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N° 802

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 mars 2013.

PROPOSITION DE LOI

visant à améliorer la sécurité et la tranquillité
dans les immeubles locatifs sociaux,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Philippe GOUJON, Jean-François LAMOUR, François FILLON, Claude GOASGUEN, Alain MARC, Dominique LE MÈNER, Philippe COCHET, Jérôme CHARTIER, Jean-Luc MOUDENC, Marie-Louise FORT, Bernard BROCHAND, Charles de LA VERPILLIÈRE, Lionel TARDY, Patrick HETZEL, Olivier DASSAULT, Jacques LAMBLIN, Marc LE FUR, Guy GEOFFROY, Jean-Pierre DECOOL, Fernand SIRÉ, Michel HEINRICH, Jean-Claude MATHIS, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Olivier AUDIBERT-TROIN, Isabelle LE CALLENNEC, Annie GENEVARD, Josette PONS, Jacques PÉLISSARD, Jean-Marie TETART, Véronique LOUWAGIE, Éric WOERTH, Marc-Philippe DAUBRESSE, Rémi DELATTE, Patrick DEVEDJIAN, Philippe VITEL, Damien ABAD, Geneviève LEVY, Jacques Alain BÉNISTI, Valérie BOYER, Dominique TIAN, Bernard PERRUT, Claude STURNI, Yves FROMION, Jean-Luc REITZER, Bérengère POLETTI, Guy TEISSIER, Jean-Claude BOUCHET, Patrick BALKANY, Philippe MEUNIER, Charles-Ange GINESY, François SCELLIER, Jean-Pierre BARBIER, Lucien DEGAUCHY, Jacques MYARD, Alain LEBOEUF, Jean-Pierre VIGIER, Gérald DARMANIN, Laurent WAUQUIEZ, Yves NICOLIN et Jean-Claude GUIBAL,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi vise à améliorer la sécurité et la tranquillité dans le parc locatif social en facilitant les procédures d’expulsion des locataires causant des troubles de voisinage graves et répétés.

Les troubles de jouissance constituent des infractions au regard de l’article L. 1728 du code civil selon lequel le preneur du bail est tenu d’user de la chose louée en bon père de famille et selon l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 selon lequel il incombe au locataire d’user paisiblement des locaux loués.

Les bailleurs sociaux sont responsables de leurs locataires, au même titre que tout bailleur. En outre, le décret du 21 décembre 2001 leur a assigné des missions plus larges de sécurisation de leurs immeubles, avec l’obligation d’assurer la surveillance et le gardiennage en fixant un ratio d’un gardien à temps plein par tranche de 100 logements, qui s’applique soit dans les zones urbaines sensibles, soit dans les villes de plus de 25 000 habitants, soit dans les communes situées dans une aire urbaine d’au moins 50 000 habitants et dont une ou plusieurs communes comptent 15 000 habitants. La loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité n° 95-73 du 21 janvier 1995 a permis, afin de lutter contre ces troubles, le développement de la vidéosurveillance, l’obligation d’études préalables de sécurité, la délivrance par les bailleurs aux autorités de police et de gendarmerie d’autorisations permanentes de pénétrer dans les parties communes ainsi que des obligations de gardiennage et de surveillance. La circulaire du 3 mai 2002 invitait les préfets à associer la police nationale à la définition des mesures de sécurisation des immeubles et de leurs abords. Enfin, la loi pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003 a permis la définition du délit d’entrave, en réunion ou de manière délibérée, à la libre circulation des personnes dans les parties communes, donnant de nouveaux instruments législatifs pour qualifier le trouble à la jouissance et à l’ordre public, complétés et améliorés par la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) du 14 mars 2011 ainsi que par la loi de lutte contre les violences de groupes du 2 mars 2010.

Néanmoins, le faible recours des bailleurs sociaux à la procédure d’expulsion entretient un sentiment d’impunité pour les fauteurs de trouble et un sentiment d’exclusion pour ceux qui en sont victimes au quotidien et voient leur qualité de vie se dégrader inexorablement, subissant les troubles médicaux corrélés : dépressions, syndromes d’anxiété, d’hyper-vigilance, troubles du sommeil, etc.

Fermer les yeux sur cet état de fait, dont nombre de nos concitoyens nous font part dans nos permanences, reviendrait à excuser des comportements inadmissibles et à déconsidérer les locataires du parc social qui jouissent paisiblement de leur logement. Il n’y a pourtant pas de justification à ce que les locataires du parc social soient moins bien traités que ceux du parc privé, dans lequel on sait que les procédures d’expulsion sont plus fréquemment utilisées sur ces motifs.

