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N
° 1604

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2013

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 1548).

PAR M. Jean-Yves CAULLET

Député

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Voir les numéros : 1548, 1639, 1614, 1603.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

TRAVAUX DE LA COMMISSION 11

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 11

II. EXAMEN DES ARTICLES 31

TITRE PRÉLIMINAIRE : OBJECTIFS DE LA POLITIQUE EN FAVEUR DE L’AGRICULTURE, DE L’ALIMENTATION, DE LA PÊCHE MARITIME ET DE LA FORÊT 31

Article 1er (articles L. 1 à L. 3 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime, article 1er de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d’orientation agricole) : Principes généraux de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation 31

Après l’article 1er 36

TITRE IER : PERFORMANCE ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES 37

Article 2 (articles L. 611-1, L. 621-2, L. 621-5, L. 621-8 du code rural et de la pêche maritime) : Adaptation de la composition et des missions du conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire et de FranceAgriMer 37

Article 3 (articles L.311-4 à L. 311-7 [nouveaux], L. 666-1 du code rural et de la pêche maritime) : Création des groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) et définition des conditions de leur reconnaissance 40

Article 4 (articles L. 211-3 du code de l’environnement, L. 411-27, L. 820-1 du code rural et de la pêche maritime) : Déclaration de l’azote commercialisé et extension du bail environnemental 44

Après l’article 10 49

TITRE II : PROTECTION DES TERRES AGRICOLES ET RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS 49

Avant l’article 11 50

Article 11 (article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime) : Renforcement des prérogatives du conseil régional dans l’élaboration du plan régional de l’agriculture durable 51

Article additionnel après l’article 11 52

Article 12 (articles L. 112-1, L. 112-1-1, L. 112-2, L. 135-3 et L. 135-5 du code rural et de la pêche maritime et articles L. 122-1-5, L. 122-3, L. 123-1-2, L. 123-6, L. 124-2, L. 143-1, L. 145-3 du code de l’urbanisme) : Préservation du foncier agricole 52

Article 13 (articles L. 141.1, L. 141-1-1 [nouveau], L. 141-6, L. 143-1, L. 143-2, L. 143-7 du code rural et de la pêche maritime) : Améliorer l’efficacité de l’intervention des SAFER 60

TITRE III : POLITIQUE DE L’ALIMENTATION ET PERFORMANCE SANITAIRE 64

Article 17 (articles L. 111-5 et L. 230-1 du code rural et de la pêche maritime, L. 541-1 du code de la consommation et L. 3231-1 du code de la santé publique) : Renforcement et clarification de la politique de l’alimentation 64

Article 18 (articles L. 201-2, L. 201-4, L. 201-7, L. 201-8, L. 221-5, L.223-4, L. 223-5, L. 223-6-2 [nouveau], et L. 223-8 du code rural et de la pêche maritime, L. 421-5, L. 425-1 et L. 425-2 du code de l’environnement) : Extension des mesures de police sanitaire aux animaux de la faune sauvage 65

Article 20 (articles L. 5141-13-1, L. 5141-13-2, L. 5141-14-1 à L. 5141-14-5 [nouveaux], L. 5141-16, L. 5142-6, L. 5142-6-1, L. 5142-6-2, L. 5143-6, L. 5144-1, L. 5442-10, L. 5442-11 à L. 5442-14 [nouveaux] du code la santé publique) : Prévenir la consommation excessive d’antibiotiques 67

Article 21 (articles L. 251-8, L. 251-9, L. 253-5, L. 253-8-1 [nouveau], L. 253-14, L. 253-16 du code rural et de la pêche maritime, article 38 du code des douanes) : Prévention de la consommation excessive de produits phytosanitaires 72

Article 22 (articles L. 1313-1, L. 1313-2 et L. 1313-5 du code de la santé publique) : Transfert à l’ANSES de la compétence de délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires et des matières fertilisantes 74

Article 23 (articles L. 254-1, L. 254-3-1, L. 254-6, L. 254-6-1 [nouveau], L. 254-7, L. 254-10, L. 258-1 du code rural et de la pêche maritime) : Réglementation de l’activité de conseil et mise en place d’un suivi des produits phytopharmaceutiques 77

TITRE V : DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORÊT 78

Article 28 : Ratification de l’ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012 relative à la partie législative du code forestier 78

Article 29 (article L. 112-1, L. 113-1, L. 113-2, L. 121-2, L. 125-1, L. 121-1 nouveau, L. 121-2-2 nouveau, L. 122-1, L. 122-2, L. 122-6, L. 312-1, L. 122-2, L. 123-2, L. 122-12, L. 122 13, L. 122-14, L. 122-15, L. 123-1, L. 125-1, L. 125-2, L. 133-3, L. 152-1, L. 153 1, L. 153-1-1 nouveau, L. 153-1-2 nouveau, L. 154-2, L. 156-4 nouveau du code forestier, art. L. 126-1, L. 632-1-2 du code rural et de la pêche maritime, art. L. 414-8, L. 425-1, L. 425-4 et L. 425-12 du code de l’environnement) : Objectifs, gouvernance et financement de la politique forestière 79

Article additionnel après l’article 29 : Caractère intégrateur des documents forestiers 85

Article 30 (articles L. 122-2, L. 122-7, L. 124-3, L. 124-1, L. 124-2, L. 143-2, L. 213-1, L. 213-1-1, L. 214-13, L. 214-14, L. 332-7, L. 332-8, L. 313-3, L. 321-1, L. 331-19, L. 341-6 du code forestier) : Défrichements, groupements d’intérêt économique et environnemental forestier, diverses dispositions relatives à la forêt 86

Article additionnel après l’article 30 : Biens fonciers vacants et sans maître 92

Article 31 (articles L. 131-7, L. 161-8, L. 161-21 du code forestier et articles 22 à 26, 34, 39, 45 et 546 du code de procédure pénale) : Harmonisation avec le code forestier des dispositions du code de procédure pénale relatives aux fonctionnaires et agents habilités à constater et rechercher les infractions forestières 94

Article additionnel après l’article 31 : Contrat d’objectifs et de performance entre l’État et l’Office national des forêts 94

Article 32 (article L. 4424-33-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Transfert de l’État vers la collectivité territoriale de Corse de la compétence en matière de production et de multiplication de plants forestiers et autres végétaux 95

Article 33 : Éviter la mise sur le marché de bois et de produits dérivés du bois issus d’une récolte illégale 95

Article additionnel après l’article 33 : Rapport sur les exportations de bois ronds et de grumes 96

TITRE VI : DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER 97

Article 34 (articles L. 111-2-1, L. 182-8, L. 182-9, L. 272-6, L. 272-7, L. 272-8, L. 272-9, L. 272-10, L. 272-13, L. 272-14, L. 272-15, L. 272-16 [abrogés] ; L. 180-1, L. 181-6-1, L. 181-25, L. 182-1-1, L. 182-13-1, L. 511-14 [nouveaux], L. 182-1, L. 272-11, L. 272-12, L. 372-1, L. 461-10, L. 571-1, L. 571-2, L. 681-1, L. 681-10, L. 762-6, L. 762-7 [modifiés] du code rural et de la pêche maritime ; article 6 de l’ordonnance n°2011-864 du 22 juillet 2011 relative à a protection et à la mise en valeur des terres agricoles dans les départements d’outre-mer, le département de Mayotte et à Saint-Martin ; article 4 de la loi n°2013-453 du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer) : Pilotage de la politique agricole et agro-alimentaire outre-mer 97

Article 35 (articles L. 175-4, L. 175-6, L. 175-7, L. 175-8, L. 176-2, L. 176-3, L. 176-6, L. 177-2, L. 177-4, L. 177-3, L. 178-3, L. 178-4, L. 371-1 [nouveau], L. 373-3 [nouveau], L. 374-10 [nouveau] du code forestier) : Adaptation des dispositions du code forestier aux outre-mer et exercice des missions du Conseil national de la propriété forestière en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion 99

Article 36 (articles L. 181-1, L. 181-2, L. 181-3, L. 181-24, L. 181-26 [nouveau], L. 182-25, L. 274-11 [nouveau], L. 371-1, L. 371-2, L. 371-5-1 [nouveau], L. 461-2 du code rural et de la pêche maritime, article L. 150-1 du code de l’urbanisme) : Adaptation aux outre-mer les dispositions des titres Ier à IV du projet de loi d’avenir et homologation de peines 100

