs judiciaires notamment les mandataires judiciaires bénéficient de facto, et ce d’autant plus que les marges de souplesse prévues par la loi – les modes de désignation « hors liste » – ne sont pas utilisées en pratique par les tribunaux de commerce.

Il ressort en outre des statistiques fiscales étudiées par l’inspection générale des finances que :

- le chiffre d’affaire annuel des administrateurs judiciaires est d’environ 100M€ (résultat net comptable de 26,7 M€). La rémunération individuelle moyenne s’élève à environ 348000 € par an lorsque le professionnel est titulaire d’une structure unipersonnelle imposée à l’impôt sur le revenu (75 % des cas), soit quasiment 14 fois le revenu annuel moyen d’un salarié en France. Elle est de 437.000 € par an et par associé dans les structures d’exercice pluripersonnelles.

- le chiffre d’affaires annuel des mandataires judiciaires est de l’ordre de 230 M€ (résultat net comptable de 76,2 M€). La rémunération individuelle moyenne s’élève à environ 341.000 € par an pour les titulaires d’une structure unipersonnelle imposée à l’impôt sur le revenu (75 % des entreprises), soit près de 14 fois le revenu annuel moyen d’un salarié en France. Elle est de 377.000 € par an par associé pour les entreprises associant plusieurs personnes.

2. Objectifs poursuivis

Le projet vise à accroître rapidement le nombre de personnes qualifiées pour exercer les fonctions d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire.

C’est pourquoi, le gouvernement souhaite ouvrir de nouvelles voies universitaires et professionnelles d’accès à ces professions, en prévoyant la création d’un nouveau diplôme et en formant davantage d’étudiants à ces deux métiers. Il souhaite également élargir les conditions de dispenses d’examen d’accès au stage, de stage professionnel et d’examen d’aptitude.

Ce diplôme de niveau master sera créé par voie réglementaire par le ministre chargé de l’enseignement supérieur, sur le modèle du « diplôme supérieur du notariat », qui permet d’accéder à la profession de notaire.

De façon analogue, l’obtention de ce nouveau diplôme supérieur en administration et liquidation d’entreprises en difficulté permettra d’être inscrit sur les listes d’accès aux fonctions d’administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire, sans qu’il soit nécessaire de passer préalablement l’examen d’aptitude.

Il est à noter que l’ordonnance visera encore à renforcer la possibilité de dispense, totale ou partielle, des obligations de stage et de passage de l’examen d’aptitude. Ces dispenses seront désormais de droit lorsque seront remplies des conditions de compétence et d’expérience professionnelle fixées par décret en Conseil d’État.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et les particuliers

Le projet permettra de créer un nombre élevé d’emplois hautement qualifiés d’administrateurs judiciaires et de mandataires judiciaires. Pourront par exemple en bénéficier les licenciés en droit qui se destineront à ce nouveau diplôme supérieur en administration et liquidation d’entreprises en difficulté ou les personnes remplissant les conditions de compétence et d’expérience professionnelle, comme les actuels collaborateurs d’administrateurs judiciaires et de mandataires judiciaires.

Impacts pour les entreprises

Un accroissement du nombre d’administrateurs judiciaires et de mandataires judiciaires permettra de traiter plus rapidement les situations d’entreprises en difficulté, et d’améliorer leurs chances de survie.

Les professionnels déjà en place pourraient profiter des nouvelles libertés offertes par la loi pour développer leur activité, tout en disposant d’un avantage de notoriété lié à leur antériorité. Un tel développement serait d’autant plus aisé pour ces professionnels que la mesure s’accompagnerait d’une nouvelle faculté de créer sans entraves des bureaux annexes, d’avoir recours au salariat, et d’accéder plus aisément qu’aujourd’hui aux capitaux extérieurs.

Impacts pour les administrations

Sera créé, par le ministre chargé de l’enseignement supérieur, un diplôme de niveau master spécialisé dans l’administration et liquidation d’entreprises.

Selon l’édition 2014 des « Repères et références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche » du ministère de l’enseignement supérieur, le coût moyen d’une formation universitaire était, en 2012, de 10.940 € par étudiant et par an.

Cette dépense moyenne par étudiant prend en compte :

- la totalité des dépenses : dépenses courantes (personnels et fonctionnement), dépenses en capital, et dépenses de l’administration permettant l’organisation du système.

- le nombre d’élèves de l’année civile n, calculé en prenant deux tiers des effectifs de l’année scolaire n-1/n et un tiers de l’année scolaire n/n+1.

Comme précédemment indiqué, au vu des évolutions démographiques constatées (280 professionnels âgés de plus de 50 ans en 2012), les besoins en formation sont estimés à environ +/- 280 professionnels à horizon de 10 ans. La durée de la formation étant de trois ans, les effectifs d’étudiants par niveau sont estimés à environ 13 par année :

Année

Diplôme d’études supérieures

Diplôme supérieur d’administration et de liquidation d’entreprises en difficulté

Nombre total d’années d’études

Nombre de diplômés

 

L3

M1

M2

   

2015

13

0

0

13

0

2016

13

13

0

26

0

2017

13

13

13

39

13

2018

13

13

13

39

26

2019

13

13

13

39

39

2020

13

13

13

39

39

2021

13

13

13

39

39

2022

13

13

13

39

39

2023

13

13

13

39

39

2024

13

13

13

39

39

Total 2015-2024 (10 ans)

130

117

104

351

273

Sur la décennie 2015-2024, cette mesure représenterait un investissement d’environ 351 étudiants-année. Son coût budgétaire pour le ministère de l’enseignement supérieur est donc estimé à 3,83 M€ sur 10 ans, soit 383.000 € par an. En régime de croisière, 39 étudiants seront formés chaque année (soit 13 par niveau), pour un coût de l’ordre de 426.600 € par an.

Impacts juridiques

La mesure envisagée sera applicable tant aux nationaux qu’aux ressortissants d’autres États membres. Dans ces conditions, elle est pleinement compatible avec les exigences du droit de l’UE143.

En ce qui concerne les administrateurs et les mandataires judicaires, depuis la transposition de la directive 89/48/CEE du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, les articles L. 811-5 et L. 812-3 du code de commerce prévoient que « les personnes qui justifient avoir acquis, dans un État membre […] autre que la France […], une qualification suffisante pour l'exercice de la profession » d’administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire sont dispensées de conditions de diplôme, de stage et d'examen professionnel, sous réserve de subir « un examen de contrôle des connaissances ».

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

4. Consultations prévisionnelles

Le Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires sera par la suite consulté. En cas d’introduction de dispositions particulières dans les îles Wallis-et-Futuna, il sera nécessaire de consulter préalablement l’Assemblée territoriale de cette collectivité.

Article 20 (1° du II)

Habilitation
Création de la profession de commissaire de justice

1. Difficultés à résoudre

Actuellement, les professions de commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice et mandataire judiciaire sont encadrées par des statuts distincts :

- Les commissaires-priseurs judiciaires sont régis par l’ordonnance du 26 juin 1816 et par l’ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945.

Dans le cadre de leur monopole légal, les commissaires-priseurs judiciaires réalisent des estimations et des ventes judiciaires de biens meubles aux enchères publiques144. Par « judiciaires », il convient d’entendre les ventes « prescrites par la loi ou par décision de justice, ainsi que correspondantes »145. Ils peuvent donc être amenés à intervenir dans le cadre de procédures collectives (redressement et liquidations judiciaire), saisies-ventes, successions, tutelles, réalisations de gages, crédits municipaux. Si leur compétence territoriale est, en principe, nationale146, ils doivent intervenir « à titre habituel », dans le ressort du tribunal de grande instance du siège de leur office ou bureau annexe147. Ce monopole légal est en réalité une compétence partagée avec les autres officiers publics ou ministériels et les autres personnes légalement habilitées148, la compétence de ces derniers étant généralement limitée aux « lieux où il n'est pas établi de commissaires-priseurs judiciaires »149. Ainsi, les notaires et les huissiers de justice peuvent réaliser des ventes et prisées judiciaires de biens meubles dans leur « ressort d'instrumentation », à l'exception des communes où est établi un office de commissaire-priseur judiciaire. De même, les courtiers de marchandises assermentés peuvent organiser des ventes de marchandises en gros150, y compris en cas de liquidation judiciaire151.

Si, en principe, les commissaires-priseurs judiciaires ne peuvent « se livrer à aucun commerce en [leur] nom, pour le compte d'autrui, ou sous le nom d'autrui »152), ils peuvent, par exception153, être opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (OVV) ou procéder à des ventes de gré à gré de biens meubles en qualité de mandataire du propriétaire des biens. Ces activités concurrentielles font alors l’objet d’une séparation fonctionnelle : elles doivent être exercées dans des structures commerciales distinctes qui « peuvent se livrer, pour les besoins des ventes volontaires qu'elles sont chargées d'organiser, à des activités de transport de meubles, de presse, d'édition et de diffusion de catalogues. ». En outre, les commissaires-priseurs judiciaires peuvent « être autorisé[s] à exercer à titre accessoire certaines activités ou fonctions »154, dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État.

- Les huissiers de justice sont régis par l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945.

Les huissiers de justice exercent, à titre de monopole légal, des activités réservées, telles que la signification des décisions de justice et des autres titres exécutoires155, la signification de requêtes ou d’ordonnances d’injonction de payer, la sommation de communiquer et le commandement de payer, le recouvrement judiciaire de créances, le protêt156, les saisies, les mesures conservatoires après l'ouverture d’une succession (C. proc. civile, art. 1304 à 1333). Par ailleurs, les huissiers audienciers assurent le service intérieur près les cours et tribunaux. À titre accessoire, les huissiers de justice peuvent également effectuer des constatations purement matérielles à la requête de particuliers, qui sont exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter. Sauf en matière pénale, où elles ont valeur de simples renseignements, ces constations font foi jusqu'à preuve contraire. Enfin, les huissiers de justice exercent certaines activités en concurrence avec d'autres professions. Tel est le cas du recouvrement amiable de créances157 (où ils sont en concurrence avec les sociétés de recouvrement) et des prisées et ventes publiques judicaires ou volontaires de meubles et effets mobiliers corporels, mais seulement dans les lieux où il n'est pas établi de commissaire-priseur judiciaire.

- Les mandataires judiciaires sont régis par le code de commerce.

Les mandataires judiciaires inscrits sur la liste établie par une commission nationale158 peuvent être désignés en justice pour exercer les fonctions de mandataire judiciaire. Le tribunal peut, après avis du procureur de la République, désigner comme mandataire judicaire une personne physique justifiant d'une expérience ou d'une qualification particulière au regard de la nature de l'affaire et remplissant certaines conditions, même si elle n’est pas inscrite sur la liste des professionnels. En pratique, les mandataires judiciaires bénéficient cependant d’un quasi-monopole de fait, les désignations hors liste demeurant exceptionnelles.

Dans les procédures de liquidation judiciaire, les mandataires judiciaires sont chargés par décision de justice de représenter le débiteur, d’assurer la représentation de l’intérêt collectif des créanciers, de procéder à la réalisation des actifs du débiteur, personne physique ou personne morale, et d’en répartir le produit entre les créanciers selon leur rang.

Dans les procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire, les mandataires judiciaires assurent la représentation de l’intérêt collectif des créanciers mais non celle du débiteur, contrôlent un certain nombre d’actes notamment en l’absence d’administrateur judiciaire, et assurent, devant la juridiction, l’expression de la collectivité des créanciers. Ils peuvent être nommés comme commissaire à l'exécution du plan, en cas de plan de continuation

Dans toutes les procédures, ils reçoivent les déclarations de créances et les vérifient.

Enfin, ils peuvent exercer les poursuites contre les dirigeants ou le débiteur dans le cadre du titre VI du code de commerce, outre les actions à l'encontre des tiers.

Les mandataires judiciaires ne peuvent exercer aucune activité commerciale. En effet, la qualité de mandataire judiciaire est incompatible159 avec l'exercice de toute autre profession, toutes les activités à caractère commercial, et à de rares exceptions160 près, la qualité d'associé161 ou de représentant légal162 de sociétés. À titre accessoire et sous certaines réserves, ils peuvent exercer des activités libérales juridiques : consultations dans les matières relevant de la qualification de l'intéressé, accomplissement de mandats ad hoc (conciliateur, mandataire à l'exécution, commissaire à l'exécution du plan ou liquidateur amiable, expert judiciaire, séquestre judiciaire).

En mars 2009, les travaux de la commission présidée par Jean-Michel Darrois sur les professions du droit163 ont conclu que la répartition des différentes compétences entre ces professionnels, entre autres, créait des incertitudes et était source de complexités inutiles pour le justiciable et, parfois, source de conflits entre les professionnels eux-mêmes.

Pour mettre un terme à cette situation, et assurer une cohérence au sein des professions du droit, le Rapport Darrois a préconisé de fusionner les professions de huissier de justice, commissaire-priseur judiciaires et mandataire judiciaire, afin de « mutualiser des moyens sur des domaines d’activité très similaires, voire concurrentiels ». Par ailleurs, il a suggéré la mise en place de structures interprofessionnelles associant ces trois professions.

Les commissaires-priseurs judiciaires, huissiers de justice et mandataires judiciaire ont en commun de traiter des conséquences de la défaillance des débiteurs, qu’il s’agisse de personnes morales ou physique. Ces professions partagent une forte dimension humaine : au-delà de la technicité juridique, elles sont appelées à jouer un rôle socialement important pour des personnes confrontées à situations difficiles : procédures collectives, licenciements, insolvabilités, ventes forcées, etc. S’agissant plus spécifiquement des procédures collectives, ces professions sont toutes trois amenées à intervenir en présence de débiteurs défaillants. Au-delà de leur mission de sauvegarde et de redressement, les mandataires judiciaires exercent, dans le cadre de l’exécution de leur mandat de justice, les droits des débiteurs et procèdent à la liquidation de l’entreprise en difficulté dont le redressement est manifestement impossible. Au cours de cette procédure, huissiers de justice et commissaires-priseurs sont également sollicités : les premiers pour accomplir la signification d’actes de justice par exemple ; les seconds pour dresser l’inventaire ou réaliser l’actif.

2. Objectifs poursuivis

La mesure envisagée est complémentaire aux dispositions du projet visant à promouvoir l’inter-professionnalité capitalistique et d’exercice entre les professions du droit, notamment les trois professions concernées.

Au vu de la similitude partielle, et parfois, de la complémentarité des missions confiées aux commissaires-priseurs judiciaires, huissiers de justice et mandataires judiciaires, il semble nécessaire de rationaliser l’organisation actuelle de leurs statuts, et de fusionner ces trois professions dans une nouvelle profession de « commissaires de justice ». Dans un souci de polyvalence et d’efficacité, il s’agira de rapprocher les missions communes et complémentaires, sans pour autant gommer les spécificités actuelles164 de ces trois professions.

Il est envisagé une évolution progressive :

- à court/moyen terme, les professionnels continueraient à exercer leur métier comme aujourd’hui, et pourraient bénéficier de passerelles élargies pour « accéder » aux fonctions qui relevaient jusqu’ici d’une profession distincte. Il en irait de même des salariés, qui pourraient aussi acquérir de nouvelles compétences grâce à la formation continue.

- à plus long terme, la profession de « commissaire de justice » associerait des « généralistes » et des « spécialistes ». De façon à assurer une plus grande polyvalence qu’aujourd’hui, les missions communes ou complémentaires aux trois professions intégreraient un tronc commun que tous les « commissaires de justice » maîtriseraient. Pour les métiers plus spécifiques, des spécialisations, justifiées par des certificats de compétence, seraient progressivement mises en place. Ce double niveau de compétence – socle commun et spécialisations – permettrait de répondre à la complexité et à la sophistication des procédures dont le commissaire de justice aurait à connaître.

Les prérogatives attachées à la nouvelle profession seraient exercées dans le strict respect d’une déontologie professionnelle, et sous le contrôle d’autorités ordinales, pour éviter, notamment, les conflits d’intérêt.

La réforme nécessiterait de refondre la formation initiale et continue de ces professionnels, ainsi que celle de leurs salariés, dont les conventions collectives devraient également être fusionnées.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de dix mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

3. Consultations prévisionnelles :

Le Conseil National des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires, la Chambre Nationale des Commissaires-Priseurs Judiciaires, la Chambre Nationale des Huissiers de Justice, seront consultés.

Article 20 (2° du II)

Habilitation
Clarifier les règles régissant l’activité de ventes judiciaires de meubles

1. Difficultés à résoudre

Les commissaires-priseurs judiciaires, les notaires, les huissiers ou encore les courtiers de marchandises assermentés peuvent, par leur statut, procéder à des ventes judiciaires.

1.1. Commissaire-priseur judiciaire

Le commissaire-priseur judiciaire est un officier public et ministériel chargé de procéder, dans les conditions fixées par les lois et les règlements en vigueur, à l'estimation et à la vente publique aux enchères des meubles et effets mobiliers corporels.

Il peut :

- procéder à la vente forcée des biens saisis, dans la procédure de saisie-vente, si le créancier choisit que celle-ci ait lieu dans une salle des ventes (article L. 322-1du code de commerce) ;

- procéder aux ventes de marchandises après liquidation judiciaire, ordonnées par le juge-commissaire (article L. 642-19 du code de commerce), quand les ventes ont lieu au détail ou par lots (article L. 322-2 du code de commerce) ;

- procéder à la vente des biens meubles du débiteur, autres que les marchandises, ordonnée par le juge-commissaire (article L. 322-2, al. 2 du code de commerce) ;

- procéder, sur décision du tribunal de commerce, aux ventes publiques et par enchères après cessation de commerce, ou dans les cas de nécessité décidés par la juridiction (article L. 322-3 du code du commerce) ;

- procéder aux ventes aux enchères publiques de marchandises en gros, en l'absence de courtiers de marchandises assermentés (article L. 322-7 du code de commerce) ;

- procéder, sur décision du tribunal ou du juge, aux ventes judiciaires de marchandises en gros, normalement dévolues aux courtiers de marchandises assermentés (article L. 322-15 du code de commerce).

Les commissaires-priseurs judiciaires ont une compétence nationale, à l'exclusion toutefois des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ainsi que des territoires d'outre-mer et des collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Ils ont un monopole des ventes judicaires aux sièges de leurs offices (monopole qu'ils partagent entre eux). Ils ne peuvent procéder à titre habituel aux ventes judiciaires en dehors du siège de leur office et, le cas échéant, d'un bureau annexe attaché à l'office (ordonnance du 26 juin 1816, article 3). Il résulte de cette disposition que le commissaire-priseur judiciaire ne peut aller vendre en dehors de son office ou de son bureau annexe qu'à titre occasionnel.

En dehors du siège de leurs offices et notamment dans les villes où ils ont été autorisés à ouvrir des bureaux annexes, les commissaires-priseurs judiciaires viennent en concurrence pour les ventes judiciaires avec les autres officiers habilités à procéder à ces ventes, chacun de ces officiers ne pouvant évidemment agir que dans son propre ressort d'instrumentation.

1.2. Huissier

Régis par une ordonnance du 2 novembre 1945, les huissiers de justice sont des officiers ministériels qui ont seul qualité pour signifier les actes et les exploits, faire les notifications prescrites par les lois et règlements lorsque le mode de notification n’a pas été précisé, et ramener à exécution les décisions de justice, ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire. Ils peuvent procéder au recouvrement amiable ou judiciaire de toutes créances.

Ils ont qualité pour procéder, dans les lieux où il n'est pas établi de commissaire-priseur judiciaire, aux ventes judiciaires de meubles aux enchères publiques. Mais les huissiers de justice ne peuvent agir que dans leur ressort d'instrumentation, qui est le ressort du tribunal d'instance de leur résidence, sauf exceptions prévues à l'article 6 du décret du 29 février 1956.

1.3. Notaire

Les notaires, officiers publics principalement établis pour recevoir tous les actes et contrats, peuvent :

- procéder aux ventes de meubles (décret du 17 septembre 1793, qui autorise les notaires, greffiers et huissiers à faire les prisées et ventes de meubles) ;

- procéder aux ventes de marchandises après liquidation judiciaire, ordonnées par le juge-commissaire (article L. 642-19 du code de commerce), quand les ventes ont lieu au détail ou par lots (article L. 322-2 du code de commerce) ;

- procéder à la vente des biens meubles du débiteur autres que les marchandises, ordonnée par le juge-commissaire (article L. 322-2, al. 2 in fine du code de commerce) ;

- procéder, sur décision du tribunal de commerce, aux ventes publiques et par enchères après cessation de commerce, ou dans les cas de nécessité décidés par la juridiction (article L. 322-3 du code de commerce qui vise largement « les autres officiers publics ») ;

- en l'absence de courtiers assermentés : procéder aux ventes aux enchères publiques de marchandises en gros (article L. 322-7 du code de commerce) ;

- procéder, sur décision du tribunal ou du juge, aux ventes judiciaires de marchandises en gros, normalement dévolues aux courtiers de marchandises assermentés (article L. 322-15 du code de commerce).

Les ventes de meubles constituant des immeubles par destination sont réservées aux seuls notaires. S’agissant des ventes de fonds de commerce, la difficulté consiste à déterminer quel est l'officier compétent en la matière en raison de la nature particulière de ces biens. D'une manière générale, la jurisprudence recherche quels sont les éléments prédominants. Si les éléments incorporels sont les plus importants, elle retient la compétence du notaire. Ainsi, on reconnaîtra au notaire le droit exclusif de procéder à la vente publique d'un fonds de commerce dont les éléments incorporels ont une valeur supérieure à celle des éléments corporels. En revanche, si les éléments corporels sont prédominants, on retiendra la compétence du commissaire-priseur judiciaire.

La désignation des notaires ou des commissaires-priseurs judiciaires est donc une question de fait et les juges du fond apprécient souverainement en fonction, soit de la prédominance des éléments incorporels justifiant la désignation d'un notaire, soit de la prédominance des éléments corporels justifiant la désignation d'un commissaire-priseur judiciaire.

1.4. Greffier de tribunal de commerce 

Ils sont toujours compétents pour procéder aux ventes publiques de meubles en vertu de l'article 1er du décret du 17 septembre 1793 qui ne semble pas avoir été abrogé.

1.5. Courtiers de marchandises assermentés

En vertu des dispositions du code de commerce, les courtiers de marchandises assermentés peuvent notamment :

- ventes de marchandises en gros après liquidation judiciaire (article L. 322-2, al. 2 du code de commerce) ;

- ventes des marchandises du débiteur en liquidation judiciaire, ordonnée par le juge-commissaire (article L. 131-28, al. 2°du code de commerce) ;

- sur décision du tribunal de commerce, ventes publiques et par enchères après cessation de commerce ou, dans les cas de nécessité, décidés par la juridiction (article L. 322-3, al. 3 du code de commerce) ;

- ventes aux enchères publiques de marchandises en gros (article L. 322-4 du code de commerce) ;

- reventes et rachats de marchandises en cas d'inexécution d'un contrat ou marché (article L. 131-26 du code de commerce) ;

- ventes aux enchères publiques de marchandises déposées dans un magasin général en application de l'article L. 522-31 du code de commerce (article L. 131-27, al. 1er du code de commerce) ;

- ventes aux enchères de marchandises en gros ayant fait l'objet d'une saisie administrative ou judiciaire (article L. 131-29, 1°du code de commerce) ;

- ventes aux enchères de marchandises au détail ordonnées par décision de justice, à défaut de commissaire-priseur judiciaire (article L. 131-29, 2 du code de commerce).

Le principe est celui d'une compétence limitée au ressort de la cour d'appel lorsqu'il est désigné judiciairement. Lorsque la vente en gros présente un caractère judiciaire, les courtiers assermentés ne jouissent plus d'un monopole. Ils sont compétents, sauf désignation par le tribunal de commerce d'un commissaire-priseur judiciaire ou d'un autre officier public, pour les ventes de marchandises en gros autorisées ou ordonnées dans les conditions prévues aux articles L. 322-14 et suivants du code de commerce), pour les ventes des marchandises du débiteur en liquidation judiciaire ordonnées par le juge-commissaire ainsi que pour les ventes sur réalisation de gage dans les conditions prévues à l'article L. 521-3 du code de commerce qui traite du droit du créancier pour la réalisation du gage.

Enfin, en vertu de l'article L. 131-29 du code de commerce, ils peuvent être désignés pour procéder aux ventes publiques de marchandises en gros ayant fait l'objet d'une saisie administrative ou judiciaire pour les ventes de marchandises au détail à défaut de commissaire-priseur. Dans les cas où le juge a l'option entre plusieurs officiers vendeurs, s'il décide de confier la vente à un officier autre que le courtier, il doit respecter le monopole des commissaires-priseurs dans les villes où sont établis des offices de commissaires-priseurs.

La répartition de ces compétences relève d’une rare complexité dans la mesure notamment où les textes en la matière ne sont pas toujours très explicites.

2. Objectifs poursuivis

Il s’agit de disposer d’une réglementation des ventes judiciaires lisible pour les entreprises et les particuliers

Il est donc proposé de :

- clarifier les règles régissant l’activité de ventes judiciaires de meubles ; et

- améliorer sa connaissance par la création d’une liste pour l’information du public.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La réglementation actuelle prend sa source dans des dispositions législatives diverses. La voie législative est donc nécessaire pour clarifier les règles régissant l’activité de ventes judiciaires de meubles.

Est ainsi prévue une habilitation à prendre par ordonnance les mesures envisagées.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La complexité de la réglementation française tranche avec la relative lisibilité des règlementations des autres Etats européens. Ainsi, certains Etats ont fait le choix de confier les opérations de vente judiciaire à une profession unique. En Allemagne, ce sont les auxiliaires de justice, des fonctionnaires ayant reçu une formation spécifique. En Espagne, cette compétence revient également à un fonctionnaire, le secrétaire judiciaire. En Italie, le juge de l’exécution peut s’appuyer sur les « instituts de vente judiciaire », des personnes privées autorisées à procéder aux opérations de vente judiciaire.

Cette proposition améliorait la lisibilité du droit, notamment pour les opérateurs étrangers et du public.

Le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de dix mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Article 20 (III)

Habilitation
Accès à la profession de greffier de tribunal de commerce

1. Difficulté à résoudre

Les greffiers des tribunaux de commerce sont officiers publics et ministériels.

Pour accéder à ces fonctions, il convient d’une part, de remplir un certain nombre de conditions, et d’autre part, d’emprunter l’une des deux voies d’accès pour être titularisé par le garde des sceaux, ministre de la justice.

Les conditions requises pour devenir greffier d’un tribunal de commerce sont d’être Français et d’avoir satisfait aux obligations du service national, de satisfaire à des conditions d’honorabilité165, d’être titulaire soit d’une maîtrise en droit, soit d’un titre ou diplôme équivalent, d’avoir accompli un stage de formation d’un an, et d’avoir réussi l’examen professionnel, sans y avoir échoué préalablement plus de trois fois. Des dispenses sont toutefois possibles : pour l’examen et tout ou partie du stage166 ; pour les conditions de diplômes ou d’examen167 ; pour l’examen ou le stage168.

Les deux voies d’accès possibles sont les suivantes :

- la présentation du successeur par le greffier de tribunal de commerce sortant (c’est-à-dire l’exercice du droit de présentation prévu par l’article 91 de la loi de finances du 28 avril 1816) : la demande de nomination par le garde des sceaux, ministre de la justice, est présentée au procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle est situé l’office. Elle est accompagnée de la convention conclue entre le titulaire de l’office (ou le cas échéant, ses ayants-droit) et le candidat, accompagné d’un plan de financement. La valorisation monétaire est calquée sur l’estimation d’un fonds de commerce (volume d’activité économique générée par le greffe) ;

- la nomination au choix par le garde des sceaux, ministre de la justice, pour les offices créés ou laissés vacants. Dans ce cas, la nomination est conditionnée au versement d’une  indemnité dont le montant est fixé par la Chancellerie. En pratique très rare169, ce type de nomination ne suppose pas la réussite à un concours :

o les candidatures sont adressées au procureur général, qui les transmet au garde des sceaux, ministre de la justice, avec un avis. Cet avis est établi après réception de l’avis motivé du bureau du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce ;

o les candidatures sont ensuite classées par ordre de préférence par une commission composée, outre de deux magistrats, d’un membre des tribunaux de commerce, de deux greffiers de tribunal de commerce, et d’une personne remplissant les conditions pour être nommée greffier de tribunal de commerce.

Le nombre de greffes de tribunal de commerce est fixé par la carte judiciaire170. L’attache territoriale à une juridiction commerciale, inhérente aux fonctions de greffier de tribunal de commerce, rend impraticable un principe de liberté d’installation à cette profession.

Pour autant, les conditions actuelles de nomination dans les offices de greffier de tribunal de commerce ne sont pas suffisamment ouvertes. Pour les offices existants, elles supposent l’exercice du droit de présentation du successeur. Pour les offices créés ou vacants, le système de désignation paraît opaque.

L’enjeu est donc de moderniser les modalités de recrutement des greffiers des tribunaux de commerce, en y introduisant un élément de méritocratie et en les rendant plus transparentes. Dans cette perspective, la solution d’un mécanisme de concours, tel que celui qui a été préconisé par la mission présidée par M. Richard Ferrand, député, sur les professions réglementées, semble la plus adaptée.

Il est nécessaire de moderniser les règles de recrutement des greffiers de tribunaux de commerce. Compte tenu de la rareté des offices, et de la spécificité tenant à leur attache à une juridiction commerciale, la liberté d’installation n’est pas envisageable. Dans ces conditions, il paraît pertinent de sélectionner par concours les candidats autorisés à succéder aux titulaires des offices cessant leurs fonctions.

2. Objectifs poursuivis

Le projet vise à permettre au Gouvernement de prendre une ordonnance dans un délai de six mois, afin de modifier les règles de sélection des candidats aux offices des greffiers des tribunaux de commerce par l’institution d’un concours pour la titularisation dans les offices créés ou vacants, et pour les offices existants, lors de la cessation des fonctions du titulaire de l’office.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales.

Par voie de conséquence, l’encadrement des fonctions de greffier de tribunal de commerce, et les conditions d’accès à cette profession, relèvent du seul niveau législatif.

Le projet visera à instaurer un principe d’accès aux fonctions de greffier de tribunal de commerce plus méritocratique – le concours – tant pour les créations d’office que pour les vacances ou les successions.

Dans les cas des successions, un accès par concours n’implique pas de supprimer le droit de présentation. En effet, dans ce cas, le titulaire de l’office présentera le lauréat du concours à l’agrément du ministre de la justice. Ce lauréat devra lui verser une contrepartie financière au titre de l’exercice du droit de présentation171. En cas de désaccord sur le montant de cette contrepartie financière, un arbitrage pourra être rendu par le ministre de la justice172.

Le déroulement du recrutement pourra être le suivant :

- Avis de concours publié par le garde des sceaux pour vacance, création ou succession dans un office de greffier de tribunal de commerce ;

- Organisation du concours par le ministère de la justice et sélection du lauréat ;

- En cas de succession dans un office :

o signature, par le lauréat du concours et l’ancien titulaire d’un « traité de cession »

o présentation du lauréat à l’agrément du ministre de la justice, qui valide l’accord sur le prix de la cession de l’office.

- Titularisation par le ministre de la justice.

4. Consultations prévisionnelles

Le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce sera consulté.

Article 21 (1°)

Habilitation
Définir les conditions d’exercice de la profession d’avocat en entreprise

1. Difficultés à résoudre

Le juriste d'entreprise est un professionnel du droit qui exerce son activité en tant que salarié d'une entreprise, par dérogation au monopole d'exercice du droit par les avocats, et en application de l'article 58 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971173 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

2. Objectifs poursuivis

L’absence de protection des avis et communications des juristes d’entreprises françaises est source de difficultés. Leurs avis ne bénéficient d’aucune protection. Ils peuvent être saisis, dans le cadre de procédures judiciaires, sans aucune restriction, ce qui pose de nombreux problèmes :

- un moindre recours aux juristes internes pour établir des notes écrites qui risquent d’être utilisées ensuite contre l’entreprise dans le cadre de procédures judiciaires ;

- la méfiance des partenaires ou filiales étrangers dans leurs échanges avec les services juridiques français, pouvant même conduire à la délocalisation des services juridiques vers des pays où les juristes d'entreprises bénéficient du « legal privilege ».

Ainsi, la création d’un statut d’avocat en entreprise bénéficiant d’un privilège de confidentialité sur leurs avis et productions permettrait de surmonter ces difficultés.

Les principaux axes de ce statut pourraient être les suivants :

- l’avocat en entreprise serait inscrit auprès d’un barreau, sur une liste ad hoc. Il serait tenu de respecter les principes déontologiques et éthiques de la profession, mais ne serait pas tenu à l’obligation personnelle du respect du secret professionnel d’ordre public, réservé aux seuls avocats libéraux ;

- il aurait un contrat de travail et serait donc salarié. Il réserverait l’exclusivité de ses prestations à son entreprise ;

- il n’aurait pas la capacité de plaider devant les juridictions où la représentation par avocat est obligatoire ;

- il mettrait en œuvre un « privilège de confidentialité » à définir, permettant de préserver la confidentialité de ses conseils donnés en interne, au bénéfice et sous le contrôle de son employeur.

En cas de procédure d’investigation administrative ou pénale, la levée du privilège de confidentialité s'effectuerait selon un dispositif juridiquement encadré.

Au regard de ces objectifs, un statut juridique de la profession d’avocat en entreprise doit être créé. L’avocat en entreprise deviendrait une nouvelle profession juridique réglementée.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La profession d’avocat réunit, au 1er janvier 2012, 56 176 avocats sur l’ensemble du territoire national, soit une hausse de 42% en dix ans. Le barreau de Paris concentre à lui seul 41% de l’effectif total (22 981 avocats)174.

Cette croissance s’explique par une croissance interne de la profession, ainsi que par la fusion avec les conseils juridiques en 1992. Depuis le 1er janvier 2012, la profession d’avoué d’appel a également disparu.

La création d’un statut d’avocat en entreprise pourrait impacter les 15 870 juristes d’entreprises exerçant en France175, soit la deuxième profession juridique en France après celle d’avocat.

S’agissant des effectifs des directions juridiques, une enquête176 indique que l’effectif moyen de juristes au sein d’une direction juridique oscille entre 5 juristes dans les entreprises dont le chiffre d’affaire est compris entre 100 M€ et 500 M€ et 83 juristes dans les entreprises dont le chiffre d’affaire est supérieur à 10Md€.

Par ailleurs, il apparaît que seuls 29,8% des directeurs juridiques ont exercé auparavant au sein d’un cabinet d’avocat (avec une durée moyenne de cinq ans d’exercice), ce qui indique une profonde césure entre les deux professions que le projet de loi cherche à corriger.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Article 21 (2°)

Habilitation
Réduire le champ des incompatibilités d'exercice pour la profession d’expert-comptable

1. Difficultés à résoudre

La profession d’expert-comptable est régie par les dispositions de l’ordonnance n°45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable.

L’expertise comptable peut être exercée sous forme libérale (expert-comptable), sociétale (société d’expertise comptable), associative (association de gestion et de comptabilité) ou par succursale (succursale d’expertise comptable).

L’expertise comptable est incompatible avec toute occupation ou tout acte de nature à porter atteinte à l’indépendance de la personne qui l’exerce. Elle est notamment incompatible avec toute activité commerciale ou acte d'intermédiaire autre que ceux que comporte l'exercice de la profession, sauf s'il est réalisé à titre accessoire et n'est pas de nature à mettre en péril l'exercice de la profession ou l'indépendance des associés expert-comptable, aux termes de l’article 22 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts comptables.

L'alinéa 7 du même article autorise les professionnels de l’expertise comptable à effectuer des consultations, études et travaux d'ordre statistique, économique, administratif, juridique, social ou fiscal, et apporter leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise, mais sans pouvoir en faire l'objet principal de leur activité et à la condition qu'il s'agisse d'entreprises dans lesquelles ils assurent des missions d'ordre comptable de caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où lesdites consultations, études, travaux ou avis sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés.

Le dernier alinéa de l’article 2 de l’ordonnance du 19 septembre 1945 permet aux membres de l’ordre des experts-comptables d’assister dans leurs démarches déclaratives à finalité fiscale, sociale et administrative, les personnes physiques qui leur ont confié les éléments justificatifs et comptables nécessaires auxdites démarches.

Les possibilités d’intervention des professionnels de l’expertise comptable sont difficiles à appréhender.

Par ailleurs, ces restrictions font l'objet de difficultés d'interprétation. Le Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables considère pour sa part, que les textes ne peuvent pas interdire à un professionnel de l’expertise comptable d'exercer une activité non soumise à une prérogative d'exercice par une autre profession réglementée dès lors qu'une telle activité n'est pas incompatible avec les règles déontologiques et professionnelles qui s'imposent lui.

Enfin, aux termes de l’article 7 quater de l’ordonnance du 19 septembre 1945, les experts-comptables peuvent détenir des participations dans des sociétés de toute nature sous le contrôle du conseil régional de l’ordre. Ainsi, par le truchement d’une société dont l’expert-comptable est dirigeant, il peut exercer des activités commerciales ou rédiger des études et travaux d’ordre statistique, économique, administratif, social ou fiscal sans supporter les restrictions qui s’imposent à lui dans sa structure d’exercice. Dès lors, il semble logique de permettre aux experts-comptables de pouvoir effectuer ces études et travaux, que ceux-ci soient ou non liés à des travaux comptables réalisés pour un client ou adhérent.

2. Objectifs poursuivis

Pour toutes ces raisons, il est proposé de moderniser et simplifier les prérogatives des professionnels de l’expertise comptable quant aux travaux d'ordre économique, administratif, social ou fiscal. Elle propose une clarification du champ d’intervention des professionnels de l’expertise comptable pour les démarches effectuées au profit des entreprises et particuliers, tout en leur permettant d’élargir ses activités dans ces matières. Cependant, les professionnels de l’expertise-comptable ne pourront, conformément au droit positif, réaliser les consultations juridiques, fiscales et sociales ainsi que la rédaction d’actes sous seing privé qu’à titre accessoire, au profit de clients pour lesquels ils assurent des prestations en conformité avec les textes encadrant leurs activités. 

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’adaptation de la réglementation applicable aux professionnels de l’expertise comptable permettra de réaliser des économies pour les entreprises comme pour les particuliers.

Les actuelles dispositions contraignent inutilement le développement de l’activité des professionnels. Cette mesure permettra alors aux professionnels de l’expertise comptable d’accompagner les très petites entreprises, notamment les auto-entrepreneurs et les entreprises dans le cadre du financement participatif, et de les conseiller utilement en vue du développement de leur activité. Ils pourront également aider les particuliers dans leurs démarches à finalité administrative ou fiscal. Il en résultera une meilleure qualité des documents transmis aux administrations, ce qui facilitera leur traitement.

Il demeurera cependant une exception, à savoir les consultations juridiques, fiscales et sociales et la rédaction d’actes sous seing privé qui continueraient à ne pouvoir être réalisés à titre principal que par les professions juridiques réglementées. Les consultations juridiques devraient toutefois toujours pouvoir être réalisés par des experts-comptables, sans qu’ils puissent en faire l’objet principal de leur activité, et à la condition que ces consultations juridiques s’adressent à des personnes physiques ou morales pour lesquelles les experts-comptables réalisent une mission visée à l’article 2 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 de caractère permanent, habituel ou dans la mesure où lesdits travaux ou études juridiques sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés.

En 2013, 19 305 experts-comptables étaient inscrits au tableau de l’Ordre, exerçant soit en libéral, soit au sein d’une des 14 536 sociétés d’expertise comptable ou encore au sein d’une des 224 associations de gestion et de comptabilité. Pour mémoire, le Conseil supérieur des experts comptables estimait en 2013 que le chiffre d’affaires total de la profession était de 11 milliards d’euros.

L’ouverture du champ d’intervention des professionnels en France renforcera l’attrait de la profession et permettra aux jeunes professionnels de développer leur activité.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

4. Consultations prévisionnelles

Le Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables sera consulté sur le projet d’ordonnance.

Article 21 (3°)

Habilitation
Structures d’exercice pluridisciplinaires de professionnels appartenant à des professions libérales différentes : permettre la constitution de structures d’exercice interprofessionnelles associant des professions juridiques entre elles et des professions juridiques et du chiffre

1. Difficultés à résoudre

Les jalons d’une interprofessionnalité d’exercice, qui a pour objet de favoriser l’exercice en commun de plusieurs professions, ont été posés par le législateur il y a près de quarante ans, à l’occasion de l’adoption de la loi n° 72-1151 du 23 décembre 1972.

Depuis lors, les dispositions relatives aux sociétés civiles professionnelles autorisent l’exercice en commun, au sein d’une même structure, de professions libérales réglementées différentes. Le principe a par la suite été étendu aux sociétés d’exercice libéral, sans toutefois que ces dispositions ne trouvent leur traduction réglementaire.

Des alternatives ont donc été recherchées mais ne permettent pas la création de structures couvrant l’ensemble des besoins des clientèles des entreprises comme des particuliers, et de faire face à la concurrence internationale. Peuvent être citées :

- les rapprochements capitalistiques de structures d’exercice d’activités différentes - sociétés de participations financières libérales, holdings de cabinets divers créés en 2001 et modifié substantiellement par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées ;

- la collaboration ponctuelle est reconnue aux avocats par le règlement intérieur national de la profession qui reconnaît à ses membres la possibilité d’appartenir à un réseau pluridisciplinaire et de participer à des coopérations interprofessionnelles ponctuelles. La mise en œuvre de cette collaboration relève donc plutôt de l’initiative des professions concernées.

Avec la mondialisation des échanges ainsi que la complexification du droit et des procédures, les besoins des entreprises et des particuliers ont évolué. L’exportation de services juridiques constitue non seulement un facteur de croissance de l’activité des professions du droit, mais aussi un facteur d’influence du droit français et continental.

S’agissant des particuliers, l’enjeu est également important. L’exemple de la procédure de divorce est à cet égard éclairant : du fait de l’intervention de divers acteurs (avocat, notaire voire l’huissier de justice), le justiciable se trouve confronté à une multitude de démarches, génératrices de surcoûts.

Alors qu’en France les professions réglementées restent cloisonnées, un grand nombre de pays européens se sont tournés vers l’interdisciplinarité.

- pour le Royaume Uni, le Legal Services Act de 2007 a dérégulé la profession des avocats britanniques et leur a permis de créer des structures juridiques nouvelles autorisant le regroupement de praticiens de différentes disciplines et l’appel de capitaux extérieurs ;

- pour l’Espagne, la loi 25-2009 dite Ley omnibus permet l’interprofessionnalité d’exercice dès lors qu’il n’y a pas de risques pour la déontologie des professions ; à titre indicatif, 20% des sociétés inscrites au barreau de Barcelone sont aujourd’hui des sociétés multidisciplinaires ;

- pour l’Italie, il est désormais possible depuis 2013 de constituer des sociétés de professionnels unidisciplinaires ou interdisciplinaires, bien que les notaires n’y aient pas accès ;

- pour l’Allemagne, la réunion au sein d’une même structure entre les professions juridiques, judiciaires et comptables est possible depuis longtemps, comme l’indique le paragraphe 59 du règlement fédéral des avocats (BRAO) et rencontre un grand succès en pratique.

Cette situation européenne contraste fortement avec l’absence de cadre juridique national permettant l’interprofessionnalité d’exercice.

Il convient également de rappeler que la mission de réflexion sur les professions du droit présidée par Me Jean-Michel Darrois s’est, dans son rapport sur les professions du droit de mars 2009, prononcée pour un rapprochement entre professionnels du droit (avocats, notaires, etc.), mais aussi pour un rapprochement de ceux-ci avec les professionnels du chiffre (experts comptables, notamment).

2. Objectifs poursuivis

Il convient de favoriser une évolution de l’organisation des professionnels du droit et du chiffre vers davantage de pluridisciplinarité et de faciliter les rapprochements entre professionnels. Son objectif réside dans la constitution de structures couvrant l’ensemble des besoins des clientèles des entreprises comme des particuliers et d’être en mesure de faire face à la concurrence internationale.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure proposée constitue un élément fort de simplification des démarches au profit des entreprises et des particuliers.

En permettant aux clients de disposer, au sein d’une seule structure, d’une offre globale adaptée à leurs demandes. Il s’agit donc d’abord et avant tout de satisfaire à un besoin des entreprises de disposer de prestations complètes pour un même sujet ayant des angles juridiques, comptables et financiers.

Il résultera mécaniquement de cette mutualisation des services, pour une qualité identique, une réduction du prix des tarifs proposés, les frais de fonctionnement des structures étant réduits. Les entreprises bénéficieront ainsi de moyens supplémentaires pour investir et créer de l’emploi.

Ces structures permettront de renforcer la concurrence en prix et la disponibilité du service au bénéfice des entreprises clientes dans leurs différents moments de vie, qui bénéficieront d’un suivi personnalisé. Cette proposition concerne également les particuliers, qui pourront au cours d’une même procédure judiciaire bénéficier, auprès d’un même prestataire, des services d’un huissier pour l’assignation, d’un avocat pour la représentation et d’un notaire pour l’exécution.

Du coté des professionnels, outre les nouvelles perspectives commerciales offertes par ce dispositif, ces structures seront davantage dynamiques et compétitives au niveau européen et international, en vue de répondre à l’internationalisation des services. Il s’en suivra des créations d’emplois et un attrait renforcé des entreprises françaises pour les professionnels étrangers.

Le système français sera ainsi mis en accord avec celui de ces principaux partenaires européens, en tant que l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni disposent de structure d’exercice associant professionnels du droit et du chiffre.

Pour mémoire, le secteur des activités juridiques et comptables représentent un chiffre d’affaire de près de 38 Md€177 pour environ 76 000 entreprises et indépendants178 et près d’un million d’emplois directs et indirects.

La garantie du respect des exigences des règles statutaires et déontologiques propres aux différentes professions du droit et de l’expertise comptable devra toutefois être réaffirmée dans le cadre d’une coopération structurelle durable.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

4. Consultations menées

Le Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables, le Ministère des outre-mer seront consultés sur le projet d’ordonnance.

Article 21 (4°)

Habilitation
Faciliter le recours à la forme de la société pour l’exercice des professions réglementées du droit

1. Difficultés à résoudre

Le droit actuel limite à certaines formes juridiques limitativement énumérées les possibilités de constitution d’une personne morale par certains professionnels libéraux. Les formes juridiques offertes aux professionnels se limitent aux sociétés civiles professionnelles et sociétés d’exercice libéral.

1.1. Commissaire-priseur judiciaire

Les commissaires-priseurs judiciaires peuvent exercer leurs fonctions au sein des sociétés civiles professionnelles ou dans le cadre de sociétés d'exercice libéral et de sociétés en participation.

1.2. Avocat

S’agissant des conditions d’exercice en groupe de la profession d’avocat, les formes juridiques autorisées comprennent, essentiellement, l’exercice sous forme d’une association, d’une société civile professionnelle, d’une société d’exercice libéral ou d’une société en participation.

1.3. Huissier

L'exercice en société des fonctions d'huissier de justice est encadré de manière classique. Ainsi, les huissiers de justice peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre d'une société civile professionnelle. Ils peuvent également être associés d'une société d'exercice libéral. Enfin, les sociétés holdings que constituent les sociétés de participations financières de professions libérales sont également ouvertes aux huissiers de justice.

1.4. Notaire

Les formes juridiques ouvertes à la profession de notaire sont les sociétés civiles professionnelles et sociétés d'exercice libéral. Plus récemment, les sociétés de participations financières de professions libérales, véritables sociétés holdings de professions libérales, ont été ouvertes à l'exercice des fonctions notariales. De même, le notaire peut être membre d'un groupement d'intérêt économique ou encore d'un groupement européen d'intérêt économique.

1.5. Administrateur et mandataire judiciaires

Les administrateurs judiciaires sont mandatés par les tribunaux de grande instance ou de commerce, soit pour administrer des personnes ou entités (société, association, copropriété, succession…) privées de leur organe de gestion, soit pour assurer temporairement un mandat spécial, soit dans le cadre de procédures collectives (nombre : 115 en 2010). Les mandataires judiciaires sont mandatés par les tribunaux de grande instance ou de commerce, pour représenter les créanciers dans les procédures collectives, préserver les droits financiers des salariés, et liquider les actifs des liquidations judiciaires. Ils ne peuvent exercer une autre profession, mais peuvent à titre accessoire donner des consultations juridiques (nombre : 315 en 2010).

Les articles L. 811-7 et L. 812-5 du code de commerce imposent là encore une exigence quant à la forme juridique obligatoire que doit revêtir la société : SCP, SEL, GIE ou GEIE, société en participation.

L’imposition de formes juridiques spécifiques contraint la forme des structures juridiques offertes aux professionnels pour exercer leur activité. Elle conduit à faire renoncer les professionnels aux avantages attachés à telle ou telle forme et leur impose un cadre juridique contraint limité aux seules sociétés civiles professionnelles et sociétés d’exercice libéral. Ces restrictions concourent à la formation de petites structures inadaptées à la concurrence que leur livrent de grandes structures, souvent anglo-saxonnes.

Ce type de restrictions restreint également l’établissement de prestataires établis dans d’autres États membres constitués sous une forme juridique différente, ce qui nuit à l’attractivité du territoire. En effet, les entrepreneurs qui choisissent un statut juridique le font selon des critères de simplicité, de protection juridique et de fiscalité. Le choix du statut à un Impacts non seulement sur l’objet mais également sur les charges fiscales et sociales auxquelles l’activité est soumise.

D’après les chiffres publiés par l’Insee, le marché des professions juridiques représente en 2012 plus de 22 milliards d’euros de chiffre d’affaires HT. Ainsi, une mesure d’apparence simple peut avoir un effet de levier relativement important, eu égard à la taille du secteur.

2. Objectifs poursuivis

La présente mesure vise à permettre le recours à toute forme juridique pour l’exercice des professions de commissaire-priseur judiciaire, d’avocat, d’huissier de justice, de notaire, d’administrateur et de mandataire judiciaire, à l’exclusion de celles conférant la qualité de commerçant à leurs associés, soit les sociétés en commandite par actions et les sociétés en nom collectif.

Les professions judiciaires et juridiques étant marquées par des règles déontologiques fortes, au premier rang desquelles l’indépendance d’exercice, la mesure appliquera à toutes les nouvelles formes juridiques les conditions de détention capitalistique actuellement en vigueur pour la société d’exercice libéral.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Une modification des règles de niveau législatif applicables aux professions de commissaire-priseur judiciaire, d’avocat, d’huissier de justice de notaire d’administrateur et de mandataire judiciaire est nécessaire pour ouvrir les formes juridiques autorisées, qui sont prévues par des dispositions de niveau législatif.

Est ainsi prévue une habilitation à prendre par ordonnance les mesures envisagées.

Pour chaque profession visée, une disposition ouvrira le recours à toute forme juridique à l’exception de celles qui confèrent la qualité de commerçant.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les aménagements proposés présenteront des avantages économiques (investissements, création sociétés et emplois), en tant que les professionnels disposeraient d’une plus grande latitude pour choisir la forme juridique qui s’adapte le mieux à leur activité.

Ils auront de plus des effets bénéfiques en termes d'influence des entreprises françaises. Les mesures proposées permettront en effet de faciliter la constitution de réseaux transeuropéens, de favoriser le développement des structures nationales à l’échelle européenne en leur permettant d’adopter toute forme juridique (notamment celle reconnue à l’étranger comme la SA) et d’y associer des professionnels européens. Ces structures à fondation nationale pourraient alors concurrencer les sociétés européennes par une croissance externe et augmenter leur volume d’activité.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

CHAPITRE IV – CAPITAL DES SOCIÉTÉS D’EXERCICE LIBÉRAL

Article 22

Habilitation
Capital des sociétés d’exercice libéral et des sociétés de participations financières
de professions libérales

1. Difficultés à résoudre

Le cadre législatif actuel restreint le dynamisme des professionnels, tant en termes d’innovation que de disponibilité du service. De plus, il n’offre pas toutes les garanties de souplesse nécessaires aux professionnels pour accompagner le développement de leur activité et leur expansion à l’international.

En premier lieu, la société d’exercice libéral (SEL) est, avec la société civile professionnelle (SCP), la structure juridique ouverte à toutes les professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Elle est régie par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990.

En matière de participation, le droit positif distingue la détention du capital de celle des droits de vote : si la majorité des droits de vote doit nécessairement être détenue par des professionnels en exercice au sein de la société (directement ou indirectement), la majorité du capital social peut être détenue par des professionnels extérieurs à la société (premier alinéa de l’article 5-1 de la loi n° 90-1258).

Cependant, cette possibilité d’ouverture du capital social peut être exclue, sauf pour les professions juridiques et judiciaires, par décret en Conseil d’État lorsqu’elle présente un risque d’atteinte à « l’exercice de la profession, au respect de l’indépendance de ses membres ou de ses règles déontologiques propres ».

Il en résulte de ces dispositions, pour les professions autres que juridiques et judiciaires, que le complément du capital social et des droits de vote (minorité) de la SEL ne peut être détenu que par :

- des personnes physiques ou morales exerçant la ou les professions constituant l'objet social de la société ;

- pendant un délai de dix ans, des personnes physiques qui, ayant cessé toute activité professionnelle, ont exercé cette ou ces professions au sein de la société ;

- les ayants droit des personnes physiques mentionnées ci-dessus pendant un délai de cinq ans suivant leur décès ;

- certaines sociétés dont les membres exercent leur profession au sein de la SEL, ou une société de participations financières de professions libérales (voir ci-dessous) ;

- des personnes exerçant soit l’une quelconque des professions libérales de santé, soit l’une quelconque des professions libérales juridiques ou judiciaires, soit l’une quelconque des autres professions libérales selon que l’exercice de l’une de ces professions constitue l’objet social.

Il ressort des dispositions de la loi n° 90-1258 qu’un ensemble de règles particulièrement complexes s’applique aux professions libérales selon la famille à laquelle elles appartiennent :

- pour les professions juridiques et judiciaires, une majorité du capital et des droits de vote doit être détenue par une même profession, qui constitue l’objet social de la société, le complément pouvant être détenu par les autres professions juridiques et judiciaires ;

- pour les professions de santé, des tiers non-qualifiés peuvent détenir jusqu’à 25 % du capital de la société ;

- pour les autres professions libérales, des tiers non-qualifiés peuvent détenir la minorité du capital.

Le dispositif SEL est ainsi un frein à l’investissement et à la création de structures secondaires (filiales, succursales) des professionnels nationaux et européens, en tant qu’il empêche la détention majoritaire de capital et droits de vote par une même personne dans plusieurs sociétés, mais également d’être actionnaire majoritaire de plusieurs sociétés sans y exercer. Par ailleurs, il est aujourd’hui impossible pour un professionnel national comme européen d’investir de façon conséquente sur le territoire national, en tant qu’il ne peut détenir la majorité des droits de vote d’une société d’exercice libérale sans exercer au sein de cette même société (problématique concernant l’ensemble des professionnels exerçant sous forme de SEL).

En second lieu, les sociétés de participations financières de profession libérale (SPFPL) sont des holdings financières destinées à prendre des participations dans des SEL et n’ayant pas cependant la capacité d’exercice. Elles peuvent être constituées par les personnes physiques ou morales exerçant une ou plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Elles ont pour objet la détention des parts ou d'actions de SEL ayant pour objet l'exercice d'une ou plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (SPFPL mono-professionnelles ou SPFPL pluriprofessionnelles).

Le principe est que plus de la moitié du capital et des droits de vote d'une SPFPL doit être détenue par des personnes exerçant la même profession que celle exercée par les sociétés faisant l'objet de la détention des parts ou actions. Le complément peut être détenu par les personnes mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990. Il s’agit d'anciens professionnels et ayants droit et d'autres membres de professions libérales réglementées appartenant à la même famille de professions.

Par ailleurs, contrairement à ce qui est prévu pour les SPFPL pluriprofessionnelles (article 31-2 de la loi n° 90-1258), aucune disposition n’est prévue pour permettre une prise de participation jusqu’à 50 % de la part d’opérateurs exerçant des professions identiques au sein de l’UE ou de l’espace économique européen (EEE).

Depuis la loi n° 2004-130 du 11 février 2004, l’objet des SPFPL a été doublement élargi :

- tout d’abord, l’objet a été élargi à "la participation à tout groupement de droit étranger ayant pour objet l'exercice de la même profession", permettant ainsi la constitution de réseaux mono-professionnels internationaux,

- en outre, la loi n° 2004-130 prévoit que les SPFPL peuvent désormais "avoir des activités accessoires en relation directe avec leur objet et destinées exclusivement aux sociétés ou aux groupements dont elles détiennent des participations".

Cet élargissement permet à la SPFPL d'avoir des produits propres, autres que les dividendes de ses filiales et de dégager ainsi des revenus complémentaires afin d'imputer les intérêts des emprunts contractés pour l'acquisition des titres de ses filiales. À titre d’exemple, ces activités accessoires en relation directe avec la détention de titres de participation peuvent être la gestion de la trésorerie du groupe, des prestations informatiques et comptables, un service de documentation, des bibles de savoir-faire ou d'actes, l'assistance dans l'élaboration d'un dossier.

Pour les professions juridiques et judiciaires, le choix d’exercer en SEL est variable selon les professions. À titre d’exemple, sur 1 163 offices d’huissiers de justice exerçant dans une structure commune, seuls 138 (11,9 %) sont en SEL contre 1 019 en SCP (87,6 %). Les taux les plus importants concernent les administrateurs et mandataires judiciaires (respectivement 63,3 % et 54,3 %, mais pour un nombre de structures d’exercice très restreint : respectivement 30 et 81) et les avocats (48 % de SEL, 33 % de SCP et 13 % en association d’avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI) sur un total de 7 534 structures d’exercice). Pour les autres professions (notaires, commissaires-priseurs, greffiers de tribunaux de commerce), les taux d’exercice en SEL ne dépassent pas 25 %.

Pour les professions de la santé, le recours à la SEL est diversement développé : selon le rapport du 18 mars 2013 de la 6ème chambre de la Cour des comptes consacré aux SEL des professions de santé, en 2010 étaient décomptés 20 527 SEL dont 14 697 pour les professions de santé (source DGFIP). Les deux tiers des laboratoires de biologie médicale, un quart des pharmacies d’officine sont exploités en SEL (représentant 46,3 % des pharmacies d’officine exploitées sous une forme sociétale) mais seuls 6 % des médecins et 10 % des chirurgiens-dentistes ont choisi cette forme juridique. Cependant, lorsqu’une forme sociétale est choisie pour exploiter un cabinet médical ou de chirurgien-dentiste, la SEL s’impose à plus de 80 %. Par ailleurs, c’est parmi les professions de santé que le taux de progression de la SEL est le plus élevé (entre 2000 et 2010 le nombre a été multiplié par 9,2).

Les professions techniques et du cadre de vie telles que les commissaires aux comptes ou les architectes qui peuvent utiliser des structures commerciales classiques (société à responsabilité limitée - SARL, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée - EURL) n’ont quasiment jamais recours ni aux SEL ni aux SCP. Pour la profession de commissaire aux comptes, on dénombre 3 646 SARL/EURL et 1 567 autres structures commerciales (société en nom collectif - SNC, société anonyme - SA, société par action simplifiée - SAS, etc.) contre 95 SEL soit 1,8 %, et une seule SCP ; le constat est assez similaire pour les architectes : 7 696 SARL/EURL contre 453 SEL (soit 5,1 %) et 267 SCP.

2. Objectifs poursuivis

La mesure qui serait envisagée vise les objectifs suivants :

- s’agissant spécifiquement des SEL exerçant une profession juridique ou judiciaire, la règle de détention capitalistique pourrait être adaptée pour réserver la totalité du capital d’une SEL dans le domaine du droit aux personnes physiques ou morales exerçant l’une des professions juridiques ou judicaires ou la profession d’expert-comptable, dans la limite d’un tiers des droits de vote pour cette dernière catégorie de professionnels. Pour mémoire, cette possibilité est déjà offerte par les règles régissant la détention du capital et des droits de vote des sociétés d'expertise comptable ;

adapter la dérogation à la règle de détention majoritaire des droits de vote, et dans une moindre mesure du capital, par les personnes physiques en exercice au sein de la société. Le principe de détention majoritaire du capital et des droits de vote par les personnes en exercice au sein de la société continuerait à s’appliquer. Cependant l’actuelle dérogation serait aménagée en vue de permettre aux personnes physiques ou morales exerçant la même profession que celle constituant l’objet social de la société de détenir la totalité du capital social et des droits de vote. De nouvelles structures d’exercice pourraient ainsi être créées, notamment sous la forme d’établissements secondaires, pour permettre aux professionnels de développer leur activité. Néanmoins, excepté pour les professions juridiques et judiciaires, il serait toujours possible de déroger à cette règle lorsque cette dernière serait de nature à porter atteinte à l'exercice de la profession concernée, au respect de l'indépendance de ses membres ou de ses règles déontologiques propres (maintien du droit existant) ;

-  concernant les SPFPL, l'actionnariat de ces structures pourrait être ouvert aux professionnels européens qui exercent la même profession que celle constituant l'objet social de la société. Concomitamment, l’objet des SPFPL pourrait être élargi, pour leur permettre d’exercer des activités allant au-delà de la simple détention des parts et actions de leurs filiales et des activités accessoires.

Cette mesure ne concernerait pas les professions de santé

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1. Impacts pour les entreprises

3.1.1. Développer l’activité et la création de nouvelles structures

La levée des barrières réglementaires permettrait de libérer le dynamisme des structures, en ayant pour effet quasi mécanique d’augmenter :

- l’emploi qui sera être déployé par la création de nouvelles sociétés, tant au bénéfice des professionnels du droit que des fonctions supports (ressources humaines, comptabilité, secrétariat, etc.) ; de plus, le développement économique de l’activité libérale grâce à ces nouvelles structures permettrait un accès plus aisé des jeunes au marché de l’emploi, tout en permettant une mobilité plus forte des professionnels ;

- la disponibilité du service, en tant que les entreprises et les particuliers bénéficieraient d’une offre plus large et de meilleure qualité, leur offrant ainsi la possibilité de trouver plus facilement le professionnel à même de l’accompagner dans leur projet ;

- la concurrence, en tant qu’un accroissement des acteurs présents sur un marché pourrait conduire les opérateurs à une nouvelle régulation des prix et à des offres de services novatrices afin de préserver leurs parts de marché et de gagner des nouveaux clients.

La compétitivité des professionnels français serait accrue, en tant qu’elle conduirait à une plus grande concurrence, facteur de développement et d’innovation. De plus, le développement économique de l’activité libérale grâce à ces nouvelles structures permettrait un accès plus aisé des jeunes au marché de l’emploi, tout en permettant une mobilité plus forte des professionnels.

3.1.2. Faciliter le recours à toutes les sources de financement

Les entreprises libérales, comme tous les entrepreneurs quel que soit leur secteur d’activité, connaissent des difficultés de financement, tant au niveau interne (capacité d’autofinancement réduite par le ralentissement de l’activité) qu’au niveau externe (prudence des opérateurs financiers envers les entreprises dites à risque). Plus particulièrement, les sociétés d’exercice libéral font face à la méfiance du secteur bancaire conventionnel. En effet, leur profitabilité est intimement liée aux fluctuations de l’activité économique, puisqu’il s’agit, notamment pour l’activité de conseil offerte par les professionnels d’apporter une expertise technique aux entreprises et de les accompagner pour la réalisation de leurs projets.

En période de conjoncture basse, les organismes bancaires ont naturellement tendance à favoriser les entreprises déjà installées au détriment des jeunes entrepreneurs ou des projets d’installation innovants. Cet accès réduit au crédit bancaire touchent en effet particulièrement les jeunes professionnels souhaitant démarrer leur activité, qui présentent un risque plus élevé et ne bénéficient pas toujours des garanties financières suffisantes pour souscrire un emprunt couvert par une sureté réelle.

Il s’agirait donc également de pallier ces difficultés conjoncturelles en offrant la possibilité aux professionnels d’apporter une partie des fonds nécessaires au démarrage d’une nouvelle/autre société, tout en leur accordant un droit de regard sur l’activité par l’intermédiaire des droits de vote. Par rapport à un financement bancaire, l’apport en capital d’un confrère offre une plus grande souplesse à la société, en tant que ce dernier peut décaler la rémunération de ses parts sociales dans le temps alors qu’un emprunt doit être remboursé à échéance fixe et régulière. De manière classique, le professionnel poursuit certes des finalités économiques, mais qui auront des perspectives de rentabilité à plus long terme qu’un opérateur financier, mais également confraternel, dans une logique de parrainage.

3.1.3. Accroître l’influence des sociétés françaises sur la scène européenne

Des aménagements des SEL et SPFPL pourraient revêtir des avantages à la fois économiques (investissements, création sociétés et emplois) et en termes d'influence des entreprises françaises afin de faciliter la constitution de réseaux transeuropéens par la création d’établissements secondaires sous forme de filiales et une plus grande souplesse à l’exportation. Ces structures à fondation nationale pourraient alors concurrencer les actuels groupes européens par une croissance externe et ainsi augmenter leur volume d’activité.

3.2. Impacts juridiques

La Commission européenne, confortée par la jurisprudence de la Cour de justice de l’union européenne, se montre particulièrement attentive aux conditions permettant de renforcer la concurrence dans le secteur des services, à éliminer les restrictions injustifiées à l'accès aux services professionnels et à leur exercice, notamment en ce qui concerne la structure d'actionnariat et la levée des restrictions pesant sur les entreprises. Les mesures qui seront proposées dans le cadre de l’habilitation devront aller dans le sens des attentes de la Commission et prévenir tout risque d’un contentieux devant la Cour de justice.

Le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

4. Consultations prévisionnelles

Les instances ordinales des différentes professions libérales concernées devront être consultées.

CHAPITRE V – URBANISME

Article 23

Rapport sur la mobilité dans le parc social

1. État des lieux

Au terme de l’article L.101-1 du code de la construction et de l’habitation, « tous les deux ans, un rapport est présenté par le Gouvernement au Parlement sur la situation du logement en France. Ce rapport comprend notamment une évaluation territorialisée de l'offre et des besoins en matière de logements ; des données sur l'évolution des loyers ; des données sur les révisions annuelles ou les modifications du barème visé à l'article L. 351-3, ainsi que sur leurs conséquences sur les bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement ; un bilan d'application du supplément de loyer de solidarité prévu à l'article L. 441-3 ; ainsi que des informations sur l'occupation des logements d'habitations à loyer modéré visés au livre IV et sur son évolution ».

L’augmentation générale des loyers et des prix des logements en accession à la propriété entraîne une demande accrue de logements d’habitation à loyer modéré (HLM) et, pour les ménages logés en HLM, peu d’incitations à sortir du parc social : le taux de rotation dans le parc social est de 8,8 %, contre 18,7 % dans le logement privé. 1,7 million de foyers étaient en attente d’un logement HLM en 2012.

Afin de pallier le manque de logements accessibles aux ménages modestes, le parc social s’est centré sur les populations les plus fragiles. Selon les données de l’enquête logement de l’Insee, si 59 % des habitants HLM appartenaient à la moitié la plus riche de la population en 1973, ce taux est passé à 27% en 2006.

La loi du 4 mars 1996, permet aux organismes HLM d’appliquer un supplément de loyer de solidarité (SLS) pour les locataires dont les ressources dépassent de plus de 20 % les plafonds de ressources. La loi du 25 mars 2009 a tenté de favoriser la rotation dans le parc social par la diminution de 10,3 % du plafond de ressources pour accéder à un logement social et par la remise en cause du principe de maintien dans les lieux. En effet, les locataires qui dépassent de plus de 100 % le plafond de ressources durant deux années successives doivent quitter le parc social dans un délai de trois ans (sauf si les occupants sont handicapés ou âgés de plus de 65 ans et sauf si le logement se situe en zone urbaine sensible).

Le décret n° 2009-1141 du 22 septembre 2009 prévoit qu’en cas de sous-occupation d’un logement social, le locataire qui déménage peut bénéficier d’une aide à la mobilité prise en charge par le bailleur pour un montant maximum de 1.000 €.

Malgré ces mesures, l’écart de prix entre le parc social et le parc privé est devenu tel que les ménages renoncent à déménager. Afin de favoriser la mobilité, plusieurs propositions ont été formulées par le Conseil d’État et le Centre d’analyse stratégique. Parmi celles-ci, la modification du mode de fixation des loyers par l’introduction d’une progressivité en fonction des revenus du locataire ou une meilleure organisation des mutations internes au parc social. Il s’agit de compléter et d’actualiser ces études.

2. Objectifs poursuivis

Afin d’améliorer la connaissance des freins à la mobilité dans le parc social, il est nécessaire notamment d’approfondir les études existantes pour avoir une connaissance plus précise sur le traitement des demandes de mutations et les parcours résidentiels pour les logements du parc social. Dans cette optique, il est proposé de compléter l’information du Gouvernement et du Parlement par les compléments du rapport mentionné à l’article L.101-1 du code de la construction et de l’habitation afin de le compléter et l’enrichir sur ces thématiques. L’utilisation des données qui pourra en être faite sera utile à la réflexion et à l’élaboration de réformes pour augmenter la mobilité dans le parc social.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Il s’agit de compléter l’article législatif L.101-1 du code de la construction et de l’habitation afin de compléter l’information du Parlement sur les deux thématiques proposées.

4. Analyse des impacts prévisibles

La confection du rapport n’a pas d’impact direct sur les particuliers ou sur les entreprises. Les acteurs du secteur HLM seront sollicités pour fournir des données nécessaires à l’alimentation des deux nouveaux thèmes du rapport.

Article 24

Zone de majoration de constructibilité

1. État des lieux

Différents outils ont été créés afin de favoriser le développement du logement intermédiaire avec notamment les mesures issues de l'ordonnance du 20 février 2014 et des outils financiers (principalement des dispositifs fiscaux).

Ainsi, l’ordonnance du 20 février 2014 prévoit plusieurs mesures ayant pour objet de favoriser le développement du logement intermédiaire avec notamment la création d’une définition du logement intermédiaire, la possibilité donnée aux collectivités territoriales d’en prévoir le développement dans leurs documents de programmation (PLH) et la création d’un bail réel immobilier de longue durée pour la production de logement intermédiaire. L’ordonnance autorise également les organismes HLM à créer des filiales ayant pour objet la production de logement intermédiaire.

Les mesures de cette ordonnance sont soumises à un zonage puisqu’elles ne s’appliquent que dans les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie par l’article 232 du code général des impôts (communes soumises à la taxe sur les logements vacants), ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L.302-5 du code de la construction et de l’habitation.

Par ailleurs, il existe des dispositifs financiers (principalement fiscaux) destinés à favoriser le développement du logement intermédiaire tels que notamment le dispositif Pinel, le régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, introduit par l’article 73 de la loi de finances pour 2014, le Borloo ancien et le prêt locatif intermédiaire. Ces dispositifs financiers font - pour certains - l’objet d’un zonage défini hors de l’ordonnance du 20 février 2014.

Il est rappelé que les mesures de l’ordonnance du 20 février 2014 et les outils financiers précités ne sont pas corrélés.

Il s’avère que le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 pose des difficultés substantielles en termes de lisibilité et de cohérence avec les dispositifs d’aide existants en faveur du logement intermédiaire.

Il s’agit, notamment, de rendre lisibles et cohérents les différents outils créés en faveur du logement intermédiaire de manière à ce que les acteurs concernés s’en saisissent. Il s’agit également de compléter les dispositions de l’ordonnance du 20 février  2014 pour compléter les outils permettant de développer le logement intermédiaire.

En effet, actuellement, le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 et les zonages – quand ils existent – des outils financiers en faveur du logement intermédiaire ne se recoupent pas nécessairement.

Ainsi, les logements construits avec l’appui de dispositifs financiers en faveur du logement intermédiaire peuvent être qualifiés de logements intermédiaires au sens de l'ordonnance uniquement dans le cas où il y a cohérence entre le zonage de l'ordonnance du 20 février 2014 et le zonage du dispositif financier concerné.

A l’inverse, un logement construit avec l'aide des dispositifs financiers précités – dont le dispositif Pinel - dans un endroit situé hors du zonage de l'ordonnance du 20 février 2014 ne pourra pas s'appeler logement intermédiaire au sens de l'ordonnance.

Le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 introduit donc des difficultés de compréhension de la définition du logement intermédiaire alors que l’un des objets de cette ordonnance était de clarifier cette notion.

D’autre part, ce zonage crée des difficultés opérationnelles relatives au régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, introduit par l’article 73 de la loi de finances pour 2014. En effet, comme précédemment énoncé, le zonage introduit par l’ordonnance du 20 février 2014 n’est pas recouvert de manière intégrale par les zones A et B1 sur lequel s’applique ce dispositif. En conséquence, les filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire, qui ne peuvent intervenir que sur le zonage prévu par l’ordonnance du 20 février 2014, ne pourront pas systématiquement mobiliser le régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, ce qui nuit à l’efficacité de la mesure même de création de telles filiales. De plus, les maisons mères de ces filiales peuvent - quant à elles - intervenir sur la France entière. Ainsi, les territoires appartenant au zonage de l’ordonnance mais non compris dans les zones A et B1 ne verront probablement de filiales intervenir car elles ne pourront pas bénéficier du dispositif fiscal applicable aux investisseurs institutionnels.

De plus, seules les collectivités situées au sein du zonage de l’ordonnance peuvent prévoir dans leur PLH le développement de logement intermédiaire au sens de l’ordonnance. Cependant, en dehors du zonage de l’ordonnance, rien n’interdit aux collectivités territoriales de prévoir la production de logements sous plafonds intermédiaires dans leur PLH (bien que les logements ne soient pas considérés comme intermédiaires par la loi). Ainsi, le zonage de l’ordonnance sur le logement intermédiaire introduit encore une fois un problème de lisibilité.

Enfin le bail réel immobilier, qui permet notamment de portage foncier des opérations de construction de logements intermédiaires ne peut avoir lieu que dans les zones définies par l’ordonnance, ce qui ne permet pas de le mobiliser dans l’ensemble des territoires où le besoin en logements intermédiaires a été identifié.

1. Objectifs poursuivis

Les modifications du code de l’urbanisme ont pour objectif principal d'assurer la pleine traduction opérationnelle de la programmation et de la planification, par les collectivités territoriales, du développement des logements intermédiaires. Les communes sur le ressort desquels des logements intermédiaires seront construits pourront délimiter au sein des Plans locaux d’urbanisme (PLU) ou documents d’urbanisme en tenant lieu (Plan d’occupation des sols (POS), Plan d’aménagement de zone (PAZ) ou Plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) , des secteurs à l’intérieur desquels la réalisation de logements intermédiaires pourra bénéficier d’une majoration de constructibilité pouvant aller jusqu’à 30% (nouvel article L.127-1-1 du code de l’urbanisme). Ce mécanisme est similaire à celui qui existe déjà pour les logements sociaux à l’article L.127-1 du même code.

Il est également prévu que la mise en place de cette majoration dans les PLU puisse se faire par le biais de la procédure spécifique de modification simplifiée, comme c’est déjà le cas pour les autres majorations de constructibilité.

2. Options possibles et nécessité de légiférer

La délégation de compétence des aides à la pierre, qui était conçue au départ comme un dispositif expérimental, a été codifiée dans le code de la construction et de l’habitation, puis renforcée par la loi n° 2014-366 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) et par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPAM). L’extension des compétences pouvant être déléguées par l’Etat en matière d’habitat et d’hébergement relève donc de modifications législatives et plus précisément des articles L.301-3, L. 301-5-1 et L. 301-5-2 du code de la construction et de l’habitation, pour la délégation de compétence aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) hors métropoles et aux conseils généraux, et des articles L. 3641-5, L. 5217-2 et L. 5219-1, du code général des collectivités territoriales, respectivement, pour la métropole du Grand Paris, pour la métropole de Lyon et pour les autres métropoles de droit commun, dont Aix-Marseille. Il eut été possible de maintenir la programmation des aides au logement intermédiaire et aux logements en location-accession comme seule prérogative du préfet, y compris dans les territoires délégués, mais cela aurait eu les conséquences négatives suivantes :

- l’existence de deux acteurs responsables en matière de programmation des aides de l’Etat sur les territoires délégués : l’Etat pour les logements intermédiaires et la location-accession (hors territoire délégué aux CG) et le délégataire pour le logement social sur les parcs public et privé, ce qui aurait rendu plus complexe les négociations locales avec des acteurs multiples sur des typologies de logements souvent complémentaires notamment dans le cas d’opérations mixant différents types de logements et concourant ainsi à la mixité sociale à l’échelle du quartier ;

- le manque de lisibilité dans la mise en œuvre des politiques locales de l’habitat et de l’hébergement, à l’opposé d’une part des objectifs recherchés par les dispositions contenues dans les lois ALUR et MAPAM, qui constituent une étape supplémentaire dans le renforcement des délégations de compétences et dans la cohérence de cette mise en œuvre, et d’autre part du contenu des PLH, qui en tant que supports de la politique locale des EPCI et des métropoles, prennent en compte les logements intermédiaires dans la définition des besoins et des objectifs sur le territoire intercommunal en application de l’article 2 de l’ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014.

Compte tenu de ces éléments, il est cohérent de permettre, par voie législative, aux délégataires des aides à la pierre de programmer également les aides en faveur des logements intermédiaires et des logements en location-accession.

Les autres articles ont pour objet de compléter ou modifier des dispositions législatives.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Le développement d’un parc de logement locatif intermédiaire durable dans les zones les plus chères, aura pour effets :

- un meilleur accès au logement des classes moyennes et une augmentation du reste à vivre pour ces ménages ;

- une meilleure fluidité des parcours résidentiels et la levée des freins à la mobilité des ménages ;

- une atténuation des effets de seuil entre le parc social et le marché libre, permettant de faciliter les sorties du parc social et la mobilité de ce parc social au reste du parc locatif, et in fine de réduire la pression sur le logement locatif social.

La modification du code de l’urbanisme permettra de créer un nouveau mécanisme de majoration des règles de constructibilité pour la réalisation de programmes de logements comportant des logements intermédiaires (nouvel article L.127-1-1 du code de l’urbanisme). Le dispositif est applicable aux territoires des communes couverts par un PLU, un POS, un PAZ ou un PSMV.

Sur le plan financier, la mise en place de ce dispositif de majoration n’entraînera aucun coût financier supplémentaire. Les collectivités ou EPCI pourront se saisir du dispositif de majoration s’ils souhaitent accroître la production de logements intermédiaires. Le recours à ce dispositif, qui est volontaire, sera d’autant plus facilité que, conformément à l'article L.123-13-3 du code de l’urbanisme modifié par la présente ordonnance,  sa mise en place dans le règlement du PLU se fait par le biais de la procédure de modification simplifiée, procédure souple qui ne nécessite qu'une mise à disposition du public.

En ce qui concerne les impacts qualitatifs en matière d’urbanisme, on peut indiquer, à titre de comparaison, que selon une étude réalisée en 2012 par le Ministère de l’Egalité des territoires et du logement, 142 délibérations étaient intervenues pour majorer les règles de constructibilité en matière de logement social (article L.127-1 du code de l’urbanisme) et qu’une trentaine étaient intervenues pour majorer les règles de constructibilité en matière d’habitations (possibilité plus récente prévue par l’article L.123-1-11 du code de l’urbanisme).

4. Consultations menées

Le conseil national d’évaluation des normes a été consulté.

5. Modalités d’application dans le temps, abrogations et mesures transitoires

Il est proposé une entrée en vigueur différée de la mesure prévue sur les règles de majoration de constructibilité).

Le renvoi à un décret en CE, avec un différé d'entrée en vigueur, a son utilité pour laisser le temps de définir par décret les pièces nécessaires au contrôle du respect des dispositions du L.127-1-1, à fournir dans le dossier de demande de permis de construire (indication volumes consacrés aux logements intermédiaires, identification de la part du programme consacrée aux logements intermédiaires notamment).

En d'autres termes, si la règle de fond peut juridiquement entrer directement en vigueur, sans règle de procédure, son application est très incertaine.

Le présent projet de loi prévoit en revanche une entrée en vigueur immédiate pour les délégations de compétence.

Article 25 (1°)

Habilitation
Promouvoir le développement du logement intermédiaire et de la location-accession

1. Difficulté à résoudre

Différents outils ont été créés afin de favoriser le développement du logement intermédiaire avec notamment les mesures issues de l'ordonnance du 20 février 2014 et des outils financiers (principalement des dispositifs fiscaux).

Ainsi, l’ordonnance du 20 février 2014 prévoit plusieurs mesures ayant pour objet de favoriser le développement du logement intermédiaire avec notamment la création d’une définition du logement intermédiaire, la possibilité donnée aux collectivités territoriales d’en prévoir le développement dans leurs documents de programmation (PLH) et la création d’un bail réel immobilier de longue durée pour la production de logement intermédiaire. L’ordonnance autorise également les organismes d’habitation à loyer modéré (HLM) à créer des filiales ayant pour objet la production de logement intermédiaire.

Les mesures de cette ordonnance sont soumises à un zonage puisqu’elles ne s’appliquent que dans les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie par l’article 232 du code général des impôts (communes soumises à la taxe sur les logements vacants), ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L.302-5 du code de la construction et de l’habitation.

Par ailleurs, il existe des dispositifs financiers (principalement fiscaux) destinés à favoriser le développement du logement intermédiaire tels que notamment le « dispositif Pinel », le régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, introduit par l’article 73 de la loi de finances pour 2014, le « Borloo ancien » et le prêt locatif intermédiaire. Ces dispositifs financiers font - pour certains - l’objet d’un zonage défini hors de l’ordonnance du 20 février 2014.

Il est rappelé que les mesures de l’ordonnance du 20 février 2014 et les outils financiers précités ne sont pas corrélés.

Il s’avère que le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 pose des difficultés substantielles en termes de lisibilité et de cohérence avec les dispositifs d’aide existants en faveur du logement intermédiaire.

Il s’agit, notamment, de rendre lisibles et cohérents les différents outils créés en faveur du logement intermédiaire de manière à ce que les acteurs concernés s’en saisissent. Il s’agit également de compléter les dispositions de l’ordonnance du 20 février 2014 pour compléter les outils permettant de développer le logement intermédiaire.

En effet, actuellement, le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 et les zonages – quand ils existent – des outils financiers en faveur du logement intermédiaire ne se recoupent pas nécessairement.

Ainsi, les logements construits avec l’appui de dispositifs financiers en faveur du logement intermédiaire peuvent être qualifiés de logements intermédiaires au sens de l'ordonnance uniquement dans le cas où il y a cohérence entre le zonage de l'ordonnance du 20 février 2014 et le zonage du dispositif financier concerné.

À l’inverse, un logement construit avec l'aide des dispositifs financiers précités – dont le dispositif Pinel – dans un endroit situé hors du zonage de l'ordonnance du 20 février 2014 ne pourra pas s'appeler logement intermédiaire au sens de l'ordonnance.

Le zonage de l’ordonnance du 20 février 2014 introduit donc des difficultés de compréhension de la définition du logement intermédiaire alors que l’un des objets de cette ordonnance était de clarifier cette notion.

D’autre part, ce zonage crée des difficultés opérationnelles relatives au régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, introduit par l’article 73 de la loi de finances pour 2014. En effet, comme précédemment énoncé, le zonage introduit par l’ordonnance du 20 février 2014 n’est pas recouvert de manière intégrale par les zones A et B1 sur lequel s’applique ce dispositif. En conséquence, les filiales des organismes HLM dédiées au logement intermédiaire, qui ne peuvent intervenir que sur le zonage prévu par l’ordonnance du 20 février 2014, ne pourront pas systématiquement mobiliser le régime fiscal applicable aux investisseurs institutionnels, ce qui nuit à l’efficacité de la mesure même de création de telles filiales. De plus, les maisons mères de ces filiales peuvent - quant à elles - intervenir sur la France entière. Ainsi, les territoires appartenant au zonage de l’ordonnance mais non compris dans les zones A et B1 ne verront probablement de filiales intervenir car elles ne pourront pas bénéficier du dispositif fiscal applicable aux investisseurs institutionnels.