La résiliation du bail pour trouble de jouissance est rendue plus malaisée dans le parc social dont les baux répondent au principe du droit au maintien dans les lieux, régi par les articles 4 à 17 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 et les articles L. 442-4-1et L. 442-6 du code de la construction et de l’habitation, modifiés par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

La rareté de ces procédures, témoignant du faible recours des bailleurs sociaux aux outils judiciaires à leur disposition, les rend médiatiquement visibles. Ainsi, le 11 janvier 2013, une décision remarquée de la cour d’appel de Versailles validait l’expulsion réclamée par l’office HLM des Hauts-de-Seine de quatre familles qui ne respectaient pas leur obligation de jouir paisiblement de la chose louée, en bon père de famille, selon les préconisations des articles L. 1728 du code civil, et 7 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

Cette proposition de loi vise à compléter le cadre juridique existant, et, par la certitude de l’application des sanctions en cas de manquement à ses obligations par le locataire, à dissuader de tels comportements.

L’article 1er propose de compléter les clauses limitatives au droit au maintien dans les lieux dans le parc social régies par le code de la construction et de l’habitation, en y incluant le motif de trouble de voisinage, attesté par une décision de justice passée en force de chose jugée. L’extinction du droit au maintien dans les lieux entraîne résiliation du bail dans un délai de trois mois et s’impose au bailleur comme au locataire.

L’article 2, complétant l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, établit l’obligation pour le bailleur d’annexer au contrat de bail le règlement intérieur de l’immeuble, ayant valeur contractuelle, spécifiant l’obligation de jouir paisiblement du logement ainsi que des parties communes de l’ensemble immobilier dans lequel celui-ci est situé, que le locataire signera en même temps que le contrat de location.

L’article 3 qui complète le b) de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, établit que les organismes d’habitation à loyer modéré intègrent dans leur contrat de bail une clause résolutoire pour non-respect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués. Le manquement à ces obligations serait constaté par une décision de justice rendue à l’encontre du locataire ou de toute personne occupant son domicile, et passée en force de chose jugée. Ainsi, en cas de trouble persistant, et après avoir mis le locataire en demeure de se conformer à ses obligations, l’organisme bailleur pourra-t-il mettre en œuvre la clause résolutoire ou saisir le juge aux fins de résiliation du bail.

L’article 4 introduit un ensemble de dispositions pour améliorer la sécurité et la tranquillité des immeubles sociaux.

Il prévoit ainsi d’assermenter les gardiens d’immeubles, à la demande du bailleur qui les emploie et si ceux-ci en acceptent la charge, pour leur permettre de dresser procès-verbal aux personnes qui contreviennent au règlement intérieur. Le produit des indemnités est affecté à un compte spécifique ouvert par le bailleur, et ne pourra être utilisé par lui qu’à des travaux de réfection, de rénovation, d’entretien ou de sécurisation des ensembles immobiliers lui appartenant. Le texte prévoit également que les organismes d’habitation à loyer modéré accordent à la police et à la gendarmerie nationale une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de leurs immeubles et que, lorsque la tranquillité et la sécurité des locataires le nécessite, ils mettent en place des équipements de vidéoprotection dans les parties communes.

L’article 4 propose également d’instaurer une procédure de signalement des fauteurs de trouble par les maires ou les maires d’arrondissements à Paris, Lyon et Marseille, permettant, après une première mise en demeure sous la forme d’une convocation du locataire ou de toute personne occupant son logement visant à lui rappeler ses obligations d’user paisiblement des locaux loués à peine de résiliation de son contrat de bail, en présence d’un représentant du bailleur, d’un officier de police judiciaire et du maire ou du maire d’arrondissement, d’engager la procédure d’expulsion du locataire fauteur de troubles.

Les maires ou les maires d’arrondissement pourront également instituer, pour les immeubles sociaux implantés sur le territoire où ils sont compétents, un groupe de liaison chargé de faciliter la transmission des informations relatives à la tranquillité et à la sécurité entre les organismes d’habitation à loyer modéré, les forces de l’ordre, l’autorité judiciaire et tout autre service en tant que de besoin.

L’article 5, modifiant le code de procédure pénale, prévoit de renforcer la protection et l’aide apportées aux locataires victimes d’agressions ou de nuisances en autorisant le bailleur à se porter partie civile par subrogation ou aux côtés de ceux-ci.