TITRE VII : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET DIVERSES 101

Article 39 (articles L. 111-2-1, L. 141-6, L. 181-25, L. 181-26, L. 312-1, L. 371-5-1, L. 722-5-1 du code rural et de la pêche maritime, article L. 211-3 du code de l’environnement, L. 122-1, L. 122-3, L. 122-12, L. 122-13, L. 122-14, L. 122-15 du code forestier) : Dispositions transitoires 101

Après l’article 39 102

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 103

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 105

INTRODUCTION

L’agriculture et l’industrie agroalimentaire constituent une ressource fondamentale stratégique pour notre pays. La France, dans un environnement mondialisé, de plus en plus concurrentiel, marqué par la présence accrue des pays émergents, grâce à une agriculture de qualité, a su conserver sa place à l’international. Si depuis les années qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux années 1990, les politiques publiques en faveur de l’agriculture, dans une Europe en construction, ont donné la priorité au développement des modèles productivistes pour faire face aux besoins d’une industrie agroalimentaire en plein développement, les dernières décennies ont vu ces priorités infléchies pour aller vers des modèles économiques plus vertueux vis-à-vis de l’environnement et de l’aménagement du territoire, tout en gardant leur compétitivité dans le cadre d’une mondialisation accélérée des échanges.

L’agriculture française a aujourd’hui atteint l’objectif d’autosuffisance que lui assignait la politique agricole commune et son chiffre d’affaires excédentaire s’inscrit au quatrième rang mondial. Les exportations de produits agricoles et alimentaires contribuent positivement au solde de notre balance commerciale et le maintien d’une production agricole diversifiée participe à la vitalité économique de nombreux territoires.

Pour autant, la question du rôle imparti à l’agriculture dans les prochaines décennies se trouve posée de manière insistante : quelle agriculture ou quelles agricultures pour demain en termes économiques, sociaux, sanitaires et territoriaux ? Cette question est fondamentale pour donner une réponse forte aux attentes des acteurs économiques et politiques mais également aux consommateurs et à la société en général. Il convient d’apporter des réponses justes pour redonner confiance après plusieurs crises sanitaires récentes, envers certaines pratiques agricoles, envers les contrôles et envers les experts à l’origine des agréments donnés par l’État.

C’est dans la ligne de ce questionnement que s’inscrit le présent projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (ci-après dénommé « projet de loi d’avenir »). Il vise, en premier lieu, à établir des orientations de long terme et à réaffirmer la nécessité d’outils de gestion, de régulation et d’organisation, à travers l’amélioration ou le renforcement d’un ensemble de mécanismes. Il s’agit également, dans le même mouvement, de faire en sorte que se construisent conjointement les performances économique et environnementale des exploitations d’aujourd’hui et de demain en facilitant le renouvellement des générations, en préservant la force et l’excellence de l’agriculture française dans un monde globalisé. L’atteinte de ces objectifs permettra que l’agriculture, l’alimentation et la forêt soient pleinement reconnues comme des composantes d’avenir essentielles à l’équilibre économique, social et environnemental de notre pays.

De tels objectifs passent par le renforcement de la compétitivité des filières agricoles et agroalimentaires – dont certaines souffrent aujourd’hui – dans le prolongement du cadre rénové de la politique agricole commune à partir de 2014 et en complément du travail conjointement réalisé par l’État et les professionnels. Les outils proposés viendront ainsi compléter les instruments déjà mis à disposition des différents acteurs, notamment le soutien apporté à l’investissement et à la restructuration par la Banque publique d’investissement (BPI-France) et dans le cadre du pacte pour la croissance, la compétitivité et l’emploi (CICE).

La recherche de la compétitivité ne peut ignorer les enjeux liés à la transition écologique. Le projet agro-écologique pour la France, qui constitue une dimension structurante du présent projet de loi et en inspire maintes dispositions, doit placer la double performance économique et environnementale au cœur de pratiques agricoles innovantes, que le cadre législatif doit favoriser. Les changements espérés ne pourront s’opérer sans un dialogue rénové entre le monde agricole au sens large et la société, ce qui suppose le développement d’outils de médiation, une meilleure circulation de l’information, une transparence renforcée et une gouvernance rénovée pour une représentativité plus ouverte.

Cette double performance est le gage de la durabilité de notre agriculture et de la reconnaissance de sa production tant sur les marchés mondiaux, européens et nationaux que par l’ensemble de la société. Sa bonne mise en œuvre nécessite à la fois de l’innovation technique, technologique et scientifique et de l’innovation sociale et collective en matière de coopération, d’organisation du travail et de modes d’investissements.

Parler d’innovation oblige à parler de jeunesse, d’enseignement et de recherche. Le projet de loi d’avenir retient la priorité essentielle qui doit être donnée à la jeunesse, pour le renouvellement des générations en agriculture et la rénovation des enseignements et formations dispensés aux futurs acteurs du monde agricole et alimentaire, en phase avec les nouveaux défis auxquels le secteur est confronté.

Le projet de loi apporte également des modifications significatives à notre droit forestier. La France dispose d’un potentiel économique et environnemental important avec ses forêts publiques et privées, il convenait d’apporter des précisions, par exemple, sur l’importance du rôle de la forêt dans la fixation du carbone et de réaffirmer sa multifonctionnalité. Pour que le potentiel de la forêt française devienne un atout, un programme national de la forêt et du bois définira les orientations de la politique forestière qui seront adaptées par région. Ces orientations tant nationales que régionales seront arrêtées après un débat public. Le projet prévoit également d’inciter les propriétaires privés au regroupement en vue d’une gestion multifonctionnelle et d’une exploitation durable de la forêt, favorable au redressement de la filière bois-forêt. La création d’un fonds stratégique de la forêt et du bois sera essentielle à cette politique.

Le projet de loi d’avenir intègre également des dispositions spécifiques à l’outre-mer.

*

* *

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est plus particulièrement saisie des articles 1er à 4, 11 à 13, 17, 18, 20 à 23 et 28 à 36 du présent projet de loi, qu’elle a examinés au cours de ses réunions du 4 décembre 2013.

S’agissant des principes généraux de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, la Commission a souhaité que puissent être prises en compte tant la dimension sociale de cette politique que la nécessité d’en assurer l’articulation au plus près des réalités territoriales, dans toute leur diversité.

L’introduction de clauses environnementales dans les baux a donné lieu à débats, portant moins sur l’opportunité d’en étendre la possibilité à la totalité du territoire national que sur les difficultés auxquelles elles peuvent exposer des exploitations engagées dans des choix culturaux différents.

Plusieurs amendements ont été adoptés, soutenus par votre rapporteur pour avis, tendant à améliorer les conditions d’élaboration ou le contenu du plan régional de l’agriculture durable.

Des discussions détaillées ont porté sur la composition et les pouvoirs des commissions départementales de consommation des espaces agricoles, dont le projet de loi d’avenir envisage l’extension du champ de compétence.

Les principaux apports de la commission se situent néanmoins sur le titre V du projet de loi, consacré à la forêt. Votre rapporteur pour avis a grandement nourri ses réflexions du rapport « Bois & Forêts de France – Nouveaux défis » qu’il a remis au Gouvernement en juin 2013. L’emploi, la lutte contre le dérèglement climatique, la préservation de la biodiversité, la transition énergétique, le rééquilibrage du commerce extérieur, sont autant d’enjeux et de défis, chers à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui trouvent en leur cœur la forêt et le bois. Avec plus de 400 000 emplois, les secteurs de la forêt et du bois sont à l’égal de l’industrie automobile. Deuxième poste déficitaire du commerce extérieur pour 6,5 milliards d’euros, ces filières recèlent un potentiel d’environ 60 000 emplois. Couvrant près de 30 % de la surface de la France métropolitaine, la forêt joue un rôle majeur comme puits de carbone, réserve de biodiversité, protection du grand cycle de l’eau et aménagement du territoire. Le bois, matériau renouvelable et recyclable, permet une substitution indispensable à l’utilisation de matériaux fossiles tant en matériau de structure que comme source d’énergie pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Tels étaient les enjeux auxquels il convenait d’apporter une réponse forte.