De plus, seules les collectivités situées au sein du zonage de l’ordonnance peuvent prévoir dans leur PLH le développement de logement intermédiaire au sens de l’ordonnance. Cependant, en dehors du zonage de l’ordonnance, rien n’interdit aux collectivités territoriales de prévoir la production de logements sous plafonds intermédiaires dans leur PLH (bien que les logements ne soient pas considérés comme intermédiaires par la loi). Ainsi, le zonage de l’ordonnance sur le logement intermédiaire introduit encore une fois un problème de lisibilité.

Enfin le bail réel immobilier, qui permet notamment de portage foncier des opérations de construction de logements intermédiaires ne peut avoir lieu que dans les zones définies par l’ordonnance, ce qui ne permet pas de le mobiliser dans l’ensemble des territoires où le besoin en logements intermédiaires a été identifié.

2. Objectifs poursuivis

D’une manière générale, l’objectif poursuivi est de mettre en place des outils permettant de développer une nouvelle offre de logements plus accessibles aux ménages à revenus moyens, que ce soit à la location ou à l’achat et de susciter la production de cette nouvelle offre par les acteurs.

Ce projet de loi vise à modifier par voie d’habilitation certaines dispositions du code de la construction et de l’habitation et du code de l’urbanisme pour compléter les outils permettant de développer le logement intermédiaire.

En premier lieu, afin de rendre lisibles et cohérents les différents outils créés en faveur du logement intermédiaire de manière à ce que les acteurs concernés s’en saisissent, la condition de zonage applicable à l’ordonnance du 20 février 2014 pourrait être supprimée sur le logement intermédiaire pour la rendre plus lisible et opérationnelle pour les opérateurs. Les aides financières et fiscales pour la production de logements intermédiaires resteraient quant à elles soumises à un zonage indépendant de celui de l’ordonnance. Ainsi, le zonage ou l'absence de zonage de l'ordonnance n'a aucun impact sur les outils financiers.

En second lieu, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), aux conseils généraux et aux métropoles, délégataires des aides à la pierre de l’État pour le logement locatif social, pourraient également être les acteurs locaux de la programmation des aides au logement intermédiaire et aux logements en location-accession sur leur territoire de compétence lorsque les besoins de ce territoire identifiés dans les PLH justifient la production de ce type de logements qui constitue une offre complémentaire entre le parc locatif social et le parc privé, étant rappelé que les dispositions législatives en vigueur (L. 302-1 du CCH) disposent que les PLH, qui constituent le socle de toute délégation aux EPCI ou aux métropoles en matière d’habitat et d’hébergement, contiennent les objectifs de production des territoires en matière de logements intermédiaires.

Les collectivités pourraient ainsi mettre en œuvre de véritables politiques locales de développement du logement locatif intermédiaire – à l’instar de ce que certaines font d’ores et déjà sur le logement locatif social, et disposeront pour se faire de tous les leviers d’action possible.

Enfin l’objet social des filiales qui peuvent être créées par les organismes HLM pour construire et gérer du logement intermédiaire pourrait être complété pour qu’il soit précisé de manière explicite que ces filiales peuvent également acquérir des logements intermédiaires. Ces filiales pourraient se voir confier la gestion de logements intermédiaires et confier elle-même une partie de leur parc en gestion à un autre organisme par le même biais.

Enfin, les modifications du code de l’urbanisme ont pour objectif principal d'assurer la pleine traduction opérationnelle de la programmation et de la planification, par les collectivités territoriales, du développement des logements intermédiaires. Les communes sur le ressort desquels des logements intermédiaires seront construits pourront délimiter au sein des Plans locaux d’urbanisme (PLU) ou documents d’urbanisme en tenant lieu (Plan d’occupation des sols (POS), Plan d’aménagement de zone (PAZ) ou Plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) , des secteurs à l’intérieur desquels la réalisation de logements intermédiaires pourra bénéficier d’une majoration de constructibilité pouvant aller jusqu’à 30% (nouvel article L.127-1-1 du code de l’urbanisme). Ce mécanisme est similaire à celui qui existe déjà pour les logements sociaux à l’article L.127-1 du même code.

Il est également prévu que la mise en place de cette majoration dans les PLU puisse se faire par le biais de la procédure spécifique de modification simplifiée, comme c’est déjà le cas pour les autres majorations de constructibilité.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La délégation de compétence des aides à la pierre, qui était conçue au départ comme un dispositif expérimental, a été codifiée dans le code de la construction et de l’habitation, puis renforcée par la loi n° 2014-366 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) et par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPAM). L’extension des compétences pouvant être déléguées par l’Etat en matière d’habitat et d’hébergement relève donc de modifications législatives et plus précisément des articles L.301-3, L. 301-5-1 et L. 301-5-2 du code de la construction et de l’habitation, pour la délégation de compétence aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) hors métropoles et aux conseils généraux, et des articles L. 3641-5, L. 5217-2 et L. 5219-1, du code général des collectivités territoriales, respectivement, pour la métropole du Grand Paris, pour la métropole de Lyon et pour les autres métropoles de droit commun, dont Aix-Marseille.

Il eut été possible de maintenir la programmation des aides au logement intermédiaire et aux logements en location-accession comme seule prérogative du préfet, y compris dans les territoires délégués, mais cela aurait eu les conséquences négatives suivantes :

- l’existence de deux acteurs responsables en matière de programmation des aides de l’Etat sur les territoires délégués : l’Etat pour les logements intermédiaires et la location-accession (hors territoire délégué aux CG) et le délégataire pour le logement social sur les parcs public et privé, ce qui aurait rendu plus complexe les négociations locales avec des acteurs multiples sur des typologies de logements souvent complémentaires notamment dans le cas d’opérations mixant différents types de logements et concourant ainsi à la mixité sociale à l’échelle du quartier ;

- le manque de lisibilité dans la mise en œuvre des politiques locales de l’habitat et de l’hébergement, à l’opposé d’une part des objectifs recherchés par les dispositions contenues dans les lois ALUR et MAPAM, qui constituent une étape supplémentaire dans le renforcement des délégations de compétences et dans la cohérence de cette mise en œuvre, et d’autre part du contenu des PLH, qui en tant que supports de la politique locale des EPCI et des métropoles, prennent en compte les logements intermédiaires dans la définition des besoins et des objectifs sur le territoire intercommunal en application de l’article 2 de l’ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014.

Compte tenu de ces éléments, il est cohérent de permettre, par voie d’ordonnance, aux délégataires des aides à la pierre de programmer également les aides en faveur des logements intermédiaires et des logements en location-accession.

Les autres articles ont pour objet de compléter ou modifier des dispositions législatives.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées :

Le développement d’un parc de logement locatif intermédiaire durable dans les zones les plus chères, aura pour effets :

- un meilleur accès au logement des classes moyennes et une augmentation du reste à vivre pour ces ménages ;

- une meilleure fluidité des parcours résidentiels et la levée des freins à la mobilité des ménages ;

- une atténuation des effets de seuil entre le parc social et le marché libre, permettant de faciliter les sorties du parc social et la mobilité de ce parc social au reste du parc locatif, et in fine de réduire la pression sur le logement locatif social.

La modification du code de l’urbanisme permettra de créer un nouveau mécanisme de majoration des règles de constructibilité pour la réalisation de programmes de logements comportant des logements intermédiaires (nouvel article L.127-1-1 du code de l’urbanisme). Le dispositif est applicable aux territoires des communes couverts par un PLU, un POS, un PAZ ou un PSMV.

Sur le plan financier, la mise en place de ce dispositif de majoration n’entraînera aucun coût financier supplémentaire. Les collectivités ou EPCI pourront se saisir du dispositif de majoration s’ils souhaitent accroître la production de logements intermédiaires. Le recours à ce dispositif, qui est volontaire, sera d’autant plus facilité que, conformément à l'article L.123-13-3 du code de l’urbanisme modifié par la présente ordonnance,  sa mise en place dans le règlement du PLU se fait par le biais de la procédure de modification simplifiée, procédure souple qui ne nécessite qu'une mise à disposition du public.

En ce qui concerne les impacts qualitatifs en matière d’urbanisme, on peut indiquer, à titre de comparaison, que selon une étude réalisée en 2012 par le Ministère de l’Egalité des territoires et du logement, 142 délibérations étaient intervenues pour majorer les règles de constructibilité en matière de logement social (article L.127-1 du code de l’urbanisme) et qu’une trentaine étaient intervenues pour majorer les règles de constructibilité en matière d’habitations (possibilité plus récente prévue par l’article L.123-1-11 du code de l’urbanisme).

S’agissant des délégations de compétence, l’article 61 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a prévu la possibilité pour l’État de déléguer ses compétences en matière de financement des aides à la pierre aux métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération, syndicats d'agglomération nouvelle et communautés de communes, à leur demande, dès lors que ces groupements sont dotés d'un document stratégique en matière de logement formalisé dans un programme local de l'habitat (PLH).

Cette possibilité ouverte aux structures intercommunales dotées de la compétence en matière de programme local de l’habitat a constitué une nouvelle étape dans la prise de responsabilité des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans le domaine de la politique de l’habitat. En effet, le PLH permettait jusqu’alors la définition d’une politique mais sa réalisation était subordonnée pour une part importante à l’obtention des financements de l’État. La conclusion d’une convention de délégation de compétences d’une durée de six ans permet la mise en œuvre de cette politique à l’initiative et sous la responsabilité directe de l’EPCI (article L.301-5-1 du CCH.) Les départements peuvent également demander à se voir déléguer les aides à la pierre pour six ans renouvelables hors territoire de compétence d’un EPCI délégataire (article L. 301-5-2 du CCH).

Après une montée en charge de ce dispositif au cours de la période 2005-2008, une stabilisation du nombre de délégation de compétence est constatée ces dernières années, traduisant sans doute un certain attentisme vis-à-vis des réformes annoncées portant sur les compétences des collectivités territoriales.

Au 1er janvier 2013, on compte 109 délégataires, dont 26 départements et 83 EPCI.

Au titre de l’année 2014, les négociations relatives aux prises de délégation ou aux renouvellements de convention ne sont pas encore complètement achevées. Selon les dernières informations des services déconcentrés (enquête d’avril 2014), s’ajouteraient à ces délégations, le Conseil Général de la Gironde, la Communauté d’agglomération du Grand Rodez, la Communauté d’agglomération Agglopole Provence et la Communauté d’agglomération du Grand Poitiers. La Communauté d’agglomération d’Arras et la Communauté d’agglomération du Pays d’Aix n’ont pas encore confirmé leur intention de renouveler leur convention de délégation de compétence.

Dès lors, en ce qui concerne les logements intermédiaires, l’impact d’une mesure d’élargissement des possibilités de délégation de compétences peut être évalué comme suit :

- L’article 3 de l’ordonnance, exclut la programmation des aides aux logements intermédiaires dans les communes carencées en application de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation. Au titre du dernier bilan annuel (2013), on décompte 190 communes carencées.

- L’article 279-0 bis A du code général des impôts (CGI) prévoit que les agréments des logements intermédiaires ouvrant droit à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à taux réduit (10 %) ne peuvent être délivrés que dans les zones A et B1 du zonage relatif à l’investissement locatif.

Sur les 2 338 communes concernées, 680 communes sont situées en territoires délégués et 1 658 en territoires non délégués.

Les aides en faveur la location-accession consistent actuellement en des prêts de la Caisse des dépôts et consignation (prêt PSLA) et en des aides fiscales (TVA à taux réduit et exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties - TFPB). Elles peuvent être accordées sur tout le territoire, les plafonds de loyers, les plafonds de prix d’acquisition et les plafonds de ressources dépendant du zonage de l’investissement locatif. En 2013, 7 332 prêts PSLA ont été accordés, dont environ la moitié en territoires délégués.

Il découlera de l’extension de la possibilité de délégation une activité supplémentaire pour les conseils généraux et les intercommunalités liée à l’intégration des aides aux logements intermédiaires et à la location-accession dans les délégations de compétences qui devrait s’avérer négligeable par rapport à celle résultant de l’instruction des logements locatifs sociaux. En effet :

- les logements intermédiaires comme la location accession ne font pas l’objet de subvention de l’État. L’instruction des demandes est donc réduite et sans aucune mesure avec l’instruction des dossiers de demandes de subventions des logements locatifs sociaux qui nécessitent une vérification des caractéristiques physiques et financières des opérations par rapport aux prescriptions du code de la construction et de l’habitation (calcul de l’assiette subventionnable, vérification des seuil de subvention, vérification de l’équilibre financier de l’opération, surcharge foncière, …) ;

- le nombre de logements pris en compte sera très nettement inférieur aux 117 065 logements locatifs sociaux financés en 2013 sur le parc public ;

Au surplus, la délégation de compétences, par définition, ne s’impose pas aux collectivités. Elle s’accompagne de la mise à disposition des services déconcentrés de l’État prévue tant par l’article 104 de la loi « libertés et responsabilités locales » ainsi que par la loi « MAPTAM » de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles du 27 janvier 2014. Cette mise à disposition est de droit dès lors que le délégataire en fait la demande, et dans ce cas l’impact en termes d’activité supplémentaire pour le délégataire est nul. Au 1er janvier 2013, les services de l’État étaient mis à la disposition des délégataires, dans 71 % des cas sur le parc public et dans 78 % des cas sur le parc privé.

Enfin, la suppression du zonage mentionné dans l’ordonnance aura un impact positif sur la production de logements, en particulier de logements intermédiaires et sociaux. En simplifiant la réglementation, les acteurs économiques pourront utiliser pleinement les outils créés pour la production de logements intermédiaires. Cette mesure aura un impact positif sur l’emploi et les finances publiques car elle met en place les conditions adéquates pour la production de logements. Elle a en conséquence un impact positif sur les particuliers : l’augmentation de l’offre de logements intermédiaires permettra un gain de pouvoir d’achat en réduisant leurs dépenses pour le logement.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Article 25 (2°)

Habilitation
Clarifier les mesures sur les rapports locatifs pour soutenir l’investissement

1. Difficultés à résoudre

Le régime de droit commun en matière de baux d’habitation est défini par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, dite loi Mermaz-Malandain. Le droit des contrats de louage, définit aux articles 1709 à 1762 du code civil, ne vient en effet à s’appliquer que de manière supplétive.

La loi du 6 juillet 1989 précitée tend à établir un équilibre entre deux droits fondamentaux, constitutionnellement garantis, que sont le droit de propriété et le droit au logement.

Cette loi régule les rapports entre bailleurs et locataires, et, encadre très précisément leurs relations, notamment leurs droits et obligations. Son article 1 dispose que « Le droit au logement est un droit fondamental; il s'exerce dans le cadre des lois qui le régissent. L'exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d'habitation grâce au maintien et au développement d'un secteur locatif et d'un secteur d'accession à la propriété ouverts à toutes les catégories sociales. »

Jusqu’à 2014, plusieurs lois sont venues compléter le dispositif des rapports locatifs établi par la loi de 1989, sans procéder toutefois à des modifications majeures dans l’équilibre des rapports locatifs.

La loi n°2014-366 du 26 mars 2014 dite loi ALUR a substantiellement modifié et complété le cadre juridique des rapports locatifs entre bailleurs et locataires tant pour les logements nus que pour les logements meublés constituant la résidence principale du preneur.

L’objectif principal des modifications apportées par la loi a consisté à sécuriser les locataires et les bailleurs et à améliorer l’équilibre de leurs rapports au cours des moments essentiels de la relation bailleurs-locataires : recherche de logement, entrée dans les lieux, conditions d’occupation, sortie du logement.

La loi ALUR contribue à l’apaisement des rapports locatifs, néanmoins il subsiste deux séries de difficultés :

- d’une part, il est fait état de difficultés rédactionnelles et d’articulation de certaines dispositions de la loi, notamment celles limitant la faculté pour le bailleur de donner congé à son locataire au terme du contrat ;

- d’autre part, les conditions d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi du 6 juillet 1989 suscitent des difficultés d’interprétation qui nuisent à la bonne application des textes et sont par ailleurs de nature à maintenir durablement la pluralité des régimes juridiques en matière de baux d’habitation.

1. Objectifs poursuivis

L’ensemble de ces difficultés de compréhension et d'application du droit des rapports locatifs nuisent à la sécurité juridique des relations contractuelles et pourraient être source de nombreux conflits dans une matière par nature conflictuelle.

Ainsi, le texte proposé vise, d’une part, à modifier certaines dispositions de la loi du 6 juillet 1989 qui ont donné lieu à des difficultés d’interprétation, et, d’autre part, à  simplifier les modalités d’application dans le temps des dispositions de la loi ALUR pour unifier à court terme le régime des baux d’habitation et ainsi concourir à l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité du droit.

Il est proposé d’apporter, par voie d’ordonnance, les évolutions suivantes à la loi du 6 juillet 1989 :

- la modification de l’article 3-2 tendant à préciser que la possibilité pour le locataire de demander à compléter l’état des lieux ne vaut que pour l’état des lieux d’entrée. Cette modification permettrait d’exclure expressément tout complément pour l’état des lieux de sortie.

- la clarification des dispositions relatives à la colocation : la première modification tendrait à exclure du champ de la colocation les locations formées uniquement de couples mariés ou pacsés au moment de la signature du bail. En effet, le dispositif introduit par le législateur n’était pas destiné à ces couples. La seconde modification tendrait à améliorer la rédaction de certaines dispositions relatives à l'aménagement de la solidarité susceptibles de provoquer des difficultés d'interprétation notamment en précisant que l’extinction de la solidarité concernerait le colocataire et sa caution, et, que l’extinction de l’engagement de la caution surviendrait en même temps que celle du colocataire, et non pas lors de la délivrance de son congé.

- la clarification des règles protectrices du locataire en cas de vente du logement qu’il occupe : le législateur a souhaité dès l’examen en première lecture de la loi ALUR accentuer la protection du locataire en cas de vente du logement dont il est locataire. La première protection a été introduite par amendement à l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 relatif au congé lors de l’examen du texte par la commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale. Une seconde mesure a été ajoutée au Sénat par l’introduction d’un nouvel article 11-2 à la loi du 6 juillet 1989 précitée. Il ressort du texte final une difficulté d’articulation entre ces deux textes qu’il conviendrait de corriger

Le dispositif proposé s’appuie sur une approche globale de la protection du locataire et répond à un double objectif :

maintenir un niveau élevé de protection du locataire : le congé pour vente ne peut être délivré par le propriétaire moins de 3 ans après avoir acquis le logement. La protection conférée au locataire demeure dans ces conditions meilleure à celle dont il bénéficiait avant la loi ALUR, où le congé pouvait être notifié à la fin du bail quelle que soit l’ancienneté de l’acquisition du bien. Le locataire a donc l’assurance de pouvoir être maintenu dans son logement pour une période de trois ans lorsque son logement a fait l’objet d’une acquisition en cours de bail ;

ne pas décourager l’investissement : la mesure introduite par la loi ALUR prorogeant automatiquement les baux a pour conséquence immédiate pour les bailleurs institutionnels se portant acquéreurs de logement de leur interdire la délivrance d’un congé pour vente au locataire dans un délai pouvant s’étaler de six à douze ans suivant les hypothèses, puisque les baux qu’ils signent ne peuvent être d’une durée inférieure à six ans. Dès lors, afin de ne pas décourager les investisseurs, il convient d’assurer au propriétaire bailleur qu’il ne peut se voir interdire la délivrance d’un congé pour vente au-delà de 6 ans après l’acquisition du logement.

Ce double objectif se traduit par :

la suppression de la mesure prorogeant automatiquement les baux des locataires lors de la division d’un immeuble en plusieurs lots de copropriétés (vente à la découpe) dans une zone tendue ;

la modification des conditions de limitation des congés pour vente en cas d’acquisition d’un bien occupé introduite par la loi ALUR pour compléter la protection du locataire face aux congés pour vente ou reprise délivrés suite à l’acquisition d’un logement occupé. La mesure prévoit donc d’autoriser la délivrance d’un congé pour vente au terme du contrat en cours lorsque la durée restant à courir à la date de l’acquisition est supérieure à trois ans (bail de 6 ans pour les bailleurs institutionnels). Elle prévoit aussi d’autoriser le congé pour vente à compter du premier renouvellement ou de la première reconduction du contrat de location lorsque la durée restante à courir à la date d’acquisition du logement est inférieure à trois ans. Par ailleurs, la modification de la disposition relative au congé pour reprise vise à préciser le point de départ du délai permettant à l’acquéreur de reprendre le bien.

La modification de l’article 24 tend à rétablir la rédaction initiale de la loi du 6 juillet 1989 relative aux demandes additionnelles aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation motivées par l'existence d'une dette locative, supprimée involontairement par la loi ALUR.

La modification de l’article 25-3 tend à rendre applicable aux contrats de locations meublées l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 relatif au contrat de location-type. Cette modification permet d’étendre les mentions obligatoires essentielles pour l’information du locataire et pour la mise en œuvre de l’encadrement des loyers aux logements loués meublés.

Les modifications de l’article 25-8 ont vocation à harmoniser certaines dispositions relatives aux meublés en matière de congés avec celles applicables aux locations nues.

Par ailleurs, il pourrait être proposé un échelonnement d’entrée en application de ces mesures en permettant :

- l’application aux baux en cours de certaines dispositions introduites par la loi ALUR, lesquelles ne bouleversent pas substantiellement l’équilibre du contrat.

-  l’application explicitement des nouvelles dispositions de la loi ALUR aux baux reconduits afin d’intégrer progressivement ces contrats au nouveau régime de droit commun des baux d’habitation, à l’exception de certaines dispositions encadrant le niveau des loyers.

2. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Ces mesures permettraient une plus grande sécurité juridique du fait de la résolution des difficultés d’interprétation de certaines dispositions, et devraient éviter les contentieux inhérents à ces difficultés juridiques. À titre de précision, les ventes de logements occupés représentent entre 4,2 % et 4,4 % du volume des transactions annuelles, soit environ 30 000 logements par an effectuées pour la majorité d’entre elles par des investisseurs institutionnels.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

3. Application et Outre-Mer

Impact uniquement sur les départements d’outre-mer et Mayotte, la loi du 6 juillet 1989 leur étant applicable directement.

a) Les départements d’outre-mer et Mayotte

La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion et Mayotte ne disposent d’aucune compétence particulière en matière de logement.

Ces départements d'outre-mer et celui de Mayotte sont régis par le principe de l’assimilation législative : les textes en vigueur dans l’hexagone s'y appliquent de façon automatique sans qu’il soit besoin de le préciser.

La loi du 6 juillet 1989 est rendue applicable au département de Mayotte par une ordonnance n° 2012-576 du 26 avril 2012.

b) Saint-Barthélemy

En application du 2° de l’article LO  6214-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT), Saint-Barthélemy est compétente en matière d’urbanisme, de construction, d’habitation et de logement depuis le 15 juillet 2007. L’Etat y demeure compétent en matière de droit civil et de droit commercial.

La collectivité est régie par le principe de l’assimilation législative.

L’Etat ne pouvant pas intervenir dans une matière de compétence attribuée à la collectivité, les textes relevant d’une compétence locale ne sont pas applicables sans qu’il soit besoin de le préciser (cf., notamment, l’article LO 6213-1 du CGCT).

c) Saint-Martin

En application du 1° du II de l’article LO  6314-3 CGCT, Saint-Martin est compétente en matière d’urbanisme, de construction, d’habitation et de logement depuis le 1er avril 2012. L’Etat y demeure compétent en matière de droit civil, de droit commercial et de professions réglementées.

La collectivité est régie par le principe de l’assimilation législative.

L’Etat ne pouvant pas intervenir dans une matière de compétence attribuée à la collectivité, les textes relevant d’une compétence locale ne sont pas applicables sans qu’il soit besoin de le préciser (cf., notamment, l’article LO 6313-1 du CGCT).

d) Saint-Pierre-et-Miquelon

En application du 3° du II de l’article LO  6414-1 du CGCT, Saint-Pierre-et-Miquelon est compétente en matière d’urbanisme, de construction, d’habitation et de logement. Moyennant quelques différences de rédaction, l’archipel est compétent en matière de logement depuis 1946, sauf entre le 1er octobre 1977 et le 11 juin 1985 (période pendant laquelle Saint-Pierre-et-Miquelon est un département d'outre-mer). L’Etat y demeure compétent en matière de droit civil, de droit commercial et de professions réglementées.

La collectivité est régie par le principe de l’assimilation législative depuis 1976.

L’Etat ne pouvant pas intervenir dans une matière de compétence attribuée à la collectivité, les textes relevant d’une compétence locale ne sont pas applicables sans qu’il soit besoin de le préciser (cf., notamment, l’article LO 6413-1 du CGCT).

Le principe de l’assimilation législative n’est pas rétroactif, mais l’article LO 6413-1 du CGCT a posé que tous les textes qui relèvent de la compétence de l’Etat et qui n’ont jamais été rendu applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon le sont devenus sans autre formalité le 1er janvier 2008.

e) Nouvelle-Calédonie

La lecture combinée des articles 20, 21 et 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie permet de déterminer qu’en matière de logement ce sont les provinces de la Nouvelle-Calédonie qui sont compétentes.

La Nouvelle-Calédonie est régie depuis l’origine par le principe de la spécialité législative. Pour qu’un texte soit applicable localement, il doit avoir fait l’objet d’une mention expresse d’application.

Une partie de la loi du 6 juillet 1989 a été rendue applicable localement par l’article 34 de la loi n°2012-1270 du 20 novembre 2012 issu d’un amendement.

Dès lors, la loi du 6 juillet 1989 ne peut plus être modifiée par l’Etat pour son application en Nouvelle-Calédonie, il appartient désormais, soit au congrès de la Nouvelle-Calédonie, soit à chacune des assemblées de province de procéder, le cas échéant, à sa modification.

f) Polynésie française

La lecture combinée des articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d’autonomie de la Polynésie française permet de déterminer que cette collectivité d’outre-mer est compétente en matière de logement.

La Polynésie française est régie depuis l’origine par le principe de la spécialité législative. Pour qu’un texte soit applicable localement, il doit avoir fait l’objet d’une mention expresse d’application.

Une partie du titre Ier de la loi du 6 juillet 1989 a été rendue applicable localement par une ordonnance n° 98-774 du 2 septembre 1998.

La loi de 1989 a pu être étendue en Polynésie française en 1998 car il a été considéré que les dispositions de cette loi rendues applicables localement relevaient au principal du droit civil, compétence qui relevait à l’époque de l’Etat. Tel n’est plus le cas aujourd’hui. Dès lors, quelle que soit la matière de compétence à laquelle il est possible de faire référence (droit de l’urbanisme, droit du logement, droit civil ou droit commercial), la compétence échappe à l’Etat dans cette collectivité d’outre-mer.

Dès lors, la loi du 6 juillet 1989 ne peut plus être modifiée par l’Etat pour son application en Polynésie française, il appartient désormais à l’assemblée de la Polynésie française de procéder, le cas échéant, à sa modification.

g) Wallis-et-Futuna

La lecture de l’article 12 de la loi n°61-814 du 29 juillet 1961 modifiée conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d’outre-mer et de l’article 40 du décret n°57-811 du 22 juillet 1957 auquel cet article 12 renvoie permet de déterminer que cette collectivité d’outre-mer est compétente en matière d’urbanisme, d’habitat, d’établissements dangereux, incommodes et insalubres mais pas en matière de droit civil ou commercial.

Wallis-et-Futuna est régie depuis l’origine par le principe de la spécialité législative. Pour qu’un texte soit applicable localement, il doit avoir fait l’objet d’une mention expresse d’application.

La loi du 6 juillet 1989 n’a jamais été étendue à Wallis-et-Futuna et donc ne s'y applique pas.

arianne

PROJET DE LOI POUR LA CROISSANCE ET L’ACTIVITÉ

Étude d’impact

Tome 2

NOR : EINX1426821L/Bleue-1

10 décembre 2014

Sommaire

TITRE II – INVESTIR 4

CHAPITRE IER – INVESTISSSEMENT 4

Section 1 – Faciliter les projets 4

Articles 26 et 27 4

Extension des expérimentations relatives à l’autorisation unique ICPE et au certificat de projet à d’autres régions pour les projets d’intérêt économique majeur et création d’un permis unique d’environnement 4

Article 28 : Mesures d’accélération des projets de construction et de modernisation du droit de l’environnement 8

Article 28 : Habilitation 9

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (a du 1° du I) 9

Article 28 : Habilitation 11

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (b du 1° du I) 11

Article 28 : Habilitation 15

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (c du 1° du I) 15

Article 28 : Habilitation 17

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (d du 1° du I) 17

Article 28 : Habilitation 18

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (e du1° du I) 18

Article 28 : Habilitation 26

Modifier les règles applicables à l’évaluation environnementale des plans, programmes et projets (2° du I) 26

Article 28 : Habilitation 34

Moderniser et clarifier les modalités de participation, de concertation, de consultation et d’information du public (3° du I) 34

Article 28 : Habilitation 37

Moderniser les conditions du règlement, devant les juridictions administratives, des litiges nés principalement de l’application des législations relevant du code de l’environnement (4° du I) 37

Article 29 38

Sécurisation des projets de construction en recentrant l’action en démolition aux cas où elle est indispensable 38

Article 30 45

Harmoniser les seuils de recours à un architecte pour les exploitations agricoles 45

Article 31 46

Simplifier la procédure d’autorisation pour l’implantation de la fibre optique dans les parties communes d’un immeuble 46

Article 32 1° et 2° 48

Habilitation à prendre par ordonnance les dispositions législatives nécessaires à la transposition des directives n° 2014/53/UE et n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil des 16 avril et 15 mai 2014 et à la simplification du CPCE 48

Article 32- 3° 51

Habilitation à simplifier le régime juridique applicable aux servitudes radioélectriques 51

Article 33 54

Ratification de l’ordonnance du 12 mars 2014 et modifications de l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques 54

Section 2 – Améliorer le financement 55

Article 34 55

Actionnariat salarié (Attribution gratuite d’actions) 55

Article 35 60

Actionnariat salarié – Régime fiscal des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) – Champ d’application 60

Articles 36 et 37 63

Harmonisation des dispositions relatives aux délais de versement des primes d’intéressement et de participation et aux intérêts de retards et précision sur les modalités de mise en place du plan d’épargne d’entreprise 63

Article 38 65

Mise en place du PERCO à la majorité des deux tiers des salariés 65

Article 39 66

Alignement des quotas de jours transférables vers un PERCO selon qu’ils proviennent d’un CET ou de jours de repos non pris en l’absence de CET 66

Article 40 68

Permettre aux salariés, au même titre que les autres signataires, de renégocier un accord d’intéressement comportant une clause de tacite reconduction 68

Article 41 69

Conseils en propriété industrielle 69

Article 42 71

Valorisation à l’international de l’expertise hospitalière française 71

Chapitre II –entreprises a participation publique 75

Section 1 – Articles 43 et 44 75

Habilitation à compléter l’ordonnance n° 2014-948 et action spécifique 75

Sections 2 à 4 - Articles 45 à 53 75

Simplification du cadre juridique de l’intervention de l’État et autorisations d’opérations sur le capital de sociétés à participation publique 75

CHAPITRE III – INDUSTRIE 88

Article 54 88

Attributions de l’Autorité de sûreté nucléaire – possibilité de se prononcer sur les options de sûreté des technologies promues à l’export. 88

Section 1 – Alléger les obligations des entreprises 90

Article 55 90

Allègement des obligations comptables des TPE sans activité 90

Article 56 93

Suppression de l’obligation de recourir à un acte extrajudiciaire dans les relations entre bailleurs et locataires 93

Article 57 95

Habilitation : Ordonnance concessions - Simplification du droit des contrats de concession à l’occasion de la transposition d’une nouvelle directive européenne 95

Article 58 102

Plafonnement des frais mis à la charge des entreprises en cas de publicité de la sanction ou de l’injonction les concernant 102

Section 2 – Procédures de l’Autorité de la concurrence 105

Article 59 105

Habilitation simplification des procédures 105

Section 3 – Faciliter la vie des entreprises 107

Article 60 107

Habilitation Carte d’identité virtuelle des entreprises 107

Article 61 110

Dérogation SNCF sur la facturation électronique 110

Articles 62 et 63 111

Publicité dans les grands stades - Définition et dérogation 111

Article 64 Rapport sur les régimes de retraite supplémentaires relevant de l’article L137-11 du code de la sécurité sociale 117

CHAPITRE V – ASSURER LA CONTINUITÉ DE LA VIE DES ENTREPRISES 119

Section 1 - Spécialisation de certains tribunaux de commerce 119

Articles 65 à 68 119

Section 2 – Administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires 125

Article 69 125

Habilitation pour prévoir les conditions et modalités de désignation d’un deuxième administrateur judiciaire et d’un deuxième mandataire judiciaire dans certaines procédures 125

Section 3 – Efficacité renforcée des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire 131

Article 70 131

Conversion de créances en capital / cession forcée en cas de redressement judiciaire 131

TITRE II – INVESTIR

CHAPITRE IER – INVESTISSSEMENT

Section 1 – Faciliter les projets

Articles 26 et 27

Extension des expérimentations relatives à l’autorisation unique ICPE et au certificat de projet à d’autres régions pour les projets d’intérêt économique majeur et création d’un permis unique d’environnement

4. État des lieux

Des procédures expérimentales en matière environnementale ont été instituées par la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et à sécuriser la vie des entreprises :

- Le certificat de projet (ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014) : il s’agit d’un instrument de sécurité juridique et de stabilisation du droit par lequel le préfet de département notifie un engagement à un porteur de projet sur les différentes procédures à respecter et les délais de délivrance des autorisations. Ce certificat a en outre pour effet de cristalliser le droit applicable au projet pendant 18 mois. Il est mis en œuvre pour une durée de trois ans à partir du 1er avril 2014 pour l’Aquitaine, la Franche-Comté et la Champagne-Ardenne et du 1er septembre 2014 pour la Bretagne ;

- L’autorisation unique « ICPE » (ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014) : cette expérimentation vise à organiser l’instruction coordonnée et la délivrance en un acte unique de l’ensemble des décisions relevant de l’État pour un projet soumis à autorisation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).

Elle concerne d’une part, les projets d’installations éoliennes et de méthanisation dans les régions Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Basse-Normandie, Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Bretagne et Midi-Pyrénées, d’autre part tous les projets d’installations classées relevant du régime de l’autorisation en Champagne-Ardenne et Franche-Comté. En particulier, pour ces régions, la procédure unique doit être coordonnée avec celle du permis de construire lorsque la délivrance de ce dernier ne relève pas de l’État. Elle est mise en œuvre depuis mai 2014 ;

- L’autorisation unique « IOTA » (ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014) : il s’agit d’une expérimentation similaire concernant les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à autorisation « loi sur l’eau », intégralement situés dans les territoires des régions expérimentatrices. Cette autorisation rassemble, autour de l’autorisation IOTA soumis à la loi sur l’eau, toutes les autres autorisations environnementales relevant de l’État qui peuvent, le cas échéant, être nécessaires pour un même projet : l’autorisation spéciale de modification d’une réserve naturelle nationale (sauf lorsqu’une autorisation d’urbanisme est requise), l’autorisation spéciale de modification d’un site classé ou en instance de classement (sauf lorsqu’une autorisation d’urbanisme est requise), la dérogation à l’interdiction d’atteinte aux espèces et habitats protégés ou l’autorisation de défrichement. Depuis juin 2014, elle est appliquée en Rhône-Alpes et en Languedoc-Roussillon dans le cadre de l’expérimentation.

Le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, adopté le 14 octobre 2014 en première lecture à l’Assemblée nationale, prévoit d’étendre les deux autorisations uniques définies ci-dessus à tout le territoire national. Concernant les ICPE, cette généralisation ne concernerait toutefois que les projets énergétiques visés au titre I de l’ordonnance (principalement les éoliennes et les installations de méthanisation).

Dans le cadre des États généraux de la modernisation du droit de l’environnement, il a été mis en exergue la multiplicité des autorisations qu’un projet d’activité économique devait obtenir et la difficulté pour les porteurs de projets à connaître toutes les législations susceptibles de s’appliquer à leur projet. L’insécurité juridique née des changements fréquents de la règle de droit ont par ailleurs été soulignés. Pour des motifs liés à la complexité d’un projet mais aussi du fait de l’omission ou de la « découverte » tardive d’une législation s’appliquant au projet ou encore par un changement de circonstances du droit, le temps nécessaire pour voir aboutir un projet est jugé trop long.

5. Objectifs poursuivis

L’objectif de ces dispositions est :

- d’une part, d’étendre à d’autres régions les expérimentations d’autorisation unique ICPE et de certificat de projet. Cette extension serait limitée aux projets dont l’intérêt économique le justifie. Par ailleurs, outre l’Aquitaine, la Franche-Comté, la Champagne-Ardenne et la Bretagne, seule l’Île-de-France bénéficierait de l’extension de l’expérimentation relative au certificat de projet ;

- d’autre part, sur la base de l’évaluation des expérimentations et des recommandations du groupe de travail mis en place sur le sujet dans le cadre de la feuille de route du Gouvernement pour la modernisation du droit de l’environnement, de permettre au Gouvernement de pérenniser les dispositifs d’autorisation unique ICPE et IOTA.

6. Options possibles et nécessité de légiférer

La mise en place des expérimentations a nécessité l’adoption de mesures législatives, prises par voie d’ordonnances. L’extension de leur champ d’application comme leur pérennisation nécessitent donc que soient prises des dispositions de même nature.

L’extension des expérimentations serait limitée aux projets d’ampleur, c’est-à-dire tout projet présentant un intérêt majeur pour l'activité économique, compte tenu du caractère stratégique de l'opération concernée, de la valeur ajoutée qu'elle produit, de la création ou de la préservation d'emplois qu'elle permet ou du développement durable du territoire qu'elle rend possible. La pérennisation des dispositifs d’autorisation unique a vocation en revanche à avoir une portée transversale. Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

7. Présentation et analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les porteurs de projets

En ce qui concerne l’extension géographique des expérimentations autorisation unique ICPE et certificat de projet, l’impact pour les porteurs de projets sera significatif en termes de délais et de simplification des processus. Les porteurs de projet d’importance majeure bénéficieraient ainsi :

- d’un cadre d’action plus clair (certification des législations applicables, engagement sur le délai de délivrance des autorisations sollicitées et mention des éléments de nature juridique ou technique d’ores et déjà détectés par l’administration susceptibles de faire obstacle au projet) ;

- d’un cadre d’action plus stable (gel des dispositions législatives et réglementaires déterminant les conditions de délivrance des autorisations sollicitées) ;

- d’un gain de temps (le certificat de projet pourra valoir avis de cadrage préalable et notification de la décision d’examen au cas par cas de l’autorité environnementale) ;

- d’une simplification des formalités avec un unique dossier de demande d’autorisation à réaliser et une seule étude d’impact environnementale qui couvrira tous les aspects des différentes législations couvertes ;

- d’un guichet unique qui animera le travail d’instruction et cordonnera la prise de position de l’ensemble des services de l’État.

Ceci devrait se traduire par des gains financiers importants en termes de complexité et de durée de procédure et aboutir à des décisions juridiquement plus solides, dans un délai plus court. Un délai d’autorisation ICPE de 10 mois au maximum est attendu, alors que la moitié des demandes nécessitent actuellement un délai supérieur à un an.

Le suivi et l’évaluation de ces expérimentations permettront de quantifier cet impact.

En ce qui concerne la pérennisation des dispositifs expérimentaux d’autorisation unique, celle-ci permettra de simplifier les procédures sans diminuer le niveau de protection de l’environnement, de garantir une meilleure intégration des enjeux environnementaux pour un même projet et d’assurer une anticipation, une lisibilité et une stabilité juridique accrues pour le porteur de projet.

C’est pourquoi, le présent article habilite le Gouvernement à :

ajuster les dispositions expérimentales, pour lesquelles l’évaluation aurait mis en lumière des difficultés de mise en œuvre pratique ;

compléter le champ des autorisations et dérogations intégrées, le cas échéant. Le rapport d’évaluation devra se prononcer sur l’opportunité d’intégrer le permis de construire quand l’État est l’autorité compétente, certaines autorisations du code de l’énergie (autorisation d’exploiter, approbation des tracés empruntant le domaine public) et l’autorisation de travaux ou d’activité dans un parc national (sur avis conforme du directeur de Parc) ;

codifier les dispositions des ordonnances ICPE et IOTA ;

prendre en considération les adaptations en matière d’évaluation environnementale et de participation du public pour lesquelles d’autres réformes sont menées par le Gouvernement.

Impacts pour l’administration

La charge de travail pour l’administration sera sans doute augmentée, compte tenu de l’important travail de réingénierie des processus et de coordination de services que nécessitera le déploiement de ces procédures expérimentales.

Toutefois, les régions entrant dans le dispositif bénéficieront du retour d’expérience des premières régions expérimentatrices. Les services sont d’ailleurs d’ores et déjà informés de l’extension programmée par le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Les projets éligibles sont limités aux opérations d’importance majeure. Enfin, l’extension du certificat de projet est circonscrite à l’Île-de-France.

Ces différentes précautions devraient pouvoir assurer le succès de l’élargissement de ces expérimentations sans générer de perturbations et de charges dirimantes pour les services.

Par ailleurs, la pérennisation des dispositifs d’autorisation unique ne devrait pas engendrer de perturbations et de charges supplémentaires pour les services compte tenu de l’extension du champ territorial des expérimentations intervenue en amont.

8. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes a été consulté.

9. Texte d’application et outre-mer

Les mesures relatives aux autorisations uniques sont applicables sur l’ensemble du territoire national ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon et Saint-Martin.

Article 28 : Mesures d’accélération des projets de construction et de modernisation du droit de l’environnement

Le Gouvernement s’est engagé dans un projet ambitieux de modernisation du droit de l’environnement dont l’objectif est que ce droit, tout en continuant à assurer un niveau élevé de protection de l’environnement, soit plus simple, plus lisible et plus efficace pour l’ensemble de ses utilisateurs. A cette fin, une feuille de route du Gouvernement pour la modernisation du droit de l’environnement a été adoptée qui prévoir la conduite de plusieurs actions dont certaines ont donné lieu à la mise en place de groupes de travail.

Cette démarche, qui participe à la politique de simplification engagée par le Gouvernement, s’accompagne d’une réflexion conduite à la demande du Premier ministre par Jean-Pierre Duport, Préfet honoraire, sur l’accélération des projets publics et privés en matière de logement, d’urbanisme et d’aménagement du territoire.

Le présent article a pour objet d’habiliter le Gouvernement à adopter par ordonnance les dispositions de nature législative permettant la mise en œuvre, d’une part, des mesures qui seront retenues à l’issue des travaux menés dans le cadre de la mission sur l’accélération des projets de construction confiée au Préfet Jean-Pierre Duport et, d’autre part, compte tenu du lien étroit existant entre cette mission et l’exercice de modernisation du droit de l’environnement, les propositions de certains groupes de travail mis en place dans ce cadre.

Article 28 : Habilitation

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (a du 1° du I)

« a) En réduisant les délais de délivrance des décisions prises sur les demandes d’autorisation d’urbanisme, notamment grâce à une diminution des délais d’intervention des autorisations, avis ou accords préalables relevant de législations distinctes du code de l’urbanisme ; ». 

1. Difficultés à résoudre

Le Président de la République a fixé au Gouvernement un objectif de délivrance des autorisations d'urbanisme dans un délai de 5 mois maximum, à compter du dépôt d'un dossier de demande complet.

Afin que cet objectif soit atteint, le Premier ministre a confié au Préfet honoraire Jean-Pierre Duport une mission visant à définir les réformes qui pourraient être conduites de manière à raccourcir les délais de délivrance des autorisations d'urbanisme.

Les premiers travaux de cette mission ont fait apparaître la nécessité de mesures de niveau législatif, concernant la réduction de certains délais attachés à des législations distinctes du code de l'urbanisme.

Délais d'instruction de base :

Les délais d’instruction de droit commun des demandes d'autorisation d'urbanisme sont d'ores et déjà inférieurs à 5 mois. Ces délais sont en effet fixés à 1 mois maximum pour les déclarations préalables, 2 mois maximum pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle et à 3 mois maximum pour les autres demandes autorisations. Le principe est que le silence gardé par l’autorité compétente à l’issue de ces délais d’instruction vaut acceptation. Les projets pouvant donner lieu à un refus tacite de permis sont limitativement énumérés par le code de l'urbanisme. Ces cas de silence valant rejet sont liés au fait que le permis vaut autorisation au titre d'une législation connexe ou est subordonné à la satisfaction de procédures ou formalités relevant également d'une législation connexe.

Délais maximum de délivrance des autorisations d'urbanisme (droit commun):

Type d'autorisation

Délai d'instruction

Déclaration préalable

1 mois

Permis de construire portant sur une maison individuelle

2 mois

Permis de démolir

2 mois

Permis de construire hors maisons individuelles

3 mois

Permis d'aménager

3 mois

Majorations, substitutions et prolongations de délais :

Les délais maximum d'instruction de droit commun peuvent toutefois être majorés de 1 ou 2 mois, ou bien être fixés à une durée allant de 3 mois à 1 an. Ces modifications de délai d'instruction sont notifiées au demandeur dans le mois qui suit le dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme. Les délais d'instruction peuvent également faire l'objet d'une prolongation exceptionnelle pour prendre en compte des obligations de procédure qui ne peuvent être connues dans le mois qui suit le dépôt de la demande.

L'ensemble de ces allongements de délais sont strictement encadrés dans la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Ils sont liés à l'application de législations connexes à l'application du droit des sols. La procédure d'autorisation d'urbanisme est en effet articulée avec d'autres procédures distinctes du code de l'urbanisme, de telle sorte que la délivrance de l'autorisation d'urbanisme ne peut pas intervenir avant la satisfaction de formalités préalables.

Tel est le cas, lorsque l'autorisation d'urbanisme tient lieu d'autorisation au titre d'un autre code que le code de l'urbanisme à condition que l'autorité compétente au titre de la législation connexe en cause ait donné son accord dans le délai d'instruction de la demande de permis ou de la déclaration préalable.

Il en va de même, lorsque la délivrance de l'autorisation d'urbanisme est subordonnée à un accord visant à la prise en compte de préoccupations ne relevant pas de l'occupation des sols.

Enfin, la délivrance de l'autorisation d'urbanisme est parfois différée dans l'attente de l'accord d'une autre autorisation indépendante du code de l'urbanisme.

2. Objectifs poursuivis

Afin que l'objectif précité de fixation des délais d'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme à 5 mois maximum puisse être atteint, le présent projet de loi prévoit d'habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance, pour diminuer en tant que de besoin les délais d'intervention de formalités préalables à l'arrêt de la décision d'urbanisme.

Certains de ces délais relèvent en effet de dispositions de rang législatif. Leur compression par un texte de niveau législatif constitue dès lors un préalable, à défaut duquel le Gouvernement ne pourra pas procéder par la suite à la diminution des délais d'instruction des demandes d'autorisations d'urbanisme concernées par décret en Conseil d'État.

3. Analyse d’impact des mesures envisagées

Les mesures envisagées permettraient d'accélérer la délivrance d'autorisation d'urbanisme, sans toutefois renoncer à la prise en compte de préoccupation attachées à des politiques publiques ne relevant pas de la législation sur l'occupation des sols.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures envisagées.

Article 28 : Habilitation

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (b du 1° du I)

« b) En définissant ou en modifiant les conditions d’articulation des autorisations d’urbanisme avec les autorisations, avis, accords ou formalités relevant de législations distinctes du code de l’urbanisme ». 

4. Difficultés à résoudre

La procédure de délivrance des autorisations d'urbanisme est articulée avec un certain nombre de législations distinctes du code de l'urbanisme, selon plusieurs modalités :

- l'autorisation d'urbanisme peut valoir autorisation au titre de la législation connexe, à condition que l'autorité compétente au titre de cette législation ait donné son accord sur le projet.

- la délivrance de l'autorisation d'urbanisme peut être subordonnée à un accord préalable d'une personne consultée sur la demande d'autorisation d'urbanisme.

- la délivrance de l'autorisation d'urbanisme peut être différée dans l'attente de l'accord d'une autorisation relevant d'une législation connexe à l'application du droit des sols (différé de délivrance).

- enfin, la mise en œuvre de l'autorisation d'urbanisme peut également être différée dans l'attente de la satisfaction d'une formalité relevant d'une législation connexe à l'application du droit des sols (différé de travaux).

Parfois, l'articulation consiste à la fois en un différé de délivrance de l'autorisation d'urbanisme et en un différé de travaux.

En outre, le projet peut être dispensé de formalité au titre du code de l'urbanisme, du fait que son contrôle est assuré par une autre autorisation ou une autre législation.

Tableau illustrant les différentes modalités d'articulation des autorisations d'urbanisme avec des formalités relevant de législations connexes :

Modalités d'articulation

Exemples de projets concernés

Autorisation d'urbanisme tient lieu d'autorisation au titre d'une législation distincte du code de l'urbanisme

Au titre du code du patrimoine :

Construction, démolition ou aménagement situé dans le champ de visibilité d'un monument historique

Construction, démolition ou aménagement situé dans une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine

Au titre du code de l'environnement :

Construction, démolition ou aménagement situé dans une réserve naturelle nationale

Construction, démolition ou aménagement situé dans un cœur de parc national

Au titre du code de la défense :

Construction à proximité d'un ouvrage militaire ou à l'intérieur d'un polygone d'isolement d'un établissement de conservation d'explosifs

Au titre du code de la construction et de l'habitation :

Construction d'un établissement recevant du public ou d'un immeuble de grande hauteur

Autorisation d'urbanisme subordonnée à un accord préalable

Démolition d'un bâtiment situé dans un site inscrit au titre du code l'environnement (accord de l'architecte des bâtiments de France)

Construction, démolition ou aménagement situé dans un site classé au titre du code de l'environnement ou en instance de classement (accord du préfet ou du ministre chargé des sites)

Différé de délivrance de l'autorisation d'urbanisme et/ou différé de travaux

Construction ou aménagement situé dans une zone de présomption de prescriptions archéologiques

(Différé de délivrance à la décision du préfet de région sur la fixation de prescriptions archéologiques et le cas échéant différé de travaux à la fin des fouilles)

Construction ou aménagement soumis à autorisation de défrichement au titre du code forestier

(différé de travaux à l'obtention de l'autorisation de défrichement)

Construction d'une installation classée pour la protection de l'environnement

(différé de travaux à la fin de l'enquête publique organisée au titre de l'autorisation ICPE ou différé de travaux à la date d'enregistrement de l'installation)

Dispense de formalité au titre du code de l'urbanisme, du fait d'un contrôle au titre d'une législation relevant d'un autre code

Dispositifs de publicité soumis à autorisation au titre du code de l'environnement

Affouillement ou exhaussement soumis à formalité au titre du code minier

Construction sur un immeuble classé monument historique

Par ailleurs, les autorisations d'urbanisme sont impactées par les expérimentations portant sur des autorisations uniques, lancées dans certaines régions et qui pourraient être généralisées à l'ensemble d’un territoire national :

- expérimentation d'une autorisation unique pour les installations classées au titre de la protection de l'environnement soumises à autorisation au titre du code de l'environnement (AU-ICPE) ;

- expérimentation d'une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activité soumises à autorisation au titre de la loi sur l'eau (AU-IOTA).

Tableau synthétisant les articulations des autorisations d'urbanisme avec les expérimentations Autorisation unique ICPE (AU-ICPE) et Autorisation unique IOTA (AU-IOTA) :

Expérimentation

Champ d'application géographique

Articulation

AU-ICPE

(éoliennes et unités de méthanisation relevant de la compétence du préfet au titre du code de l'urbanisme)

Basse-Normandie, Bretagne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais et Picardie

L'AU-ICPE vaut permis de construire

AU-ICPE (hors éoliennes et hors unités de méthanisation relevant de la compétence du préfet au titre du code de l'urbanisme)

Champagne-Ardenne, et Franche-Comté

Différé de travaux à la clôture de l'enquête publique organisée dans le cadre de l'instruction de la demande d'AU-ICPE

AU-IOTA

Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes

Différé de travaux à la délivrance de l' AU-IOTA

Au final, il reste néanmoins quelques procédures impactant la construction et l'aménagement, dépourvues de liens avec l'application du droit des sols (ex : déclaration au titre de la loi sur l'eau, autorisation au tire de la loi sur l'eau hors Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes ou dérogation à l'interdiction d'atteinte aux espèces protégées).

5. Objectifs poursuivis :

L'habilitation consiste à permettre au Gouvernement de légiférer par ordonnance, afin de créer des passerelles entre la procédure de délivrance des autorisations d'urbanisme et les formalités opposables aux projets d'aménagement et de construction, dans les cas où aucune articulation n'est prévue.

Elle vise également à améliorer en tant que de besoin les articulations d'ores et déjà prévues en l'état actuel du droit.

Les premiers travaux menés par le Préfet honoraire Jean-Pierre Duport, dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par le Premier ministre au titre de l'accélération de la réalisation des opérations de construction et d'aménagement, ont en effet mis en exergue des besoins de lisibilité accrue et de meilleure coordination, s'agissant de la conduite des diverses procédures auxquelles peut être soumis un même projet.

6. Analyse d’impact des mesures envisagées

L'articulation des procédures permet au demandeur d'avoir plus de visibilité quant au déroulement des différentes formalités auxquelles est soumis son projet.

La coordination des procédures permet en outre, le cas échéant, l'organisation d'une enquête publique unique au titre de plusieurs autorisations, ce qui constitue un gain de temps et d'argent.

Entre autres modalités d'articulation de la procédure d'application du droit des sols avec des procédures issues de législations distinctes du code de l'urbanisme, le différé de travaux permet au bénéficiaire de ne pas perdre de temps concernant la durée de validité de son autorisation d'urbanisme. Dans cas, le délai de validité de 2 ans à compter de l'acquisition ou de la notification de l'autorisation ne court en effet qu'à partir de la date à laquelle les travaux peuvent commencer. Dans l'attente de la délivrance de l'autorisation ou de la satisfaction de la formalité relevant de la législation connexe à l'application du droit des sols, l'autorisation d'urbanisme peut être accordée sans attendre, puis être purgée du délai de recours en annulation. Elle acquière alors un caractère définitif.

En l'état actuel du droit, lorsqu'aucune articulation n'est prévue, le bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme ne peut pas, dans les faits, la mettre en œuvre avant d'avoir obtenu toutes les autres autorisations nécessaires à la réalisation de l'aménagement ou de la construction. Concrètement, le bénéficiaire perd alors du temps au niveau de la durée de validité de son autorisation d'urbanisme. Cela peut conduire, dans des cas extrêmes, à l'obligation de redéposer une demande d'autorisation d'urbanisme pour un même projet. En revanche, en cas de différé des travaux, la durée de délai de validité du permis est acquise. Elle n'est pas affectée par le temps nécessaire à l'accord d'autres autorisations devant être obtenues pour que les travaux puissent commencer.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures envisagées.

Article 28 : Habilitation

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (c du 1° du I)

« c) En aménageant les pouvoirs du juge administratif lorsqu’il est saisi d’un recours contre une autorisation d’urbanisme ou le refus d’une telle autorisation ». 

7. Difficultés à résoudre

À la suite du rapport « Construction et droit au recours : pour un meilleur équilibre » remis au ministre chargé du logement par le Président Daniel Labetoulle, ont été adoptées plusieurs mesures visant à lutter contre les recours malveillants et fluidifier le traitement des contentieux dans le cadre de l’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 et du décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 relatifs au contentieux de l’urbanisme.

Au-delà de la question spécifique des recours manifestement malveillants, les délais du traitement des contentieux d’urbanisme (même ceux qui sont déposés de bonne foi et de façon parfaitement légitime) apparaissent comme de véritables freins à la construction. L’ordonnance du 18 juillet 2013 tente d’y remédier notamment en instituant un mécanisme de régularisation des permis en cours d'instance, à l'initiative du juge, dans le cadre d’un sursis à statuer sur l’annulation et en améliorant le mécanisme d’annulation partielle des permis prononcé par le juge, par une réécriture de l'article L.600-5 du code de l'urbanisme.

Toutefois, lors d’auditions menées dans le cadre de la mission confiée au préfet Duport, les opérateurs ont fait état de certaines manœuvres retardant la décision sur des dossiers déposés et respectant les prescriptions réglementaires. En particulier, est constatée l’apparition d’un urbanisme dit « négocié » où les prescriptions des documents d’urbanisme ne sont pas respectées tandis que des conditions ne figurant pas dans ces documents d’urbanisme sont imposées aux aménageurs.

8. Objectifs poursuivis

Afin d’encourager la réalisation de projets, la mission Duport propose de réfléchir à un aménagement des pouvoirs du juge administratif lorsqu’il est saisi d’un recours contre un refus d’autorisation d’urbanisme.

9. Analyse des impacts des dispositions envisagées

En l’état actuel du droit du contentieux administratif, il existe une tendance législative et jurisprudentielle importante visant à conférer au juge administratif un office de juge du plein contentieux objectif. Dans le cadre d’un tel office, le juge administratif dispose d’un pouvoir de réformation de la décision administrative, c’est-à-dire qu’il peut en modifier le contenu, sans être tenu par l’alternative binaire de l’office du juge de l’excès de pouvoir (rejeter la requête ou annuler la décision administrative). Le juge administratif ne se prononce toutefois dans ce cadre que sur la légalité de l’acte et non sur l’existence de droits subjectifs comme il le fait en matière de plein contentieux indemnitaire.

Les caractéristiques du contentieux de pleine juridiction sont connues :

- d’une part, il a pour effet d’accélérer les procédures administratives dès lors que la décision du juge se substitue à celle de l’administration et purge le litige ;

- d’autre part, pour les contentieux les plus lourds, il peut alourdir la phase contentieuse en créant une charge supplémentaire de travail pour le juge au niveau de l’instruction, susceptible comme tel, d’allonger les délais de jugement. Sauf le cas où l’autorité compétente est en situation de compétence liée, le juge peut substituer son appréciation à celle de l’administration alors que celle-ci est dans certains cas très étendue.

Le régime juridique qui s’attache à l’office du juge de plein contentieux est en réalité très éclaté et se prête mal à la systématisation (Botteghi et Lallet, Le plein contentieux et ses faux-semblants, AJDA, 2011, p. 156). A titre d’illustration, on peut retenir l’existence de deux particularités procédurales s’attachant au plein contentieux, l’une, tenant à l’obligation du ministère d’avocat, l’autre, tenant à l’obligation pour le juge d’apprécier les mérites de la demande au jour où il statue et non à la date de l’édiction de la décision administrative attaquée.

S’agissant de l’obligation du ministère d’avocat, celle-ci n’est pas rédhibitoire car le pouvoir réglementaire peut librement prévoir des exceptions à l’obligation faite au requérant d’être représenté par un avocat (article R. 431-3 du code de justice administrative).

Pour l’obligation au juge d’examiner la demande au jour où il statue s’agissant des règles de fond, elle apparait être porteuse d’efficacité car elle permet au juge de réformer directement la décision à l’aune du droit positif sans attendre que l’administration ne statue, par la suite, au regard des nouvelles règles.

En outre, lorsque le juge est saisi d’un recours pour excès de pouvoir, il est tenu, sauf moyen d’ordre public, par les moyens soulevés dans la requête. Or s’il délivre un permis à la place de l’administration, il devra s’assurer qu’un autre motif, même non invoqué dans la décision de rejet, serait à même d’entrainer un refus de permis de construire. Il en résulte pour le juge un travail beaucoup plus intense et plus long d’instruction. Il pourrait être pénalisant au regard de l’objectif de la réforme que le juge administratif ait à procéder à des procédures d’instructions lourdes, voire à des expertises, pour substituer son appréciation à celle de l’administration. Par ailleurs, pour que le juge délivre par son jugement un permis modificatif ou une autorisation de construire, il devra être en possession de l’entier dossier et examiner l’ensemble de la légalité de la décision.

Article 28 : Habilitation

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (d du 1° du I)

« d) En définissant les conditions dans lesquelles, en cas d’annulation du refus de délivrance d’une autorisation d’urbanisme, le représentant de l’État se substitue à l’autorité compétente pour délivrer cette autorisation ». 

10. Difficulté à résoudre

Les décisions d’occuper ou d’utiliser le sol sont des actes administratifs pris par l’autorité publique compétente (État ou commune) et sous la forme juridique d’un arrêté. La délivrance de l’autorisation est un droit pour le demandeur, dès lors que le projet respecte les dispositions légales ou réglementaires applicables en matière d’urbanisme.

Toutefois, lors d’auditions menées dans le cadre de la mission confiée au préfet Duport, les opérateurs ont fait état de certaines manœuvres retardant la décision sur des dossiers déposés et respectant les prescriptions réglementaires. En particulier, est constatée l’apparition d’un urbanisme dit « négocié » où les prescriptions des documents d’urbanisme ne sont pas respectées tandis que des conditions ne figurant pas dans ces documents d’urbanisme sont imposées aux aménageurs.

11. Objectifs poursuivis

Le préfet Duport, dans le cadre de sa mission, propose de réfléchir à l’hypothèse d’une substitution du maire par le représentant de l’État en cas d’annulation d’un refus d’autorisation d’urbanisme, sur le modèle et avec les garanties des procédures de ce type déjà prévues par la loi.

12. Analyse des impacts des dispositions envisagées

De telles dispositions ont déjà été adoptées dans des cas de défaillance des collectivités locales, notamment lorsqu’il est constaté qu’une commune n’a pas atteint son objectif de rattrapage de logements sociaux alors que le contexte communal ne le justifie pas. Le cas échéant, il appartient au préfet de prononcer la carence de cette commune par arrêté motivé conformément à l’article L.302-9-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH).

La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014 a introduit plusieurs évolutions destinées à sécuriser les opérations de production de logements dans ces communes dites « carencées ». Son article 151 a ainsi modifié les articles L.422-2 du code l’urbanisme et L.302-9-1 du CCH afin de confier au préfet la délivrance des autorisations d’utilisation et d’occupation du sol pour des constructions à usage de logements en communes carencées. La compétence du préfet pour la délivrance des autorisations d’utilisation et d’occupation du sol en communes carencées est limitée aux seules constructions à usage de logements. Elle demeure conditionnée à l’identification des secteurs concernés, dans l'arrêté préfectoral de mise en état de carence (Art L.302-9-1 du CCH).

En s’inspirant de ce modèle, la mission Duport s’attachera à étudier les conditions dans lesquelles cette substitution du maire par le préfet est réalisable, en définissant notamment les critères permettant de motiver l’atteinte portée à la libre administration des collectivités territoriales. À cet égard, la présente habilitation est étroitement liée à la précédente liée à l’aménagement des pouvoirs du juge administratif. En effet, la mission Duport estime qu'il est possible de conférer un pouvoir de réformation au juge administratif saisi d’un recours contre un refus d’autorisation d’urbanisme afin que ce dernier puisse renvoyer au représentant de l’État le soin de délivrer l’autorisation demandée.

Article 28 : Habilitation

Accélérer les projets de construction et d’aménagement (e du1° du I)

« e) En supprimant la procédure d’autorisation des unités touristiques nouvelles prévue par l’article L.145-11 du code de l’urbanisme et en prévoyant les modalités suivant lesquelles les unités touristiques nouvelles sont prévues et contrôlées dans le cadre des documents d’urbanisme ou des autorisations mentionnées au livre IV de ce code ». 

13. Difficultés à résoudre

Parallèlement aux différentes procédures de planification urbaine, d’opérations d’aménagement et d’autorisations d’urbanisme, a été mise en place dans le code de l’urbanisme, par la loi « développement et protection de la montagne » de 1985, une procédure complémentaire visant à assurer un contrôle préalable par l’État des « unités touristiques nouvelles », applicable uniquement dans les zones de montagne.

13.1. Le régime applicable aux projets d’unités touristiques nouvelles

L’unité touristique nouvelle (UTN) est définie par l’article L.145-9 du code de l’urbanisme (CU) comme toute opération de développement touristique, en zone de montagne, ayant pour objet, en une ou plusieurs tranches, soit de construire des surfaces destinées à l’hébergement touristique ou de créer un équipement touristique comprenant des surfaces de plancher, soit de créer des remontées mécaniques, soit de réaliser des aménagements touristiques ne comprenant pas de surface de plancher dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.

Les dispositions relatives au contrôle des « unités touristiques nouvelles » s’appliquent actuellement dans l’ensemble des communes ou parties de communes classées en zones de montagne, pour des raisons essentiellement économiques, et situées dans une quarantaine de départements métropolitains.

La procédure d’autorisation des UTN n’est pas applicable aux projets prévus sur les territoires couverts par un schéma de cohérence territoriale (art. L. 145-11 du CU). Dans ce cas, les projets d’UTN sont prévus dans le schéma de cohérence territoriale (SCOT) et intégrés à sa procédure d’élaboration ou d’évolution. La volonté du législateur est de favoriser une réflexion préalable sur la montagne, en particulier au travers des SCOT ou des plans locaux d’urbanisme.

La procédure d’autorisation des UTN s’applique sur les territoires non couverts par un SCOT. Dans ce cas, la création et l’extension d’UTN sont soumises à une autorisation préfectorale qui doit être demandée par la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de PLU. Cette autorisation valable quatre ans renouvelables est préalable à la délivrance des autorisations d’urbanisme, telles que le permis de construire ou d’aménager ou l’autorisation des remontées mécaniques, qui ne peuvent être délivrées que sur des territoires couverts par un plan local d’urbanisme ou une carte communale.

Sont soumis à l’autorisation du préfet coordonnateur de massif, après avis du comité de massif, les projets d’UTN les plus importants ayant pour objet :

soit la création, l’extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsque ces travaux ont pour effet la création d’un nouveau domaine skiable alpin, ou l’augmentation de la superficie totale d’un domaine skiable alpin existant, lorsque cette augmentation est supérieure ou égale à 100 hectares (ha),

soit des opérations de construction ou d’extension d’hébergements et d’équipements touristiques d’une surface de plancher totale supérieure à 12 000 m², à l’exclusion des logements à destination des personnels saisonniers ou permanents des équipements et hébergements touristiques,

soit lorsqu’ils sont soumis à étude d’impact en application du code de l’environnement, l’aménagement, la création et l’extension de terrains de golf, l’aménagement de terrains de camping, l’aménagement de terrains pour la pratique de sports ou de loisirs motorisés, ou les travaux d’aménagement de pistes pour la pratique des sports d’hiver alpins, situés en site vierge au sens du tableau annexé à l’article R.122-2 du code de l’environnement d’une superficie supérieure à 4 hectares (art. R. 145-2 du CU).

Sont soumis à l’autorisation du préfet de département, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, les projets d’UTN ayant pour objet essentiellement :

la création, l’extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsqu’ils ont pour effet soit l’augmentation de plus de 10 ha et de moins de 100 ha d’un domaine skiable alpin existant, soit la création d’une remontée mécanique n’ayant pas pour objet principal de desservir un domaine skiable et pouvant transporter plus de dix mille voyageurs par jour sur un dénivelé supérieur à 300 m ;

certaines opérations, « lorsqu’elles ne sont pas situées dans un secteur urbanisé ou dans un secteur constructible situé en continuité de l’urbanisation », à savoir la création ou l’extension, sur une surface de plancher totale supérieure à 300 m², d’hébergements ou d’équipements touristiques, l’aménagement de terrains de camping comprenant plus de 20 emplacements, ou la création de refuges de montagne, ou leur extension sur une surface de plancher totale supérieure à 100 m² (art. R. 145-3 du CU).

13.2. La procédure d’autorisation des UTN

Le contrôle des projets touristiques en montagne apparaît désormais trop lourd et complexe et la procédure d’autorisation des UTN apparaît comme un échelon supplémentaire d’autorisation, par rapport aux autres procédures applicables de permis de construire ou de permis d’aménager, et désormais inadapté dans le contexte actuel.

Le champ d’application de la procédure d’autorisation UTN est aujourd’hui étendu (cf. articles
R. 145-2 et R. 145-3 du CU). Il s’applique à certains projets pour lesquels les procédures d’urbanisme de droit commun paraissent suffisantes. La plupart des hébergements hôteliers sont aujourd’hui réalisés en dehors de la procédure UTN, car situés en dessous des seuils d’autorisation au titre des UTN. A contrario, des projets de moindre importance, tels que certaines remontées mécaniques ou de petits terrains de camping, font encore l’objet d’un contrôle de l’État au titre des UTN, alors qu’ils sont soumis par ailleurs à une autorisation de remontées mécaniques (également lourde puisque portant à la fois sur les aspects techniques et sur l’urbanisme), un permis de construire ou un permis d’aménager.

Au total, la soumission à une autorisation préfectorale complexe de projets de moins en moins importants aboutit à créer des doublons de procédures inutiles et est source de litiges ou contentieux.

13.3. Cette procédure est inadaptée aux enjeux et réalités actuels des territoires de montagne

Cette procédure d’autorisation spéciale a été mise en place dans un contexte où l’essor économique entraînait la création rapide de nombreuses stations de montagne et de grands équipements hôteliers dont le développement était encore peu encadré par la politique d’aménagement du territoire et les documents de planification urbaine. Elle a ainsi permis, depuis les années 1980, la réalisation d’un contrôle par l’État des équipements touristiques en montagne, afin d’éviter un suréquipement de certaines collectivités et de l’espace montagnard.

L’évolution économique en particulier a conduit à une diminution rapide et constante du nombre et de l’importance de ces projets d’équipements touristiques depuis une quinzaine d’années. A cet égard, le rapport d’audit du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGDD) sur l’application des dispositions d’urbanisme de la loi montagne remis à la Ministre du logement en octobre 2013 relève que les autorisations UTN sont de moins en moins nombreuses (à l’exception des départements savoyards qui disposent de stations de sport d’hiver dynamiques) et aléatoires, car désormais inadaptées aux réalités et enjeux actuels des territoires de montagne.

Ce rapport insiste sur la nécessité pour l’État d’appuyer et accompagner les collectivités territoriales dans la réhabilitation des sites touristiques dégradés et des parcs immobiliers inadaptés à la demande actuelle, et afin de les rendre plus respectueux des enjeux de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers.

14. Objectifs poursuivis et dispositif prévu

Le Gouvernement souscrit à la recommandation de la mission d’audit du CGDD de « revoir et simplifier la procédure en prenant en compte l’ensemble des autres procédures obligatoires » et à celle de procéder à « l’adaptation de la procédure des UTN au contexte économique actuel et aux situations particulières des massifs en liaison avec tous les partenaires de l’État ».

Par ailleurs, depuis la loi montagne de 1985 les différentes procédures permettant d’assurer la protection des secteurs de montagne ont été notablement développées, notamment dans le cadre des documents de planification urbaine (SCOT, PLU ou cartes communales) et de protection de l’environnement, tels que les chartes des parcs naturels ou les réserves naturelles, de sorte qu’il paraît désormais possible à la fois de simplifier les procédures existantes et d’alléger le contrôle préalable par l’État des projets d’équipements touristiques.

De plus, la procédure d’autorisation des UTN permet la réalisation de projets non conformes à certaines règles d’urbanisme, telles que les dispositions prévues au III de l’article L. 145-3 du CU relatives à la construction en continuité de l’urbanisation existante (cf. art. L.145-10 du même code) et se trouve désormais en contradiction avec les objectifs de densification urbaine et de lutte contre l’artificialisation des sols développés en particulier par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR).

La procédure spécifique d’autorisation des « unités touristiques nouvelles » prévue par l’article L. 145-11 du CU pourrait être supprimée. La réalisation des unités touristiques nouvelles continuerait cependant à faire l’objet d’un contrôle dans le cadre des documents de planification urbaine ou des autorisations prévues par ce code.

Deux cas de figure se présentant, les modalités de contrôle des UTN diffèreraient selon que le territoire concerné est couvert ou non par un document d’urbanisme applicable :

1) lorsque le projet se situe sur un territoire couvert par un plan local d’urbanisme, il pourrait être envisagé de supprimer l’autorisation des UTN et de prévoir un dispositif identique à celui existant pour les SCOT : inscription des projets d’UTN dans les PLU ou les documents en tenant lieu, après avis du comité de massif pour les projets les plus importants ou de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites pour les autres projets ;

2) lorsque le projet se situe sur un territoire couvert par une carte communale ou n’est pas couvert par un document d’urbanisme (où s’appliquent notamment les règles nationales d’urbanisme), il pourrait être envisagé de supprimer l’autorisation des UTN et de prévoir, dans le cadre de l’instruction du permis de construire ou du permis d’aménager, un avis conforme du préfet de massif après avis du comité de massif pour les projets les plus importants ou du préfet de département après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites pour les autres projets.

Un réexamen des seuils ou critères des UTN pourrait être effectué à cette occasion.

Ces propositions répondraient aux besoins actuels de simplification administrative et d’accélération des procédures d’autorisations d’urbanisme. Le développement relativement rapide des procédures de planification urbaine en zone de montagne devrait permettre d’assurer un encadrement satisfaisant de l’aménagement des territoires concernés dans le respect de l’environnement et répondre aux besoins adaptés aux circonstances locales.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

15. Analyse des impacts des dispositions envisagées

À la demande du ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité (DHUP), un rapport a été réalisé par le CEREMA relatif au diagnostic de la procédure UTN (septembre 2014).

Les principales informations qui en ressortent sont les suivantes.

a/ Données quantitatives relatives aux autorisations UTN instruites (dites « de massif » ou « départementales » selon qu’elles relèvent du préfet de massif ou de département)

Pour les UTN « de massif » :

Selon les données de ATOUT France, pour l’ensemble des massifs de France métropolitaine, 34 UTN de massif ont été instruites (hors SCOT) sur la période 2007-2014, soit une moyenne de 4-5 UTN par an.

NB d’instructions UTN par massif sur la période 2007-2014

Répartition par département

28 dans les Alpes

(20 pour la partie nord et 8 pour la partie sud)

16 en Savoie ;

3 en Haute-Savoie ;

1 en Isère ;

5 dans les Hautes-Alpes ;

2 dans les Alpes-Maritimes (dont 1 golf) ;

1 dans le Var (golf)

4 dans les Pyrénées

2 dans les Hautes-Pyrénées ;

1 en Ariège ;

1 dans les Pyrénées-Atlantiques

2 dans le Massif Central

2 dans l’Aude (même opération).

L’évolution des UTN de massif est la suivante sur la période 2007-2014 (les creux peuvent être dus aux années d’élections) :

Cette évolution se répartit comme suit selon les massifs.

A noter qu’aucune UTN de massif instruite durant la période 2007-2014 n’est localisée dans les massifs des Vosges, du Jura ou en Corse.

Sur les 34 UTN de massif instruites,

- 3 seulement portent sur l’aménagement de domaines skiables, dont 2 relèvent en réalité du niveau départemental,

- 6 portent sur des aménagements autres que les domaines skiables

2 sur des circuits de loisirs motorisés (en Savoie)

4 sur des golfs 18 trous (dont 2 pour la même opération)

- aucune ne porte sur des opérations de campings ;

- le reste des opérations (soit 24, 72 %) portent sur des opérations avec création de surfaces de plancher (SP) (hébergement et/ou équipement touristiques).

La plupart des opérations comportent une partie hébergements et une partie équipements touristiques ;

La consistance de ces opérations est très variable : on trouve ainsi des opérations de +12 000 m² SP à 60 000 m² SP ;

Les équipements touristiques sont des équipements culturels et ludiques, de balnéo, aqua-ludiques et bien-être, fitness, salles de séminaires, restauration ...

Sur l’ensemble des 34 demandes d’autorisation, 4 ont fait l’objet d’un refus : 1 aire de loisirs motorisées, 2 opérations d’hébergements, 1 golf.

Pour les UTN « départementales » :

Les informations recueillies étant parcellaires, les résultats ne sont pas donnés à l’échelle nationale, mais par périmètre concerné.

- pour la région Rhône-Alpes :

Selon les informations fournies par la DREAL Rhône-Alpes, 24 UTN départementales ont fait l’objet d’une demande d’autorisation au préfet de département sur la période 2007-2014. Ces 24 UTN portent :

pour 14 d’entre elles, sur des opérations concernant des refuges (Restructurations-extensions de l’ordre de 200 m² SP. Reconstructions, de l’ordre de 500 à 1000 m² SP environ) ;

pour 7 d’entre elles, sur des opérations d’hébergement (hôtels principalement, par exemple de l’ordre de 6 000 m² SP, ou plus, 11 850 m² SP) ;

les 3 restantes, sur des restaurants d’altitude (de l’ordre de 2 000 m² SP) et sur un parc de loisirs.

Evolution des UTN départementales en Rhône-Alpes

Plus de la moitié des opérations portent sur des refuges. Ceci est lié à la politique spécifique des Conseils Généraux (Savoie en particulier) pour la rénovation des refuges en 2011.

- pour le massif des Pyrénées

Au 20 février 2014, le massif des Pyrénées recensait 5 demandes d’autorisation pour des UTN départementales, déposées depuis 2007. Ces 5 demandes concernent seulement 3 départements (2 en Ariège, 1 dans les Pyrénées Atlantiques, 2 dans les Hautes-Pyrénées).

Sur ces 5 demandes :

• une demande datant de 2010 (création d’un refuge de 355 m²) avait été retirée avant la tenue de la réunion de la formation spécialisée de la commission (CDNPS) chargée de donner un avis ;

• une demande (concernant la construction d’un refuge) était en cours d’instruction à la date du recensement ;

• 3 demandes avaient fait l’objet d’une autorisation :

o une demande en 2008 portant sur la construction d’un bar-restaurant de 1000 m² (opération réalisée) ;

o une demande en 2010 portant sur la création d’un refuge de 50 couchages dans le cadre d’un projet transfrontalier (travaux non débutés, la décision ayant fait l’objet d’un recours contentieux),

o une demande en 2013 portant sur l’extension d’un refuge de 175 à 500 m² (en cours de montage financier).

À noter que sur ces 5 demandes d’autorisation, 4 concernent un refuge (en raison notamment du seuil d’autorisation de 100 m²).

Pour les autres départements enquêtés :

Ø 1 UTN départementale dans les Hautes-Alpes pour un restaurant d’altitude

Ø Pour le Cantal, 3 UTN départementales entre 2007 et 2011.

Il convient d’observer qu’un certain nombre de projets sont conçus de façon à ne pas entrer dans les seuils de soumission à l’autorisation UTN et font seulement l’objet en pratique d’un permis de construire ou d’un permis d’aménager.

b/ La procédure d’autorisation UTN apparaît complexe, lourde et longue, particulièrement dans les massifs, régions et départements (et pour les commissariats, DREAL et DDT) dans lesquels elle est rarement mise en œuvre. C’est le cas des territoires ruraux, mais également de ceux où l’investissement est ralenti avec des projets qui n’aboutissent pas, comme dans les Pyrénées depuis plusieurs années.

Par ailleurs, la procédure d’autorisation des UTN mobilise un certain nombre d’acteurs sur une période de plusieurs années. Selon les textes, interviennent dans la procédure :

• la collectivité pétitionnaire (la ou les communes ou l'EPCI compétent en matière de PLU sur le territoire desquels s'étend l'emprise du projet),

• et selon le régime de l’UTN,

o le préfet coordonnateur de massif, ainsi que la commission spécialisée du comité de massif,

o ou le représentant de l'État dans le département, ainsi que la formation spécialisée de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et des sites,

• ainsi que le public, consulté dans le cadre d’une mise à disposition de la demande d’autorisation de l’UTN.

Dans plusieurs départements, la DDT, ATOUT France, ainsi que la DREAL et les autres services de l’État concernés (RTM, DDFP, sous-préfectures ...), sont associés étroitement en amont par la collectivité pétitionnaire à l’élaboration du projet et du dossier UTN, avec le bureau d’études chargés d’élaborer ce dossier et le cas échéant, le porteur de projet privé.

C’est généralement la collectivité pétitionnaire ou le bureau d’études qui sollicitent les services pour cette phase amont.

Quel que soit le niveau de la procédure, la DDT instruit les demandes d’autorisation pour le compte de l’État : elle coordonne les avis des différents services et en fait la synthèse. Elle met à disposition du public les projets UTN et fait la synthèse des observations émises par le public. En commission UTN, elle précise les résultats de cette mise à disposition et l’avis de l’État.

16. Mesures de mise en œuvre et d'application envisagées

Outre la traduction de la mesure par une ordonnance relative à la simplification des dispositions législatives relatives aux procédures applicables aux UTN, un décret d’application modifiant les dispositions réglementaires correspondantes du code de l’urbanisme sera nécessaire (décret en Conseil d’État).

17. Conditions d’application outre-mer

Les dispositions du code de l’urbanisme relatives aux unités touristiques nouvelles ne sont pas applicables aux départements d’outre-mer comportant des zones de montagne, en application de l’article 98 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Elles ne sont pas non plus applicables aux autres collectivités d’outre-mer compte tenu du principe de spécialité législative.

Article 28 : Habilitation

Modifier les règles applicables à l’évaluation environnementale des plans, programmes et projets (2° du I) 

1. Description des difficultés à résoudre :

1.1. Diagnostic portant sur l’évaluation environnementale vis-à-vis du droit européen de l’environnement

1.1.1. Les plans et programmes

La directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, dite « plans et programmes », impose que certains plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient soumis à une évaluation environnementale. Cette évaluation permet notamment d’intégrer les considérations environnementales dans l’élaboration et l’adoption de ces plans et programmes.

Pour ce qui concerne le champ d’application de cette directive, le décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement et le décret n° 2012-995 du 23 août 2012 relatif à l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme ont complété le dispositif en vigueur, notamment en introduisant un examen au cas par cas applicable à différents types de document de planification.

S’agissant de l’autorité environnementale, dans la situation actuelle, ont été désignés les préfets de département, de région ou de bassin pour les plans et programmes à caractère local (SCoT, PLU, PDU, SRADT, SDAGE, etc.) et la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGDD) pour les plans et programmes à caractère national.

La France fait aujourd’hui face à un pré-contentieux de transposition de la directive 2001/42/CE. La mise en demeure adressée aux autorités françaises en janvier 2013 pointe notamment le caractère incomplet de la liste des plans et programmes soumis à évaluation environnementale stratégique au regard du champ d’application de cette directive et met en exergue la confusion entre l’autorité chargée d’élaborer ou d’approuver certains plans (a priori hors documents d’urbanisme) et celle devant formuler un avis au titre de ses compétences d’autorité environnementale.

1.1.2. Les plans et programmes

La directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement (dite directive « EIE », pour « évaluation des incidences sur l'environnement ») codifiée sous le n° 2011/92/UE, conditionne l'autorisation de certains projets susceptibles d’impacts notables sur l'environnement à une évaluation de leurs incidences.

Une réforme des études d’impact environnemental a été conduite en 2010-2011 pour permettre le classement par la Commission européenne d’une procédure d’infraction relative à la transposition de la directive 85/337/CEE. Cette réforme a notamment introduit un examen au cas par cas qui permet, pour les projets visés par l’annexe II à cette directive, après décision de l’autorité environnementale, d’exempter d’étude d’impact les projets n’ayant pas une incidence notable sur l’environnement. L’introduction de l’examen au cas par cas a réduit la charge réglementaire, en permettant une approche plus concrète des effets potentiels induits et en ne soumettant que les projets qui le nécessitent vraiment à une étude d’impact.

