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N° 2287

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2014.

PROPOSITION DE LOI

autorisant l’accord local de représentation des communes membres d’une communauté de communes ou d’agglomération,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Virginie DUBY-MULLER,
MM. Martial SADDIER et Lionel TARDY,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a constitué une étape majeure dans la construction de la France décentralisée d’aujourd’hui en répondant d’ailleurs aux objectifs premiers de la décentralisation affirmés en 1982 : renforcer la démocratie locale, notamment par l’élection au suffrage universel des conseillers communautaires des intercommunalités en même temps que les conseillers municipaux et accroître l’efficacité de l’action publique locale au plus près du citoyen.

Les nouvelles règles établies par la loi du 16 décembre 2010 précitée prévoyaient notamment pour la composition des conseils communautaires que :

– le nombre de sièges à pourvoir est fixé par un tableau arrêté par le législateur et varie en fonction de la taille démographique de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ;

– ces sièges sont répartis à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, avec toutefois deux tempéraments : chaque commune doit avoir au minimum un délégué. La représentation de chaque commune est ainsi garantie ; aucune commune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges. Ce mécanisme de redistribution des sièges est destiné aux établissements publics de coopération intercommunale qui comptent une commune-centre sensiblement plus peuplée que l’ensemble des autres communes de l’EPCI ;

– pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération, la possibilité d’accords amiables, décidés à la majorité des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié de la population totale de celles-ci ou de la moitié des conseils municipaux représentant les deux tiers de la population, est maintenue pour fixer et répartir, en tenant compte de la population de chaque-commune, le nombre de sièges de délégués communautaires. À défaut, la loi prévoit le nombre et la répartition des sièges comme pour les communautés urbaines et les métropoles.

La loi du 16 décembre 2010 précitée a été modifiée par la loi n° 2012-1561 du 31 décembre 2012 relative à la représentation communale dans les communautés de communes et d'agglomération, ayant pour objet de permettre une meilleure transition entre les modes de représentation des communes au sein des conseils délibérants et des bureaux des communautés de communes et celui défini dans la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, applicable dès les élections de mars 2014, et d’apporter ainsi plus de souplesse dans la représentation communale dans les communautés de commune et d’agglomération.

Cette loi du 16 décembre 2012 a prévu une augmentation, dans la limite de 25 % supplémentaires, du nombre de conseillers communautaires. Elle a également à l’organe délibérant de relever le nombre de vice-présidents sans toutefois qu’il dépasse 30 % de son effectif ni le nombre de quinze.

Ces dispositions, non censurées par le Conseil constitutionnel, étaient dans la ligne jurisprudentielle du Conseil constitutionnel, qui, depuis sa décision 94-358 DC du 26 janvier 1995, a rappelé au législateur que, les intercommunalités exerçant des prérogatives au nom des communes et procédant de leur légitimité démocratique, le principe d'égalité du suffrage s'oppose à ce que les communes y soient représentées de manière disproportionnée au regard de leur population. Les fondements de cette appréciation sont la règle du suffrage égal énoncée par l'article 3 de la Constitution et l'égalité des citoyens proclamée par l'article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

Le nouvel article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales résultant de ces deux lois de 2010 et 2012 s'est appliqué pour la première fois entre la fin de 2012 et l'automne 2013, en vue de répartir les sièges de conseillers communautaires avant les élections de mars 2014. La très grande majorité des décisions constituant les nouveaux conseils communautaires a été le résultat d'accords locaux obtenus à la majorité qualifiée, s'écartant plus ou moins fortement du barème purement démographique désormais en vigueur.

Pourtant, le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité a jugé par une décision 2014-405 DC, le 20 juin 2014, que la liberté de détermination de la représentation communale permise par le I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales dérogeait au principe général de proportionnalité de la représentation communale « dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ». Il en résulte qu'à partir de cette décision, seule reste en vigueur la règle de représentation purement démographique.

Nous avons alors immédiatement alerté le Gouvernement, par le biais d’une question d’actualité au Sénat dès le 17 juillet dernier, sur les conséquences qu’une telle décision allaient emporter.

En effet, de nombreuses communes se sont retrouvées dans l’obligation de procéder à une nouvelle élection municipale et donc au fléchage des conseillers communautaires, suite à des décisions des tribunaux administratifs annulant les élections municipales de mars 2014, alors même que ces communes faisaient partie de communauté de communes dans lesquelles un accord avait été trouvé sur la répartition des membres du conseil communautaire.

Suite à cette décision 2014–405 DC, la composition de ces conseils communautaires doit être revue dans deux hypothèses : en premier lieu, dans celle des contentieux introduits devant les juridictions avant la date du 20 juin 2014 ; en second lieu, lorsque le conseil municipal d’une commune membre d’un EPCI, ayant composé son conseil communautaire par accord local, est partiellement ou intégralement renouvelé.

Les cas d'élections partielles communales, nous le savons, interviendront dès lors que les décisions d’annulation seront définitives. C’est ainsi que dans les communautés de communes où un accord de représentation avait été trouvé, dans le respect des règles précitées, un certain nombre de conseillers communautaires vont se retrouver immédiatement privés de leur mandat, rompant l’équilibre trouvé il y a moins de six mois.

La présente proposition de loi vise à remédier à ces situations. Elle entend donc établir des limites chiffrées aux écarts de représentation issus d'un accord local, en cohérence avec la jurisprudence fixée par le Conseil Constitutionnel en matière de représentation électorale.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« I. – Sans préjudice des dispositions de l'article L. 5212-7, le nombre et la répartition des délégués sont établis :

« a) soit selon les modalités prévues aux II à VI du présent article ;

« b) soit, dans les communautés de communes et les communautés d'agglomération, par accord des deux tiers des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié de la population totale de celles-ci ou de la moitié des conseils municipaux des communes intéressées représentant les deux tiers de la population totale.

« La répartition fixée par l'accord prévu au b est fonction de la population de chaque commune. Chaque commune dispose d'au moins un siège. Par rapport au résultat de l'application du a, une commune ne peut obtenir une représentation supérieure de plus d'un siège ni voir sa proportion de sièges dans le conseil communautaire baisser de plus d'un cinquième. En outre aucune commune ne peut détenir plus de la moitié des sièges. Le nombre total de sièges réparti en application de l'accord ne peut excéder de plus de 25 % celui qui serait attribué en vertu des III et IV du présent article. »

Article 2

Dans les communautés de communes et d'agglomération dont le conseil communautaire a été modifié postérieurement au 20 juin 2014, une nouvelle application de l'article L. 5211–6–1 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction issue de la présente loi est autorisée dans les six mois suivant sa promulgation.

Dans ce cas, les chiffres des populations communales pris en compte sont ceux des populations légales de 2014.

Article 3

La charge pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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