Le projet de loi déposé par le Gouvernement était déjà ambitieux. En créant un fonds stratégique pour la forêt et le bois, en imaginant la structure des groupements économiques et environnementaux forestiers, en encadrant le défrichement, en clarifiant les approvisionnements pour lutter contre la récolte illégale, en reformulant les fonctions d’intérêt général remplies par la forêt, le texte soumis au Parlement façonne un certain nombre d’outils dont les professionnels sauront se saisir pour dynamiser la filière forestière. D’autant qu’ils viennent en complément du compte épargne investissement assurance renforcé par le projet de loi de finance rectificative 2013.

Votre rapporteur pour avis a jugé utile de formuler des propositions complémentaires pour aller plus loin. Les fonctions d’intérêt général de la forêt ont été précisées dans la perspective d’asseoir un financement durable sur des activités connexes. Le régime réglementaire des documents d’aménagement a été précisé pour prévenir une instabilité normative chronique préjudiciable à la gestion de long terme qui prévaut pour les espaces boisés, et pour permettre une intégration en leur sein des différentes prescriptions réglementaires. Des amendements ont été adoptés pour limiter le morcellement de la forêt privée, soit en rendant plus efficace le droit de préférence des propriétaires mitoyens de parcelles en vente, soit en mobilisant la procédure existante des biens vacants et sans maîtres. Enfin, diverses modifications plus techniques ont été suggérées pour une meilleure cohérence de la législation.

Votre rapporteur pour avis se félicite du travail de grande qualité effectué au sein de la commission du développement durable, devant laquelle près de deux cents amendements avaient été déposés, signe de la mobilisation sans faille des parlementaires autour des questions agricoles et forestières si cruciales pour notre développement futur. Nourrie de ce riche débat, la commission du développement durable a délivré un avis favorable à l’adoption du projet de loi sur l’avenir de l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Notre commission s’est saisie pour avis du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 1548) et a désigné comme rapporteur pour avis M. Jean-Yves Caullet. Je rappelle que la saisine porte plus particulièrement sur les articles 1er à 4, 11 à 13, 17, 18, 20 à 23 et 28 à 36.

À l’issue du dépôt des amendements, lundi 2 décembre à 9 heures, 194 amendements avaient été déposés.

J’ai déclaré irrecevables pour des raisons constitutionnelles les amendements CD173 de Mme Brigitte Allain et CD53 de M. Bertrand Pancher.

Ont en outre été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 : les amendements CD35 et CD41 de M. Martial Saddier, l’amendement CD42 de M. Bertrand Pancher, les amendements CD65, CD66, CD68, CD72 et CD80 de M. Martial Saddier, l’amendement CD100 de M. Serge Bardy et les amendements CD164 et CD170 de Mme Brigitte Allain. Leurs auteurs ont été informés de cette décision.

Je propose de suspendre notre séance vers 11 heures, afin que nous puissions assister à la réunion constitutive de la mission d’information de la conférence des présidents sur l’écotaxe poids lourds, mission qui comptera cinquante membres, dont 21 issus de notre commission. Nous reprendrons nos travaux à 17 heures cet après-midi et, éventuellement, ce soir à 21 heures.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. L’avenir nous intéresse tous. L’agriculture et la forêt couvrent une telle proportion de notre territoire que rares sont ceux d’entre nous qui ne sont pas concernés.

Le projet de loi dont nous allons débattre ambitionne de redonner un avenir à notre agriculture, sur des bases renouvelées et avec l’objectif de fournir une alimentation sûre à nos concitoyens et à l’ensemble de la planète. Il en va de même pour son volet forestier. C’est dire que ses ambitions sont vastes et j’ai la conviction que le texte présenté par le Gouvernement répond à ces enjeux, même s’il nous appartient de l’améliorer par nos amendements.

La France est une grande nation agricole et forestière. Elle l’a été dans le passé et l’est encore aujourd’hui. Nous devons mesurer ensemble l’importance stratégique de cette richesse, afin de conserver pour l’avenir notre capacité à disposer d’une production agricole et forestière compétitive et de qualité.

Si la position de la France en matière agricole est encore forte, elle apparaît cependant moins hégémonique qu’elle a pu l’être voilà quelques décennies, et nous ne devons pas l’ignorer. De grands pays émergents, comme le Brésil, voient leur agriculture se développer. Ils disposent de grands espaces par comparaison avec les limites de notre territoire et ont su s’imposer au plan international comme des concurrents de premier plan, sur des marchés qui n’évoluent guère en volume et où leurs parts de marché progressent.

Les difficultés que connaissent certains de nos modèles agricoles, novateurs et très performants jusqu’à la fin des années 1990, en montrent également les limites dans un contexte national et mondial qui a évolué et dont les attentes en termes de produits ont changé.

Concomitamment, les consommateurs, qui ont connu des crises alimentaires telles que celles de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) et de la dioxine, se montrent plus soucieux qu’autrefois en matière de qualité, de traçabilité et de sécurité de l’alimentation.

Relever dans ces conditions le défi de la compétitivité consiste donc à « marcher sur ses deux jambes » – cette citation étant, du reste, tout ce que je partage avec son auteur. Il nous faut réinventer un développement de nos systèmes de production qui tire mieux parti d’un environnement respecté, qui utilise la qualité de nos ressources et qui soit capable de puiser dans la recherche et l’innovation et de s’appuyer sur un tissu rural tourné vers de nouvelles sources de valeur ajoutée, afin de nous permettre d’atteindre une double performance économique et environnementale. Quant à la « triple performance » que certains voudraient voir évoquer par cohérence avec les trois piliers du développement durable, en y ajoutant la dimension sociale, il faut souligner que cette dimension, qui est celle des conditions de vie et de rémunération du monde agricole, sous-tend bien évidemment celle de l’économie dans le texte que nous examinons.

Tel est le sens du projet agroécologique porté par ce projet de loi, qui a reçu, comme j’ai pu le constater durant les auditions menées aux côtés de M. Germinal Peiro, rapporteur au fond de la commission des affaires économiques, un accueil globalement favorable. Cette idée d’équilibre entre la performance économique et la performance écologique est en effet un objectif très largement partagé.

Je saisis par ailleurs cette occasion pour remercier M. Germinal Peiro de m’avoir permis de suivre avec lui bon nombre d’auditions, ce qui nous a permis d’éviter un double travail et de partager nos vues sur la plupart des sujets, donnant ainsi plus de poids au travail de notre commission en vue de l’examen du texte au fond par la commission des affaires économiques.

Bien sûr, certaines attentes sont insatisfaites, des impatiences demeurent, la question des moyens financiers reste posée et des inquiétudes s’expriment. Tout cela est très classique dès lors que l’on trace des pistes d’avenir. Il appartiendra à notre débat d’y répondre, au moins en partie. Cependant, dans le contexte budgétaire actuel, le projet de loi ménage des marges de manœuvre partout où c’est nécessaire et possible. Sans occulter la contrainte financière, je tiens à souligner que l’ensemble des acteurs du monde agricole et forestier attend avec impatience la promulgation de ce texte pour s’en saisir et le mettre en œuvre au profit du développement de leurs filières respectives.

Tout en rappelant, à la suite du président Chanteguet, que notre commission n’est saisie que d’une partie du texte, je présenterai brièvement son architecture générale.

Le titre préliminaire, qui traite des objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche maritime, est très général et de nature plus politique que juridique. Nous sommes collectivement convenus que, sur cette partie du texte, il n’y avait pas lieu à laisser libre cours à notre imagination, souvent débordante en matière d’amendements. Une dizaine d’amendements rédactionnels seulement seront donc proposés sur un article qui aurait pu en susciter bien davantage, s’il n’avait été aussi bien rédigé.

Le titre Ier, consacré à la performance économique et environnementale des filières agricoles et alimentaires, comprend une mesure phare : la création des « groupements d’intérêt économique et environnemental » (GIEE), destinés à permettre la création d’espaces de projets entre plusieurs exploitations agricoles, qui pourront être ouverts à d’autres partenaires et ne seront assortis d’aucune contrainte particulière d’ordre juridique. C’est un fait nouveau qu’une loi ouvre une possibilité au lieu de normer un processus. Cette démarche suscite certes des questions, mais il faut parfois ouvrir à l’initiative l’organisation de la production agricole et celle de son aval. Il faudra saisir cette occasion pour développer de nouvelles pratiques agricoles, durables et ancrées sur le territoire.