L'autorité environnementale est, soit le ministre chargé de l'environnement pour les projets relevant du niveau national, soit la formation d’autorité environnementale du CGEDD pour les projets donnant lieu à une décision du ministre chargé de l’environnement ou à un décret pris sur son rapport ainsi que pour les projets qui sont élaborés par les services dans les domaines relevant des attributions du même ministre ou sous la maîtrise d’ouvrage d’établissements publics relevant de sa tutelle, soit le préfet de région pour les autres projets.

Des demandes d’information ou des interrogations de la Commission européenne font craindre un nouveau contentieux sur la transposition actuelle. La Commission s’interroge sur la soustraction d’office de projets figurant à l’annexe II de la directive par le biais des critères et seuils fixés en droit national. Cette restriction du champ matériel serait aggravée par l’absence d’une « clause filet » et la France outrepasserait, selon la Commission, sa marge d’appréciation pour transposer cette annexe.

En outre, une nouvelle directive (2014/52/UE) modifiant la directive 2011/92/UE a été adoptée en 2014. Le délai laissé aux Etats membres pour la transposer expire le 16 mai 2017.

1.1.3. Données chiffrées

D’après les rapports des autorités environnementales locales et nationales, ont été rendus par les autorités environnementales en 2013 :

• 472 décisions de cas par cas sur des documents d’urbanisme (PLU et cartes communales) ;

• 458 décisions de cas par cas sur d’autres plans et programmes ;

• 900 avis d’autorité environnementale sur des documents d’urbanisme ayant fait l’objet d’une évaluation environnementale stratégique ;

• 116 avis d’autorité environnementale sur d’autres plans et programmes.

Sur les documents d’urbanisme, le taux de soumission (obligation de conduire une évaluation environnementale stratégique) est de 9 % et aucune décision n’a été rendue de manière tacite. Sur les autres plans et programmes, 7 % des décisions conduisent à réaliser une évaluation environnementale (0,4 % de décisions tacites).

En 2013, ont été rendus par les autorités environnementales :

• 4954 décisions de « cas par cas » sur des projets dont 24 % sur des projets d’urbanisme. Parmi ces 1162 décisions rendues par les autorités environnementales locales, 41 % concernent des ZAC ou lotissements, 35 % des permis de construire et 23 % des projets de tourisme et loisir.

• 2371 avis d’autorité environnementale sur des projets ayant fait l’objet d’une étude d’impact. 24,5 % des avis des autorités environnementales locales concernent des projets relevant du champ de l’urbanisme, répartis de la manière suivante : 72 % de ZAC et lotissements, 19 % de permis de construire et 9 % de projets de tourisme et loisir.

S’agissant des décisions de cas par cas sur les projets, 9 % sont des décisions de soumission à étude d’impact (0,7 % tacites). Le taux d’avis sans observation émis par les autorités environnementales locales est de 17 %.

1.2. Diagnostic portant sur l’évaluation environnementale vis-à-vis du droit européen de l’environnement

1.2.1. La modernisation du droit de l’environnement

Conformément à la feuille de route du Gouvernement pour la modernisation du droit de l’environnement, un groupe de travail dont la présidence a été confiée à M. Jacques Vernier a pour mission de « clarifier et simplifier la mise en œuvre du régime des études d’impact, notamment pour celles qui relèvent de la catégorie dite du cas par cas, sur la base des retours d’expérience » et « d’améliorer l’organisation et l’indépendance de l’autorité environnementale, par une meilleure adéquation entre les enjeux des projets, le mode d’organisation et la dévolution des compétences d’autorité environnementale ».

Les enjeux sont donc de deux ordres : contribuer à l’impératif de simplification et améliorer la conformité du droit interne au droit de l’Union européenne (plans, programmes, projets) et préparer la transposition de la nouvelle directive 2014/52/UE sur les études d’impact.

Après deux années de mise en œuvre des différentes réformes relatives à l’évaluation environnementale et aux études d’impact entrées en vigueur en 2012, des voies de simplification des procédures ont en effet été identifiées et pourraient être mises en œuvre sans nuire à la protection de l’environnement (principe de non-régression). Il est ainsi possible d’améliorer la transposition du champ d’application des deux directives précitées afin d’éviter la sur-transposition comme la sous-transposition.

Des améliorations au dispositif des autorités environnementales (séparation fonctionnelle et autonomie) doivent également être mises en œuvre pour mettre un terme au précontentieux initié par la Commission européenne sur cette question et garantir l’impartialité des avis et décisions qu’elles rendent.

1.2.2. La mission de simplification confiée au préfet Duport

Dans le cadre de la mission sur l’accélération des projets de construction confiée au Préfet Jean-Pierre Duport, le Premier ministre lui a notamment demandé de définir les réformes qui pourraient être conduites de manière à clarifier et simplifier le régime des études d’impact, dans le respect du droit européen. Les premiers travaux ont fait apparaître, dans le domaine de l’urbanisme, la nécessité de mesures de niveau législatif, concernant la mise en place de procédures coordonnées permettant d’assurer une meilleure articulation entre l’évaluation environnementale stratégique du plan ou programme et celle du projet et l’évaluation des incidences sur l’environnement de projets différents.

En effet, l’état du droit actuel est marqué par des procédures parfois lourdes et complexes, et une redondance de l’analyse des incidences environnementales sur l’ensemble de la chaîne de l’aménagement et de l’urbanisme opérationnels.

S’agissant de l’articulation entre l’évaluation environnementale stratégique du document d'urbanisme et l’étude d'impact d’un projet :

La modification d’un document d’urbanisme pour permettre la réalisation d’un projet soumis à étude d’impact implique aujourd’hui, lorsque la procédure d’évolution du document d’urbanisme fait l’objet d’une évaluation environnementale stratégique, la mise en oeuvre de deux procédures différentes, avec la saisine de d'autorités environnementales distinctes. A titre d’exemple, dans le cas d’une mise en compatibilité d’un ScoT ou d’un PLU avec un projet soumis à étude d’impact et faisant l’objet d’une déclaration d’utilité publique (DUP) ou, si celle-ci n’est pas requise, d’une déclaration de projet, le préfet de département est saisi, en tant qu’autorité environnementale, sur l’évaluation environnementale stratégique de la mise en compatibilité du ScoT ou du PLU et une autre autorité environnementale (souvent le préfet de région) sur l’étude d’impact du projet. Des évolutions nécessiteraient d’être apportées afin de lever ces redondances inutiles, et d’améliorer la lisibilité et l’efficacité globale du dispositif actuel, avec la mise en place d’une procédure unique.

De plus, cette situation conduit à des redondances d’analyse des incidences environnementales puisque le projet fait l’objet d’une étude d’impact et la procédure d’évolution du document d’urbanisme, lorsqu’elle entre dans le champ d’application de l’évaluation environnementale stratégique défini aux articles R.121-14 et R.121-16 du code de l’urbanisme, fait également l’objet d’une évaluation environnementale.

Par ailleurs, le droit actuel (rubrique 34° du tableau annexé à l’article R.122-2 du code de l’environnement) prévoit que les ZAC et les permis d’aménager font l’objet d’une étude d’impact lorsqu’ils sont situés dans une commune non dotée d’un document d’urbanisme ou dans une commune dotée d’un PLU, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation environnementale permettant l’opération. Or, cette formule « permettant l’opération » donne lieu à des interprétations distinctes, ce qui est source d’insécurité juridique pour les acteurs.  De plus, cette rubrique 34° n’est pas en cohérence avec la rubrique 36° du même tableau, rubrique plus claire et plus lisible car ne comportant pas la formule « permettant l’opération », qui exonère d’étude d’impact les travaux ou constructions soumis à permis de construire dès lors que la communes est couverte par un document d’urbanisme ayant fait l’objet d’une évaluation environnementale. Il convient donc de clarifier l’état du droit, tout en le simplifiant, afin d’éviter toute redondance.

S’agissant de l’articulation entre les évaluations environnementales de projets différents (articulation entre une opération d’aménagement d’ensemble et les projets mis en œuvre à l’intérieur de cette opération) :

Le droit actuel (rubrique 36° du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement) soumet à étude d’impact les travaux ou construction soumis à permis de construire au-dessus de certains seuils, dans les communes couvertes par un document d’urbanisme n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation environnementale. Lorsque ces projets sont situés dans le périmètre d’une opération d’aménagement d’ensemble (ZAC ou lotissements), l’étude d’impact de ces projets peut être inutilement redondante, dès lors que des conditions à définir par ordonnance sont respectées.

Il convient donc d’améliorer l’efficacité globale du système actuel, à la fois concernant les opérations d’aménagement d’ensemble, et concernant l’articulation entre ces opérations et les projets mis en œuvre à l’intérieur de ces opérations, dans le prolongement de certaines évolutions déjà apportées. Ainsi, s’agissant spécifiquement des ZAC, la réforme des études d’impact a pu permettre de réduire certaines exigences, puisque désormais, les ZAC sont soumises, en fonction de seuils, soit à un examen au cas par cas, soit à une étude d’impact.

2. Objectifs poursuivis et dispositif prévu

L’habilitation sollicitée vise donc à concrétiser à la fois les propositions que le préfet Duport formulera et celles du groupe de travail dirigé par Jacques Vernier vis-à-vis des évaluations environnementales.

L’objectif commun de ces travaux conduits en parallèle consiste à opérer des simplifications dans le double respect du principe de non-régression et du respect du droit de l’Union européenne.

a) S’agissant de l’évaluation environnementale en général :

L’ordonnance devra permettre, outre de contribuer à l’impératif de simplification, d’améliorer la conformité du droit interne au droit de l’Union européenne (plans, programmes, projets) en prévoyant des mesures de nature à répondre aux griefs exprimés dans la demande d'information de la Commission pour transposition incomplète et incorrecte de la directive 2011/92/UE et de préparer la transposition de la nouvelle directive 2014/52/UE sur les études d’impact.

S’agissant des plans, une définition appropriée du champ d’application de la directive « plans et programmes » sera établie afin de permettre l’extinction de la procédure d’infraction initiée par la Commission européenne.

Afin d’améliorer la transposition du champ d’application de la directive relative aux études d’impact des projets, une approche par projet et non plus par autorisation pourrait être développée. Par exemple, le dispositif en vigueur amène, dans certaines situations, à des études, formalités et consultations redondantes du fait que le champ d’application de l’étude d’impact est défini par l’autorisation nécessaire et non par l’objectif poursuivi. De manière complémentaire, il conviendrait, par des procédures uniques ou coordonnées, de mieux articuler les évaluations environnementales des plans, programmes et projets.

En outre, certaines novations de la directive 2014/52/UE pourraient être transposées par anticipation car elles s’inscrivent dans l’objectif de simplification du présent projet de loi. C’est notamment le cas de la possibilité pour un maître d’ouvrage de faire valoir dans sa demande d’examen au cas par cas les mesures d’évitement et de réduction des impacts de son projet sur l’environnement afin que celui-ci soit dispensé d’une étude d’impact.

Différentes options étant toujours à l’étude, le Gouvernement n’a pas encore à ce jour arrêté sa position sur ces différents points.

Concernant l’autorité environnementale :

Le dispositif national d’autorité environnementale sera modifié pour répondre aux impératifs de séparation fonctionnelle et d’autonomie entre autorité décisionnaire et autorité environnementale.

De premiers travaux ont été conduits en 2013 et avaient étudiés quatre scénarii d’évolution :

• remontée des plans approuvés par un préfet à l’autorité environnementale de niveau supérieur ;

• les préfets restent les autorités environnementales locales mais leurs avis sont rendus après avis d’un collège d’experts ;

• les autorités environnementales locales sont des collèges d’experts ;

• une autorité administrative indépendante.

Le groupe de travail présidé par J. Vernier examine d’autres possibilités comme le dépaysement de dossiers sensibles ou impliquant les services de l’État, ou la possibilité de confier la mission d’autorité environnementale locale à un représentant du Conseil général de l’environnement et du développement durable en région ou interrégion chargé d’endosser les avis préparés par la direction régionale chargée de l’environnement.

Les conclusions du groupe de travail n’ayant pas été rendues en décembre 2014, le Gouvernement n’a pas encore à ce jour arrêté sa position sur l’évolution de l’autorité environnementale.

b) S’agissant plus précisément du domaine de l’aménagement et de l’urbanisme :

Le présent projet de loi prévoit d'habiliter le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance, afin de permettre :

• Une meilleure articulation entre l’évaluation environnementale stratégique des documents d'urbanisme et l’étude d’impact des opérations d’aménagement ou lotissements soumis à permis d’aménager : l’évaluation environnementale du document d’urbanisme pourrait, sous certaines conditions à définir par ordonnance, tenir lieu de l’étude d’impact de l’opération d’aménagement ou du lotissement ainsi que des projets mis en œuvre à l’intérieur du périmètre de cette opération ou de ce lotissement.

Il s’agit de mettre en œuvre le principe de coordination posé par le droit européen (notamment l’article 11 de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001), avec la mise en place de procédures uniques, permettant de simplifier le système actuel, tout en respectant les exigences cumulatives posées par la directive précitée et la directive relative l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. Il convient de réfléchir à des pistes de solution adaptées aux différents cas de figure qui peuvent se présenter : permettre au maître d’ouvrage de compléter ou actualiser sa propre évaluation des incidences sur l’environnement du projet par des éléments qui n’auraient pu être étudiés lors de l’évaluation environnementale du document d’urbanisme, ne pas réaliser de nouvelle étude d’impact au stade de l’opération d’aménagement, lorsque le document d’urbanisme respecte certaines conditions.

Une option pourrait consister à prévoir que le document d’urbanisme tient lieu de l’étude d’impact de l’opération d’aménagement s’il a fait l’objet d’une évaluation environnementale et qu’il ne nécessite pas d’être modifié pour permettre la réalisation du projet. Cette option part du postulat que si un document d’urbanisme permet la réalisation d’une opération d’aménagement sans qu’il soit besoin de le faire évoluer, alors c’est que l’analyse des incidences environnementales du parti d’aménagement du secteur dans lequel il est projeté d’implanter cette opération a été réalisée et qu’en conséquence, aucune étude d’impact supplémentaire n’est requise au titre des procédures de ZAC et de permis d’aménager. Elle permettrait  d’éviter les redondances d’évaluation des incidences environnementales « aval », et s’inscrit dans une logique de simplification des procédures.

Une voie complémentaire de simplification possible est de réviser le champ des projets soumis à une étude d’impact, les projets liés à l’urbanisme relevant de l’annexe II de la directive 2011/92/UE qui laisse aux États membres une marge d’appréciation quant aux choix des critères et seuils définissant les projets devant relever d’une évaluation des incidences sur l’environnement. Cette piste d’évolution doit s’inscrire dans une logique de simplification, tout en veillant à ne pas créer d’effet contre-productif par rapport au principe des Etats généraux du droit de l’environnement de progrès des normes environnementales (pas de simplification sans niveau égal ou supérieur de protection de l’environnement). Il conviendra en particulier d’être vigilant sur le fait de ne pas exonérer d’étude d’impact des projets à enjeux relevant du champ de l’urbanisme et situés en zones sensibles.

• Une meilleure articulation entre l’étude d’impact des opérations d’aménagement ou lotissements soumis à permis d’aménager et l’étude d’impact des projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagement situés à l’intérieur du périmètre de ces opérations ou lotissements.

Plusieurs options pourraient être envisagées par ordonnance :

- option 1 : les projets mis en œuvre à l’intérieur d’une opération d’aménagement ou d’un lotissement ne donneraient pas lieu à la réalisation d’une évaluation des incidences sur l’environnement, l’opération ou le lotissement ayant lui-même fait l’objet de cette évaluation. Cette option s’inscrit dans une logique d’analyse globale des incidences environnementales : il est opportun d’évaluer les incidences environnementales à l’échelle de l’opération d’aménagement dans son ensemble plutôt qu’à l’échelle de chacun des projets mis en œuvre au sein de cette opération. Dans le même ordre d’idées, il convient, dans un objectif de simplification et de clarté pour les porteurs de projets, de prévoir des pistes d’évolution permettant d’éviter dans des conditions à déterminer que des projets qui, pris individuellement, seraient dispensés d’étude d’impact, s’y retrouvent soumis au seul motif qu’il relève d’un programme d’ensemble.

- option 2 : l'autorité environnementale précise en amont, au moment de l'avis sur l’évaluation des incidences sur l’environnement de l’opération d’aménagement ou du lotissement soumis à permis d’aménager, si une actualisation de cette évaluation sera nécessaire au stade des projets soumis à permis de construire et mis en œuvre à l'intérieur de l’opération d’aménagement ou du lotissement (stade aval de l'autorisation d'urbanisme) ;

- option 2 bis : l’autorité environnementale indiquerait précisément les points sur lesquelles une actualisation est attendue au stade de l’autorisation d’urbanisme.

De façon complémentaire, la piste d’évolution d’une entrée par « projet » au lieu et place d’une entrée par « procédure », qui permet de rendre le système français plus compatible avec le droit communautaire, nécessiterait d’être examinée.

Les conclusions des travaux du groupe présidé par M. Vernier sur l’autorité environnementale devraient permettre de dégager des pistes de solution.

• L’extension de la démarche coordonnée d’analyse des incidences environnementales permise dans le cadre de la procédure intégrée pour le logement (article L.300-6-1 du code de l’urbanisme créé par l’ordonnance n° 2013-888 du 3 octobre 2013 relative à la procédure intégrée pour le logement dite « PIL ») aux mises en compatibilité des documents d’urbanisme avec un projet soumis à étude d’impact, et faisant l’objet d’une DUP ou d’une déclaration de projet.

L’ordonnance du 3 octobre précitée a introduit une mesure innovante de simplification, puisqu’elle permet d'engager une démarche unique d'analyse des incidences environnementales. Elle met en œuvre le principe de la procédure coordonnée prévu par les textes communautaires. Elle prévoit ainsi que si l’analyse de l'incidence sur l’environnement des modifications apportées au document d’urbanisme et des adaptations du document de rang supérieur est suffisamment précise dans l’étude d’impact, alors celle-ci vaut évaluation environnementale de la mise en compatibilité du document d'urbanisme et de l’adaptation du document de rang supérieur.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact général de la modernisation de l’évaluation environnementale prévue par le droit de l’environnement

Les mesures envisagées conduiront à réduire le nombre d’études d’impact afin les cibler encore davantage sur les projets présentant le plus d’effets sur l’environnement. Il en ira de même pour les documents de planification.

Elles contribueront, pour l’ensemble des acteurs (citoyens, opérateurs tels qu’aménageurs et maîtres d’ouvrage publics et privés, collectivités territoriales, services déconcentrés de l’Etat), à rendre le droit applicable en matière d’évaluation environnementale des plans et d’étude d’impact des projets plus simple, plus clair et plus lisible.

Les nouvelles articulations entre évaluation environnementale stratégique et étude d’impact permettront :

- de faire gagner du temps aux opérateurs et aux collectivités territoriales : une démarche unique d’évaluation des incidences environnementales sera désormais mise en œuvre, avec une seule autorité environnementale à saisir ;

- de réduire les coûts et les risques contentieux pour ces mêmes acteurs par la réalisation d’une seule évaluation des incidences sur l’environnement à réaliser, répondant aux exigences cumulatives des directives ;

- d’alléger la charge de travail pour les services déconcentrés de l’Etat (DREAL) en charge de préparer les décisions d’examen au cas par cas et les avis de l’autorité environnementale locale par une saisine unique au titre des deux types d’évaluation.

Le Gouvernement n’ayant pas arrêté toutes ses orientations au stade de l’habilitation, il n’est pas possible de déterminer le nombre de projets concernés par les simplifications envisagées, ni le gain qu’elles représentent.

Impact spécifique en matière de logements et d’urbanisme ;

En particulier, outre une simplification de notre droit et une amélioration de sa conformité au droit de l’Union européenne, les mesures envisagées par le Gouvernement permettront d’accélérer la réalisation des opérations d’aménagement qui concourent à la satisfaction de l’objectif du Gouvernement de mise en chantier de 500.000 logements par an.

L’optimisation, sous certaines conditions définies par ordonnance, de la réalisation d’une étude d’impact pour les projets soumis à permis de construire et situés à l’intérieur d’une opération d’ensemble (ZAC ou lotissement) permettra de générer les gains suivants :

- elle permettra de faire gagner du temps et ainsi d’accélérer la réalisation des opérations, de réduire les coûts et de limiter le risque contentieux pour les maîtres d’ouvrage ;

- d’alléger la charge de travail pour les services déconcentrés de l’Etat (DREAL) en charge de préparer les décisions d’examen au cas par cas et les avis de l’autorité environnementale locale.

4. Mesures de mise en œuvre et d'application envisagées

Outre la traduction de ces mesures par une ordonnance, des décrets d’application modifiant les dispositions réglementaires correspondantes du code de l’urbanisme et du code de l’environnement seront nécessaires (décrets en Conseil d’Etat).

5. Conditions d’application outre-mer

Ces dispositions s’appliqueront à l’ensemble des départements, y compris les départements d’outre-mer.

Article 28 : Habilitation

Moderniser et clarifier les modalités de participation, de concertation, de consultation et d’information du public (3° du I) 

18. Difficultés à résoudre

La participation du public en matière environnementale est l’objet de dispositions de droit international (conventions d’Aarhus et d’Espoo) et de droit de l’Union européenne (directives 2001/42/CE, 2003/4/CE et 2003/35/CE).

En droit interne, l’article 7 de la Charte de l’environnement dispose que « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».

Les règles organisant la participation du public aux décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ont sensiblement évolué ces dernières années.

Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, des modifications aux procédures de débat public et de concertation ont été apportées et une réforme des enquêtes publiques a été menée. Cette dernière est entrée en vigueur le 1er juin 2012.

Par ailleurs, la reconnaissance par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État de la pleine valeur constitutionnelle de l'article 7 depuis l'entrée en vigueur de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 a rendu nécessaire une adaptation de la législation qui s'est traduite par l'adoption de dispositions transversales codifiées aux articles L.120-1 et L.120-2 du code de l'environnement par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (art. 244).

Plusieurs décisions rendues par le Conseil constitutionnel dans le cadre de la procédure de question prioritaire de constitutionnalité ont toutefois, en déclarant contraires à l'article 7 de la Charte certaines dispositions du code de l'environnement, mis en évidence le caractère incomplet de ces dispositions au regard des exigences découlant du principe de participation du public.

La loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement et l’ordonnance n° 2013-714 du 5 août 2013 prise sur le fondement d'une habilitation consentie par celle-ci ont eu pour objet, en tirant les conséquences de cette jurisprudence, de donner à l'article 7 de la Charte de l'environnement toute sa portée, afin de permettre aux citoyens de s'impliquer de façon concrète et utile dans le processus d'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement.

19. Objectifs poursuivis

L’objectif poursuivi par le présent article est, en premier lieu, d’achever cette vaste réforme de la participation du public aux décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. Il est, en outre, de répondre aux critiques fréquemment formulées sur ces procédures. On leur reproche, en particulier, leur lourdeur, mais aussi qu’elles interviennent souvent à un stade trop avancé dans les procédures d’autorisation où il n’est plus guère possible de modifier les projets. Il est donc envisagé de proposer des simplifications et des améliorations des dispositifs actuels de participation du public de manière cohérente et dans le respect des principes internationaux et constitutionnels.

On relèvera, par ailleurs, que le constituant a attribué au législateur le soin de fixer les conditions et limites de la participation du public. Seules les modalités d’application relèvent du niveau réglementaire.

L’ordonnance modifiera principalement les chapitres Ier à III du titre II du livre Ier du code de l’environnement. Des mesures concerneront d’autres législations notamment pour ce qui concerne la mise en cohérence des procédures particulières de participation du public.

20. Analyse des impacts des dispositions envisagées

« a) En simplifiant, complétant et harmonisant les dispositions des articles L. 120-1 et suivants du code de l’environnement, en ce qui concerne notamment leur champ d’application, les dérogations qu’elles prévoient et les modalités de publicité des observations du public et, lorsqu’elles ne sont pas conformes à l’article 7 de la Charte de l’environnement, les procédures particulières de participation du public à l’élaboration des décisions ayant une incidence sur l’environnement ; »

Dans le but d’assurer la pleine cohérence du dispositif transversal de participation du public issue de la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 et de l’ordonnance n° 2013-714 du 5 août 2013 relatives à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement, il convient de modifier les dispositions des articles L. 120-1 et suivants du code de l’environnement afin, en particulier, d’harmoniser, d’une part, l’articulation entre le dispositif transversal de participation du public et les dispositions prévoyant la mise en œuvre pour certaines décisions d’une procédure particulière de participation du public et, d’autre part, les modalités d’appréciation de l’incidence sur l’environnement pour toutes les catégories de décisions des autorités publiques. Il convient également d’étendre à l’ensemble des décisions des autorités publiques l’exclusion de la participation du public en cas d’atteinte aux intérêts mentionnés par le I de l’article L. 124-4 du code de l’environnement.

Ces modifications concourront à la réalisation du même objectif que celui recherché par les dispositions relatives à la participation du public de l’article d’habilitation, et en particulier du d) du 3°, de mieux proportionner la procédure de participation du public au projet concerné.

En outre, au regard de la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État, certaines procédures particulières de participation du public peuvent ne plus être conformes à l’article 7 de la Charte de l’environnement, ce qui crée une situation d’insécurité juridique pour les porteurs de projets compte tenu de la possibilité pour les requérants, à l’occasion d’un recours en annulation dirigé contre une autorisation administrative, de soulever une question prioritaire de constitutionnalité.

Il convient, dès lors, soit de modifier la procédure particulière de participation du public afin de la rendre conforme aux exigences découlant de l’article 7 de la Charte de l’environnement, soit de la supprimer, afin de rendre applicable le dispositif supplétif et transversal de participation du public des articles L. 120-1 et suivants du code de l’environnement.

Enfin, l'article 3 de la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement a mis en place une expérimentation dans le cadre des consultations organisées en application de l'article L.120-1 du code de l'environnement sur certains projets de décrets et d'arrêtés ministériels pris en matière de préservation du patrimoine naturel, de chasse et d’installations classées pour la protection de l’environnement.

Cette expérimentation, qui a pris fin le 1er octobre 2014, a consisté :

- d'une part, à ouvrir au public la possibilité de consulter les observations présentées sur le projet au fur et à mesure de leur dépôt, ce qui a conduit à mettre en place un forum électronique ;

- d'autre part, à confier à une personnalité qualifiée désignée par la Commission nationale du débat public (CNDP), dans un but de transparence, la rédaction de la synthèse des observations du public.

Cette habilitation vise à permettre de prendre les dispositions permettant de généraliser ou d’adapter cette expérimentation.

« b) En fixant les modalités de la concertation et de la participation du public en fonction des caractéristiques du plan, programme ou projet, de l’avancement de son élaboration et des concertations déjà conduites ;

« c) En simplifiant les modalités des enquêtes publiques et en étendant la possibilité de recourir à une procédure de participation du public unique pour plusieurs projets, plans ou programmes ou pour plusieurs décisions. »

Après deux années de mise en œuvre de la réforme des enquêtes publiques, il apparaît que des simplifications des procédures et des clarifications peuvent être apportées sans nuire à la protection de l’environnement.

Les procédures de participation du public peuvent notamment être mieux adaptées aux caractéristiques et aux impacts environnementaux potentiels des projets, plans, programmes. Il devrait ainsi être mieux tenu compte des concertations déjà conduites en amont pour prévoir un dispositif de participation proportionné préalablement à l’autorisation d’un projet ou à l’approbation d’un document de planification.

S’agissant des enquêtes publiques, leurs modalités peuvent être simplifiées. De manière plus générale, favoriser le recours, dans certains cas, à une participation par la voie électronique pourrait significativement améliorer la participation effective de nos concitoyens à élaboration des décisions susceptibles d’affecter l’environnement (en particulier pour des plans régionaux où une enquête publique n’est pas adaptée).

Des difficultés d’interprétation méritent, en outre, d’être levées et le recours à une procédure unique de participation du public pour plusieurs plans, programmes et projets étendu.

Article 28 : Habilitation

Moderniser les conditions du règlement, devant les juridictions administratives, des litiges nés principalement de l’application des législations relevant du code de l’environnement (4° du I) 

21. Difficultés à résoudre

Dans le cadre des États généraux de la modernisation du droit de l’environnement, le renforcement de la sécurité juridique des porteurs de projet en matière de contentieux administratif est apparu comme l’un des axes prioritaires de réforme.

Mieux prévenir les litiges, notamment en améliorant le dialogue en amont, éviter qu’ils ne fragilisent les projets, parfois même alors qu’ils n’ont pas encore été engagés, améliorer la cohérence des règles et des délais de procédure ou encore mieux les adapter aux contraintes spécifiques auxquelles sont soumis les projets conduits dans le domaine environnemental sont autant d’attentes exprimées par les acteurs. Il est relevé, par exemple, que le risque d’annulation qui pèse sur les autorisations délivrées, parfois pour de simples vices de forme, est un obstacle à l’obtention de financements.

L’une des actions de la feuille de route pour la modernisation du droit de l’environnement est ainsi consacrée à cette thématique. Dans ce cadre, un groupe de travail a été mis en place, présidé par Delphine HEDARY, Conseiller d’État et composé de représentants des diverses parties prenantes.

22. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les dispositions qui seront adoptées dans le cadre de l’ordonnance devront permettre, dans le respect de l’accès au juge, d’accélérer les procédures contentieuses et de sécuriser les porteurs de projets face au risque d’annulation.

Article 29

Sécurisation des projets de construction en recentrant l’action en démolition aux cas où elle est indispensable

23. État des lieux

Le contentieux de l’urbanisme est devenu, ces dernières années, un sujet récurrent, objet de toutes les attentions, tant des professionnels de la construction que des représentants de la société civile179. Dans la période la plus récente, tous les travaux législatifs relatifs aux questions d’aménagement et d’urbanisme ont donné lieu à de nombreux échanges et propositions d’amendements sur le sujet.

Le Gouvernement a présenté en 2013 une réforme du contentieux des autorisations d’urbanisme (ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme et décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013) en s’inspirant notamment du rapport « Construction et droit au recours : pour un meilleur équilibre » remis le 25 avril 2013 à Madame la ministre de l’égalité des territoires et du logement par Monsieur le Président Daniel Labetoulle 180

Bilan de la loi Littoral et des mesures en faveur du littoral, DATAR, septembre 2007 , une étude a été réalisée par le Centre d’études techniques de l’Équipement (Cete) de Méditerranée sur six sites expérimentaux répartis sur les trois façades maritimes métropolitaines. La notion d’espaces remarquables a été étudiée à partir des documents disponibles : PLU, SCOT, DTA, SMVM, document départemental d'application de la loi « Littoral ».

Sur ces territoires, les espaces remarquables ont surtout été désignés en fonction des protections existantes (réserve naturelle, arrêté de protection de biotope, terrain acquis par le Conservatoire du littoral ou le conseil général) ou des inventaires comme les Znieff (Zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique) ou les Zico (zone importante pour la conservation des oiseaux). Peu d’espaces remarquables ont été définis par des critères paysagers. L’essentiel des espaces remarquables a été désigné en zone naturelle dans les POS/PLU.

Sur les six sites étudiés (Estérel, Thau, Arcachon, côte morbihannaise, côte des isles, baie de Somme), représentant une superficie totale de 152.325 ha répartis sur 63 communes, 46.616  ha ont été qualifiés d'espaces remarquables et caractéristiques du littoral au titre de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, soit environ 30 % de la superficie totale des 63 communes.

Ces données ne sont toutefois pas nécessairement représentatives de la situation au plan national.

Ainsi, dans trois départements de Provence-Alpes-Côtes-Azur (le Var, les Bouches-du-Rhône et les Alpes-Maritimes), les espaces remarquables et caractéristiques du littoral représentent en moyenne
46 % de la surface des communes littorales
182

Source : Atlas Littoral PACA, édition 20.

La carte ci-dessous identifie (en vert clair) les espaces qualifiés de remarquables par le schéma de cohérence territoriale des Lacs Médocains.

Au regard de ces différentes données, on peut constater que la proportion des espaces remarquables et caractéristiques est extrêmement variable et ce, d’autant plus que le juge n’est pas lié par la qualification donnée par le document d’urbanisme, mais peut également qualifier ou « déqualifier » un espace remarquable au cours d’un contentieux ;

- les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard visés au II de l’article 145-3 du code de l’urbanisme : Il s’agit des espaces, paysages et milieux des communes soumises à la loi montagne et que les documents et décisions relatif à l’occupation des sols doivent préserver ;

- les sites désignés Natura 2000 en application de l’article L. 414-1 du code de l’environnement ;

- les sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l’environnement : Il s’agit des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général. Il en existe une liste par département et l’inscription est prononcée par arrêté du ministre chargé des sites.

Ces sites sont les suivants :

les cœurs d’un parc national délimité en application de l’article L. 3312 du code de l’environnement ;

les réserves naturelles classées instituées en application de l’article L.3321 du code de l’environnement ;

les périmètres de protection autour des réserves naturelles institués en application des articles L. 33216 à L.33218 du code de l’environnement ;

les secteurs des plans de prévention des risques visés aux II et III de l’article L.51516, aux 1° et 2° du II de l’article L. 562-1 du code de l’environnement ;

les secteurs qui leur correspondent dans les plans de prévention des risques visés à l’article L.1745 du code minier ;

les périmètres des servitudes relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement institués en application de l’article L. 5158 du code de l’environnement ;

les périmètres des servitudes relatives aux terrains pollués, aux stockages de déchets, ou aux anciennes carrières institués en application de l’article L. 51512 du code de l’environnement ;

les secteurs sauvegardés visés aux articles 313-1 et suivants du code de l'urbanisme ;

les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager créés en application de l'article L. 642-1 du code du patrimoine ;

les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine créés en application de l'article
L. 642-1 du code du patrimoine ;

les périmètres de protection d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques défini par l'article L. 621-30 du même code ;

les secteurs délimités par le plan local d’urbanisme en application de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme.

L’article L.123-1-5 du code de l’urbanisme prévoit que le règlement du plan local d’urbanisme peut « Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique, architectural ou écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, ces prescriptions sont celles prévues à l'article L. 130-1 ».

Ces secteurs sont donc définis localement par la commune ou l’EPCI compétent en matière d’urbanisme et ne sont pas recensés au niveau national. On en compte de quelque uns pour les petites communes à plusieurs dizaines pour les communes d’importance.

24.2.2. Les protections liées aux risques naturels ou technologiques

- les secteurs des plans de prévention des risques visés aux II et III de l’article L.515-16, aux 1° et 2° du II de l’article L. 562-1 du code de l’environnement et les secteurs qui leur correspondent dans les plans de prévention des risques visés à l’article L.174-5 du code minier ;

- les périmètres des servitudes relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement institués en application de l’article L. 515-8 du code de l’environnement ;

- les périmètres des servitudes relatives aux terrains pollués, aux stockages de déchets, ou aux anciennes carrières institués en application de l’article L.515-12 du code de l’environnement.

24.2.3. Les protections liées au patrimoine architectural

- les secteurs sauvegardés visés aux articles 313-1 et suivants du code de l'urbanisme ;

- les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager créés en application de l'article L. 642-1 du code du patrimoine ;

- les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine créés en application de l'article
L. 642-1 du code du patrimoine ;

- les périmètres de protection d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques défini par l'article L. 621-30 du même code ;

- les secteurs délimités par le plan local d’urbanisme en application de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme ;

25. Consultations menées

Le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté.

26. Textes d’application et outre-mer :

Le dispositif est applicable sur l’ensemble du territoire national.

Article 30

Harmoniser les seuils de recours à un architecte pour les exploitations agricoles

27. Etat des lieux :

L’article L. 431-3 du code de l’urbanisme dispose que « les personnes physiques ou exploitations agricoles à responsabilité limitée à associé unique (EARL), qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes, une construction de faible importance ne sont pas tenues de recourir à un architecte ». Le seuil fixé par décret en Conseil d’État est actuellement de 800 m2.

Les agriculteurs indépendants (personnes physiques ou exploitation agricole à responsabilité limitée) ne sont pas tenus de recourir à un architecte pour des constructions dont la superficie est inférieure à ce seuil.

Pour les agriculteurs en activité dans le cadre d’un autre type de société (groupements agricoles d’exploitation en commun – GAEC - par exemple), le seuil d’exemption est particulièrement bas, soit 21 m2, entraînant ainsi un surcoût pour des projets de taille similaire.

28. Description des objectifs poursuivis

Bien que les schémas sociétaires se soient fortement diversifiés depuis l’émergence du GAEC en 1962 jusqu’au développement massif des EARL à partir des années 1990, les chiffres du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt témoignent d’une préférence pour l’EARL avec un nombre s’élevant à 68 200 en 2009, contre 38 000 à cette même date pour les GAEC en activité. De même, entre 2000 et 2010, on comptait une baisse du nombre des associés de GAEC de 8 % contre une hausse de 35 % des associés en EARL.

L’étude menée par le Gouvernement permettra de déterminer les formes sociétaires susceptibles de bénéficier de l’exemption et de quantifier précisément le seuil pertinent pour maximiser le nombre de constructions éligibles et minimiser le manque à gagner pour les architectes.

29. Options possibles et nécessité de légiférer

Afin d’élargir la notion de « personnes physiques ou d’exploitation agricoles qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes », la mesure envisagée se traduit par une modification de l’article L .431-3 du code de l’urbanisme.

Article 31

Simplifier la procédure d’autorisation pour l’implantation de la fibre optique dans les parties communes d’un immeuble

30. Difficultés à résoudre

Selon l’article 17 de la loi du 10 juillet 1965, la gouvernance de la copropriété repose sur un triptyque : « Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale des copropriétaires ; leur exécution est confiée à un syndic placé éventuellement sous le contrôle d'un conseil syndical ». Le concours de ces trois organes est indispensable à la gestion d’un immeuble, car chacun d’entre eux détient un rôle précis.

- Le syndicat de copropriétaires et son représentant le syndic de copropriété veillent à la conservation et à l’administration de l’immeuble : il décide du budget prévisionnel annuel, des travaux nécessaires, des actes d’acquisition ou de vente, du changement de syndic, des modifications éventuelles au règlement de copropriété). Ses décisions doivent être prises en assemblée générale des copropriétaires et exécutées par le syndic auquel cas sa responsabilité peut être engagée devant le tribunal de grande instance (TGI) ;

- Le conseil syndical (sauf décisions contraire de l’assemblée générale des copropriétaires) possède un rôle consultatif qui consiste à assister le syndic de copropriété et à contrôler la gestion en vérifiant la comptabilité et en élaborant le budget prévisionnel. Il établit l’ordre du jour en concertation avec l’assemblée générale. Les membres et son président sont élus par les copropriétaires. Bien que la structure rende compte devant l’assemblée générale, les membres peuvent être responsables des fautes graves commises dans l’exécution de leur mission ;

- L’assemblée générale de copropriété vote les décisions importantes, notamment l’installation de la fibre optique. Cette assemblée a pour obligation de se tenir au moins une fois chaque année ; et de façon exceptionnelle, à l’initiative du syndic, du conseil syndical voire des copropriétaires.

L’article 109 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie organise les modalités de cette autorisation en étant venue modifier l’article 24-2 de la loi n°66-457 du 2 juillet 1966 qui dispose dorénavant que :

« lorsque l'immeuble n'est pas équipé de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, toute proposition émanant d'un opérateur de communications électroniques d'installer de telles lignes en vue de permettre la desserte de l'ensemble des occupants par un réseau de communications électroniques à très haut débit ouvert au public dans le respect des articles L.33-6 et L.34-8-3 du code des postes et des communications électroniques est inscrite de droit à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale [des copropriétaires].

L'assemblée générale [des copropriétaires] est tenue de statuer sur toute proposition visée au premier alinéa. Par dérogation au h de l'article 25 de la présente loi, la décision d'accepter cette proposition est acquise à la majorité prévue au premier alinéa du I de l'article 24. »

D’après une étude du FTTH Council Europe, le taux de pénétration de la fibre optique dans les habitations en France n'atteint que 1 % du marché de l'internet, et 2,5 % pour la fibre déployée jusqu'au bâtiment (FTTB). L’hexagone n’est placé qu’en 18ème position en Europe.

31. Objectifs poursuivis

L’objectif est d’améliorer ces taux de pénétration en simplifiant la procédure d’autorisation pour l’implantation de la fibre optique dans les parties communes d’un immeuble. À cette fin, il est ainsi prévu de modifier la structure délivrant l’autorisation de l’implantation de la fibre optique, en substituant le conseil syndical de copropriété à l’assemblée générale des copropriétaires.

32. Options possibles et nécessité de légiférer

Le choix de modifier la rédaction de l’article 24-2 de la loi n°66-457 du 10 juillet 1965 par la voie législative tient dans le souci de faciliter l’autorisation d’installation de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique.

33. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs et les particuliers

Bien que la fibre optique peine à pénétrer dans les foyers français avec seulement 315 000 abonnés en 2013 sur 2,16 millions de foyers éligibles, l’Autorité de régulation des communications au 2ème trimestre 2014 comptabilise une forte croissance pour le très haut débit en fibre optique avec une hausse de 68 % du nombre d’abonnements en un an.

La fibre optique est un support technologique très stable qui permet une meilleure qualité de service. En outre, la multiplicité des terminaux et des services proposés nécessitent des débits de plus en plus rapides comme peut l’offrir la fibre optique capable d’acheminer des débits 100 fois plus élevés que le réseau actuel en cuivre (plus connu sous le nom ADSL). Enfin, à la différence du réseau actuel, les flux de données remontants (de l’utilisateur vers le réseau) peuvent être aussi rapides que les flux descendants (du réseau vers l’utilisateur), ce qui est un accélérateur dans le développement d’applications nouvelles, et plus globalement dans le développement du marché des nouvelles technologies et du numérique.

Par ailleurs, le déploiement de la fibre optique ne nécessite qu’un seul réseau mutualisé, ce qui réduit les travaux à effectuer au sein d’une copropriété. Selon la loi, l’opérateur d’immeuble choisi par la copropriété doit respecter des conditions de déploiement visant à garantir un accès « ouvert » et « technologiquement neutre » à l’ensemble des opérateurs. Cette réglementation impose à l’opérateur d’immeuble choisi par la copropriété la mutualisation au bénéfice de la concurrence et du consommateur.

Enfin, le coût prévu pour la copropriété d’un immeuble est nul puisque la loi de modernisation de l’économie de 2008 et son décret d’application n° 2009-54 du 15 janvier 2009, codifié à l’article R9-2 I du code des postes et des communications électroniques disposent que « l’installation, l’entretien, le remplacement et le cas échéant la gestion des lignes se font aux frais de l’opérateur signataire de la convention ».

Impacts pour les entreprises et les collectivités territoriales

Selon le plan très haut débit du Gouvernement, un effort d’investissement par les opérateurs privés et les collectivités territoriales de 20 Md€ en 10 ans devrait permettre de couvrir, d’ici 2020, l’ensemble des habitants dans les zones conventionnées et 43 % dans les zones non conventionnées. 20 000 emplois directs sont mobilisés pour le déploiement de nouvelles infrastructures sur les 10 prochaines années dans le cadre de ce plan.

Article 32 1° et 2°

Habilitation à prendre par ordonnance les dispositions législatives nécessaires à la transposition des directives n° 2014/53/UE et n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil des 16 avril et 15 mai 2014 et à la simplification du CPCE

34. Difficultés à résoudre

La directive n° 2014/53/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative à l'harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché d'équipements radioélectriques et abrogeant la directive n° 1999/5/CE, publiée au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) du 22 mai 2014 abroge et remplace la directive n° 1999/5/CE du 9 mars 1999 relative à la mise sur le marché des équipements radioélectriques et des équipements terminaux de télécommunications.

Cette directive avait été transposée en droit national à titre principal aux articles L. 32, L. 34-9,
L. 36-7, R. 9 et R. 20-1 et suivants du code des postes et des communications électroniques (CPCE). Ces dispositions doivent être modifiées et complétées d’ici le 12 juin 2016 afin de respecter les délais de transposition de la directive n° 2014/53/UE. Cette dernière modifie le champ d’application de la directive n° 1999/5/CE du 9 mars 1999, instaure un système d’enregistrement tenu par la Commission européenne, adapte le cadre existant aux équipements innovants et prend en considération les nouveaux principes issus du nouveau cadre législatif réglementaire (NLF) qui s’est substitué à la « Nouvelle approche ».

La directive n° 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à des mesures visant à réduire le coût du déploiement de réseaux de communications électroniques à haut débit, publiée au JOUE du 23 mai 2014, a pour objet de faciliter le déploiement rapide des réseaux de communications électroniques à très haut débit (THD) notamment en instituant une obligation :

- de transparence et un droit d’accès aux infrastructures physiques existantes dès lors qu’elles peuvent accueillir des infrastructures de réseaux de communications électroniques haut débit ;

- de transparence et de coordination des travaux de génie civil ;

- de pré-équipement des bâtiments neufs et des bâtiments anciens lors de rénovations de grande ampleur ;

- d’accès aux infrastructures dans les bâtiments ou aux abonnés d’un immeuble.

La directive prévoit également la mise en œuvre de procédures de règlement des différends et de centralisation des informations à une ou plusieurs entités compétentes.

Les dispositions existant en droit national concernant l’ensemble de ces aspects devront être modifiées ou complétées avant le 1er janvier 2016 afin de respecter les délais de transposition.

35. Objectifs poursuivis

Les mesures envisagées visent à permettre l’adoption des mesures législatives nécessaires à la transposition de ces deux directives européennes en droit national par voie d’ordonnance.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

36. Options possibles et nécessité de légiférer

La transposition des deux directives européennes précitées nécessitent de modifier ou compléter des dispositions législatives existantes dans le code des postes et des communications électroniques et dans d’autres codes comme le code de l’environnement ou le code de l’habitation et de la construction notamment.

La directive n° 2014/53/UE du 16 avril 2014 doit être transposée en droit national le 12 juin 2016 au plus tard.

La directive n° 2014/61/UE du 15 mai 2014 doit être transposée en droit national au plus tard le
1er janvier 2016.

Les délais contraints dans lesquels doivent avoir été adoptées les dispositions de niveau législatif et réglementaire nécessaires à la transposition de ces deux directives, ainsi que la marge de manœuvre limitée laissée aux États membres dans cet exercice de transposition particulièrement technique justifient le recours à une ordonnance.

37. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts économiques

La transposition de la directive du 16 avril 2014 permettra d’améliorer le niveau de conformité des équipements mis sur le marché européen, clarifiera le rôle de chacun des acteurs de la chaîne et améliorera l’information des consommateurs.

La transposition de la directive du 15 mai 2014 contribuera à diminuer les coûts de déploiements des réseaux THD, dont le déploiement constitue un élément clef en matière de compétitivité. Elle aura donc in fine un impact positif sur la croissance et l’emploi. Selon l’étude d’impact produite par la Commission européenne, les travaux de génie civil représentent 80 % des coûts globaux de déploiement des réseaux de communications électroniques à très haut débit. En conséquence, la Commission estime qu’une utilisation intensive des infrastructures physiques existantes, un renforcement de la coopération sur les travaux de génie civil et la rationalisation des procédures de délivrance des autorisations constituent un ensemble d’actions cohérentes qui permettraient de générer des économies potentielles de dépenses en capital pour les opérateurs de communications électroniques de l’ordre de 20 à 30 % des coûts d’investissements totaux, soit un montant qui pourrait atteindre 63 milliards d’euros d’ici à 2020 pour l’ensemble des États membres de l’Union Européenne.

Impacts pour les entreprises

Les obligations pesant sur les entreprises (fabricants, importateurs, distributeurs) sont clarifiées et les obligations de notification qui pèsent sur elles sont rationnalisées (suppression de la procédure de notification prévue à l’article 6.4 de la directive initiale, création d’une procédure de notification à la Commission européenne et d’obligations d’informations à la Commission et aux États membres concernant un nombre limité de matériels).

Impacts pour les administrations

La création d’une base de données administrée par la Commission est estimée à 300 000 € et les frais de maintenance annuels à 30 000 €. Les coûts de nature administrative sont estimés à 727 000 € dont 635 000 € de frais de personnel. Au niveau national, l’impact de la nouvelle directive sur les administrations compétentes devrait être globalement neutre (la suppression de la procédure de notification prévue par l’article R.20-11 du code des postes et des communications électroniques permettra aux agents de l’Agence nationale des fréquences de se concentrer sur de nouvelles tâches issues de la mise en œuvre de la directive tel que l’instruction des informations notifiées par les fabricants concernant les combinaisons des équipements « radio logiciels »).

38. Textes d’application et outre-mer

L’adoption des mesures législatives nécessaires à la transposition de ces deux directives européennes en droit national par voie d’ordonnance devra être suivie rapidement par l’adoption des mesures réglementaires correspondantes dans les délais de transposition précités sous peine d’astreinte.

Article 32- 3°

Habilitation à simplifier le régime juridique applicable aux servitudes radioélectriques

39. Difficultés à résoudre

Le code des postes et des communications électroniques prévoit deux types de servitudes au bénéfice des départements ministériels pour protéger leurs centres radioélectriques : les servitudes contre les obstacles et les servitudes contre les perturbations électromagnétiques (articles L.54 et suivants du code des postes et des communications électroniques).

Les articles L. 56-1 et L. 62-1 du même code prévoient également l’instauration de servitudes radioélectriques au bénéfice des opérateurs de communications électroniques mais ces dispositions n’ont jamais été mises en œuvre, les textes d’application de ces deux derniers articles n’étant, en fait, jamais intervenus.

Du fait de la complexité de la réglementation et des difficultés de sa mise en œuvre, un groupe de travail, piloté par l’Agence nationale des fréquences (ANFr) en 2010, a été constitué afin de formuler des propositions visant à simplifier la procédure d’adoption des servitudes radioélectriques. En application du 5° de l’article R. 20-44-11 du code des postes et des communications électroniques, l’ANFr est en effet consultée sur les projets de servitudes radioélectriques et chargée de constituer, tenir à jour et diffuser la documentation relative aux servitudes.

40. Objectifs poursuivis

Le dispositif actuel s’avère en effet extrêmement lourd du fait d’un circuit de signatures complexes et surtout sans réelle valeur ajoutée. Le groupe de travail composé de l’ensemble des administrations et autorités affectataires de bandes de fréquences183, a plébiscité la recherche de simplifications administratives et la suppression de toutes les dispositions qui n’apportent pas de valeur ajoutée ou qui ne sont pas obligatoires du fait d’autres textes. Par ailleurs, l’actualisation des dispositions du code des postes et des communications électroniques relatives aux servitudes radioélectriques est nécessaire, afin de les mettre en conformité avec celles du code de l’urbanisme et de l’environnement, du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ou encore du code de la construction et de l’habitation.

41. Options possibles et nécessité de légiférer

Les mesures envisagées consisteraient à s’inspirer de certaines des propositions du groupe de travail et s’articuleraient autour des trois orientations suivantes :

- établissement des servitudes par arrêté et non plus par décret, sauf dans le cas de conclusion défavorable de l’enquête publique ;

- suppression du classement des centres en catégories ;

- suppression des servitudes dont bénéficient les opérateurs de communications électroniques en vertu des articles L. 56-1, contre les obstacles, et L. 62-1, contre les perturbations à l’exception des seules servitudes au bénéfice des centres exploités pour les besoins de la défense ou de la sécurité publique.

L’adoption de ces mesures législatives serait de nature à simplifier et clarifier le processus d’instauration des servitudes radioélectriques. À titre d’exemple, le caractère purement formel de la procédure de consultation prévue après l’enquête publique dans le système actuel n’a pour effet que de retarder leur établissement. Quant aux servitudes prévues aux articles L. 56-1 et L. 62-1 du code des postes et des communications électroniques, les textes d’application de ces articles n’ont jamais été pris depuis 1996 sans que cela ait apparemment entravé l’activité des opérateurs, qui ne sont pas demandeurs compte tenu de la complexité de sa mise en œuvre.

La mise en œuvre des mesures proposées nécessite la modification des articles L. 54 à L. 64 du code des postes et des communications électroniques.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

42. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Environ 5 500 stations sont protégées par 10 000 décrets établissant des servitudes radioélectriques. L’ANFr gère le suivi de la procédure nécessaire à l'établissement d'une servitude et la base de données « notariale » qui en résulte. Celle-ci est consultable en ligne permettant aux administrations et aux porteurs de projet (grands travaux, éoliennes, carrières…) d'être informés de l'existence de servitudes pouvant impactées leur zone d'étude

(http://www.anfr.fr/fr/emetteurs/servitudes/listes-des-servitudes.html).

La gestion des servitudes radioélectriques reste une activité en croissance pour l’ANFr ainsi que le démontre le graphique ci-dessous issu de son rapport d’activité de 2011. Cette croissance est essentiellement due aux ministères de l’Intérieur et de la Défense.

Les simplifications envisagées de la procédure d’élaboration des servitudes radioélectriques seraient une source d’économies pour plusieurs administrations : l’ANFr réalisera des économies substantielles (ex : la suppression de certaines consultations lui permettrait de réduire les frais postaux et serait une source de gain de temps pour ses personnels qui pourraient se consacrer à d’autres activités) ; les administrations bénéficiaires des servitudes et celles consultées concernant les projets de servitudes réaliseraient également des économies qui pourraient être estimées lors de l’élaboration du projet d’ordonnance.

43. Consultations prévisionnelles

Les projets de mesures envisagées devront être soumis pour avis à l’Autorité de régulation des communications, à la Commission consultative des communications électroniques, à la Commission supérieur du service public des postes et des communications électroniques et au Conseil national d’évaluation des normes.

44. Textes d’application et outre-mer

La modification du cadre législatif simplifiera les procédures administratives sans pour autant réduire les garanties individuelles. Elle nécessitera l’adaptation des dispositions réglementaires du code des postes et des communications électroniques dans un deuxième temps.

Ces dispositions ne sont pas applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française où les servitudes sont instituées dans les conditions des lois n°49-758 du 9 juin 1949 et n° 49-759 du 9 juin 1949.

Article 33

Ratification de l’ordonnance du 12 mars 2014 et modifications de l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques

45. État des lieux

L’ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014 relative à l’économie numérique a modifié l’article
L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques, afin de favoriser l’établissement des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique dans les logements et locaux à usage professionnel existants. Elle a clarifié le champ d’application du cadre juridique applicable aux conditions d’établissement de ces lignes et l’a complété par des dispositions de nature à accélérer la prise de décision des copropriétés en vue d’atteindre les objectifs du « Plan France Très Haut Débit ».

46. Description des objectifs poursuivis

Il s’agit d’améliorations rédactionnelles et de clarifications.

47. Options possibles et nécessité de légiférer

Il est proposé de reprendre la rédaction retenue par le Conseil d’État du projet de loi de ratification de l’ordonnance du 12 mars 2014 déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 30 juillet 2014 et de la compléter par une disposition clarifiant le fait que les immeubles des bailleurs sociaux sont bien inclus dans le périmètre du dispositif.

48. Consultations menées

En vertu de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes a été consultée s’agissant de la modification d’une disposition législative relative au secteur des communications électroniques.

49. Textes d’application et outre-mer

Les améliorations rédactionnelles de l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques ne nécessiteront pas de mise en œuvre ou de suivi particuliers.

Section 2 – Améliorer le financement

Article 34

Actionnariat salarié (Attribution gratuite d’actions)

50. État des lieux

L’actionnariat salarié renforce l’implication des salariés dans le développement de leur entreprise tout en permettant de stabiliser une partie du capital social de l’entreprise.

À cet égard, l’attribution gratuite d’actions se révèle être un outil efficace pour atteindre ces deux objectifs. Sans risque en capital pour le salarié puisque ne nécessitant aucune mise de fond de sa part, cette forme de rémunération est en outre ouverte à toutes les sociétés par actions.

Cependant, l’évolution de la fiscalité et des prélèvements sociaux pesant sur les attributions d’actions gratuites est de nature à dissuader les entreprises de recourir à ce dispositif.

1.1. Régime juridique

Le dispositif relatif à l’attribution gratuite d’actions (AGA) est codifié aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-6 du code du commerce. Seules les sociétés par actions sont éligibles (sociétés anonymes - SA, sociétés par actions simplifiées - SAS, sociétés en commandite par actions - SCA).

Des actions peuvent être attribuées par une société à ses salariés et mandataires sociaux (à l’exclusion des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance), et, sous certaines conditions, à ceux des sociétés qui lui sont liées. L’assemblée générale extraordinaire (AGE) peut autoriser l’attribution d’actions gratuites en faveur de l’ensemble du personnel salarié, ou le cas échéant, de certaines catégories.

Diverses dispositions encadrent ces distributions.

Ainsi, il ne peut être attribué d’actions gratuites aux salariés et aux mandataires sociaux détenant chacun plus de 10 % du capital social. De surcroît, une telle attribution ne peut avoir pour effet pour les intéressés de détenir chacun plus de 10 % du capital social.

Par ailleurs, le nombre total des actions gratuites attribuées ne peut pas excéder 10 % du capital social de la société ou 15 % pour les petites et moyennes entreprises dont les titres ne sont pas cotés. Ce plafond de distribution est porté à 30 % lorsque l’AGA bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société. Dans tous les cas, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq si les actions gratuites sont attribuées à l’ensemble du personnel.

Le bénéficiaire d’une action gratuite ne devient propriétaire des titres correspondants qu’au terme d’une période d’acquisition qui ne peut être inférieure à 2 ans. Il est ensuite astreint à une période de conservation dont la durée minimale est de 2 ans à l’issue desquels il peut librement disposer des titres.

1.2. Régime fiscal

Les gains des bénéficiaires d’AGA se décomposent comme suit :

- un gain d’acquisition, de nature salariale, égal à la valeur, à leur date d'acquisition, des actions gratuites ;

- un gain de cession, de nature patrimoniale, égal à la différence entre le prix de cession et la valeur des actions à leur date d'acquisition.

Pour les actions attribuées à compter du 28 septembre 2012, le régime d’imposition de ces différents gains est le suivant :

- le gain d’acquisition est soumis au barème de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires au titre de l'année au cours de laquelle le bénéficiaire a disposé de ses actions, les a cédées, converties au porteur ou mises en location ;

- le gain de cession est également soumis au barème de l’impôt sur le revenu l’année de cession mais selon le régime applicable aux plus-values de cessions de valeur mobilières. Il peut ainsi bénéficier d’un abattement pour une durée de détention allant de 50 % (détention plus de 2 ans) à 65 % (détention plus de 8 ans).

1.3. Régime social

Au plan social, le gain d’acquisition des actions gratuites est soumis à la cotisation sociale généralisée (CSG) sur les revenus d’activité (7,5 %), et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS, 0,5 %).

Il est également soumis à une contribution patronale (30  %) due par l’employeur au titre de l’année de l’attribution de l’action et à une contribution salariale spécifique (10 %) due par le salarié l’année de cession des titres.

Le gain de cession, pour sa part, est soumis aux seuls prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine (15,5 %).

Date de dernière modification

Le régime des actions gratuites est codifié à l’article 80 quaterdecies du CGI modifié en dernier lieu par l’article 11 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 prévoyant l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu du gain d’acquisition.

L’abattement pour durée de détention est codifié à l’article 150-0 D du CGI. Cet article a été modifié en dernier lieu par l’article 2 de la loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014 sortant notamment du bénéfice de cet abattement le gain de cession des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise.

L’article 182 A ter a été modifié en dernier lieu par l’article 11 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 prévoyant l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu du gain d’acquisition.

L’article 200 A du CGI a été modifié en dernier lieu par l’article 17 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 supprimant le 2 bis de cet article relatif à un taux forfaitaire d’imposition en matière de plus-value mobilière.

Les articles L. 136-2 et L. 136-6 du code de la sécurité sociale ont été modifiés en dernier lieu par les articles 17, 26 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 modifiant des références au sein de ces deux articles.

Les articles L. 137-13 et L. 137-14 du code de la sécurité sociale ont été modifiés en dernier lieu par l’article 17 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 opérant des modifications formelles sur ces articles.

L’article L. 225-197-1 du code de commerce a été modifié en dernier lieu par l’article 9 de la loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle relevant les plafonds d’attribution des actions gratuites.

51. Description des objectifs poursuivis

Il est proposé de diminuer le niveau de taxation des bénéficiaires tout en simplifiant pour ceux-ci le régime d’imposition applicable.

La nature salariale du gain résultant de l’AGA serait réaffirmée, mais l’ensemble des gains, qu’il s’agisse du gain résultant de l’attribution ou du gain résultant de la cession ultérieure de l’action, sera imposé avec le bénéfice de l’abattement pour durée de détention prévu pour les plus-values mobilières, au moment de la cession des titres.

Les deux gains sont par ailleurs déjà imposés à l’impôt sur le revenu selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu.

Pour plus de simplicité, le régime social du gain d’acquisition sera également aligné en partie sur celui du gain de cession, les deux seront désormais taxables aux prélèvements sociaux dus sur les revenus du patrimoine et la contribution salariale spécifique attachée au gain d’acquisition sera supprimée.

Pour inciter les entreprises à recourir au dispositif, il est proposé de diminuer le taux de la contribution patronale de 30 % à 20 % et d’en transformer l’assiette comme l’exigibilité qui seront désormais appréciées à la date d’acquisition du titre.

Par ailleurs, un régime spécifique est prévu en faveur des petites et moyennes entreprises, qui pourront émettre des actions gratuites bénéficiant d’un abattement de contribution patronale d’un PASS184 sur quatre ans, lorsqu’elles n’auront procédé avant la date de décision d’attribution à aucune distribution de dividendes. Cette mesure a pour objectif d’amorcer une politique d’actionnariat salarié dans les PME indépendantes qui ont privilégié une politique de réinvestissement en ne distribuant pas de dividendes à leurs actionnaires ou porteurs de parts. Le bénéfice de cette mesure est subordonné au respect du règlement relatif aux aides « de minimis ».

Enfin, l’application du rapport de un à cinq prévu par le code de commerce en cas d’attribution à l’ensemble des salariés sera adapté, en supprimant ce rapport lorsque l’attribution porte sur moins de 10 % du capital social ou 15 % pour les sociétés non cotées, de manière à ne pas freiner les AGA à l’ensemble du personnel en dessous de ces seuils. Il ramène la durée minimale légale d’acquisition des titres de deux ans à un an ; la durée minimale cumulée (acquisition et conservation) ne devra, cependant, pas être inférieure à deux ans.

52. Options possibles et nécessité de légiférer

Conformément à l’article 34 de la Constitution, seule la voie législative permet d’atteindre les objectifs fixés.

Deux options étaient envisageables :

Option 1 : Fusionner gain d’acquisition et gain de cession afin d’aligner totalement leur régime.

D’une simplicité réelle, cette option présente toutefois l’inconvénient de ne pas tenir compte de la différence de nature entre le gain d’acquisition, de nature salariale et le gain de cession, de nature patrimoniale. Elle reviendrait ainsi à appliquer à la partie salariale du gain des dispositions contraires à sa nature telle l’exonération de fait en cas de donation à titre gratuit et modifierait la territorialité de la taxation telle que résultant des conventions fiscales internationales.

Option 2 : Conserver une distinction entre les deux gains pour tenir compte des différences de nature mais aligner leurs modalités d’imposition.

Cette option permet d’aligner les régimes d’imposition des deux gains précités tout en permettant des adaptations spécifiques pour tenir compte de la nature salariale du gain d’acquisition.

L’option 2 est donc préférée afin de ne pas taxer le gain d’acquisition selon des modalités contraires à sa nature réelle.

53. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts sur les particuliers

Les bénéficiaires d’AGA verront leur niveau de taxation allégé

Impacts sur les entreprises

Cette mesure améliore l’attractivité du dispositif d’AGA, renforçant ainsi l’implication des salariés dans le développement de leur entreprise. Cette attractivité est particulièrement renforcée pour les jeunes PME indépendantes qui ont privilégié une politique de réinvestissement en ne distribuant pas de dividende avant l’attribution gratuite. La mesure incite par ailleurs les salariés à conserver ces actions sur une longue durée pour profiter de l’abattement pour durée de détention en matière d’impôt sur le revenu, qui s’appliquera désormais à l’intégralité du prix de cession, et plus seulement au montant de la plus-value réellement constatée. Le taux d’abattement est croissant avec la durée de détention (65% pour une détention de plus de 8 ans), ce qui est de nature à stabiliser le capital social des entreprises.

La mesure est favorable au développement des entreprises et à l’emploi.

Le nombre d’entreprises potentiellement concernées s’élève à près de 350 000 (71 000 SA ; 274 000 SAS, 1 370 SCA ; source INSEE 2012).

Impacts sur les administrations

L’incidence budgétaire globale de la réforme concernant l’impôt sur le revenu n’est pas chiffrable.

Le coût annuel de la suppression de la cotisation sociale salariale est estimé à 25 M€. Le coût annuel de la réduction de la contribution sociale patronale est estimé à 100 M€ et à 200 M€ la première année pour tenir compte du décalage d’exigibilité de la contribution sociale patronale.

Compte-tenu de la date probable d’entrée en vigueur de la loi, il est retenu un prorata d’un tiers au titre de 2015. Le coût estimé s’élève à 75 M€ pour l’année 2015, 191 M € pour l’année 2016 (125 + 66) et 125 M€ pour 2017.

Augmentation nette (+) ou diminution nette (-) des recettes fiscales exprimée en millions d’euros

 

 

2015

2016

2017

 

Augmentation pérenne (+)
ou
diminution pérenne (-)

État

nc

nc

nc

 

 

Collectivités territoriales

 

 

 

 

 

Sécurité sociale

-75 

-191 

-125 

 

-125

Autres administrations publiques

 

 

 

 

 

Total pour l’ensemble des APU

-75

-191 

-125 

 

-125

-191

-125

 

-125

Il convient, cependant de préciser que la suppression de la cotisation sociale salariale de 10 % sera en partie compensée par le paiement de la CSG/CRDS sur les revenus du patrimoine au taux de 15,5  % au lieu de la CSG/CRDS sur les revenus du travail au taux de 8 % qui s’applique actuellement au gain d’acquisition.

Par ailleurs, l’ensemble de ces mesures étant destiné à relancer les AGA, l’augmentation potentielle du nombre d’attributions pourrait compenser la diminution affichée du rendement de ces cotisations.

Impacts juridiques

La réforme proposée en matière d‘AGA est conforme au droit européen en vigueur.

Le bénéfice de l’abattement de contribution sociale patronale est subordonné au respect du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.».

54. Consultations menées

Les dirigeants de jeunes entreprises et de jeunes salariés ont été consultés dans le cadre des Assises de l’entrepreneuriat en 2014 (Groupe de travail n°2 : « développer le recrutement et la fidélisation des jeunes diplômés dans les PME »).

Cette mesure a également été discutée avec les dirigeants d’entreprises étrangères réunis au sein du conseil stratégique de l’attractivité. Ceux-ci ont été unanimes pour considérer que la mesure était de nature à renforcer considérablement l’attractivité des entreprises sur le territoire national.

Article 35

Actionnariat salarié – Régime fiscal des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) – Champ d’application

55. État des lieux

1.1. Régime juridique

Conformément à l’article 163 bis G du code général des impôts (CGI), l’émission des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises (BSPCE) est réservée aux sociétés par actions dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers ou, s’ils y sont admis, si leur capitalisation boursière est inférieure à 150 M€. Lorsqu’elles dépassent ce seuil, les sociétés concernées peuvent, pendant les trois ans suivant la date de ce dépassement et sous réserve de remplir l’ensemble des autres conditions, continuer à attribuer ces bons.

Leur capital doit être détenu pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales détenues elles-mêmes pour 75 % au moins par des personnes physiques. Par ailleurs, ce dispositif est ouvert aux sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés depuis moins de quinze ans, à la date d’attribution des bons. Enfin, leur création ne doit pas procéder d’une opération de concentration, d’une restructuration, d’une extension ou d’une reprise d’activités préexistantes, sauf si elles répondent aux conditions prévues par le I de l’article 39 quinquies H du CGI.

Le prix d’acquisition du titre souscrit en exercice du bon est fixé au jour de l’attribution par l’Assemblée générale extraordinaire (AGE) ou, sur délégation de l’AGE, par le conseil d’administration ou le directoire.  Il est au moins égal, lorsque la société émettrice a procédé dans les six mois précédant l’attribution du bon, à une augmentation de capital par émission de titres conférant des droits équivalents, à ceux résultant de l’exercice du bon, au prix d’émission des titres concernés alors fixé. L’AGE détermine le délai pendant lequel les bons peuvent être exercés. Elle peut déléguer au conseil d’administration ou au directoire le soin de fixer la liste des bénéficiaires des BSPCE. Dans ce cas, le conseil d’administration ou le directoire indique le nom des attributaires des bons et le nombre de titres attribués à chacun d’eux. Les BSPCE sont incessibles.

1.2. Régime fiscal

Le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en exercice des bons attribués est soumis à l’impôt sur le revenu au titre des plus-values de cession, en application de l’article 163 bis G du CGI. Le calcul de la plus-value est effectué par application des nouveaux abattements prévus par l’article 150-0 D du CGI modifié, déterminés en fonction de la durée de détention des titres185. Le gain net de cession des titres souscrits en exercice des bons attribués est passible du taux d’imposition proportionnel de 19%. Toutefois le taux majoré de 30 % est applicable si le salarié exerce son activité depuis moins de trois ans dans la société, à la date de cession.

En revanche, lorsque les conditions prévues ne sont pas remplies, ces gains nets constituent un complément de salaire soumis à l’impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des traitements et salaires.

Dans le cadre des discussions du second projet de loi de finances rectificative pour 2014, le Parlement a adopté un amendement apportant deux précisions sur l’application de la réforme de l’imposition des plus-values mobilières adoptée en loi de finances pour 2014 (article 17). Il exclut du champ des abattements pour durée de détention prévus à l’article 150-0 D et de l’abattement fixe de 500.000 € prévu à l’article 150-0 D ter en cas de départ à la retraite, les gains de cession de titres souscrits en exercice de BSPCE. En effet, ces gains sont taxés à l’impôt sur le revenu à un taux forfaitaire et non au barème progressif et il n’y a pas lieu de leur accorder un avantage en impôt supplémentaire.

1.3. Régime social

Les gains de cession relevant du régime des plus-values d’imposition sont également soumis, à la charge du bénéficiaire, aux prélèvements sociaux applicables aux revenus du patrimoine, au taux global de 15,5 %.

En revanche, ils sont compris dans l’assiette des cotisations et contributions sociales sur les salaires, ainsi que dans celle des taxes et participations assises sur les salaires, si les conditions prévues ne sont pas remplies

Le dispositif des BSPCE permet aux jeunes entreprises en croissance de renforcer l’implication des salariés, notamment des cadres et des dirigeants, dans l’accroissement de valeur de l’entreprise, tout en conservant leur capacité d’investissement. Ce dispositif participe à l’attractivité du territoire national dans des secteurs qui peuvent être facilement délocalisés.

Toutefois, de nombreuses entreprises innovantes ne peuvent recourir à l’attribution de BSPCE dès lors que leur création procède de transferts d’activités nouvelles, ce qui les rend inéligibles à ce dispositif sauf dans certains cas prévus au I de l’article 39 quinquies H du CGI. Elles ne peuvent pas, par ailleurs, distribuer de BSPCE aux salariés de leurs filiales.

Le régime des BSPCE apparait équilibré et satisfait les acteurs, mais son champ d’application n’est plus adapté aux réalités économiques et s’avère beaucoup trop restreint.

56. Description des objectifs poursuivis

Pour conserver l’attractivité des BSPCE, la mesure proposée vise à permettre à de nombreuses jeunes entreprises innovantes, dont le lancement ou le développement s’appuie fréquemment sur des transferts d’activités nouvelles, de distribuer des BSPCE et d’attirer ainsi les talents indispensables à leur essor tout en préservant leur capacité d’autofinancement.

Considéré comme attractif, ce dispositif permet d’éviter la fuite de ces talents dans des secteurs qui peuvent être facilement délocalisés, notamment celui de l’économie numérique.

57. Options possibles et nécessité de légiférer

Conformément à l’article 34 de la Constitution, seule la voie législative permet d’atteindre les objectifs fixés.

Il est proposé ainsi de prévoir une exception en faveur des jeunes entreprises qui bénéficient d’un transfert d’une nouvelle activité développée par une autre jeune entreprise elle-même éligible au dispositif des BSPCE et, plus largement, en faveur des entreprises éligibles à ce dispositif qui se restructurent. Dans ce cas, la condition d’immatriculation au registre du commerce depuis moins de quinze ans s’apprécie au regard de l’immatriculation de la société la plus ancienne parmi celles prenant part à l’opération pour éviter tout effet d’aubaine. Pour les mêmes raisons, la condition tenant à la capitalisation serait appréciée au niveau de l’ensemble des sociétés issues de l’opération éligibles au dispositif des BSPCE.

Il est également proposé d’élargir le dispositif des BSPCE aux cas de l’acquisition d’une jeune entreprise par une autre et de la création d’une filiale à activité nouvelle par une jeune entreprise, en prévoyant la possibilité, pour la société mère, d’attribuer des bons aux salariés des filiales dont elle détient au moins 75% du capital ou des droits de vote, si ces filiales remplissent elles-mêmes les conditions pour être éligibles au dispositif BSPCE, à l’exception des conditions concernant la composition du capital. Pour éviter toute recherche d’optimisation, la condition tenant à la capitalisation boursière (inférieure à 150 M€) serait examinée au regard de l’ensemble constitué par la société mère et les filiales concernées par les attributions de BSPCE émanant de la mère.

58. Présentation et analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les particuliers

Cette mesure a pour principal objectif de permettre aux jeunes entreprises en création d’attirer les talents, notamment les jeunes, indispensables à leur essor, et d’impliquer les salariés dans le succès de leur entreprise tout en conservant la capacité d’investissement de celle-ci.

Impacts pour les entreprises

Cette mesure doit permettre d’accroître l’attractivité du territoire national en permettant la création et le développement d’entreprises nouvelles, notamment dans le domaine du numérique, secteur qui peut être facilement délocalisé, mais également dans tous les autres domaines de l’économie.

59. Consultations menées

Il a été procédé à la consultation des dirigeants de jeunes entreprises innovantes et de jeunes salariés dans le cadre des Assises de l’entrepreneuriat 2014 (Groupe de travail n°2 : « développer le recrutement et la fidélisation des jeunes diplômés dans les PME »).

Cette mesure a également été discutée avec les dirigeants d’entreprises étrangères réunis au sein du conseil stratégique de l’attractivité. Ceux-ci ont été unanimes pour considérer que la mesure était de nature à renforcer considérablement l’attractivité des entreprises sur le territoire national.

Articles 36 et 37

Harmonisation des dispositions relatives aux délais de versement des primes d’intéressement et de participation et aux intérêts de retards et précision sur les modalités de mise en place du plan d’épargne d’entreprise

60. État des lieux

Les sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation doivent être versées aux salariés avant des dates légales différentes pour chacun des dispositifs. Ces dates, lorsqu’elles sont dépassées, déclenchent des intérêts de retard, à la charge de l’employeur. Les intérêts de retard sont calculés sur la base de deux taux distincts, ce qui peut nuire à la lisibilité des dispositifs.

En matière d’intéressement, la date limite est le dernier jour du septième mois suivant l’exercice de calcul. Ainsi, toutes les sommes versées au-delà de la date limite de versement produisent des intérêts calculés au taux légal (article L.3314-9 du code du travail).

En matière de participation, la date limite est le dernier jour du quatrième mois suivant l’exercice de calcul (article R. 3324-21-1 du code du travail). Passé ce délai, les entreprises complètent le versement par un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privés (article D. 3324-21-2 du code du travail). Contrairement à l’intéressement, les textes de référence se trouvent dans la partie réglementaire du code du travail.

61. Description des objectifs poursuivis

L’objectif de cet article est d’harmoniser les dates limites de versement et, en conséquence, le point de départ des intérêts de retard. Il est donc prévu une date limite unique pour le versement des primes d’intéressement et de participation, à savoir le dernier jour du cinquième mois suivant l’exercice de calcul au titre duquel les droits sont nés, date médiane entre celles actuellement en vigueur. Corrélativement, les intérêts de retard débutent, pour les deux dispositifs, le premier jour du sixième mois.

Le projet de loi instaure également un taux d’intérêt de retard unique en cas de dépassement de la date limite de versement des primes, à savoir le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées. Il s’agit donc de prendre comme seule référence le taux applicable aujourd’hui à la participation.

Le point de départ de l’indisponibilité de la participation (le premier jour du sixième mois, soit le lendemain de la date limite de versement) figurera dorénavant dans la partie législative du code du travail.

Par ailleurs, l’article 37 vise à améliorer la lisibilité des dispositions du code relatives à la mise en place de l’épargne salariale. Celles-ci sont, selon les dispositifs, tantôt entièrement définies dans la loi (participation, intéressement, et PERCO), tantôt précisées par décret (plan d’épargne d’entreprise). Par souci de cohérence et de clarté, la mesure proposée inscrit également dans la loi les modalités de mise en place du plan d’épargne d’entreprise. Conformément au droit actuel, celles-ci sont identiques à celles applicables en matière de participation (article L. 3322-6 du code du travail).

62. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Un nombre significatif d’entreprises versent à la fois des primes de participation et d’intéressement. Ainsi, en 2012, 55,8 % des salariés du secteur marchand non agricole ont eu accès à un dispositif d’épargne salariale, parmi lesquels 49 % bénéficiaient d’un accord d’intéressement et d’un accord de participation186. La mesure d’harmonisation proposée permet de renforcer la lisibilité des dispositifs de l’épargne salariale, en particulier pour les entreprises et les salariés concernés par la participation et l’intéressement.

Pour les entreprises qui versent des primes de participation, la mesure conduit simplement à repousser d’un mois la date limite de versement. La mesure permet donc de réduire la probabilité d’un versement avec retard de la participation.

Pour les entreprises qui versent des primes d’intéressement, la mesure conduit à :

- avancer de deux mois la date limite de versement de la prime d’intéressement aux salariés de l’entreprise ;

- verser un intérêt de retard sur la base de 1,33 fois le TMOP.

En théorie, la mesure accroît la probabilité d’un versement avec retard de l’intéressement et conduit à augmenter les intérêts de retard, le TMOP étant supérieur en moyenne au taux légal.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution comparée des deux taux d’intérêt de retard actuels.

En pratique cependant, on constate que peu d’entreprises versent avec retard les primes d’intéressement, les entreprises prévoyant souvent un versement en avance par rapport à la date limite légale, notamment afin d’effectuer ces versements avant la période estivale (lorsque l’exercice est calculé sur l’année civile).

De ce fait, la mesure constitue essentiellement une simplification pratique pour les entreprises.

Article 38

Mise en place du PERCO à la majorité des deux tiers des salariés

63. État des lieux

L’intéressement, la participation et les plans d’épargne d’entreprise peuvent être mis en place selon plusieurs modalités :

- avec les organisations syndicales ;

- au sein du comité d’entreprise ;

- à la majorité des deux tiers du personnel.

En revanche, le plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) ne peut être mis en place par ratification à la majorité des deux tiers du personnel que lorsque l’entreprise ne dispose pas de délégué syndical ou de comité d’entreprise.

Ceci s’explique par des contingences historiques. Le dispositif antérieur au PERCO, le plan partenarial d’épargne salariale volontaire ne pouvait être mis en place qu’avec les organisations syndicales. Dès la création du PERCO, il a été possible de mettre en place ce plan par accord avec le comité d’entreprise. Enfin, dans le cadre de la loi du 3 décembre 2008, une « banalisation » du PERCO a été décidée en permettant sa mise en place unilatérale.

Mais l’entreprise d’harmonisation n’a pas été poussée jusqu’à son terme dans la mesure où il n’a pas été prévu de permettre la mise en place du PERCO via la ratification avec le personnel lorsque l’entreprise ne dispose pas de délégué d’entreprise ni de comité d’entreprise.

Cette situation est insatisfaisante dans la mesure où elle prive certaines entreprises, notamment les plus petites, de la possibilité de mettre en place un PERCO.

64. Description des objectifs poursuivis

Dans un souci d’harmonisation et afin de répondre aux demandes des petites et moyennes entreprises, il est proposé d’autoriser la mise en place des plans d'épargne pour la retraite collectif (PERCO) par ratification aux deux tiers des salariés, lorsqu’il n’existe pas de délégué syndical ou de comité d’entreprise.

65. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure permettra de favoriser la mise en place de PERCO, notamment dans les petites et moyennes entreprises.

Article 39

Alignement des quotas de jours transférables vers un PERCO selon qu’ils proviennent d’un CET ou de jours de repos non pris en l’absence de CET

66. État des lieux

Si l’accord instituant le dispositif du compte épargne-temps le prévoit, le salarié peut utiliser tout ou partie de ses droits pour alimenter un plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO). Les droits inscrits sur un compte épargne-temps qui sont utilisés, à compter du 22 août 2008, pour alimenter un PERCO sont exonérés d’impôt sur le revenu, dans la limite de dix jours par an.

Ces droits « compte épargne-temps » bénéficient également, dans la limite d’un plafond de dix jours par an, d’une exonération des cotisations patronales et salariales de sécurité sociale dues au titre des assurances sociales et des allocations familiales. La contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et les autres cotisations et contributions assises sur les salaires restent dues (cotisations d’assurance chômage, contributions FNAL et VT).

Ces droits ainsi utilisés ne rentrent pas dans le plafond de versement du quart de la rémunération brute.

En revanche, en l’absence de compte épargne temps dans l’entreprise, le salarié peut, dans la limite de 5 jours par an, verser les sommes correspondant à des jours de repos non pris sur le PERCO. Ces 5 jours, monétisés, bénéficient des mêmes avantages fiscaux et sociaux que les 10 jours issus du compte épargne temps (CET). Toutefois ces derniers sont pris en compte pour l’appréciation du plafond de versement du quart de la rémunération brute.

67. Description des objectifs poursuivis

La nouvelle disposition met fin à une différence de traitement entre salariés disposant d’un compte épargne temps et ceux n’en disposant pas. Il autorise les salariés ne disposant pas de CET à verser l’équivalent de dix jours de congés non pris dans un PERCO, au lieu de cinq jours actuellement. Ce transfert devra se faire dans le respect des règles tenant à la durée minimale de congés devant nécessairement être pris sous forme de repos. Par ailleurs, il est proposé que ces jours de congés non-inscrits et versés sur le PERCO ne soient pas pris en compte pour l’appréciation du plafond de versement du quart de la rémunération brute, à l’instar de ce qui est prévu pour les droits CET versés sur le PERCO.

68. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Sur l’ensemble des salariés du secteur concurrentiel, 12 % disposent d’un compte épargne temps : 32 % parmi les salariés au forfait en jour, 10 % parmi les autres. Quel que soit le secteur d’activité, les ingénieurs et cadres sont plus fréquemment concernés : un quart d’entre eux est titulaire d’un CET, contre 15 % des techniciens et agents de maîtrise et 7 % des employés et ouvriers. Les salariés des secteurs financier, de l’immobilier, de l’industrie ou des transports sont les plus fréquemment titulaires d’un CET. Les ingénieurs et cadres de ces secteurs sont particulièrement concernés (33 % en sont titulaires), mais aussi les employés des secteurs financier et immobilier (23 %) et les ouvriers et employés de l’industrie (11 %)187.

En outre, 70 % des salariés de grandes entreprises (plus de 1000 salariés) ont accès à un CET, contre seulement 33 % chez les moins de 500 salariés188.

Par ailleurs, près de 20 % de l’ensemble des salariés ont accès à un PERCO et, sur ces salariés, plus de 60 % y ont effectué un versement en 2012189 .