Tel est, Mesdames et Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi qu’il vous est proposé d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après l’article L. 442-3 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 442-3-0 ainsi rédigé :

« Art. L. 442-3-0. – Le droit au maintien dans les lieux du locataire s’éteint en cas de manquement grave et répété, par le locataire ou toute personne occupant son domicile, aux obligations qui lui incombent au titre des articles 1728 du code civil et 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. La charge de la preuve de ces manquements incombe au bailleur, et doit être constatée par une décision passée en force de chose jugée du tribunal d’instance du ressort dans lequel est situé l’immeuble. L’extinction du droit au maintien dans les lieux entraîne résiliation du bail dans un délai de trois mois et s’impose au bailleur comme au locataire. »

Article 2

Après le quatrième alinéa de l’article 3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« – le règlement intérieur de l’immeuble, spécifiant l’obligation de jouir paisiblement du logement ainsi que des parties communes de l’immeuble. Le locataire procède à sa signature en même temps que le contrat de location. »

Article 3

Le b) de l’article 7 de la loi n° 89–462 du 6 juillet 1989 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les organismes d’habitation à loyer modéré intègrent dans leur contrat de bail une clause résolutoire pour non-respect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués, résultant de troubles de voisinage constatés par une décision de justice rendue à l’encontre d’un locataire ou de toute personne occupant son domicile et passée en force de chose jugée. En cas de trouble persistant, et après avoir mis le locataire en demeure de se conformer à ses obligations, l’organisme d’habitation à loyer modéré met en œuvre la clause résolutoire ou saisit le juge aux fins de résiliation du bail. »

Article 4

Après le chapitre IX du titre II du livre Ier du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un chapitre X ainsi rédigé :

« Chapitre X

« De la sécurité et de la tranquillité des immeubles sociaux

« Art. L. 129-8. – Les gardiens d’immeuble, à la demande du bailleur et à condition qu’ils en acceptent la charge, peuvent prêter serment devant le juge du tribunal d’instance dans le ressort duquel ils exercent. L’assermentation les habilite à dresser des procès-verbaux à l’encontre des locataires qui contreviendraient aux dispositions du règlement intérieur de leur immeuble, à l’exception de tout autre type d’infractions. Le produit des indemnités est affecté à un compte spécifique ouvert par le bailleur, et ne pourra être utilisé par lui qu’à des travaux de réfection, de rénovation, d’entretien ou de sécurisation des ensembles immobiliers lui appartenant.

« Art. L. 129-9. – Les organismes d’habitation à loyer modéré accordent à la police et à la gendarmerie nationales ainsi, le cas échéant, qu’à la police municipale, une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de leurs immeubles.

« Art. L. 129-10. – Lorsque la tranquillité et la sécurité des locataires le nécessitent, les organismes d’habitation à loyer modéré mettent en place des équipements de vidéoprotection dans les parties communes de leurs immeubles.

« Art. L. 129-11. – Tout trouble de voisinage est signalé par l’organisme d’habitation à loyer modéré au maire de la commune, et à Paris, Lyon et Marseille, au maire d’arrondissement, ainsi qu’à la police et à la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, à la police municipale, et fait l’objet d’un rappel au règlement intérieur.

« Art. L. 129-12. – Le maire de la commune, et à Paris, Lyon et Marseille, le maire d’arrondissement, peut convoquer le locataire et toute personne occupant son logement, en présence d’un fonctionnaire de police ou de la gendarmerie nationale ou, le cas échéant, de la police municipale et d’un représentant de l’organisme d’habitation à loyer modéré, pour lui rappeler son obligation d’user paisiblement des locaux loués, à peine de résiliation de son contrat de bail.

« Il peut instituer, pour les immeubles sociaux implantés sur le territoire où il est compétent, un groupe de liaison chargé de faciliter la transmission des informations relatives à la tranquillité et à la sécurité entre les organismes d’habitation à loyer modéré, la police et la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, la police municipale, l’autorité judiciaire et tout autre service en tant que de besoin. »

Article 5

Après l’article 2-20 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-20-1 ainsi rédigé :

« Art. 2-20-1. – En cas d’infraction pénale commise par un locataire au préjudice d’un autre locataire, d’un préposé ou d’un prestataire de service du bailleur, dans le périmètre d’application du règlement intérieur de l’immeuble où ils résident, le bailleur peut exercer les droits reconnus à la partie civile au lieu et place de la victime, ou se constituer partie civile à ses côtés. Toutefois, le bailleur ne sera recevable dans son action que si il justifie avoir reçu l’accord de la victime ou, si celle-ci est un mineur ou un majeur protégé, celui de son représentant légal. »


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