Le texte introduit également une autre mesure importante : la généralisation de la possibilité d’introduire des clauses environnementales dans les baux. Ce point suscitera sans doute un débat technique et juridique, car il s’agit là de l’élargissement d’une possibilité, et non d’une obligation.

Le titre II est consacré à la protection des terres agricoles et au renouvellement des générations, avec une révision du contenu du plan régional de l’agriculture durable, des mécanismes de lutte contre l’artificialisation des terres et de renforcement du rôle des commissions départementales de consommation des espaces agricoles (CDCEA), ainsi que la révision de certaines règles applicables aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) – un sujet extrêmement pointu, mais très important.

Le titre III traite de la politique de l’alimentation et de la performance sanitaire. Cet ensemble très technique est fortement encadré par le droit de l’Union européenne, qui ne nous laisse que peu de latitude au niveau national. J’en retiens les dispositions relatives à la politique publique de l’alimentation, à la traçabilité des animaux et à la protection sanitaire des élevages et de la faune sauvage.

La question de la consommation d’antibiotiques est traitée en renforçant le rôle des vétérinaires dans la lutte contre l’antibiorésistance, avec un plus grand encadrement des pratiques d’utilisation des antibiotiques, sans pour autant mettre en cause la réalité de l’acte vétérinaire dans nos territoires ruraux. Il y avait là un équilibre à trouver et il me semble que le texte est parvenu à un dispositif tout à fait satisfaisant.

La maîtrise des produits phytopharmaceutiques est également recherchée et le texte prévoit – ce qui suscite de nombreuses questions – de transférer à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) les autorisations de mise sur le marché pour les produits phytopharmaceutiques et les matières fertilisantes.

Bien que notre commission ne soit pas saisie du titre IV relatif à l’enseignement agricole, je vous invite tous à participer à sa rédaction. En effet, s’il est un titre du texte qui justifie l’« avenir » invoqué dans le titre du projet de loi, c’est bien celui qui porte sur la formation, la recherche, l’enseignement supérieur, l’enseignement agricole et les liens nécessaires entre ceux-ci pour développer de nouveaux modes de production.

J’ai bien évidemment consacré une attention particulière au titre V du projet de loi, relatif à la forêt. Personne parmi vous ne sera surpris qu’il concentre divers dispositifs que je vous proposerai de soutenir, dont certains reprennent des mesures que je vous avais exposées ici même à la suite de mon rapport sur la forêt et le bois.

Nous connaissons les enjeux économiques, écologiques et sociaux de la forêt française qui, dans son importance et sa diversité, offre un modèle de gestion durable. Ce potentiel énorme est interpellé sous ses trois dimensions par les exigences climatiques et c’est là une occasion pour parvenir à conjuguer la performance économique, indispensable à l’utilisation d’un matériau renouvelable dans notre lutte contre le dérèglement climatique, et la protection et le développement des aménités économiques et environnementales de ce vaste espace de notre pays.

Le texte reconnaît la multifonctionnalité de la forêt et exprime la volonté de la dynamiser sous ses différents aspects. Il faut pour cela des moyens, et la création du Fonds stratégique pour le bois et la forêt répond, à cet égard, à une attente de l’ensemble des professionnels concernés. Ce fonds devra bien entendu être alimenté et je ne doute pas qu’au fil des lois de finances qui se succéderont, nous fassions preuve de responsabilité, de constance et d’imagination pour y parvenir.

Le projet de loi de finances rectificative comporte lui aussi des mesures complémentaires, comme le régime fiscal du compte épargne investissement assurance et la prolongation des dispositifs d’encouragement fiscal à l’investissement (DEFI) forestiers. Il s’agit là d’un ensemble important.

Nous aurons aussi à débattre de la fonctionnalité carbone de la forêt. La vente des quotas carbone, qui est l’une des sources potentielles les plus importantes pour alimenter le fonds stratégique, n’étant pas prévue dans le projet de loi, je vous proposerai des rédactions permettant d’aller aussi loin que possible, compte tenu des contraintes d’élaboration du texte, pour poser des cliquets anti-retour quant à l’utilisation des fonds carbone au bénéfice de la forêt et du bois.

Je passe sur les programmes nationaux et régionaux de la forêt et du bois, qui structureront la politique nationale et la déclineront au niveau régional, en insistant simplement sur le fait qu’ils seront désormais soumis à un débat public propre à mieux faire partager à l’ensemble de la société la multifonctionnalité forestière – car le traitement de cette question ne doit pas s’apparenter à une partie de tir à la corde entre des personnes poursuivant des objectifs différents. La multifonctionnalité est un équilibre qui peut varier en fonction des massifs et des situations, mais qui comporte toujours les dimensions écologique, environnementale, économique et sociale.

Nous devons donner à notre politique forestière les moyens de réussir. Nous devons pour ce faire mobiliser une propriété privée trop morcelée. Le projet de loi crée, en parallèle au secteur agricole, des groupements d’intérêt économique et environnemental forestiers, destinés à faciliter les regroupements. Cette mesure incitative, dont on espère qu’elle mobilisera les acteurs, doit être l’antichambre de la coopération. Quelques amendements permettront de préciser cette fonction.

Je vous proposerai aussi, dans cet ordre d’idées, deux mesures permettant respectivement aux communes et à l’État de jouer un rôle un peu plus actif dans la restructuration du parcellaire forestier.

Enfin, le titre VI, relatif à l’outre-mer, fera l’objet de réflexions spécifiques de Mme Chantal Berthelot, qui a temporairement quitté notre commission. Je ne présenterai donc sur ce thème que quelques amendements relatifs aux aspects forestiers.

Une loi qui touche à l’agriculture et à la forêt a toujours une résonance forte et représente toujours un événement. Il y en a rarement deux dans une même législature. J’ai entendu hier rappeler, lors d’un congrès célébrant le cinquantenaire de la création des centres régionaux de la propriété forestière (CRPF), les conditions d’élaboration de la loi de 1963 qui a créé la dynamique de la propriété forestière privée : il est encourageant de constater que les problèmes ont alors été pris à bras-le-corps et que, si tous n’ont pas été résolus, la forêt française a connu en cinquante ans des évolutions cardinales. C’est ce que je souhaite pour les volets agricole et forestier du texte que nous examinons.

Cinquante ans, ce n’est pas le temps du politique, mais celui de la transformation agricole et forestière : c’est sur la durée que nous devons construire le succès de ce projet de loi et des filières auxquelles il s’intéresse. Le projet est ambitieux. Il le sera plus encore avec les amendements que, je l’espère, nous lui adjoindrons et l’énergie que nous lui consacrerons lui vaudra le succès.

Je vous appelle donc à soutenir ce texte et à lui apporter vos suffrages.

M. Serge Bardy. Dans la continuité des négociations menées au plan européen sur la politique agricole commune par notre ministre de l’agriculture, M. Stéphane Le Foll, le Gouvernement nous présente aujourd’hui un projet de loi d’avenir ambitieux pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Ce texte est examiné aujourd’hui par notre commission, saisie pour avis sur 22 articles sur les 39 qu’il comporte. À la suite de cet examen, ce projet sera successivement examiné par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, puis par la Commission des affaires économiques, avant d’être examiné en séance publique dans les premiers jours de janvier 2014. C’est dire l’attention que nous portons à l’agriculture et au destin des milliers d’agriculteurs qui peuplent notre pays et nos circonscriptions.

À l’issue de l’audition de dizaines de représentants d’organismes professionnels, de coopératives, de syndicats, d’associations interprofessionnelles et de tant d’autres structures, nous avons complété notre point de vue sur ce texte, ce qui conduit le groupe SRC à formuler une série de propositions en vue de faire évoluer la proposition initiale du Gouvernement et de renforcer certains aspects du texte originel ou de préciser certains points afin de leur donner une plus grande cohérence au regard des questions examinées.

Lors de cet examen dans notre commission, plus de 180 amendements seront présentés et débattus – avec tact et modération, j’en suis certain – par l’ensemble des commissaires ici présents.