À la lecture de ces données statistiques, il apparaît donc que ce sont majoritairement les salariés non cadres et/ou travaillant dans les PME qui n’ont pas accès à un CET. Les salariés des PME et des ETI sont donc pénalisés à deux titres : ils ne bénéficient pas des fonctionnalités du CET et n’ont accès qu’à une version dégradée de la passerelle CET-PERCO.

En mettant fin à cette différence de traitement, la mesure proposée permet de favoriser l’alimentation du PERCO.

La mesure proposée se traduira par une perte de recettes fiscales et sociales, a priori d’ampleur limitée en raison des critères retenus. Elle concernera en effet les salariés des entreprises bénéficiant d’un PERCO mais n’ayant pas accès à un CET. Les salariés concernés par cette mesure sont principalement employés dans des PME (moins de 250 salariés), dans lesquelles l’existence d’un CET est peu répandue. Or, on estime que dans ces PME, environ 6% seulement des salariés ont accès à un PERCO. De ce fait, le public concerné par la mesure sera donc très limité et l’impact sur les finances sociales faible.

Partant des hypothèses :

- que parmi les entreprises ayant un PERCO, 80 mettent en place un CET de 80% ;

- que 6 % des salariés dans les entreprises privées de moins de 250 salariés ont un PERCO ;

- que la moitié des salariés concernés ne modifiera pas son comportement et que ceux qui le modifient mettront en moyenne 2,5 jours supplémentaires sur le PERCO ;

l’assiette exonérée pourrait être estimée à environ 20 millions d’euros.

Article 40

Permettre aux salariés, au même titre que les autres signataires, de renégocier un accord d’intéressement comportant une clause de tacite reconduction

1. Etat des lieux

Un accord d'intéressement peut être renouvelé par tacite reconduction si l’accord d’origine le prévoit. Si aucune des parties habilitées à renégocier un accord d’intéressement (le chef d’entreprise ou son représentant ou pour les salariés, le délégué syndical, le salarié mandaté ou la majorité des membres salariés du comité d’entreprise) ne demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d’échéance de l’accord, l’accord est alors renouvelé par tacite reconduction pour une nouvelle période de trois ans, la durée de cette prolongation était implicite, vu le caractère triennal de l’intéressement. Toutefois la durée de cette prolongation n’est pas explicitée dans la loi. Le renouvellement est notifié par la partie la plus diligente à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE).

Un accord ratifié à la majorité des deux tiers des salariés peut prévoir une tacite reconduction. Cependant, lorsque l’accord a été ratifié à la majorité des deux tiers du personnel et que les salariés ne disposent pas d’un représentant, seul le chef d’entreprise peut demander la renégociation de l’accord.

La demande de renégociation interdit la tacite reconduction. Quelle que soit l’issue de la renégociation, la poursuite de l’intéressement dans l’entreprise nécessite un nouvel accord qui devra être négocié, conclu et déposé dans les conditions et délais de droit commun.

2. Description des objectifs poursuivis

Il est prévu que lorsqu’un accord d’intéressement ratifié à la majorité des deux tiers du personnel prévoit une clause de tacite reconduction, les salariés peuvent demander la renégociation de l’accord, ce qui n’est pas possible aujourd’hui. Seul l’employeur pouvait effectuer cette démarche, ce qui créait une asymétrie dommageable pour les salariés. Cette mesure permet d’assurer l’égalité entre l’employeur et le salarié.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Dans les entreprises de moins de 50 salariés, 90 % des accords d’intéressement sont conclus à la majorité des deux tiers des salariés. Selon les remontées effectuées auprès des DIRECCTE, on peut estimer à 10 % la part des accords d’intéressement qui comportent une clause de tacite reconduction, principalement dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

Cette mesure est donc très importante pour assurer la prise en compte de la volonté des salariés, mais aussi pour sécuriser l’employeur qui souhaite associer son personnel à une renégociation de l’accord.

Article 41

Conseils en propriété industrielle

69. État des lieux

Les conseils en propriété industrielle offrent des services en matière de conseil, d’assistance, de représentation des tiers en vue de l'obtention, du maintien, de l'exploitation ou de la défense des droits de propriété industrielle (brevets, dessins et modèles, marques). Le recours à la publicité et au démarchage par cette profession est strictement encadré par le code de la propriété intellectuelle.

D’autres professions, telles que les experts comptables et les avocats, connaissaient un encadrement strict de leurs règles en matière de publicité et de démarchage, voire une interdiction de recourir à ces modes de communications commerciales. Toutefois, leur réglementation a récemment été assouplie pour se conformer au droit européen.

Dans un arrêt préjudiciel du 5 avril 2011 (Aff. C-119/09, Société fiduciaire nationale d’expertise comptable c/ Ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique), la Cour de justice de l’Union européenne a estimé que le décret portant code de déontologie des experts comptables n’était pas conforme à la directive n°2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur en ce qui concerne les règles qui leur étaient applicables en matière de démarchage. Suite à cet arrêt, une décision du Conseil d'État du 22 juin 2011 a entériné l'autorisation du démarchage pour la profession d’expert-comptable. La réglementation a ensuite été modifiée par le décret n° 2012-432 du 30 mars 2012 relatif à l’exercice de l’activité d’expertise comptable.

La loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques a été modifiée par l’article 13 de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation afin d’autoriser les avocats à recourir à la publicité et à la sollicitation personnalisée.

Le code de la propriété intellectuelle comporte des dispositions qui limitent la possibilité pour les conseils en propriété industrielle de recourir à la publicité et au démarchage (articles L. 423-1,
R. 422-53, R. 423-2) :

- il leur est interdit de recourir à la publicité et au démarchage en vue de représenter des tiers, de donner des consultations ou de rédiger des actes en matière de droit de la propriété industrielle ;

- l'interdiction du démarchage ne s'étend pas aux offres de services effectuées, par voie postale, à destination de professionnels, mais elles doivent se limiter à la communication d'informations générales (informations sur le cabinet, son organisation, sur le droit de la propriété industrielle, etc.).

Par ailleurs, le code de la propriété intellectuelle prévoit des sanctions pénales obsolètes en cas de méconnaissance de ces dispositions, en renvoyant à l’article 5 de la loi n°72-1137 du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile.

70. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif de modifier l’article L. 423-1 du code de la propriété intellectuelle afin de supprimer les limitations apportées aux communications commerciales des conseils en propriété industrielle. Ces limitations constituent en effet des contraintes injustifiées et disproportionnées à l’exercice de leur activité. Les conseils en propriété industrielle seront désormais autorisés à recourir à la publicité et à la sollicitation personnalisée.

En outre, le projet de loi renvoie les modalités d’application à un décret en Conseil d’État qui précisera que le recours à la publicité et à la sollicitation personnalisée devra être respectueux de l’indépendance de la profession et ne pas induire le client en erreur.

71. Options possibles et nécessité de légiférer

La mesure modifie l’article L. 423-1 du code la propriété intellectuelle qui interdit certaines formes de communications commerciales aux conseils en propriété industrielle. L’objectif est de permettre à cette profession réglementée de recourir à la publicité et au démarchage. Le principe est ainsi posé au niveau de la loi. Les modalités d’encadrement sont renvoyées au niveau réglementaire.

72. Impacts des dispositions envisagées

Les dispositions relatives au recours à la publicité et au démarchage permettront aux conseils en propriété industrielle d’élargir leurs offres de service et de développer leurs activités de conseil auprès des entreprises innovantes et des inventeurs indépendants en les guidant dans leur stratégie de protection et de défense de leurs actifs immatériels.

Les conseils en propriété industrielle resteront toutefois soumis à des règles strictes en matière d’affichage de prix puisqu’ils ont l’obligation d’établir un barème indicatif du montant de leurs honoraires, distincts des remboursements de frais et de redevances des titres de propriété industrielle (brevets, marques, dessins et modèles). Le détail de toutes ces charges doit être communiqué à toute personne qui en fait la demande (article R. 422-53 du code de la propriété intellectuelle).

Les dispositions du projet de loi relatives aux communications commerciales des conseils en propriété industrielle sont conformes à l’article 24 de la directive n°2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur ainsi qu’à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.

73. Consultations menées

La Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle a indiqué à l’administration être favorable à la suppression des limitations à la publicité et au démarchage, notamment pour s’aligner sur la nouvelle réglementation applicable aux avocats. L’assemblée générale de la CNCPI a en effet adopté le 17 mars 2014 un projet de modification de son règlement intérieur tenant compte de cette suppression. Cependant, ce règlement intérieur modifié ne peut entrer en vigueur que si les dispositions législatives et réglementaires du code de la propriété intellectuelle sont elles-mêmes modifiées.

74. Textes d’application et outre-mer

Le projet de loi renvoie les modalités d’application à un décret en Conseil d’État qui précisera que le recours à la publicité et à la sollicitation personnalisée devra être respectueux de l’indépendance de la profession et ne pas induire le client en erreur.

Article 42

Valorisation à l’international de l’expertise hospitalière française

75. État des lieux

Les centres hospitalo-universitaires ne disposent pas actuellement de dispositifs appropriés leur permettant de valoriser leur expertise dans deux domaines à fort potentiel de développement que sont l’offre d’expertise à l’international et la valorisation industrielle et commerciale des résultats de la recherche.

L’article L. 6141-1 du code de la santé publique, qui dispose que l’objet principal des établissements publics de santé n’est « ni industriel, ni commercial » est en effet insuffisant pour autoriser ces établissements publics à prendre des participations dans des sociétés ou à créer des filiales pour développer cette expertise. Par ailleurs, si l’article L. 6145-7 du code de la santé publique autorise les établissements publics de santé à assurer à titre subsidiaire des prestations de service et à valoriser les activités de recherche, l’article R 6145-48 interdit de recruter spécifiquement des personnels pour assurer ces prestations, celles-ci devant être assurées à moyens constants.

Ainsi, dans le domaine de l’expertise à l’internationale, l’inadaptation des règles actuelles est un frein en termes d’efficience de l’offre française, alors même que la concurrence est principalement internationale. A titre d’exemple, l’expérience par l’AP-HP lors de la réponse à un appel d’offre algérien pour la construction d’un CHU à Constantine a souligné le caractère profondément inadapté du cadre juridique actuel. L’AP-HP n’a pas pu émettre certaines clauses de garanties demandée par les algériens, comme une garantie bancaire, alors même qu’elles font parties des relations contractuelles de base sur les marchés internationaux. En raison de son statut d’établissement public, elle n’a pas pu faire d’offres sur des prestations de gestion (mise à dispositions temporaire de personnels d’encadrement, gestion financière..). A la différence de ses partenaires privés dans le cadre du consortium constitué pour l’occasion, elle n’est pas autorisée à disposer d’une structure juridique en Algérie, alors même qu’un tel bureau, outre d’évidentes facilités matérielles, aurait permis de bénéficier d’une fiscalité plus avantageuse (taux d’imposition de 19% sur les bénéfices contre une retenue à la source de 24% sur le chiffre d’affaires).

De nombreux acteurs étrangers se sont positionnés dans le domaine de l’expertise hospitalière. John Hopkins international et Harvard Médical International ont plusieurs contrats de gestion ou de partenariat, tout comme la Mayo Clinic ou le New York Presbytarian Hospital. La Cleveland Clinic a également construit récemment un hôpital à Abu Dhabi. En Allemagne, plusieurs structures sont présentes à l’international : Freiburg University, Medical center, University Medical Center Eppendorf, Vivantes, filiale de la Charité à Berlin.

D’autres pays se sont récemment investis sur ce secteur en développement : la Turquie, la Corée du Sud avec les sociétés DAIWO et HYUDAI, l’Autriche avec VAMED (équipement et gestion), la Grande Bretagne avec l’International Hospital Group qui a obtenu le marché de d’un CHU en Algérie, ou l’Italie, dont le plus gros hôpital privé, le San Rafaele allié au cabinet Rizzani est également chargé d’un CHU en Algérie.

L’expertise hospitalière française, qui est unanimement reconnue, doit pouvoir se positionner sur ce marché en pleine croissance avec un cadre juridique adapté.

Or, l’application des règles de la comptabilité publique rend plus complexe la mise en place du projet : difficulté pour ouvrir un compte en monnaie locale, nécessité d’ouvrir une régie avec l’ensemble des contraintes associées. Par ailleurs, malgré un soutien affirmé des tutelles, le recrutement de personnels dédiés sur ce projet est fragilisé par la nécessité de le mener « à moyens constants », conformément à l’article R. 6145-48 du code de la santé publique. Ainsi, les structures internes de valorisation de la recherche créées par les centres hospitalo- universitaires souffre d’un manque de souplesse de gestion et de difficultés de recrutement de professionnels spécialisés, difficultés qui constituent un frein au développement de leur activité. Or cette possibilité est ouverte aux organismes de recherche (INSERM, CNRS) et aux universités depuis la loi sur la recherche et l’innovation de 1999. Ces derniers ont créés des filiales (INSERM Transfert, FIST, sociétés d’activités industrielles et commerciales puis société d’accélération du transfert de technologie-SATT depuis le programme d’investissement d’avenir, IRCADE à l’université de Strasbourg) dédiés à la valorisation de la recherche et de l’innovation.

Cette inadaptation des règles juridiques actuelles se retrouve dans le domaine de la valorisation des brevets. La valorisation de la recherche est source de ressources financières, avec un retour sur investissement plus court lorsqu’il s’agit d’innovation en « amont » issues des laboratoires de recherche nécessitant plus de fond de maturation. A titre d’exemple, l’Office de transfert de technologie et de partenariats industriels, structure interne créée par l’AP-HP en 2000, a généré plus de 25 millions d’euros annuels répartis entre recettes directes d’exploitation, de produits pharmaceutiques, de brevets et de savoir-faire et de partenariat industriel, et a contribué à créer plus de 60 jeunes entreprises innovantes, malgré un cadre juridique contraignant.

Enfin, alors que les membres concernés des ComUE ont pu en devenir actionnaires, les CHU n’ont pu entrer au capital des SATT. La création de filiales permettrait aux CHU de bénéficier d’une souplesse de gestion dans des secteurs où les autres intervenants, qu’ils soient français ou étrangers, ne sont pas soumis au code des marchés publics et aux règles de la comptabilité publique. Elle permettrait également de professionnaliser le recrutement, gage de compétitivité, dans des secteurs par nature très spécialisés. La création de filiales permettrait de renforcer la politique de protection et de valorisation des innovations, de création de jeunes entreprises innovantes, de participation à ces activités, associée aux acteurs régionaux d’ores et déjà structurés et leur donnerait une meilleure lisibilité internationale.

76. Description des objectifs poursuivis

Ces nouvelles dispositions permettront aux plus gros CHU de développer leur offre d’expertise à l’international. Elles prévoient par ailleurs un encadrement strict des conditions de création des filiales (délibération du conseil de surveillance, contrôle du directeur général de l’ARS), qui seront précisées par décret en Conseil d’État.

Les expertises envisagées concernent principalement les champs suivants :

Formations cliniques médicales et paramédicales : base de protocoles de soins, second avis médical, savoir-faire sur les protocoles et gestes cliniques, programme de formation initiale des médecins et formation continue, savoir-faire paramédical ;

Définition de la stratégie d’un hôpital : conception d’une stratégie hospitalo-universitaire, positionnement de l’hôpital dans son territoire, stratégie de financement et business plan, élaboration du projet médical et de capacités cibles ;

Organisation des flux : SAMU, urgences, consultations, blocs opératoires, laboratoires, circuit du médicament, brancardage, imagerie… ;

Organisation biomédicale : stérilisation, ingénierie biomédicale ;

Systèmes d’information : aide à la définition de la stratégie SI, organisation et déploiement de projets multi-sites

Gestion immobilière : support à la définition d’un projet immobilier neuf ou en rénovation, support au pilotage de la construction (Maîtrise d’ouvrage)

Services hôteliers et logistiques : restauration, blanchisserie, développement durable, transports ;

Achats (médicament, équipement médical) : organisation et processus, formation spécifiques des acheteurs à l’hôpital, évaluation du potentiel d’économies ;

Ressources humaines : fiches de postes, recrutement, formation continue ;

Gestion financière et codage : audit et gestion performance, gestion du financement, chaîne de facturation ;

Les pays susceptibles d’exprimer des besoins dans ces domaines sont très divers. A titre d’exemple, l’AP-HP est actuellement sollicitée par l’Algérie, le Bahreïn, le Brésil, Oman, le Vietnam, le Liban, les Emirats arabes unis, le Mexique et le Paraguay.

Certains gros projets pourraient se faire en partenariat avec d’autres établissements de santé, français ou étrangers, par le biais le cas échéant de prise de participations dans des sociétés communes qui auraient vocation à gérer le projet. S’agissant de la valorisation de la recherche, la possibilité ou de créer des filiales permettra un maillage indispensable avec les SATT et les filiales privées de valorisation existante. Ce dispositif permettra également de soutenir les jeunes entreprises créées en prenant une participation à leur capital social.

77. Options possibles et nécessité de légiférer

Ce dispositif relève à l’évidence du domaine législatif : modification des règles d’organisation des établissements publics de santé, des compétences du conseil de surveillance et du directeur général, qui figurent dans la partie législative du code de la santé publique.

Le dispositif retenu s’inspire de l’article L. 711-1 du code de l’éducation, applicable aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, qui dispose que « dans le cadre des missions qui leur sont dévolues par le présent code et afin de faire connaître leurs réalisations, tant sur le plan national qu'international, ces établissements peuvent assurer, par voie de convention approuvée par le conseil d'administration dans les conditions fixées aux articles L. 712-3, L. 715-2, L. 716-1, L. 717-1 et L. 718-1, des prestations de services à titre onéreux, exploiter des brevets et licences et commercialiser les produits de leurs activités. Ils peuvent créer à cette fin des services d'activités industrielles et commerciales, dans les conditions prévues à l'article L. 123-5. Ils peuvent prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ».

Il complète l’article L. 6145-7 du code de la santé publique, qui autorise les établissements publics de santé à assurer à titre subsidiaire des prestations de service, à valoriser les activités de recherche et leurs résultats et à exploiter des brevets et des licences, afin d’autoriser les centres hospitalo-universitaires, qui ont vocation à développer ce type d’activité, à prendre également des participations et à créer des filiales pour développer leur offre d’expertise à l’étranger et valoriser leurs brevets.

La création de filiales sera soumise à la délibération du conseil de surveillance (article L. 6143-1 du code de la santé publique) par le directeur général du CHU (article L. 6143-4 du code de la santé publique) et la décision de création ne sera exécutoire que si le directeur général de l’ARS ne s’y oppose pas dans les deux mois.

78. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Ce dispositif permettra d’augmenter les recettes des CHU, dans un contexte où la contrainte financière qui pèse sur eux est forte. Seuls quelques CHU devraient être concernés.

Il contribuera également au renforcement de la présence française à l’étranger, dans un domaine où l’expertise française est incontestable.

Le développement de cette offre d’expertise aura par ailleurs un effet d’entraînement sur d’autres secteurs d’activité, comme le bâtiment, les contrats internationaux comportant souvent un volet immobilier important ou l’équipement très classiquement demandé dans les offres « clés en main ».

79. Textes d’application et outre-mer

Les conditions d’application seront fixées par le décret mentionné au dernier alinéa de l’article
L. 6145 7 du code de la santé publique.

CHAPITRE II –ENTREPRISES A PARTICIPATION PUBLIQUE

Section 1 – Articles 43 et 44

Habilitation à compléter l’ordonnance n° 2014-948 et action spécifique

Sections 2 à 4 - Articles 45 à 53

Simplification du cadre juridique de l’intervention de l’État et autorisations d’opérations sur le capital de sociétés à participation publique

80. Objectifs poursuivis

D’une manière générale, les objectifs poursuivis par le chapitre 2 du titre 2 du présent projet de loi sont de :

- sécuriser le cadre juridique de la gouvernance et des opérations sur le capital des sociétés à participation publique,

- favoriser une intervention plus efficace de l’État actionnaire dans les sociétés à participation publique et, enfin,

- permettre à l’État de réaliser des opérations favorisant le développement de sociétés à participation publique ou permettant de dégager des fonds pouvant être réutilisés pour de nouvelles acquisitions ou pour le désendettement.

Le présent projet de loi vise à :

- ratifier l’ordonnance n° 2014-948 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique et à compléter et corriger les dispositions de l’ordonnance du 20 août 2014 susvisée, afin d’améliorer l’efficacité et la cohérence de ces dispositions ; mettre en cohérence certaines dispositions de cette ordonnance avec celles du code général des impôts, du code de commerce et de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et préciser les règles applicables aux participations des collectivités territoriales au capital des sociétés commerciales en veillant à garantir la protection des intérêts publics (article 43).

- compléter l’effort de simplification et de modernisation du cadre juridique de l’État actionnaire en revoyant la composition de la Commission des participations et des transferts (article 45) et l’arsenal juridique des offres réservées aux salariés (article 50),

- intégrer dans un texte législatif unique les dispositions relatives à l’État actionnaire contenues dans d’autres textes tout en veillant à la compatibilité de ce dispositif avec le droit européen et le droit constitutionnel,

- permettre la réalisation d’opérations de cession de titres conformément aux annonces du ministre en charge de l’économie (articles 47 et 49).

81. État des lieux

Les articles 49 à 55 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) encadrent l’exercice de la liberté d’établissement, tandis que les articles 63 à 66 TFUE régissent la libre circulation des capitaux. En vertu de ces dispositions, toutes les restrictions à ces libertés sont interdites, entre les États membres et, pour les mouvements de capitaux, également entre les États membres et les pays tiers.

Si les articles précités s’opposent à toutes entraves, le Traité (articles 52 § 1 et 65 § 1, sous b) prévoit cependant que peuvent être admises des « mesures justifiées par des motifs liés à l’ordre public ou à la sécurité publique ». En outre, la Cour applique la théorie jurisprudentielle des raisons impérieuses d’intérêt général dès lors que les entraves ne sont pas discriminatoires ou indirectement discriminatoires.

Des États membres ont donc mis en place des mécanismes d’actions spécifiques leur permettant de conserver un certain contrôle sur les entreprises privatisées, dans des secteurs majeurs ou stratégiquement sensibles. Ces droits préférentiels sont susceptibles de constituer une atteinte aux libertés fondamentales reconnues par le traité, dont la libre circulation des capitaux et la liberté d’établissement dans la mesure où ils sont susceptibles d’entraver ou rendre moins attrayants les investissements directs des opérateurs des autres États membres. Ils ne sont toutefois pas condamnés en eux-mêmes.

La Cour de justice de l’Union européenne exige le respect de quatre conditions cumulatives.

La Cour de justice s’assure que les droits spéciaux ne confèrent pas aux autorités nationales un pouvoir potentiel de discrimination susceptible d’être utilisé de manière arbitraire, en violation des dispositions du traité. Ainsi, les dérogations doivent respecter quatre conditions, cumulatives :

- mesure ou procédure non discriminatoire ;

- justifiée par l’ordre public, la sécurité publique ou des raisons impérieuses d’intérêt général ;

- propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi ;

- proportionnée à ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

La mesure doit être justifiée par des raisons d’ordre public, de santé publique, de sécurité publique ou des raisons impérieuses d’intérêt général.

Lorsqu’un État institue un régime d’actions spécifiques par voie législative ou réglementaire, les mesures doivent pouvoir se justifier par des motifs prévus par le traité (ordre public et sécurité publique) ou par des raisons impérieuses d’intérêt général. En effet, la Cour de justice admet que dans certains cas les États membres doivent pouvoir conserver « une certaine influence dans les entreprises initialement publiques et ultérieurement privatisées, lorsque ces entreprises agissent dans les domaines des services d’intérêt général ou stratégique ». Cependant, elle vérifie systématiquement les justifications invoquées.

Enfin, la Cour de justice rappelle que les exigences de la sécurité publique doivent être entendues strictement et que ce motif ne saurait être invoqué « qu'en cas de menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société ». Elle a ainsi jugé que la sécurité d’approvisionnement en énergie , ou la disponibilité du réseau de télécommunications et des services d’électricité peuvent correspondre à des exigences de la sécurité publique en cas de crise, de guerre ou de terrorisme, pouvant justifier une entrave aux libertés fondamentales de circulation des capitaux, des services et d’établissement. Toutefois, les États doivent préciser en quoi la détention de « golden shares » permet d’éviter l’atteinte à la sécurité publique. La mesure doit être nécessaire et proportionnée au but poursuivi.

S’agissant de la portée de l’article 44 du projet de loi, ses dispositions organisent une gradation dans les droits attachés à l’action spécifique en distinguant suivant la nature des intérêts que ce mécanisme vise à protéger. Le dispositif le plus contraignant se trouve limité au secteur de la défense. Les décrets créant sur le fondement de ces dispositions des actions spécifiques pourront, au cas par cas, faire le tri entre les prorogatives prévues par la loi.

Il convient de noter qu’aucun contentieux spécifique au secteur de la défense en matière de droits spéciaux n’a à ce jour été jugé par la Cour de justice.

Le champ d’application de la mesure pour le secteur de la défense s’entend des entreprises dont l’activité relève des intérêts essentiels de la défense nationale au sens de l’article 346 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » qui prévoit dans son § 1 b) que « tout État membre peut prendre les mesures qu’il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d’armes, de munitions et de matériel de guerre ».

Les droits attachés à l’action spécifique en cas d’acquisition de participations en méconnaissance des seuils fixés sont progressifs et se traduisent en premier lieu– comme pour l’action spécifique pouvant être mise en œuvre dans d’autres secteurs économiques stratégiques que celui de la défense– par une privation des droits de vote.

À l’issue d’un délai de trois mois suivant la privation des droits de vote – délai qui s’impose à l’administration – le dispositif de l’action spécifique, pour des entreprises dont l’activité relève des intérêts essentiels de la défense nationale au sens de l’article 346 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, est complété par un mécanisme de vente forcée.

81.1. Rectification de dispositions de la loi visant à reconquérir l’économie réelle

Concernant la rectification de dispositions résultant de la loi visant à reconquérir l’économie réelle, elles sont au nombre de deux :

- Applicabilité de l’exemption transitoire à l’obligation de déposer une offre publique du fait de l’attribution de droits de vote double

Le V de l’article 7 de la loi (article transitoire et non codifié) prévoit un nouveau dispositif de dérogation temporaire à l’obligation de déposer une offre, pour les actionnaires qui passeraient en-deçà du seuil de 30 % des droits de vote avant de revenir au-delà grâce à l’attribution de droits de vote double, tout en restant en-deçà du pourcentage de droits de vote détenus à la date d’entrée en vigueur de l’article (le 2 avril 2014). Toutefois, telle que rédigée, la loi prévoit que cette dérogation n’est valable que les deux années qui suivent son entrée en vigueur. Or, les droits de vote double ne sont acquis qu’à l'expiration d’un délai de deux ans à compter de son entrée en vigueur, de sorte que la dérogation prévue ne peut s'appliquer.

Par ailleurs, cette disposition prend en compte le cas d’une obligation de déposer une offre en raison du franchissement du seuil de 30 % mais n’intègre pas la situation de dérogation en cas de franchissement du seuil de l’excès de vitesse, de sorte qu’il n’est pas certain à ce jour qu’elle puisse s’appliquer à d’autres situations que celle d’un actionnaire entre 30 et 31 % de détention du capital ou des droits de vote, qui franchirait à la baisse le seuil de 30 %, puis à nouveau à la hausse du fait de l’attribution de droits de vote double, tout en demeurant finalement sous le pourcentage de droits de vote détenu au 2 avril 2014.

Il est donc proposer d’élargir le délai d’application de cette disposition transitoire de sorte qu’elle puisse effectivement s’appliquer. Il est proposé de fixer la limite au 31 décembre 2018.

C’est l’objet de l’article 52.

- Application du nouveau principe de caducité en cas d’excès de vitesse

La première difficulté résulte du 5ème alinéa de l’article 5 de la loi visant à reconquérir l’économie réelle, concernant la suppression des droits de vote pour l’initiateur d’une offre publique, du fait de l’excès de vitesse, devenue caduque.

Le 2 du II de l'article L.433-1-2 du code monétaire et financier prévoit que cet initiateur, si sa détention préalablement à la situation d'offre obligatoire était comprise entre 30 et 50 % du capital ou des droits de vote, est privé des droits de vote attachés aux actions pour la fraction excédant le nombre d'actions qu'il détenait « préalablement au dépôt du projet d'offre » augmenté de 1 % du capital ou des droits de vote.

Or, la privation des droits de vote devrait porter sur la fraction excédant le nombre d'actions qu'il détenait préalablement à la situation d'offre obligatoire de sorte que ce dispositif soit cohérent avec l'objectif de cette disposition consistant à limiter l'emprise d'un actionnaire qui, à l'issue de son offre publique, n'a pas atteint la majorité du capital ou des droits de vote de la société concernée.

Par exemple dans le cas d’un initiateur qui dispose de 35 % du capital et des droits de vote d’une société qui réalise l’achat d’un bloc de 5 % et atteint ainsi 40 %, il doit donc déposer une offre du fait du dépassement du seuil d’excès de vitesse. S’il n’atteint que 45 % du capital de la cible à l’issue de l’offre, elle devient caduque. Selon les termes de la loi, l’initiateur reviendra alors à 40 % de capital (i.e. nombre d’actions détenues « préalablement au dépôt du projet d’offre »), alors que la volonté du législateur était qu’il revienne à 36 % - c’est-à-dire à sa détention initiale augmentée d’un pourcent qui correspond à l’excès de vitesse, seuil dont le dépassement constitue le fait générateur de l’obligation de dépôt du projet d’offre publique.

Cette rectification permet ainsi de rétablir l’égalité des actionnaires initiateurs d’une offre, qui se trouvaient dans des situations différentes, dans le cas d’une offre devenue caduque.

L’objet de l’article 53 est de corriger cette erreur.

81.2. Transferts de capital

Concernant plus particulièrement les projets de privatisation, ils sont au nombre de trois : les sociétés GIAT Industrie, Aéroport de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon.

81.2.1. Transfert de la majorité du capital de GIAT Industries et de ses filiales au secteur privé

81.2.1.1. Les évolutions successives du GIAT

Le Groupement Industriel des Armements Terrestres (GIAT) était à l’origine un service du ministère de la défense, créé en 1971, pour distinguer les missions industrielles de fabrication de matériels militaires terrestres des missions étatiques de conduite des programmes d’armement relevant quant à elles des attributions de la Direction des Armements Terrestres. Afin de bénéficier d’une plus grande souplesse de gestion, le GIAT est devenu, à effet du 1er juillet 1990, une société nationale dénommée GIAT Industries, en application de la loi n° 89-924 du 23 décembre 1989 autorisant le transfert à une société nationale des établissements industriels dépendant du GIAT.

Dans le cadre de ce changement de statut, un dispositif spécifique de transfert des personnels du GIAT a été prévu par la loi n° 89-924. Les militaires et les fonctionnaires ont eu la possibilité d’obtenir un détachement, une mise à disposition ou une disponibilité au sein de la société nationale ainsi créée. Quant à eux, les personnels relevant du statut des ouvriers des établissements industriels de l’État ont eu le choix entre deux formules : (i) être employés par la nouvelle société sous le régime commun du droit du travail ou (ii) être placés sous un régime spécifique leur permettant de continuer à bénéficier des mêmes dispositions (droits et obligations) que sous leur ancien statut d’ouvrier d’État.

La société nationale GIAT Industries a engagé en 2004 un processus d’adaptation et de réforme de son organisation opérationnelle et de son périmètre organique (le projet « GIAT 2006 ») en concentrant ses activités formant son cœur de métier dans une nouvelle structure, communément appelé « Groupe Nexter » articulée autour d’une société nouvellement créée, Nexter Systems SA, à la fois société opérationnelle dans le domaine des systèmes blindés/artillerie/armement et maison mère du Groupe Nexter, groupe qui réunit outre Nexter Systems, des filiales spécialisées par secteurs d’activité et segments (munitions, équipements). Née de cette restructuration, et filiale détenue à 99,99 % par GIAT Industries, la société Nexter Systems SA a vu le jour le 1er décembre 2006.

Là encore, le législateur a fait le choix d’un maintien des différents statuts de personnels existant en permettant le transfert de l’ensemble des personnels auprès des filiales de GIAT Industries, en application de l’article 52 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, modifiant l’article 6 de la loi n° 89-924.

Par ailleurs, depuis décembre 2013, GIAT Industries détient également SNPE, suite à la cession réalisée par l’État. Filiale à 100 % de SNPE, la société Eurenco SA regroupe les activités (poudres, explosifs, chimie de spécialité et additifs pétroliers) demeurés dans SNPE après qu’eurent été cédés au groupe SAFRAN d’autres actifs du secteur de la propulsion solide ensuite réunis au sein d’Herakles, filiale de SAFRAN.

Par ailleurs, GIAT Industries détient une participation minoritaire de 22,68 % du capital dans MNR Groupe SA dont l’actif principal est constitué de la société Manurhin Equipment, constructeur de machines-outils spécialisées. Cette entrée de GIAT Industries au capital de MNR Groupe est intervenue en 2011.

Ainsi, GIAT Industries compte désormais deux filiales contrôlées respectivement à 99,99 % et à 100 %, Nexter Systems SA et SNPE, et détient une participation de 22,68 % dans MNR Groupe SA.

81.2.1.2. La nécessaire évolution de Nexter Systems SA dans un contexte budgétaire européen particulièrement contraint

Le domaine d'activité de Nexter Systems SA s'étend à la fourniture de systèmes de combat terrestre et de munitions pour les armées françaises et étrangères. Ses principaux sites industriels sont à Versailles, Roanne et Bourges pour le secteur d’activité « Systèmes » et à La Chapelle-Saint-Ursin, Bourges et Tarbes pour le secteur d’activité « Munitions ». D’autres sites industriels de dimension moins importante, relevant tous du secteur d’activité « Equipement », sont situés à Rennes, Saint-Chamond, Saint-Etienne, Toulouse et Tulle. Le groupe Nexter est également présent en Arabie Saoudite, aux Emirats Arabes Unis et en Inde, au travers d’implantations commerciales ou de services de soutien-client. En 2013 elle employait environ 2 800 personnes pour un chiffre d'affaires consolidé proche de 800 M€. L’acquisition en 2014 des sociétés munitionnaires Mecar SA et Simmel Difesa SpA (dont le chiffre d’affaires combiné était de 185 M€ en 2013 avec un total de près de 600 employés) étend son empreinte industrielle à la Belgique et l’Italie.

La gamme de produits actuellement proposés par le Groupe Nexter est notamment composée de véhicules multi-missions ARAVIS et TITUS, de véhicules de combat VBCI, de systèmes d'artillerie CAESAR, TRAJAN et 105 LG, de munitions de moyen et gros calibres conventionnelles, « intelligentes » ou « insensibles », et de services clients, de soutien et de revalorisation (cf. parc de chars Leclerc).

Compte tenu de la réduction des budgets de défense au sein de l’Union européenne, l’industrie d’armement terrestre européenne doit désormais, plus que jamais, chercher à l’export, auprès d’une clientèle élargie, les moyens d’assurer son développement. Cette nécessité accrue intervient à un moment où la concurrence est avivée par l’arrivée concomitante, sur les mêmes marchés tiers, des industries nord-américaines et des pays émergents, à la recherche de relais de croissance. Dans ce contexte, les acteurs voulant conserver une offre globale dans le secteur terrestre doivent atteindre une taille critique leur permettant d’investir et d’augmenter leur compétitivité.

Dans ce contexte, le projet de création d’un leader européen de l’armement terrestre, capable de faire jeu égal avec les plus grands acteurs mondiaux du secteur s’est fait jour. Ce leader serait constitué par l’union à parité des deux grands groupes européens que sont le français Nexter Systems et l’allemand Krauss-Maffei Wegmann (KMW).

KMW est leader des armements terrestres en Allemagne. Ses principaux sites sont à Munich et Kassel en Allemagne mais l’entreprise est également présente en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Grèce, en Turquie, aux États-Unis, au Mexique, au Brésil et à Singapour. Le groupe KMW emploie environ 3 100 personnes dans le monde (dont environ 2 700 en Allemagne) et réalise un chiffre d’affaires consolidé de 800 M€ par an environ.

Il est ainsi proposé qu’une nouvelle structure soit créée, détenue à parts égales par l’État français, via GIAT Industries, et par la famille Wegmann (via sa société de participations), cette structure détenant elle-même Nexter Systems à hauteur de 99,99 % et KMW à hauteur de 100 %. Le Gouvernement instituera également une action spécifique au capital de Nexter Systems afin d’assurer la protection des intérêts essentiels de l’État.

Ce projet implique que l’État cesse de détenir le plein contrôle sur Nexter Systems pour, à l’avenir, le partager à parité avec la famille Wegmann au travers de la nouvelle structure qui donnera également la parité de contrôle sur KMW. La mise en œuvre du projet nécessite donc, au préalable, de faire sortir Nexter Systems du secteur public au sens de sa définition stricte. Or, en application de l’article 22-V-b) et 22-I de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, une autorisation législative est nécessaire pour procéder au transfert de la majorité du capital au secteur privé.

Ce projet pose également la question du maintien des statuts des personnels (militaires, fonctionnaires et ouvriers sous décret) de Nexter Systems et de ses filiales françaises au sein de l’entreprise une fois celle-ci privatisée.

En permettant la constitution d’un leader européen de l’armement terrestre tel qu’envisagé dans le diagnostic ci-avant, la sortie de Nexter Systems du secteur public répond aux objectifs suivants :

- assurer la pérennité de la société Nexter Systems autour d’une gamme élargie de produits, de compétences et de savoir-faire ;

- élargir l’empreinte géographique à l’export de manière à diminuer la dépendance aux marchés occidentaux dont les budgets de dépense d’armement sont atones ;

- disposer de la taille critique suffisante pour être en mesure d’investir sur l’ensemble de la gamme de produits de la société et d’assurer son développement dans la durée ;

- pérenniser notre base industrielle et technologique de défense ;

- renforcer l’Europe de la Défense dans le domaine industriel ;

- répondre à l’objectif de consolidation européenne tel que le Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale (2013) l’a défini de manière à renforcer l’Europe de la Défense dans le domaine industriel.

Pour les employés de Nexter Systems SA et de ses filiales, la réalisation de ces objectifs permettra à l’entreprise d’augmenter sa résilience aux variations de la commande nationale, d’éviter les baisses de charges liées aux effets de cycle, et de les prémunir contre d’éventuelles restructurations.

L’opération de privatisation ne devra toutefois pas affecter le statut des militaires, fonctionnaires et ouvriers sous décret employés au sein de Nexter Systems SA et de ses filiales, des garanties législatives leur ayant été accordées lors des évolutions successives, en 1989 puis 2006, du groupe GIAT. En conséquence, et par cohérence avec les mesures prises précédemment, il est proposé au législateur de poursuivre une nouvelle fois l’objectif de maintenir ces statuts dans le cadre du transfert de Nexter Systems au secteur privé nécessaire à la mise en œuvre du projet « Nexter-KMW ».

81.2.1.3. L’évolution à venir de SNPE

SNPE est l’ancienne Société Nationale des Poudres et Explosifs. Sa cession par l’État à GIAT Industries a été réalisée en décembre 2013. Ses principales activités opérationnelles, la conception, production et commercialisation des poudres et explosifs, sont regroupées dans sa filiale Eurenco qui propose des produits énergétiques servant à la fabrication de têtes militaires et à la production de munitions et de dispositifs pyrotechniques à usage militaire ou industriel. Eurenco produit et commercialise également le NEH, un additif pour carburant. Eurenco emploie environ 1 000 personnes et réalise un chiffre d’affaires annuel d’environ 250 M€. Ses principaux sites sont Bergerac, Sorgues, Clermont (Belgique) et Karlskoga (Suède).

Ce périmètre a considérablement évolué ces dernières années, avec les cessions d’Isochem en 2010, SNPE Matériaux Energétiques en 2011 et du site de Vihtavuori en 2013. Avec ses actifs recentrés sur Eurenco, et une taille trop petite pour soutenir durablement sa gamme de produits et ses savoir-faire, SNPE est confrontée à deux possibilités :

- une intégration  « horizontale » – à l’échelle européenne – selon un schéma de rapprochement métier équivalent dans le secteur « Poudres, explosifs, chimie de spécialité », à celui négocié par Nexter Systems et KMW dans le secteur « Armements terrestres », ou

- une intégration « verticale », selon un schéma de filière, SNPE se rapprochant d’un acteur munitionnaire.

L’acquisition du site finlandais de Vihtavuori par le munitionnaire scandinave Nammo AS annoncée au marché début 2014 illustre la tendance actuelle de verticalisation du marché européen des poudres et explosifs. Cette tendance s’explique en partie par les nouvelles munitions qui sont conçues de plus en plus souvent spécifiquement pour un emploi dans un système d’armes précis, avec des compositions énergétiques également spécifiquement conçues pour les munitions correspondantes. Le choix d’une poudre propulsive lors de la conception d’une nouvelle munition engageant le munitionnaire sur le long terme (10 à 20 ans) avec une substituabilité faible compte tenu des coûts de qualification d’une nouvelle poudre, la sécurisation de la relation entre le munitionnaire et le poudrier devient un enjeu stratégique à la fois pour le munitionnaire et pour le poudrier, qui ont dès lors un intérêt mutuel à se rapprocher.

Afin de lever les obstacles d’ordre législatif qui empêcheraient SNPE de saisir toutes les opportunités de consolidation industrielle de sa filiale Eurenco qui pourraient se présenter à elle à plus ou moins brève échéance, le transfert au secteur privé de SNPE doit être autorisé.

Cette société avait déjà été inscrite, par l’article 10 de la loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense, sur la liste des sociétés privatisables annexées la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 de privatisation. Or, suite à l’abrogation de la loi n° 93-923 par l’ordonnance n°2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, et en application de l’article 22-V-b) et 22-I de cette ordonnance, une nouvelle autorisation législative est nécessaire.

Les objectifs prioritaires recherchés pour SNPE et sa filiale opérationnelle Eurenco sont de :

- assurer la pérennité de la société autour d’une gamme élargie de produits, de compétences et de savoir-faire ;

- élargir la gamme de matériels couverts et l’empreinte géographique à l’export de manière à diminuer la dépendance aux marchés occidentaux dont les budgets de dépense de munitions sont atones ;

- disposer de la taille critique suffisante pour être en mesure d’investir sur l’ensemble de la gamme de produits de la société et d’assurer son développement dans la durée ;

- pérenniser notre base industrielle et technologique de défense.

81.2.2. Transfert de la majorité du capital des sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon au secteur privé

La loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports a permis de moderniser le cadre juridique des aéroports régionaux, notamment en permettant l’apport des concessions d’aérodromes relevant de la compétence de l’État, et dont la gestion était auparavant concédée à une chambre de commerce et d’industrie, à des sociétés dont le capital initial est détenue entièrement par des personnes publiques.

En application de cette loi, la concession des aéroports de Nice-Côte d’Azur et Cannes-Mandelieu a été apportée en juin 2008 , par la chambre de commerce et d’industrie de Nice Côte d’Azur, à la société Aéroports de la Côte d’Azur, dont l’actionnariat se compose à ce jour de l’État (60 %), la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Nice Côte d’Azur (25 %), la région Provence Alpes Côte d’Azur (5 %), le département des Alpes Maritimes (5 %) et la communauté d’agglomération de Nice Côte d’Azur (5 %).

De même, la concession des aéroports de Lyon-Saint Exupéry et Lyon-Bron a été apportée en mars 2007, par la CCI de Lyon, à la société Aéroports de Lyon, dont l’actionnariat se compose à ce jour de l’État (60 %), la chambre de commerce et d’industrie de Lyon (25 %), la région Rhône-Alpes (5 %), le département du Rhône (5 %) et la communauté urbaine de Lyon (5 %).

Les sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports et de Lyon exploitent ainsi les infrastructures aéroportuaires dont ils ont la charge dans le cadre de concessions avec l’État, dont les durées ont été allongées respectivement jusqu’en 2044 et 2047, conformément à loi de 2005. Concomitamment à cet allongement, les contrats de concession ont été mis en conformité avec le cahier des charges type annexé au décret n° 2007-244 du 23 février 2007, qui détaille l’ensemble des obligations mises à la charge des sociétés, en matière de service public aéroportuaire.

Les sociétés aéroportuaires sont par ailleurs soumises à une régulation de leurs tarifs de redevances aéronautiques, dont le niveau ainsi que l’évolution sont soumis à l’approbation de la Direction Générale de l’Aviation Civile en sa qualité de régulateur du secteur aérien. Dans certains cas, ce cadre peut être complété et précisé par un contrat de régulation économique, conclu entre l’État et la société aéroportuaire pour une période de 5 ans, qui fixe à cette dernière des objectifs chiffrés en matière d’investissements, de qualité de service et définit en contrepartie le niveau maximal de hausses tarifaires applicables. La société Aéroports de Lyon a, à ce jour, engagé un processus en vue de conclure un tel contrat de régulation économique, qui couvrirait la période tarifaire 2015-2019.

Ces caractéristiques des sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon permettent d’ores et déjà à l’État de s’assurer, par son rôle de concédant et de régulateur, du respect des exigences liées au service public aéroportuaire, ainsi que de la résilience économique de l’aéroport et du niveau adéquat des tarifs pratiqués vis-à-vis de ses usagers. Conformément à sa stratégie de gestion active de ses participations, l’État actionnaire vise à calibrer son niveau de détention dans chacune des sociétés dans lesquelles il intervient, de telle manière que le « rendement stratégique » de l’euro public investi soit le plus élevé possible, grâce à une adéquation entre le niveau de participation au capital, les droits de gouvernance et les objectifs poursuivis. En l’espèce, le maintien d’une participation de l’État au capital de ces sociétés aéroportuaires n’apparaît pas nécessaire pour répondre aux objectifs que l’État poursuit s’agissant de ces aéroports.

En cédant sa participation dans les sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon, l’État visera à satisfaire les trois objectifs suivants :

- préserver ses intérêts patrimoniaux, et plus généralement ceux de l’ensemble des actionnaires du secteur public ;

- assurer le respect du contrat de concession et la qualité du service public offert aux usagers des aéroports (notamment les compagnies aériennes et leurs passagers) ;

- développer l’outil industriel et les perspectives d’emploi que ces sociétés représentent à l’échelle régionale, en renforçant les perspectives de développement de leur activité en cohérence avec les acteurs locaux.

82. Options possibles et nécessité de légiférer

Concernant les articles 52 et 53, il est nécessaire de modifier des dispositions législatives introduites par la loi visant à reconquérir l’économie réelle afin que ces dernières puissent pleinement entrer en vigueur.

L’article 23 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises prévoit qu’un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de cinq mois à compter de la publication de l'ordonnance. L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, prise en application de l’article 10 de la loi du 2 janvier 2014 précitée, a fait l’objet d’une publication au Journal officiel de la République française le 23 août 2014. Par ailleurs, les modifications apportées à l’ordonnance ou à d’autres textes de nature législative relèvent du domaine de la loi.

Les opérations par lesquelles l’État transfère au secteur privé la majorité du capital d’une société qu’il détient depuis plus de cinq ans et dont les effectifs sont supérieurs à 1 000 personnes ou le chiffre d’affaire supérieur à 150 M€ doivent faire l’objet d’une autorisation préalable par la loi, en vertu de l’article 22 de l’ordonnance du 20 août 2014 susvisée. Pour l’application de cette règle, les participations détenues par toute société ayant pour objet principal la détention de titres et dont la totalité du capital appartient à l’Etat sont assimilées à des participations détenues directement par l’Etat et toute opération de cession d’un actif susceptible d’une exploitation autonome représentant plus de 50% de l’actif net comptable ou du chiffre d’affaires ou des effectifs, appréciés sur une base consolidée, d’une société détenue à plus de 50% par l’Etat est assimilée à la cession de cette société.

Plusieurs options ont été envisagées concernant l’avenir de GIAT Industrie et de ses filiales ainsi que des sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon.

82.1. Les options possibles pour GIAT Industries et ses filiales

82.1.1. Concernant Nexter Systems

Compte tenu des objectifs recherchés et de l’impossibilité pour la société Nexter Systems de réaliser en propre une croissance organique au niveau requis pour atteindre la taille critique nécessaire, une analyse stratégique a été conduite par la société pendant les trois dernières années afin de déterminer le meilleur schéma de rapprochement et d’identifier le meilleur candidat à une alliance, sur la base des critères principaux suivants :

- compatibilité des stratégies d’alliance/croissance ;

- cohérence de l’opération au regard de la protection des intérêts de la défense nationale ;

- complémentarité de la gamme de produits ;

- complémentarité des présences dans les zones géographiques de clientèle à l’échelle mondiale.

Cette analyse a conduit au projet de rapprochement envisagé entre Nexter Systems et KMW.

82.1.2. Concernant SNPE

En cédant SNPE à GIAT Industries, l’État a inscrit SNPE dans une logique de rapprochement à court terme avec le pole munitionnaire du Groupe Nexter. Toutefois, la non-intégration de SNPE au sein du Groupe Nexter correspondait à la nécessité de ne pas fragiliser la position d’Eurenco sur le marché européen des poudres et explosifs, les autres clients d’Eurenco (c.-à-d. industriels munitionnaires extérieurs au groupe GIAT Industries et industriels du secteur des carburants pétroliers) pesant pour les trois quarts de son chiffre d’affaires.

Sans écarter d’éventuels rapprochements horizontaux ultérieurs entre acteurs européens, le rapprochement d’Eurenco avec le futur groupe Nexter-KMW permettrait de poursuivre l’effort de sécurisation de la filière munitionnaire française via la gamme produits et les savoir-faire d’Eurenco.

82.2. Les options possibles pour les sociétés Aéroport de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon

La cession de la participation de l’État dans ces sociétés prendra la forme d’un appel d’offres sur cahier des charges. Une telle procédure, ouverte, transparente et non discriminatoire, et conforme aux engagements pris par l’État vis-à-vis des autorités européennes dans le cadre de l’examen de la réforme de la gestion des grands aéroports régionaux, assurera à l’État la meilleure gestion de son patrimoine, en permettant la mise en concurrence des investisseurs potentiels.

Enfin, la mise en œuvre de la cession fera l’objet d’une concertation approfondie avec les autres actionnaires publics de ces sociétés (collectivités territoriales concernées et chambres de commerce et d’industrie). Ceux-ci seront associés en amont à la définition des modalités précises de la cession, qui seront établies au cas par cas pour chacune des sociétés en tenant compte des avis exprimés par les actionnaires publics au cours de cette concertation. Les actionnaires publics locaux pourront également être associés à la mise en œuvre de la procédure de cession aux cotés de l’État, sous la réserve de ne pas se porter candidats ou prendre part à une candidature dans le cadre de l’appel d’offres.

83. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Outre les effets induits par l’ordonnance du 20 août 2014 susvisée, le projet de loi comporte des mesures de simplification et la modernisation du cadre juridique de l’État actionnaire qui aura pour effet une simplification et une clarification de la règlementation remplaçant des textes anciens dont la lecture est malaisée.

83.1. Concernant le dispositif d’encadrement de l’endettement de Réseau ferré de France (RFF)

Le dispositif actuel d’encadrement de la participation de RFF au financement des projets de développement a conduit à une impasse financière évaluée à 1 Md€ par an en 2010, malgré le versement de concours publics importants (2,2 Md€) et des recettes de péages en très forte progression (3,3 Md€). Des projections financières plus récentes confortent ce diagnostic en apportant un éclairage encore un peu plus préoccupant sur la trajectoire financière de l’établissement.

L’augmentation importante de cet endettement pourrait conduire le groupe public ferroviaire à répercuter tout ou partie de cette hausse sur le prix des titres de transport, ainsi que sur les redevances acquittées par les transporteurs de marchandises, allant ainsi à l’encontre de la politique de report modal et de croissance verte portée par la France.

La règle proposée permet d’encadrer la participation financière de SNCF Réseau aux investissements de développement, limitant ainsi les répercussions sur les usagers ainsi que sur la facture des transporteurs de marchandises. S’il n’est pas possible de chiffrer avec précision l’impact de cette mesure, il est rappelé que le montant dépensé par RFF sur ses ressources propres au titre des grands projets de développement est d’environ 0,9 Md€/an en 2013 et 2014.

Cette règle s’inspire de pratiques vertueuses en vigueur dans d’autres pays européens dont la qualité du système ferroviaire est reconnue (par exemple en Suisse).

La fixation du niveau plafond du ratio est renvoyée à un décret compte tenu de la nécessité d’une expertise financière approfondie et étant donnée l’importance d’accompagner le niveau de ce ratio de précisions techniques qui ne sont pas du domaine de la loi. Le niveau de ce ratio devra permettre à SNCF Réseau de retrouver une situation financière comparable à celle d’autres gestionnaires d’infrastructures. Le respect du plafond fera l’objet d’un contrôle par le Conseil d’administration avant toute décision actant le montant de la participation de SNCF Réseau et autorisant la signature d’une convention de financement.

À titre de rappel, le secteur des transports en général, et le transport ferroviaire en particulier, constitue un relais indispensable pour une croissance durable. La présente mesure, en ce qu’elle vise à financer de manière responsable et soutenable les investissements dans le réseau ferroviaire, en particulier de régénération et de renouvellement, notamment dans les zones denses, devrait donc permettre de soutenir les initiatives prises pour améliorer les perspectives de croissance de notre pays.

83.2. Concernant plus particulièrement les projets de privatisation

83.2.1. GIAT Industrie et ses filiales

Impacts économiques, opérationnels et sociaux

Dans le cadre de l’opération prévue, Nexter Systems a vocation à être apportée à une société détenue à parité par GIAT Industries et la famille allemande Wegmann-Bode, actionnaire de KMW. Les titres de Nexter Systems étant apportés et non cédés, cette opération de rapprochement n’aura pas d’impact financier ou budgétaire pour l’État, sinon, le cas échéant, de manière marginale, en ajustement des valeurs de Nexter Systems afin d’établir la parité.

À court et moyen termes, Nexter Systems gardera son autonomie pour l’exécution des contrats en cours et l’écoulement du carnet de commandes, l’opération ayant ainsi un impact opérationnel limité. À terme, l’intégration progressive des activités de Nexter Systems et KMW pourra donner lieu à une spécialisation des sites de manière à limiter les redondances internes au futur groupe et assurer le développement de l’entreprise, tout en maintenant l’équilibre franco-allemand. Les exemples de MBDA et d’Airbus Group révèlent que cet objectif de long terme, révélateur d’une intégration réussie, reste difficile à atteindre. À ce stade de l’opération, il est trop tôt pour déterminer jusqu’à quel point et comment cette spécialisation pourrait s’opérer.

Impacts sociaux

La mesure n’aura pas d’impact social puisque la présence de chacun des partenaires sur son marché national sera préservée et valorisée dans l’opération. Chacune des sociétés devrait continuer à jouer le rôle de fournisseur de référence en veillant à tenir sa place dans l’écosystème du secteur, notamment, pour ce qui est de Nexter Systems en France, dans le respect des engagements souscrits vis-à-vis du ministère de la défense et du tissu des PME. De plus, l’objectif du rapprochement visant à renforcer la position du nouvel ensemble sur les marchés à l’exportation, la mesure devrait permettre un développement de l’activité favorable à l’emploi.

Impacts sur l’emploi public

L’opération sera neutre pour les ouvriers sous décret de Nexter Systems SA et de ses filiales françaises dont les statuts seront maintenus, ainsi que pour les militaires et fonctionnaires en détachement, en disponibilité ou en position hors cadre qui pourront demander le maintien dans la position statutaire qui est la leur au moment du transfert de la majorité du capital au secteur privé.

83.2.2. Les sociétés Aéroport de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon

Impacts économiques

Sur le plan économique et opérationnel, la mesure ne sera pas préjudiciable aux sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon, dont le développement et la performance à long-terme seront au contraire encouragés par l’entrée à leur capital d’un nouvel investisseur, qui devra conserver sa participation pour une durée minimale. Par ailleurs, le développement de ces aéroports aura un impact global positif pour l’ensemble de l’économie régionale, dont les aéroports concernés par cette mesure constituent un outil essentiel en matière d’accessibilité et de compétitivité. La concertation qui sera menée avec les actionnaires locaux permettra en outre à l’État de tenir compte, dans le cadre de la procédure de cession, des attentes des acteurs locaux en relation avec l’activité de l’aéroport. Enfin, la mesure sera sans impact pour l’État en sa qualité de concédant et de régulateur, puisqu’il conservera un contrôle suffisant sur l’activité de la société, ses perspectives économiques et financières, ainsi que sur les niveaux des tarifs pratiqués à l’égard des usagers des aéroports concernés.

Impacts sociaux

Sur le plan social, cette mesure vise à renforcer les perspectives de développement de l’activité des sociétés aéroportuaires concernées, qui devraient s’accompagner d’un développement de l’emploi, au sein de ces sociétés, des entreprises en lien avec l’activité des aéroports concernés et plus généralement de l’économie régionale qui devrait bénéficier de ce développement.

Sur le plan financier, la mesure permettra à l’État de céder ses participations dans ces sociétés dans des conditions avantageuses, permettant en particulier de valoriser une prime reflétant le contrôle dont l’État dispose actuellement du fait de sa participation majoritaire. L’impact financier précis pour l’État ne peut être estimé à ce stade, la valorisation de ces sociétés devant être déterminée, en application du titre III de l’ordonnance n°2014-948 du 20 août 2014, par la Commission des Participations et des Transferts, qui tiendra compte des conditions de marché à la date de ces opérations. La valorisation de la participation de l’État dans ces aéroports ressortira in fine des offres présentées.

83.3. Concernant les mesures relatives à l’obligation de lancement d’une offre publique d’achat (OPA)

Les impacts ne sont pas nouveaux et déjà pris en compte lors de l’adoption de la loi visant à reconquérir l’économie réelle puisqu’il s’agit ici de rendre opérantes des dispositions introduites par cette loi.

84. Consultations menées

Le Conseil supérieur de la fonction publique de l’État a été consulté sur la disposition relative au projet de privatisation de GIAT industrie et de ses filiales, eu égard à l’impact du projet de loi sur le statut des militaires, fonctionnaires et ouvriers sous décret en place au sein de Nexter Systems.

Dans le cadre des organes de gouvernance de GIAT Industries, ont eu lieu :

- la présentation des différents scénarios de développement stratégique et de consolidation lors de la réunion du Comité stratégique de GIAT Industries du 10 décembre 2013 ;

- la présentation d’une synthèse des travaux du Comité stratégique lors de la réunion du conseil d’administration de GIAT Industries du 18 décembre 2013 ;

- la présentation détaillée de l’opération de rapprochement de Nexter Systems avec KMW lors de la réunion exceptionnelle du conseil d’administration de GIAT Industries du 1er juillet 2014 ;

- la revue de ce projet de rapprochement lors de la réunion du Comité stratégique de GIAT Industries du 15 septembre 2014 ;

- la présentation d’une synthèse des travaux du Comité stratégique lors de la réunion du conseil d’administration de GIAT Industries du 18 septembre 2014.

À l’égard des instances représentatives du personnel (IRP) de GIAT Industries, ont eu lieu :

- l’information sur la stratégie et la situation de l’entreprise lors de la réunion du Comité central d’entreprise du 29 janvier 2014 avec la présentation des différents scénarios de développement stratégique et de consolidation ;

- l’information du Comité central d’entreprise lors d’une réunion organisée le 1er juillet 2014 avec la présentation de l’opération de rapprochement de Nexter Systems avec KMW ;

- l’information donnée le 10 octobre 2014 lors d’une réunion de « comité de groupe ad hoc », tenue au niveau du Groupe Nexter, incluant les filiales Mecar SA et Simmel Difesa SpA, avec les représentants des instances représentatives du personnel des entités (Comité d’entreprise et instances équivalentes pour les filiales italienne et belge) ;

- le processus formel d’information et de consultation à partir de novembre 2014 en cohérence avec les différentes étapes de préparation et de réalisation du processus législatif.

85. Textes d’application et outre-mer

Le présent projet de loi propose une entrée en vigueur immédiate.

Une fois la loi promulguée, la mise en œuvre de la sortie du secteur public de Nexter Systems nécessitera :

- la prise d’un avis conforme de la Commission des Participations et Transferts au projet de rapprochement entre Nexter Systems et KMW, conformément au Titre III chapitre II de l’ordonnance n° 2014-948;

- puis la prise d’un décret décidant du transfert au secteur privé de Nexter Systems conformément à l’article 22-I de l’ordonnance n° 2014-948 ;

- et enfin, la prise d’un arrêté du Ministre des finances et des comptes publics, et du Ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, en application de l’article 29 alinéa 2 de l’ordonnance n° 2014-948.

La mise en œuvre de la loi ne nécessitera pas d’acte juridique supplémentaire quant au maintien du statut des militaires et des fonctionnaires au sein de Nexter Systems privatisée. En revanche, s’agissant des ouvriers sous décret, une modification des décrets n° 90-582 du 9 juillet 1990 relatif aux droits et garantis prévus à l’article 6-b de la loi n° 89-924 susvisée et n° 95-727 du 9 mai 1995 relatif à la protection sociale des ouvriers mentionnés à l’article 6 (b) de la loi n° 89-924 susvisée s’avère nécessaire de façon à prendre en compte les modifications engendrées par le projet de loi (transformation du statut de la société).

La mise en œuvre de la loi nécessitera également des textes d’application :

- un décret fixant le régime indemnitaire des membres de la commission des participations et des transferts conformément à l’article 45 ;

- un décret définissant les modalités d’application de l’article L.2111-10-2 du code des transports ;

- une modification du règlement général de l’Autorité des marchés financiers conformément à l’article 52.

CHAPITRE III – INDUSTRIE

Article 54

Attributions de l’Autorité de sûreté nucléaire – possibilité de se prononcer sur les options de sûreté des technologies promues à l’export.

86. État des lieux

Suite à l’accident nucléaire de Fukushima, la majorité des pays qui envisageaient de recourir à une part d’énergie nucléaire dans leur mix énergétique ont replacé la sûreté nucléaire parmi les critères déterminants du choix de leur technologie. Alors que la filière nucléaire française rencontre une concurrence qui s’est intensifiée depuis 2011, la promotion à l’export des technologies les plus sûres constitue un facteur différenciant sur lequel l’offre française peut se mettre en valeur.

Le Gouvernement et le président de la République ont exprimé à plusieurs reprises leur volonté de ne promouvoir à l'export que les projets répondant aux plus hauts niveaux de sûreté. C'est naturellement l’Autorité de sûreté nucléaire qui doit se prononcer sur ces critères.

En droit interne, les attributions de l’ASN en matière d’actions à l’international sont pourtant limitées à une participation à l’élaboration des positions françaises et à la représentation de la France dans les négociations internationales, dans ses domaines de compétences. A ce jour, il n'est possible de faire examiner un dossier de sûreté que pour un projet envisagé sur le territoire national. L'ASN intervient également en appui des autorités de sûreté étrangères, à leur demande, mais cela se fait après le choix de technologie par le pays client.

La possibilité pour l’ASN de se prononcer sur les options de sûreté des technologies promues à l’export par l’industrie française contribuera à améliorer le positionnement de la filière française face à ses principaux concurrents étrangers, qui bénéficient pour certains de cette possibilité dans leur pays, ainsi qu'à expliciter la politique du Gouvernement à travers un examen rigoureux et indépendant.

L'extension des missions de l'ASN, qui est une autorité administrative indépendante, est du ressort exclusif de la loi.

87. Description des objectifs poursuivis

L’objectif du projet de loi est de donner la possibilité à l'ASN d’étudier, aux frais du demandeur, un examen générique des options de sûreté des modèles de réacteurs ou d’installations destinées à l’export au regard des exigences s’appliquant en France pour le même type de réacteur ou d’installation.

88. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts économiques, sociaux et environnementaux

Cette disposition n’engage aucune ressource publique et n’a donc aucune conséquence sur le budget de l’État, l’article prévoyant que l’examen mené par l’ASN est financé par la personne qui en fait la demande.

Cet article contribuera à améliorer la lisibilité du positionnement de la filière nucléaire française à l’export face à ses principaux concurrents en pays étrangers, dont certains font examiner leurs concepts par leur autorité de sûreté nucléaire nationale. En augmentant les chances de succès des offres industrielles proposées par l’industrie française à l’export, elle se traduira par des répercussions positives en termes de chiffres d’affaires et d’emplois sur le sol français.

Sur le plan environnemental, cette disposition s’inscrit en cohérence avec la volonté exprimée par le Gouvernement de renforcer la sûreté des installations nucléaires, y compris celles proposées à l’export par des industriels français. Le Gouvernement est attaché à ce que seules les technologies satisfaisant aux plus hauts standards en matière de sûreté nucléaire (pour les réacteurs nucléaires, cela se traduit par la promotion exclusive des réacteurs dits de troisième génération) et intégrant les retours d’expérience de l’accident nucléaire de Fukushima soient promues à l’export.

Impact pour les administrations

Cet article étend les attributions de l’autorité de sûreté nucléaire en matière d’action à l’international. Il prévoit que l’Autorité de sûreté nucléaire, sur demande et aux frais d’un tiers, examine pour le compte de ce dernier les options de sûreté des technologies destinées à des projets à l’exportation. L’examen s’appuiera sur les exigences qu’appliquerait l’ASN pour la construction en France de ce même type d’installation.

Cet avis n’engage nullement la responsabilité de l’ASN vis-à-vis du demandeur ou des autorités du pays dans lequel l’installation sera construite, l’autorisation de mise en service de l’installation et sa sûreté relevant de la responsabilité exclusive des autorités du pays sur le territoire duquel est située l’installation.

Cet article est par ailleurs compatible avec les dispositions législatives existantes s’appliquant à l’Autorité de sûreté nucléaire (missions, principe d’indépendance, fonctionnement, attributions).

89. Consultations menées

Ces dispositions ont fait l'objet d'échanges avec l'Autorité de sûreté nucléaire.

CHAPITRE IV – SIMPLIFIER

Section 1 – Alléger les obligations des entreprises

Article 55

Allègement des obligations comptables des TPE sans activité

90. État des lieux

Lorsqu’une entreprise, personne physique ou morale, souhaite arrêter temporairement son activité, elle peut demander une « mise en sommeil ». Elle doit alors demander une inscription modificative au registre du commerce et des sociétés (RCS) dans le délai d’un mois suivant la cessation d’activité. La mise en sommeil n’emporte pas radiation des personnes physiques ou morales qui restent inscrites au RCS et restent tenues à l’ensemble de leurs obligations comptables (établissement des comptes annuels et pour les sociétés, dépôt des comptes annuels) alors même qu’elles n’ont aucune activité.

S’agissant des personnes physiques, la cessation totale d’activité est inscrite au RCS avec le maintien de l’immatriculation pour une période d’un an, renouvelable une fois (articles R.123-45 et R.123-46.6° et 8° du code de commerce). A défaut de reprise d’activité, le greffier radie d’office l’entrepreneur au terme du délai d’un an ou de deux ans si la mention a été renouvelée (article R.123-129 du code de commerce).

S’agissant des personnes morales, la cessation totale d’activité est également inscrite au RCS (articles R.123-66 et R.123-69.1° du code de commerce). Cette inscription n’emporte ni dissolution, ni liquidation de la personne morale. Le greffier peut, en l’absence de toute inscription modificative relative à une reprise d’activité et au terme d’un délai de deux ans après la mention au RCS de la cessation totale d’activité, procéder à la radiation d’office de la personne morale du RCS après l’en avoir informée par lettre recommandée avec avis de réception. Cette radiation d’office est portée à la connaissance du ministère public pour éviter les fraudes (article R.123-130 du code de commerce).

Il s’agit de simplifier la gestion des très petites entreprises en sommeil, en les dispensant de certaines formalités qui continuent de s’appliquer, en dépit de la cessation totale d’activité.

91. Description des objectifs poursuivis

La mesure vise à alléger les obligations comptables des micro-entreprises en sommeil, qui n’ont aucune activité. Le maintien de l’ensemble des contraintes est source de lourdeurs pour les entrepreneurs qui cessent totalement et temporairement leur activité.

92. Options possibles et nécessité de légiférer

La mesure nécessite de créer une dérogation aux obligations comptables des micro-entreprises qui sont de nature législative.

La mesure vise uniquement les très petites entreprises, personnes physiques et morales, appartenant à la catégorie des « micro-entreprises » au sens de l’article L.123-16-1 du code de commerce. Il s’agit des entreprises qui n’ont pas de salarié et qui ne dépassent pas un des deux seuils suivants :

• total de bilan de 350 000 € ;

• chiffre d’affaires net total de 700 000 €.

La mesure allège les obligations comptables de ces micro-entreprises pendant leur mise en sommeil, dès lors qu’elles cessent totalement leur activité et déposent à l’appui une déclaration sur l’honneur. Ainsi, les personnes physiques qui cessent leur activité pourront ne pas établir de bilan et de compte de résultat.

S’agissant des sociétés, qui sont soumises à la directive 2013/34/UE, elles pourront établir un bilan abrégé et un compte de résultat abrégé plus simples que la présentation comptable simplifiée dont elles bénéficient lorsqu’elles sont en activité.

La mesure prend fin en cas de reprise d’activité ou à l’issue du délai de deux ans pendant lequel l’entreprise peut être mise en sommeil.

93. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

La mesure nécessite la création de deux articles L.123-28-1 et L.123-28-2 du code de commerce dispensant les micro-entreprises de certaines obligations comptables durant la cessation d’activité.

Impact pour les entreprises

La mesure allège les charges des entreprises en sommeil, qui n’auront plus besoin d’établir de comptes annuels, dans le cas d’une entreprise individuelle, et qui pourront établir des comptes abrégés (bilan et compte de résultat), dans le cas d’une société.

A ce jour, on dénombre au RCS 88 102 entreprises en sommeil, dont 43 498 avec un effectif de 0 à 9 salariés, potentiellement concernées par la mesure.

Impact pour les administrations

Les comptes sont remplacés par une déclaration sur l’honneur attestant l’absence d’activité.

94. Consultations menées

La mesure figure dans les 50 nouvelles mesures du conseil pour la simplification des entreprises190. L’avis de l’Autorité des normes comptables a été sollicité.

95. Textes d’application et outre-mer

La mesure renvoie à un décret pour la définition de ses modalités d’application, en particulier s’agissant du contenu du bilan et du compte de résultat abrégés pour les micro-entreprises personnes morales. Un arrêté fixera le modèle d’attestation sur l’honneur à déposer au greffe pour bénéficier de la mesure.

Le régime législatif et réglementaire applicable dans ces collectivités d'outre-mer est celui de « l'identité législative » ; les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Il n’est pas prévu de disposition d’adaptation de ces mesures.

Dans les collectivités régies par le principe d’identité législative (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon), la mesure est applicable de plein droit sans qu’il soit nécessaire de prévoir une mention particulière d’applicabilité.

Dans les collectivités régies par le principe de spécialité législative (Polynésie française, îles Wallis et Futuna, Nouvelle-Calédonie), les lois et règlements n’y sont applicables que sur mention expresse du texte en cause ou s’ils y ont été rendus applicables par un texte spécial.

La mesure n’est pas applicable à la Polynésie française et à la Nouvelle Calédonie car ces collectivités sont devenues compétentes en matière de droit commercial et l’État ne peut plus intervenir dans ce domaine.

S’agissant des îles Wallis et Futuna, une mesure d’extension par voie législative est prévue.

Article 56

Suppression de l’obligation de recourir à un acte extrajudiciaire dans les relations entre bailleurs et locataires

96. État des lieux

Les relations entre bailleur et locataire d’un local commercial sont soumises à un formalisme excessif, contraignant et coûteux pour les parties. Ainsi, de nombreuses décisions prises tout au long de la vie du bail par l’une ou l’autre des parties doivent être communiquées à l’autre partie sous la forme d’un acte extrajudiciaire, c’est-à-dire par le recours à un huissier de justice (la signification).

L’article L.145-31 du code de commerce autorise déjà le recours à la lettre recommandée avec demande d’avis de réception lorsque le locataire demande au bailleur le droit de procéder à une sous-location.

Récemment, l’article 20 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a modifié l’article L.145-9 du code de commerce pour permettre que le congé puisse être également donné par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Lorsque les dispositions du code de commerce relatives au bail commercial imposent le recours à l’acte extrajudiciaire, il convient de permettre également le recours à la lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le recours à la lettre recommandée avec demande d’avis de réception demeure facultatif et ne constitue qu’une option offerte aux parties qui conservent la possibilité d’utiliser l’acte extrajudiciaire délivré par huissier.

97. Description des objectifs poursuivis

Il s’agit de poursuivre la logique de simplification et de diminution des coûts. Le recours à un huissier a pour objet essentiel de donner date certaine à l’acte transmis. Cet objectif peut être rempli par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

98. Options possibles et nécessité de légiférer

Tous les articles du code de commerce concernés sont de nature législative.

Le dispositif retenu permettra aux parties, seulement si elles le souhaitent, d’utiliser la lettre recommandée avec demande d’avis de réception à la place de la signification par acte d’huissier. Elles conserveront donc toujours la possibilité de recourir, comme précédemment, à un acte d’huissier.

Cette possibilité pourra intervenir dans deux domaines, le renouvellement du bail et la déspécialisation de l’activité exercée.

Les actes liés au renouvellement du bail sont mentionnés aux articles suivants du code de commerce :

- article L.145-10 (demande de renouvellement du bail) ;

- article L.145-12 (notification au locataire de l’accord du bailleur pour renouveler le bail après un refus) ;

- article L.145-17 (justification d’un refus de renouvellement du bail sans versement de l’indemnité d’éviction) ;

- article L.145-18 (notification au bailleur de l’accord du locataire sur les conditions de non-renouvellement du bail) ;

- article L.145-19 (bénéfice du droit de priorité du locataire en cas de reconstruction de l’immeuble). Aucun de ces articles n’est d’ordre public.

Les actes liés à la déspécialisation sont mentionnés aux articles suivants du code de commerce :

- article L.145-47 (information du bailleur en cas de déspécialisation partielle) ;

- article L.145-49 (demande de déspécialisation totale faite au bailleur) ;

- article L.145-55 (information du bailleur du renoncement à la déspécialisation).

Tous ces articles sont d’ordre public.

99. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact pour les entreprises

Les procédures elles-mêmes seront simplifiées et leur coût sera fortement diminué. Ainsi, le coût d’une notification d’un acte par huissier pour une demande de renouvellement de bail commercial est d’environ 80 euros (décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996), alors que le prix d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception coûte au minimum 4,55 euros. Cette mesure permettra donc de diminuer les coûts liés aux relations entre bailleur et locataire.

100. Présentation des consultations menées

La mesure de simplification et d’allègement des coûts s’inscrit dans le prolongement de l’article 20 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, introduisant la faculté de donner congé par LRAR, lequel article n’a pas suscité d’opposition tant de la part des bailleurs que des locataires.

101. Textes d’application et outre-mer

Un décret précisera la date de la notification par LRAR qui sera la date de première présentation. Il s’agit de la même règle que celle retenue dans le décret relatif au bail commercial pris pour l’application de l’article L.145-9 du code de commerce tel que modifié par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.

Article 57

Habilitation : Ordonnance concessions - Simplification du droit des contrats de concession à l’occasion de la transposition d’une nouvelle directive européenne

102. État des lieux

Au niveau européen, les contrats de concession étaient jusqu’à présent régis par des règles variant en fonction de leur objet. L’attribution des contrats de concession de travaux publics était soumise aux règles de base de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, tandis que l’attribution des contrats de concession de services présentant un intérêt transnational relevait des principes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment des principes d’égalité de traitement, de non-discrimination et de transparence.

En droit français, les contrats de concession sont actuellement soumis à des règles variant en fonction de leur objet et de la qualité de l’autorité concédante. L’attribution des contrats de concession de travaux publics relève de l’ordonnance n° 2009-684 du 15 juillet 2009 pour les pouvoirs adjudicateurs soumis à l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005191, du décret n° 2010-406 du 26 avril 2010 pour l’État et ses établissements publics, et des articles L. 1415-1 à L. 1415-9 du code général des collectivités territoriales pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics. L’attribution des délégations de service public est régie par la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993pour l’État et ses établissements publics et aux articles L. 1411-1 à L. 1411-19 du CGCT pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics. En outre, les contrats de concession de service qui n’ont pas pour objet l’exploitation ou la gestion d’un service public ne sont pas réglementés en droit interne et sont simplement soumis aux principes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, lorsqu’ils présentent un intérêt transfrontalier certain.

Le 20 décembre 2011, la Commission européenne a présenté trois propositions de directives afin de moderniser le cadre normatif européen de l’achat public, dont une directive sur l’attribution de contrats de concession. Ce paquet législatif vise à simplifier le droit de la commande publique en en faisant un outil en faveur de l’innovation, en facilitant l’accès des petites et moyennes entreprises (PME) aux contrats publics et en favorisant la prise en compte, par les autorités publiques, d’objectifs sociaux et environnementaux.

Adoptée le 11 février 2014, la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession vise à réduire l’insécurité juridique qui encadre leur passation et à promouvoir un meilleur accès des entreprises au marché concurrentiel des concessions. Entrée en vigueur le 17 avril 2014, elle propose un encadrement inédit de la procédure d’attribution de l’ensemble des contrats de type concessif.

103. Description des objectifs poursuivis

103.1. Une transposition complète et fidèle de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014

Pour les contrats de concession dont la valeur estimée est égale ou supérieure au seuil européen (5 186 000 euros), les dispositions de la directive seront transposées de manière exhaustive, en évitant toute sur-transposition.

103.1.1. Une transposition consacrant la spécificité du modèle concessif

Le texte européen constitue une réelle nouveauté, en créant un régime juridique spécifique aux contrats de concession et en clarifiant la notion de concession qui, contrairement aux marchés publics, suppose un transfert du risque d’exploitation. Sa transposition préservera ainsi la spécificité des contrats de concession par rapport aux marchés publics.

En tant que modèle dans lequel, à titre de rémunération, le concessionnaire se voit octroyer le droit d’exploiter soit l’ouvrage soit le service, avec les risques financiers que cela comporte, les contrats de concession constituent un cadre pratique pour la réalisation de travaux ou l’exploitation de services. Ils représentent l’un des principaux leviers pour parvenir à une croissance intelligente, durable et inclusive, tout en garantissant une utilisation optimale des deniers publics.

103.1.2. Une transposition préservant les souplesses de la directive

Le Gouvernement entend tirer parti de toutes les souplesses que contient la directive. A ce titre, l’ordonnance n’aura pas vocation à étendre les dispositions de la directive aux secteurs exclus de son champ d’application. Ainsi, les opérateurs économiques et les autorités concédantes agissant dans certains secteurs d’activité stratégiques tels que le secteur de la distribution, du traitement ou de l’assainissement de l’eau ou encore les services de transports de voyageurs ne seront pas impactés par les disciplines issues de la directive au regard du droit national existant. Ils resteront soumis à un régime juridique simplifié directement inspiré de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 dite « loi Sapin ». Le Gouvernement n’entend donc pas non plus dérèglementer les secteurs exclus du champ d’application de la directive s’ils étaient jusqu’à son entrée en vigueur règlementés par un cadre spécifique tel que celui prévu par la loi Sapin. En tout état de cause, ces secteurs seraient néanmoins soumis aux principes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, conformément à la jurisprudence Telaustria de la Cour de justice de l’Union européenne. Il en ira de même pour les secteurs sociaux et autres secteurs spécifiques qui revêtent par nature un intérêt transfrontalier limité (service de santé, éducation, restauration scolaire).

Pour les contrats qui relèvent du champ de la directive, le Gouvernement souhaite également préserver toutes les mesures prévues par le texte européen qui s’inspirent ou s’apparentent à des dispositions déjà présentes dans notre droit interne. C’est notamment le cas de la durée des contrats de concession qui a fait l’objet de tant de débat lors des négociations de la directive pour que le dispositif retenu suive enfin la même logique que celle prévue par la loi Sapin. Le recours à la négociation comme procédure de droit commun dans la procédure de passation des contrats de concession est également une grande avancée issue des négociations, même si elle demeure un peu plus encadrée qu’en droit interne. Il n’est pas envisageable en droit interne de ne pas transposer une telle mesure : elle constitue déjà la pierre angulaire des procédures de passation des délégations de service public.

Les règles relatives à la quasi-régie et à la coopération entre personnes publiques, jusqu’alors régies par la jurisprudence, sont précisées et assouplies. Le champ des exceptions relatives à la quasi-régie a été étendu, permettant ainsi aux autorités concédantes de confier sans publicité ni mise en concurrence des prestations à des entités avec lesquelles elles entretiennent une relation particulière. La directive exclut en outre les contrats de concession conclus entre plusieurs autorités concédantes aux fins de fournir, conjointement et sans contrepartie, leurs services publics par la voie de la coopération. De telles dérogations, gages de souplesse pour les autorités concédantes, doivent être intégrées dans notre droit national. Ces dérogations constituent en effet le corolaire de l’affirmation du principe de libre administration des personnes publiques et du libre choix des modalités de mise en œuvre, par les collectivités publiques, de leurs missions d’intérêt général.

Enfin, reprenant la jurisprudence dégagée par la CJUE dans son arrêt Pressetext la directive assouplit les conditions de recours à un avenant pendant l’exécution d’un contrat de concession. Partant, elle prend toute la mesure de la spécificité des contrats de concession. Ce sont en effet des contrats de longue durée, qui doivent s’adapter aux nécessités des travaux et services en cause, pour garantir, à chaque instant dans l’exploitation du contrat, leur qualité et leur performance.

103.2. Une unification et une simplification du régime des contrats de concession

La transposition de la directive 2014/23/UE est l’occasion de mettre un terme à l’éclatement qui caractérise jusqu’à présent le régime juridique des contrats de concession, en définissant un cadre unique, approprié, équilibré et flexible.

103.2.1. L’harmonisation des concepts français et européens

La directive 2014/23/UE unifie et clarifie la définition des contrats de concession, qu’ils aient pour objet la construction et l’exploitation d’un ouvrage ou la gestion et l’exploitation d’un service. Sa transposition est l’occasion de procéder à une harmonisation des notions françaises et européennes, afin de garantir une lisibilité du droit et la sécurité juridique des contrats de concession.

L’absence de règles claires et unifiées régissant l’attribution des contrats de concession crée en effet une insécurité juridique, qui affecte tant la définition de la concession que le régime juridique applicable. Réunir les différents régimes applicables aux contrats de concession au sein d’un corpus unique et cohérent permettra de mettre fin à une insécurité juridique liée à l’éclatement actuel des régimes et à un vide juridique sur les concessions de service n’ayant pas pour objet l’exploitation d’un service public.

L’instauration d’un corpus juridique unique doit également permettre de supprimer à l’échelle européenne les entraves à la libre prestation des services et les distorsions dans l’accès des opérateurs économiques aux contrats de concession, qui se traduisent souvent par une perte de débouchés commerciaux pour nos entreprises.

103.2.2. La préservation de la libre administration des collectivités publiques

La directive 2014/23/UE consacre la liberté la liberté des pouvoirs publics dans le choix du mode de gestion de leurs services publics. Ainsi, les collectivités publiques sont libres d’exécuter les missions de service public qui leur sont confiées en mobilisant leurs propres ressources, incluant la possibilité de coopérer avec d’autres entités, ou de confier l’exploitation de ces missions à un tiers dans le cadre d’un contrat de concession.

En droit de l’Union européenne, l’existence d’une activité de service public est sans incidence sur la qualification du contrat en concession. Si la directive 2014/23/UE se réfère uniquement à la notion de service, elle ne fait pas obstacle à la gestion concédée d’un service public : les autorités concédantes pourront toujours fixer des obligations de service public spécifiques, notamment pour garantir la qualité et la continuité du service public.

Enfin, les transferts de compétence ou de responsabilité organisés entre autorités concédantes, en vue de l’exécution de leurs missions publiques et qui ne prévoient pas la rémunération de prestations contractuelles, sont exclus du champ de la directive 2014/23/UE.

103.2.3. La reprise des acquis de la législation française

Pour les contrats de concession dont la valeur estimée est inférieure au seuil d’application de la directive 2014/23/UE (5 186 000 euros) et pour les contrats qui sont exclus de son champ d’application (par exemple, secteur de l’eau et des transports de voyageurs) ou qui ont pour objet un service social ou un autre service spécifique, le nouveau corpus juridique reprendra les dispositions actuellement applicables en droit français et qui leur sont déjà applicables.

104. Options possibles et nécessité de légiférer

104.1. La transposition de cette directive implique l’adoption de normes de niveau législatif

Les dispositions régissant actuellement les contrats de concession en droit français figurent dans trois corpus juridiques de niveau législatif : la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, l’ordonnance n° 2009-684 du 15 juillet 2009, et le CGCT (articles L. 1415-1 à L. 1415-9 et L. 1411-1 à L. 1411-19).

104.2. Le recours aux ordonnances de l’article 38 de la Constitution est justifié

104.2.1. La transposition par ordonnance reste l’option la plus sûre pour respecter des délais de transposition très contraints

La réforme qui s’engage doit garantir la transposition de la directive 2014/23/UE dans le délai imparti de deux ans à compter de son entrée en vigueur, soit avant le 18 avril 2016. Tout retard dans sa transposition serait contraire aux exigences constitutionnelles et susceptible de constituer un manquement au sens du droit de l’Union européenne. Surtout, il exposerait les acteurs du secteur et certaines situations contractuelles déjà acquises à une très grande insécurité juridique : une directive européenne devient invocable par les particuliers à l’échéance du délai de transposition et ses dispositions claires, précises et inconditionnelles ont un effet direct.

Les règles relatives aux contrats de concessions imprègnent aujourd’hui un pan non négligeable du droit de la commande publique, elles sont utilisées par de nombreux acteurs (publics, opérateurs privés, défendus par de nombreux syndicats et groupes de pression). Une telle réforme ne pourra aboutir efficacement que si elle fait l’objet d’une concertation préalable approfondie auprès de tous les acteurs concernés.

Le recours à une ordonnance permet de mener de façon concomitante et coordonnée les travaux de rédaction des dispositions législatives et réglementaires. Le délai de transposition très contraint ne permet pas d’attendre l’issue du travail parlementaire pour ouvrir la concertation sur les mesures réglementaires d’application. Le décret contiendra en effet toutes les règles de procédure qui mobilisent les acteurs du secteur. Le recours à une ordonnance permet la présentation d’un texte à vocation législative clair et stable, accompagné de son texte d’application qui en est le reflet cohérent pour un travail de concertation productif et efficace.

104.2.2. La réforme engagée, très technique, laisse très peu de marge de manœuvre au travail parlementaire

La directive 2014/23/UE contient des dispositions particulièrement précises, impératives et techniques qui laissent très peu de marge de manœuvre aux États membres. Le travail du Parlement en serait pour une grande part réduit à la reproduction de dispositions précises et inconditionnelles de la directive, sans possibilité de modification. Les seules options qu’elle ouvre ne prêtent pas à non plus à discussion dans la mesure où elles concernent des dispositifs favorables aux entreprises, notamment aux PME, qu’il n’est pas envisageable de remettre en cause.

105. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Garantir la sécurité juridique et améliorer l’intelligibilité du droit.

La transposition de la directive 2014/23/UE a vocation à préciser et sécuriser les règles applicables aux différentes autorités concédantes au sein d’un corpus juridique unique, mettant ainsi fin à un éclatement des régimes concessifs applicables et à un vide juridique concernant les contrats de concession de service qui n’ont pas pour objet l’exploitation ou la gestion d’un service public.

Lutter contre les distorsions de concurrence entre opérateurs économiques.

La complexité des règles régissant l’attribution des contrats de concession peut être source d’entraves à la libre prestation des services et provoque des distorsions dans l’accès des opérateurs économiques au marché intérieur. La fragmentation des réglementations nationales des conditions de concurrence peut se traduire par la perte de débouchés commerciaux pour les acteurs économiques.

L’existence d’un cadre juridique unifié permettra d’assurer un accès effectif et non discriminatoire aux contrats de concession pour tous les opérateurs économiques, favorisant ainsi les investissements publics dans les infrastructures et les services stratégiques pour le citoyen.

Utiliser davantage le contrat de concession comme un levier de croissance.

Impact pour les autorités concédantes :

En tant que modèle dans lequel, à titre de rémunération, le concessionnaire se voit octroyer le droit d’exploiter soit l’ouvrage, soit le service, avec les risques financiers que cela comporte, les contrats de concession constituent un cadre pratique pour la réalisation de travaux ou l’exploitation de services indispensables. Ils représentent un des principaux leviers pour parvenir à une croissance intelligente, durable et inclusive, tout en garantissant une utilisation optimale des deniers publics.

Le droit interne comportant déjà un encadrement pour les concessions de travaux et les concessions de service portant sur la gestion d’un service public, l’impact sera globalement neutre pour les autorités concédantes. Le texte de transposition ne fera pas peser davantage de charges, notamment financières, sur ces dernières.

Impact pour les opérateurs économiques :

Les contrats de concession sont des instruments majeurs du développement à long terme d’infrastructures et de services stratégiques, car ils concourent au progrès de la concurrence, permettent de tirer parti de l’expertise du secteur privé et contribuent à réaliser des progrès en matière d’efficacité et d’innovation.

En outre, afin de favoriser l’emploi et l’intégration sociale des personnes handicapées et défavorisées, la directive 2014/23/UE prévoit expressément la possibilité de réserver les contrats de concession à certains opérateurs économiques dès lors qu’ils emploient un minimum de 30 % de personnes handicapées ou défavorisées. Pour les contrats de type concessif, aucune disposition ne concernait spécifiquement la réservation de contrats de concession à des structures employant des publics en situation de vulnérabilité sur le marché de l’emploi, contrairement au code des marchés publics. L’effet de l’insertion d’une disposition expresse dans le texte de transposition pourrait être, à l’instar des marchés publics, bénéfique pour ce public.

La directive offre également la possibilité, pour le concessionnaire, de confier à des tiers l’exécution d’une partie du contrat de concession, qu'il ne peut ou ne veut assurer lui-même. Le recours à d'autres entreprises a pour objectif de favoriser l'accès à la commande publique des entreprises spécialisées, notamment des PME.

Dans la mesure où le droit interne comporte déjà un encadrement juridique des contrats de concession, certes fragmenté et fragmentaire, le texte de transposition n’induira pas de charge supplémentaire pesant sur les opérateurs économiques.

Impacts économiques

Les entreprises bénéficieront d’une unification et la simplification du régime des contrats de concession.

Pour les contrats de concession dont la valeur estimée est égale ou supérieure à 5 186 000 euros, l’ordonnance se limitera à une transposition a minima de la directive 2014/23/UE, en évitant toute sur-transposition et en reprenant systématiquement toutes les mesures favorables à la compétitivité, à l’innovation et aux PME.

Pour les contrats de concession qui sont hors du champ de la directive, inférieurs à son seuil d’application ou qui ont pour objet un service social ou un autre service spécifique, l’ordonnance reprendra les règles existantes fixées par la législation française en matière de délégation de service public.

Ayant vocation à régir tous les contrats de concession quel que soit leur objet, elle mettra en cohérence avec ce cadre général les régimes concessifs sectoriels qui figurent dans des textes particuliers, tels que le code des transports, le code de l’urbanisme ou le code du tourisme, tout en préservant leurs spécificités.

Enfin, l’ordonnance qualifiera de contrats administratifs les contrats de concession passés par les personnes morales de droit public, clarifiant ainsi le bloc de compétence juridictionnelle issue de l’ordonnance n° 2009-684 du 15 juillet 2009.

Impacts juridiques

Le recours à l’ordonnance doit permettre une transposition complète et fidèle des dispositions de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014.

L’ordonnance définira ainsi le champ d’application du nouveau régime des contrats de concession (définition des contrats de concession et des autorités concédantes, précision des exclusions dont la quasi-régie et la coopération public-public), rappellera les principes fondamentaux de la commande publique et leurs exceptions (notamment la possibilité de réservation de certains contrats de concession) et précisera les règles applicables dans l’hypothèse de contrats mixtes, c'est-à-dire de contrats dont une partie seulement relève du régime concessif.

En matière de passation des contrats de concession, l’ordonnance définira les procédures applicables et les règles de confidentialité, limitera la durée des concessions et déterminera les cas et le régime des interdictions de soumissionner. Elle habilitera le pouvoir réglementaire à préciser les mesures de publicité adéquates, les modalités de calcul de la valeur estimée des contrats, les conditions de définition des spécifications techniques et fonctionnelles, les modalités de sélection des candidatures et de choix des offres, ainsi que les conditions d’achèvement de la procédure.

Pour l’exécution des contrats de concession, l’ordonnance déterminera les règles générales en matière d’information des autorités concédantes, prévoira la possibilité de confier une partie de l’exécution des contrats de concession à des tiers, encadrera la faculté de modifier ces contrats en cours d’exécution et précisera certaines hypothèses de résiliation des contrats de concession.

L’ordonnance habilitera le pouvoir réglementaire à préciser les mesures d’application nécessaires. Enfin, elle traitera de la question de l’application des nouvelles dispositions et de leur éventuelle adaptation en outre-mer.

106. Justification du délai d’habilitation.

L’échéance de transposition très courte, à savoir avant le 18 avril 2016, commande d’engager le chantier de transposition au plus vite. Le délai d’habilitation sollicité, de neuf mois, doit permettre d’élaborer une ordonnance particulièrement technique applicable à l’ensemble des contrats de concession. Cette ordonnance devra être suivie d’un important chantier réglementaire afin d’élaborer les textes d’application nécessaires à la transposition complète de la directive 2014/23/UE et à la simplification du régime concessif.

chéma archi concessions

Article 58

Plafonnement des frais mis à la charge des entreprises en cas de publicité de la sanction ou de l’injonction les concernant

107. État des lieux

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a introduit la possibilité pour l’Administration, d’ordonner, à titre de sanction complémentaire, la publicité d’une amende administrative décidée à l’encontre d’un opérateur et la publicité d’une mesure d’injonction adressée à une entreprise.

Les articles L.132-2 et L141-1-2 (V) du code de la consommation, ainsi que l’article L.465-2 (V) du code de commerce prévoient cette publicité.

Les articles R.132-2-2 et R.141-6 du code de la consommation, ainsi que R.465-2 du code de commerce, issus du décret n° 2014-1109 du 30 septembre 2014, en organisent les modalités.

La loi n’a pas fixé de plafonnement des coûts des mesures de publicité. Or s’agissant d’une sanction, ces coûts seront nécessairement à la charge des entreprises.

Récemment, l’adoption du décret n° 2014-1109 du 30 septembre 2014 n’a pas permis d’introduire ces plafonnements, les dispositions relatives aux charges des entreprises relevant du niveau législatif.

108. Description des objectifs poursuivis

Lorsque l’administration ordonnera la publicité de la sanction ou mesure d’injonction décidée à l’encontre d’une entreprise, il convient que l’entreprise sache, sans ambiguïté, que les frais de cette publicité seront à sa charge, et qu’elle sache également que ces frais sont plafonnés.

Cette sanction devant être soumise à l’entreprise dans le cadre de la procédure contradictoire préalable à son adoption, les entreprises seront alors mieux à même des présenter leurs observations sur cet aspect au vu du coût de la publicité envisagé et de leurs moyens financiers.

Le plafonnement introduit permettra d’éviter, et de donner l’assurance aux entreprises, que les mesures de publicité ne revêtent un coût disproportionné.

Il s’agit de poursuivre la logique de simplification, clarification, et de limitation des coûts. Même si la publicité est à la charge de l’entreprise, et a donc un coût pour elle, celui-ci est encadré par un plafond égal au plafond légal de la sanction encourue la plus élevée.

109. Options possibles et nécessité de légiférer

Tous les articles des codes de la consommation et du commerce concernés sont de nature législative.

Le dispositif retenu permet aux entreprises d’avoir connaissance du fait que le coût de la publicité de la sanction ou de l’injonction décidée à leur encontre est à leur charge. S’agissant d’une sanction, la prise en charge financière de son coût par les entreprises concernées est évidente au regard de la logique et la finalité d’une sanction. Cette charge pour les entreprises, qui existe déjà par l’effet de la loi du 17 mars 2014 précitée, n’apparaît pas explicitement.

Il est préférable que l’existence de cette charge soit mentionnée explicitement. Outre la levée d’une ambiguïté, la caractéristique essentielle du dispositif retenu réside dans la création d’un plafond équivalent au plafond légal de la sanction encourue la plus élevée et qui s’appliquera pour l’ensemble des mesures de publicité qui auront pu être décidées.

Le dispositif retenu permettra ainsi de limiter les frais à la charge de l’entreprise. L’administration chargée de la concurrence et de la consommation, compétente pour prononcer cette sanction, devra donc estimer le coût des frais de la publicité qu’elle envisage d’ordonner afin de ne pas dépasser le plafond fixé par la loi. Cette estimation et prise en compte du coût aura un impact direct sur la mesure de publicité finalement retenue, et donc sur la détermination du niveau de sanction approprié.

Les entreprises, pour lesquelles la prise en charge de ce coût sera dépourvue d’ambiguïté, pourront contrôler le niveau de la sanction décidée à leur encontre et faire valoir leurs observations dès le stade de la procédure contradictoire en toute connaissance de cause.

110. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact pour les entreprises

L’existence de cette charge est mise en évidence et son niveau est limité par les plafonds d’amendes administratives déjà fixées dans les codes de la consommation et de commerce.

Ainsi, le plafond des amendes administratives varie de :

- 3.000 à 15.000 € pour une personne physique et de 15.000 à 75.000 € pour une personne morale (manquements aux I à III de l’article L.141-1 du code de la consommation) ;

- de 1.500 à 3.000 € pour une personne physique et de 7.500 à 15.000 € pour une personne morale (en cas de non-respect d’une injonction prononcée en application du VII de l’article L.141-1 du code de la consommation) ;

- de 15.00 à 75.000 € pour une personne physique et de 75.000 à 375.000 € pour une personne morale (en cas de manquement aux dispositions du titre IV du Livre IV du code de commerce) ;

- de 3.000 à 15.000 € (en cas de non-respect d’une injonction prononcée en application du II de l’article L.465-1 du code de commerce).

111. Consultations menées

La mesure de clarification et de limitation des coûts s’inscrit dans le prolongement de la loi relative à la consommation du 17 mars 2014 et du décret du 30 septembre 2014 qui avait initialement prévu le plafonnement des frais à la charge des entreprises en cas de publicité des mesures de sanction et d’injonction les concernant, lequel décret n’avait pas suscité d’opposition du ministère de la justice ni du ministère des finances alors consultés.

112. Textes d’application et outre-mer

En application de l'article L.950-1 du code de commerce, l'article L.465-2 du code de commerce est applicable à Wallis-et-Futuna, ce qui n’est pas le cas des dispositions du code de la consommation.

C’est donc la raison pour laquelle la modification introduite au II du présent projet d'article doit être étendue à cette collectivité. En revanche, ni cet article, ni les articles L.141-1-2 et L.132-2 du code de la consommation ne sont applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française et par ailleurs aucune mention d’applicabilité n’est requise pour que ces dispositions s’appliquent à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Section 2 – Procédures de l’Autorité de la concurrence

Article 59

Habilitation simplification des procédures

113. État des lieux

L’Autorité de la concurrence s’est substituée au Conseil de la concurrence depuis la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 et l’ordonnance du 13 novembre 2008 et ses missions ont été renforcées en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et d’avis. Le contrôle des opérations de concentration économique opéré par le Ministre de l’économie lui a été transféré. Ces dernières années ont permis de constater le développement du débat contradictoire devant l’Autorité de la concurrence, en particulier sur la question de la sanction, et plus largement pour l’ensemble des procédures contentieuses. Elle doit désormais faire face à des missions de contrôle de plus en plus lourdes et complexes ce qui est facteur de lenteur des procédures et de risque juridique pour les entreprises.

Le droit de la concurrence doit être mis au service de l’efficacité économique et jouer un rôle de facilitateur dans la régulation du développement de l’activité économique des entreprises.

114. Description des objectifs poursuivis

Il s’agit d’améliorer la transparence et d’accélérer le traitement des procédures contentieuses et de contrôles confiés à l’Autorité de la concurrence. Les mesures doivent renforcer et clarifier les procédures permettant d’aboutir à des décisions de qualité en matière de contrôle des opérations de concentration économique et d’opérer le suivi du respect des engagements souscrits par les entreprises. Le dispositif envisagé a pour objectif de favoriser l’usage des procédures transactionnelles dans le règlement des dossiers de pratiques anticoncurrentielles devant l’Autorité de la concurrence et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Sans remettre fondamentalement en cause le principe de légalité des poursuites, il est par ailleurs souhaitable que l’Autorité de la concurrence puisse disposer d’outils de pilotage plus fin de son activité, de manière à déployer des ressources limitées sur les affaires dont la résolution est susceptible d’avoir un impact significatif sur les consommateurs, les entreprises, les secteurs concernés ou l’économie dans son ensemble.

115. Options possibles et nécessité de légiférer

La voie législative est obligatoire, s’agissant de mesures nouvelles se rapportant à des dispositifs législatifs existants de nature à porter atteinte aux droits de propriété et susceptible d’imposer des obligations et des sanctions aux entreprises. Il s’agit de modifier le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de quatre mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

116. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact pour les consommateurs et les particuliers

La lutte contre les pratiques anticoncurrentielles par des dispositifs accélérés et/ou négociés réduit de manière plus efficace les profits illicites et les rentes indues, au bénéfice final du consommateur.

Impact pour les entreprises

Les mesures permettront une sécurité juridique accrue (clarification des chiffres d'affaire déclenchant le contrôle des opérations de concentration ; absence d’effet suspensif des opérations de concentration du fait de ce contrôle ; accélération du traitement des procédures contentieuses). Elles confortent l’attractivité et la prévisibilité des procédures transactionnelles dans les contentieux de concurrence (connaissance précise du montant des sanctions encourues en cas de non contestation de griefs devant l’Autorité de la concurrence ; orientation des PME vers des procédures de règlement des pratiques anticoncurrentielles locales par injonction et transaction financière d’un montant limité devant la DGCCRF).

Impact pour les administrations

Ces mesures permettront de tirer pleinement les conséquences de l’existence d’une compétence du ministre chargé de l’économie en matière de pratiques anticoncurrentielles locales en ouvrant, pour l’Autorité de la concurrence, un motif de rejet de plainte lorsque les faits invoqués rentrent dans le champ de compétence du ministre. Elles instaureront une véritable procédure de transaction qui éteindra le risque de recours contre la décision de l’Autorité de la concurrence et entraînera un véritable gain procédural. Enfin, elles autoriseront la limitation des débats devant l’Autorité de la concurrence à un seul tour de contradictoire (contre deux normalement) lorsque les parties mises en cause ont déposé une demande de clémence, à l’instar de ce qui est prévu aujourd’hui pour la procédure de non-contestation des griefs.

117. Consultations menées

L’Autorité de la concurrence a été consultée en septembre 2014.

118. Textes d’application et outre-mer

S’agissant de mesures d’ordre procédural, les différentes mesures de simplification pourront entrer en vigueur immédiatement. Leur évaluation pourra être conduite dès la première année de leur entrée en vigueur.

Section 3 – Faciliter la vie des entreprises

Article 60 

Habilitation Carte d’identité virtuelle des entreprises

119. Difficultés à résoudre

Il n’existe pas encore d’identifiant ou messagerie électronique unique, sécurisé et authentifié pour les entreprises.

Pour entreprendre leurs démarches en ligne auprès des différents organismes (services fiscaux, organismes sociaux, etc.), les entreprises ont une multiplicité d’identités numériques.

120. Objectifs poursuivis

La mise en œuvre de services électroniques pour les citoyens et les entreprises s’inscrit dans le mouvement de modernisation des services de l’État. En matière de simplification, un nouveau cadre de gestion s’instaure afin de pousser les ministères et les organismes à simplifier le plus possible les règles et les procédures qui régissent les relations avec les usagers, particuliers comme professionnels.

Les moyens d’identification et d’authentification doivent contribuer à simplifier l’utilisation des services électroniques. Un identifiant unique, sécurisé et authentifié participe à ce processus de simplification. Cet identifiant mis à la disposition des entreprises devra tenir compte des principes de protection des renseignements personnels existant en droit positif.

Sur ce plan, les moyens retenus doivent notamment minimiser les possibilités :

- de collecte de renseignements personnels à partir du moyen d’identification ou des mécanismes reliés à ce moyen;

- de couplage de données lorsque cela n’est pas permis;

- de traçage et de suivi des échanges d’information à des fins non autorisées.

La mise en place de cet identifiant électronique mettrait également la France en conformité avec le règlement européen eIDAS (Electronic Identification and Signature - règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement Européen et du conseil, du 23 juillet 2014) qui prévoit une interopérabilité des systèmes d’identification utilisés par les États membres pour accéder à leurs services en ligne.La mise en place d’un identifiant électronique unique, sécurisé et authentifié pour les entreprises est indispensable à la mise en œuvre de services électroniques personnalisés. Il est essentiel au soutien de l’évolution de la dématérialisation et la facilitation de la vie des entreprises pour l’ensemble de leurs démarches. Cela participera de la transition numérique.

L’identifiant électronique, qui peut prendre la forme d’une messagerie, sera utilisée dans les relations sous forme dématérialisées et sécurisées des entreprises avec les tiers et avec les administrations.

121. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les entreprises

L’ensemble des entreprises serait concerné par la mesure.

Les entreprises échangent chaque année de l’ordre de 200 milliards de documents commerciaux en Europe dont 28 milliards de factures. La Commission européenne estime que le potentiel d’économies d’une identification électronique sécurisée et d’échanges dématérialisés est de 100 Md€.

Impacts pour les administrations

Cet identifiant électronique sécurisé permettrait d’accélérer la dématérialisation des échanges entre les entreprises et les administrations, ce qui aura également un impact sur les coûts de structure des administrations (redéploiement d’équivalents temps plein de– gestion suite aux allègements des tâches de saisie et de traitement des courriers, économies en matière –d’impressions, et d’affranchissements, etc.).

Impacts juridiques

La création d’un identifiant unique pour les entreprises permettrait la mise en œuvre du Règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement Européen et du conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la Directive 1999/93/CE, applicable à partir du 1er juillet 2016.

Le règlement a pour objet de :

- lever les obstacles existants à l’utilisation transfrontalière des moyens d’identification électronique employés dans les États membres pour s’identifier, au moins pour les services publics ;

- fixer les conditions en ce qui concerne les moyens d’identification électronique qui doivent être reconnus, et la façon dont les schémas d’identification électronique devraient être notifiés ;

- caractériser le niveau de fiabilité d’un moyen d’identification électronique par différents niveaux de garanties (faible, substantiel, élevé) ;

- mettre en place un cadre juridique général instaurant un système de confiance ;

- permettre la recevabilité juridique aux services électroniques ;

- énoncer les exigences applicables aux dispositifs de création et de validité de signature électronique qualifiés pour garantir les fonctionnalités des signatures électroniques avancées.

En pratique, le règlement vise à mettre en place un service de confiance qualifié et à accorder des effets juridiques et une certification à diverses démarches dématérialisées (signatures électroniques, cachets électroniques, horodatages électroniques, services d’envoi recommandé électronique, authentifications de site internet et documents électroniques, etc.).

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

122. Consultations prévisionnelles

La mise en œuvre d’une carte d’identité virtuelle des entreprises, qui figure dans les 50 nouvelles mesures du Conseil pour la simplification des entreprises présentées le 30 octobre 2014, sera finalisée en poursuivant les concertations initiées avec les organisations professionnelles représentatives des entreprises.

123. Conditions d’application Outre-Mer

Collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte) : le régime législatif et réglementaire applicable dans ces collectivités d'outre-mer est celui de « l'identité législative » ; les lois et règlements y sont applicables de plein droit. Il n’est pas prévu de disposition d’adaptation de ces mesures.

Collectivités régies par l’article 74 de la Constitution (Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, îles Wallis et Futuna), Nouvelle-Calédonie, TAAF :

- dans les collectivités régies par le principe d’identité législative (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon), la mesure est applicable de plein droit sans qu’il soit nécessaire de prévoir une mention particulière d’applicabilité.

- dans les collectivités régies par le principe de spécialité législative (Polynésie française, îles Wallis et Futuna, Nouvelle-Calédonie), les lois et règlements n’y sont applicables que sur mention expresse du texte en cause ou s’ils y ont été rendus applicables par un texte spécial.

Article 61 

Dérogation SNCF sur la facturation électronique

La loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire prévoit la mutualisation de certaines fonctions, notamment en matière d’achats, propice à améliorer la trajectoire financière du secteur, grâce aux synergies réalisées.

S’inscrivant dans une logique et un calendrier propres, l’application de l’ordonnance n° 2014-697 du 26 juin 2014 relative au développement de la facturation électronique serait de nature à superposer une nouvelle organisation, qui ne paraît pas contribuer à l’objectif prioritaire que se fixe la réforme ferroviaire et qui alourdirait les plannings déjà extrêmement contraints de construction du futur gestionnaire d’infrastructure unifié.

Par ailleurs, les établissements publics à caractère industriel et commercial du groupe public ferroviaire exercent une partie de leurs activités dans le secteur concurrentiel, et il convient, d’un point de vue juridique, de ne pas donner d’indice d’assimilation de ces activités à l’État.

Enfin, l’impact financier pour SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités de la mise en place d’un nouveau système de facturation à l’échelle du groupe public ferroviaire est de l’ordre de quelques dizaines de millions d’euros. Il se traduirait également par un risque d’allongement des délais de paiement, et donc d’une fragilisation des fournisseurs PME, qui représentent aujourd’hui 21% des achats de la SNCF, pendant la phase de transition. A titre d’exemple, 92% des PME fournisseurs de matériel roulant de la SNCF sont aujourd’hui satisfaites des délais de paiement de la SNCF, selon une étude menée par l’association Pacte PME.

La disposition présentée adapte donc les modalités de mise en œuvre de l’ordonnance précitée au contexte particulier du groupe public ferroviaire, de manière à préserver la volonté de simplification et de productivité de l’ordonnance, tout en éliminant tout impacts potentiel sur l’équilibre économique des différentes parties prenantes.

Articles 62 et 63

Publicité dans les grands stades - Définition et dérogation

1. État des lieux

Un effort d’investissement vient d’être consenti pour mieux accueillir de grands événements sportifs, vecteurs d’attractivité, de rayonnement international et de croissance.

La France a notifié à la Commission européenne des subventions directes aux projets de rénovation et construction des grands stades, versées par le Centre National pour le Développement du Sport (CNDS), totalisant 152 M€. Il est également mentionné que les collectivités territoriales concernées ont prévu de participer à la rénovation ou à la construction des stades, soit par l’investissement, soit par des subventions, soit par des garanties, ou autres mesures. Selon les autorités françaises, l’effort financier envisagé par les collectivités territoriales dans le cadre des projets de rénovation ou de construction des stades destinés à accueillir l’« Euro 2016 » peut être estimé à un montant de l’ordre de 900 M€.

Les grands stades, lorsqu’ils sont en concurrence pour accueillir des événements, doivent répondre à des cahiers des charges très ambitieux qui leur demandent à chaque fois des investissements importants que la publicité contribuerait à financer.

Pour l’Euro 2016, doivent être construits ou rénovés :

- 2 stades > 50 000 places : finale, ouverture, équipes à domicile

- 3 stades > 40 000 places : demi et quarts de finale

- 4 stades > 30 000 places : matchs de groupe et 1/8

Ont été retenus

- le Stade de France (rénovation mineure) : > 50 000

- 4 stades à construire :

o Lyon : > 50 000

o Lille : > 50 000

o Bordeaux : > 30 000

o Nice : > 30 000

- 6 stades à rénover entièrement

o Marseille : > 50 000

o Lens : > 40 000

o Paris : > 40 000

o Saint Etienne : > 40 000

o Toulouse : >33 000

Par exemple, en matière de places assises, le cahier des charges de l’union des associations européennes de football (UEFA) présente les exigences suivantes :

- Chaque spectateur doit se voir attribuer un siège pour chaque match de l’UEFA Euro 2016 ;

- Les spectateurs non assis sont interdits ;

- Les sièges provisoires ou temporaires sont interdits ;

- Chaque siège doit être individuel, de préférence fixé à la contremarche, confortable, équipé d’un dossier d’une hauteur minimale de 30 cm, incassable, protégé des UV et certifié conforme aux normes anti-incendie par les autorités locales ;

- Chaque siège et rangée doivent être numérotés clairement, pour permettre une identification simple et immédiate ;

- Il est recommandé d’utiliser des sièges à assise mobile, type strapontins, car ils facilitent le déplacement des spectateurs entre les rangées ;

- Pour les sièges grand public :

la profondeur de gradin doit être de 800 mm ;

la largeur des sièges centre à centre de 500 mm ;.

- Tous les sièges doivent offrir une vue dégagée du terrain, sans obstacle de type piliers, barrières, rambardes, etc.

Le cahier des charges de l’Euro 2016 impose une capacité minimale de 30 000 places assises aux 9 stades retenus (3 en réserve) ainsi que des normes techniques très précises.

La construction ou la rénovation de dix stades devrait avoir un impact économique significatif sur les territoires concernés (dix stades implantés dans cinq régions, et 51 matchs susceptibles d'attirer 2,5 millions de spectateurs).

Ces nouvelles publicités contribueront au financement des investissements auxquels les grands stades sont en train de procéder pour satisfaire aux exigences des cahiers des charges de l’Euro 2016.

Les grands stades de l’Euro 2016 sont des équipements très spécifiques par leur taille imposante. Les dispositifs publicitaires autorisés par la réglementation, de 8 et 12 m², ne sont pas visibles dans ces espaces alors qu’ils le sont dans des équipements qui peuvent sembler comparables par leur activité comme les centres de conférences, le palais omnisport Paris-Bercy (POPB), les salles de spectacle qui n’atteignent pas l’échelle des grands stades.

Le modèle économique des salles de spectacles (ou autres lieux d’événements) est très différent de celui des grands événements sportifs : l’UEFA, la fédération internationale de football association (FIFA) ou encore le comité international olympique (CIO) vivent essentiellement des droits marketing et des droits de télévision alors que les ressources essentielles des salles de spectacles consistent en la vente de billets.

En règle générale, chaque stade ne disposera que d’une ou deux « faces publicitaires » répondant aux critères de visibilité et d’audience indispensables à l’installation d’une publicité de grand format. Le risque de surcharge inesthétique est donc cantonné.

Dans le cadre de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (dite « Grenelle II »), le législateur avait déjà voté des règles dérogatoires pour certaines infrastructures comme les grands aéroports situés hors agglomération mais le cas des grands stades (qui sont généralement situés en périphérie d’agglomération) n’a pas été traité à l’époque.

Il existe en France douze stades dont la capacité est supérieure à 30 000 places. Ils sont tous situés dans de grandes agglomérations, dont la plus petite (Lens) atteint 250 000 habitants (cf. annexe 1 ci-après).

Comme pour les travaux de ravalement des monuments historiques, l’installation de dispositifs publicitaires de grande dimension sur l’emprise des stades constituerait une source de financement substantielle pour les gestionnaires.

C’est dans cet objectif que le code du patrimoine avait été modifié en 2007, afin d’autoriser la publicité sur les bâches d’échafaudage des monuments historiques. Par exemple, les chiffres de 20.000 à 120.000 € par mois sont cités comme source de revenu complémentaire pour les monuments ayant eu recours à des bâches publicitaires.

La demande d’implanter de la publicité de grande dimension sur l’emprise des stades de grande capacité a été initialement formulée par Lille dans le projet de loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR).

2. Description des objectifs poursuivis

La disposition du projet de loi permettra d’installer des toiles publicitaires ou des écrans dérogatoires aux 12 m² (4 x 3) prévus dans l’actuelle réglementation sur la publicité extérieure, sur l’emprise des grands stades, dans le cadre d’un décret en Conseil d’Etat qui déterminera les prescriptions auxquelles doit satisfaire la publicité extérieure et après autorisation préalable délivrée soit par le maire soit par le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de PLU (Plan Local d’Urbanisme) lorsqu’un RLP (Règlement Local de Publicité) intercommunal a été élaboré.

Il est souhaitable que l’installation de ces dispositifs soit pérenne car les grands événements internationaux génèrent de fortes recettes mais qui bénéficient principalement à l’organisateur et à ses partenaires exclusifs. De plus, la faible fréquence des grands événements internationaux organisés en France est telle que les événements nationaux sont également clés.

Les activités complémentaires (championnats nationaux, grands concerts et spectacles, etc.) permettent d’apporter des ressources nouvelles. La publicité extérieure (par l’exposition des marques de partenaires à l’extérieur de l’enceinte), constitue une source de revenus.

La possibilité d’animer les stades en dehors de ces seuls événements génère une activité économique permanente et vertueuse, elle permet :

- de procurer des recettes permanentes directes (publicitaires) ;

- de valoriser le stade et permet d’attirer des événements : la France, sur les cinq grands pays d’Europe, est celle qui compte les stades les moins bien remplis en championnat (20 000 spectateurs par match en moyenne, dont 30 % de places gratuites, contre 42 500 personnes en Allemagne).

C’est dans ce même esprit que la loi dite Grenelle II a aménagé des règles spécifiques destinées à favoriser le rayonnement des aéroports et leur compétitivité.

L’installation de publicités de grands formats sur l’emprise des stades permettrait pour les collectivités territoriales :

- de créer de la valeur au profit de la collectivité territoriale en rendant les espaces publicitaires plus exploitables ; 

- d’associer la publicité à l’apport de services (diffuser des contenus à valeur ajoutée sponsorisés par des marques : informations, statistiques, meilleur but, portraits de joueurs, fil d’actualité, résultats d’autres matches, etc.) ;

- d’accueillir les spectateurs à leur arrivée au stade (messages de bienvenue) ;

- de permettre une connexion aux réseaux sociaux (diffusion de fil twitter ou agrégation de contenus issus des réseaux sociaux sur les supports digitaux publicitaires) ;

- d’intégrer une aide à l’orientation ;

- de promouvoir les lieux hors événements et les événements qui se dérouleront ;

- de percevoir une redevance d’occupation domaniale qui contribue au financement des dépenses d’investissement (jusqu’à 405 M€ à Lyon) et de fonctionnement. La collectivité prévoit la perception de cette redevance dans le cadre du dossier de mise en concurrence des emplacements publicitaires. Cette redevance peut être fixe ou variable ;

- de contribuer à l’animation et aux charges du lieu que le propriétaire soit une entité publique ou privée ou un partenariat public-privé. Ces types de contrats impliquent de très lourds loyers pour les collectivités et montrent parfois leurs limites en termes de recettes ;

- de pouvoir être plus attractive pour répondre aux cahiers des charges internationaux des organisateurs d’événements.

La France doit faire face à une concurrence de plus en plus intense pour l’organisation d’évènements sportifs internationaux. Les échecs des candidatures successifs aux jeux olympiques, au championnat du monde de basketball, à l’Euro de Handball, etc., ont altéré l’image du pays quant à sa capacité à attirer les grands évènements sportifs.

Les grands stades français sont rénovés et construits pour se porter également candidats aux futurs évènements sportifs d’ampleur internationale. Le développement des infrastructures a été conçu dans le but d’organiser de grands évènements, en s’inspirant notamment des bonnes pratiques développées à l’étranger. L’UEFA, la FIFA ou encore le CIO, sont détenteurs d’évènements internationaux dont l’attribution intervient au terme d’un appel à candidature de villes ou de pays.

À cet effet, leur exploitation doit répondre à un modèle économique viable et mettre en avant les atouts de son attractivité, notamment en matière de promotion de l’évènement et de communication publicitaire.

Les espaces publicitaires disponibles renforcent l’attractivité des grands stades dans la mesure où, dans leurs cahiers des charges les organisateurs de grands événements sportifs demandent à pouvoir disposer des espaces publicitaires le temps de la manifestation.

Cette mesure présente également un intérêt pour les entreprises de communication pour lesquelles elle constitue un levier de croissance dans une période où leur activité est en baisse (- 1,7 % en 2013 et
- 1,7 % en 2012).

Enfin, un meilleur aménagement des abords des grands stades financé par la publicité permet d’aider à faire vivre de nouveaux lieux de vie et de rassemblement.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Cette mesure est de niveau législatif.

Elle prévoit que les dispositifs publicitaires, lumineux ou non, implantés sur l’emprise des équipements sportifs ayant une capacité d’accueil d’au moins 30 000 places assises, puissent déroger aux dispositions prévues par le première alinéa de l’article L.581-9 du code de l’environnement en matière d’emplacement, de surface et de hauteur, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. L’implantation des dispositifs dérogatoires est soumise à l’autorisation du maire ou du président de l’EPCI compétent.

Les règlements locaux de publicité peuvent toutefois adapter les dispositions de manière plus restrictive.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts économiques

L’accueil de grands événements sportifs, est vecteur d’attractivité, de rayonnement international et de croissance.

Les grands événements, culturels, sportifs, de mémoire, constituent des moments d’accroissement de croissance économique d’une ville, d’un territoire, d’un pays.

Ainsi, en Grande-Bretagne lors des Jeux olympiques de Londres, la croissance a atteint 1 % de plus entre juillet et septembre 2012 par rapport au trimestre précédent et 30 000 emplois auraient été créés entre 2007 et 2012 pour préparer cet évènement. Les recettes touristiques sont évaluées quant à elles à 2,5 Md€.

Au-delà de la question du chiffrage des investissements et des infrastructures lourdes, un grand évènement génère un surplus d’activité de services liés directement à son organisation. Ainsi, la caravane du Tour de France cycliste induit l’occupation de près de 6 000 chambres d’hôtel aux environs des villes traversées et mobilise de nombreuses entreprises de services (propreté, sécurité des lieux, logistique à grande échelle, personnel d’accueil, etc.).

Impacts pour les particuliers

La participation de la publicité au modèle économique du fonctionnement du stade devrait permettre la modération de l’augmentation des prix des billets. La publicité pourra être associée à l’apport de services (connectés, interactifs) à l’instar des services associés au mobilier urbain.

Impacts pour les entreprises

Elles pourront assurer la promotion de leur offre sur des supports de communication adaptés en format à la taille des grands stades et en tirer un retour sur investissement. Cette mesure leur ouvre également un espace d’expression publicitaire indépendamment de leur partenariat avec l’événement. Enfin les marques recherchent l’interaction avec le public (vote, fil tweeter, etc.) qui permet de créer un lien avec lui.

Impacts pour les collectivités territoriales

Les collectivités bénéficieront d’une contribution de la publicité au financement des grands équipements sous la forme d’une redevance domaniale.

Cette mesure va permettre aux maires ou aux présidents d’EPCI des douze grandes agglomérations disposant d’un stade dont la capacité est supérieure à 30 000 places (dont dix accueilleront les matchs de l’Euro 2016) de prendre un arrêté municipal, notamment en vue de l’échéance proche de l’Euro 2016. Ces collectivités ont dû consentir d’importants investissements pour se mettre en conformité avec les normes de l’UEFA.

L’arrêté municipal permettra l’installation d’une ou de bâches publicitaires ou d’un écran numérique de grand format sur l’emprise du stade dans le respect de la réglementation protectrice des riverains (la publicité numérique ne peut avoir une surface unitaire excédant 50 m²). Afin d’éviter les éblouissements, les dispositifs publicitaires numériques sont équipés d’un système de gradation permettant d’adapter l’éclairage à la luminosité ambiante, les publicités lumineuses sont éteintes entre 1 h et 6 h, lorsque l’équipement sportif a cessé son activité. Dans le cas contraire, les publicités lumineuses peuvent être éteintes au plus tard une heure après la cessation d’activité de l’équipement sportif et peuvent être allumées une heure avant la reprise de cette activité. Enfin, un recul de 10 m des baies d’habitation est prévu.

La possibilité d’offrir des supports de communication innovants et créatifs devrait être de nature à accroître l’attractivité des stades français.

En adoptant une réglementation spécifique sur la publicité dans l’emprise des grands stades, la France enverrait un signal fort aux organisateurs d’évènements internationaux qui y verraient une possibilité d’améliorer leur plan d’affaires et d’accroître leurs recettes publicitaires tout en valorisant leurs partenariats sur les espaces publicitaires mis exclusivement à leur disposition.

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes a été consulté.

Annexe 1

Stades de grande capacité en France 

pouvant bénéficier de la mesure

Les 10 grands stades de l’Euro 2016 sont soulignés.

- Stade de France

- Saint-Denis (93)

- 81 338 (75 000 si athlétisme)

-

-

-

-

- Stade Vélodrome

- Marseille (13)

- 60 031

-

-

-

-

- Stade Pierre-Mauroy

- Villeneuve-d'Ascq (59)

- 50 186 (30 000 si Arena)

-

-

-

-

- Parc des Princes

- Paris (75)

- 48 527

-

-

-

-

- Stade de Gerland

- Lyon (69)

- 41 842

-

-

-

-

- Stade Bollaert-Delelis

- Lens (62)

- 41 229

-

-

-

-

- Stade de la Beaujoire

- Nantes (44)

- 37 463

-

-

-

-

- Allianz Riviera

- Nice (06)

- 35 624

-

-

-

-

- Stade Geoffroy-Guichard

- Saint-Étienne (42)

- 35 616

-

-

-

-

- Stadium Municipal

- Toulouse (31)

- 35 575

-

-

-

-

- Stade Chaban-Delmas

- Bordeaux (33)

- 34 694

-

-

-

-

- Stade de la Mosson

- Montpellier (34)

- 32 939

-

-

-

 

Article 64
Rapport sur les régimes de retraite supplémentaires
relevant de l’article L137-11 du code de la sécurité sociale

124.  État des lieux

Les régimes de retraites supplémentaires relevant de l’article L.137-11 du code de la sécurité sociale, dits de « retraites chapeau », sont des régimes à prestations définies et à droits aléatoires, principalement mis en place dans de grandes entreprises. S’ils concernent plusieurs catégories de salariés, ils peuvent conduire, en particulier pour les mandataires sociaux, au versement des rentes très élevées, sans rapport avec la situation économique de l’entreprise, et constituées en peu de temps sans contribution du bénéficiaire, contrairement aux autres régimes (de base, complémentaires, supplémentaires). Ce constat appelle une réforme de ces régimes de retraites chapeaux, qui doit se baser sur des éléments remontant des organismes débiteurs sur les prestations versées.

125. Objectif de la réforme

L’objectif de la réforme est de disposer d’un rapport de la part des organismes débiteurs des rentes relevant de l’article L.137-11 du code de la sécurité sociale, adressé chaque année à l'Institut national de la statistique et des études économiques et aux services statistiques des ministères chargés de la sécurité sociale et de la mutualité. Ces données permettront une transparence et un suivi plus précis et régulier des engagements pris au titre des prestations de retraite supplémentaire et des montants de rente servis.

Sur la base de ce rapport, le Gouvernement et le Parlement pourront être conduits à prendre des mesures visant à rapprocher le fonctionnement des régimes de retraite supplémentaire relevant de l’article L.137-11 du code de la sécurité sociale avec celui des autres régimes de retraite. Le Gouvernement tiendra également compte de la nécessité de transposer la directive 2014/50/UE du 16 avril 2014 relative aux prescriptions minimales visant à accroître la mobilité des travailleurs entre les États membres en améliorant l’acquisition et la préservation des droits à pension complémentaire, qui prévoit que les droits à pension seront acquis après une période de trois ans dans l’entreprise. Il devra en outre, pour les régimes qui ne sont pas externalisés auprès des assureurs, tenir compte des dispositions de la directive 2008/94/CE du 22 octobre 2008 relative à la protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur, telle qu’interprétées par la jurisprudence européenne, au regard de l’intérêt des bénéficiaires et des risques portés par l’entreprise.

126. Options possibles et nécessité de légiférer

L’adoption de dispositions législatives est rendue nécessaire pour obliger les régimes de retraite supplémentaire à prestations définies relevant de l’article L.137-11 du code de la sécurité sociale à remettre un rapport annuel sur les prestations versées. Un texte de niveau réglementaire serait insuffisant (voir par analogie l’obligation faite aux organismes complémentaires en matière de santé de transmettre des informations sur les prestations versées au titre de l’article L.862-7 du code de la sécurité sociale).

127. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Le nombre de bénéficiaires concernés est évalué aujourd’hui entre 1 et 3 millions, répartis dans plus de 10 000 entreprises. Ces régimes soit gérés en interne ou externalisés auprès d’un assureur. D’après une enquête CSA (mai 2011), 28 % de ces régimes concernent potentiellement tous les salariés, 53 % uniquement les cadres et seulement 12 % uniquement les cadres dirigeants. Il y aurait actuellement autour de 100 000 pensionnés. Le rapport au Parlement sur la situation des régimes relevant de l’article L.137-11 du Code de la sécurité sociale établi pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2010 estimait la pension moyenne à 4.000 € par an et par bénéficiaire (même s’il existe de grandes disparités).

Les données récoltées permettront au Gouvernement et au Parlement de prendre les mesures adéquates pour aller vers un renforcement de l’équité et de l’acceptation des régimes de retraite supplémentaire à prestations définies.

CHAPITRE V – ASSURER LA CONTINUITÉ DE LA VIE DES ENTREPRISES

Section 1 - Spécialisation de certains tribunaux de commerce

Articles 65 à 68

128. État des lieux

Les défaillances d’entreprises constituent un enjeu majeur pour l’économie nationale. Plusieurs instruments statistiques permettent de l’évaluer. Les données de l’observatoire statistique du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce dénombrent, en 2013, 55 524 jugements d’ouverture, dont 1 353 procédures de sauvegarde, 15 351 redressements judiciaires, 19 162 liquidations judiciaires « classiques » et 16 830 liquidations judiciaires simplifiées, et enfin 2 828 résolutions de plans. La tendance est en hausse : le nombre de jugements d’ouverture de procédure collective a augmenté de 2,1 % au premier trimestre 2014 par rapport au premier trimestre 2013.

L’observatoire des entreprises de la Banque de France (fichier FIBEN) confirme cette tendance. À fin juillet 2014, le nombre cumulé des défaillances enregistrées sur les 12 derniers mois a augmenté de 1,4 % par rapport aux 12 mois précédents.

La majorité des entreprises connaissant des difficultés sont des PME voire des TPE. Toutefois, au 1er août 2014, 60 entreprises de taille intermédiaire (ETI) et grandes entreprises étaient défaillantes au cours des 12 derniers mois. La tendance globale est de 50 à 60 dossiers par an. Ce nombre ne doit pas conduire à sous-estimer l’impact économique de ces procédures collectives. En effet, selon une étude de l’INSEE en 2010, les ETI représentent 20 % du total de l’emploi salarié en France. La moitié des 240 grandes entreprises emploient plus de 8 000 salariés et une cinquantaine d’entre elles plus de 20 000 salariés, parmi lesquelles 20 emploient plus de 50 000 salariés.

70% des entreprises qui ont fait l’objet d’une procédure collective entre 2008 et 2012 ont moins de 3 salariés. Les ouvertures de procédure collective pour des entreprises de 20 salariés et plus sont rares : les entreprises de 20 à 49 salariés représentent 2% des ouvertures et celles d’au moins 50 salariés moins de 1%.

71,1% des entités défaillantes ont un chiffre d’affaires annuel inférieur à 500 000 euros, seules 2,6% ont un chiffre d’affaires supérieur à 5M d’euros et 1,1% un chiffre d’affaires supérieur à 10 M d’euros.

Il doit être souligné s’agissant du nombre de salariés et du chiffre d’affaires, que ces deux données restent souvent inconnues ou mal renseignées. Pour exemple, entre 2006 et 2012, sur les 372 118 ouvertures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire, la proportion de demandes pour lesquelles le nombre de salariés de l’entreprise concernés par la procédure est nul ou non renseigné atteint 63,2%. La problématique est la même s’agissant du chiffre d’affaires : entre 2006 et 2012, 40% des procédures étaient mal renseignées. Cette difficulté se retrouve quelle que soit la taille de la juridiction et l’importance de son activité en la matière.

L’attractivité du territoire français et le renforcement de la compétitivité supposent d’accroître l’efficacité de la justice commerciale. Les juridictions commerciales jouent un rôle essentiel pour la sécurisation des relations commerciales, la pérennisation de l’activité des entreprises en difficulté et la sauvegarde de l’emploi. Elles sont ainsi au cœur de la vie économique nationale.

Toutefois, pour faire face aux défis soulevés par la complexification du droit, l’internationalisation de la vie des affaires et la crise économique, l'organisation et le fonctionnement de la justice commerciale doivent encore être modernisés. L’organisation de la justice commerciale doit être réformée de manière à traiter plus facilement les dossiers particulièrement complexes ou présentant des enjeux sociaux ou économiques majeurs. En effet, lorsque les entreprises moyennes ou de grande taille rencontrent des difficultés, les conséquences sur l’emploi ou sur le développement économique de certaines régions peuvent être dramatiques. Il apparaît donc nécessaire de renforcer la spécialisation des tribunaux appelés à connaître de ces dossiers.

On observe une forte concentration des ouvertures des trois procédures collectives devant un petit nombre de juridictions commerciales. Le nombre annuel moyen de procédures ouvertes par tribunal est relativement faible. 25% des procédures sont enregistrés par seulement neuf tribunaux : Paris, suivi de Bobigny, Lyon, Bordeaux, Marseille, Nanterre, Tourcoing, Toulouse et Créteil. Pour les huit premiers tribunaux ayant ouvert le plus grand nombre de procédures, la proportion des liquidations judiciaires atteint en moyenne 77%. 8 tribunaux ouvrent plus de 1 000 procédures collectives à l’année, 18 tribunaux entre 500 et 1 000, 121 tribunaux moins de 500.

Le renforcement de la spécialisation juridictionnelle est une tendance générale au sein de l’organisation judiciaire (spécialisation des juridictions en matière de dessins, marques et modèles, en matière de propriété intellectuelle, en matière de nationalité, en matière de pratiques restrictives de concurrence, etc.). La juridiction spécialisée présente en effet de nombreux avantages. Elle permet, en particulier, de renforcer la prévisibilité de la réponse judiciaire et donc, la sécurité juridique, grâce à une jurisprudence plus homogène. La qualité de la réponse judiciaire est également accrue grâce à l’expertise particulière acquise par les juges.

129. Description des objectifs poursuivis

La spécialisation de certains tribunaux de commerce permet de centraliser les procédures collectives concernant les entreprises dépassant le cadre strictement local ou dans l’intérêt d’une bonne administration de la Justice. Cela doit permettre d’apporter des réponses plus rapides et plus efficaces aux difficultés que peuvent rencontrer certaines entreprises, et en particulier les plus importantes d’entre elles.

130. Options possibles et nécessité de légiférer

L’organisation de la justice commerciale relève de la compétence du législateur et nécessite une modification de certaines dispositions de la partie législative du code de commerce.

La mesure organise la spécialisation de certains tribunaux de commerce (article L.721-8 du code de commerce). Ces tribunaux pourront avoir une compétence étendue au ressort d’une ou plusieurs cours d’appel. Cela concernera tant les procédures de prévention que les procédures collectives stricto sensu (Livre VI du code de commerce). Leur compétence ne concernera toutefois que les sociétés et non les personnes physiques.

Réciproquement, les procédures collectives des entreprises situées dans le ressort d’une cour d’appel non dotée d’un tribunal de commerce spécialisé (TCS) dépendront, si l’un des critères retenus au 1° de l’article L. 721-8 du code de commerce est rempli, d’un TCS relevant d’une autre cour d’appel.

Les TCS seront compétents de plein droit pour les entreprises les plus importantes et les groupes connaissant des difficultés. Le critère de compétence, conformément au droit communautaire, sera déterminé à partir du « centre des intérêts principaux » relié à la définition du siège social. Ainsi, les TCS seront exclusivement compétents lorsque les critères suivants sont remplis :

- lorsque l’entreprise en difficulté dépasse certains seuils de chiffre d’affaires ou de nombre de salariés, fixés par décret ou bien ;

- lorsque le litige concerne une société ayant des établissements dans le ressort de plusieurs tribunaux de commerce.

Les TCS seront également compétents dans les cas suivants :

- pour les procédures pour l’ouverture desquelles la compétence internationale du tribunal est déterminée sur le fondement de l’article 3 du règlement n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité dans les litiges transfrontaliers ;

- pour les procédures d’insolvabilité dans les litiges transfrontaliers impliquant un État tiers.

La répartition des tribunaux spécialisés sur le territoire sera déterminée par décret.

131. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les entreprises

Le recours à un tribunal de commerce spécialisé permettra de trouver plus rapidement et dans un plus grand nombre de cas des solutions pérennes pour la sauvegarde de l’emploi dans les entreprises concernées.

L’action concertée des acteurs restaurera la confiance des partenaires de ces entreprises. La mesure aura également un impact favorable sur le maintien de l’emploi chez les sous-traitants de ces entreprises.

La probabilité de survie de ces entreprises étant améliorée par le projet, l’impact sera également positif pour les particuliers qui en sont actionnaires.

Les tribunaux spécialisés seront compétents pour connaître notamment des procédures collectives touchant les entreprises dépassant certains seuils en termes de chiffre d’affaires ou de nombre de salariés, fixés par décret en Conseil d’État.

Les seuils envisagés seraient les suivants :

- nombre de salariés au moins égal à 150,

- chiffre d’affaires au moins égal à 20 M€.

Le tableau suivant présente l’impact potentiel de la mesure sur les entreprises en fonction de ces critères192 :

Entreprises au sens LME (notion économique)

 

Total

effectifs salariés au 31/12 de l'entreprise

0 à 99 sal

100 à 150 sal

150 à 250 sal

≥ 250 sal

plus de 20 M€ de CA

13 199

4 909

1 902

2 243

4 145

dont CA compris entre 20 et 30 M€

4 168

2 687

697

543

241

dont CA supérieur à30 M€

9 031

2 222

1 205

1 700

3 904

           

Au niveau unité légale

         

 

Total

effectifs salariés au 31/12 de l'entreprise

0 à 99 sal

100 à 150 sal

150 à 250 sal

≥ 250 sal

plus de 20 M€ de CA

19 689

8 857

2 568

3 085

5 179

dont CA compris entre 20 à 30 M€

6 447

4 324

952

784

387

dont CA supérieur à 30 M€

13 242

4 533

1 616

2 301

4 792

S’agissant des procédures collectives, on dénombrait en 2013, 185 redressements et liquidations judicaires d’entreprises dont l’effectif était d’au moins 100 salariés, soit 46 liquidations et 139 redressements. L’ensemble des redressements et liquidations judiciaires concerne 269 300 emplois. Si les entreprises de plus de 50 salariés représentent seulement 1 % des défaillances environ, ce sont 25 % des emplois qui sont menacés.

Le tableau suivant présente la répartition des procédures de liquidation judicaires et redressements judicaires par catégories d’effectif en 2012 et 2013193.

Impacts pour les administrations

Le projet viendra compléter les efforts déjà réalisés par l’État pour accompagner les entreprises en difficulté de taille importante. En effet, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif spécifique pour les ETI et les grandes entreprises : celles qui emploient plus de 400 salariés bénéficient, par exemple, du pilotage du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI). De même, les Comités départementaux d’examen des difficultés de financement des entreprises (CODEFI) soutiennent les petites et moyennes entreprises (PME) en difficulté d’une certaine taille (mais en-deçà de 400 salariés). D’une façon générale, les différentes administrations concernées par les difficultés des entreprises bénéficieront du projet.

Les tribunaux de commerce

Les impacts pour les juridictions ne peuvent être déterminés qu'en fonction des seuils de compétence qui vont être fixés par décret et tenant au chiffre d’affaires et au nombre de salariés.

Il n’est pas possible d’analyser les impacts de la spécialisation avant intervention des textes réglementaires d’application. Néanmoins, il convient d’observer qu’il s’agit de transférer le traitement de certaines affaires entre juridictions commerciales sans impact sur le nombre total d’affaires. Ainsi, l’impact sur les services judiciaires sera très faible et consistera essentiellement en un transfert de quelques emplois de magistrats du parquet de juridictions non retenues vers les juridictions spécialisées.

Impacts juridiques

Ce dispositif ne soulève aucune difficulté sous l’angle de sa compatibilité avec le droit de l’Union européenne. Pour mémoire, l’ordre juridique communautaire n’a procédé que tardivement à une harmonisation des procédures d’insolvabilité en Europe, avec le Règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000, entré en vigueur le 31 mai 2002. Au vu de l’impact des procédures d’insolvabilité sur le fonctionnement du marché intérieur, le droit de l’Union européenne encadre les procédures applicables :

- la juridiction compétente pour ouvrir la procédure principale est celle de l’État membre où se trouve le « centre des intérêts principaux du débiteur ». Pour les personnes morales, il s’agit du lieu du siège statutaire, sauf preuve contraire. Dans le cas de personnes physiques, il s’agit, principe, du domicile professionnel ou de la résidence habituelle. Parallèlement, des procédures secondaires peuvent être ouvertes d’autres États membres, où le débiteur détient un « établissement » ;

- la loi de l’État membre dans lequel elle est ouverte régit tous les termes de la procédure d’insolvabilité – conditions d’ouverture, déroulement, clôture – et les règles matérielles ;

- les décisions prises par la juridiction compétente pour la procédure principale sont immédiatement reconnues par tous les États membres, sans contrôle supplémentaire, sauf si cette reconnaissance a des effets contraires à son ordre public ou dans le cas de décisions limitant le secret postal ou la liberté individuelle.

Cette harmonisation vise en particulier à éviter le déplacement intra-européen des avoirs des entreprises en difficulté, ou le choix par les dirigeants d’une juridiction plus accommodante (« forum shopping ») pour connaître des difficultés de l’entreprise.

Une modernisation des règles applicables est actuellement envisagée. La recommandation du 12 mars 2014 relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d'insolvabilité (réf. C(2014) 1500 final) vise à étendre la portée du règlement du 29 mai 2000 aux procédures préventives, qui encouragent le sauvetage d’un débiteur économiquement viable et accordent une seconde chance aux chefs d'entreprise.

En améliorant l’efficacité des procédures appliquées aux plus grandes entreprises, et en restaurant la confiance du public à leur égard, le projet est pleinement cohérent avec cette approche.

132. Textes d’application

Ces mesures impliquent la prise de plusieurs décrets :

- les critères déterminant la compétence des juridictions spécialisées (nombre de salariés, chiffre d’affaires) seront fixés par décret en Conseil d’État ;

- un décret fixera la liste et le ressort de ces juridictions ;

- un décret fixera la date d’entrée en vigueur de la mesure, au plus tard le 31 mai 2015.

Section 2 – Administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires

Article 69

Habilitation pour prévoir les conditions et modalités de désignation d’un deuxième administrateur judiciaire et d’un deuxième mandataire judiciaire dans certaines procédures

133. Difficultés à résoudre

133.1. État du droit applicable

Le code de commerce prévoit plusieurs procédures pour accompagner les entreprises en difficulté.

La sauvegarde (article L. 620-1) et le redressement judiciaire (article L. 631-1) visent les mêmes objectifs de poursuite de l'activité, maintien de l'emploi et apurement du passif de l’entreprise en difficulté. Ils interviennent toutefois à des stades différents, selon que l’état de cessation des paiements est ou non franchi : la sauvegarde intervient en amont ; le redressement en aval, lorsque l’entreprise n’est plus capable de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Au stade ultime, la liquidation judiciaire (article L. 640-1) met fin à l’activité de l’entreprise en cessation des paiements, lorsque son redressement est manifestement impossible. Elle procède alors, en tant que de besoin, à une cession globale ou séparée des éléments de son patrimoine.

En matière de sauvegarde (article L. 621-4) et de redressement judiciaire (article L. 631-9), la procédure prévoit la désignation par le tribunal :

- d’un mandataire judiciaire, qui agit au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers (article L. 622-20), et

- d’un administrateur judiciaire, qui est chargé de surveiller ou d’assister le chef d’entreprise dans sa gestion de l’entreprise (article L. 622-1). La nomination d’un administrateur n’est cependant pas obligatoire pour les entreprises de moins de 20 salariés réalisant un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 3 millions d’euros (article R. 621-11).

Dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire, le tribunal désigne un mandataire judiciaire en qualité de liquidateur (article L. 641-1).

À la demande du ministère public, et après avoir sollicité les observations du débiteur, le tribunal peut désigner plusieurs mandataires judiciaires ou plusieurs administrateurs judiciaires lors de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire. De même, lors d’une liquidation judiciaire, il peut désigner plusieurs liquidateurs, à la demande du ministère public ou d'office.

Enfin, lorsque la dimension de l'entreprise défaillante est particulièrement importante, ou qu’elle relève d'un groupe de sociétés, l'article L. 662-2 (dans sa rédaction issue de l'article 90 de l’ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014) prévoit la délocalisation de l’affaire. L’article L. 662-8 (dans sa rédaction issue de l’art 93 de cette ordonnance) prévoit par ailleurs un mécanisme de coordination : depuis le 1er juillet 2014, lorsque plusieurs tribunaux sont saisis de procédures concernant des sociétés contrôlées par la même société ou contrôlant les mêmes sociétés au sens de l'article L. 233-3, un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire communs à l'ensemble des procédures peuvent être désignés. Il peut leur être confié une mission de coordination.

133.2. Diagnostic

Les défaillances d'entreprises constituent un enjeu important pour l’économie nationale.

Plusieurs instruments statistiques permettent de l’évaluer. Les données de l’Observatoire statistique du Conseil National des greffiers de tribunaux de commerce dénombrent, par exemple, les jugements prononçant l'ouverture d'une procédure collective. En 2013, il y a eu en France 55 524 jugements d’ouverture, dont 1 353 procédures de sauvegarde, 15 351 redressements judiciaires, 19 162 liquidations judiciaires « classiques » et 16 830 liquidations judiciaires simplifiées, et enfin 2 828 résolutions de plans. La tendance récente est à la hausse : le nombre de jugements d’ouverture de procédure collective a crû de 2,1% au premier trimestre 2014 (15 220 entre janvier et mars 2014), par rapport au premier trimestre 2013 (14 905).

L’observatoire des entreprises de la Banque de France (Base Fichier bancaire des entreprises – Fiben), confirme cette tendance. À fin juillet 2014, le nombre cumulé de défaillances enregistrées par la Banque de France sur les 12 derniers mois (soit 63 168) a augmenté de 1,4 % par rapport aux douze mois précédents. Cette notion statistique de « défaillance » recouvre l’état de cessation de paiement (c’est-à-dire l’ouverture d’un redressement judiciaire). À fin août 2014, selon des données encore provisoires, la progression annuelle était sensiblement équivalente, à +1,5 %. Ces défaillances augmentent dans une majorité de secteurs.

Il ressort également de ces données statistiques que, dans la majorité des cas, les entreprises en difficulté sont de petite taille : près de 9 défaillances sur 10 concernent des micro-entreprises. Le constat de la Banque de France est corroboré par une étude réalisée conjointement par des universitaires et le pôle d'évaluation de la justice civile de la direction des affaires civiles et du sceau. Cette étude, publiée par le ministère de la justice en mars 2014, était consacrée aux trois procédures collectives – sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire – devant les juridictions commerciales de 2006 à 2012. Elle conclut notamment que ce sont plutôt des petites entreprises, voire des très petites entreprises (« T.P.E. »), qui sont soumises aux procédures collectives. La part des petites et moyennes entreprises (« PME ») plus importantes et de grandes entreprises est plutôt réduite.

De tels résultats s’expliquent notamment par la démographie d’entreprises. Selon une étude de l’INSEE de novembre 2010, sur les 2,9 millions d'entreprises que la France comptait en décembre 2007, 2,7 millions (soit 96%) étaient des micro-entreprises et 164 000 des PME hors micro-entreprises (qui comptaient une trentaine de salariés en moyenne). La France dénombre donc au total moins de 5 000 grandes entreprises et entreprises de taille intermédiaires (« ETI ») : environ 4 600 ETI, et seulement 240 grandes entreprises.

Au 1er août 2014, selon l’observatoire des entreprises de la Banque de France, 60 ETI et grandes entreprises étaient « défaillantes » au cours de 12 derniers mois.

Nombre de défaillances d’entreprises de taille intermédiaire et de grandes entreprises, Tous secteurs, Cumul 12 mois, Brut, Code série : DIREN.M.FR.DE.DF.03.N.ZZ.IG, DIREN : Observatoire des Entreprises, Mise à jour : 09/10/2014, Source : Banque de France.

À plus long terme, le nombre d’ETI et de grandes entreprises défaillantes au cours des 12 derniers mois varie en fonction du cycle économique : entre un peu moins de 30 en haut de cycle, où les entreprises rencontrent moins de difficultés (par exemple au printemps 2001 et à l’été 2005) et de l’ordre de 100 en bas de cycle (comme à l’été 2003 ou à l’été 2009).

La tendance globale est d’environ 50 à 60 dossiers de redressement d’ETI et de grandes entreprises par an. Cependant, ce nombre réduit ne doit pas conduire à sous-estimer l’impact économique de ces procédures collectives. Il convient en effet de rappeler les définitions statistiques suivantes :

- une grande entreprise est une entreprise qui a au moins 5000 salariés ou une entreprise qui a moins de 5000 salariés, mais réalise plus de 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires et plus de 2 milliards d'euros de total de bilan ;

- une ETI est une entreprise qui a entre 250 et 4999 salariés, et soit un chiffre d'affaires n'excédant pas 1,5 milliard d'euros soit un total de bilan n'excédant pas 2 milliards d'euros, ou une entreprise qui a moins de 250 salariés, mais plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires et plus de 43 millions d'euros de total de bilan.

Au total, selon l’étude de l’INSEE de 2010, les ETI représentent environ 20% du total de l’emploi salarié en France. La moitié des 240 grandes entreprises françaises emploient plus de 8 000 salariés, et une cinquantaine d’entre elles plus de 20 000 salariés, parmi lesquelles 20 plus de 50 000 salariés.

133.3. Justification de l’intervention

Lorsque des entreprises moyennes ou grandes rencontrent des difficultés, les conséquences sur l’emploi ou sur le développement économique de certaines régions peuvent être dramatiques. Il est donc capital que les mandataires de justice appelés à les aider à surmonter ces difficultés disposent de moyens suffisants et adaptés à l’ampleur d’une telle mission.

Malgré les avancées récemment apportées par l’ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014, les conditions dans lesquelles se déroulent certaines procédures complexes de sauvegarde, redressement ou liquidation d’entreprises en difficulté, ne sont pas satisfaisantes.

Il ressort des statistiques disponibles que le nombre des dossiers d’entreprises de taille importante est relativement réduit : moins d’une centaine par an sur un total d’environ 50 000. Dans ces conditions, la plupart des administrateurs et mandataires judiciaires ne sont que très rarement confrontés au suivi de dossiers comportant un grand nombre de sites industriels et plusieurs (dizaine de) milliers de salariés. Seuls quelques rares professionnels disposent de moyens matériels et humains adaptés à l’ampleur d’une telle tâche.

Aussi, une intervention étatique visant à améliorer la qualité d’intervention des administrateurs et mandataires judiciaires dans l’accompagnement des entreprises en difficulté paraît nécessaire.

134. Description des objectifs poursuivis

La mesure prévoit la désignation d’un deuxième administrateur judiciaire et d’un deuxième mandataire judiciaire pour exercer, dans de bonnes conditions, les différentes fonctions de représentation des créanciers, d’administration, d’assistance, de surveillance ou de liquidation dans le traitement des dossiers les plus complexes de sauvegarde, redressement ou liquidation d’entreprises en difficulté.

Ainsi, l’intervention systématique d’un deuxième administrateur et d’un deuxième mandataire apportera une réelle plus-value : elle permettra d’apporter une réponse plus adaptée à ces dossiers complexes, épisodiques et atypiques. Dans ces conditions, le recours à des professionnels hautement spécialisés, capables d’intervenir sur des thématiques complexes, auprès d’interlocuteurs variés et en différents points du territoire, apparaît particulièrement souhaitable.

Le projet prévoit donc d’habiliter le gouvernement à modifier la procédure applicable pour prévoir les conditions et les modalités de désignation d’un deuxième administrateur judiciaire et d’un deuxième mandataire judiciaire dans certaines procédures collectives complexes ou concernant des entreprises de taille importante, dans le but d’en améliorer l’efficacité de traitement.

135. Options possibles et nécessité de légiférer

135.1. Le choix de la voie législative

L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales.

L’encadrement de la procédure applicable devant l’office du juge commercial, et en particulier la définition des conditions et modalités de désignation obligatoire d’un second deuxième administrateur judiciaire et d’un second deuxième mandataire judiciaire dans les dossiers complexes de sauvegarde, redressement ou liquidation d’entreprises en difficulté, relèvent du seul niveau législatif.

Pour définir les contours de la notion de « moyens suffisants », Les critères qui déclencheront cette procédure – nombre de salariés, chiffre d’affaires, nombre d’établissements secondaires ou de filiales en difficulté, appartenance à un groupe en difficulté – et les conditions d’expérience et de moyens que devront remplir le second deuxième administrateur et le second deuxième mandataire sont renvoyés à un décret en Conseil d’État.

Est ainsi prévue une habilitation à prendre par ordonnance les mesures envisagées.

135.2. Caractéristiques du dispositif retenu

Le projet prévoit donc d’habiliter le Gouvernement à modifier le code de commerce pour prévoir les conditions et modalités de désignation d’un deuxième administrateur judiciaire et d’un deuxième mandataire judiciaire dans les procédures de sauvegarde (article L. 621-4-1). Il est prévu que le tribunal désigne au moins un second administrateur judiciaire et un second mandataire judiciaire lorsque le débiteur possède plusieurs établissements secondaires ou appartient à un groupe d’entreprises en difficulté, dont l’une au moins des entités emploie un nombre de salariés et réalise un chiffre d’affaires supérieur à des seuils définis par décret en Conseil d’État. Ce second administrateur et ce second mandataire seront communs à toutes les entités du groupe. Ils devront remplir des conditions d’expérience et de moyens précisés par décret en Conseil d’État.

Pour la procédure de redressement judiciaire, présentant un niveau de complexité élevé ou concernant des entreprises de taille importante, les mêmes dispositions seront applicables par renvoi de l’article L. 631-9 vers le nouvel article L. 621-4-1.

Il en ira de même pour les procédures de liquidation judiciaire (article L. 641-1-2), lorsque les mêmes seuils seront franchis : le tribunal désignera au moins un second mandataire judiciaire en qualité de liquidateur, qui sera également commun à l’ensemble des entités du groupe.

En tant que de besoin, les missions et les actes réservés au second administrateur judiciaire et au second mandataire désignés en application des articles L. 621-4-1, L. 631-9 et L. 641-1-2 seront précisés par décret.

136. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les particuliers

Le recours à un deuxième administrateur judiciaire et à un deuxième mandataire judiciaire spécialisés permettrait de trouver, plus rapidement et dans un plus grand nombre de cas, des solutions pérennes pour la sauvegarde de l’emploi dans les entreprises concernées.

L’action concertée de ces acteurs restaurerait la confiance des partenaires de ces entreprises. Compte tenu des volumes d’achat en jeu, la mesure aurait également un impact favorable sur le maintien de l’emploi chez les sous-traitants de ces entreprises en difficulté.

La probabilité de survie de ces entreprises pouvant être améliorée par le projet, l’impact serait également positif pour les particuliers qui en sont actionnaires.

Impacts pour les entreprises

Les entreprises en difficulté d’une certaine taille ou celles dont la sauvegarde, le redressement ou la liquidation présente un degré élevé de complexité, seraient les principales bénéficiaires du projet : des moyens plus importants et plus adaptés à leurs spécificités leur seraient consacrés. Leur probabilité de survie serait améliorée.

En cas de redressement réussi, les entreprises de taille plus modeste appartenant à l’écosystème de ces entreprises, notamment leurs sous-traitants, profiteraient indirectement du projet (meilleur recouvrement de leurs créances et surcroît d’activité sous-traitée).

Impacts pour les administrations

Les mesures envisagées projet viendraient compléter les efforts déjà réalisés par l’État pour accompagner les entreprises en difficulté de taille importante. En effet, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif spécifique pour les ETI et les grandes entreprises : celles qui emploient plus de 400 salariés bénéficient, par exemple, du pilotage du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI). De même, les Comités départementaux d’examen des difficultés de financement des entreprises (CODEFI) soutiennent les PME en difficulté d’une certaine taille (mais en-deçà de 400 salariés). D’une façon générale, les différentes administrations concernées par les difficultés des entreprises bénéficieront du projet.

Impacts juridiques

Le dispositif envisagé n’aurait aucun impact sur l’ordre juridique interne, au-delà de la modification des dispositions pertinentes du code de commerce.

Ce dispositif ne soulèverait aucune difficulté sous l’angle de sa compatibilité avec le droit de l’Union européenne. Pour mémoire, l’ordre juridique communautaire n’a procédé que tardivement à une harmonisation des procédures d’insolvabilité en Europe, avec le Règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000, entré en vigueur le 31 mai 2002. Au vu de l’impact des procédures d’insolvabilité sur le fonctionnement du marché intérieur, le droit de l’Union européenne (ci-après « UE ») encadre les procédures applicables :

- la juridiction compétente pour ouvrir la procédure principale est celle de l’État membre où se trouve le « centre des intérêts principaux du débiteur ». Pour les personnes morales, il s’agit du lieu du siège statutaire, sauf preuve contraire. Dans le cas de personnes physiques, il s’agit, principe, du domicile professionnel ou de la résidence habituelle. Parallèlement, des procédures secondaires peuvent être ouvertes dans d’autres États membres, où le débiteur détient un « établissement » ;

- la loi de l’État membre dans lequel elle est ouverte régit tous les termes de la procédure d’insolvabilité – conditions d’ouverture, déroulement, clôture – et les règles matérielles ;

- les décisions prises par la juridiction compétente pour la procédure principale sont immédiatement reconnues par tous les États membres, sans contrôle supplémentaire, sauf si cette reconnaissance a des effets contraires à son ordre public ou dans le cas de décisions limitant le secret postal ou la liberté individuelle.

Cette harmonisation viserait en particulier à éviter le déplacement intra-européen des avoirs des entreprises en difficulté, ou le choix par les dirigeants d’une juridiction plus « accommodante » (« forum shopping ») pour connaître des difficultés de l’entreprise.

Une modernisation des règles applicables pourrait être envisagée. La recommandation du 12 mars 2014 relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d'insolvabilité (réf. C(2014) 1500 final) vise à étendre la portée du règlement du 29 mai 2000 aux procédures préventives, qui encouragent le sauvetage d’un débiteur économiquement viable et accordent une seconde chance aux chefs d'entreprise.

En améliorant l’efficacité des procédures les plus complexes ou appliquées aux plus grandes entreprises, et en restaurant la confiance du public à leur égard, le projet serait pleinement cohérent avec cette approche.

Le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

137. Consultations prévisionnelles

La mesure envisagée a été présentée aux représentants du Conseil National des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires (« CNAJMJ ») le 24 septembre 2014.

Section 3 – Efficacité renforcée des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire

Article 70

Conversion de créances en capital / cession forcée en cas de redressement judiciaire

138. État des lieux

A ce jour, les procédures collectives (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires) sont régies par le Livre VI du code de commerce.

Chacune des procédures correspond à un degré de gravité des difficultés rencontrées par l’entreprise :

- la procédure de sauvegarde est ouverte aux entreprises en difficulté dès lors qu’elles ne sont pas en cessation des paiements,

- les procédures de redressement et de liquidation judiciaires sont destinées aux entreprises en cessation des paiements194. La finalité du redressement judiciaire est d’aboutir à un plan de continuation qui permette la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. La liquidation judiciaire n’est ouverte que si le redressement est manifestement impossible.

Depuis la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, le droit applicable au traitement des difficultés des entreprises a régulièrement évolué afin de s’adapter à la réalité économique.

Toutefois, le tribunal ne dispose pas, à l’heure actuelle, des outils suffisants pour surmonter l’opposition des actionnaires à une reprise interne d’une société en redressement par un tiers, créancier ou non. En effet, le tribunal ne peut pas ordonner la cession forcée des droits sociaux, hormis le cas de la cession forcée des titres de l’actionnaire dirigeant que le tribunal peut actuellement ordonner à la demande du ministère public lorsque le redressement de l’entreprise le requiert. De même, lorsque le projet de plan prévoit une modification du capital nécessaire à la réorganisation de l’entreprise, le code de commerce soumet la modification du capital au vote favorable des assemblées des actionnaires compétentes. Les actionnaires peuvent ainsi s’opposer à toute dilution, alors que la valeur de leurs droits résiduels sur les actifs est très faible. Ce sont les seuls créanciers qui absorbent les pertes par la possibilité de rééchelonnement ou de réduction des dettes.

Le plan de cession de l’entreprise ne constitue pas l’unique solution de redressement de l’entreprise. Afin de favoriser une reprise, le tribunal doit pouvoir opter pour d’autres voies de redressement préservant la structure juridique initiale, par exemple en décidant dans des cas particuliers une « cession interne » avec une sortie forcée d’actionnaires ou leur dilution au profit de tiers repreneurs, s’il apparaît que cette solution est la meilleure pour assurer le redressement de l’entreprise195.

Dans l’intérêt de l’entreprise, il convient de rééquilibrer les pouvoirs au profit des créanciers et des tiers repreneurs qui se sont engagés à exécuter le plan, à l’instar des dispositifs existants dans certains pays étrangers. En effet, les recherches indiquent qu’un droit des faillites plus protecteur des créanciers améliore le financement des entreprises saines et contribue à la survie des entreprises en difficulté. A contrario, les procédures trop favorables aux actionnaires finiraient par nuire à la capacité d’endettement des entreprises et à leur survie.196

A cet égard, le droit français a déjà prévu des mesures novatrices en vue de prévenir et de gérer les crises bancaires. L’article L. 613-31-16 du code monétaire et financier issu de la loi n° 2013- 672 de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 dote les pouvoirs publics d’outils nouveaux de résolution des crises bancaires. Ainsi, en cas de défaillance de l’un des établissements concernés, le collège de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut recourir à plusieurs types de mesures afin notamment de changer les dirigeants en place, de procéder au transfert ou à la cession d’office de tout ou partie de l’établissement, de recourir à un « établissement-relais » chargé de recevoir tout ou partie des biens de l’établissement en vue de leur cession, de faire supporter les pertes par les actionnaires et autres détenteurs de fonds propres de l’établissement et de faire émettre de nouveaux titres représentatifs de fonds propres.

138.1. Le « Chapter 11 » américain

Le « Chapter 11 » du code américain permet aux entreprises en difficulté de renégocier leur passif en vue de poursuivre leur activité et d’éviter ainsi des liquidations massives d’actifs. Cette procédure a été réformée en 2005 en faveur des créanciers. Le plan de restructuration proposé par le débiteur (et par les créanciers en cas de rejet par ces derniers du plan du débiteur) comporte des projections d’activité et une répartition des créanciers en classes homogènes. Au sein d’une même classe, toutes les créances ont le même rang. Il existe trois types de classes : celles dont les droits initiaux ne sont pas affectés par le plan, celles qui perdent intégralement leurs droits et les classes intermédiaires qui ne recouvrent que partiellement leurs créances initiales du fait du plan. Ce sont ces seules classes intermédiaires qui prennent part au vote du plan197. Dans ce schéma, l’actionnaire devient un acteur marginal et il ne peut pas s’opposer à une éventuelle dilution. Les créanciers peuvent ainsi recevoir la totalité des actions composant le capital de la société réorganisée. Il est donc possible d’organiser une dépossession totale des actionnaires sans leur accord198.

138.2. La loi ESUG en Allemagne

Les procédures collectives en Allemagne sont encadrées par le statut des faillites, récemment modifié par la loi sur la simplification du redressement des entreprises (ESUG), entrée en vigueur le 1er mars 2012. Cette réforme vise à faciliter le redressement d’entreprises en difficulté, au travers de plusieurs éléments :

- le renforcement de la place des créanciers dans le processus de redressement ;

- la simplification du recours aux procédures d’insolvabilité ;

- la réduction des possibilités juridiques de blocage d’un plan d’insolvabilité ;

- la codification du mécanisme « debt to equity swap »,

- la conversion des créances en capital, mesure emblématique de cette réforme.

La conversion des créances en capital existait auparavant mais nécessitait l’accord de la majorité des actionnaires en place, qui la refusaient généralement afin d’éviter leur dilution. Le nouveau dispositif permet d’imposer la conversion des créances en capital (sous réserve de l’accord des créanciers concernés) :

- le plan d’insolvabilité est approuvé par un vote séparé de divers groupes de créanciers et du groupe des actionnaires. Il est ensuite approuvé par le tribunal. Le paragraphe 245 (interdiction de faire obstruction) permet d’imposer aux actionnaires en place, dans le cadre du plan, une conversion de créances en actions de la société. La logique économique l’emporte ainsi sur le droit de veto des actionnaires ;

- en contrepartie de la dilution des actionnaires en place consécutive à l’augmentation de capital, les actionnaires peuvent se retirer, moyennant une éventuelle compensation, tenant compte de la situation financière de l’actionnaire si la société avait été liquidée. A cet égard, la conversion des créances en capital augmente les chances de redressement de la société, en diminuant son taux d’endettement, et en associant étroitement les nouveaux actionnaires qui ont un intérêt à la voir prospérer, leur propre capital étant engagé dans la société. Un mécanisme de protection a par ailleurs été prévu pour prémunir les créanciers entrant au capital contre tout recours ultérieur de la société, en cas de retour à meilleure fortune.

139. Description des objectifs poursuivis

Dans le cadre d’un plan de redressement, la mesure offre un nouvel outil pour surmonter les blocages en cas de refus ou d’impossibilité des actionnaires en place d’assurer le financement de l’entreprise par la modification du capital social. Il s’agit de permettre l’entrée de tiers, parmi lesquels les créanciers, au capital de la société, pour assurer le redressement de l’entreprise.

140. Options possibles et nécessité de légiférer

Poursuivant les objectifs de l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, qui vise à préserver l’emploi et l’activité, la nouvelle disposition ouvre la faculté au tribunal d’imposer une modification de capital aux actionnaires opposants d’une société en redressement judiciaire dont l’effectif est d’au moins 150 salariés.

Si le plan de redressement prévoit une modification de capital, notamment pour faire entrer des investisseurs, et que les actionnaires en place refusent de voter en faveur de la modification, le tribunal peut, à la demande de l’administrateur ou du ministère public :

- soit faire procéder à cette modification de capital en désignant un mandataire pour voter à la place des actionnaires opposants ; lorsque l’augmentation de capital est votée, sa réalisation doit intervenir dans un certain délai et l’augmentation de capital peut être libérée par compensation à concurrence des créances détenues sur la société qui ont été admises et dans la limite de la réduction dont elles sont l’objet ;

- soit faire procéder à cette modification de capital en ordonnant la cession forcée des titres détenus par les actionnaires opposants au profit de personnes qui se sont engagées à exécuter le plan.