Au nom du groupe SRC je tiens à remercier et à féliciter dès maintenant M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis, dont la contribution sur ce texte et les très nombreux amendements nous promettent un débat riche, notamment pour le volet consacré au développement durable et à l’aménagement du territoire, qui nous intéresse au premier chef.

Je souhaiterais enfin associer aux propositions d’amendement que j’ai formulées mes collègues socialistes ici présents qui, pour des raisons liées aux contraintes de temps et aux miracles de l’informatique, n’ont pas pu apparaître comme cosignataires de plusieurs initiatives que je proposerai lors de ce débat.

À quelques semaines du tournant de 2014 et de la nouvelle PAC, ce projet redonne de l’espoir au monde agricole en rénovant la vision et les ambitions en matière de compétitivité des filières, de renforcement de l’agroécologie, de renouvellement des générations et de révision du mode de gouvernance dans ce secteur. L’accent est également porté sur la construction d’un système qualitatif qui mette en avant la sécurité sanitaire, privilégie le produire et le consommer local, et valorise les produits issus de systèmes et de pratiques de production respectueux de l’environnement – autant de valeurs que nous partageons tous ici.

Le GIEE, présenté dans l’article 3 de ce projet de loi, est un outil pertinent pour ce faire et le fait que l’opposition n’ait pas déposé d’amendements de suppression de ce dispositif en est peut-être la meilleure preuve.

Sur un grand nombre de points, le texte proposé par le Gouvernement fait consensus. Les enjeux et les ambitions pour l’agriculture qu’il définit aux titres I et II, les propositions qu’il formule au titre III quant à l’alimentation et le cadrage qu’il propose pour la forêt en son titre IV sont autant de points qu’il était nécessaire d’aborder et de structurer pour l’avenir de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt. Nombreuses sont les avancées significatives que les exploitants agriculteurs de notre pays attendaient depuis quelques années déjà et auxquelles nous rendons ici justice.

Mme Sophie Rohfritsch. Nous craignons que ce projet de loi « d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt » n’ait d’avenir que le nom. Son objectif, affiché à l’article 1er, est certes de renforcer la compétitivité des filières, mais l’ensemble du texte ne traduit aucune vision économique de l’agriculture. Aucune de ses dispositions ne permet en effet au secteur agricole, pourtant essentiel pour l’avenir de notre pays, de se moderniser, d’innover, de développer son activité et de décrocher des parts de marché à l’étranger.

Au contraire, de nombreuses dispositions vont rendre durablement complexe le quotidien de la profession. Je citerai ainsi, entre autres exemples de handicap, la transmission de données et l’augmentation du nombre de déclarations, la réforme du fonctionnement des interprofessions, qui risque de conduire à des blocages au niveau de la prise de décision, et la modification des critères relatifs au contrôle des structures et à l’assujettissement au régime des non-salariés agricoles.

Par ailleurs, le projet de loi affiche l’ambition de « verdir » l’agriculture. Il s’agit de développer le concept d’« agroécologie », en imposant de nouvelles dispositions. Si ce concept est louable, il présuppose que l’agriculteur ne fait pas déjà du développement durable une préoccupation essentielle de son activité et il ne lui laisse aucun choix.

Le texte crée un nouveau type de groupement, le groupement d’intérêt économique et environnemental, qui seul pourra bénéficier de majorations d’aides, ce qui induit évidemment le risque de créer une agriculture à deux vitesses, selon que les agriculteurs pourront, ou non, entrer dans cette démarche et voir leurs aides bonifiées.

De même la généralisation du bail environnemental et la réforme du contrôle des structures vont faire peser des contraintes supplémentaires sur les agriculteurs.

Les députés du groupe UMP regrettent que ce projet de loi ne soit pas à la hauteur des enjeux de l’agriculture, qui attend tant de réformes. Ces enjeux sont importants et les agriculteurs vous le font, du reste, savoir depuis quelque temps.

Depuis dix-huit mois, le Gouvernement et la majorité mettent sciemment à mal ce secteur. J’en donnerai pour exemples la suppression de la « TVA compétitivité » qu’avait mise en place la majorité à laquelle j’appartenais et qui aurait pu bénéficier à 94 % des entreprises du secteur agricole, la baisse significative, en loi de finances, des crédits budgétaires destinés notamment aux aides à l’installation, à la modernisation des exploitations ou au redressement des exploitations en difficulté, ou encore la hausse des charges liée à la réforme du dispositif d’exonération des cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs saisonniers agricoles (dit « TO/DE »), qui pénalisera les agriculteurs, en particulier les agriculteurs frontaliers.

Ce projet de loi passe donc à côté des véritables préoccupations des agriculteurs. Il répond davantage à une idéologie qu’au souci de leur permettre de relever les défis auxquels ils sont confrontés. Il ne répond pas à la question cruciale de l’avenir et du rôle de l’agriculture française dans un monde ouvert et compétitif. Il manque d’ambition et, surtout, d’une écoute attentive de la profession.

Le groupe UMP votera donc contre ce projet de loi.

Mme Brigitte Allain. Je vous remercie de m’accueillir au sein de cette commission, qui fera probablement un accueil positif à certaines mesures de ce projet de loi et, je l’espère, aux amendements proposés par les députés écologistes.

Voilà enfin un projet de loi qui associe agriculture, alimentation et forêt, remettant en perspective l’idée d’un lien entre les habitants d’un territoire, les élus et les agriculteurs dans une préoccupation commune de l’orientation de l’usage des terres, de leur utilisation et de leur production. Viser à atteindre, sur un territoire, un niveau de souveraineté alimentaire, c’est inscrire l’agriculture dans une démarche sociale. C’est, d’une certaine façon, reconnaître ce droit à tous les peuples.

L’intégration dans les politiques publiques agricoles de l’agroécologie réoriente notre agriculture vers un objectif de performance en valeur ajoutée, en termes d’emplois créés et de production de qualité. Le portage collectif de cette dimension par les GIEE peut être un véritable outil de développement rural et permettra, grâce aux avancées notables réalisées en matière d’installation, d’en faire un véritable enjeu de société en milieu rural.

Une gouvernance plurielle et une plus grande transparence, notamment dans les SAFER et dans le contrôle des structures, permettront de donner réellement priorité à l’installation plutôt qu’à l’agrandissement et de favoriser les projets durables.

Il manque à ce texte des cadrages, des objectifs chiffrés et une formulation explicite de la réponse à une demande sociétale – c’est là que se situent les apports des écologistes.

Le groupe écologiste a déposé des amendements dans le domaine de l’alimentaire  sur les circuits courts, la restauration collective et les produits fermiers ; nous proposerons aussi la création d’un contrat alimentaire territorial visant à favoriser l’approvisionnement local, la restauration collective et l’installation d’agriculteurs dans un bassin de vie. Nous tenterons également de faire évoluer le texte dans ses aspects énergétiques et écologiques, notamment dans l’adaptation de l’agriculture au changement climatique et la lutte contre celui-ci grâce à une agriculture plus résiliente utilisant les semences de ferme, l’agriculture biologique, l’agroforesterie et la multifonctionnalité de la forêt, encadrant la méthanisation, et favorisant le développement des énergies renouvelables, dont le bois-énergie.

Le texte manque d’orientations et d’objectifs clairs sur la diminution de la consommation des intrants chimiques, des carburants, de l’eau, des antibiotiques, des produits pharmaceutiques, des phytosanitaires et de l’azote – à ce sujet, notre pays ne respecte pas toujours la directive européenne sur les nitrates de 1991. Ces enjeux sont importants et le projet de loi devrait davantage les prendre en compte.

Nous souhaitons également que le texte ouvre davantage la gouvernance au pluralisme syndical et à la société civile et qu’il fasse plus de place à la diversité des projets et aux capacités d’innovation, afin de permettre de préparer la transition des prochaines années.

Notre groupe a mené un travail sérieux et compte voir aboutir nombre de ses suggestions. Monsieur le rapporteur, au-delà d’une réforme de la formation des jeunes qui se préparent aux métiers de l’agriculture, ne pensez-vous pas qu’une politique ambitieuse, résolument tournée vers un développement durable de l’agriculture et vers le passage de l’agrochimie à l’agroécologie, devrait mobiliser des moyens d’accompagnement et de mise en œuvre plus importants ?