Le mécanisme est soumis à de strictes conditions permettant de justifier l’atteinte au droit de propriété des actionnaires et d’assurer ainsi la constitutionnalité du dispositif :

- condition en termes de trouble à l’économie et de préservation de l’emploi (société concernée ayant un effectif d’au moins 150 salariés dont la disparition serait de nature à causer un trouble grave à l’économie et au bassin de l’emploi) ;

- mise en œuvre de la mesure après examen des possibilités de cession totale ou partielle de l’entreprise, afin que le recours à ce dispositif n’intervienne que s’il s’agit de la seule solution sérieuse ;

- la décision a lieu en présence du ministère public et le tribunal statue après avoir entendu les actionnaires concernés, les actionnaires dirigeants, les créanciers ou tiers repreneurs et les représentants du comité d’entreprise ;

- les titres sont évalués à dire d’expert en cas de cession forcée (l’expert n’est pas prévu en cas d’augmentation de capital en raison de l’existence des règles protectrices de droit commun relatives aux augmentations de capital) ;

- la décision s’accompagne d’un droit de retrait pour les autres actionnaires ;

- la décision est subordonnée à l’engagement des souscripteurs ou cessionnaires de conserver les titres un certain temps et au paiement comptant des titres ; le tribunal a par ailleurs la faculté d’exiger la remise d’une garantie bancaire en vue de garantir l’exécution des engagements financiers des souscripteurs ou des cessionnaires ;

- un commissaire à l’exécution vérifie le respect des engagements des souscripteurs ou cessionnaires au cours de l’exécution du plan ; le non-respect de ces engagements peut entraîner la résolution du plan, outre les dommages et intérêts susceptibles d’être imposés aux repreneurs défaillants. Le prix payé reste acquis.

141. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les entreprises

La mesure proposée ne concerne que les entreprises de 150 salariés et plus.199

On dénombrait 61 468 redressements et liquidations judicaires d’entreprises200 en 2013, dont 185 seulement concernent des entreprises dont l’effectif était d’au moins 100 salariés, soit 46 liquidations et 139 redressements201.

L’ensemble des redressements et liquidations judiciaires représente 269 300 emplois. On ne dispose pas des statistiques sur les emplois menacés par les défaillances des entreprises de plus de 100 salariés, mais il est à noter que les entreprises de plus de 50 salariés représentent seulement 1% des défaillances, mais 25% des emplois menacés à elles seules.

En 2013, 11 174202 procédures de redressement judiciaire n’ont pas permis de redresser l’entreprise et ont débouché sur l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, ce qui représente 18,7 % du total des procédures de redressement judicaire et 25,9% du total des procédures de liquidation judiciaire.

La mesure vise justement à éviter l’échec des redressements judiciaires et leur conversion en liquidation judiciaire. S’adressant aux entreprises de 150 salariés et plus, l’impact de la mesure devrait être limité en termes de nombre d’entreprises concernées, mais significatif, s’agissant des emplois menacés susceptibles d’être préservés grâce à la mesure. La conversion des créances en capital permet de diminuer l’endettement de l’entreprise tout en associant les créanciers devenus actionnaires au redressement.

142. Consultations menées

Des consultations sur le principe d’une cession forcée ont été menées fin 2013 auprès des entreprises et organisations professionnelles représentatives dans le cadre de l’élaboration de l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives. Ont ainsi été consultés :

- le Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires ;

- le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce ;

- le Conseil national des commissaires-priseurs judiciaires ;

- MEDEF, CCIP, CGPME, FBF, CNB, IFPP.

La possibilité d’évincer les actionnaires en place a recueilli des avis divers des organisations consultées : avis défavorable de la CCIP et de l’IFPPC, demande du MEDEF de clarification sur la portée du dispositif, avis réservé de la CGPME (objectif visant à surmonter les blocages louable en soi, mais moyens pour y parvenir « risqués »), avis favorable sur le plan des principes des membres du CEDCADE (université de Paris Ouest Nanterre), avis favorable du conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires.

Il convient de signaler que le dispositif actuellement proposé dans le projet de loi est différent de celui qui avait été soumis aux organisations professionnelles, dans la mesure où il a été enrichi des observations formulées par le Conseil d’État lors de l’examen du projet d’ordonnance dans un sens plus protecteur des actionnaires « évincés ».

143. Textes d’application et outremer

Il n’est pas prévu en l’état de mesures particulières de mise en œuvre. La mesure fera l’objet d’un suivi dans le cadre des statistiques générales portant sur les procédures collectives.

arianne

PROJET DE LOI POUR LA CROISSANCE ET L’ACTIVITÉ

Étude d’impact

Tome 3

NOR : EINX1426821L/Bleue-1

10 décembre 2014

Sommaire

TITRE III - TRAVAILLER 3

Chapitre Ier - Exceptions au repos dominical et en soirée 3

Articles 71 à 82 3

Chapitre II - Droit du travail 17

Section 1 - Justice prud’homale 17

Articles 83 et 84 17

Section 2 - Dispositif de contrôle de l’application du droit du travail 43

Article 85 1°, 2° 43

Article 85 3° 53

Article 86 55

Régime des impatriés 55

Section 3 - Le dialogue social au sein de l’entreprise 59

Articles 87 à 91 59

Section 4 - Simplifications pour les entreprises 64

Articles 92 et 93 64

Handicap 64

Article 94 68

Habilitation pour remplacer le CAE-DOM par le CIE et pour abroger le CIA 68

Section 5 - Lutte contre la prestation de service internationale illégale 71

Articles 95 à 97 71

Section 6 - Amélioration du dispositif de sécurisation de l’emploi 84

Articles 98 à 104 84

TITRE III - TRAVAILLER

Chapitre Ier - Exceptions au repos dominical et en soirée

Articles 71 à 82

144. État des lieux

La lettre de mission du Premier ministre du 30 septembre 2013 à Jean-Paul Bailly et le rapport remis par ce dernier le 2 décembre 2013 invitent à adapter le code du travail en matière d’ouverture dominicale.

Aujourd’hui, plus de 28 % des salariés déclarent travailler le dimanche, dont près de la moitié de manière habituelle, ce qui place la France sensiblement au-dessus de la moyenne observée au sein de l’Union européenne (Sources : Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) - Analyses n°75 – octobre 2012).

Le travail dominical est habituel pour 13,2 % des salariés, et occasionnel pour 15,5 % d’entre eux. Au total, pour l’économie dans son ensemble, 8,1 millions de personnes travaillent le dimanche de manière habituelle ou occasionnelle (Enquête Emploi de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour 2011) dont 6,5 millions de salariés et 1,6 million de non-salariés. Plus des deux tiers des salariés qui travaillent habituellement le dimanche exercent des professions dans les domaines de la sécurité des personnes et des biens, de la continuité de la vie sociale et de la permanence des soins alors que ces trois secteurs d’activités n’emploient qu’un quart de l’ensemble des salariés.

1.1. La réglementation applicable aux commerces est complexe et se traduit par une conflictualité tant pour les commerces que les salariés

Dans le secteur du commerce de détail, les dérogations au repos dominical s’inscrivent aujourd’hui dans deux logiques.

La première correspond au principe de la dérogation de plein droit, qui offre la possibilité à son bénéficiaire d’employer des salariés le dimanche, de manière permanente et sans nécessiter ni démarche administrative particulière, ni contreparties sociales. Cette logique recouvre trois situations distinctes :

- les commerces du secteur alimentaire, pouvant ouvrir toute la journée s’ils fabriquent des produits destinés à la consommation immédiate, les boulangeries par exemple, (article R.3132-5 du code du travail), ou jusqu’à 13 heures s’il s’agit de commerces de détail à prédominance alimentaire, les supérettes par exemple (article L.3132-13 du code du travail) ;

- les commerces de certains secteurs non alimentaires à l’instar des vendeurs de presse, des fleuristes, des buralistes ou encore des commerces d’ameublement, dont la liste est fixée à l’article R.3132-5 du code du travail ;

- les commerces de détail de tout type situés dans une commune ou une zone touristique dont la définition est fixée à l’article L.3132-25 du code du travail.

La seconde logique correspond quant à elle à une dérogation temporaire qui doit être sollicitée auprès d’une autorité administrative. Cette dérogation donne obligatoirement lieu à des contreparties sociales. Il s’agit :

- de la dérogation accordée par le préfet à un établissement lorsque sa fermeture porte préjudice au public ou atteinte à son fonctionnement normal (L.3132-20 du code du travail) ;

- de la dérogation accordée par le préfet à un établissement situé dans un périmètre d’usage de consommation exceptionnel (PUCE) (article L.3132-25-1 du code du travail) ;

- de la dérogation accordée par le maire au maximum cinq fois par an (article L.3132-26 du code du travail), notamment les dimanches précédant les fêtes de fin d’année.

Cette situation se caractérise, par l’incohérence, l’illisibilité et l’instabilité des normes et pratiques. Elle se traduit par une conflictualité déstabilisante tant pour les commerces que les salariés, tout particulièrement en Île-de-France. Les principales causes remontent d’une part, à la loi n° 2009-974 du 10 août 2009 réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires (dite « loi Mallié »)instituant les PUCE fondés sur des usages d’ouvertures dominicales passées et, d’autre part, à la très forte dispersion constatée dans les définitions des zones touristiques.

C’est en Île-de-France que se concentrent les difficultés liées à l’application de la réglementation relative à l’ouverture dominicale des commerces. La quasi-totalité des PUCE a été créée en Île-de-France (38 sur 41) et la grande majorité des conflits relatifs à l’application de la réglementation sur l’ouverture des commerces le dimanche se concentre aussi dans cette région, qu’il s’agisse des refus de classement en commune d’intérêt touristique (notamment à Paris et en Seine-et-Marne), des classements en PUCE (Val-d’Oise, Val-de-Marne, Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis, Yvelines) ou de l’utilisation des dérogations préfectorales au titre de l’article L.3132-20 du code du travail.

1.2. Les facteurs d’incohérences

1.2.1. La loi Mallié de 2009

La loi Mallié a instauré un nouveau dispositif, permettant la création des PUCE, fondé sur une logique de régularisation de pratiques d’ouverture dominicale préexistantes et le plus souvent illégales. Ce dispositif, qui s’appuie sur des usages constatés, ne permet pas de s’inscrire dans une logique prospective d’aménagement du territoire.

Les PUCE sont générateurs de difficultés pour plusieurs raisons. En premier lieu, il en résulte des distorsions de concurrence majeures entre ceux qui n’ont pas respecté la loi en ouvrant illégalement le dimanche, et qui ont sur ce fondement été autorisés à ouvrir dans le cadre des PUCE, et ceux qui, faute de pouvoir démontrer des pratiques d’ouvertures dominicales antérieures, se voient refuser ces autorisations.

Ainsi, ceux qui n’avaient pas respecté la loi ont été favorisés puisqu’ils ont pu démontrer qu’une activité commerciale existait. A contrario, ceux qui avaient respecté la loi n’ont pas été en mesure de démontrer une telle activité.

La seconde source de difficultés est liée à la délimitation des zones et aux effets de bord qu’elle génère. D’une part, la délimitation des zones ne permet pas la définition de périmètres véritablement pertinents. En effet, le principal critère de délimitation du périmètre est celui de l’habitude de consommation dominicale, qui ne s’inscrit donc pas dans une logique prospective d’aménagement du territoire. Au-delà, le dispositif n’est applicable qu’aux périphéries des grandes unités urbaines du fait du critère de l’importance de la clientèle concernée et de l'éloignement de celle-ci de ce périmètre, ce qui crée une distorsion de concurrence avec les centres villes qui sont par essence exclus du dispositif.

La loi Mallié a atteint ses limites puisqu’aujourd’hui toutes les nouvelles demandes ne peuvent être prises en compte.

1.2.2. Des zones touristiques générant des effets pervers

Au même titre que les PUCE, les zones touristiques génèrent elles aussi des distorsions liées à la fois à leur délimitation et à leur différenciation avec les PUCE notamment en matière de traitement social. En effet, si la loi Mallié a ouvert, avec les PUCE, la voie d’une délimitation de zones sur le fondement d’une concertation locale, elle ne l’a pas étendue aux zones touristiques. Il en découle une très forte dispersion dans les définitions des zones touristiques, notamment dans les grandes villes, le problème ne se posant pratiquement pas dans les moyennes et petites villes, ni dans les villages.

Au 1er novembre 2014, on dénombre ainsi 640 communes et zones touristiques, dont la très grande majorité est située dans des communes de moins de 1 000 habitants. Environ 10 % des communes ont une population supérieure à 10 000 habitants. La ville de Bordeaux, avec plus de 200 000 habitants, est la seule commune majeure classée pour l’intégralité de son territoire communal. À l’inverse, on trouve Paris dans laquelle il existe 7 petites zones touristiques, pouvant aller d’une courte section de rue ne comprenant que quelques numéros, à la délimitation d’une seule rue dans des quartiers, tels que Montmartre ou le Marais.

Enfin, le travail dominical au sein des commerces dans les zones touristiques, contrairement aux PUCE, n’est assorti d’aucune obligation sur le plan social.

1.2.3. Des inégalités de traitement entre les salariés

Le droit actuel engendre en outre des inégalités entre les salariés qui travaillent le dimanche dans les commerces, des incohérences entre les secteurs d’activité ayant le droit d’ouvrir ou non et les ouvertures illégales à l’origine de nombreuses distorsions de concurrence.

Aujourd’hui, il existe trois régimes de contreparties différents pour salariés amenés à déroger au repos dominical dans les commerces.

Le premier régime se caractérise par l’absence d’obligation légale de contreparties dans les établissements bénéficiant d’une dérogation de droit au repos dominical, ou situés dans une commune ou zone touristique.

Le second régime consiste en une obligation légale de contreparties sociales dans les établissements bénéficiant de dérogations temporaires accordées par le préfet, comme dans les PUCE, ou pour les dérogations au titre du préjudice au public ou de l’atteinte au fonctionnement normal de l’établissement : l’obtention des dérogations est subordonnée soit à la conclusion d’un accord collectif fixant librement des contreparties, soit à la décision unilatérale de l’employeur prise après réalisation d’un référendum sur le sujet. Dans ce dernier cas, la loi a fixé le niveau des contreparties, et les salariés bénéficient au minimum d’un doublement de la rémunération et d’un repos compensateur.

Dans le troisième mécanisme, qui correspond au régime des « cinq dimanches du maire », la loi fixe directement le niveau des contreparties : doublement de la rémunération et repos compensateur équivalent en temps.

La réglementation actuelle ainsi conduit à placer les salariés d’une même enseigne dans une situation différente selon le lieu d’exécution de leur contrat de travail, sauf si ces grandes enseignes ont d’elles-mêmes fait le choix de rétablir de la cohérence en traitant tous les salariés de manière identique.

1.3. L’évolution des besoins des consommateurs

L’attente des consommateurs a évolué, concomitamment au changement complet dans les formes de distribution, les systèmes de « drive » et la montée en puissance d’internet.

Des enquêtes montrent que les Français sont favorables à l’ouverture des commerces le dimanche, au niveau national et encore plus en Île-de-France. Ces chiffres témoignent d’une forte évolution au cours des dernières années.

En effet, selon une étude de l’institut CSA de février 2013, 51 % des Français et 63 % des Franciliens déclarent avoir « le sentiment de courir toute la semaine ». Les Français sont 17 % à estimer « passer trop de temps dans les transports pendant la semaine », et ce chiffre monte à 40 % pour les Franciliens. Les Français conservent un rythme soutenu le samedi, effectuant les achats et les démarches qu’ils n’ont pas eu le temps de faire pendant la semaine. Ainsi, 42 % d’entre eux déclarent ne pas avoir beaucoup de temps libre le samedi (51 % pour les Franciliens).

En conséquence, 69 % des Français et 82 % des Franciliens sont favorables à l’ouverture des commerces le dimanche. De même, les Français sont 72 % et les Franciliens 85 % à être favorables à un assouplissement de la législation sur le sujet.

Pour ces raisons, la présence de commerces dans les gares apparaît comme un service pour les voyageurs. Un sondage réalisé par l’institut français d’opinion publique (IFOP) en octobre 2013 montre que 77 % des français sont favorables à l’ouverture des commerces situés en gare le dimanche.

Les enjeux sont la réduction des distorsions entre les commerces et les salariés selon leur activité et leur lieu d’implantation, et la libération des énergies là où des gains économiques sont possibles pour les entreprises, les salariés et les territoires, notamment pour répondre aux besoins des touristes.

Avec 83 millions de visiteurs par an, la France est la première destination touristique du monde. Le secteur se transforme rapidement sous les effets conjugués de l’émergence de nouvelles clientèles et d’une offre touristique internationale sans cesse élargie. En 2012, ce sont les clientèles d’Europe (69,3 millions de touristes, + 2,1 %) et d’Asie (4 millions de touristes, + 9,9 %) qui ont porté la croissance des arrivées de touristes en France (+ 1,8 % toutes provenances confondues). Les pays pour lesquels l’évolution est la plus forte sont la Russie (+ 23,4 % avec 700 000 touristes), la Chine (+ 23,3 % avec 1,4 million de touristes), le Brésil (+ 21,1 % avec 1,2 million de touristes) et le Japon (+ 19,6 % avec 700 000 touristes). La France détient la première place mondiale pour les courts séjours, grâce notamment à la très grande notoriété de Paris et du parc d’attraction Disneyland Paris.

Le nombre de touristes à Paris est estimé à 29 millions en 2012. 43,2 % des nuitées hôtelières sont le fait de tourisme d’affaires. Le « shopping » est la troisième activité la plus pratiquée par les touristes après la visite des musées et monuments et la découverte de Paris.

Les grands magasins assurent la promotion des principales marques du luxe, et organisent l’accueil des touristes. Les grands magasins sont en effet des espaces commerciaux privilégiés où sont représentées les principales manufactures d’exception françaises (Vuitton, Hermès, etc.), dans les secteurs de la mode, du parfum et de la beauté, mais aussi de l’équipement de la maison.

Le tourisme urbain de centre-ville, suscité par les ressources du patrimoine, draine une clientèle française, européenne et étrangère. Cette clientèle a un pouvoir d’achat et serait intéressée par l’ouverture des magasins le dimanche.

En province, les grands magasins attirent l’activité et l’animation commerciale des cœurs de ville : les motifs justifiant l’ouverture des grands magasins le dimanche sont l’activité touristique et la comparaison avec les amplitudes d’ouverture des magasins de capitales étrangères.

Depuis les années quatre-vingt-dix, les pratiques d’ouverture des pays voisins vont vers un assouplissement de l’ouverture des commerces le dimanche. Ces différences entraînent souvent un décalage entre les habitudes des touristes internationaux et les pratiques françaises.

Dans des pays tels que la Suède, la République Tchèque, la Roumanie et l’Irlande, la liberté d’ouverture dominicale est totale. D’autres pays, à l’instar du Portugal ou de l’Italie, ont opté pour un mécanisme où les autorités locales sont chargées de réguler l’ouverture.

En Angleterre ou en Espagne, le critère retenu est celui de la superficie de l’établissement, les commerces de petite taille bénéficiant d’une dérogation permanente. D’autres pays disposent d’un système fondé sur des dérogations ponctuelles. Ainsi, douze dimanches par an sont accordés aux
Pays-Bas, vingt au Danemark, neuf en Belgique (dont trois fixés par les municipalités). En Allemagne, cette compétence est confiée aux Länder : la moyenne d’ouvertures dominicales constatée est de quatre dimanches par an - dix à Berlin.

Il semble donc nécessaire, afin de renforcer l’attractivité de la France et l’animation des centres villes, de permettre une ouverture plus large des commerces, que ce soit dans les zones touristiques de rayonnement international, par une amplitude d’ouverture plus large des commerces, ou dans les cœurs de ville, par une augmentation du nombre des ouvertures ponctuelles.

Les dimanches pouvant être accordés par le maire constituent un véritable levier pour l’animation de leur commune et pour répondre aux attentes des consommateurs. Pour autant, ces « cinq dimanches » ne sont pas accordés par toutes les collectivités, et ne suffisent pas par ailleurs à couvrir toutes les périodes de forte consommation.

Le rapport Bailly précisait à cet effet que, « de manière très majoritaire, le dispositif des « cinq dimanches » du maire est considéré comme insuffisant dans la mesure où ces cinq dimanches sont souvent totalement consommés par les fêtes de fin d’année et les soldes du début d’année. Il peut induire, selon la volonté des différents maires de communes d’une même agglomération, des distorsions de concurrence au sein de cette agglomération. Un consensus s’établit autour de douze dimanches par an permettant ainsi de mieux répondre aux évènements rythmant la vie économique : soldes saisonnières, rentrée des classes, départs en vacances, fête des mères, fête des pères, animation spécifique de certaines villes, quartiers ou professions ».

145. Description des objectifs poursuivis :

La législation sur l’ouverture dominicale dans les commerces doit répondre aux enjeux du développement du territoire dans les zones disposant d’une attractivité économique et touristique. Elle doit réduire les distorsions entre les commerces, et améliorer la compensation pour les salariés volontaires. Cela permettra ainsi de clarifier et de rationaliser la législation existante, en la complétant en particulier s’agissant des gares et des zones touristiques à vocation internationale et à fort potentiel économique, et de sortir de l’insécurité juridique du cadre actuel, tout en permettant de libérer les énergies là où les gains économiques seront possibles pour les entreprises, les salariés et les territoires.

Cette adaptation de la loi nécessite d’une part, de donner des marges de décision aux acteurs locaux et à l’État, en s’appuyant sur le dialogue social et territorial et, d’autre part, de renforcer les droits des salariés concernés.

145.1. La simplification du droit

La présente loi a pour objectif de contribuer d’une part à la simplification de la réglementation relative au travail dominical dans les commerces et, d’autre part, de définir un niveau pertinent de dialogue social en développant la concertation territoriale (élus locaux, administrations, riverains, professionnels) et sociale et en réduisant les distorsions entre les commerces.

Le présent projet de loi instaure deux nouveaux dispositifs en lieu et place des PUCE et communes et zones touristiques actuelles, les zones commerciales (ZC) et les zones touristiques (ZT), fondés sur une procédure de délimitation et un régime de contrepartie harmonisés.

Il permet de simplifier le droit applicable en posant le principe uniforme selon lequel, une fois la zone délimitée, les commerces de la zone, qu’elle soit touristique ou commerciale, pourront ouvrir de droit moyennant un accord prévoyant l’attribution de contreparties aux salariés et la garantie du volontariat. Ainsi, le régime des autorisations individuelles d’ouverture dominicale qui prévalait dans le cadre des PUCE disparaît dans les ZC.

145.2. Garantir des contreparties et le respect du principe du volontariat

Garantir la compensation pour les salariés volontaires permettra d’assurer une harmonisation de traitement entre les salariés des commerces dérogeant au repos dominical, que l’établissement soit situé dans une zone commerciale ou dans une zone touristique.

Le dimanche n’étant pas considéré comme un jour ordinaire, le fait pour les salariés d’être amenés à travailler ce jour-là, dans les commerces doit être assorti de garanties en termes de volontariat et de contreparties spécifiques attestant de cette contrainte particulière, qu’il s’agisse de zones commerciales ou de zones touristiques. Le rapport remis par J.-P. Bailly a relevé qu’ il existe un réel consensus de l’ensemble des acteurs sur le fait qu’il est nécessaire d’accorder des contreparties aux salariés sur lesquels pèse cette contrainte, et sur le fait qu’il appartient au dialogue social de les définir.

Dans la réforme du dispositif actuel, le volontariat et l’accord collectif fixant les contreparties sont les clés de voûte du système permettant aux commerces de déroger au repos dominical. Le respect du volontariat n’est aujourd’hui une obligation légale que dans le cadre des dérogations temporaires accordées par le préfet (PUCE et article L. 3132-20 du code du travail).Il en va de même pour la fixation des contreparties par accord collectif.

Le projet de réforme renforce les droits des salariés concernés par le travail du dimanche. Le principe du volontariat est en outre assuré, par l’établissement d’un écrit explicite et l’inscription dans la loi du droit de refus du salarié rend illégale toute sanction ou mesure discriminatoire. La conclusion d’un accord collectif garantira des contreparties pertinentes pour les salariés et adaptées aux possibilités des entreprises.

Le projet ne modifie pas la situation des salariés travaillant dans les entreprises où activités dits « dérogataires de droit » (industries, services ou le fonctionnement permanent est rendu nécessaire par les contraintes de l’activité ou les besoins du public, comme la fourniture d’électricité, les transports publics, les hôpitaux ou les commerces de détail alimentaires jusqu’à 13 heures).

145.3. Libérer les énergies, répondre au développement du tourisme international

Le projet de loi a pour objet de placer le dialogue territorial au cœur de la délimitation des zones pouvant déroger au repos dominical, ce qui permet de trouver avec l’ensemble des acteurs concernés les équilibres nécessaires lors de la création de ces zones, mais aussi à mesure de l’évolution du tissu commercial, des pratiques des consommateurs, des transports, de l’emploi et de l’activité.

L’objectif est donc de trouver une solution adaptée à chaque zone, en passant par un dialogue territorial soutenu associant l’ensemble des parties prenantes intéressées, des pouvoirs publics jusqu’aux représentants des commerçants.

S’agissant spécifiquement des zones touristiques internationales (ZTI), leur création permet de répondre au développement de destinations concurrentes avec des offres plus novatrices, soutenues par une communication et une promotion efficaces, en particulier auprès des clientèles jeunes, qui sont d’importants relais d’image : Grande-Bretagne (Londres), Espagne (Barcelone, Madrid), Allemagne (Berlin), etc..

La création des ZTI permet également de s’adapter à la croissance rapide de nouvelles clientèles émergentes (en particulier celles en provenance des « BRICS » - Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du sud), qui réclame de la proactivité et de l’inventivité (pour proposer des offres adaptées aux spécificités culturelles, constituer le point d’entrée et de sortie en Europe de ces clientèles, maximiser sa durée de séjour et ses dépenses dans le pays, etc.).

Enfin, la création de ces zones permet également d’intégrer la notion de « shopping » dans la fonction touristique. Le « shopping » représente l’une des principales attractions pour les touristes, juste après le patrimoine et l’offre culturelle.

Il s’agit également de libérer le commerce. En effet, l’ensemble du commerce regroupe en 2012 près de 775 000 entreprises, représente 11 % de la valeur ajoutée produite totale et réalise un chiffre d’affaires de 1.401 Md€ (dont 457 Md€ pour le commerce de détail et 160 Md€ pour le commerce et la réparation automobile). Ce secteur emploie près de 3 millions de salariés en ETP, (dont 2 millions pour le commerce de détail et la réparation automobile) soit 22 % des emplois du secteur marchand hors agriculture. C’est dans le commerce que l'on dénombre le plus d'entreprises sans salarié - plus de la moitié, soit estimé en 2010 à 381 700 personnes - et 95 % des entreprises de ce secteur comptent moins de 10 salariés.

146. Options possibles et nécessité de légiférer

146.1. Le choix de la voie législative

Le schéma retenu fondé sur le dialogue territorial et social permet de délimiter les zones touristiques et commerciales en réunissant l’ensemble des acteurs concernés et ainsi de trouver le meilleur équilibre tant lors de la délimitation de la zone, qu’ultérieurement, pour prendre en compte les évolutions des modes de consommation et sur le fondement d’un cadre social harmonisé pour les salariés.

Ces mesures imposent une modification de la partie législative du code du travail.

146.2. Caractéristiques du dispositif retenu

Le projet de réforme de l’ouverture dominicale dans les commerces s’appuie sur les principes fondamentaux du rapport Bailly, à savoir celui de donner des marges de décision aux acteurs locaux en s’appuyant sur un dialogue territorial et social, et celui de renforcer les droits des salariés travaillant le dimanche dans ces commerces.

La spécificité du dimanche doit être respectée. La société se retrouve sur l’idée d’une journée différente de ressourcement, d’échange et de découverte : il s’agit de faire société ensemble, ce qui nécessite une synchronisation du temps de repos. Le dimanche est un jour où l’on est libre de son emploi du temps et du choix de son activité. De ce fait, l’activité le dimanche doit continuer à faire l’objet de régulations et de dérogations.

Le projet de réforme vise à apporter bon sens, cohérence, simplification, lisibilité et stabilité. La réforme entend intégrer les évolutions récentes de la société française : l’évolution des villes, le développement de la mobilité et du tourisme, la mutation vers la société numérique, les attentes nouvelles des Français concernant leurs souhaits d’activité le dimanche, etc. Face aux évolutions actuelles et futures, elles doivent permettre de préparer l’avenir.

La réforme est également fondée sur le dialogue social, permettant de compenser le travail du dimanche de façon cohérente et appropriée, de respecter le volontariat des salariés, de s’adapter à la diversité des territoires et donc s’appuyer sur un dialogue territorial permettant de prendre en compte leurs spécificités et l’équilibre tant entre les centres villes et les périphéries qu’entre les commerces traditionnels et les grandes enseignes. Elle vise enfin à créer les conditions pour que les évolutions se révèlent génératrices de croissance et d’emploi.

146.2.1. La création des ZTI

La mesure vise à permettre aux établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services situés dans les ZTI de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel, et à leur permettre une ouverture en soirée. Sont ainsi visées les zones de rayonnement international et disposant d’une offre commerciale particulièrement importante et attractive pour les touristes, à l’instar de zones comme les Champs-Elysées ou le Boulevard Haussmann.

Ø Procédure et critères de délimitation des ZTI

Les ZTI seront délimitées par les ministres en charge du travail, du tourisme et du commerce, après avis du maire et du président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ainsi que des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés, compte tenu de leur rayonnement international et de l’affluence exceptionnelle de touristes, notamment résidant hors France.

L’initiative et la décision au niveau des ministres se justifient de par la nature même de ces zones qui attirent une proportion importante voire prédominante de touristes étrangers et dont les enjeux débordent les questions locales, voire régionales.

§ Le travail en soirée dans les ZTI

Le rayonnement international et l’affluence exceptionnelle de touristes dans les ZTI nécessitent d’avoir des heures d’ouverture plus larges.

Le projet de loi prévoit ainsi la possibilité, pour les établissements de vente au détail situés dans les ZTI, d’ouvrir au public jusqu’à 24 heures. Actuellement, si cette ouverture en soirée est possible pour les commerces disposant d’un accord collectif en la matière ou d’une autorisation administrative, elle ne l’est que jusqu’à 22 heures. Or, les zones telles que les Champs-Elysées sont fortement fréquentées en soirée jusqu’à la fermeture des cafés et restaurants. L’ouverture des commerces au-delà de 22 heures permet donc de satisfaire les besoins de consommation de la clientèle touristique et très internationale de la zone.

Par ailleurs, il s’agit d’un alignement sur la dérogation dont bénéficient les activités de spectacle pour lesquelles la période de nuit débute à 24 heures.

Cette faculté d’employer des salariés jusqu’à 24 heures ne sera applicable qu’aux établissements couverts par un accord collectif le prévoyant, et devra donner lieu à des contreparties aux salariés, chacune des heures de travail effectuée durant la période entre 21 heures et 24 heures étant rémunérée au moins le double de la rémunération normalement due et donnant lieu à un repos compensateur équivalent en temps. Le respect du volontariat sera exigé.

Par ailleurs, l’accord collectif prévoit notamment qu’est mis à disposition du salarié un moyen de transport individuel ou collectif qui lui permette de regagner en sécurité son lieu d’habitation.

146.2.2. La création des ZC et ZT

Le projet de loi permet aux établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services situés dans les ZC caractérisées par une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes ou des ZT caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes, de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel.

Le projet de loi prévoit d’organiser un dialogue territorial (entre les élus, les acteurs économiques, l’administration et le préfet) et un dialogue social (entre les entrepreneurs, les représentants des organisations syndicales et le personnel) pour définir zones et les conditions de fonctionnement dans ces zones.

Pour la définition des critères permettant de décider de la création d’une ZC, le projet de loi revient sur le critère tiré de l’antériorité de l’usage de consommation dominicale en le remplaçant par celui d’une offre commerciale et d’une demande potentielle particulièrement importantes.

Les ZT seront celles caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes.

Les critères permettant la délimitation de ces zones seront définis par décret en Conseil d’État.

La procédure de délimitation uniformisée de ces zones sera fondée sur un dialogue territorial afin de aux différents acteurs concernés de s’entendre sur les zones devant bénéficier d’une dérogation pour l’ouverture dominicale.

L’initiative de la demande de délimitation ou de modification de ces zones appartiendra au maire ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale.

Le support du dialogue consistera en une étude d’impact justifiant notamment de l’opportunité de la création de la zone, élaborée par les différents acteurs, qui sera pilotée par l’autorité à l’initiative de la demande de délimitation.

Ces zones sont délimitées ou modifiées par le préfet de région après avis des élus locaux, des partenaires sociaux, et du comité départemental du tourisme pour les ZT, ainsi que de la chambre de commerce et d’industrie et de la chambre de métiers et de l’artisanat pour les ZC.

Ces nouvelles zones se substitueront aux PUCE et communes et zones touristiques actuels. Ainsi, les PUCE créés avant l’entrée en vigueur de la présente loi seront automatiquement basculés dans le dispositif des ZC. De même, les communes d’intérêt touristique ou thermales et les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente créées avant l’entrée en vigueur du présent projet de loi constitueront de plein droit des ZT.

Cette mesure vise tout d’abord à sécuriser la situation des commerces qui ouvrent actuellement, soit dans le cadre d’une autorisation individuelle pour ceux situés dans le périmètre des PUCE, soit dans le cadre de l’ouverture de droit dont bénéficient les établissements situés au sein des communes et zones touristiques. Au-delà, il s’agit de ne pas contraindre les communes et les services de l’État à procéder à une nouvelle instruction pour les périmètres préexistants, et dans lesquels l’ouverture dominicale est pratiquée.

146.2.3. L’extension des dimanches du maire

Le projet de réforme prévoit également d’augmenter le nombre de « dimanches du maire » de cinq dimanches à douze. Sur ces douze dimanches, cinq seront de droit pour les commerçants.

Cette mesure s’inspire du rapport Bailly qui préconise une possibilité d’ouverture dans la limite de douze dimanches, dont cinq sont de droit pour les commerçants et sept sont laissés à l’appréciation du maire. Les maires pourront ainsi répondre aux spécificités saisonnières ou événementielles de leur ville et les commerçants bénéficieront d’au moins cinq dimanches d’ouverture. Avec un tel dispositif, la France rejoint ainsi les chiffres observés dans les pays voisins. Le projet de texte prévoit que le maire fixera par arrêté les dates de ces cinq dimanches de droit.
Au-delà de ces cinq dimanches, les ouvertures s’effectueront de la même manière qu’aujourd’hui : l’octroi de dimanches est laissé à l’appréciation du maire.

146.2.4. L’ouverture le dimanche des établissements situés dans l’emprise des gares incluses dans les ZTI, ZT ou ZC ou ne relevant pas de ces zones

La mesure vise à permettre aux établissements situés dans l’emprise des gares de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel. Cette possibilité sera ouverte dans deux hypothèses différentes : soit la gare est située dans une ZTI, ZT ou ZC, et les commerces pourront alors ouvrir selon les modalités applicables dans chacune de ces zones, soit elle ne l’est pas, et alors un arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du travail et du commerce pourra autoriser l’ouverture compte tenu de l’affluence exceptionnelle de passagers dans ces gares.

146.2.5. La situation des commerces alimentaires dans les gares et les ZTI

Alors que la loi n’autorise aujourd’hui l’ouverture des commerces de détail alimentaires le dimanche que jusqu’à 13 heures, ceux situés dans les gares ou les ZTI pourront désormais ouvrir toute la journée, afin de tenir compte de la spécificité de ces zones.

Cette possibilité obéira au principe du volontariat et sera subordonnée à un accord collectif prévoyant des contreparties pour les salariés, comme cela est le cas des autres salariés travaillant le dimanche dans les ZTI, ZT et ZC.

146.2.6. Une ouverture dominicale conditionnée à l’existence d’un accord collectif fixant les contreparties octroyées aux salariés travaillant le dimanche dans les ZTI, ZT, ZC et les gares

Le cadre social du travail du dimanche sera harmonisé afin de fournir un régime protecteur pour les salariés en termes de volontariat et de contreparties.

Ce régime sera défini dans le cadre d’un accord collectif (de branche, d’entreprise, d’établissement) ou conclu à un niveau territorial.

Pour les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, l’accord pourra être conclu avec un ou plusieurs représentants du personnel (délégué du personnel ; élu au CE) mandaté par une organisation syndicale représentative dans la branche dont relève l’entreprise (ou à défaut au niveau national et interprofessionnel).En l’absence de représentants élus du personnel, l’accord pourra être conclu par un salarié mandaté de la même façon par une organisation syndicale. L’accord ainsi conclu devra être approuvé par la majorité des salariés. Ces dispositions permettant la négociation en l’absence de délégués syndicaux sont celles prévues par l’ANI de janvier 2013 sur la sécurisation de l’emploi. Elles ne sont donc pas nouvelles ni spécifiques.

Chaque commerce de détail employant des salariés le dimanche sera ainsi couvert par des dispositions conventionnelles.

Cet accord doit fixer les contreparties accordées aux salariés privés de repos dominical, ainsi que les engagements pris en termes d'emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où un accord collectif ne pourrait être conclu, il sera possible de recourir à une autorisation du préfet délivrée sur le fondement de l’article L. 3132-20 du code du travail, selon les mêmes conditions que celles en vigueur aujourd’hui, c’est-à-dire lorsqu’il est établi que la fermeture dominicale serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement (notamment en cas de distorsion de concurrence)..

146.2.7. Une ouverture dominicale conditionnée au volontariat des salariés travaillant le dimanche dans les ZTI, ZT, ZC et les gares

Le volontariat des salariés sera désormais exigé quelle que soit la nature de la dérogation accordée (L.3132-20 du code du travail, ZTI, ZT, ZC et gares) sur la base du dispositif existant le plus protecteur.

146.2.8. Une ouverture en soirée dans les ZTI conditionnée à l’existence d’un accord collectif et à une obligation de contreparties substantielles

L’emploi de salariés entre 21 h et 24 h ne sera possible que dans les établissements couverts par un accord collectif. Chacune des heures de travail de nuit, effectuée salariés appartenant aux établissements situés dans les ZTI, durant la période entre 21 h et 24 h devra être rémunérée au moins le double de la rémunération normalement due et donne lieu à un repos compensateur équivalent en temps. Seuls les salariés volontaires pourront travailler en soirée. Enfin, toujours dans le cadre de l’emploi de salariés dans les ZTI, l’accord collectif devra déterminer le moyen de transport adapté permettant aux salariés de regagner leur domicile en sécurité.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les consommateurs/particuliers

Les consommateurs disposeront de davantage de disponibilité pour accéder à des commerces offrant une amplitude d’ouverture plus large.

Impacts pour les entreprises

§ Nouvelle obligation pour les établissements situés dans les ZT

Les établissements situés dans les ZT devront à terme accorder des contreparties aux salariés et garantir le volontariat de ces derniers. Le présent projet de loi prévoit une application différée de cette nouvelle obligation (cf. § afférent aux modalités d’application de la réforme).

Il convient de minimiser la charge induite par l’octroi obligatoire de contreparties aux salariés situés dans les ZT compte tenu des accords déjà existants.

En effet, des accords locaux mettant en place des contreparties pour les salariés ont déjà été conclus dans certaines ZT à l’instar de Saint-Malo, de Marseille ou de Saint-Martin-de-Ré. Par ailleurs, certaines branches et entreprises ont négocié de tels accords qui trouvent à s’appliquer quel que soit le mode de dérogation (branche du bricolage, enseignes telles que Décathlon ou encore Boulanger). À titre d’illustration, près d’une centaine d’accords abordant le thème "travail du dimanche" ont été conclus depuis 2010 dans le secteur du commerce.

En ce qui concerne les établissements situés dans les actuels PUCE, le projet de loi n’aura aucune incidence en matière de contreparties, puisque l’obligation de contreparties est déjà applicable. Des dispositions transitoires sont prévues (cf. § afférent aux modalités d’application de la réforme) pour laisser le temps nécessaire aux entreprises de ces zones de conclure des accords dans l’hypothèse où elles étaient aujourd’hui couvertes par une décision unilatérale.

§ Simplification des démarches pour les entreprises 

Dans le cadre des futures ZC, les établissements n’auront plus à solliciter d’autorisation individuelle de dérogation, contrairement au dispositif actuel des PUCE. En effet, le droit en vigueur prévoit que chaque établissement situé dans un PUCE doit solliciter, auprès du préfet, une autorisation individuelle de dérogation au repos dominical. Cette autorisation est accordée pour une durée de cinq ans.

Le projet de réforme supprime cette demande de dérogation individuelle, et l’ouverture sera de droit comme cela est le cas dans les ZT. Ainsi, une fois la zone délimitée les commerces pourront ouvrir de droit moyennant la conclusion d’un accord prévoyant des contreparties et le respect du volontariat.

§ Gain de chiffres d’affaires

S’agissant des ZTI, l’ouverture dominicale des grands magasins générerait un surcroît de chiffre d’affaires estimé à environ 150 M€.

En effet, selon le rapport annuel du Conseil national du tourisme de novembre 2010, les touristes d’origine étrangère génèreraient de 20 à 50 % du chiffre d’affaires des grands magasins.

Les dépenses de touristes français en France représentent 43,3 Md€ (+ 1,6 % par rapport à 2011), du même ordre de grandeur que les dépenses des touristes internationaux. Près de la moitié de ces sommes (20,6 Md€) est consacrée à des dépenses autres que celles liées à l’hébergement, à la restauration et au transport, ce qui représente une évolution de + 8,9 % par rapport à 2011.

La possibilité d’ouvrir les commerces douze dimanches par an, telle que mise en place par l’article
L 3132-26 du code du travail modifié par le présent projet de loi, permettra à une majeure partie des commerces d’ouvrir le premier dimanche des soldes d’été et d’hiver, ainsi que trois dimanches en décembre. En sus de ces cinq dimanches d’ouverture, les sept dimanches supplémentaires créeront un dispositif souple pour de nombreux commerces souhaitant ouvrir pendant une partie de l’été ou de la saison touristique. Cette faculté pourra éviter une procédure complexe de classement à des communes de petite taille (par exemple, petites stations balnéaires ou de ski ayant un besoin d’animation et d’offre commerciale dominicale).

Impacts sur les administrations

La réforme devrait générer une diminution du contentieux du fait de la mise en œuvre d’une régulation des ouvertures dominicales fondée sur un dialogue territorial et social plus nourri que l’existant, et d’une réglementation plus lisible et équitable.

Les administrations déconcentrées n’auront plus à instruire les demandes de dérogation individuelle dans les PUCE du fait de la suppression de ce régime d’autorisation dans les ZC.

Enfin, les mesures transitoires avant le basculement automatique lors de l’entrée en vigueur de la loi des zones existantes dans le nouveau dispositif sont de nature à limiter le flux des demandes de délimitation de nouvelles zones.

Impacts sur les collectivités locales

Pour les collectivités locales, le développement du tourisme contribue au développement économique territorial. La création de ZT et ZTI qui nécessite d’avoir une offre commerciale coordonnée et adaptée aux besoins des touristes constitue un élément d’attractivité des villes, d’animation des centres villes et des quartiers.

Le projet de loi introduit de nouveaux acteurs dans le processus d’instruction. En effet, le projet de loi instaure une nouvelle répartition des compétences entre le maire et le président de l’EPCI. Cette compétence est actuellement exercée par le maire seul alors que demain le président de l’EPCI aura également ce pouvoir d’initiative car la réforme suppose d’avoir une gestion intercommunale, une vision globale.

Cependant, cette nouveauté est neutre pour les collectivités territoriales puisqu’avant la réforme cette compétence était déjà exercée par le maire.

Impacts juridiques

Le projet de loi n’a ni pour objet, ni pour effet de valider des situations illégales au moment où elles ont été constatées. En conséquence, les jugements rendus et les sanctions prononcées pour des ouvertures illégalement constatées antérieures à la promulgation du projet de loi ne sont pas remis en question.

Le présent projet de loi prévoit la sécurisation des anciennes zones existantes : les PUCE et les communes et zones touristiques créées avant l’entrée en vigueur de la loi deviennent des ZC et ZT à compter de l’entrée son entrée en vigueur.

Ces mesures, garantissant un traitement équitable des salariés travaillant le dimanche, sont de nature à répondre aux exigences du comité des experts sur l’application des conventions et recommandations de l’Organisation Internationale du Travail.

5. Modalités d’application

Les dispositions du projet de loi sont d’application immédiate à l’exception de trois mesures.

L’obligation d’être couvert par un accord fixant les contreparties et de garantir le volontariat dans les communes et zones touristiques délimitées avant l’entrée en vigueur de la loi ne s’appliqueront qu’à compter du premier jour du trente-sixième mois suivant celui de la publication du présent projet de loi.

S’agissant des établissements dans les PUCE qui ouvrent aujourd’hui le dimanche sur le fondement d’une décision unilatérale de l’employeur, ils pourront continuer à le faire pendant trois ans à compter de la publication du présent projet de loi. À l’issue de ce délai, ces établissements devront être couverts par un accord collectif pour pouvoir continuer à ouvrir le dimanche. Ce délai de trois ans leur permettra de rechercher les meilleures modalités en vue d’être couvert par un accord collectif. Pendant ce délai, les partenaires sociaux des branches et des territoires concernés pourront développer le dialogue social pour déterminer par accord collectif les contreparties.

Par ailleurs, en ce qui concerne les dispositions relatives aux douze « dimanches du maire », un quantum spécifique de dimanches est prévu pour l’année de promulgation de la loi (soit six dimanches pour une publication de la loi envisagée pour le milieu de l’année 2015).

Ces dispositions législatives seront applicables en France métropolitaine et dans l’outre-mer à l’exception des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.

6. Consultations menées

Dans le cadre de l’élaboration du rapport Bailly, une large concertation a été mise en œuvre . Plus de 70 auditions ont été menées et de manière générale, toutes les personnes qui en ont fait la demande, à savoir l’ensemble des acteurs concernés par la question de l’ouverture des commerces le dimanche.

Des rencontres bilatérales avec les organisations professionnelles et les organisations syndicales représentatives au niveau national interprofessionnel ont par ailleurs été tenues au cours du mois septembre 2014.

Des réunions de concertation ont été organisées avec les organisations professionnelles représentatives du commerce le 23 octobre 2014 et le 13 novembre au ministère de l’économie.

Le projet de texte a été soumis à la Commission nationale de la négociation collective le 27 novembre 2014 et au Conseil national de l’évaluation des normes le 4 décembre 2014.

Chapitre II - Droit du travail

Section 1 - Justice prud’homale

Articles 83 et 84

1. État des lieux

La France a une population active estimée à plus de 25 millions de salariés et non salariés. Parmi celle-ci, le secteur privé concurrentiel atteint 17,8 millions de salariés203. La fonction publique compte pour sa part plus de 5,5 millions d’agents titulaires et non titulaires.

Le marché du travail ainsi constitué se caractérise par une dichotomie assez prononcée, avec 86,5 % des emplois de salariés et agents publics correspondant à une relation de travail à durée indéterminée, alors que pour les contrats à durée déterminée et l’intérim, la part des emplois s’élève respectivement à 10 % et plus de 2,2 %204.

A cette stabilité apparente, correspond une rotation rapide des relations de travail à la périphérie du marché du travail. Ainsi, s’il a pu être dénombré 36 millions de déclarations préalables à l’embauche (DPAE) en 2010, l’essentiel des engagements s’est confiné à des relations de travail de courte durée : 17 millions de missions d’intérim et 12 millions de recrutements opérés dans le cadre d’un contrat de travail d’une durée inférieure à un mois. Dans ce cadre, la part des contrats à durée indéterminée paraît relativement modérée, puisqu’elle se limite à 8 % des DPAE205.

La confrontation de ces données fait ressortir un marché du travail contrasté, caractérisé par une représentation très majoritaire des relations de travail à durée indéterminée combinée à une activité marginale morcelée, parcellaire et précaire.

Pour le monde de l’entreprise, cette situation trouverait son fondement dans le risque contentieux inhérent au contrat à durée indéterminée.

A cet égard, si les recours sont peu nombreux en cas de licenciement pour motif économique (2,3 %), ils sont notablement plus importants s’agissant des licenciements pour motif personnel. Ainsi, plus du tiers des 503 000 inscriptions à Pôle Emploi ayant fait suite à l’un de ces licenciements a fait l’objet d’un recours porté devant le conseil de prud’hommes en 2013.

Evolution du taux de recours au CPH après licenciement 2004-2013

Or, le fonctionnement de la juridiction prud’homale ne correspond plus aux ambitions qui ont présidé à sa création et à son évolution depuis la loi du 18 mars 1806.

Plusieurs critiques lui sont adressées. D’une part, ses délais de traitement sont exagérément longs. D’autre part, ce qui faisait sa spécificité initiale, à savoir la conciliation obligatoire préalable, ne correspond plus qu’à une simple phase formelle, préalable à la saisine de la formation de jugement. Enfin, les décisions rendues reflètent soit des situations de blocage qui imposent l’intervention du juge départiteur, soit une fiabilité juridique relative, sanctionnée majoritairement par les chambres sociales des cours d’appel.

Sur les dix dernières années, la juridiction prud’homale a été saisie en moyenne de 200 000 demandes, avec des variations maximales de 15 % selon les années. Ainsi, en 2009, 228 000 recours ont été introduits, contre 175 000 en 2012.

Les demandes sont formées dans prés de 99 % des cas par le salarié.

Evolution du nombre d’affaires introduites (au fond et en référé)

devant les conseils des prud’hommes depuis 2004 selon la personne à l’origine de la demande

Environ 40 000 décisions sont rendues selon la procédure de référé, et la grande majorité des contestations porte sur la rupture du contrat de travail.

Evolution du nombre d’affaires introduites (au fond et en référé) devant les conseils des prud’hommes depuis 2004 et part des contestations du motif de rupture du contrat de travail

Le contentieux prud’homal concerne de manière très soutenue les ruptures de contrats à durée indéterminée. En effet, dans plus de 90 %, les demandes sont formées par des salariés ayant souscrits ce type de contrat.

Evolution des affaires terminées émanant de salariés selon la nature du contrat et proportion
de salariés en CDI depuis 2008

En 2013, les délais de traitement des demandes formées devant la juridiction prud’homale se sont encore accrus

Durée de traitement des affaires au fond traitées en 2013

selon l’instance ayant rendu la décision

(hors jonction et interprétation)

 

Affaires au fond terminées

durée moyenne (en mois)

Total des décisions*

145 470

15,9

Bureau de conciliation

13 699

2,5

Bureau de jugement

112 495

15,1

Départition

19 276

29,7

     

Source : SDSE-RGC

L’augmentation de la durée de traitement concerne toutes les phases de la procédure prud’homale.

Evolution des durées de traitement des affaires au fond terminées,

selon l’instance ayant rendu la décision, depuis 2004

(en mois)*

Année

Ensemble des affaires au fond terminées*

Bureau de conciliation

Bureau de jugement

Départition

2004

11,9

1,9

12,8

22,1

2005

12,1

2,1

12,8

22,5

2006

12,3

2,1

12,8

23,6

2007

12,5

2,1

13,0

24,3

2008

12,9

2,1

13,1

25,1

2009

12,7

2,5

13,3

24,5

2010

13,6

2,8

14,0

25,8

2011

14,4

2,8

14,3

26,5

2012

15,2

2,5

15,2

27,3

2013

15,9

2,5

15,1

29,7

Evolution

2004-2013

3,9

0,6

2,4

7,6

 

 

 

   

Source : SDSE-RGC

*hors jonction et interprétation

Ainsi, comme le montre ce tableau, le délai moyen de traitement d’une affaire terminée au fond est respectivement de 2,5 mois, 15 mois et près du double, devant la formation de conciliation, le bureau de jugement et la formation de départage. Dans ce dernier cas, les délais se sont accrus de plus de sept mois en dix ans.

L’évolution des conseils de prud’hommes se caractérise aussi par l’accroissement du nombre des appels, avec un taux d’appel au fond des deux tiers atteint en 2013.

Appel des décisions rendues par les CPH

(Affaires au fond CPH)

Affaires fond terminées par une décision statuant sur la demande

Appels interjetés*

année de la décision devant le CPH

En premier ressort

En dernier ressort

Ensemble des décisions statuant sur la demande

Nbre d'appels

Taux d'appel

2004

70 292

13 132

83 424

43205

61,5

2005

71 425

11 109

82 534

44927

62,9

2006

72 273

9 578

81 851

43274

59,9

2007

69 369

9 063

78 432

40825

58,9

2008

74 363

9 604

83 967

45178

60,8

2009

63 221

8 276

71 497

37917

60,0

2010

74 649

11 530

86 179

46671

62,5

2011

75 743

11 066

86 809

47484

62,7

2012

78 123

9 885

88 008

51722

66,2

2013

78 235

9 514

87 749

 

 

 

 

 

 

 

Source : SDSE-RGC

Ce taux d’appel est bien supérieur à celui constaté en 2012 pour les tribunaux d’instance qui s’élève à 7,4 %. Il en est de même s’agissant de celui relatif aux décisions rendues au fond émanant des tribunaux de grande instance, qui ne dépasse pas les 36 %.

La situation est d’autant plus dégradée que la part des décisions rendues en premier ressort confirmée par les cours d’appel est en diminution constante.

Résultats des appels au fond de décisions statuant sur la demande

prononcés par des CPH depuis 2004

(en effectifs)

 

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Total des arrêts

49 818

49 183

50 340

45 494

44 583

45 070

43 209

44 019

46 515

45 589

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Total des décisions statuant sur la demande

37 053

36 500

37 599

33 137

32 398

32 110

29 094

30 568

33 595

32 941

Infirmation totale

7 502

8 077

8 442

7 834

7 200

7 491

6 373

6 638

7 158

7 085

Infirmation partielle

15 137

14 700

14 434

13 637

14 065

14 302

13 392

14 126

16 947

16 157

Confirmation partielle

14 414

13 723

14 723

11 666

11 133

10 317

9 329

9 804

9 490

9 699

En %

29

28

29

26

25

23

22

22

20

21

L’ensemble de ces constats a été dressé par le rapport de M. Alain Lacabarats, président de la chambre sociale de la Cour de cassation, remis, le 16 juillet 2014, à Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la justice. Pour répondre à cette situation et restituer une justice prud’homale conforme aux attentes des justiciables, ce rapport a tracé différents axes d’action.

Outre les actions à engager en matière de formation des conseillers prud’hommes, en matière de déontologie et de discipline, la nécessité d’accélérer, de simplifier et de rationaliser les procédures et le fonctionnement des prud'hommes est cruciale.

Différentes solutions sont proposées pour favoriser un retour aux bonnes pratiques, notamment au vu des exigences inhérentes aux principes du « délai raisonnable » et de la contradiction. Il est ainsi proposé d’organiser et d’ordonner dans le temps les échanges entre les parties, d’enrichir les pouvoirs de la formation de conciliation, de favoriser une harmonisation de la jurisprudence et de rendre la représentation obligatoire devant les cours d’appel, soit par la voie du recours au ministère de l’avocat, soit par le biais de l’intervention du défenseur syndical, dont le statut est revalorisé.

Les conseillers prud’hommes ainsi que le rappelle le Conseil constitutionnel exerçant leurs fonctions à temps partiel et pour une durée déterminée dans une juridiction spécialisée, ne sont pas régis par le statut des magistrats pris en application de l'article 64 de la Constitution (2006-545 DC, 28 décembre 2006, Journal officiel du 31 décembre 2006, p. 20320, texte n°4, cons. 21, Rec. p. 138).

Néanmoins, ils sont soumis à certaines obligations déontologiques.

Ainsi, avant d’exercer des fonctions judiciaires le conseiller prud’homme doit prêter le serment prévu à l’article D. 1442-13 du code du travail: « Je jure de remplir mes devoirs avec zèle et intégrité et de garder le secret des délibérations ».

Le manquement à l’obligation d’exercer ses fonctions avec zèle est spécifiquement sanctionné par l’article L. 1442-12 du code du travail qui dispose que «  tout conseiller prud’homme qui, sans motif légitime et après mise en demeure, refuse de remplir le service auquel il est appelé peut être déclaré démissionnaire par la cour d’appel statuant en chambre du conseil ».

La faute est définie par L1442-13 du code du travail : « Tout conseiller prud’homme manquant gravement à ses devoirs dans l’exercice de ses fonctions est appelé devant la section ou la chambre pour s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés ».

Est considérée comme un manquement grave « l’acceptation par un conseiller prud’homme d’un mandat impératif, à quelque époque ou sous quelque forme que ce soit » (article L. 1442-11 du code du travail). Ce fait peut, selon le moment auquel il est établi, entraîner de plein droit l’annulation de l’élection et l’inéligibilité de l’intéressé, ou sa déchéance, après mise en œuvre de la procédure disciplinaire.

Enfin conformément aux dispositions de l’article L. 1442-15 « tout conseiller prud’homme ayant fait l’objet d’une interdiction, déchéance ou incapacité relative à ses droits civiques est déchu de plein droit de ses fonctions à la date de la condamnation devenue définitive. »

Par ailleurs ils sont soumis aux règles de récusation et de déport instituées par le code de l’organisation judiciaire et le code de procédure civile (article L.111-7 du code de l’organisation judiciaire, articles 339 et 340 du code de procédure civile). 

A côté de ces procédures de renvoi et de récusation, des interdictions sont également édictées. Ainsi, l’article L.111-9 du code de l’organisation judiciaire interdit au juge qui a connu d’une affaire en premier ressort ou en dernier ressort de faire partie de la formation de jugement du second degré ou de la Cour de cassation.

Les articles L.111-10 et L.111-11 de ce même code énoncent que les conjoints, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité, les parents et alliés jusqu’au troisième degré inclus, ne peuvent, sauf dispense, être simultanément membres d’un même tribunal ou d’une même cour en quelque qualité que ce soit et il leur est en tout état de cause interdit de siéger dans la même cause s’il est fait droit à leur demande de dispense.

Dans son rapport remis à Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, en juillet 2014, M. Lacabarats a précisé que des «initiatives de sensibilisation à la déontologie des conseillers prud’hommes ont été prises au niveau local » et souligne notamment que «  certains juges départiteurs ont pu établir des documents d’information sur la déontologie à l’intention des conseillers prud’hommes ».

Il apparaît donc opportun d’instituer un corpus d’obligations déontologiques commun, sous réserve de tenir compte de certaines spécificités, à l’ensemble des personnes, juges professionnels et juges non-professionnels, exerçant des fonctions judiciaires.

Le régime disciplinaire des conseillers prud’hommes est défini par les articles L. 1442-11 et suivants du code du travail et par les dispositions règlementaires des articles D. 1442-20 et suivants, lesquels renvoient en partie au code de l’organisation judiciaire et au code de procédure civile.

Il n’existe pas de procédure d’avertissement comparable à ce qui est prévu par l’article 44 de l’ordonnance statutaire s’agissant des magistrats de l’ordre judiciaire et, par renvoi, des juges de proximité.

Toutefois, l’article D. 1442-23 du code du travail précise que « le droit de réprimande du garde des sceaux, ministre de la justice, sur les juges non professionnels, prévu à l’article 17 de la loi du 30 août 1883 (…) [est applicable] à la juridiction des prud’hommes en tout ce qui [n’est pas] contraire aux dispositions du présent livre ».

La faute rappelée ci-dessus est définie à l’article L. 1442-13 du code du travail : « Tout conseiller prud’homme manquant gravement à ses devoirs dans l’exercice de ses fonctions est appelé devant la section ou la chambre pour s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés ».

La particularité de la procédure disciplinaire applicable aux conseillers prud’hommes réside dans le fait que le garde des sceaux, ministre de la justice, est l’organe disciplinaire décisionnaire – habilité, donc, à sanctionner des juges, fussent-ils non professionnels -, mais qu’il n’a pas l’initiative de l’engagement des poursuites.

En application de l’article L. 1442-13 du code du travail, cette initiative, consistant à « appeler » le conseiller prud’hommes ayant manqué gravement à ses devoirs, devant la section ou la chambre du conseil pour s’expliquer, appartient au président du conseil de prud’hommes et au procureur de la République.

La procédure n’est définie, outre l’article précité, que par l’article D. 1442-21 aux termes duquel : « dans le délai d’un mois à compter de la convocation, le procès-verbal de la séance de comparution est adressé par le président du conseil de prud’hommes au procureur de la République. Ce dernier le transmet avec son avis au garde des sceaux, ministre de la justice ».

Ces textes se sont substitués - lors de l'entrée en vigueur du nouveau code du travail en 2008 ayant opéré une recodification à droit constant - à l'ancien article L514-2 dudit code sur le fondement duquel avait été rédigé la circulaire SJ 91-005-AB1/28.03.91 du 28 mars 1991 relative aux droits et garanties des conseillers prud'hommes en matière disciplinaire et aux règles applicables aux procédures disciplinaires.

Toutefois, il convient de préciser que cette circulaire d’une part, prévoyait certaines formalités qui n’étaient pas prévues par les textes, et d’autre part, n'a jamais été publiée et est donc réputée abrogée en application du décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008.

La procédure applicable est donc déterminée en grande partie par la jurisprudence administrative qui a posé les principes applicables en matière disciplinaire et notamment les garanties relatives au droit à la communication du dossier sur lequel sont fondées les poursuites, et plus généralement au respect des principes du contradictoire et des droits de la défense (délai de convocation).

En application de l’article L. 1442-16 du code du travail, un conseiller prud’homme peut faire l’objet d’une suspension pour une durée maximale de 6 mois par le ministre de la justice, sur proposition du premier président de la cour d’appel et du procureur général près cette cour, en cas de « faits de nature à entrainer des poursuites pénales contre un conseiller prud’homme ». Cette mesure peut être prise après mise en œuvre de la procédure disciplinaire prévue par l’article L. 1442-13 du code du travail.

L’article L. 1442-14 du code du travail dispose que le ministre de la justice peut prononcer trois sanctions :

- la censure (par arrêté ministériel) ;

- la suspension pour une durée ne pouvant excéder six mois (par arrêté ministériel) ;

- la déchéance (par décret).

Ces décisions sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir devant les juridictions administratives compétentes (tribunal administratif s’agissant des arrêtés et Conseil d’État s’agissant des décrets).

Enfin, en application de l’article D. 1442-26 du code du travail, l’honorariat peut être conféré par arrêté du garde des sceaux aux anciens présidents et aux anciens membres des conseils de prud’hommes ayant exercé leurs fonctions pendant douze ans (par arrêté pris sur proposition du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé le siège du conseil, après avis de l’assemblée générale du conseil). Et il peut être retiré suivant la même procédure.

En pratique, selon les éléments statistiques du ministère de la justice, sur les 87 signalements reçus entre 2005 et octobre 2014 ont été prononcées 16 décisions :

- deux arrêtés de censure ;

- six arrêtés de suspension provisoire d’une durée de six mois, un arrêté de suspension provisoire d’une durée de quatre mois (décision annulée par la juridiction administrative), un arrêté de suspension d’une durée de deux mois ;

- six décrets de déchéance.

Sur la même période étaient également constatées douze démissions de conseillers prud’hommes faisant l’objet d’un signalement déontologique.

Les conseillers prud’hommes exerçant des fonctions judiciaires, nombre de textes de l’ordre international ou européen, supérieurs aux dispositions internes dans la hiérarchie des normes, concernant les « juges » s’appliquent à leur situation. Ainsi, les exigences d’indépendance et d’impartialité des tribunaux posées par l’ensemble des textes internationaux concernent-elles les juridictions formées de juges non-professionnels.

Le Pacte international des Nations unies relatifs aux droits civils et politiques du 16 décembre 1996, notamment son article 14, et la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée le 10 décembre 1948, en son article 10, proclament le droit à un « tribunal indépendant et impartial ».

Ces principes d'indépendance et d'impartialité sont repris au plan européen par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, en son article 6. Dans de nombreuses décisions, la Cour européenne est venue en préciser les implications concrètes, en énonçant notamment que l’indépendance du tribunal s’apprécie au regard du mode de désignation et de la durée du mandat des membres (CEDH, 23 juin 1981, série A n° 43, Le Compte, Van Leuven et De Meyere c. Belgique), en posant le principe d’inamovibilité des juges au cours de leur mandat comme un corollaire de leur indépendance (CEDH, 28 juin 1984, série A n° 80, Campbell et Fell c. Royaume-Uni) et en veillant à ce que le juge ne reçoive aucune pression ou instruction dans l’exercice de ses fonctions juridictionnelles, qu’elles émanent du pouvoir exécutif (CEDH, 28 juin 1984, série A n° 80, Campbell et Fell c. Royaume-Uni), du pouvoir législatif (CEDH, 26 août 2003, Filippini c. Saint-Marin) ou des parties (CEDH, 22 juin 1989, série A n° 155, Langborger c. Suède ou CEDH, 23 novembre 1993, série A n° 279, Holm c. Suède).

La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne adoptée le 18 décembre 2000 a également proclamé ce principe, en son article 47.

Par ailleurs, des principes à valeur non contraignante adoptés à l’échelle européenne rappellent les règles d’indépendance et d’impartialité des juges et disposent expressément que leurs dispositions s'appliquent également aux juges non professionnels, à moins qu'il ne ressorte clairement du contexte qu’elles ne sont applicables qu'aux juges professionnels.

Ainsi, la Charte européenne sur le statut des juges, adoptée par les participants de pays européens et les membres de deux associations internationales de juges réunis du 8 au 10 juillet 1998 à Strasbourg reprend ces principes, en les développant. Ce texte dispose que « les garanties attachées notamment au recrutement des juges, aux incompatibilités, au comportement en dehors des fonctions ou à la cessation de celles-ci s’appliquent à tous les juges » (y compris les non-professionnels).

Dans la Recommandation CM/Rec (2010)12 du Comité des Ministres aux États membres sur les juges : indépendance, efficacité et responsabilités a été adoptée par le Comité des Ministres le 17 novembre 2010, l’indépendance des juges est conçue comme « un élément inhérent à l’État de droit et indispensable à l’impartialité des juges et au fonctionnement du système judiciaire » visant à garantir à toute personne le droit fondamental de voir son cas jugé équitablement sur le seul fondement de l’application du droit et en l’absence de toute influence indue. L’impartialité et l’indépendance des juges sont considérées comme essentielles pour garantir l’égalité des parties. Au nom de « l’indépendance externe » et « pour éviter tout conflit d’intérêts réel ou perçu comme tel », ce texte préconise de limiter la participation des juges à des activités compatibles avec leur impartialité et leur indépendance. Au nom de « l’indépendance interne », la recommandation rappelle que « les juges devraient pouvoir prendre leurs décisions en toute indépendance et impartialité, et pouvoir agir sans restrictions, influences indues, pressions, menaces ou interventions, directes ou indirectes, de la part d’une quelconque autorité, y compris les autorités judiciaires elles-mêmes ». Dans le chapitre consacrée à l’éthique des juges, ce texte évoque l’importance pour les juges, dans leurs activités, d’être guidées par des principes éthiques de conduite professionnelle qui comprennent non seulement des devoirs pouvant être sanctionnés par des mesures disciplinaires mais qui guident également les juges sur la façon de se comporter.

Une étude réalisée en 2009 par le bureau du droit comparé du Service des affaires européennes et internationales du ministère de la justice, montre que l’institution d’une juridiction paritaire composée de juges non-professionnels, pour le jugement des contentieux du droit du travail est spécifique en Europe à la France. Seuls trois pays, l’Allemagne, la Belgique et le Royaume-Uni ont instauré un échevinage faisant appel à des juges non professionnels.

Des éléments recueillis en novembre 2014 sur le régime disciplinaire des magistrats statuant dans les litiges de droit du travail en Belgique il peut être observé que :

- la discipline des magistrats, professionnels et non professionnels, en exercice au sein des juridictions chargées du contentieux du travail, est régie par les dispositions du Code judiciaire, en ses articles 404 et suivants. Il convient de noter que les dispositions relatives aux mesures disciplinaires s’appliquent invariablement à l’ensemble des magistrats, professionnels ou non professionnels, qui exercent leur activité dans le cadre de ce contentieux. La matière a été profondément remaniée, à la suite d’une réforme en date du 15 juillet 2013,

- certains critères relatifs aux fautes constituant un manquement à la déontologie sont fixés par la loi, au sein du Code judiciaire. Ces règles sont applicables à l’ensemble de la profession des magistrats, quels que soient les contentieux dont ils ont la charge.

La compétence de principe est celle du tribunal disciplinaire dont les chambres sont composées de deux juges du tribunal disciplinaire et d’un assesseur issu d’une juridiction de même niveau que celle dont est issue le personne poursuivie, un bâtonnier d’un conseil de l’ordre est chaque fois adjoint avec voix consultative.

L’autorité compétente pour initier la procédure disciplinaire est le président du tribunal du travail à l’égard des membres de ce tribunal, y compris les juges sociaux. Elle peut agir sur plaine à caractère disciplinaire transmise directement par des particuliers. La procédure disciplinaire peut toujours être intentée sur réquisition du ministère public près la juridiction dont est issue la personne concernée.

Une peine mineure peut être prononcée par l’autorité qui initie la procédure et une peine majeure par la première chambre de la cour du travail pour les juges sociaux. Un appel est possible devant le tribunal disciplinaire d’appel et n’est pas suspensif.

En ce qui concerne la formation des conseillers prud’hommes, l’’article L 1442-1 du code du travail dispose que « l'État organise, dans des conditions déterminées par décret, la formation des conseillers prud'hommes et en assure le financement » étant précisé que des autorisations d’absence sont accordées pour les salariés membres d’un conseil de prud’hommes dans la limite de 6 semaines par mandat (et ne peut dépasser 2 semaines par année civile). Ces absences sont rémunérées par l’employeur, au titre de la participation au financement de la formation professionnelle, ne diminuent pas les congés payés et sont assimilées à une durée de travail effectif (L 1442-2 et D 1442-7 du même code).

Les dispositions réglementaires, articles D 1442-1 à D 1442-10 du code du travail explicitent les modalités de financement de cette formation et mentionnent les organismes auxquels l’État en délègue l’exécution.

Ainsi, aux termes des articles D 1442-1 et D 1442-3, la formation des conseillers prud’hommes peut être assurée, en exécution d’une convention de 5 ans signée avec le Ministère du travail, par des établissements publics ou instituts de formation des personnels de l'État ; par des établissements publics d'enseignement supérieur ; par des organismes privés à but non lucratif qui sont rattachés aux organisations professionnelles et syndicales ayant obtenu, au niveau national, cent cinquante sièges aux dernières élections prud'homales répartis dans au moins cinquante départements ou se consacrent exclusivement à cette formation.

La convention relative à la formation précise le programme, défini conformément aux dispositions d'un arrêté du Ministre de la Justice et du Ministre du Travail, le nombre de journées de formation par stagiaire, la durée de chaque stage, les moyens pédagogiques et techniques mis en œuvre, l'estimation de l'aide financière globale de l'État, sa répartition sur la durée de la convention et l'organisation de la délégation de l'aide financière de l'État à des structures locales. La convention précise également « les modalités du contrôle, notamment administratif et financier, des stages de formation donnant lieu au versement de l'aide financière de l'État ainsi que les modalités d'évaluation du dispositif » (D 1442-5).

L’aide financière de l’État comprend, selon l’article D 1442-4 :

« 1° Un fonds destiné à financer les frais de structure de l'organisme. Ces frais comprennent :

a) Les frais de formation suivants dans le cadre des sessions :

― matériel et documentation ;

― locaux ;

― fournitures diverses ;

b) Les frais de formation suivants hors sessions :

― frais de formation des formateurs ;

― frais liés à l'utilisation des nouvelles technologies ;

c) Les dépenses administratives suivantes :

― frais de personnel ;

― frais de fonctionnement ;

2° Une participation calculée sur la base d'un montant forfaitaire par jour de formation et par stagiaire. Cette participation couvre les dépenses d'enseignement ainsi que les frais de déplacement et de séjour des stagiaires. Ce forfait est fixé annuellement dans la convention ».

Concrètement, en application de ces dispositions, c’est le Ministère du Travail qui assure l’agrément, le conventionnement et le financement des organismes de formation prud’homale. Il contrôle également l’effectivité des formations sur le plan quantitatif. En pratique, cette formation est dispensée par des instituts du travail (entités juridiques autonomes créées au sein d’établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel) et, principalement, par des associations rattachées aux organisations professionnelles et syndicales.

On rappellera que l’importance de la formation des magistrats est reconnue dans des textes internationaux tels que les principes fondamentaux de l’ONU relatifs à l’indépendance de la magistrature adoptés en 1985.

Au niveau européen, la Charte européenne sur le statut des juges de 1998, la Charte européenne sur le statut des juges non professionnels de 2012, ainsi que les différents avis rendus par le Conseil consultatif des juges européens (v. particulièrement l’avis no 4 sur la formation initiale et continue appropriée des juges, aux niveaux national et européen) et recommandations du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe rappellent de façon constante qu’un haut niveau de compétences professionnelles constitue une condition préalable indispensable à la confiance que l’opinion publique accorde aux juges, leur légitimité et leur rôle résultant de cette compétence. Une formation professionnelle appropriée leur permet d’améliorer l’efficacité de leur performance dans leur travail et, par conséquent, de renforcer la qualité de la justice dans son ensemble.

La recommandation CM/Rec(2010)12 du Comité des Ministres aux États membres sur les juges intitulée indépendance, efficacité et responsabilités précise que « les juges devraient bénéficier d’une formation initiale et continue théorique et pratique, entièrement prise en charge par l’État. Celle-ci devrait inclure les questions économiques, sociales et culturelles nécessaires à l’exercice des fonctions judiciaires. L’intensité et la durée de cette formation devraient être fixées en fonction de l’expérience professionnelle antérieure.

Une autorité indépendante devrait veiller, en respectant pleinement l’autonomie pédagogique, à ce que les programmes de formations initiale et continue répondent aux exigences d’ouverture, de compétence et d’impartialité inhérentes aux fonctions judiciaires ». (paragraphes 56 et 57).

Conformément à ces principes, la formation des conseillers prud’homaux, base d’une justice de qualité, existe en France et est financée par l’État. Pour autant, il est constaté une participation insuffisante aux actions de formation dans la mesure où celle-ci n’a aucun caractère obligatoire. Les conseillers prud’homaux se forment en moyenne 13 jours par mandature sur les 36 jours qui leur sont proposés 87% des crédits provisionnés pour ces formations sont consommés.

En outre, la formation demeure insuffisante sur le plan de la procédure ou de la conduite du procès. Peu encadré juridiquement, le contenu de la formation est fixé par un arrêté du 11 décembre 1981 relatif aux stages de formation des conseillers prud’homaux, portant sur le programme et les méthodes pédagogiques à mettre en œuvre (annexe 2 de l’arrêté).

L’enjeu est donc de proposer un dispositif qui rende obligatoire la formation des conseillers prud’homaux en mettant en place un programme de formation relatif aux principes fondamentaux du procès, à la procédure, à la méthodologie et à la déontologie, commun à l’ensemble des juges du travail, complémentaire de la formation des organisations professionnelles et syndicales, contribuant à assurer une justice de qualité.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif d’améliorer le fonctionnement de la juridiction prud’homale en agissant sur plusieurs axes qui sont :

- La formation ;

- La déontologie ;

- La discipline ;

- Le contrôle ;

- Le traitement du contentieux prud’homal.

La procédure est intrinsèquement longue car elle peut recouvrir trois temps successifs : le temps de la conciliation, le temps du jugement et celui enfin de la départition. Dans ce cadre, le temps du procès est d’autant plus long que les procédures impliquant l’intervention du bureau de jugement ou la formation de départage sont quantitativement importante.

Evolution des décisions rendues selon l’instance de jugement

(hors jonction et interprétation)

Année

Ensemble

Bureau de conciliation

Bureau de jugement

Départition

Effectifs*

%

Effectifs

%

Effectifs

%

Effectifs

%

2004

151 367

100,0

23 573

15,6

113 192

74,8

14 602

9,6

2005

147 268

100,0

22 714

15,4

110 568

75,1

13 986

9,5

2006

145 468

100,0

21 837

15,0

109 164

75,0

14 467

9,9

2007

142 072

100,0

21 536

15,2

106 588

75,0

13 948

9,8

2008

145 534

100,0

20 951

14,4

109 224

75,1

15 359

10,6

2009

131 582

100,0

19 770

15,0

97 306

74,0

14 506

11,0

2010

151 260

100,0

19 928

13,2

115 979

76,7

15 353

10,2

2011

150 309

100,0

17 894

11,9

115 760

77,0

16 655

11,1

2012

146 087

100,0

14 234

9,7

116 507

79,8

15 346

10,5

2013

145 498

100,0

13 699

9,4

112 523

77,3

19 276

13,2

Source : SDSE-RGC

 

 

 

 

 

 

 

Si l’on se réfère au temps moyen de traitement et à la répartition des affaires terminées selon les formations sollicitées, les délais de résolution des litiges devant le conseil des prud’hommes peuvent être présentés ainsi :

- pour 9,4 % des décisions, l’affaire est traitée en conciliation dans un délai de 2,5 mois ;

- pour 77,3 % devant le bureau de jugement de 15 mois ;

- pour 13,2 % le juge départiteur de 29 mois.

Robert Badinter, garde des Sceaux, ministre de la justice, dans son allocution prononcée lors de la séance inaugurale du Conseil supérieur de la prud’homie, rappelait que, dès 1982, l’amélioration du fonctionnement des juridictions prud’homales constituait l’une de ses priorités. Trente ans après, s’impose la nécessité de reprendre le travail de réforme. Et le constat formulé en son temps par M. Badinter des méfaits d’une procédure peu satisfaisante s’avère d’une acuité renforcée. Aujourd’hui encore, nous pouvons en effet reprendre ses propos : « Humainement, attendre la solution du litige, c’est en soi une épreuve qui s’ajoute à l’épreuve… Les délais ne sont pas seulement des chiffres, ce sont aussi des difficultés et quelquefois des souffrances humaines ».

C’est pour enfin lever cette inertie du quotidien de la juridiction prud’homale que le projet de loi contient différentes dispositions visant à restaurer l’effectivité du traitement du contentieux prud’homal.

Un mouvement, dans le cadre duquel ont été déposés plusieurs projets de lois, est en cours pour doter les agents du secteur public notamment de la justice d’instruments déontologiques (cf - recueil des obligations déontologiques des magistrats, chartes de déontologie et collèges de déontologie des membres des juridictions administratives et des membres des juridictions financières, projet de loi n°1278 relatif à la déontologie et aux droits de fonctionnaires, projet de loi n° 1322 sur le renforcement des obligations déontologiques des magistrats de l’ordre judiciaire), auquel échappent actuellement les conseillers prud’hommes.

Dans son rapport relatif à la prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des Dans son rapport relatif à la prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs en France, publié le 27 janvier 2014, le groupe d’états contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECO), préconise qu'une réforme soit rapidement conduite au niveau des tribunaux de commerce et des conseils des prudhommes afin de renforcer l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité des juges non professionnels. Il propose de rendre la formation obligatoire afin d’assurer un bon fonctionnement, garantir l'impartialité et prévenir tout conflit d’intérêts. Il précise que des règles statutaires et déontologiques, ainsi qu’une supervision plus efficace devrait accompagner cette réforme.

Dans son rapport précité M. Lacabarats, propose que soit arrêté un corpus de règles déontologiques s’articulant autour des thèmes de l’impartialité, de l’indépendance, de la légalité, de la compétence, de l’honnêteté, de la dignité, de la loyauté, de la discrétion et de la diligence.

L’objectif de la présente loi est de fixer les obligations déontologiques auxquelles sont soumis les conseillers prud’hommes. .

Si une procédure disciplinaire existe, en pratique, le garde des sceaux est destinataire de relativement peu de procédures disciplinaires au regard du nombre de conseillers prud’hommes et prononce peu de sanctions.

A l’issue de ses travaux, M. Lacabarats, a considéré que le dispositif disciplinaire actuel ne prévoyant l’engagement des poursuites que sur initiative du procureur de la République ou du président du conseil des prud’hommes n’était pas satisfaisant. Il a préconisé de le rapprocher des règles en usage pour les magistrats professionnels et notamment proposé d’attribuer aux premiers présidents de cour d’appel le pouvoir de délivrer un avertissement aux conseillers prud’hommes de son ressort. Il a également suggéré que les poursuites ne soient plus exercées devant le Conseil des prud’hommes où le conseiller prud’homme poursuivi a son activité, pour des raisons tenant, tant à l’effectivité de la procédure disciplinaire qu’à l’impartialité des juges et souhaité que la procédure disciplinaire soit confiée au Conseil supérieur de la magistrature, ou à une instance disciplinaire ad hoc ou encore au Conseil supérieur de la prud’homie, sous réserve que sa composition soit revue.

L’objectif de la présente loi est de renforcer l’efficience du régime disciplinaire des conseillers prud’hommes notamment en instaurant un dispositif d’avertissement, en créant une instance disciplinaire, en réformant la procédure disciplinaire applicable et en élargissant le panel des sanctions encourues par les conseillers prud’hommes.

L’objectif de la réforme est, dans un souci de qualité de la justice, de permettre aux conseillers prud’hommes nouvellement désignés d’appréhender au mieux les enjeux socio-économiques des dossiers, la technique juridique et les règles déontologiques, par une formation initiale et continue approfondie. Outre les formations techniques au droit positif, une homogénéisation des pratiques est également recherchée.

Ainsi, le projet vise à moderniser la formation des conseillers prud’hommes en inscrivant dans la loi le caractère obligatoire de cette formation. Pris en charge par l’État, un socle commun de formation serait dispensé aux conseillers employeurs et aux conseillers salariés. Ainsi, les sujets spécifiquement judiciaires et processuels, comme l’organisation judiciaire, les rôles respectifs des juges et des greffiers, la technique de conciliation, les principes directeurs du procès civil, la rédaction des jugements et la déontologie feraient l’objet d’un enseignement unitaire délivré à tous les conseillers. Pour assurer la mise en place d’un tronc commun de formation et la réalisation de l’objectif défini, la participation de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) dont la légitimité sur le champ de la formation judiciaire n’est plus à démontrer, est envisagée, étant précisé qu’à ce jour cette Ecole n’a jamais eu de mission de formation des conseillers prud’homaux. La formation pourrait avoir lieu dans le ressort de chaque cour d’appel.

En outre, afin d’assurer l’efficacité du système mis en place, une sanction est prévue au non-respect de l’obligation de formation initiale.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

S’agissant de l’amélioration du traitement du contentieux, il aurait été envisageable de cantonner la réforme à de simple ajustements procéduraux.

Cependant, les précédentes réformes qui ont été conduites en ce sens n’ont pas été suffisantes pour accompagner les juridictions prud’homales dans le traitement pleinement efficace de ces affaires.

L’option législative pour conduire cette réforme du traitement du contentieux a ainsi été privilégiée afin de poser les fondements d’une véritable juridiction prud’homale rénovée qui lui permettra de faire face à ce contentieux tout en préservant sa spécificité.

Par ailleurs, l’article 34 de la Constitution prévoit que la loi fixe les règles concernant « le statut des magistrats ». Cette expression inclut les règles statutaires applicables aux conseillers prud’hommes dans la mesure où ils exercent une activité juridictionnelle.

Dès lors, tant en matière disciplinaire qu’en matière de déontologie, un texte législatif s’impose pour modifier les dispositifs existants ou créer de nouveaux dispositifs.

Enfin, en matière de formation, l’objectif visé par le projet vise à modifier les principes relatifs à la formation des conseillers prud’homaux et instaurer le caractère obligatoire de cette formation. L’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du régime des obligations civiles et commerciales. L’obligation imposée aux conseillers prud’hommes relève du seul niveau législatif. Un décret en Conseil d’État sera pris pour définir les conditions et modalités précises de la formation initiale, notamment le délai dans lequel l’obligation de formation initiale doit être exécutée.

3.1. Donner toutes ses chances à la conciliation

En affirmant la mission conciliatrice fondamentale du bureau de conciliation

Tel est l’objet du 19° de l’article 87 qui introduit un nouvel article L.1454-1 qui rappelle solennellement qu’il entre dans la mission de ce nouveau bureau « de concilier les parties ». C’est dire que la conciliation n’est plus conçue comme une simple « phase » procédurale. Elle fait partie de la mission même des conseils de prud’hommes.

En ouvrant la palette des dispositifs pour permettre une conciliation

Tel est aussi l’objet du II et III de l’article 87 du projet de loi.

Ainsi que cela a été précédemment souligné, le taux de conciliation devant le conseil de prud’hommes n’est actuellement pas satisfaisant, de sorte qu’il apparaît nécessaire de revaloriser cette première étape de la procédure. Il doit être souligné à cet égard qu’en application des dispositions législatives existantes, le conseil de prud’hommes a la possibilité, pour les litiges dont il est saisi, d’ordonner une mesure de médiation. Il est cependant nécessaire de prendre des mesures règlementaires d’adaptation, afin d’inciter le conseil de prud’hommes à avoir recours à de telles mesures et d’améliorer la procédure de conciliation elle-même. L’objectif poursuivi n’est en tous les cas pas de déposséder le bureau de conciliation et d’orientation de sa mission de conciliation mais au contraire de faciliter cette conciliation, en fournissant à la juridiction de nouveaux outils procéduraux qu’elle restera libre d’utiliser.

Le développement des modes alternatifs de règlement des litiges doit par ailleurs trouver son terrain d’élection avant la saisine du juge. En effet, et il s’agit là d’une tendance globale en matière civile, commerciale et sociale en France et dans l’Union européenne, il est opportun de fournir aux parties un cadre procédural adapté afin qu’elles soient incitées à tenter de résoudre à l’amiable leur litige. En matière prud’homale, une telle réforme permettra au conseil de prud’hommes d’examiner, lors d’une demande d’homologation judiciaire, les accords intervenus entre les parties dans un cadre extrajudiciaire, ce qu’il ne peut pas faire actuellement sauf cas particuliers, ainsi que de n’avoir à juger que les dossiers les plus contentieux qui n’ont pu être résolus à l’amiable.

C’est pourquoi en, matière de médiation et de conciliation, le II de l’article 87 abroge l’article 24 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative. Cet article 24 a été inséré par l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 transposant la directive 2008/52/CE du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale. Cette directive a en particulier posé le principe selon lequel les accords issus de processus de médiation extrajudiciaire pouvaient être soumis à l’homologation du juge, pour qu’ils aient force exécutoire. Cette directive ne s’appliquait qu’aux litiges transfrontaliers mais lors de sa transposition il a été fait le choix de la transposer aussi aux litiges internes. Cependant, pour les litiges relevant de la compétence des conseils de prud’hommes, la transposition a été effectuée a minima, de sorte qu’actuellement seuls les accords de médiation portant sur des litiges transfrontaliers peuvent faire l’objet d’une demande d’homologation judiciaire devant le conseil de prud’hommes.

Par l’abrogation de cet article 24, les parties seront autorisées à saisir le conseil de prud’hommes d’une demande d’homologation judiciaire d’accords portant également sur des litiges internes. Cette disposition ne pourra donc que favoriser le recours à une médiation ou une conciliation dans un cadre extrajudiciaire puisqu’elle apportera une sécurité juridique aux accords issus de ces processus. Ce recours à la médiation et la conciliation extrajudiciaires ne restera qu’une faculté ouverte aux parties.

Le III de l’article 87 supprime le second alinéa de l’article 2064 du code civil qui exclut la possibilité de conclure une convention de procédure participative pour les différends s’élevant à l’occasion de tout contrat de travail, entre employeur et salarié. Il est rappelé que la procédure participative a été instaurée par la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires. Il s’agit d’un nouveau mode de négociation structurée, inspiré du droit collaboratif nord-américain.

Par la convention de procédure participative, les parties à un différend s’engagent, avant tout procès, à rechercher une solution amiable à ce différend, chacune avec l’assistance de son avocat. Elles peuvent dans ce cadre bénéficier de l’aide juridictionnelle. A l’issue de cette procédure participative, si un accord est intervenu entre les parties, le juge peut être saisi pour homologuer l’accord afin de le rendre exécutoire.

Il est ainsi proposé aux parties l’utilisation de cet autre mode extrajudiciaire de résolution amiable des différends.

3.2. Offrir une palette de voies procédurales permettant de tenir compte de la spécificité des affaires

Tel est l’objet des 2° et 3° du I de l’article 87 du projet de loi qui disposent que le bureau de conciliation devient le « bureau de conciliation et d’orientation ».

Cette nouvelle dénomination reflète une volonté de consacrer la nouvelle palette procédurale offerte à cette formation qui pourra, aboutir à une conciliation, mais aussi opter pour la saisine du bureau de jugement, composé le cas échéant dans sa formation restreinte, ou devant la formation de départage.

En effet, afin de disposer d’un traitement contentieux mieux adapté à la nature de certaines, le bureau de conciliation est doté d’une compétence d’orientation singulièrement enrichie par le projet de loi.

Dans neuf cas sur dix, la phase de conciliation ne met pas fin au litige et les parties sont renvoyées devant le bureau de jugement, voire, le cas échéant, la formation de départage. Pour autant, certains analystes considère que cette appréciation du contentieux ne reflète qu’imparfaitement la réalité des suites réservées aux saisines de la juridiction prud’homale. Ils font référence aux accords intervenus hors les murs de la juridiction, que ce soit par référence aux désistements et aux radiations qui correspondent respectivement 10 et 16 % des décisions terminées au fond. A leurs yeux, ces incidents de procédure sont consubstantiels à la procédure prud’homale elle-même.

Ainsi, la juridiction prud’homale présente, au vu de ces éléments, une dimension paradoxale, à savoir participer à la détermination de la solution d’un litige en s’exonérant de la sécurité juridique attachée à la décision de justice.

Ainsi donc, la conciliation hors les murs serait trois fois plus importante que la conciliation rendue obligatoire par l’article L. 1411-1 du code du travail.

Ce constat n’est pas satisfaisant et dénote un cadre procédural qui ne répond pas aux attentes du justiciable. Les parties finissent par trouver un accord, mais hors du cadre qui a été prévu à cet effet.

C’est pourquoi, le rapport Lacabarats a proposé que les fonctions de la formation de conciliation soit enrichies, aux fins de porter une attention à une attente des justiciables qui souhaitent pouvoir accéder à des voies procédurales plus adaptées à leur situation, à la nature de leur litige. A cet effet, le bureau de conciliation et d’orientation est appelé à offrir une palette de voies procédurales potentielles susceptibles de lever les obstacles à l’émergence d’une solution interne à la juridiction.

3.2.1. Le renvoi devant le bureau de jugement dans sa formation restreinte

En cas d’échec de la conciliation, outre le renvoi de droit commun au bureau de jugement, l’article L.1454-1-2 du code du travail, introduit au 19° du I de l’article 87 du projet de loi, offre la possibilité, en cas de licenciement ou de résiliation judiciaire, au salarié et à l’employeur qui le souhaitent de renvoyer l’affaire devant le bureau de jugement, constitué d’un seul conseillers prud’hommes salarié et d’un seul conseiller employeur. Dans ce cas, l’affaire est jugée dans un délai de 3 mois. Ainsi, si l’on se réfère aux délais de traitement ci-dessus exposés, la combinaison de la séance de conciliation avec l’audience du bureau de jugement pourrait permettre d’envisager l’intervention de la décision dans un délai avoisinant les six mois.

Dans ce cadre, avec l’accord des parties, serait privilégié l’objectif de célérité. Cette nouvelle voie procédurale serait toutefois infléchie. Ainsi, dans le cas où interviendrait un partage, l’affaire serait directement renvoyée devant la formation de départage. Toute latitude serait laissée encore aux conseillers de juger que l’affaire mérite l’intervention d’une formation plus solennelle, constitutive d’une collégialité plus étendue et d’un débat juridique plus affirmé.

Ainsi, même avec l’accord des parties, cette ouverture procédurale ne peut jouer que pour autant que les conseillers prud’hommes y soient favorables.

3.2.2. Le renvoi devant le bureau de jugement présidé par un juge professionnel

En cas d’échec de la conciliation, une autre voie procédurale est offerte aux parties, et ce en raison de la nature de l’affaire. Celles-ci peuvent en effet demander que l’affaire soit portée directement devant la formation présidée par un juge professionnel, notamment lorsqu’elles considèrent notamment que leur litige nécessite une analyse juridique plus approfondie. Le renvoi est de droit lorsque le salarié et l’employeur le demandent.

En application du deuxième alinéa de l’article L.1454-1-3 également introduit au 19° du I de l’article 87 du projet de loi, lorsque l’accord des parties n’est pas réuni, le renvoi devant la formation présidée par le juge professionnel peut aussi intervenir en cas de partage des conseillers prud’homme.

Au vu du caractère particulier de cette procédure, le bureau de jugement ne peut rendre sa décision que pour autant que celui-ci soit réuni au complet.

Ces deux voies procédurales accréditent les nouvelles fonctions dévolues au bureau de conciliation et d’orientation qui ne se limite plus à la prise d’acte d’un accord ou une absence d’accord, mais doit répondre à l’attente des parties et apprécier la spécificité d’une affaire aux fins de renvoyer le litige vers la formation la plus adéquate.

3.2.3. Le statut du défenseur syndical

La création d’un véritable statut du défenseur syndical garantira au salarié une défense de qualité. Le statut des défenseurs syndicaux créé par le projet de loi précise la rémunération de leurs heures de délégation, leur dispositif de formation, les obligations de confidentialité qui s’imposent à eux.

L’article L.1453-4 du code du travail est complété des dispositions permettant de créer un véritable statut des défenseurs syndicaux :

- publication par chaque organisation syndicale et professionnelle de la liste de ses défenseurs syndicaux ;

- maintien du salaire des défenseurs syndicaux pendant les heures de délégation pour l’exercice de ses fonctions, dans la limite de 10 heures par mois. Cette rémunération est remboursée aux employeurs par l'État ;

- dispositif de formation des défenseurs syndicaux de 2 semaines par période de quatre ans suivant la publication de la liste ;

- obligations de confidentialité et de secret pour les défenseurs syndicaux.

3.2.4. Donner de nouveaux outils aux juges prud’homaux

En vertu du 8ème alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, « tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ». Sur le fondement de cette disposition, les partenaires sociaux sont fondés à édicter des normes obligatoires qui participent de notre ordonnancement juridique. Au plan international, les conventions collectives peuvent en outre constituer une norme éligible à la transcription en droit interne d’un engagement international.

Ainsi, la convention collective, au même titre que la loi ou le règlement, peut être, sur un périmètre territorial donné, source de droits et d’obligation. Au vu de cette portée, le juge, confronté à certains litiges, peut avoir besoin d’être éclairé sur l’interprétation d’une stipulation d’ordre conventionnel. Or, la procédure d’avis devant la Cour de cassation est réservée aux demandes intéressant exclusivement l'interprétation de dispositions légales ou réglementaires civiles ou pénales.

L’exclusion du champ de l’avis de la Cour de cassation est dommageable, ce d’autant que parfois une question d’interprétation d’une norme conventionnelle peut connaître un retentissement pratique conséquent. Aussi, au IV de l’article 87, le projet de loi prévoit de modifier l’article L. 441-1 du code de l’organisation judiciaire en étendant la voie de la demande d’avis de la Cour de cassation.

L’introduction de cette demande d’avis contribuera à l'efficacité de l'action judiciaire, en évitant la multiplication de décisions contradictoires sur le même sujet, et ce dans des délais maîtrisés permettant la formation d'une jurisprudence unifiée.

3.2.5. Déontologie

Dans le souci de renforcer l’indépendance, l’impartialité et l’intégrité des conseillers prud’hommes, ainsi que pour unifier les obligations déontologiques pesant sur les juges non-professionnels et sur le modèle des dispositions du statut de la magistrature, le 8° du I de l’article 87 du projet de loi remplace l’article L.1442-11 du code du travail pour énoncer les obligations déontologiques qui pèsent sur les conseillers prud’hommes : indépendance, impartialité, dignité, probité, devoir de réserve, interdiction de toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions.

Un décret viendra préciser que le Conseil supérieur de la prud’homie élabore et rend public un guide déontologique des juges des conseillers prud’homme, destiné à expliciter et préciser le sens des obligations déontologiques. Une diffusion large notamment par le biais d’internet de ce document est envisagée et sera organisée.

3.2.6. Procédure disciplinaire

Afin de renforcer le rôle des premiers présidents des cours d’appel en matière de contrôle des conseillers prud’hommes, le 13° du I de l’article 87 du projet de loi crée un article L.1442-13-1 du code du travail qui, sur le modèle du pouvoir pré-disciplinaire des premiers présidents sur les magistrats du siège de l’ordre judiciaire prévu par l’article 44 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, confère à ceux-ci le pouvoir de délivrer un avertissement aux conseillers prud’hommes des conseils de prud’hommes situés dans le ressort de leur cour. Cet avertissement est un pouvoir propre des premiers présidents.

Tirant les conséquences de l’institutionnalisation du rôle des premiers présidents des cours d’appel en matière de contrôle des conseillers prud’hommes, les 13° et 15° du I de l’article 87 du projet de loi créent un article L.1442-13-3 et remplace l’article L1442-16 du code du travail afin de permettre au premier président, après audition préalable de l’intéressé, de saisir le conseil de discipline pour engager une procédure disciplinaire ainsi que pour obtenir une suspension provisoire d’un conseiller prud’homme à l’encontre duquel existent des faits de nature à entraîner une sanction disciplinaire.

La discipline des conseillers prud’hommes ne pouvant pas être confiée au Conseil supérieur de la magistrature, en l’état actuel des dispositions de l’article 65 de la Constitution, les conseillers prud’hommes, magistrats du siège non professionnels ne relevant pas du statut de la magistrature, le présent projet de loi propose sur le modèle de la commission nationale de discipline des juges des tribunaux de commerce de créer une commission nationale de discipline des conseillers prud’hommes en introduisant un article L.1442-13-2 au code du travail dont certains membres seront désignés en son sein par le Conseil supérieur de la prud’homie.

Cette commission, siégeant à la Cour de cassation et présidée par un président de chambre de cette cour comportera :

- un membre du Conseil d’État désigné par le vice-président de cette juridiction ;

- deux magistrats de l’ordre judiciaire désignés sur une liste établie par les premiers présidents des cours d’appel ;

- deux représentants des salariés, conseillers prud’hommes ou ayant exercé les fonctions de conseiller prud’homme, désignés par les représentants des salariés au conseil supérieur de la prud’homie en son sein ;

- deux représentants des employeurs, conseillers prud’hommes ou ayant exercé les fonctions de conseiller prud’homme, désignés par les représentants des employeurs au conseil supérieur de la prud’homie en son sein.

À ces membres titulaires seront adjoints des membres suppléants en nombre égal, désignés ou élus dans les mêmes conditions.

Le projet de loi insère deux articles L.1442-16-1 et L. 1442-16-2 afin de fixer les règles de quorum applicable à la commission de discipline et précise que ses décisions doivent être motivées.

Les autres règles précisant la procédure suivie devant la commission nationale de discipline seront fixées par voie réglementaire.

La commission nationale de discipline prend des décisions de caractère juridictionnel qui pourront faire l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.

L’article 88 du projet de loi, prévoit une application différée de l’entrée en vigueur des dispositions concernant la déontologie et la discipline afin de permettre l’élaboration des textes réglementaires au plus tard le 1er jour du 18ème mois suivant la publication de la loi et précise que la durée du mandat des membres de la première commission nationale de discipline des conseillers prud’hommes pourra être réduite afin que le mandat des membres de la commission nationale de discipline coïncide avec le renouvellement des membres du conseil supérieur de la prud’homie.

Par ailleurs, le projet de loi vise à remplacer l’article L.1442-15 du code du travail, afin d’instaurer de nouvelles sanctions susceptibles d’être prononcées par la commission nationale de discipline des conseillers prud’hommes, ainsi il remplace le terme de censure par celui de blâme et crée une sanction de déchéance avec une interdiction d’exercer les fonctions de conseiller prud’homme pour une durée maximum de dix ans ou de manière définitive.

L’interdiction pour un conseiller prud’homme d’accepter un mandat impératif est maintenue dans un article L. 1442-11-1 du code du travail créé par le projet de loi.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les justiciables

L’objectif poursuivi par la réforme est d’améliorer et accélérer le traitement des litiges opposant salarié et employeur, à l’occasion d’un contrat de travail. Il devra en résulter une plus-value tant pour les particuliers que pour les entreprises, dont la situation juridique sera plus rapidement sécurisée.

Les questions déontologiques se posent avec acuité pour les conseillers prud’hommes compte tenu des conditions de leur désignation et de l’expérience professionnelle dont ils tirent leur légitimité.

La fixation d’obligations déontologiques, le renforcement du rôle des premiers présidents et l’instauration d’une commission nationale de discipline, prévus par le présent projet de loi devraient permettre une amélioration du fonctionnement des conseils de prud’hommes, afin notamment de résoudre les difficultés constatées dans les juridictions, la diligence dans le traitement des affaires et l’indépendance des conseilleurs prud’hommes. Ces mesures doivent contribuer à renforcer la confiance des citoyens dans les institutions publiques et notamment les institutions judiciaires en garantissant effectivement que les acteurs publics, notamment les conseillers prud’hommes, agissent avec impartialité, intégrité, objectivité et probité, en servant l’intérêt général.

Impacts sur la charge de travail des juges départiteurs

Actuellement, les dossiers donnent lieu à une phase de conciliation puis une phase de jugement. En cas de partage des voix des conseillers prud’homaux, l’affaire est renvoyée à une audience de départage présidée par le juge d’instance.

Le projet de texte renforce les pouvoirs du bureau de conciliation, qui devient bureau de conciliation et d'orientation, et réduit les hypothèses de saisine du bureau de jugement.

Dans le cas d'un licenciement ou d'une demande de résiliation judiciaire, le bureau de conciliation et d'orientation peut, avec l'accord des deux parties, renvoyer l'affaire devant le bureau de jugement dans sa composition restreinte qui devra statuer dans le délai de trois mois.

En cas d'échec de la conciliation, le bureau de conciliation et d'orientation peut, même d'office, en raison de la nature du litige, renvoyer l'affaire devant la formation de départage. Ce renvoi est de droit si toutes les parties le demandent. Si l'une des parties le demande et que le bureau de conciliation est partagé, l'affaire est de plein droit renvoyée devant la formation de départage.

Il apparaît donc que le juge départiteur se verra confier des affaires qui actuellement partent devant le bureau de jugement dans trois hypothèses :

- d'office sur décision du bureau de conciliation et d'orientation ;

- à la demande de toutes les parties ;

- à la demande d'une partie si le bureau de conciliation et d'orientation est partagé.

Il est difficile d'évaluer les hypothèses où les conseillers prud'homaux vont décider d'office de renvoyer les affaires au juge départiteur et non au bureau de jugement. Les politiques menées par les conseillers prud'homaux dépendent tant du contexte local que de la section saisie. Le taux d'affaires renvoyées en départage s'élève actuellement en moyenne à 20% mais cette moyenne cache des disparités importantes sur le territoire. Certains conseils de prud'hommes ont à cœur de mener leur mission à terme quelles que soient les difficultés rencontrées et saisissent a minima la formation de départage, aux alentours de 5 à 6%, d'autres au contraire ne parviennent pas à dépasser leur mésentente chronique et présentent des taux de départage très élevé de l'ordre de 40 ou 50%. En outre, les hypothèses où les conseillers prud'homaux souhaiteront renvoyer d'office l'affaire en départage risquent d'être absorbées par la seconde hypothèse (demande de toutes les parties) et difficile à isoler.

Par ailleurs, le taux d'appel des décisions des conseillers prud'homaux s'élève en moyenne à 60%. Le rapport de M. Lacabarats rappelle le taux de 62,10% relevé en 2012.

L’objectif de la réforme est d’alléger sensiblement la charge de travail des conseillers des cours d’appels dont 30% de l’activité est consacrée au contentieux relevant des juridictions prud’homales.

Enfin le projet de loi ouvre la possibilité de lier les affaires de même type dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

Au vu de l'opinion généralement exprimée par les avocats sur la lourdeur et l'inefficacité de la procédure prud'homale, le comportement des parties est peut être plus aisément prévisible. On peut envisager que les parties préfèreront souvent recourir au juge départiteur plutôt que de voir leur affaire appelée devant le bureau de jugement afin d'obtenir une décision mieux fondée en droit et de réduire considérablement les délais de jugement.

Néanmoins, les demandes de renvois en départage pourront dépendre pour une grande part de la complexité des affaires. Si l'affaire ne présente pas de difficulté juridique majeure et que les délais d’audiencement devant le bureau de jugement ne sont pas excessifs (délais de jugement actuel : 13,7 mois ; par hypothèse, ces délais se réduiront progressivement, le BJ étant moins saisi qu’actuellement), les parties peuvent souhaiter qu'elle soit retenue par les conseillers prud'homaux. De même, des questions de stratégie importantes peuvent guider les choix de l'une ou l'autre des parties : le défendeur peut avoir tout intérêt à ce que l'affaire ne soit pas jugée trop vite et refusera le renvoi direct en départage. Le demandeur peut également préférer d'abord un renvoi en bureau de jugement pour accentuer la pression dans le cadre des négociations en cours avec son adversaire. Ces comportements ne doivent pas être négligés.

La dernière hypothèse de renvoi semble destinée à pallier ces stratégies procédurales puisqu'elle permet à une seule partie de demander le renvoi direct en départage. Dans cette hypothèse, soit le bureau de conciliation et d'orientation est d'accord et l'affaire est renvoyée en départage, soit il est partagé et l'affaire est également renvoyée en départage. C'est seulement dans l'hypothèse où le bureau de conciliation et d'orientation s'y oppose que l'affaire partira en formation de jugement, hypothèse qui rejoint la première : si le bureau de conciliation et d'orientation estime que l'affaire relève du départage, il n'attendra pas la demande d'une partie et renverra de lui-même, s'il estime que l'affaire n'en relève pas et que l'affaire peut relever du bureau de jugement, il ne fera pas non plus droit à la demande de la partie intéressée.

Au vu des incertitudes tenant aux pratiques différentes des conseillers prud'homaux et des stratégies procédurales des parties, il est opportun de retenir plusieurs hypothèses de travail pour évaluer la charge de travail qu'entraînera le renvoi direct en départage tant pour le juge départiteur que pour le greffe.

En 2013, les CPH ont été saisis de 205 648 affaires nouvelles. Le taux moyen de conciliation s'élève à 6% sur le territoire national. Une fois déduites toutes les affaires non susceptibles de donner lieu à une décision au fond (conciliation, radiation, désistement, caducité, etc), il reste 91 000 affaires susceptibles d'être jugées en bureau de jugement ou en départage. Pour l’année 2013, le taux de départage s’est élevé à 22,6%, soit 19 300 affaires. Ainsi, si l’on déduit ces affaires qui seraient en tout état de cause venues en départage, on obtient un nombre d’affaires à orienter d’environ 72 000 affaires.

On retiendra une hypothèse basse d'augmentation de la charge de travail du juge départiteur fixée à 11 % de ces affaires à orienter, soit 8 000 affaires et une hypothèse haute fixée à 28 %, soit 20 000 affaires. Ces hypothèses correspondent à un taux de départage sur affaires en jugement qui passe de 15 % aujourd’hui à respectivement 22 et 30 %

Il en résulte une charge de travail supplémentaire pour les magistrats évaluée ainsi qu’il suit :

Sur la base moyenne de 6 heures par dossier, l’étude évalue cette charge de travail supplémentaire à 28 ETPT206en hypothèse basse et 71 ETPT en hypothèse haute.

Pour les fonctionnaires, l’évaluation est effectuée à partir des critères de l’applicatif outilgref. Le traitement d’un dossier au fond est évalué à 180 minutes (hors accueil et conciliation). Ce temps de travail comporte le temps dédié à l’aide à la décision et l’accompagnement du travail du bureau de jugement. Ce temps évalué à 30 minutes ne sera plus utile. On en déduit une économie de même hauteur par dossier dans l’hypothèse de l’orientation devant le juge départiteur. Il y aura donc un gain en hypothèse basse de 3 ETPT et 6 ETPT en hypothèse haute.

Départage

2 013

Hyp basse

Hyp haute

Nb de décisions

145 470

145 470

145 470

Nb de décisions en départage

19 276

27 203

39 120

Taux de départage sur les affaires en jugement

15%

22%

30%

Augmentation du nb de décisions

 

7 927

19 844

Hausse ETPT magistrats (0,00357 ETPT par affaire)

28

71

Baisse ETPT fonctionnaires

 

-3

-6

Total ETPT

 

26

65

Impacts sur l'activité des chambres sociales

Le taux d'appel des décisions des conseillers prud'homaux s'élève en moyenne à 60%, avec une hausse continue depuis 2009. En 2012, le taux d’appel s’établissait à 66,21%

L’objectif de la réforme est d’alléger sensiblement la charge de travail des conseillers des cours d’appels dont 30% de l’activité est consacrée au contentieux relevant des juridictions prud’homales.

Dès lors que dans les hypothèses ci-dessus fixées, les affaires seront portées devant les juges départiteurs, on peut supposer que le taux d’appel des décisions sera moindre. Néanmoins, ce taux ne saurait correspondre au taux habituellement constaté pour les décisions rendues par les juges d’instance et qui s’élève à seulement 6%. En effet, les litiges prud’homaux présentent par nature de forts enjeux économiques et sont davantage frappés d’appel que les décisions rendues à l’instance. Pour mémoire, le taux d’appel des décisions rendues par les tribunaux de grande instance s’élève à 20%, sans distinction des litiges complexes.

L’effet de ces mesures est évalué sur le volume global des affaires faisant l’objet d’un appel, soit 78 123 en 2013. En hypothèse basse, si le taux d’appel global diminue de 6 points (soit 10 %), environ 4800 affaires de moins viendront en appel. En hypothèse haute, si le taux d’appel global diminue de 30 points (soit environ 36 %), environ 23 600 affaires de moins viendront en appel.

En l’absence de norme officielle, l’étude se base sur les réflexions du groupe de travail chargé de la charge de travail des magistrat qui prévoyait un ratio de 1 ETPT pour 230 dossiers  terminés, soit 7h30 par affaire.

Le gain en ETPT de fonctionnaires est calculé à partir des critères de l’applicatif outilgref. Le traitement d’un dossier est estimé à 300 minutes.

Le gain peut être ainsi estimé à :

Appel

2012

Hyp taux d'appel réduit de 6 pts (10 %)

Hyp taux d'appel réduit de 30 points (45 %)

Nb d'appels

51 722

46 874

28 124

Taux d'appel

66,21%

60%

36%

Nb d'affaires

78 123

78 123

78 123

Baisse du nb d'appel

 

-4 848

-23 598

Baisse ETPT magistrats (1ETPT pour 230 dossiers)

-17

-67

Baisse ETPT fonctionnaires (20 ETPT pour 28 magistrats)

-12

-48

Total ETPT

 

-30

-115

Impacts sur les effectifs

Les différentes hypothèses développées ci-dessus pour l’évolution du départage et de l’appel doivent être croisées en distinguant trois cas de figure :

- la conjonction des hypothèses basses

- la conjonction des hypothèses hautes

- la conjonction de l’hypothèse haute en matière de départage et de l’hypothèse basse en appel.

Le solde en effectifs de ces trois scénarios peut être positif ou négatif suivant les combinaisons.

Solde ETPT

Hyp basse départage et appel

Hyp haute départage et appel

Hyp haute départage et basse appel

ETPT magistrats

11

4

54

ETPT fonctionnaires

-15

-54

-19

Total

-4

-50

35

Toutefois, à court terme et compte tenu du fait que les stocks d’appel existants doivent être écoulés, l’hypothèse d’une augmentation du départage sans baisse du volume d’activité en appel est la plus réaliste. Elle suppose 54 ETPT de magistrats et permet de dégager 19 ETPT de fonctionnaires.

§ Le transfert du contentieux prud'homal vers le juge du tribunal de grande instance

Le projet de texte prévoit de modifier l'article L.1454-2 et de transférer le contentieux prud'homal au tribunal de grande instance.

La charge de travail de ce contentieux représente en 2013 50 ETPT pour les juges d'instance.

Il y aura en conséquence transfert de cette charge sur le tribunal de grande instance.

La charge de travail des fonctionnaires n’est pas modifiée.

§ La formation

Actuellement l’État via le Ministère du Travail (Direction générale du travail) a conclu une convention cadre avec chaque organisme de formation, à savoir les Instituts du travail de Bordeaux, Grenoble, Lorraine, Rennes, Strasbourg et Paris, ainsi qu’avec 6 associations rattachées à une organisation syndicale et 6 associations rattachées à une organisation professionnelle. La dotation consacrée à cette formation s’est élevée, pour le mandat 2009-2013 des conseillers prud’homaux à 42,3 millions d’euros, soit une moyenne annuelle de 8 millions d’euros. Seuls 87% de ces crédits ont été utilisés, soit 36 millions d’euros (7,5 millions d’euros annuels). Ces crédits sont versés à hauteur de 70% aux associations en charge de la formation des conseillers prud’hommes salariés, 30% aux associations en charge de la formation des conseillers employeurs et une part marginale est réglée aux Instituts du travail.

La répartition actuelle de la formation s’effectue pour la majeure partie en début de mandat du conseiller. La durée des sessions de formation est de 1 à 5 jours, avec une majorité de formations de 3 jours.

Le projet de loi se borne à poser le principe d’une formation initiale et continue pour les conseillers de prud’homme. Les choix d’organisation et modalités pratiques seront établis par les textes réglementaires d’application. Il n’est donc pas possible de procéder à l’évaluation des impacts de cette disposition. Les fiches d’impacts annexées aux décrets, prévues par la circulaire du Premier ministre 17 juillet 2013 relative à la mise en œuvre du gel de la réglementation feront état, le moment venu, des impacts potentiels de cette réforme.

Impacts budgétaires

S’agissant du défenseur syndical, le remboursement aux employeurs des salaires maintenus pendant les heures de délégation des défenseurs syndicaux constituera une charge pour les finances publiques. En l’état des données disponibles sur le nombre actuel de défenseurs syndicaux et leurs caractéristiques, il n’est cependant pas possible d’évaluer l’impact financier de cette mesure.

Impacts juridiques

S’agissant des mesures relatives au traitement du contentieux prud’homal, celles-ci conduisent à modifier certaines dispositions législatives du code du travail.

Elles devront s’accompagner de modifications règlementaires correspondantes. Celles-ci auront notamment pour finalité d’aider les parties dans la préparation de leur dossier, en leur fournissant des documents Cerfa ordonnant les modalités de saisine du conseil de prud’hommes et fixant la liste des pièces à fournir pour que la demande soit jugée recevable. Cette rationalisation ne sera pas défavorable aux parties, et particulièrement, au salarié, en ce qu’elle permettra aux conseillers prud’hommes d’être, dés leur saisine, informés plus complètement sur la nature de la demande. Dans l’intérêt du demandeur, plus tôt le dossier est constitué, plus tôt il est traité.

En outre, interviendra au soutien de la réforme législative, un ensemble de dispositions impliquant l’institution, et ce dès la phase de conciliation, d’une véritable mise en état, avec un calendrier maîtrisé de remise des pièces et écritures. A cette fin, les dispositions de rationalisation de la procédurale orale prévues aux articles 446-1 à 446-5 seront étendues et adaptées à la procédure prud’homale. Par ce biais, la juridiction pourra se prémunir contre les pratiques dilatoires fréquemment constatées et dénoncées, reposant sur la politique conciliante et opportune des renvois successifs.

Bien évidemment, cette rationalisation ne sera en aucun cas constitutive d’une remise en cause de la procédure orale, au titre de laquelle les parties présentent oralement à l'audience leurs prétentions et les moyens à leur soutien. Elles peuvent également se référer aux prétentions et aux moyens qu'elles auraient formulés par écrit.

5. Consultations menées

Le projet de loi a été soumis à la Commission permanente d’étude et au Comité technique des services judiciaires le 20 novembre 2014 ainsi qu’au Conseil supérieur de la prud’homie qui s’est réuni le 26 novembre 2014.

Il a également été soumis au Commission nationale de la négociation collective, le 27 septembre 2014.

Les dispositions relatives à la déontologie et à la discipline insérées dans le présent projet de loi seront soumises à la consultation obligatoire du Comité technique des services judiciaires et à la consultation facultative de la commission permanente d’études instituée au Ministère de la justice le 25 novembre 2014.

Section 2 - Dispositif de contrôle de l’application du droit du travail

Article 85 1°, 2°

1. État des lieux

1.1. Un contexte d’évolution organisationnelle du système d’inspection du travail

En vertu du décret du 20 mars 2014 relatif à l’organisation du système d’inspection du travail, une nouvelle organisation du système d’inspection du travail est déployée région par région depuis le mois de septembre 2014 et sera effective sur l’ensemble du territoire au 1er janvier 2015.

Ces dispositions organisationnelles visent à renforcer le système d’inspection du travail afin de lui permettre de mieux répondre aux exigences socio-économiques contemporaines, en luttant notamment contre la concurrence déloyale et le travail illégal. De tels objectifs ne peuvent cependant être atteints que si le système d’inspection du travail peut aussi rapidement s’appuyer sur un renforcement de ses moyens d’actions et des sanctions efficaces permettant d’assurer l’effectivité des règles de base en droit du travail.

L’évolution organisationnelle s’accompagne d’un plan de transformation d’emplois de contrôleurs du travail en emplois d’inspecteurs du travail en section, par le biais d’un concours réservé exceptionnel qui, bien qu’annoncé sur dix ans, n’a été initialement ouvert que pour une durée de trois ans, en application de l’article 6 de la loi n° 2013-185 du 1er mars 2013 portant création du contrat de génération.

C’est pourquoi, le projet d’article de loi prévoit une habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures adaptées concernant la pérennisation du PTE au-delà de trois ans et des mesures renforçant le rôle de surveillance et de sanction de l’inspection du travail.

1.2. La nécessité d’un renforcement du rôle de surveillance du système d’inspection du travail

Le système d’inspection du travail a pour mission de veiller à l’application de la réglementation du travail dans les entreprises. Ce rôle de surveillance ou de contrôle s’exerce à travers des visites de contrôle qui peuvent donner lieu à des avertissements ou des conseils, à l’établissement de procès-verbaux d’infractions, mais aussi à des interventions directes destinées à protéger les travailleurs exposés à des situations dangereuses.

Deux principaux constats peuvent être établis concernant les moyens dévolus à l’inspection du travail pour exercer sa mission.

D’une part, les mesures en vigueur en cas de situation dangereuse pour la sécurité des salariés sont d’une efficacité très variable.

D’autre part, l’inspection du travail dispose de quatre principales mesures, globalement sous utilisées, pour faire face à une situation dangereuse, trois relevant du pouvoir de l’administration du travail et une nécessitant l’intervention d'un juge :

- l’arrêt de travaux BTP (article L. 4731-1 du code du travail). Cet arrêt de travaux qui couvre peu de situations est régulièrement mis en œuvre par l’inspection du travail (6517 décisions en 2013207) ;

- un dispositif d’arrêt d’activité risque chimique (article L. 4731-2 du code du travail) quasi inutilisé : 2 procédures en 2013208 ;

- les mises en demeure du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE). Ce dispositif a été mis en déployé à 100 reprises en 2013209 ;

- le référé devant le juge civil (article L.4732-1 du code du travail) en cas de risque pour la santé des travailleurs. 32 procédures ont été initiées en 2013210.

Or, les moyens d’investigations sont insuffisants. Le code du travail prévoit que, pour mener à bien ses missions, l'agent de contrôle dispose de différents outils :

- un accès aux seuls documents rendus obligatoires par le code du travail (article L. 8113-4 du code du travail). Face à la complexité des situations rencontrées lors d’un contrôle, cet accès limité pose aujourd’hui des difficultés d’investigation lorsque certains employeurs ne respectent pas la réglementation.

- la possibilité, dans le domaine de la santé et la sécurité, de demander des vérifications et des mesurages (article L. 4722-1 du code du travail). En 2013, 1491 demandes de vérification ou de mesurage ont été notifiées. Les rapports établis par les organismes accrédités permettent à l’employeur d’obtenir un état des lieux précis dans des domaines où la réglementation revêt des aspects très techniques. Cela permet d’engager dans des champs limités les régularisations nécessaires et les moyens de prévention appropriés.

- la demande de repérage avant travaux de l’amiante (articles L. 4121-3 et L. 4531-1 du code du travail). Le dispositif de repérage de l’amiante existant dans le code de la santé publique ne concerne que les immeubles bâtis. Il est par conséquent inadapté à l’ensemble des situations exposantes pour les professionnels.

2. Description des objectifs

L’objectif de la réforme est de renforcer les moyens d’intervention et d’investigation du système d’inspection du travail afin de permettre une plus grande effectivité du droit du travail de manière à réduire les distorsions de concurrence entre les entreprises vertueuses et celles qui se montrent récalcitrantes à appliquer les règles de base du code du travail.

La nouvelle organisation du système d’inspection du travail nécessite par ailleurs de préciser les attributions de différents agents de contrôle.

2.1. Etendre et optimiser les procédures d’arrêt temporaire de travaux et d’activité

2.1.1. Etendre le champ d’application de l’article L. 4731-1 du code du travail

Les risques justifiant l'arrêt temporaire des travaux du fait de l’exposition des travailleurs à une situation de danger grave et imminent ne sont pas limités au secteur du BTP, mais se retrouvent aussi dans d'autres secteurs. Au-delà des risques de chute, d’ensevelissement et ceux liés à l’amiante, il est envisagé d’ajouter les domaines suivants :

- Amiante (l’objectif est d’étendre cette procédure à toute interventions sur des matériaux, des équipements, des matériels ou des articles susceptibles de provoquer l'émission de fibres d'amiante, alors qu’elle est aujourd’hui limitée aux opérations de retrait de ces matériaux et de réduire ainsi les cancers professionnels).

- Equipements de travail (l’utilisation équipements de travail dépourvus de protecteurs, de dispositifs de protection ou de composants de sécurité appropriés ou inopérants a conduit à 19 463 accidents du travail avec arrêt de travail en 2012).

- Risque électrique (le risque résultant de travaux ou d’une activité dans l’environnement des lignes électriques aériennes ou souterraines est d’une gravité particulière, les accidents étant généralement mortels).

- Jeunes (il s’agit de soustraire les jeunes visés par les situations de dérogations aux travaux dangereux lorsqu’il existe un risque sérieux pour leur intégrité physique ou mentale).

2.1.2. Optimiser l’arrêt temporaire d’activité « risque chimique »

Dans le domaine du risque chimique, le dispositif d’arrêt temporaire d’une activité exposant des travailleurs à des risques CMR sera simplifié.

2.1.3. Simplifier et harmoniser les procédures

Les procédures administratives, les conséquences pour les entreprises et les travailleurs concernés, ainsi que les voies de recours à l’encontre des dispositifs d’arrêt temporaires de travaux et d’activité seront harmonisées et simplifiées afin d’améliorer l’intelligibilité du droit. Par ailleurs les contrôleurs du travail pourront procéder à de telles mesures sans nécessité d’une délégation d’un inspecteur du travail.

2.1.4. Etendre les moyens d'investigation

- Accès aux documents

Comme les autres corps de contrôle qui agissent au sein des DIRECCTE, un accès à l’ensemble des documents en lien avec le contrôle contribuera à des constats précis et à une vision nuancée de la suite réservée. La possibilité d’obtenir une copie limite le risque de contestation et sécurise la relation avec l’entreprise.

- Demandes de vérifications, d’analyses ou de mesurages

Pour favoriser la prévention des risques professionnels, la possibilité de faire effectuer un prélèvement en vue d'analyse sera instaurée.

- Repérage avant travaux de l’amiante

La création de nouvelles obligations pour les donneurs d’ordre ou propriétaires permettra de mettre en œuvre un repérage avant travaux de l’amiante préalablement à toute opération comportant des risques d’exposition et mettra fin ainsi à une pratique d’arrêt des chantiers en cas de suspicion.

2.1.5. Préciser les attributions des agents de contrôle

Dans le cadre des évolutions organisationnelles du système d’inspection du travail, les attributions des contrôleurs du travail et des inspecteurs du travail doivent être précisées. L’ordonnance procèdera à un balayage du code du travail, du code rural et de la pêche maritime et du code des transports afin de clarifier les compétences respectives des agents de contrôle. Certaines dispositions obsolètes concernant la compétence de l’inspection du travail seront abrogées et des ajustements de cohérence prévus pour les renvois d’articles internes à chaque code ainsi que les renvois externes entre les codes.

2.1.6. Renforcer les sanctions en cas de résistance illicite à l’action de l’administration

- Le non-respect de la décision du DIRECCTE

La disproportion entre le champ d’application de la mise en demeure du DIRECCTE (existence d’une situation dangereuse) et les sanctions encourues en cas de non-respect de cette décision (contravention de 5ème classe) nécessite son alignement sur la sanction du non-respect des règles de sécurité.

- Le non-respect de la décision d’arrêter les travaux ou l’activité

Lorsqu’un travailleur est exposé à un risque grave et imminent visé à l’article L. 4731-1 du code du travail, l’agent de contrôle peut procéder à un arrêt de travaux ou d’activité. En cas de non-respect de la décision des agents de contrôle de l’inspection du travail, il est envisagé de substituer une sanction administrative à la sanction pénale actuellement prévue afin d’obtenir plus rapidement une mise en conformité.

- Le non-respect de la demande de vérifications, d’analyses ou de mesurages

Lorsqu’un risque auquel est exposé un travailleur ne peut être évalué du fait du défaut de connaissance, l’agent de contrôle peut demander à l’employeur de faire procéder à une vérification d’un équipement, d’une installation ou à un mesurage ou une analyse. En cas de non-respect de la décision des agents de contrôle de l’inspection du travail, il est envisagé de créer une sanction administrative.

- Le non-respect des dispositions relatives au repérage avant travaux de l’amiante

Il est envisagé de sanctionner le non-respect par les des donneurs d’ordre ou les propriétaires de leurs nouvelles obligations en matière de repérage avant travaux de l’amiante par une amende administrative nouvellement créée.

2.2. La nécessité de réviser les modes de sanction en matière de droit du travail

2.2.1. État des lieux

2.2.1.1. Les limites de la sanction pénale en droit du travail

Le dispositif actuel de sanction en droit du travail repose essentiellement sur le droit pénal. Or, la sanction pénale ne constitue plus nécessairement la réponse efficace et adaptée pour sanctionner certains types d’infractions. Ainsi, selon l’étude de juillet 2014 de l’Observatoire des suites pénales, de moins en moins de procès-verbaux sont traités par les parquets ou le sont dans des délais de plus en plus longs, non compatibles avec les réalités socio-économiques et atténuant de ce fait en partie l’utilité de la sanction. Ainsi, 72% des procès-verbaux dressés par l’inspection du travail en 2004 ont connu des suites contre 60% de ceux dressés en 2009 et 46% de ceux dressés en 2011.

Les efforts de ces dernières années en matière de rationalisation des échanges et de coordination entre autorités administratives et judiciaires n’ont pas permis d’améliorer l’efficacité de la voie pénale.

En outre, le droit du pénal du travail est construit suivant des modes n’intégrant ni la transaction pénale à la différence d’autres codes (par exemple l’article 6 du code de procédure pénale) ni l’ordonnance pénale introduite par la loi n°72-5 du 3 janvier 1975.

Enfin, dans certains domaines du droit du travail les peines prévues n’ont pas été actualisées et sont inadaptées à des situations manifestement illicites en matière de délits en matière de santé, de sécurité au travail et au regard du délit d’obstacle.

2.2.1.2. L’absence de sanctions administratives pécuniaires

Sauf dans le cadre des dispositifs d’incitation à la négociation obligatoire (égalité professionnelle, pénibilité, contrat de génération) le code du travail ne prévoit pas actuellement de sanctions administratives pécuniaires.

L’extension d’un tel dispositif de sanction à d’autres domaines apparaît pourtant pertinente pour améliorer la rapidité de la réponse donnée aux comportements illégaux. .. Cette solution de création de sanctions administratives pécuniaires a également été retenue récemment pour d’autres champs de l’action publique (écologie, droit de la consommation).

2.2.2. Objectifs

L’objectif général de la réforme est d’améliorer l’effectivité du droit du travail en diversifiant les outils disponibles. En outre, il s’agit d’accélérer la mise en œuvre des sanctions et de faire face aux situations complexes de contrôle.

2.2.2.1. Première mesure : créer des sanctions administratives pécuniaires

Dans un contexte d’évolution des modes d’intervention du système d’inspection du travail, la création d’amendes administratives pécuniaires, pour certains manquements clairement identifiés, permet de répondre à l’objectif d’amélioration de l’efficacité des sanctions en confiant à l’administration du travail la possibilité de sanctionner directement le non-respect du droit du travail par les entreprises récalcitrantes.

Le champ d’application envisagé dans l’ordonnance pour de telles amendes concerne des dispositions de base qui permettent d’assurer des droits fondamentaux des travailleurs :

- Durée du travail : infractions aux durées maximales de travail et aux repos qui correspondent aux obligations minimales définies par le directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ; infractions aux textes relatifs au contrôle de la durée du travail, indispensables pour l’effectivité de ces dispositions fondamentales.

- Salaire minimum : il constitue la contrepartie de la prestation de travail et nécessite de ce fait une régularisation et une sanction rapide et efficace.

- Conditions d’hygiène et d’hébergement : l’hygiène est envisagée dans son sens large en y intégrant, outre les sanitaires, les vestiaires, le réfectoire et le local de repos.

Des amendes administratives pourront également être prévues en cas de non-respect des décisions de l’administration prises dans le champ de la santé et de la sécurité au travail.

Ce nouveau dispositif de sanction sera régi par une procédure garantissant les droits fondamentaux des usagers, notamment les droits de la défense, le contradictoire, la personnalisation des peines.

2.2.2.2. Deuxième mesure : instaurer la transaction pénale en matière de droit du travail

L’ordonnance créera également la possibilité de recourir au mécanisme de la transaction pénale pour certaines infractions au code du travail.

L’autorité administrative envisagée pour mener la procédure de transaction est le DIRECCTE. Afin de permettre la mise en place progressive d’une politique pénale adaptée aux enjeux locaux en lien avec le procureur de la République.

La proposition de transaction offre la possibilité de combiner des sanctions des mises en conformité.

En lien avec le ministère de la Justice, le champ d’application de la transaction sera ciblé sur les parties du code du travail les plus pertinentes et les infractions les moins graves. Ainsi les délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée d’un an et plus sont exclus de cette procédure. Les domaines pour lesquels il est important qu’un procès pénal se déroule et que les victimes puissent se constituer partie civile ne seront pas concernés.

2.2.2.3. Troisième mesure : rendre possible la voie de l’ordonnance pénale pour le traitement judiciaire des contraventions en droit du travail

Pour accélérer le traitement des infractions considérées comme les moins graves, l’ordonnance proposera par ailleurs d’ouvrir la procédure simplifiée par ordonnance pénale à toutes les contraventions du code du travail.

2.2.2.4. Quatrième mesure : réviser le quantum des peines pour certaines infractions

A ce stade, des travaux de révision approfondie sont envisagés pour deux types d’infractions. Ce champ pourra être complété lors des travaux d’élaboration de l’ordonnance.

- Infractions en matière de santé et de sécurité au travail

Face aux enjeux socio-économiques en matière de santé et sécurité au travail, il apparaît nécessaire de réviser l’architecture des sanctions pénales et d’augmenter les peines maximales en matière de santé et sécurité au travail.

Le choix des domaines devant faire l’objet d’une revalorisation des peines se porte sur le champ de la santé et de la sécurité au travail compte tenu des enjeux forts pour le respect de la protection de l’intégrité physique des travailleurs et des peines particulièrement faibles fixées en cas d’infractions à ces dispositions qui n’ont pas été réévaluées depuis près de trente ans.

- Obstacle aux fonctions de l’inspection du travail

Le montant de l’amende encourue en cas d’obstacle aux fonctions d’inspecteurs ou de contrôleurs du travail (3 750 euros) est peu dissuasif. L’obstacle, constaté à 316 reprises en 2013211, empêche le déroulement du contrôle et induit une situation inéquitable entre les entreprises.

Il est envisagé de rehausser le montant de l’amende afin qu’il soit plus dissuasif et de permette au juge une véritable graduation de la peine en fonction tant de la taille et des particularités de l’entreprise selon la façon dont l’obstacle s’est produit.

2.3. Une nécessité d’harmonisation entre le code du travail et d’autres codes

Une partie du régime du droit du travail se trouve traitée dans le livre VII du code rural et de la pêche maritime et dans les parties 1 et surtout 5 du code des transports (droit du travail applicable aux gens de mer).

Le principe qui préside à l’articulation de ces différents codes entre eux est le suivant : le code du travail s’applique par défaut aux secteurs rural et maritime, sauf s’il existe dans les codes susmentionnés des dispositions d’adaptation spécifiques. Certaines de ces mesures d’adaptation font explicitement référence aux agents de l’inspection du travail. Il appartient donc au législateur d’adapter ces codes en cohérence avec les modifications qui seront proposées dans le code du travail.

2.3.1. Le code des transports

Il s’agit, d’une part, de reprendre la terminologie employée dans les articles du code du travail et de toiletter les dispositions obsolètes issues de la recodification du code des transports qui est intervenue en octobre 2010.

Par ailleurs, parallèlement aux nouvelles sanctions administratives qui seront prévues dans le code du travail, la partie 5, livre 5, titre 4, chapitre 4 du code des transports sera adaptée pour y introduire ces sanctions en cas de manquement aux dispositions portant sur les mêmes champs thématiques.

D’autre part, il s’agit, en matière de contrôle, de permettre la mise en œuvre effective de la convention internationale 2006 ratifiée par la France (cf. loi n°1320 du 29 novembre 2012) en favorisant des échanges sécurisés d’informations entre l’administration des affaires maritimes et l’inspection du travail. 

Les dispositions du code des transports relatives au quantum des peines ou à l’introduction de la transaction pénale devront enfin faire l’objet d’une mise en cohérence avec les modifications correspondantes du code du travail.

2.3.2. Le code rural et de la pêche maritime

L’objectif principal est d’harmoniser les décisions administratives et les sanctions prévues par le code rural et de la pêche maritime avec celles du code du travail, lorsqu’on a affaire à des infractions de même nature.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

La réforme nécessite une modification de la partie IV du code du travail relative à la santé et sécurité au travail et de la partie VIII relative au contrôle de l’application de la législation du travail. Elle passe aussi par un toilettage de l’ensemble des dispositions du code du travail pour préciser les attributions des différents agents de contrôle de l’inspection du travail.

Elle nécessite également une modification des parties législatives du code rural et de la pêche maritime et du code des transports relatives au régime du travail avec une adaptation aux spécificités de ces secteurs.

Il est enfin à noter que la réforme conduira à l’abrogation de certaines dispositions législatives devenues obsolètes et à la mise en cohérence des renvois au sein de codes. Une modification des dispositions de l’article 524 code de procédure pénale est aussi nécessaire.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

Impacts économiques et financiers

- Sanctions administratives pécuniaires 

Les constats d’infractions au code du travail réalisés par l’inspection du travail aboutissent majoritairement à des rappels à la loi et non à des procès-verbaux (moins de 1 % des manquements constatés fait l’objet de procès-verbaux selon le rapport annuel au BIT au titre de l’année 2013).

On peut estimer que le nombre de sanctions administratives sera, après une période d’appropriation du dispositif, équivalent à celui identifié en matière pénale soit, compte-tenu des manquements susceptibles de faire l’objet d’une sanction pénale, environ 900 procédures par an.

Rapportée aux 1 800 000 d’entreprises assujetties au contrôle de l’inspection du travail, la sanction administrative pécuniaire concernera un faible nombre d’entreprises.

- Ordonnance pénale et transaction pénale 

Les nouveaux moyens confiés à la justice doivent permettre un traitement judiciaire plus rapide des infractions à l’égard des entreprises ne respectant pas les dispositions légales en matière de droit du travail.

- Renforcement des modes d’intervention

Moyens d'intervention en matière de santé et sécurité au travail

La mise en œuvre de ce pouvoir a montré une utilisation pertinente n’entraînant pas de conséquences préjudiciables à l’activité économique. Il y a lieu ensuite de rapprocher le coût de la prévention (par exemple location d’une nacelle télescopique pour prévenir un risque de chute de hauteur) et celui pour l’entreprise d’un accident du travail. La quasi-inexistence de recours au juge démontre la justesse d’utilisation des arrêts de travaux. La possibilité pour l’entreprise d’agir en référé en cas de désaccord encadre le dispositif et le sécurise.

Moyens d'investigation

L'accès à certains documents est sans impact économique réel. Le fait d'en procurer, le cas échéant, une copie est un coût très marginal déjà assuré par la quasi-totalité des entreprises. Les analyses demandées par l'inspection ont naturellement un coût. Il convient cependant de remarquer, sur la base du droit positif, le nombre peu élevé des demandes de vérification et de mesurages notifiées sur l'ensemble du territoire (environ 3000 en 2013).

Repérage avant travaux de l’amiante

Le repérage de l’amiante en amont de la réalisation des travaux permettra aux entreprises un gain économique important en permettant notamment d’éviter des arrêts de travaux prononcés par l’inspection du travail.

Impacts sociaux

L’extension des moyens d’intervention de l’inspection du travail assure une meilleure protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ainsi que l’amélioration de leurs conditions de travail.

Impacts environnementaux

Les modifications apportées aux moyens d'intervention peuvent, dans le domaine du risque chimique, contribuer à une protection de l'environnement.

Impacts administratifs

- Accès au corps de l’inspection du travail - Concours réservé

En application de l’article 6 de la loi n° 2013- 185 du 1er mars 2013 portant création du contrat de génération, le plan de transformation d’emplois de contrôleurs du travail en emplois d’inspecteurs du travail en section, par le biais d’un examen professionnel exceptionnel a été initialement ouvert que pour une durée de 3 ans. Cette première tranche doit permettre à 540 contrôleurs du travail de devenir inspecteurs d’ici début 2016. La mise en œuvre de ce plan doit être poursuivie au-delà de cette date afin de permettre, à moyen terme, la transformation de la totalité des 1 500 emplois de contrôleurs du travail en section.

- Sanctions administratives pécuniaires 

La création des sanctions administratives pécuniaires nécessite un travail collaboratif avec le ministère de la justice et le ministère des finances qui sera en charge du recouvrement des amendes administratives. S’agissant des DIRECCTE, il sera nécessaire d’assurer au niveau régional le traitement des sanctions administratives pécuniaires.

- Révision des sanctions pénales et des procédures de traitement judiciaire des infractions

Un travail important avec les services du ministère de la Justice sera engagé pour réviser le quantum de certaines peines et revoir l’architecture des sanctions en matière de santé et sécurité au travail

Impacts sur le fonctionnement de la justice

- Sanctions administratives pécuniaires 

Seule une partie probablement limitée des décisions de sanction prononcées par le DIRECCTE donnera lieu à recours devant le tribunal administratif, la décision ayant été précédée d’échanges entre l’inspecteur du travail et l’entreprise puis d’une procédure préalable à cette décision. Au total, l’impact sur le contentieux administratif restera limité.

- Ordonnance pénale et transaction pénale 

Les deux dispositifs devraient pouvoir contribuer au désengorgement des tribunaux par une gestion plus rapide et plus efficace des flux de procédures.

Impacts en termes de handicap

L’ordonnance ne contiendra aucune disposition susceptible d’avoir un impact sur les droits des personnes en situation de handicap. Cependant, la possibilité d’arrêter les travaux en cas de situation dangereuse contribue à la prévention du handicap.

Impacts en termes d’égalité entre les femmes et les hommes

S’agissant de l’organisation, la mixité des emplois ne sera pas modifiée par la mise en œuvre de la réforme. Elle est actuellement d’un niveau satisfaisant dans les services d’inspection du travail. Sur les 2236 agents de contrôle affectés dans les sections d’inspection du travail, 59,1% sont en effet des femmes.

4. Modalités d’application de la réforme

4.1. Application dans le temps

L’article d’habilitation prévoit un délai de neuf mois afin donner le temps à l’administration d’élaborer le projet d’ordonnance en procédant aux différents consultations nécessaires et aux travaux interministériels en collaboration avec le ministère de la Justice, le ministère chargé de l’agriculture et le ministère chargé des transports.

4.2. Consultations

Les consultations suivantes ont été opérées :

- Conseil d’orientation des conditions de travail ;

- Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours ;

- Comité technique ministériel.

Article 85 3°

1. État des lieux :

Le délit d’entrave aux institutions représentatives du personnel est caractérisé lorsque quiconque porte atteinte ou tente de porter atteinte à la mise en place et au fonctionnement régulier des institutions. Cette notion est interprétée de façon assez large par le juge. Il peut s’agir de la non convocation d’un délégué du personnel aux réunions mensuelles (Cass. crim., 17 décembre 1996, n° 95-84.938P), ou bien encore du non-respect de l’obligation de consulter le comité d’entreprise (Cass. crim., 6 octobre 1992, n° 90-87.498).

Le délit d’entrave est actuellement passible, dans la plupart des cas, d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 3.750 euros d’amende par le tribunal correctionnel. Ces peines d’emprisonnement revêtent un caractère dissuasif pour les investisseurs étrangers.

C’est pourquoi, lors de son discours du 20 octobre 2014 prononcé lors du Conseil stratégique de l’activité, le Président de la République a affirmé sa volonté de modifier les peines sanctionnant le délit d’entrave. Il apparaît d’autant plus utile de réformer ces peines que les sanctions d’emprisonnement sont en pratique très peu appliquées. Tout d’abord, les procédures pénales traitant du délit d’entrave aux institutions représentatives du personnel représentent une très faible part du total des procédures (entre 2 et 4% des procédures sur les 10 dernières années). De plus, au sein des procédures engagées dans le cadre du délit d’entrave, les procédures aboutissant à des peines d’emprisonnement sont extrêmement rares.. En effet en 2009, sur 276 procédures relevant du thème « représentation du personnel, le juge a seulement prononcé deux fois des peines d’emprisonnement (soit à peine 1%). De même, en 2008, sur 170 procédures engagées, seules 2 ont abouti à des peines d’emprisonnement212. Ces sanctions sont donc très peu utilisées par le juge ce qui pose la question de leur adaptation au délit d’entrave.

En pratique, les entraves au comité d’entreprise et aux délégués du personnel sont condamnés en proportions relativement équivalentes (en 2006, 42 condamnations d’entrave aux DP et 40 condamnations d’entrave au CE ; en 2007, 24 condamnations d’entraves aux DP et 30 condamnation d’entraves au CE213).

Le Gouvernement souhaite donc modifier les sanctions concernant l’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel, notamment en revenant sur les peines d’emprisonnement, pour rendre les sanctions applicables plus adaptées à la réalité des situations.

2. Description des objectifs poursuivis

2.1. Regagner en attractivité et afficher un signal rassurant pour les investisseurs

Dans la lignée des engagements pris par le Président de la République, la modification des peines sanctionnant le délit d’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel a vocation à envoyer un signal rassurant aux investisseurs étrangers qui seront plus incités à s’implanter sur le territoire national.

2.2. Préserver la garantie et l’effectivité des droits des salariés à leur représentation

Cette modification ne doit pas se traduire par un affaiblissement du respect des règles relatives aux institutions représentatives du personnel. Cette mesure doit au contraire permettre d’aboutir à des sanctions mieux adaptées et ainsi plus efficaces.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

L’impact juridique associé à la suppression du délit d’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel n’est pas significatif. Il se traduira par la modification de certaines dispositions de la deuxième partie du code du travail.

Impacts économiques, financiers, sociaux et environnementaux

En termes économiques, il est attendu de cette réforme un renforcement de l’attractivité du territoire pour les investisseurs étrangers, qui aura un impact économique positif même si celui-ci ne peut être précisément évalué.

La réforme ne devrait pas avoir d’impact social particulier puisque l’ordonnance devra veiller à préserver l’effet dissuasif des sanctions et le respect des institutions représentatives du personnel.

Article 86

Régime des impatriés

147. État des lieux

Le régime des impatriés vise à faciliter le recrutement de cadres étrangers à fort potentiel par les entreprises françaises en exonérant notamment la prime d’impatriation, pour un montant forfaitaire évalué à 30% de la rémunération, ainsi que le surcroît de rémunération liée à l’impatriation elle-même. Les personnes impatriées bénéficient en outre d’une exonération temporaire d’ISF des biens situés hors de France.

Codifié sous l’article 155B du code général des impôts, le régime des impatriés peut bénéficier aux salariés et dirigeants qui n’ont pas résidé en France durant les cinq années précédant leur recrutement par une entreprise établie en France.

En 2013, 11 070 personnes ont bénéficié de ce régime fiscal.

Évolution du nombre de bénéficiaires et du coût du régime des impatriés

ANNÉE

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

VARIATION PERIODE

Bénéficiaires

7 350

7 270

8 430

8 600

9 070

9 840

11 070

51%

Coût (M€)

40

50

70

80

110

115

135

238%

Gain moyen annuel (€) par bénéficiaire

5 442

6 878

8 304

9 302

12 128

11 687

12 195

124%

Source : Documents budgétaires, DLF, 2014.

La présence de cadres dirigeants ou de spécialistes étrangers est déterminante pour l’attractivité du territoire. Elle permet aux entreprises internationalisées de bénéficier des compétences de haut niveau nécessaires à leur activité et conformes à leur culture. Ensuite, elle constitue facteur clé en matière de localisation des quartiers généraux d’entreprise.

La localisation des quartiers généraux d’entreprise est elle-même un enjeu stratégique en raison des effets économiques induits par leur présence sur un territoire.

Les retombées économiques liées à la présence de ces quartiers généraux sont multiples. D’abord, ces retombées concernent les emplois créés et leurs effets induits. En 2010, l’INSEE recensait 119 400 équivalents temps pleins dans les quartiers généraux. La présence de ce capital humain est bénéfique en raison des compétences des personnes concernées, mais aussi en raison des effets induits de distribution de revenus profitables pour la consommation et les recettes fiscales associées, et ce compte-tenu du niveau de rémunération, supérieur à la moyenne, dont bénéficient les impatriés.

Ensuite, autour du quartier général se développe un écosystème créateur de valeur appelé « corporate complex ». La présence des quartiers généraux nourrit des secteurs à haute valeur ajoutée (banquier-conseils, cabinets d’avocats ou de fiscalistes, conseils en communication, cabinets de recrutement en cadres dirigeants…). L’effet de levier serait de l’ordre de 15 à 20 (chaque « top manager » dans un quartier général fait travailler 15 à 20 consultants externes de haut niveau). Les QG favorisent la co-localisation d’autres centres de décision avec la concentration des prestataires qui se rapprochent de leurs principaux donneurs d'ordre. La présence des centres de décision favorise aussi, par effet d'entraînement, la co-localisation d’autres activités du groupe (marketing, R&D…).En outre, la présence de hauts dirigeants et de quartiers généraux d’entreprises internationales est également essentielle en matière de décisions d’investissement. Ces dernières sont en effet prises par les équipes dirigeantes des entreprises sur la base des informations dont elles disposent. Il apparaît dans tous les cas qu’une équipe dirigeante implantée en France possède une vision plus fine du pays et moins biaisée par les préjugés que si elle était située à l’étranger. Elle est alors davantage susceptible d’être favorable à une décision d’investissement sur le territoire français. De plus, la présence de décideurs de grands groupes dans notre pays est certainement la meilleure assurance qu’une image juste de notre pays circule à l’intérieur de ces groupes.

Or les considérations d’optimisation fiscale entrent en ligne de compte dans les choix de localisation des quartiers généraux. La fiscalité est ainsi un des leviers sur lesquels il est possible d’agir pour attirer les « talents » étrangers et par conséquent, les quartiers généraux d’entreprise. Différents classements en matière d’attractivité et de compétitivité reposant sur des enquêtes d’opinion témoignent d’une perception souvent négative de la fiscalité française aux yeux des dirigeants étrangers, dissuadant ces derniers de venir s’installer en France.

C’est dans le but de remédier à cette image et de renforcer son attractivité, que la France s’est dotée du régime fiscal des impatriés. Cependant, celui-ci fixe des restrictions importantes qu’il serait utile d’assouplir afin d’en améliorer l’attractivité.

148. Description des objectifs poursuivis

Le régime fiscal existant n’est pas maintenu dans le cas où l’impatrié change d’employeur ou d’entreprise, y compris dans le cadre d’une mobilité intragroupe.

La perte de ce régime d’exonération, dans cette hypothèse, constitue un frein à la valorisation des compétences des impatriés au sein d’un groupe et aux possibilités de promotion de ces derniers.

En effet, sur une période qui peut aller jusqu’à cinq ans, il est très probable que l’impatrié puisse se voir proposer une promotion au sein du groupe qui l’emploie. Une telle évolution de carrière est conforme au fonctionnement standard d’une société multinationale.  Il convient donc de rendre possible le maintien du régime dans le cas d’un changement de fonctions, comme une promotion de carrière, réalisé au sein du groupe.

Afin d’être aussi attractif que les dispositifs de nos voisins et concurrents étrangers qui se sont également dotés de régimes fiscaux de faveur à destination des impatriés, le régime français doit permettre la mobilité en entreprise et intragroupe qui constitue le prolongement de carrière habituel du manager de haut niveau au sein d’une société multinationale.

La mesure consistant à maintenir le bénéfice du régime en cas de changement de fonctions au sein d’une entreprise ou d’un groupe a donc pour objectif d’envoyer un signal positif aux cadres étrangers, pour les encourager à venir en France et de faciliter l’implantation des quartiers généraux d’entreprises internationales.

Analyse comparative de la fiscalité des entreprises, salariés « clefs » des quartiers généraux et impatriés dans 4 pays européens

 

Allemagne

Belgique

Luxembourg

Irlande

Fiscalité des impatriés

Aucun régime particulier

Régime datant du 08/08/1983, sans limite théorique de temps.

Circulaire de 2010 mise à jour du 27 janvier 2014 : un salarié hautement qualifié peut sans limite de durée bénéficier d’une exonération d’impôt (partielle ou totale) des dépenses en nature ou en espèces directement liées à son expatriation.

Special Assignee relief programme (SARP) ; depuis 2012, s’applique aux nouveaux arrivants et aux irlandais revenant dans leur pays. Il permet d’exclure de l’IR un montant de 30% de son revenu imposable compris entre 75 000€ et 500 000€ pendant 5 ans. La « Foreign Earnings Deduction » : plafonnée à 35 000€, s’applique depuis 2012 aux salariés qui bien que résidents en Irlande exercent leurs fonctions pendant au moins 60 jours par an dans un pays BRICS.
Impatriés : le régime du « remittance basis » limite d’imposition aux revenus de source irlandaise pour les contribuables considérés non-résidents non-domiciliés à partir du moment où ces derniers ne rapatrient pas leurs revenus de source étrangère.

149. Options possibles et nécessité de légiférer

Le dispositif relève du domaine de la loi en vertu des dispositions de l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui prévoit que la loi fixe les règles concernant « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ».

Le I.-1 de l’article 155 B du code général des impôts définissant le champ d’application de la réduction de l’impôt sur le revenu pour les impatriés est modifié afin de permettre le maintien du bénéfice de ce régime fiscal aux salariés impatriés changeant de fonctions au sein d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises établis en France. Cette extension permettra à plusieurs entités juridiquement distinctes d’un même groupe de bénéficier des compétences pour lesquelles le salarié impatrié a été spécifiquement recruté.

150. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts économiques

Le territoire national sera plus attractif pour les cadres de haut niveau dont la présence incitera au maintien et à l’implantation des quartiers généraux d’entreprises internationalisées. En soi, la présence d’un quartier général et son activité constituent un bénéfice pour l’économie nationale. En outre, la présence sur le territoire national des décideurs étrangers contribue probablement à orienter favorablement les décisions d’investissement prises au sein de ces entités.

Les entreprises internationalisées pourront recruter plus facilement les talents nécessaires à leur activité.

Impacts pour les particuliers

L’internationalisation du recrutement des entreprises sera facilitée et les étrangers pourront bénéficier d’une incitation à développer leur carrière en France.

Impacts pour les collectivités d’outre-mer

Cette disposition n’est pas applicable à  Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna  en raison de l’autonomie fiscale dont bénéficient ces collectivités ultra-marines.

Section 3 - Le dialogue social au sein de l’entreprise

Articles 87 à 91 

151. État des lieux

151.1. L’éclatement des compétences et du contentieux en matière électorale est source de complexité et d’insécurité pour l’ensemble des acteurs du dialogue social au sein de l’entreprise

Les élections professionnelles tant concernant leur organisation que le contrôle de la régularité des opérations électorales peuvent faire l’objet de recours auprès du juge judiciaire. Toutefois, le code du travail maintient au profit de l’administration une compétence résiduelle d’arbitrage en matière préélectorale, en cas de désaccords des organisations syndicales sur certaines dispositions du protocole d’accord préélectoral.

Plus précisément, le juge judiciaire, et plus particulièrement le tribunal d’instance, est le juge de l’élection et de la désignation ainsi que le juge des différents paramètres dont dépend leur validité. En matière préélectorale, le juge est compétent pour apprécier la validité de la négociation du protocole préélectoral, pour trancher les litiges relatifs aux informations que l’employeur doit remettre aux organisations syndicales pour leur permettre de contrôler les effectifs et la liste électorale, pour définir les conditions de l’organisation de l’élection et du déroulement des opérations électorales sur lesquels aucun accord n’a pu intervenir et enfin pour mettre en place un dispositif de contrôle des élections.

L’autorité administrative intervient quant à elle en cas de désaccord pour déterminer le cadre dans lequel les élections vont se dérouler. Il s’agit pour l’essentiel de :

- la division de l’entreprise en établissements distincts aussi bien pour les élections des délégués du personnel (art. L. 2314-31) que des comités d’établissements (art. L. 2327-7), ou pour la division en secteur d‘activité distinct pour le CHSCT (art. L. 4613-4) ;

- la répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux (art L. 2314-11 et R. 2314-6, L. 2324-13 et R. 2324-3), ainsi que la répartition des sièges du comité central d’entreprise en établissements (art. L 2327-7 et s) ;

- les dérogations aux conditions d’ancienneté en matière d’électorat et d’éligibilité (art. L. 2314-20 et L. 2324-18).

Cette répartition est source d’une grande complexité pour l’ensemble des acteurs du dialogue social dans les entreprises, d’autant qu’elle s’applique quelle que soit la taille de l’entreprise concernée dès lors que cette dernière est tenue d’organiser des élections des représentants du personnel.

Elle entraîne en outre la possibilité d’une multiplicité de voies recours contentieux, ce qui fragilise et rallonge le déroulement du processus électoral. En effet, elle conduit souvent à ce qu’une juridiction soit contrainte de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision d’une autre juridiction ou de l’administration. Les élections peuvent être invalidées plusieurs mois voire plusieurs années après leur déroulement, ce qui crée une difficulté tant en termes de respect de l’expression de la volonté des salariés que de fonctionnement normal des institutions élues qui peuvent être remises en cause plusieurs mois, voire plusieurs années, après les élections.

Ces délais peuvent aussi avoir un impact depuis l’entrée en vigueur de la loi du 20 août 2008, sur la détermination des organisations syndicales représentatives et, par suite, sur la validité du mandat des délégués syndicaux. L’entrecroisement des recours constitue donc une source potentielle de fragilité pour la représentation du personnel.

Enfin, elle est source d’incohérences. A titre d’exemples :

- si l’administration du travail est compétente pour reconnaître, en cas de désaccord, l’existence d’établissements distincts pour la mise en place des délégués du personnel et du comité d’entreprise, elle n’est pas compétente pour la division en établissements distincts s’agissant de la désignation des délégués syndicaux. Elle n’a de compétence, en matière de droit syndical, que pour autoriser, en l’absence d’accord, la suppression du mandat de délégué syndical en cas de diminution des effectifs.

- l’administration n’est pas non plus compétente pour décider de la création d’une unité économique et sociale, même si elle l’est ensuite pour opérer la division de l’entreprise en établissements distincts dans le cadre d’élections professionnelles.

- l’administration est compétente pour décider de la suppression d’un comité d’entreprise, elle ne l’est pas pour décider de la suppression d’un comité d’établissement.

- s’agissant de la répartition du personnel dans les collèges électoraux, l’administration peut seulement opérer la répartition de catégorie de personnel, mais non décider de l’appartenance à tel ou tel collège de tel ou tel salarié déterminé, la compétence étant alors celle du juge d’instance.

151.2. La nécessité de renforcer l’information des organisations syndicales relative aux résultats des élections

En l’état du droit, le code du travail impose à l’employeur d’informer par tous moyens le personnel de l’entreprise de l’organisation des élections dans l’entreprise ainsi que d’inviter les organisations syndicales présentes en son sein à négocier un protocole d’accord préélectoral (articles L.2314-2 et suivi du code du travail pour l’élection à la délégation du personnel et articles L.2323-3 et suivants pour l’élection des membres du comité d’entreprise).

Toutefois, concernant les résultats de ces élections, seule est imposée la transmission du procès-verbal des élections à l’inspection du travail dans les quinze jours (article R.2314-25 pour les élections des délégués du personnel et article R.2324-21 pour les élections au comité d’entreprise). Les organisations syndicales ont exprimé le souhait dans le cadre des travaux du Haut Conseil du dialogue social d’obtenir une information renforcée en ayant transmission de ces procès-verbaux.

151.3. La cohérence de certaines dispositions du code du travail en matière de dialogue social en entreprises pourrait encore être renforcée

Deux lois récentes, la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, ainsi que la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale sont venues apporter des innovations législatives importantes en matière de dialogue social en entreprise. Or, il apparaît que certaines dispositions préexistantes dans le code du travail n’ont as été mises en cohérence avec ces dernières. Ainsi, afin de renforce la lisibilité et l’effectivité de ces dispositions, il apparaît nécessaire d’assurer leur mise en cohérence.

En outre, l’examen de ces disposions a pu faire apparaître des incohérences entre les dispositions relatives au fonctionnement du comité d’entreprise et celles touchant à celui du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ainsi, si le code prévoit l’obligation de mettre à l’ordre du jour l’ensemble des consultations rendues obligatoires pour le comité d’entreprise, une telle disposition n’est pas reprise pour le CHSCT. Or, elle peut être source de contentieux entre l’employeur et le secrétaire du CHSCT quant à la définition de l’ordre du jour.

152. Description des objectifs poursuivis

La mesure envisagée poursuit les finalités suivantes :

- simplifier et sécuriser le processus électoral et son contentieux ;

- renforcer l’information des organisations syndicales afin d’assurer une meilleure représentation des salariés dans les entreprises ;

- renforcer l’effectivité et la cohérence des dispositions du droit du travail relatives au de dialogue social en entreprise.

153. Options possibles et nécessité de légiférer

Le dispositif relève du domaine de la loi en vertu des dispositions de l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux « du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ».

Le dispositif envisage tout d’abord de procéder au transfert de la compétence administrative en matière préélectorale au juge judiciaire, et plus particulièrement au juge d’instance. Cela a pour conséquence d’octroyer au juge judiciaire une compétence de suspension de l’élection et de prorogation des mandats en la matière. Cette unification du contentieux sous l’égide du juge judiciaire devrait permettre de simplifier et de sécuriser le processus électoral pour l’ensemble des acteurs du dialogue social en entreprise et de réduire les délais contentieux notamment en mettant fin aux sursis à statuer.

Le dispositif prévoit également l’obligation de transmission du procès-verbal des élections professionnelles aux organisations syndicales de salariés qui ont présenté des listes de candidats aux scrutins concernés ainsi que celles ayant participé à la négociation du protocole d’accord préélectoral

Enfin, le dispositif envisagé assurera la cohérence des dispositions du code du travail relatives à la base de données économique et sociale introduite par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi ainsi que celles relatives à la formation économique sociale et syndicale suite aux évolutions législatives introduites par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

154. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts sur les entreprises

S’agissant du contentieux des élections professionnelles, toutes les entreprises ayant plus de 10 salariés sont concernées  par ces mesures soit environ 199 034 entreprises214. En revanche il apparaît difficile d’évaluer voire de chiffrer précisément leur impact. La simplification et la mise en cohérence des dispositions du code du travail qui sera permise par l’unification de la compétence en matière électorale et par la mise en cohérence des dispositions du code du travail avec des dispositions législatives récentes auront sans nul doute un impact positif. Concernant l’obligation de transmission du procès-verbal des élections aux organisations syndicales, la transmission s’effectuant par tous moyens, elle ne représentera qu’un coût extrêmement limité pour l’entreprise.

Nombre d'élections professionnelles s'étant déroulées lors du premier cycle de mesure. Il s'agit uniquement des élections transmises au centre de traitement, certaines entreprises n'envoyant pas les procès-verbaux d'élection bien que ce soit obligatoire.

Institutions

2009

2010

2011

2012

Total

CE

12536

20093

16305

10586

59520

DP

28497

53902

48810

35411

166620

DUP

7872

15084

13473

8172

44601

Total général

48905

89079

78588

54169

278389

S’agissant du congé de formation économique sociale ou syndicale, il bénéficie aux salariés suivant des formations organisées, notamment par des « organisations syndicales reconnues représentatives au plan national » (article L. 3142-7 du code du travail).

La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a réformé l’organisation et le financement de cette formation. Elle prévoit, notamment, que sont financées par les interventions du fonds que la loi met en place les formations organisées par « les organisations syndicales de salariés reconnues représentatives au niveau national et celles dont la vocation statutaire revêt un caractère national et interprofessionnel et qui recueillent plus de 3 % des suffrages exprimés lors des élections [ professionnelles ; cf. article L.2135-12, nouveau).

L’article 88 du projet de loi reprend cette même définition des organisations syndicales s’agissant du congé de formation.

En pratique, aucun changement dans les organisations syndicales bénéficiaires n’intervient puisque bénéficient du congé et des financements outre les 5 organisations syndicales de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel (la CGT, la CFDT la CGT-FO la CFE-CGC et la CTFC), l’UNSA et Solidaires, organisations remplissant la condition posée par la nouvelle définition légale.

Impacts pour les administrations

Seule la mesure relative à la suppression de la compétence administrative en matière électorale aura un impact sur les administrations publiques.

L’ensemble des interventions des services du ministère du travail concernant les institutions représentatives du personnel est de plusieurs milliers par an.

Le total des interventions regroupe les observations faites par les services sur la nécessité d’engager le processus électoral compte tenu de l’effectif de l’entreprise en l’absence de procès-verbal de carences (observations assez fréquentes notamment dans les TPE) et les décisions proprement dites de l’administration du travail (Directeur régional principalement) appelée à arbitrer en cas de désaccord sur la caractérisation d’établissement distinct, la répartition du personnel et des et des sièges entre les collèges.

Les données chiffrées disponibles donnent une volumétrie annuelle ainsi mesurée :

- 850 décisions relatives aux institutions représentatives du personnel en 2010215 et 507 en 2012, parmi lesquelles 117 décisions d’arbitrage

- 47 recours hiérarchiques devant le ministre en 2011.

Le nombre de 850 décisions regroupe l’ensemble des décisions relatives aux élections des délégués du personnel et des comités d’entreprise, mais également à la mise en place, à l’élection ou à la suppression certaines institutions (comité central d’entreprise, comité de groupe), voire l’ensemble des décisions relatives à cette institution (cas de la délégation unique du personnel, avec 216 décisions).

Ces mêmes données, pour l’année 2012, s’établissent 507 décisions, année où le nombre total d’élection est en recul de près d’un tiers par rapport à 2011. Sur ce total, une requête ciblée sur la mention des articles du code du travail concernés par l’article 92 du présent projet de loi dans les décisions recensées conduit à un total de 117 décisions d’arbitrage préélectoral.

La suppression de la compétence administrative en matière préélectorale devrait ainsi avoir un impact limité sur l’activité des services de l’administration. Le transfert de cette compétence au juge judiciaire devrait permettre d’alléger l’activité de l’administration et notamment des services des DIRECCTE, tout en présentant une charge raisonnable pour le juge judiciaire.

Impacts juridiques

Là encore, seule la mesure relative à la suppression de la compétence administrative en matière électorale aura un impact sur l’ordre juridique.

Toutefois cet impact sur les juridictions de l’ordre judiciaire devrait être limité eu égard :

- au faible nombre de dossiers concernés sur l’ensemble du territoire national ;

- au fait que le juge judiciaire est déjà le juge de droit commun en matière d’élections professionnelles.

155. Consultations menées

La Commission nationale de la négociation collective ainsi que le Conseil d’orientation sur les conditions de travail vont être prochainement consultés sur ces dispositions.

156. Mise en œuvre du suivi et de l’évaluation de l’intervention

Aucun texte d’application est nécessaire à l’exception de l’article 87 (suppression de la compétence administrative en matière électorale) qui supposera la modification de plusieurs articles de la partie règlementaire du code du travail.

Section 4 - Simplifications pour les entreprises

Articles 92 et 93

Handicap

Article 92:

Périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP)

157. État des lieux

La loi n°2014-288 du 5 mars 2014 a créé un dispositif juridique unique et sécurisé de mise en situation en milieu professionnel ouvert à toute personne accompagnée quel que soit son statut, son âge ou le cadre juridique de l’accompagnement dont elle bénéficie (article L.51-35-1 et suivants du code du travail). Ce dispositif s’applique à toute personne accompagnée dans une démarche d’insertion sociale ou professionnelle. Elle peut bénéficier aux travailleurs handicapés qu’ils soient salariés ou demandeurs d’emploi.

L’article L5212-7 du code du travail prévoit que l’accueil des stagiaires en situation de handicap permet à un employeur de s’acquitter partiellement de son obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

Il est en conséquence nécessaire de compléter cet article par la mention des périodes de mise en situation en professionnel.

158. Options et nécessité de légiférer

Cette mesure a pour objectif d’inciter les entreprises à mettre en œuvre cette disposition en faveur des travailleurs handicapés, en en faisant une modalité d’acquittement partiel de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapées, au même titre que pour les stages prévus à l’article L. 5212-7 du Code du travail.

Les périodes de mise en situation en milieu professionnel constituent un outil au service des parcours des personnes handicapées. Elles permettent à un travailleur, privé ou non d’emploi, ou à un demandeur d’emploi, de se confronter à des situations réelles de travail pour découvrir un métier ou un secteur d’activité, confirmer un projet professionnel, faire émerger de nouvelles compétences ou initier une démarche de recrutement. Elles sont accessibles (L. 5135-2) à l’ensemble des personnes suivant un accompagnement social ou professionnel personnalisé quel que soit son statut (jeunes, personnes reconnues travailleur handicapé, demandeurs d’emploi inscrits ou non, salariés de l’IAE ou bénéficiant d’un CAE). Elles sont directement prescrites (L. 5135-2) par la structure assurant l’accompagnement : Pôle emploi, mission locale, Cap emploi, structures d’insertion par l’activité économique et tout organisme conventionné à cet effet par Pôle emploi, missions locales ou Cap emploi.