M. Yannick Favennec. Ce projet de loi d’avenir agricole s’inscrit dans un contexte charnière pour l’agriculture : sept ans après la loi d’orientation agricole de 2006, trois ans après la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche en 2010, elle intervient surtout à l’issue de la définition des modalités d’application de la nouvelle politique agricole commune (PAC) pour la période comprise entre 2014 et 2020. Il est à ce titre essentiel pour tirer les conséquences nationales des nouvelles dispositions européennes.

Malheureusement, tous les acteurs déplorent le manque de souffle et d’ambition de ce texte, qui ne se traduit par aucune mesure concrète permettant de renforcer la compétitivité – grande absente de ce projet de loi – alors qu’elle constitue un enjeu essentiel pour l’agriculture française.

Le projet de loi s’attache essentiellement à répondre à la question du rôle imparti à l’agriculture dans les prochaines décennies : s’il est nécessaire de concilier les performances économique et environnementale et d’ouvrir davantage le monde agricole à la société, le groupe UDI déplore que ce texte soit essentiellement prophétique et ne réponde pas davantage aux enjeux réels à plus court terme.

S’agissant des missions dévolues à l’agriculture, redéfinies à l’article 1er, nous déplorons qu’elles ne réaffirment pas suffisamment que ce secteur s’avère stratégique pour notre pays en matière d’emploi, d’équilibre de la balance commerciale et de relance de l’activité.

Pour ce qui concerne la réorganisation des filières, l’article 2 du projet replaçant les régions au cœur de la gestion des crédits du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), nous appelons à ce que décentralisation ne rime pas avec incohérence de la politique agricole.

L’article 3 crée les groupements d’intérêt économique et écologique (GIEE), qui sont présentés comme la nouveauté la plus importante du projet de loi. Nous avons toujours soutenu l’idée qui sous-tend leur création : celle de pouvoir enfin concilier – et non plus opposer – agriculture de production et agriculture durable. Hélas, cet article pose plusieurs difficultés. Le projet de loi se contente ainsi d’en poser les grands principes, en renvoyant leur application au pouvoir réglementaire. Au total, il convient de préciser la rédaction de cet article. Nous souhaiterions que la majoration des aides destinées aux GIEE ne vampirise pas l’ensemble des soutiens qui pourraient être apportés à d’autres projets n’entrant pas dans le champ défini par ces groupements.

Il était essentiel de revoir le rôle des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER), le contexte agricole n’ayant plus rien à voir aujourd’hui avec celui qu’il était en 1960 lors de leur création. Nous aurions néanmoins pu aller plus loin dans la clarification et l’encadrement des critères de recours au droit de préemption, ainsi que dans l’appui qu’elles doivent apporter aux projets d’aménagement dans nos territoires.

Concernant les dispositions relatives à la performance sanitaire du titre III du projet de loi, il est indispensable de restaurer la confiance entre les acteurs de l’alimentation, du producteur au consommateur, afin que les citoyens puissent s’approprier la politique publique dans ce domaine.

Il convient de revenir sur l’interdiction faite aux groupements d’éleveurs de délivrer à leurs adhérents les antibiotiques que leur a prescrits leur vétérinaire dans le cadre d’un programme sanitaire d’élevage (PSE) à vocation collective.

Plus généralement, le groupe UDI appelle le Gouvernement à ne pas complexifier la vie de nos exploitants avec de nouvelles normes.

Je regrette que, s’agissant d’un projet de loi sur l’avenir de l’agriculture, seuls deux articles soient consacrés à l’enseignement agricole et que leurs dispositions manquent d’ambition.

En conclusion, si certaines mesures vont dans le bon sens et étaient attendues par le monde de l’agriculture, beaucoup d’imprécisions demeurent à la lecture de ce projet de loi. Il est effectivement indispensable de tourner notre agriculture vers des modes de production plus durables, notamment à travers la valorisation de l’enseignement agricole, insuffisamment rénové. L’ambition portée par le titre du texte ne se retrouve malheureusement pas dans son contenu, et nous ne pouvons que le déplorer. Pour toutes ces raisons, le groupe UDI votera contre ce projet de loi en espérant que nos travaux permettront de lui donner une véritable ambition pour répondre aux défis que les agriculteurs de France doivent relever au quotidien.

M. Jacques Krabal. Nous examinons ce projet de loi dans un contexte préoccupant pour de nombreux exploitants et salariés agricoles. Que ce soit en termes de production, de surfaces cultivées, de nombre d’agriculteurs, de salariés et d’exploitations, tous les chiffres démontrent un affaissement inquiétant.

Ce malaise agricole français, ancien, n’est pas homogène, et, comme toutes les crises, il touche plus durement les plus fragiles, alors que les céréaliers profitent d’une période de cours très élevés – néanmoins, dans le sud de l’Aisne, les évolutions qu’engendrera la nouvelle PAC entraîneront des pertes financières importantes pour les exploitations de blé.

Ces répercussions économiques ne seront pas sans effet sur le paysage agricole et para-agricole, et sur l’environnement économique et l’emploi qui en découle. Il est important de veiller à la préservation des zones à handicaps naturels, mais il est aussi primordial de ne pas fragiliser les zones intermédiaires rurales dont l’économie est dominée par l’agriculture et l’agroalimentaire. Nous devons également éviter l’écueil consistant à opposer les filières entre elles.

Ce projet de loi doit être l’occasion de soutenir ceux qui en ont le plus besoin, comme les secteurs des fruits et légumes, de l’élevage et du lait qui souffrent terriblement, notamment dans le sud de l’Aisne et en Thiérache. N’oublions pas qu’un agriculteur se suicide tous les deux jours en France. Ce délitement de l’agriculture française emporte des conséquences économiques et sociales désastreuses pour l’emploi, pour l’aménagement et la revitalisation des territoires ruraux, pour l’autonomie et la sécurité alimentaires, pour notre balance commerciale et pour l’image de notre pays dans le monde. Pourtant, le secteur agricole représente 3,5 % de la population active, 4,5 % du PIB et occupe 53 % du territoire français.

La loi d’avenir agricole doit permettre de redonner de l’espoir aux agriculteurs et de susciter des raisons d’être fier de la qualité de la production française. Oui, l’agriculture est stratégique pour notre pays !

Le projet de loi contient de bonnes mesures, attendues depuis longtemps : ainsi, l’outil du GIEE répond à des besoins identifiés. La mobilisation des moyens de l’État pour renforcer la compétitivité des filières – grâce à une contractualisation adaptée et à la rénovation du contrôle des structures – s’inscrira dans un schéma régional et favorisera l’emploi et l’investissement. L’encadrement du recours aux engrais et aux produits phytosanitaires va dans le sens d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Enfin, je me réjouis des dispositions en faveur de l’enseignement.

Nous entendons néanmoins les critiques de plusieurs acteurs majeurs du secteur sur le manque de mesures et de moyens visant à renforcer durablement la compétitivité.

Afin de se maintenir sur le territoire des zones intermédiaires, certaines exploitations n’auront pas d’autre choix que d’envisager la reconversion de leur activité. Nous devons donc répondre aux demandes des agriculteurs souhaitant lutter à armes égales avec leurs concurrents européens.

En France, nous sommes les champions de la lourdeur des contraintes administratives, sanitaires et environnementales ; en outre, nous subissons un coût du travail plus élevé qu’en Allemagne, en Italie ou en Espagne.

Les députés du groupe RRDP proposeront en Commission des affaires économiques et en séance publique des amendements pour améliorer ce projet de loi.

M. Jacques Kossowski. En France, le bois-énergie devrait fournir près d’un tiers des 23 % d’énergie renouvelable, selon un objectif défini pour 2020 : cela représenterait quelque 21 millions de mètres cubes supplémentaires. Comme le précisait la Commission européenne le 20 septembre dernier, cette croissance constitue une opportunité pour ce secteur, mais elle pose un défi important pour le maintien des écosystèmes forestiers. En effet, la forêt demeure le plus grand réservoir de biodiversité des écosystèmes terrestres ; aussi, le développement accéléré d’une filière industrielle du bois, prévu par ce projet de loi, ne risque-t-il pas d’attenter à de bons principes de gestion durable des forêts, notamment en ce qui concerne la préservation de la biodiversité ?