Pour faciliter d’une part la mobilisation de ce nouveau dispositif en faveur des personnes handicapées dans le cadre de parcours d’accès à l’emploi ou de réorientation professionnelle et inciter, d’autre part, les employeurs à les accueillir, l’article 1er créé une nouvelle modalité d’acquittement partiel de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

L’article L. 5212-7 du Code du travail prévoit les situations d’accueil de stagiaires en situation de handicap qui permettent aux employeurs de s’acquitter partiellement de leur obligation d’emploi des travailleurs handicapés. La PMSMP ne constituant pas un stage en tant que tel, il convient de prendre une disposition législative pour la faire entrer dans le périmètre d’acquittement partiel de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

159. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts budgétaires 

L’impact budgétaire prévu pour cette disposition devrait être faible. Il sera supporté par l’Agefiph chargée de la gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, qui verra baisser sa collecte au titre de l’OETH, proportionnellement au nombre et à la durée des PMSMP déclarées.

Impacts sociaux

Le schéma simplifié par rapport aux mesures antérieures permet la sécurisation juridique du dispositif pour le bénéficiaire. Il verra ainsi le maintien de son statut et de sa rémunération pendant la PMSMP, l’accès aux installations, transports collectifs (L. 5135-6), le respect du règlement intérieur, des règles d’hygiène et sécurité de la structure d’accueil (D.5135-6), de la protection des droits individuels et collectifs, de réintégration au poste de travail s’il est salarié…

Impacts sur l’emploi

Cette disposition s’insère pleinement dans les objectifs de construction de parcours d’insertion professionnelle intégrés.

Elle s’inscrit comme un levier très fort de la politique de l’emploi. En effet, l’expérience montre que la confrontation à des situations réelles de travail constitue un puissant vecteur d’insertion et de levée des freins à l’emploi.

160. Textes d’application

Un décret précisera les modalités de mise en œuvre et les conditions d’éligibilité des PMSMP à l’acquittement partiel.

161. Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles (CNEFOP) a été consulté.

Article 93 

Travailleurs indépendants handicapés (TIH)

162. État des lieux

Pour satisfaire à leur obligation d’emploi, les entreprises assujetties ont notamment la possibilité de conclure des contrats de sous-traitance, de fournitures ou de prestations de services avec des entreprises adaptées , des centres de distribution de travail à domicile ou avec des établissements ou services d’aide par le travail. Ces contrats permettent aux entreprises assujetties de soutenir indirectement l’emploi des travailleurs handicapés.

Les contrats passés avec les travailleurs indépendants handicapés ne sont pas valorisables par les entreprises au titre de leur obligation d’emploi. Or, l’activité indépendante peut offrir des perspectives d’emploi aux personnes handicapées. Il est donc opportun de soutenir les travailleurs indépendants handicapés.

En conséquence, et conformément à l’engagement pris dans le cadre du comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013, il est proposé d’intégrer les contrats de sous-traitance passés avec les travailleurs indépendants handicapés dans les modalités d’accomplissement partiel de l’obligation d’emploi, à l’instar des contrats de sous-traitance passés avec des entreprises adaptées, des centres de distribution de travail à domicile.

163. État du droit et nécessité de légiférer

Pour pouvoir valoriser ces contrats dans le cadre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, l’entreprise ne peut les conclure qu’avec les structures agréées par l’État qui emploient les travailleurs les plus lourdement handicapés.

En l’état actuel du droit, les entreprises ne bénéficient pas de cette possibilité lorsqu’elles concluent un contrat de prestation avec un travailleur indépendant. L’ouverture de cette possibilité par l’article 2 et permettra ainsi de favoriser ces travailleurs, qui représentaient en 2008, 8% des bénéficiaires de l’obligation d’emploi, soit environ 71 500 personnes.

Les contrats de sous-traitance passés avec des entreprises adaptées, des centres de distribution de travail à domicile sont listés à l’article L. 5212-6 du Code du travail comme étant une modalité d’acquittement partiel de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

164. Analyse des impacts de la disposition envisagée

Impact budgétaire

L’impact budgétaire de cette disposition devrait être faible. Il sera supporté par l’Agefiph qui verra baisser sa collecte au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, en fonction du nombre de contrats qui seront passés.

Impact économique

Cette mesure aura un effet incitatif au recours à ce mode de sous-traitance pour les entreprises assujetties à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. Les TIH verront ainsi leur potentiel d’activité croître.

Impact sur l’emploi

Cette mesure aura pour effet d’encourager l’entreprenariat des travailleurs handicapés.

165. Textes d’application

Un décret précisera quels sont les travailleurs handicapés concernés par cette disposition, et quelles sont les modalités et limites de cet acquittement partiel. Il déterminera notamment la part de la facture qui pourra être prise en compte au titre de l’acquittement partiel de l’obligation d’emploi en fonction du nombre de salariés éventuellement employés par le travailleur indépendant handicapé (seul le travail de la personne handicapé pourra être comptabilisé au titre de l’obligation d’emploi). Le dispositif sera encadré de façon à limiter les effets d’aubaine tout en restant attractif pour les entreprises souhaitant recourir aux services d’un travailleur indépendant handicapé.

166. Consultation obligatoire

Le Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles (CNEFOP) a été consulté.

Article 94

Habilitation pour remplacer le CAE-DOM par le CIE et pour abroger le CIA

167. État des lieux

La mise en œuvre du contrat unique d’insertion (CUI) en outre-mer s’est traduite par la mise en œuvre en 2011 du même contrat qu’en métropole dans le secteur non-marchand, le contrat d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE), alors que dans le contrat d’accès à l’emploi (CAE-DOM) était maintenu, bien qu’adapté, dans le secteur marchand (le contrat applicable en métropole est le contrat initiative emploi (CUI-CIE)).

Depuis 2011, les objectifs de prescription des CAE-DOM ne sont plus atteints, ce qui témoigne la baisse de l’attractivité du dispositif. Ainsi, en 2013, 3916 CAE-DOM ont été réalisés au lieu des 5806 programmés.

Malgré l’aide forfaitaire versée mensuellement et les exonérations de cotisations sociales prévues dans le cadre du CAE-DOM, les employeurs privés ont de moins en moins recours à ce dispositif, dans un contexte où la situation de l’emploi est très dégradée en outre-mer.

Par ailleurs, les garanties en termes de qualité du parcours d’insertion sont plus importantes dans le cadre du contrat initiative-emploi (CIE) en vigueur en métropole : désignation d’un tuteur, définition d’actions d’accompagnement et de formation, exclusion des recrutements par des particuliers. Les services de l’État soulignent également le manque de lisibilité des dispositifs et les difficultés dans le suivi et le pilotage de ces derniers.

Dans le secteur non-marchand, les CUI-CAE ont été progressivement déployés en Outre-mer en application de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion. Le contrat d’insertion par l’activité (CIA), créé en 1994, a toutefois été maintenu. Ce contrat pouvait être conclu entre un conseil général et un bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) dans le cadre d’un programme annuel de tâches d'utilité sociale. La Martinique et la Guyane sont les deux derniers départements à l’avoir utilisé, en 2011. Le CUI-CAE s’y est substitué car il concerne les mêmes publics dans des conditions de prise en charge et de pilotage plus favorables.

168. Objectifs et nécessité de légiférer

Le projet d’article 94 a deux objectifs principaux :

- Supprimer le CAE-DOM et le remplacer par le CUI-CIE.

Le remplacement du CAE-DOM, actuel volet marchand des contrats aidés en outre-mer, par le contrat initiative-emploi (CUI-CIE), permettrait de simplifier l’architecture des contrats aidés et d’en améliorer le pilotage et le suivi. Il répond aux attentes des acteurs locaux qui veulent disposer d’un cadre d’action des politiques de l’emploi plus fonctionnel, plus attractif et plus efficace, dans des zones affectées par un taux de chômage élevé. Les caractéristiques financières du CIE sont en effet plus attractives que celles du CAE-DOM, actuellement très peu mobilisé par les employeurs ultramarins, alors que les besoins en insertion sont particulièrement importants.

- Supprimer le contrat d’insertion par l’activité.

- L’extinction du CIA est totale depuis 2012 et la suppression des dispositions relatives à ce dispositif assurerait la clarté et l’intelligibilité du droit.

Cet article a donc pour objectif de parachever la clarification et la mise en cohérence des dispositifs de contrats aidés, engagée en 2008 avec la création du contrat unique d’insertion. La déclinaison du CUI dans le secteur non-marchand avait été appliquée sur l’ensemble du territoire. Sa déclinaison dans le secteur marchand, le contrat initiative emploi, n’avait pas été étendue à l’Outre-mer.

En effet, le contrat unique d’insertion, créé par la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion, se décline en un volet non marchand, le contrat d’accompagnement dans l’emploi et un volet marchand, le contrat initiative-emploi. Le CUI est entré en vigueur :

- le 1er janvier 2010 en France métropolitaine et le 1er mars 2012 à Mayotte, sous ses deux formes, non marchande et marchande ;

- le 1er janvier 2011, dans les départements ultramarins et les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, sous sa forme non marchande seulement. Le contrat aidé marchand antérieur au CUI, le contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE-DOM), a été adapté pour tenir lieu de CUI marchand en outre-mer tout en conservant des caractères propres éloignés de la logique du CUI-CIE.

La loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements d'outre-mer créé le contrat d’insertion par l’activité. Les dispositions sont codifiées au sein du code d’action sociale et des familles (articles L. 522-1 ; L. 522-8 ; L. 522-29-1). Le CIA n’est plus utilisé depuis 2011, ayant été progressivement remplacé par les CUI-CAE.

Les dispositions relatives au CUI, au CAE-DOM et au CIA sont des dispositions législatives codifiées dans le code du travail et le code d’action sociale et des familles, leur modification nécessite l’intervention du législateur.

Le projet d’article 99 prévoit d’autoriser le gouvernement de modifier les dispositions relatives aux contrats aidés en Outre-mer par voie d’ordonnance.

Pour ce faire, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi les mesures envisagées.

169. Analyse des impacts de la disposition envisagée

Impact budgétaire 

Dans l’hypothèse d’un développement du recours au CUI-CIE en Outre-mer, la fusion des deux enveloppes budgétaires (CAE-DOM et CUI-CIE) permettront de répondre aux besoins des DOM, compte-tenu de l’enveloppe de CUI-CIE augmentée en 2015.

Impact social

Le remplacement du CAE-DOM par le CUI-CIE devrait permettre de relancer les contrats aidés dans le secteur marchand en Outre-mer, offrant des opportunités d’insertion plus importantes pour les personnes éloignées de l’emploi en Outre-mer.

Le CUI-CIE offre également de meilleures garanties en termes de qualité de l’environnement de travail et de parcours d’insertion : désignation d’un tuteur, définition d’actions d’accompagnement et de formation, exclusion des recrutements par des particuliers…

Impact économique

Le remplacement du CAE-DOM par le CUI-CIE peut stimuler l’activité des employeurs du secteur marchand en Outre-mer et favoriser l’amélioration du contexte économique.

Impact sur l’emploi

Le développement des contrats aidés dans le secteur marchand devrait améliorer à moyen-terme l’insertion durable des personnes éloignées de l’emploi en Outre-mer.

170. Textes d’application

Une ordonnance précisera les modifications législatives induites par le cadre d’habilitation.

Les dispositions présentes dans les parties réglementaires du code du travail et du code d’action sociale et des familles relatives aux CUI, CAE-DOM et au CIA devront être modifiées par un décret en Conseil d’État.

171. Consultation menée

Le Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles (CNEFOP) a été consulté.

Section 5 - Lutte contre la prestation de service internationale illégale

Articles 95 à 97

Le renforcement des sanctions administratives

en matière de détachement transnational de travailleurs salariés

172. État des lieux

Toute entreprise non établie en France qui souhaite fournir des prestations de services sur le territoire national en détachant ses salariés dans le cadre de l’exécution d’un contrat de prestation de services est tenue de déposer une déclaration préalable de détachement et de désigner un représentant de son entreprise en France. Cette déclaration est adressée aux services de l’inspection du travail compétents. Elle renseigne les services de contrôle notamment sur le nom de l’entreprise, le nombre de salariés détachés, le lieu d’exécution de la prestation, la durée de la prestation, le montant de la rémunération. Elle permet l’exercice d’un contrôle effectif sur les situations de détachement, notamment en en permettant le ciblage et le suivi statistique du détachement en France. Elle peut être déposée en format papier ou électronique.

Conformément à l’article 4 de la directive d’exécution de la directive détachement du 15 mai 2014, le représentant de l’entreprise en France à vocation à être l’interlocuteur des services de contrôles en cas d’inspection. Il doit permettre l’échange des documents nécessaires, faciliter et accélérer le déroulé des procédures de contrôles. En effet, bien trop souvent, lors d’un contrôle d’une situation de travail, les services se heurtent à des salariés ne parlant pas français et dans l’incapacité de désigner un interlocuteur à même de fournir les premiers renseignements nécessaires à l’analyse de la situation.

L’article L. 1262-2-1 du code du travail, introduit par l’article 1er de la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale, a consacré législativement ces obligations et instauré des sanctions administratives en cas de non-respect.

Les articles L. 1264-1 à L. 1264-3 du code du travail fixent ainsi les modalités de mise en œuvre d’une amende administrative en cas de défaut de déclaration préalable de détachement transnational de salariés ou de défaut de désignation d’un représentant par le prestataire de services étranger ainsi que de défaut de vérification par le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre de la réalisation de ces obligations.

L’amende administrative est prononcée par l’autorité administrative compétente, après constatation par un agent de contrôle de l’Inspection du travail. Cette sanction est applicable non seulement à l’employeur des salariés détachés, en cas de non-respect de l’une ou l’autre de ses obligations, mais également au maître d’ouvrage ou au donneur d’ordre, co-contractant du prestataire, en cas de manquement à leur obligation de vigilance sur l’une ou l’autre de ces obligations. Son montant est d’au plus 2 000 € par salarié détaché et d’au plus 4 000 € en cas de réitération dans un délai d’un an à compter du jour de la notification de la première amende. Le montant total de l’amende ne peut être supérieur à 10 000 €.

173. Objectifs poursuivis par la réforme

En matière de lutte contre les fraudes au détachement, l’existence d’un système de sanctions efficace est une condition indispensable, non seulement pour punir ceux qui se sont livrés à des comportements frauduleux dont le premier signe est souvent le refus du dépôt de la déclaration de détachement et du représentant en France, mais aussi pour dissuader ceux qui pourraient être tentés de frauder. Le recours au détachement est aussi bien le fait d’entrepreneurs isolés faisant appel à quelques salariés pour honorer un contrat de prestation de services, que de dispositifs plus organisés appuyés sur le recours à un grand nombre de salariés dans des conditions qui peuvent parfois être frauduleuses. C’est pourquoi, il faut pouvoir punir efficacement le non dépôt d’une déclaration de détachement, élément essentiel d’un dispositif de contrôles ciblés. Par ailleurs, les sanctions doivent être significatives et adaptées à l’ampleur des fraudes afin d’avoir les effets dissuasif et répressifs escomptés.

C’est pourquoi, le présent projet de loi prévoit de renforcer la portée et l’effectivité de cette sanction, en augmentant le plafond de l’amende de 10 000 euros à 150 000 €. Le texte ne modifie pas le montant de la sanction applicable pour chaque salarié qui reste fixé à 2 000 €.

174. Options possibles et nécessité de légiférer

La lutte contre le travail illégal et, en particulier contre les prestations de service internationales illégales, constitue un axe majeur du plan national de lutte contre le travail illégal 2013-2015.

La loi du 10 juillet 2014 qui a procédé à la transposition anticipée de la directive européenne du 15 mai 2014 relative au détachement de travailleurs a, en outre, renforcé considérablement les moyens à la disposition des agents en charge de la lutte contre le travail illégal et les fraudes aux prestations de services internationales. Elle a instauré de nouvelles sanctions administratives tant à l’égard de l’employeur recourant à du détachement qu’à l’égard du donneur d’ordre en cas, notamment, de non-respect de l’obligation de dépôt d’une déclaration de détachement en France. Elle a mis en place de nouveaux cas de responsabilité solidaire de la chaîne de sous-traitance, en cas de non-respect, par l’employeur des salariés et avec l’accord tacite des donneurs d’ordre ou maîtres d’ouvrage, de certaines dispositions de droit du travail, en cas de non-paiement du salaire au minimum légal ou conventionnel ou en cas d’hébergement de salariés dans des conditions indignes. Elle ouvre aux officiers de police judicaire, dans les affaires les plus graves de travail illégal, des techniques d’enquêtes applicables à la délinquance et la criminalité organisée (mises sur écoute en enquête préliminaire, captation d'image dans un lieu privé sur commission rogatoire). Ceci est cohérent avec le renforcement des sanctions et des pénalités prononcées dans les situations de travail illégal qui présentent un caractère aggravant que viennent d’adopter les sénateurs dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Le renforcement de la lutte contre les fraudes au détachement passe aussi par l’accentuation de la coopération entre les corps de contrôle, et par la réforme, en cours, relative à nouvelle organisation du contrôle de l’inspection du travail. Ces dispositions assorties d’une politique de prévention accrue qui s’appuie sur l’ensemble des partenaires y compris sociaux pourront produire des effets positifs, poursuivant les objectifs de verbalisation du travail illégal et de redressements de cotisations sociales. La première option consiste à poursuivre leur mise en œuvre à cadre législatif constant. 

Pour autant, le rythme de progrès pouvant en être attendu ne paraît pas à la hauteur de l’enjeu. Le développement de la fraude est rapide et atteint dans certain cas un niveau très élevé. Il est corrélé à l’augmentation très forte du nombre de détachements déclarés en France (plus de 30 % de jours d’emploi détachés supplémentaires en 2013 par rapport à 2012). L’adaptation des fraudeurs aux nouvelles contraintes posées par le cadre législatif est constante. La complexité des montages frauduleux est aujourd’hui relevée par l’ensemble des corps de contrôle.

Aussi est-ce une seconde option qui est ici retenue afin de doter les services de moyens d’action ayant un fort effet répressif et dissuasif.

Il est ainsi paru nécessaire de renforcer nettement le niveau des sanctions administratives en matière de détachement de travailleurs salariés dans le cadre d’une prestation de services transnationale car il est courant aujourd’hui de constater la présence de centaines de salariés détachés non déclarés notamment sur des chantiers du bâtiment ou des travaux publics. Le présent projet de loi modifie l’article
L. 1264-3 du code du travail en portant le montant maximal de la sanction administrative de 10 000 à 150 000 euros.

175. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

L’impact juridique de cette mesure est mineur puisqu’elle ne consiste qu’à majorer le plafond de la sanction administrative en matière de détachement de travailleurs salariés dans le cadre d’une prestation de services transnationale. Cette sanction est d’ores et déjà assortie des garanties procédurales d’usage en matière de droits de la défense et des citoyens face à l’administration. En outre, sa mise en œuvre par l’autorité administrative compétente, qui sera désignée par décret en Conseil d’État, sera soumise, le cas échéant, au contrôle du juge administratif.

Impacts économiques et financiers

En 2013, on dénombrait 67 000 déclarations et 212 000 salariés détachés.

Les 67 000 déclarations effectuées équivalent à plus de 7,4 millions de jours de détachement, soit plus de 32 000 équivalents temps plein (ETP). Le nombre de déclarations a progressé de 12% par rapport à 2012 et le nombre de jours d’emploi détachés de 30%, continuant ainsi la progression à deux chiffres observée depuis plusieurs années.

En 2013, environ 1 000 contrôles ont été effectués sur les entreprises étrangères.

La mesure aura un impact en termes de recettes supplémentaires pour l’État et les organismes de sécurité sociale. D’une part, cette mesure facilitera les contrôles et la détection de fraudes aux détachements et permettra ainsi d’augmenter le recouvrement des cotisations de sécurité sociale éludées. D’autre part, cette mesure vise à faciliter le contrôle des situations de détachement transnational de travailleurs salariés et permettra donc de mieux prévenir ou réprimer la concurrence sociale déloyale au détriment des entreprises établies en France respectueuses du droit du travail.

Impacts sociaux

Cette mesure vise à faciliter le contrôle des situations de détachement transnational de travailleurs salariés et permettront donc de mieux garantir l’effectivité des droits de ces salariés tout comme la prévention de la concurrence sociale déloyale au détriment des salariés des entreprises établies en France.

Impacts en termes de contrôle et d’efficacité des sanctions

Le renforcement de la sanction administrative aura un effet dissuasif sur nombre de prestataires de services qui ne déclarent pas, actuellement, les détachements de leurs salariés en France. L’effectivité des déclarations de détachement et de la désignation d’un représentant en France du prestataire de services étranger permet aux services de l’inspection du travail d’avoir connaissance et de contrôler de manière organisée et plus rapide, le cas échéant, les conditions de ces détachements transnationaux de salariés sur le territoire national. Cela permettra d’assurer de leur conformité au regard des règles impératives (« noyau dur ») de la législation sociale française et de lutter contre toute forme de concurrence sociale déloyale au détriment des entreprises respectueuses des règles fondamentales du droit du travail, notamment en ce qui concerne les règles de santé et de sécurité en matière de chantier de BTP.

Le présent projet de loi aura également un impact en termes d’efficacité des sanctions administratives en matière de détachement transnational de travailleurs salariés. En effet, le dispositif actuel s’il peut être efficace pour les situations mineures de manquement ne sera pas suffisamment dissuasif dans les cas de fraude transnationale organisée ou d’ampleur importante. A titre d’illustration, les services de contrôle ont constaté la présence de plus de 200 ouvriers détachés sur un chantier de travaux, alors que la déclaration de détachement mentionnait seulement une vingtaine de travailleurs. Ces ouvriers travaillaient sans que les règles du travail applicables soient respectées. Dans cet exemple, si le dispositif actuel ne permet de sanctionner ce manquement que par une amende de 10 000 euros maximum, ce qui équivaut à une amende administrative concernant 5 salariés dont le détachement n’est pas déclaré, le nouveau dispositif permettrait quant à lui de sanctionner ce même manquement par une amende de 150 000 euros, soit une amende administrative relative à 75 salariés dont le détachement ne serait pas déclaré.

Impacts administratifs

L’impact administratif de cette mesure est limité, la seule modification du plafond n’ayant pas d’incidence sur la procédure elle-même.

La procédure de sanction administrative sera mise en œuvre suivant les usages déjà en vigueur dans l’administration.

Impacts sur les collectivités territoriales

Cette mesure est susceptible d’impacter les collectivités territoriales lorsqu’elles sont directement co-contractantes d’une entreprise établie hors de France et recourant à des salariés détachés (et non pas uniquement maître d’ouvrage) et qui seraient passibles d’une sanction en cas de défaut de vérification du respect des obligations incombant à leur cocontractant prestataire de services étranger, lorsque ce dernier n’a pas souscrit à ses obligations.

176. Modalités de mises en œuvre

176.1. Application dans le temps

Le présent texte entre en vigueur à compter de la publication du décret d’application prévu par l’article L. 1262-5 du code du travail pour l’application de l’article L. 1264-3 dudit code.

176.2. Application dans l’espace

Le présent texte s’applique à la France métropolitaine, aux départements d’Outre-mer ainsi qu’à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

Ces dispositions peuvent être transposées et appliquées à Mayotte.

176.3. Textes d’application

L’augmentation du plafond de la sanction ne nécessite pas en lui-même de mesure réglementaire. Toutefois, cette augmentation n’entrera en vigueur qu’à compter de la publication du décret d’application prévu par l’article L. 1262-5 du code du travail pour l’application de l’article L. 1264-3 dudit code.

La création d’une nouvelle mesure administrative de suspension

temporaire d’activité d’un prestataire de services étranger en cas

d’infraction grave à des règles fondamentales du droit du travail

177. État des lieux

Certaines prestations de services effectuées par des entreprises non établies en France donnent lieu à des infractions graves particulièrement en matière de droit du travail et plus particulièrement concernant le salaire minimum légal, la durée du travail et l’hébergement de travailleurs salariés.

Outre qu’elles portent atteinte aux droits fondamentaux des salariés, qu’elles menacent gravement notre modèle social, elles faussent également fortement les règles de concurrence loyale et mettent en péril les entreprises respectueuses de la loi.

Or, les procédures actuelles ne permettant pas de faire cesser immédiatement ces infractions, les opérations illicites se poursuivent au vu et au su de tous en dépit des procédures pénales mises en œuvre par les services de contrôle. Cette situation décrédibilise la capacité de l’État à faire respecter les règles qu’il fixe.

En effet, d’une part, le dispositif de fermeture administrative temporaire d’établissement pour une durée maximale de trois mois en cas d’infraction de travail illégal, prévu par l’article L. 8272-2 du code du travail, n’est pas applicable, dans la mesure où toutes les infractions ne relèvent pas du travail illégal, et est par nature inadapté aux entreprises établies à l’étranger qui ne disposent pas d’établissement en France contre lequel une fermeture pourrait être ordonnée.

D’autre part, il est très difficile, dans les faits, de poursuivre sur le plan pénal les entreprises prestataires étrangères qui, par nature, ne sont pas établies en France pour des infractions au droit du travail - l’extranéité des entreprises est un obstacle important aux procédures juridictionnelles- et qui, de plus, interviennent sur des périodes très courtes incompatibles avec les délais de mise en œuvre des actions juridictionnelles.

178. Objectifs poursuivis

Les principaux objectifs de cette mesure sont les suivants :

- assurer l’effectivité du respect des normes en matière du droit du travail par des employeurs établis hors de France et inciter fortement les maîtres d’ouvrage et donneurs d’ordre à remplir leurs obligations de vigilance ;

- protéger les salariés détachés contre les pratiques abusives de leurs employeurs ;

- assurer une concurrence loyale entre entreprises établies et non établies sur le territoire national.

Le présent projet de loi permet à l’autorité administrative compétente d’enjoindre à un prestataire de services étranger de suspendre son activité, pour une durée maximale d’un mois, lorsqu’il est constaté par un agent de contrôle de l’inspection du travail des infractions d’une particulière gravité caractérisées par :

- le non-respect manifeste du salaire minimal légal;

- le large dépassement des limites de durée maximale du travail (quotidienne ou hebdomadaire);

- l’hébergement collectif indigne des travailleurs salariés.

La sanction administrative est subordonnée à l’existence d’un constat effectué par un agent de l’Inspection du travail. L’employeur dispose d’un délai qui sera fixé par voie réglementaire pour présenter ses observations, régulariser la situation constatée et apporter à l’administration les éléments tangibles de la mise en conformité. Dans le cas où l’inspecteur constate que les manquements se poursuivent, la mesure de cessation d’activité est alors susceptible d’être prononcée par l’autorité administrative compétente.

Une sanction administrative financière pour non-respect de la mesure administrative de cessation temporaire d’activité vient parachever l’effectivité du dispositif. Cette dernière est fixée à 10 000 € maximum par salarié concerné.

179. Options possibles et nécessité de légiférer

Les outils juridiques actuels sont inadaptés au cas les plus graves de fraude en matière la prestation de services transnationale effectuée par une entreprise établie à l’étranger.

La mise en œuvre des sanctions financières est en effet le plus souvent rendue délicate par les difficultés de recouvrement des pénalités ou amendes prononcées en France à l’égard d’entreprises établies à l‘étranger. Il en va de même de l’application d’éventuelles peines d’emprisonnement. Les progrès accomplis par les services en charge de la lutte contre le travail illégal au sein de l’Union européenne ; notamment grâce à l’activité des bureaux de liaison, suppose néanmoins des délais et des procédures qui ne permettent pas d’intervention immédiate pour faire cesser une infraction manifeste, même de grande ampleur.

Le renforcement de cette coopération, passe par la mise en place de procédures plus rapides et plus efficaces de recouvrement des dettes sociales entre les États Membres conformément aux dispositions de la directive européenne du 15 mai 2014. A terme, la coopération efficace entre services de contrôle et de recouvrement permettra d’obtenir, en cas de fraude à la prestation de service internationale, un niveau d’effectivité et d’efficacité comparable à celui pouvant être atteint au plan national auprès des employeurs établis en France et recourant au travail illégal.

Dans cette perspective, il paraît nécessaire de disposer de moyens de mettre fin immédiatement aux violations les plus graves et les plus manifestes de l’ordre public social en cas de fraude au détachement. A défaut, se développe un sentiment d’impunité des fraudeurs –comme de certains de leurs clients en France- préjudiciable à une concurrence saine et loyale avec les entreprises établies en France.

Ce moyens portant une atteinte justifiée et proportionné mais directe à l’exécution de contrats en cours, l’intervention du législateur est nécessaire pour qu’ils puissent être mis en œuvre de manière sûre et pertinente par les services de contrôle et l’autorité administrative.

180. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

La présente mesure du projet de loi crée une mesure administrative assortie des garanties procédurales d’usage en matière de droits de la défense et des citoyens face à l’administration. En outre, sa mise en œuvre est soumise, le cas échéant, au contrôle du juge administratif, garant du respect de ces droits par l’administration.

Impacts économiques et financiers

Ces mesures auront un impact économique et financier indirect en faveur des entreprises respectueuses de la réglementation. Elles visent à faciliter le contrôle et la régularisation ou la répression des situations de manquements graves aux droits des travailleurs salariés détachés et permettront donc de mieux garantir l’effectivité des droits de ces salariés tout comme la prévention de la concurrence sociale déloyale au détriment des entreprises respectueuses de la réglementation, en particulier celles établies en France.

Ces mesures auront un impact économique et financier sur les maîtres d’ouvrage de droit privé et de droit public en raison des conséquences matérielles de la cessation d’activité d’un prestataire de services établi hors de France intervenant sur des chantiers menés pour leur compte.

Ces mesures auront un impact économique et financier sur les employeurs étrangers des salariés concernés par les manquements constatés qui feront l’objet d’une mesure de suspension d’activité voire, en cas de non-respect de cette dernière, d’une sanction administrative pécuniaire.

Elles n’auront que peu d’impact financier sur l’administration compétente pour mettre en œuvre cette sanction et auront pour conséquence d’augmenter les recettes de l’État.

Impacts sociaux

Ces mesures visent à faciliter le contrôle et la régularisation ou la répression des situations de manquements graves aux droits des travailleurs salariés détachés et permettront donc de mieux garantir l’effectivité des droits de ces salariés tout comme la prévention de la concurrence sociale déloyale au détriment des salariés des autres entreprises, en particulier celles établies en France.

Impacts en termes de lutte contre la fraude

Le présent projet de loi renforce l’efficacité des sanctions en matière d’infraction grave aux règles fondamentales du droit du travail en matière de salaire minimum légal, de durée du travail et d’hébergement de travailleurs salariés.

En effet, les procédures pénales actuelles ne permettent pas de faire cesser immédiatement ces infractions graves, les opérations illicites se poursuivent en dépit des procédures judiciaires mises en œuvre par les services de contrôle dont la portée est limitée par l’extranéité et la volatilité des entreprises concernées.

Seule une mesure de cessation administrative temporaire d’activité peut permettre d’y mettre fin dans un délai relativement bref afin de faire régulariser la situation des salariés concernés et de garantir l’effectivité de leurs droits.

Impacts sur les collectivités territoriales

Ces mesures auront un impact économique et financier potentiel indirect sur les collectivités territoriales en leur qualité de maîtres d’ouvrage de droit public en raison des conséquences matérielles de la cessation d’activité d’un prestataire de services établi hors de France intervenant sur des chantiers menés pour leur compte.

181. Modalités de mises en œuvre

181.1. Application dans le temps

Le présent texte entre en vigueur à compter de la publication des décrets d’application prévues par les articles L. 1263-3 et L. 1263-4 du code du travail.

181.2. Application dans l’espace

Le présent texte s’applique à la France métropolitaine, aux départements d’Outre-mer ainsi qu’à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

Ces dispositions peuvent être transposées et appliquées à Mayotte.

181.3. Textes d’application

Un décret d’application viendra préciser les modalités de mise en œuvre des articles L. 1263-3 et L. 1263-4 du code du travail.

La généralisation obligatoire de la carte d’identité professionnelle du bâtiment

182. État des lieux

La création, en 2007, à l’initiative du réseau des caisses de congés payés du bâtiment et des travaux publics d’une carte d’identification des salariés des entreprises du secteur du bâtiment a contribué à la réduction du travail illégal et de la concurrence sociale déloyale, en facilitant le contrôle des entreprises sur les chantiers.

Toutefois, cet outil présente les désavantages de reposer sur une adhésion volontaire des employeurs et de s’appliquer aux seules entreprises établies en France qui relèvent du régime particulier des congés payés institué par le législateur, en 1937, pour prendre en compte le morcellement des périodes d’emploi des travailleurs du bâtiment et des travaux publics chez différents employeurs, et ainsi garantir leurs droits à des congés payés.

Or, ce secteur d’activité connaît aujourd’hui une très forte augmentation des détachements de travailleurs d’entreprises établies dans un État de l’Union européenne ou dans un pays tiers, puisque le nombre de travailleurs détachés pour effectuer des travaux de bâtiment et de travaux publics représente un peu moins de la moitié du nombre total de travailleurs détachés en France, soit 92 500 auxquels il faut ajouter 16 000 salariés employés par des entreprises établies hors de France et détachés sur le territoire national, en qualité d’intérimaires, dans des entreprises utilisatrices afin d’effectuer des travaux de bâtiment et de travaux publics en 2013.

Il convient de souligner que le nombre total de travailleurs détachés, soit 210 000, ne se rapporte qu’aux travailleurs qui ont fait l’objet d’une déclaration de détachement à l’inspection du travail.

Le manquement délibéré ou non à cette obligation de déclaration auprès de l’administration du travail par les entreprises étrangères génère aussi bien des infractions aux règles sur les conditions de travail et de rémunération des travailleurs détachés que des infractions de travail illégal et de fraudes aux cotisations de congés payés alimentant ainsi une concurrence sociale déloyale et des pertes de marchés et d’emplois pour les entreprises respectueuses de la législation sociale française.

En outre, la carte ne concerne que les salariés affiliés à la caisse de congés payés et ignore les salariés intérimaires qui sont aussi présents sur les chantiers de BTP en nombre important.

183. Objectifs poursuivis

Le présent projet de loi a pour objectif d’assurer de l’identification de chaque salarié présent sur un chantier de BTP et de faciliter les contrôles des services d’Inspection comme cela a pu être mise en place dans plusieurs États européens, comme le Luxembourg ou la Finlande. Il vise in fine à s’assurer de la déclaration de ce salarié par l’employeur en vue de prévenir le travail illégal et la non déclaration des détachements transnationaux à l’Inspection du travail.

Ces mesures complètent les dispositions introduites par la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale. Le présent projet de loi prévoit ainsi de rendre obligatoire pour l’ensemble des entreprises, établies en France ou à l’étranger, occupant ou faisant travailler des salariés, y compris les salariés intérimaires, le cas échéant détachés en France, sur un chantier de bâtiment ou de travaux publics, un dispositif d’identification professionnelle.

Ce dispositif repose sur une carte d’identification nominative que le salarié devra avoir sur lui afin de la présenter à toute demande d’un agent de contrôle compétent en matière de travail illégal ou d’un agent de contrôle d’une caisse des congés payés du bâtiment et des travaux publics.

La carte concernera bien également l’ensemble des salariés détachés par une entreprise non établie en France, afin que sur un chantier l’ensemble des salariés puisse être identifiés aisément et justifier d’une déclaration effective. Il s’agit d’une mesure complémentaire à celle de la déclaration de détachement.

Il est proposé d’assortir le non-respect de cette obligation de déclaration d’une sanction administrative pécuniaire de 2000 € maximum par salarié à l’instar de la sanction prévue en cas de défaut de déclaration préalable de détachement transnational de salariés, de défaut de désignation d’un représentant du prestataire de services étranger et/ou de défaut de vérification par le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre de la réalisation de ces obligations.

184. Options possibles et nécessité de légiférer

Le caractère facultatif du système actuel, le développement des actions de sensibilisation et de partenariat ont montré leurs limites. Aussi, est-il proposé de rendre le dispositif obligatoire. La généralisation obligatoire de la carte d’identité professionnelle du bâtiment nécessite dès lors des modifications législatives et réglementaires. Compte tenu de l'expérience acquise par le réseau des caisses de congés payés du BTP, ce dispositif pourra être mis en œuvre selon des modalités rapides, simples et faciles d’accès pour les entreprises.

Il pourra s'appuyer sur l’organisation déjà en place pour la délivrance de la carte BTP et ne constituera pas une charge supplémentaire pour les entreprises, dont la plupart adressent déjà les données nécessaires à l'édition de la carte dans le cadre de l'affiliation de leurs salariés à leur caisse de congés.

Pour les entreprises non établies en France qui procèdent au détachement de salariés, il est envisagé que ce soit la déclaration de détachement qui serve de support aux informations à délivrer à l'organisme chargé de l'édition de la carte d'identification professionnelle. Les employeurs détachant des salariés en France n'auront donc pas à effectuer une déclaration spécifique mais simplement à adresser la même déclaration à la caisse de congés.

Ainsi mise en œuvre, cette obligation, qui concerne indifféremment les entreprises établies en France et celles établies à l'étranger, ne génèrera donc aucune entrave aux libertés de circulation qui aurait pu caractériser une atteinte aux règles communautaires.

La carte sera éditée à chaque changement d'employeur, comme il est d'ailleurs obligatoire de procéder à une déclaration préalable à chaque embauche (ou à une déclaration à chaque détachement). Ainsi, le salarié ne sera nullement tenu de conserver la carte d'un emploi à l'autre. Il incombe en revanche à chacun de ses employeurs de déclarer son embauche en vue de l'édition d'une carte pour chaque emploi. A cet égard, il conviendra d'accorder une importance particulière à ce que la carte puisse être éditée rapidement, ce qui conduira vraisemblablement à privilégier la télé-déclaration auprès de l'opérateur qui sera désigné.

Enfin, bien que s’adressant aux seules entreprises du secteur du BTP, cette mesure n’est pas de nature à créer une rupture d’égalité entre secteurs d’activité, compte tenu des spécificités du secteur du BTP, qui connaît un nombre de fraudes beaucoup plus conséquent que les autres secteurs. Ce constat est avéré en France mais également au niveau de l'UE. A cet égard, la directive d'application de la directive 2014/67/UE du 15 mai 2014 mentionne explicitement le secteur de la construction comme celui pour lequel les états membres doivent mettre en place obligatoirement des mécanismes de responsabilité solidaire entre employeurs et maîtres d'ouvrages afin de lutter efficacement contre la fraude au détachement.

185. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts juridiques

Les présentes mesures du projet de loi permettent de généraliser et de rendre obligatoire une mesure actuellement facultative. Ces mesures sont assorties de sanctions administratives présentant les garanties procédurales d’usage en matière de droits de la défense et des citoyens face à l’administration.

En outre, la mise en œuvre de ces sanctions sera soumise, le cas échéant, au contrôle du juge administratif, garant du respect de ces droits par l’administration.

Impacts économiques et financiers

Le nouveau dispositif de carte d’identité professionnelle généralisé et obligatoire devrait concerner :

- environ 1 400 000 salariés du secteur du BTP d’ores et déjà employés par des entreprises établies en France (source: INSEE - 2013) et déjà titulaires, en grande partie, d’une carte d’identité professionnelle délivrée par la Caisse des congés payés du bâtiment ;

- environ 330 000 salariés du secteur du BTP entrant chaque année dans ce secteur d’activité (source: DGT à partir de données brutes DARES – chiffres 2013) ;

- environ 93 000 salariés employés par des entreprises établies hors de France et détachés sur le territoire national dans le secteur du BTP en 2013 (source: DGT – chiffres 2013) ;

- environ 16 000 salariés employés par des entreprises établies hors de France et détachés sur le territoire national, en qualité d’intérimaires, dans des entreprises utilisatrices afin d’effectuer des travaux de BTP en 2013 (source: DGT – chiffres 2013) ;

- environ 120 000 salariés employés par des entreprises de travail temporaire établies en France et mis à disposition, en qualité d’intérimaires, dans des entreprises utilisatrices afin d’effectuer des travaux de BTP en 2013 (source: DGT à partir de données brutes DARES- chiffres 2012) susceptibles toutefois de réaliser une pluralité de missions pour le compte de la même entreprise utilisatrice ou de plusieurs entreprises utilisatrices différentes.

Au total, environ 2 000 000 de salariés sont concernés.

Cette mesure assortie d’une sanction pécuniaire en cas de non-respect est susceptible d’avoir un impact sur les employeurs nationaux et étrangers concernés par les manquements à l’obligation de détention d’une carte d’identité professionnelle du Bâtiment.

Elle aura peu d’impact financier sur l’administration compétente pour mettre en œuvre cette sanction et aura pour conséquence d’augmenter les recettes de l’État.

De plus, cette mesure, en favorisant la lutte contre le travail illégal et en particulier le travail dissimulé, aura pour effet direct ou indirect d’augmenter tant les cotisations recouvrées par les organismes sociaux que les taxes fiscales et les recettes de l’État.

Enfin, il est à préciser que le présent projet de loi rendra plus aisé l’identification des salariés présents sur des chantiers de bâtiment et des travaux publics. Ainsi, il contribuera à faciliter les contrôles dans le cadre de la lutte contre le travail illégal dans la mesure où l’absence de carte d’identité professionnelle du bâtiment pourra constituer un indice laissant présumer l’exercice d’un travail dissimulé et/ou d’un emploi d’étranger sans titre de travail de la part de l’employeur du salarié concerné. Au fond, il offre un instrument supplémentaire de lutte contre la concurrence sociale déloyale dans le cadre des détachements transnationaux de travailleurs salariés dont le nombre croît régulièrement dans le secteur du bâtiment.

Impacts sociaux

Cette mesure qui vise à faciliter le contrôle et la régularisation ou la répression des situations de travail illégal permettra de mieux garantir l’effectivité des droits des salariés qui en sont victimes tout comme la prévention ou la répression de la concurrence sociale déloyale au détriment des salariés des autres entreprises.

Impacts administratifs

L’impact administratif de cette mesure est limité, la mise en œuvre du dispositif généralisé et obligatoire de carte d’identité professionnelle du bâtiment étant confiée, par voie réglementaire, à un organisme national disposant de moyens de gestion propres.

186. Modalités de mises en œuvre

5.1 Application dans le temps

Le présent texte entre en vigueur à compter de la publication des décrets d’application prévus par l’article L. 8291-1 du code du travail.

5.2 Application dans l’espace

Le présent texte s’applique à la France métropolitaine, aux départements d’Outre-mer ainsi qu’à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

Ces dispositions peuvent être transposées et appliquées à Mayotte.

5.3 Textes d’application

Des décrets d’application viendront préciser les modalités de mise en œuvre de l’article L. 8291-1 du code du travail.

Section 6 - Amélioration du dispositif de sécurisation de l’emploi

Articles 98 à 104

187. État des lieux

187.1. Après seize mois de mise en œuvre, la nouvelle procédure de licenciement collectif pour motif économique semble avoir atteint l’essentiel des objectifs que s’étaient fixés les partenaires sociaux et le législateur

L’un des objectifs de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi était de conforter le dialogue social sur les restructurations et de rompre avec les dérives du cadre juridique antérieur qui encourageait les acteurs à recourir de manière dilatoire aux juges (tribunal de grande instance et conseil des prudhommes) et qui faisait prévaloir une culture du conflit à une culture de la recherche d’un compromis.

La négociation collective a désormais une place dominante, illustrant le succès du développement du dialogue social. Si on exclut les entreprises dont les projets de licenciement collectif s’inscrivent dans des procédures collectives, plus de 75% des entreprises ont engagé une négociation sur le plan de sauvegarde de l’emploi pour les procédures engagées à compter du 1er juillet 2013. Au-delà de 100 salariés, cette part monte à plus de 80%. La négociation aboutit dans près des trois quarts des cas à un accord collectif majoritaire partiel ou total, soit plus de 61% des procédures, hors redressement ou liquidation judiciaire, qui font l’objet d’un accord majoritaire. Cette part est croissante.

Il apparaît cependant qu’un certain nombre de points de la législation ont besoin d’être précisés ou modifiés afin de lever des incertitudes et de conforter les objectifs de l’ANI du 11 janvier 2013 et de la loi du 14 juin 2013

Des clarifications rédactionnelles ont besoin d’être effectuées.

187.1.1. Concernant le périmètre d’application des critères d’ordre de licenciement

Avant la loi relative à la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, seul un accord collectif permettait de fixer un périmètre inférieur à celui de l’entreprise toute entière.

Ces règles pouvaient poser des difficultés dans les entreprises qui ne parvenaient à aboutir à un accord. A titre d’illustration, dans l’hypothèse d’une entreprise comportant un établissement à Lille et un établissement à Marseille engageant une restructuration sur son seul site de Marseille, celle-ci pouvait par le jeu des critères d’ordre être conduite à licencier un salarié travaillant dans son établissement de Lille pour proposer à un salarié de Marseille un reclassement interne à Lille, proposition que ce salarié refuse quasi systématiquement. Au final, l’application des critères d’ordre au niveau de l’entreprise peut aboutir, non pas à un, mais à deux licenciements.

Avec les articles L. 1233-24-2 et L. 1233-24-4 issus de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, l’employeur a désormais la possibilité de fixer un autre périmètre que celui de l’entreprise pour l’application des critères d’ordre, et ce que ce soit par le biais d’un accord collectif ou d’un document unilatéral.

Cette disposition, qui résulte d’un jeu de renvoi de l’article L 1233-24-4, relatif aux documents unilatéraux portant PSE, au même contenu que celui de l’article L. 1233-24-2 relatif aux accords majoritaires portant PSE, ces derniers pouvant déterminer le périmètre d’application des critères d’ordre.

Cette nouvelle possibilité a fait l’objet d’arrêts de portée divergente au regard de la loi (jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n°1404370 et n°1404270 du 11 juillet sur le plan de sauvegarde de l’emploi de la société Mory Ducros et jugement du TA de Paris n°1411810 du 14 octobre 2014 sur le plan de sauvegarde de l’emploi de la société France télévision confirmant cette possibilité alors que l’arrêt de la CAA de Versailles du 22 octobre 2014 n° 14VE02408, 14VE02409, 14VE02658, 14VE02579 annule la décision d’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi de la société Mory Ducos en raison d’une erreur d’interprétation). Cette divergence est source d’insécurité juridique pour les entreprises.

187.1.2. Concernant les « petits » licenciements collectifs ne donnant pas lieu à PSE

Une erreur matérielle figure dans la rédaction de l’article L. 1233-53 issu de la loi de sécurisation de l’emploi puisque cet article prévoit une formalité nouvelle pour les licenciements de moins de dix salariés dans la section du code du travail relative aux licenciements de dix salariés ou plus sur une même période de trente jours

Or le législateur n’a pas entendu modifier les règles applicables aux « petits licenciements », qu’ils soient individuels ou collectifs (entre 2 et 9 salariés). Ceux-ci font l’objet d’une information de l’administration une fois les licenciements prononcés dans les conditions des articles L 1233-19 et L. 1233-20 du code du travail. Ils sont régis par les dispositions d’une autre section (section III – licenciement de moins de dix salariés sur une période de trente jours) du chapitre relatif au licenciement économique que celle dans laquelle s’inscrit l’article L. 1233-53 (la section IV – licenciement de dix salariés ou plus sur une période de trente jours).

187.1.3. Concernant le moment où l’employeur est tenu de proposer le contrat de sécurisation professionnelle

La rédaction de la loi de sécurisation de l’emploi prévoit déjà l’articulation entre la proposition obligatoire du contrat de sécurisation professionnelle et la procédure de licenciement collectif pour motif économique mise en œuvre par l’employeur, mais de manière insuffisamment précise.

L’article L1233-66 du code du travail prévoit que, en cas de licenciement économique donnant lieu à la mise en œuvre d’un PSE, l’employeur doit proposer le CSP à l’issue de la dernière réunion du comité d’entreprise.

L’article L1233-39 précise qu’en cas de PSE, l'employeur notifie le licenciement après avoir obtenu une décision favorable d’homologation ou de validation.

Or la proposition du CSP est l’acte qui, si le salarié l’accepte ce qui survient dans l’immense majorité des cas, enclenche le processus de rupture du contrat de travail.

En cas de décision de refus d’homologation, l’employeur qui proposerait le CSP à l’issue de la dernière réunion du comité d’entreprise pourrait se retrouver dans la situation où il met en œuvre le PSE sans être couvert par une décision administrative favorable.

187.2. Le suivi des PSE par les DIRECCTE comme certains des jugements rendus mettent en évidence la nécessité de sécuriser les objectifs de la loi de sécurisation de l’emploi.

L’esprit et l’objectif de l’ANI et de la loi du 14 juin 2013, de focaliser les obligations de l’employeur sur la qualité des mesures du PSE et leur adaptation aux besoins des salariés, et d’éviter que des obligations formelle sans effet utile sur la qualité effective du PSE ne soient source d’insécurité juridique pour les procédures s’avèrent devoir être confortées sur plusieurs points.

187.2.1. En matière de motivation des décisions administratives

L’article L. 1233-57-4 du code du travail dispose que « la décision prise par l'autorité administrative est motivée » sans pour autant préciser quel doit être le contenu ou le niveau de détail de la motivation.

Cet article n’impose ainsi pas qu’il soit fait référence à l’ensemble des points de contrôle de l’administration dans le cadre de l’homologation et de la validation des PSE.

Il convient, en effet, de souligner que les décisions de validation ou d’homologation n’entrent pas dans le champ d’application de la loi du 11 juillet 1979. En particulier, elles ne relèvent d’aucune des catégories de décisions défavorables devant être motivées en application de l’article 1er de cette loi.

La majorité des jugements concluant à l’annulation des décisions d’homologation des PSE est fondée sur ce motif de l’insuffisante motivation de la décision administrative. Or l’annulation, après que les licenciements ont commencé d’être mis en œuvre, d’une décision d’homologation sur le seul motif de l’insuffisance de motivation, alors même que la procédure d’information-consultation conduite par l’employeur est régulière et que les mesures du PSE sont de bonne qualité et proportionnées, a pour effet paradoxal d’entacher a posteriori les licenciements prononcés et de faire retomber sur l’employeur les conséquences d’un acte qui lui est extérieur. L’article L. 1235-16 du code du travail prévoit en effet qu’un tel jugement donne lieu soit à la réintégration du salarié dans l’entreprise, soit au versement au salarié d’une indemnité à la charge de l’employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

187.2.2. En matière de caractère suffisant et proportionné des mesures du PSE dans les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire appartenant à un groupe

L’appréciation du caractère suffisant ou non des mesures du PSE aux moyens du groupe ou de l’unité économique et sociale à laquelle appartient l’entreprise mettant en œuvre le PSE lorsque cette dernière est en redressement ou liquidation judiciaire pose difficulté.

En effet, la rédaction actuelle du 1° de l’article L. 1233-57-3 place l’administrateur/liquidateur judiciaire devant une exigence impossible puisque la maison-mère n’a pas d’obligation légale de participer au financement du PSE de sa filiale.

Si le dirigeant d’une filiale in bonis a les moyens de convaincre sa maison-mère de l’intérêt de participer au financement du PSE car cette dernière est intéressée à la santé financière et à la restructuration de sa filiale, qui influe notamment sur la valorisation de l’actif qu’elle détient, l’administrateur/liquidateur judiciaire n’a, quant à lui, pas de levier pour convaincre la maison-mère de financer le PSE.

L’administrateur/liquidateur judiciaire a pour mission légale, d’une part de sauver la part de l’activité qui peut l’être (soit par son rétablissement, soit par sa cession), d’autre part de réaliser tout ou partie de l’actif pour rembourser les dettes contractées auprès notamment des créanciers prioritaires.

Par ailleurs, les dispositions du code de commerce (articles L. 631-19 et L. 642-5), de niveau législatif, obligent l’administrateur-liquidateur judiciaire à effectuer les licenciements dans un délai légal de 30 jours qui conditionne la garantie par l’AGS des créances détenues par les salariés.

Concrètement, dans le cas d’une entreprise en procédures collectives, et notamment en liquidation judiciaire, la portée d’un éventuel refus d’homologation au motif que les mesures ne seraient pas proportionnées aux moyens du groupe est inopérante : concrètement, l’administration peut se retrouver confrontée à une situation où elle refuse durablement l’homologation du plan, au risque au-delà du délai de prise en charge du PSE par l’AGS de placer durablement les salariés dans une situation où ils ne peuvent pas être licenciés et donc pas pris en charge par Pôle emploi, mais où bien qu’encore salariés, ils ne sont plus rémunérés faute de moyens dans l’entreprise pour le faire. Par ailleurs, si l’administration consciente de cette fragilité homologue le PSE pour protéger les droits des salariés, elle encourt une annulation devant le juge administratif qui donnera lieu, en cas de recours des salariés devant les Conseil de prud’hommes, à une indemnité d’au moins 6 mois de salaire imputable in fine à l’AGS du fait de l’insolvabilité de l’employeur. Aucun levier ne permet de renvoyer la prise en charge de cette indemnisation à la société mère.

La sanction d’une insuffisance du PSE au regard des moyens de l’UES ou du groupe a pour effet de faire peser sur l’AGS les indemnisations qui pourraient être prononcées par le juge prudhommal et de faire encourir aux salariés le risque de perdre le bénéfice de la garantie AGS.

187.2.3. Sur le champ de l’obligation de rechercher des reclassements internes à l’étranger pour les entreprises ayant des implantations ou appartenant à des groupes ayant des implantations à l’étranger

L’obligation de rechercher des solutions de reclassement dans l’ensemble des entreprises du groupe auquel appartient l’entreprise peut s’avérer difficile à mettre en œuvre au vu de la structuration souvent complexe des groupes et de la difficulté à identifier et à actualiser les offres pour les entreprises. .

Cette obligation se traduit par un formalisme excessif faisant peser sur l’employeur ou son représentant une insécurité juridique puisqu’il suffit qu’il ait omis de solliciter l’un des entreprises du groupe pour encourir l’annulation de la procédure par le juge administratif. En outre, les entreprises du groupe ne sont, au demeurant, pas tenues de lui répondre.

La sanction d’un éventuel oubli de sollicitations de certaines entreprises du groupe par l’administrateur/liquidateur judiciaire serait, là aussi, reportée à la charge de l’AGS.

En outre, cette obligation est dans la plupart des cas une obligation vide de portée pour les salariés. Hormis une petite minorité de salariés effectivement mobiles à l’international, la plupart des salariés ne souhaitent pas quitter la France pour aller travailler dans un pays étranger, singulièrement s’agissant de groupes ayant des implantations hors d’Europe ou sur des emplois équivalents pour lesquels les niveaux de salaires peuvent être très inférieurs, car indexés sur le niveau de vie local et les conditions de travail moins protectrices.

La mobilité géographique à l’international implique, en effet, des changements affectant la vie personnelle et sociale des salariés d’une manière telle que la plupart d’entre eux répondent négativement aux questionnaires de mobilité que les employeurs sont obligés de leur adresser après avoir sollicité l’ensemble des entreprises du même groupe pour connaître les emplois susceptibles d’être proposés aux salariés licenciés.

188. Description des objectifs poursuivis

188.1. La clarification du droit

Outre la correction d’erreurs rédactionnelles, le projet de loi vise à tirer toutes les conséquences de l’instauration de la procédure d’homologation sur les modalités de mise en œuvre de certaines obligations de l’employeur, et à préciser certains points de la législation relative au licenciement collectif pour motif économique.

188.2. Le renforcement de l’effet utile et du caractère applicable et sécurisé pour les employeurs et les salariés des dispositions relatives au licenciement collectif pour motif économique

La législation sur le licenciement collectif pour motif économique doit, comme l’ont voulu l’ANI du 11 janvier 2013 et la loi relative à la sécurisation de l’emploi, d’une part assurer la qualité et le caractère adapté des mesures sociales d’accompagnement des salariés dont le licenciement pour motif économique est devenu inévitable.

D’autre part, elle doit assurer la sécurité juridique pour les entreprises dont la maîtrise des délais de réorganisation est une condition fondamentale de réussite de leurs projets pour rétablir leur situation économique et leur compétitivité.

La décision administrative en elle-même, à compter du moment où elle a bien été prise et notifiée, ne doit pas être considérée comme un critère de régularité de la procédure d’information-consultation mise en œuvre du PSE élaboré par l’employeur mais comme une condition préalable de sa mise en œuvre. Son but est d’apporter une information tant à l’employeur qu’aux salariés sur les principaux motifs qui conduisent l’administration à apprécier que la procédure est régulière et que le PSE peut bien être mis en œuvre.

189. Options possibles et nécessité de légiférer

L’objectif recherché, de modifier, corriger des erreurs ou clarifier certaines dispositions de niveau législatif imposent une modification de la partie législative du code du travail.

189.1. En matière de motivation des décisions administratives

Il est proposé de prévoir qu’en cas d’annulation d’une décision de validation ou d’homologation d’un PSE sur le seul motif d’une insuffisance de motivation de cette décision, l’autorité administrative devra prendre une nouvelle décision suffisamment motivée.

Par ailleurs, l’annulation pour ce seul motif ne rendra plus irrégulière la procédure d’information-consultation et le PSE mis en œuvre par l’employeur conformément à toutes les obligations légales y afférant. Elle sera donc sans incidence sur la validité du licenciement et ne donnera pas lieu à la réintégration ou au versement d’une indemnité à la charge de l’employeur, et ce afin de ne pas pénaliser l’employeur et les salariés qui auraient déjà engagé la construction d’un nouveau projet professionnel voire dont le projet aurait abouti.

189.2. En matière de caractère suffisant et proportionné des mesures du PSE dans les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire appartenant à un groupe

Il est proposé de prévoir qu’en cas de RJ-LJ, le respect par l’employeur du caractère suffisant et proportionné des mesures du PSE s’apprécie en fonction des moyens dont dispose l’entreprise, et non plus des moyens dont dispose le groupe ou l’UES auquel elle appartiendrait.

189.3. Concernant la mise en œuvre du CSP dans le cadre d’un PSE :

Il est proposé de prévoir que l’employeur sera tenu de proposer le CSP seulement après qu’il aura reçu la décision administrative favorable relative à l’homologation ou à la validation du PSE.

189.4. Concernant le champ de l’obligation de rechercher des reclassements internes à l’étranger pour les entreprises ayant des implantations ou appartenant à des groupes ayant des implantations à l’étranger :

Il est proposé de prévoir que l’employeur ne devra plus, pour être regardé comme ayant satisfait à son obligation de reclassement, avoir proposé a priori au salarié des postes de reclassement situés en-dehors du territoire national.

En revanche, le salarié pourra toujours demander à recevoir la liste de ces postes. L’employeur sera tenu de la mettre à sa disposition et de prévoir des mesures d’accompagnement adaptées pour ceux des salariés qui souhaiteraient et accepteraient des offres de reclassement à l’étranger.

Par ailleurs, le fait de cibler les efforts de recherche sur les seuls salariés intéressés par une mobilité à l’étranger permettra à l’employeur de mieux calibrer les offres et les mesures d’accompagnement (formation, etc).

190. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impacts pour les entreprises et les salariés

Les entreprises conduites à mettre en œuvre des projets de réorganisation donnant lieu à PSE disposeront d’un cadre légal précisé, sécurisé, et mieux adapté aux différentes situations juridiques et économiques dans lesquelles elles mettent en œuvre ces projets, notamment pour celles en redressement ou liquidation judiciaire qui se trouvent placées sous le contrôle du tribunal de commerce.

En particulier, les entreprises ayant mis en œuvre une procédure d’information légale et ayant établi un PSE conforme aux exigences ne risqueront plus de voir leur restructuration remise en cause pour un motif échappant à leur responsabilité, à savoir l’éventuelle insuffisante motivation de la décision administrative, et de payer une indemnité sans avoir commis le moindre manquement à la loi.

Les salariés ne se verront plus inutilement proposer d’envisager un reclassement à l’international et ne risqueront plus de se trouver dans une situation où faute de décision favorable, ils perdraient le bénéfice de la garantie par l’AGS de leurs créances salariales.

Impacts sur les administrations centrales

La réforme devrait générer une diminution du contentieux du fait de la clarification du cadre légal et de son adaptation pour les cas d’entreprise en redressement ou liquidation judiciaire.

.

Impacts sur les Préfectures/ DIRECCTE

La réforme devrait générer une diminution du contentieux du fait de la clarification du cadre légal et de son adaptation pour les cas d’entreprise en redressement ou liquidation judiciaire.

Impacts juridiques

Le projet de loi n’a ni pour objet, ni pour effet de valider des situations illégales au moment où elles ont été constatées. En conséquence, les jugements rendus et les sanctions prononcées pour des irrégularités constatées antérieures à la promulgation du projet de loi ne sont pas remis en question.

191. Modalités d’application

Les dispositions du projet de loi sont d’application immédiate.

Ces dispositions législatives seront applicables dans tous les départements français en métropole et outre-mer, à l’exception de Mayotte qui dispose d’une législation spécifique en matière de licenciement pour motif économique dans l’attente de la transposition des dispositions de la loi de sécurisation de l’emploi.

192. Consultations menées

Le projet de texte a été soumis à la consultation du Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles et à la commission nationale de la négociation collective.

1 Une commission des sanctions sera d’ailleurs instituée à compter du 1er janvier 2015.

2 Directive 97/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juillet 1997 concernant les masses et dimensions de certaines catégories de véhicules à moteur et de leurs remorques, et modifiant la directive 70/156/CEE – 2.1.2 de l’annexe 1.

3 Les catégories de véhicules sont définies au niveau international. Elles sont reprises au niveau communautaire (Directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules, qui abroge et remplace la directive 70/156/CEE) et nationale (article R. 311-1 du code de la route).

4 L’article R. 311-1 du code la route précise que les autobus sont des véhicules de transport en commun qui, par leur construction et leur aménagement, sont affectés au transport en commun de personnes et de leurs bagages.

5 Loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs.

6 Cette définition exclut donc les services à la demande, qui sont également des services publics, les services occasionnels, services libéralisés mais réglementés qui comprennent notamment les déplacements touristiques commandés par les tour-opérateurs, et les transports dits « privés » c’est-à-dire pour compte-propre.

7 Décret n° 85-891 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes.

8 Service temporaire mis en place en cas d’arrêt prolongé du service ferroviaire, pour cause de travaux sur le réseau par exemple.

9 Concrètement, l’organisation est généralement déléguée à la SNCF.

10 L’emploi du mot « peuvent » laisse toutefois sous-entendre que cela n’est pas systématique.

11 Titre Ier pris en application des articles L 3111-1 à L.3111-3.

12 Règlement n° 1073/2009 du Parlement européen et du conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché international des services de transport par autocar.

13 Règlement (CEE) n° 684/92 du Conseil du 16 mars 1992 établissant des règles communes pour les transports internationaux de voyageurs effectués par autocars et autobus ; règlement (CE) n° 12/98 du Conseil du 11 décembre 1997 fixant les conditions de l’admission des transporteurs non-résidents aux transports nationaux de voyageurs par route dans un État membre ; règlement CE n° 561/2006 du parlement européen et du conseil du 15 mars 2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) n° 3821/85 et (CE) n° 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) n° 3820/85 du Conseil.

14 Anciennement article 29-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée.

15 4° de l’article 31-1 du décret n° 85-891 précité.

16 Donc à l’exception notable des services urbains.

17 La région est donc également compétente pour les services ferroviaires infra-départementaux.

18 Directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 modifiant la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires et la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire.

19 Article L. 2121-12.

20 Précisées par le décret n° 2010-932 du 24 août 2010 relatif au transport ferroviaire de voyageurs.

21 Lequel a également une compétence d’autorité organisatrice.

22 Dont les véhicules de transport public particulier (taxi, VTC).

23 Hors Transilien et RER.

24 Article 32 du décret n° 85-891 précité : Les services occasionnels de transport public routier de personnes sont les services qui ne répondent pas à la définition des services réguliers et qui ont pour principale caractéristique de transporter des groupes constitués à l'initiative d'un donneur d'ordre ou du transporteur lui-même.

25 Transilien et RER.

26 Au plus un million de voyageurs transportés en 2013 sur une distance typique de 500 kilomètres.

27 Source : http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/transport/data/main_tables.

28 Source : http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/transport/data/main_tables.

29 Chiffres début 2014 : 128 lignes d’intérêt régional, 3 lignes d’intérêt national, 240 lignes TER en substitution du train.

30 Entreprises déjà en infraction avec la réglementation, l’objet de l’autorisation est manifestement de détourner la réglementation pour effectuer des services infranationaux, une analyse détaillée permet de prouver que le service concerné affecterait sérieusement, sur les tronçons directs, la viabilité d’un service comparable couvert par un contrat de service public.

31 Les autres États-membres concernés sont consultés à cette occasion(le pays de départ, le pays d’arrivée et, le cas échéant, les autres pays traversés).

32 Par un exemple, via un autocar dédié entre deux points du territoire national.

33 Le même seuil doit être respecté en termes de chiffre d’affaire (ce qui est généralement redondant car les billets infranationaux sont moins onéreux que les billets internationaux du fait de l’inclusion du trajet national dans le trajet international).

34 La procédure mise en oeuvre par la DGITM aboutit à la formulation de refus, sans remise en cause de l'analyse portée par une l'AO concernée et consultée,  dès lors que cette dernière a émis un avis défavorable.

35 Avis 14-A-05 du 14 février 2014 relatif au fonctionnement concurrentiel du marché du transport interrégional régulier par autocar.

36 Au lieu des 4 mois pour l’autorisation internationale additionnés des 3 mois pour l’autorisation nationale

37 Intérieure ou communautaire.

38 4656 en 2011.

39 http://www.fntv.fr/transport-par-autocar/. http://www.fntv.fr/transport-par-autocar/.

40 Leur part modale a été divisée par un facteur 2 en 10 ans. Le réseau comprend actuellement 35 lignes.

41 Le CGDD en a référencé 3 dans son rapport  n° 007141-01 « services de transport d’intérêt national ».

42 C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les régions y recourent largement (part modale de 5%) en complément des services ferroviaires, mais uniquement dans le ressort régional.

43 Par exemple, pour un AR entre Paris et Lille pour quatre personnes, réservé en été 2 jours à l’avance, le prix unitaire est de 28,5€ via iDbus et de 99€ par le TGV.

44 Thredbo 13 Analysis of intercity bus markets on long distances in an established and a young market: The example of the U.S. and Germany. Workshop 4. Governance, ownership and competition in deregulated public transport markets.Katrin Augustina*,Regine Gerikeb, Manuel Josue Martinez Sanchezc, Carolina Ayalac.

45 D’après Médiapart.

46 L’offre « low cost » de la SNCF (Ouigo) reste très limitée géographiquement, même si elle permet déjà de transporter 3 à 4 fois plus de passagers que les autocars dans le cadre du cabotage. L’offre iDTGV reste également limitée.

47 D’après Médiapart.

48 Places de stationnement. Gestion des fourrières. Gestion du trafic.

49 Circulation des tractions diesel et à la production d’électricité, d’origine thermique, utilisée pour la traction électrique.

50 Efficacité énergétique des modes de transport, Etude réalisée pour le compte de l’ADEME par Deloitte, Janvier 2008.

51 Application de l’article L. 1431-3 du code des transports. http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Guide_Information_CO2-2.pdf

52 Paragraphe 213 de l’avis 14-A-05.

53 Véhicule léger.

54 Directive 2003/59/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2003 relative à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules routiers affectés aux transports de marchandises ou de voyageurs. Transposée par le décret n° 2007-1340 du 11 septembre 2007 relatif à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules affectés aux transports routiers de marchandises ou de voyageurs.

55 Règlement (CE) n°561/2006 du Parlement et du Conseil du 15 mars 2006 modifié, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route.

56 Article R. 413-10 du code de la route.

57 Il semble toutefois délicat de déduire de ce graphique un risque moindre par autocar que via le train. Au regard de la proximité des chiffres relatifs aux deux modes, la méthodologie mériterait d’être expertisée plus avant. En revanche, les écarts par rapport aux voitures sont suffisamment importants pour lever tout doute.

58 Exemple du département du Loiret.

59 Paragraphes 217 à 227 de l’avis 14-A-05 de l’AdlC.

60 Entre 150 km/h et 200 km/h pour le train contre 100 km/h maximum pour l’autocar (limite réglementaire imposée pour des raisons de sécurité).

61 Et les situations liées à l’aménagement des voies (passages à niveau, signalisation, ouvrages d’arts particuliers…).

62 Environ 200 places pour un TER, 600 pour un TET contre 50 pour un autocar.

63 1° de l’article L. 2141-1 du code des transports.

64 International Transport Forum, Transport et parité des sexes, Document de référence n° 2011-11, Chantal Duchène, Avril 2011.

65 INSEE Ile de France, Les Franciliens utilisent autant les transports en commun que la voiture pour se rendre au travail, n°353, avril 2011.

66 International Transport Forum, Transport et parité des sexes, Document de référence n° 2011-11, Chantal Duchène, Avril 2011.

67 Tiré de International Transport Forum, Transport et parité des sexes, Document de référence n° 2011-11, Chantal Duchène, Avril 2011.

68 Les services régionaux sont organisés autour des villes régionales importantes, et non le long de « la grande diagonale » de la région. Ainsi, non seulement la distance maximale par TER infrarégionaux n’excède pas celle de cette grande diagonale mais en outre, elle y est très inférieure pour la majorité des dessertes.

69 Avec toutefois deux exceptions : la desserte Interloire (Nantes-Orléans : 336 km par route) et la desserte Tours Lyon (497 km par route).

70 Selon la DGITM, toutes les dessertes sont de longueur inférieure à 250 km sauf une (269 km).

71

72

Pour éviter un effet « licence taxi ». Cette durée devrait probablement être de l’ordre de 5 ans

73 .

Le développement de l’autocar peut en effet avoir un impact positif sur le développement du ferroviaire, les deux participant conjointement à une modification profonde des habitudes de déplacement

74 .

Il s’agit du chiffre avancé par l’AdlC sur la base des objectifs poursuivis en Allemagne

75 .

Chiffre cohérent avec les sondages effectués sur la base des clients actuels dans le cadre du cabotage

76 .

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

77 .

Seule l’absence d’application à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon nécessite toutefois une codification. Concernant Saint Barthelemy et Saint-Martin, pour lesquels le code des transports prévoit une inapplicabilité générale des dispositions relatives au transport routier, elle n’est pas nécessaire

78 .

Cf. page 92 de l’avis 14-A-05 de l’Autorité de la concurrence

79 .

Plus des trois quarts du réseau autoroutier sont concédés.

80

Décret n° 95-81 du 24 janvier 1995 relatif aux péages autoroutiers

81 .

Ce système contractuel est établi sur la base d’un équilibre financier, prévoyant une évolution des tarifs de péages jusqu’à la fin de la concession. En ce qui concerne les sociétés concessionnaires historiques, les tarifs évoluent relativement à l’inflation, sur la base d’une formule de type « coef. x inflation » (0,7 x inflation par exemple) ou pour les contrats de plan, coef x i + constante. Le contrat de concession qui lie les concessionnaires et l’État définit ainsi le cadre d’évolution des tarifs, celuI.ci étant précisé en principe tous les cinq ans par des contrats de plan conclus avec l’État. Ces contrats permettent de financer des investissements complémentaires en contrepartie d’une évolution complémentaire de la loi tarifaire.

82

Décret n°2005-1742 du 30 décembre 2005 fixant les règles applicables aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics

83

84 .

Décret n° 93-584 du 26 mars 1993 relatif aux contrats visés au I de l'article 48 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publique

85 s.

Décret n° 2004-86 du 26 janvier 2004 portant création de la Commission nationale des marchés des sociétés concessionnaires d'autoroutes ou d'ouvrages d'ar

86 t.

Décret n°2007-940 du 15 mai 2007 relatif à la Commission nationale des marchés des sociétés concessionnaires d'autoroutes ou d'ouvrages d'art et modifiant le décret n° 2004-86 du 26 janvier 200

87 4.

Chiffres 2012 – Source Xerfi/201

88 3.

Exemple du Télépéage sans arrêt dans le cadre du « paquet vert autoroutier 

89 ».

La déductibilité des charges financières de l’assiette de l’impôt sur les sociétés est normalement « rabotée » mais pas pour les sociétés concessionnaires dans le cadre d’une délégation de service public, dont font partie les SC

90 A.

Vinci (Vinci Autoroutes) et Eiffage (APPR), deux des majors français du BTP, dominent le secteur de la concession d’autoroutes. Ils ont réalisé respectivement 51,9% et 26,5% des revenus sectoriels hors ouvrages à péages. Vinci Autoroutes est notamment à la tête d’ASF, principale société du secteur présente en particulier dans le Sud (A7), de Cofiroute qui exploite les axes A10 et A11, ainsi qu’Escota, concessionnaire de l’autoroute A8 de la Côte d’Azur. Le troisième acteur, Sanef, est détenu majoritairement par le groupe Abertis, qui revendique le leadership mondial dans la concession d’autoroutes.

91

Prérogative du pouvoir législatif de modification des contrats en cours pour un motif impérieux d’intérêt généra

92 l.

Sur la base de l’article 15 de l’Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux public

93 s.

Pour mémoire, la diminution des effectifs salariés dans le secteur des SCA (-16% en huit ans) s’explique par l’automatisation croissante des péages, à travers une utilisation plus fréquente des cartes bancaires et le développement du télépéage. Ce dernier a conquis un nombre croissant d’usagers, notamment depuis la mise en place du télépéage sans arrêt depuis 2009. Ainsi, la part des salariés affectés aux péages était de 36,4% en 2012, contre 43% en 2007

94 .

Ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux public

95 s.

Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés public

96 s.

Lequel vient d’ailleurs d’être refondu par la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/C

97 E.

Décret n° 2005-1742 précit

98 é.

Les règles de seuil sont différente

99 s.

Arrêté du 20 avril 2012 fixant les conditions d'établissement, de délivrance et de validité du permis de conduir

100 e.

Chiffres de la Délégation à la Sécurité et à la Circulation routières (DSCR

101 ).

L’attribution des places à l’examen est opérée par le service de répartition des places des Préfectures, ou des DDI et dépend du nombre d’élèves inscrits par l’auto-école, du taux de réussite de l’auto-école à la première présentation et surtout du nombre d’inspecteurs disponibles. Les places ne sont pas nominatives et il appartient à l’établissement de répartir les places qui lui sont attribuées entre les candidates inscrits dans son établissement. L’attribution des places reposait, jusqu’au 1er octobre 2014,repose sur le principe suivant : un élève reçu à la première présentation vallait une place d’examen pour l’auto-école. À l’opposé, l’élève recalé qui devait de nouveau présenter l’examen ne génèrait pas de droit pour une nouvelle attribution de places. La réforme introduite par le gouvernement le 1er octobre accorde un droit à place y compris pour les deuxièmes présentation

102 s.

Par exemple, le dispositif du permis à 1 euro par jour, qui ne concerne aujourd’hui que les premières présentations. La réforme du permis de conduire voulue par le gouvernement va corriger cette anomalie et ouvrir le dispositif du permis à un euro par jour aux candidats ayant échou

103 é.

Rapport sur la Mobilité Inclusive, Auxilia, 201

104 3.

Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur a chargé en juin 2013 Mme Florence Gilbert, présidente de la commission « jeunes et éducation routière » du conseil national de la sécurité routière (CNSR), de mener une réflexion approfondie pour améliorer les délais d’attente d’une place d’examen du permis de conduire

105 .

Voir notamment l’avis n°10-A-26 du 7 décembre 2010 de l’Autorité de la concurrence, et ses décisions en matière de concentration dans le commerce de détai

106 l.

« Structural Features of Distributive Trades and their Impacts on Prices in the Euro Area », rapport de septembre 20

107 11

A cet égard, l’étude de la Commission européenne « The economic impact of modern retail on choice and innovation in the EU food sector » d’octobre 2014 » qui présente un état des lieux de la concentration du secteur au niveau national, doit être mise en regard de son objectif, à savoir l’analyse du secteur alimentaire et donc des interactions avec le secteur amont (pour lequel la demande, qui renvoie à la question du référencement des produits, doit être prise en compte d’un point de vue national)

108 .

Indice mesurant la concentration du marché, établi en additionnant le carré des parts de marché des opérateur

109 s.

Banque Centrale Européenne, op. ci

110 t.

CJCE, British Leyland, 11 novembre 1986, aff. 226/

111 84

La part de l’ensemble des produits commercialisables vendus par les grandes surfaces s’élève à 32 %, cette part s’élève à 67 % pour les produits alimentaires et à 17 % pour les produits non alimentaires. Le commerce de détail emploie 1,639 millions de salariés (INSEE, situation du commerce 2010 ; effectifs non-salariés et statistiques ventilées par format de distribution non disponibles

112 ).

K. Berger (2004), « Quel est l'impact de la concurrence des surfaces de type discount sur les prix des hypermarchés à dominante alimentaire ? » Revue de la concurrence et de la consommation, juillet – août – septembre, 2004, n°139. L’auteur se focalise sur les hypermarchés de 17 zones de chalandise et s’intéresse à la pression sur les prix exercée par les magasins de hard discount. Les zones de chalandise sont définies comme étant à forte concurrence dès lors que la surface totale des hypermarchés, rapportée au nombre de magasins discount, dépasse 4000 m

113 2.

Le résultat vaut pour les produits des marques de fabricants et de marques de distributeurs, mais pas pour les produits premier prix. En revanche, la pression concurrentielle conduit les hypermarchés à proposer davantage de produits premier pri

114 x.

UFC-Que Choisir (2008), « Concurrence locale sur les zones de chalandise et niveaux de prix : quelle relation ? 

115 ».

Le degré de concurrence est évalué à partir du nombre de grandes surfaces et de magasins discounts dans les différentes composantes de la zone de chalandise (zone primaire de la zone de chalandise, zone secondaire et à moins de 10 km du magasin

116 ).

P. Biscourp, X. Boutin et T. Vergé, « The effects of retail regulations on prices: evidence from French data », document de travail, 200

117 8.

On fait ici l’hypothèse que 10 % des grandes surfaces réalisent 10 % du chiffre d’affaires

118 .

cf. avis n° 12-A-01 du 11 janvier 2012 relatif à la situation concurrentielle dans le secteur de la distribution alimentaire à Paris, §1

119 46

Insee – résultats sectoriels 2010 : activités juridiques [6910Z] - Observatoire des Métiers dans les Professions Libérales, novembre 201

120 2.

CE, 23 juin 2000, Chambre syndicale du transport aérien et Fédération nationale de l'aviation marchande, Recueil Lebon, p. 240 : « en principe, les prélèvements perçus par voie d'autorité au profit des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une mission de service public et qui n'ont ni le caractère d'une taxe parafiscale instituée sur le fondement de l'article 4 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, ni celui d'une redevance pour service rendu, constituent des impositions dont il appartient au législateur, en vertu de l'article 34 de la Constitution, de fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement 

121 ».

CE, Ass., 21 novembre 1958, Syndicat national des transporteurs aériens, Recueil Lebon, p. 57

122 2.

Conseil d’État, Section du rapport et des études, « Redevances pour service rendu et redevances pour occupation du domaine public », La Documentation française, 2002, p. 3

123 6.

Conseil d’État, Section du rapport et des études, « Redevances pour service rendu et redevances pour occupation du domaine public », La Documentation française, 2002, p. 1

124 6.

Voir notamment l’arrêt du 24 mai 2011 dans l’affaire C-50/08, Commission c/ France (Rec. I.04195) : la Cour de Justice a récemment jugé qu’en l’absence de pouvoirs décisionnels, de contrainte ou de coercition, « les activités notariales, telles qu’elles sont définies en l’état actuel de l’ordre juridique français, ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique […] ». L’établissement, avec les solennités requises, d’actes authentiques, suppose l’existence préalable d’un consentement ou d’un accord de volonté des parties. Le fait qu’elle ne relève pas de l’exercice de l’autorité publique n’exclut toutefois pas que l’activité notariale puisse poursuivre « un objectif d’intérêt général, à savoir garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers 

125 ».

CJCE, Aff. C-280/00, Altmark Trans GmbH et Regierungspräsidium Magdeburg/Nahverkehersgesellschaft Altmark Gmb

126 H.

Articles LO 6213-1, LO 6313-1 et LO 6413-1 du CGC

127 T.

ce128 Article 91 de la loi du 28 avr. 1816, modifié par la loi n° 66-879 du 29 novembre. 19

129 66

Ce nombre est passé de 0,6 million à 1,2 million de transactions par a

130 n.

Pour rappel, le nombre de notaires salariés a été multiplié par trois entre 2005 et 2012, pour un taux de croissance moyen de création d’office de l’ordre de +0,4% par an. Au 1er janvier 2012, selon la direction des affaires civiles et du sceau du ministère de la justice, les salariés représentaient 847 notaires sur un total de 9 312, soit environ 9% de l’effectif.

131

Voir notamment l’arrêt du 24 mai 2011 dans l’affaire C-50/08, Commission c/ France (Rec. I.04195) : la Cour de Justice a récemment jugé qu’en l’absence de pouvoirs décisionnels, de contrainte ou de coercition, « les activités notariales, telles qu’elles sont définies en l’état actuel de l’ordre juridique français, ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique […] ». L’établissement, avec les solennités requises, d’actes authentiques, suppose l’existence préalable d’un consentement ou d’un accord de volonté des parties. Le fait qu’elle ne relève pas de l’exercice de l’autorité publique n’exclue toutefois pas que l’activité notariale puisse poursuivre « un objectif d’intérêt général, à savoir garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers 

132 ».

Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, Observatoire de l’activité libérale, II. Droit

133 .

Articles LO 6213-1, LO 6313-1 et LO 6413-1 du CG

134 CT

En Polynésie Française : délibération 99-54 APF du 22 avril 1999 portant refonte du statut du notariat ; délibération 87-118 AT du 12 novembre 1987 relative aux commissaires-priseurs judiciaires et délibération 92-122 AT du 20 août 1992 relative aux huissiers de justice. En Nouvelle Calédonie : délibération n° 85/CP du 2 avril 2009 instituant un droit de présentation au profit des officiers publics ministériels de Nouvelle-Calédonie.

A Wallis et Futuna : arrêté n° 2014-296 du 20 juin 2014 relatif à la désignation des fonctionnaires huissiers ; il n’y a ni notaires, ni commissaires-priseurs judiciaires dans ce territoire.

135

« Une personne physique titulaire d'un office notarial ne peut pas employer plus d’un notaire salarié. Une personne morale titulaire d'un office de notaire ne peut pas employer un nombre de notaires salariés supérieur à celui des notaires associés y exerçant la profession. » (Article 1ter- 1er alinéa de l’ordonnance n°45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat

136 ).

Voir les mesures envisagées par ailleurs, qui tendent à ouvrir le capital des sociétés d'exercice libéral et des sociétés de participations financières de professions libérales, ainsi qu’à créer un nouveau régime juridique d’"établissement" permettant de déconnecter totalement la propriété du capital de l'exercice de la profession proprement di

137 t.

Articles LO 6213-1, LO 6313-1 et LO 6413-1 du CG

138 CT

En Polynésie Française : délibération 99-54 APF du 22 avril 1999 portant refonte du statut du notariat ; délibération 87-118 AT du 12 novembre 1987 relative aux commissaires-priseurs judiciaires et délibération 92-122 AT du 20 août 1992 relative aux huissiers de justice. En Nouvelle-Calédonie : délibération n° 85/CP du 2 avril 2009 instituant un droit de présentation au profit des officiers publics ministériels de Nouvelle-Calédonie.

A Wallis-et-Futuna : arrêté n° 2014-296 du 20 juin 2014 relatif à la désignation des fonctionnaires huissiers ; , il n’y a ni notaires, ni commissaires-priseurs judiciaires dans ce territoir

139 e.

Voir : http://www.inpi.fr/fr/services-et-prestations/reutilisation-des-donnees-de-l-inpi/licences-rncs/liste-des-licencies.html que le nombre des licenciés de l'INPI est en effet relativement limité : six licenciés pour la partie « immatriculation, modification, radiation », et cinq pour la partie « comptes annuels ».