M. Michel Heinrich. La précédente majorité, dans le cadre de la loi de modernisation de l’agriculture (LMA) du 27 juillet 2010, avait mis en place la contractualisation – progrès sensible, mais qui n’était pas allé sans heurts – qui a pu conduire à des échecs comme en Lorraine entre les producteurs de lait et Lactalis. La création d’organisations de producteurs constitue une avancée, mais elle reste insuffisante lorsque l’acheteur ne respecte ni les fournisseurs ni les contrats signés. La contractualisation a ainsi mis en exergue les déséquilibres importants existant entre un producteur de lait – pour lequel le contrat peut représenter 50 à 70 % de son chiffre d’affaires – et un acheteur pour lequel le poids de ce partenariat est insignifiant. Or rien dans ce projet de loi ne permet d’améliorer le système et de lutter contre les difficultés rencontrées par les acteurs du secteur.

Je déplore que l’article 12 du texte renforce l’instabilité du droit applicable aux documents d’urbanisme. Nous sommes tous favorables à la maîtrise de la consommation des espaces, mais ce texte s’appliquera – notamment pour les schémas de cohérence territoriale (SCoT) – alors même que la législation issue du Grenelle n’a pas encore pu produire tous ses effets.

M. Jean-Louis Bricout. Le droit actuel applicable au bail avec clauses environnementales répond aux enjeux de biodiversité, en particulier dans les zones sensibles. Ne pensez-vous pas, monsieur le rapporteur, que la possibilité de généraliser ces clauses risque de perturber le modèle économique de l’exploitation concernée, et de constituer une contrainte forte si les exigences ne concernent qu’une partie des terres de l’exploitation ? Ne serait-il pas suffisant de garantir au propriétaire la réalisation d’un état des lieux écologique stipulant les éléments fixes du paysage au moment de la signature et du renouvellement du bail, toute évolution devant être soumise à l’accord du bailleur ?

M. Jean-Pierre Vigier. L’article 1er du projet de loi vise au renforcement de la compétitivité des filières : cette orientation est positive, mais le texte ne va pas assez loin. Il convient d’impliquer plus fortement les agriculteurs dans l’organisation de ces filières. En moyenne montagne, les exploitations agricoles sont de taille modeste et génèrent de faibles revenus ; afin d’augmenter ceux-ci, il faudrait limiter le nombre d’intermédiaires et permettre à l’agriculteur de maîtriser l’ensemble de la chaîne, de la production à la commercialisation. Celui-ci pourrait ainsi valoriser plus fortement son produit et vivre de sa vente. Quel choix sera opéré à ce sujet, monsieur le rapporteur ?

M. Guillaume Chevrollier. Ce texte ne répond pas aux espérances des agriculteurs, qui sont nombreux à se trouver dans une situation difficile. On ne devrait pas qualifier ce projet de loi d’avenir, mais de rectification agricole sur certains points techniques. Il ne porte aucune vision et ne promeut aucun projet de filière. Quelles sont les dispositions qui permettraient aux agriculteurs de se moderniser, d’innover, de développer leur activité et d’améliorer leur compétitivité ? Où sont les moyens et les objectifs ? Ce texte n’apporte pas de solutions concrètes à leurs difficultés, mais plutôt des contraintes et des lourdeurs inutiles. Il crée en effet de nouvelles déclarations à produire et données à transmettre. Où se situe le choc de simplification ?

Le secteur de l’élevage est celui qui souffre le plus : sans son développement, quel est l’avenir des filières agroalimentaires et de leurs nombreux fleurons français ?

Il s’avère étonnant que le projet de loi ne traite pas de la situation des salariés de l’agriculture, des industries agroalimentaires et des services liés à l’agriculture. Il développe le concept d’agroécologie, dont l’actuelle majorité n’est pas l’initiatrice puisque les précédents gouvernements ont promu une agriculture plus durable, grâce au plan Écophyto, au développement de l’agriculture biologique et à la méthanisation : les agriculteurs ont consenti beaucoup d’efforts dans ces domaines au cours des dernières années.

Notre agriculture souffre du poids trop lourd des normes, qui créent des distorsions de concurrence avec les pays voisins, ce qui s’avère préjudiciable pour notre compétitivité ; dans ce domaine, la priorité réside dans la conduite de l’harmonisation européenne.

Je crains que ce projet de loi ne constitue une occasion manquée pour le Gouvernement, car les agriculteurs et les Français attendent du concret pour que notre pays reste une grande nation de production agricole.

Mme Valérie Lacroute. Ce projet de loi n’a d’avenir que le nom et constitue une déception. Le statut de l’agriculteur n’est pas traité de manière satisfaisante, alors qu’il est impératif de redéfinir la fonction de l’agriculteur par rapport à la PAC, à l’environnement fiscal et au cadre dans lequel s’effectuent les installations. Le GIEE représente une tentation de faire entrer de nouveaux acteurs dans le monde agricole : cette ouverture peut s’avérer positive, mais elle ne doit pas remettre en cause l’organisation globale et équilibrée de l’agriculture française ; le critère d’acceptation doit reposer sur la viabilité des projets présentés par les porteurs.

Nous sommes également inquiets pour le rôle des interprofessions, qui subsistent entièrement. Si l’on ne conserve pas la notion de stratégie de filière, on remet en cause leur fonctionnement et on perd une partie de l’identité de notre agriculture.

Il est singulier qu’une loi dite « d’avenir » n’aborde pas les thèmes de la recherche, de l’innovation et de l’investissement. Si l’on souhaite développer une économie plus circulaire dans le domaine agricole et rester compétitif dans les marchés internationaux, il est nécessaire de disposer d’une recherche très active. Or derrière l’idée d’agroécologie, n’allons-nous pas retrouver le small is beautiful ? Les pays qui gagnent des parts de marché s’appuient sur de la recherche, de l’innovation et des investissements puissants.

La surface agricole occupe plus de 60 % du territoire de ma circonscription du sud du département de la Seine-et-Marne, et les agriculteurs rencontrés chaque semaine me font part de leurs inquiétudes. Ils défendent la nécessité de préserver la performance de l’agriculture française, malmenée par la pression fiscale insupportable, l’augmentation de la TVA qui pénalise de nombreux domaines agricoles, l’écotaxe et la réforme en cours de la PAC. Notre modèle agricole ne doit pas subir le même sort que notre secteur industriel.

M. Gilbert Sauvan. Ce texte traite des préoccupations exprimées par les agriculteurs de ma circonscription, située dans les Alpes-de-Haute-Provence. L’article 11 du projet de loi sur le plan régional de l’agriculture durable (PRAD) me réjouit, et il faudrait prévoir la participation des départements à leur élaboration. En effet, ceux-ci présentent une diversité d’agriculture à l’intérieur d’une même région, si bien que les plans devraient pouvoir prendre en compte ces différences.

Les droits de la préemption des SAFER visent à éviter la concentration abusive des terres agricoles – sujet délicat, traité par les articles 13 et 15 du projet de loi – car une exploitation d’une centaine d’hectares est considérée comme vaste dans mon département et moyennement étendue, voire petite, dans d’autres parties du pays. Il y a lieu que le PRAD détermine les zones où les exploitations peuvent s’agrandir et celles où l’installation de jeunes agriculteurs s’avère préférable.

M. Julien Aubert. Ce texte suscite de la déception. J’en attendais beaucoup, puisque le Gouvernement ne s’était jusqu’à présent pas intéressé à la situation de plus en plus dramatique des agriculteurs. Il représentait l’occasion de définir une véritable stratégie. Or le projet de loi n’en contient pas. Il ne constitue qu’un collectif fourre-tout, comprenant, certes, des mesures positives pour les petites exploitations ou sur les SAFER et la lutte contre l’artificialisation des terres agricoles, mais qui surtout multiplie les plans pluriannuels et autres gadgets – alors même que l’agriculture a pour mission essentielle de produire et d’assurer l’alimentation des habitants et qu’il est donc dangereux de lui confier de nouvelles tâches se rattachant à une gestion administrative de l’espace. Je m’interroge sur l’opportunité d’étendre les baux à clauses environnementales au secteur privé ; de même, des instruments comme les GIEE me semblent trop mous.

Le texte n’aborde pas la question fiscale, pourtant l’une des principales préoccupations des agriculteurs. En effet, leur problème majeur réside dans l’impossibilité à vivre du travail de leurs mains, notamment à cause de l’impôt bureaucratique. Nous avons besoin d’un grand choc de simplification, reposant sur une profonde rénovation de l’administration de l’agriculture. Le texte ne porte pas cette ambition, et il vous reste près de quatre ans, mesdames et messieurs les députés de la majorité, pour la concrétiser.

M. David Douillet. Le texte ne dessine aucune vision économique de l’agriculture ; une loi dite « d’avenir », qui ne traite ni de recherche, ni d’innovation, ni d’investissement, s’avère pour le moins mal nommée. De nombreuses dispositions rendront le quotidien des agriculteurs plus complexe.

Il s’agit d’un projet dogmatique, qui repose sur le concept d’agroécologie et donc sur l’idée que les agriculteurs n’intègrent pas le développement durable dans leur activité, et il est injuste de soupçonner dans chaque agriculteur un pollueur en puissance. Plutôt que d’accompagner le monde agricole, le renforcement des déclarations et des contrôles en matière environnementale alourdira les démarches administratives.

Le Gouvernement met à mal l’agriculture depuis dix-huit mois : suppression de la TVA compétitivité qui aurait bénéficié à 95 % des entreprises de ce secteur, baisse significative des crédits budgétaires en loi de finances – touchant notamment les aides à l’installation, à la modernisation des exploitations et au soutien de celles se trouvant en difficulté – et hausse des charges liée à la réforme du dispositif d’exonération des cotisations patronales pour l’emploi des travailleurs saisonniers agricoles.

Ce projet de loi ne répond pas à la question cruciale de l’avenir et du rôle de l’agriculture française dans un monde compétitif. Les acteurs de ce milieu pointent le manque d’ambition et de stratégie d’avenir, et font part de leur déception quant à la définition du statut de l’agriculteur et de leurs inquiétudes sur la réforme de la représentativité des interprofessions, qui risque de créer des blocages et de déséquilibrer le fonctionnement des filières. Enfin, la création des GIEE – dont on ignore le financement – ne permettra pas d’améliorer la compétitivité de l’agriculture française dans une économie mondialisée très concurrentielle.

M. Jean-Luc Moudenc. L’agriculture française est depuis longtemps autosuffisante, mais les crises sanitaires se sont multipliées et ont ébranlé la confiance des consommateurs. Monsieur le rapporteur, quelle réponse le projet de loi apporte-t-il à ce problème ? Des actions nouvelles – et avec quels moyens – sont-elles envisagées pour cette exigence fondamentale de restauration de la confiance ?

*

M. Michel Heinrich. À quelle heure reprendrons-nous nos travaux cet après-midi ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. À dix-sept heures.

M. Michel Heinrich. Pas avant ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous avons les uns et les autres d’autres engagements.

M. Michel Heinrich. C’est la première fois que notre Commission achève sa séance du mercredi matin à onze heures !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Cela tient à l’organisation, à onze heures, de la réunion d’installation de la mission d’information de la conférence des présidents sur l’écotaxe poids lourds que j’ai annoncée à l’ouverture de notre réunion. Ce n’est pas moi qui ai fixé le jour et l’heure de la réunion constitutive de cette mission. Je suis de ceux qui pensent, monsieur Heinrich, que les parlementaires devraient rester à Paris jusqu’au vendredi soir. (Murmures et sourires sur divers bancs)

*

M. le rapporteur pour avis. Je vous remercie, mes chers collègues, de votre présence nombreuse et de l’intérêt que vous portez à ce projet de loi. Néanmoins, plusieurs de vos questions ne relèvent pas du champ dont notre Commission s’est saisie.

Selon certains d’entre vous, les acteurs du monde agricole souhaitaient la définition d’une véritable vision stratégique et leur attente aurait été déçue. Cela veut donc dire que cette vision fait défaut depuis de nombreuses années déjà ! L’agriculture et la forêt sont des secteurs stratégiques, confrontés à des contraintes et à des difficultés nombreuses. Les objectifs que nous leur fixons sont donc importants pour notre pays. Rien n’était parfait avant ce projet de loi et rien ne sera parfait non plus après, mais nous avons tous à cœur de progresser.

D’autre part, les questions relatives à l’enseignement agricole, à la recherche et à l’innovation sont traitées dans le titre IV du projet de loi, dont notre Commission ne s’est pas saisie. Le Gouvernement traite à juste titre la formation, la recherche et l’innovation comme un tout. La recherche et l’innovation doivent irriguer la formation, tant dans le secondaire que dans le supérieur. L’ensemble des acteurs du monde agricole, des exploitants aux laboratoires, doit participer à ce mouvement. Si nous ne parvenons pas à articuler convenablement la recherche et la formation, nous n’atteindrons pas les grands objectifs fixés dans l’article 1er du projet de loi, à commencer par la double performance, économique et environnementale.

Nous ne prétendons pas que rien n’a été fait auparavant en la matière. Cependant, avec ce texte, nous avons l’ambition de réconcilier l’ensemble des modalités de production agricole : quels que soient la structure agricole et le mode de production, toutes les filières devront viser la double performance et améliorer leur compétitivité en développant la recherche, afin de réduire leur dépendance aux intrants extérieurs. Historiquement, la richesse des terroirs a fait la puissance alimentaire de notre pays, avant même les révolutions agricoles. Il s’agit non pas de revenir en arrière, mais de faire en sorte que toutes les filières exploitent au mieux les potentialités écologiques de notre territoire, grâce aux connaissances et aux techniques modernes.

Monsieur Aubert, vous avez qualifié les GIEE d’« objet mou ». Je ne vous comprends plus : vous nous reprochez une absence d’encadrement, alors même que vous vous plaignez des lourdeurs administratives lorsque nous encadrons ! Avec les GIEE, nous créons un outil nouveau. Il appartiendra aux acteurs de terrain de les mettre en place dans les meilleures conditions.

Monsieur Sauvan, les PRAD seront élaborés dans chaque région selon des modalités élargies et souples. Rien n’empêchera d’y associer l’ensemble des acteurs concernés.

S’agissant du statut des agriculteurs, qui nous préoccupe tous, il n’existe pas de solution évidente : les organisations professionnelles, que le rapporteur de la commission des affaires économiques et moi-même avons auditionnées, demandent que ce statut soit précisé, mais elles n’ont pas elles-mêmes de position bien établie sur le sujet. Il convient donc de poursuivre le travail sur cette question, qui ne relève cependant pas des articles dont notre Commission s’est saisie.

Nous n’avons jamais prétendu que rien n’a été fait auparavant en matière de promotion d’une agriculture plus durable, monsieur Chevrollier. Vous avez rappelé à juste titre le plan Écophyto et les mesures en faveur de la méthanisation. Avec ce projet de loi, nous envisageons l’ensemble des modes de production dans le cadre d’un même concept, celui de l’agroécologie, afin de les accompagner dans la transition vers la double performance.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué la TVA, mais je rappelle que ce texte n’est pas un projet de loi de finances. Quoi qu’il en soit, pour la première fois, une mesure générale visant à favoriser la compétitivité, le CICE, bénéficie au secteur agricole. En outre, les objectifs stratégiques des secteurs agricole et forestier – par exemple, ceux du plan Protéines végétales – font partie intégrante des objectifs économiques que le Gouvernement a fixés pour la Nation à moyen terme. Ainsi, ces deux secteurs ne sont plus traités à part : ils contribueront à la performance économique et écologique globale de notre pays. Ce projet de loi ne vise nullement à les cantonner dans un quelconque « pré carré ».

En matière de contractualisation, le texte prévoit un renforcement de la médiation en cas de difficultés, comme l’a souligné monsieur Heinrich. D’autres textes de loi prévoient des mesures destinées à répondre à ces difficultés, notamment à l’insuffisance des prix payés aux producteurs.

En réponse à monsieur Kossowski, le développement de la filière bois-énergie représente en effet une opportunité, à condition que nous gérions la ressource de manière durable. À cet égard, nous faisons nôtre l’objectif de gestion durable et multifonctionnelle de la forêt : il figure déjà dans le code forestier, et nous le mentionnons à nouveau dans le projet de loi à chaque fois que c’est nécessaire. J’y insiste : le recyclage du bois est une des clés pour maintenir un équilibre entre le développement de la filière bois-énergie et la préservation de la multifonctionnalité forestière dans la durée. Si nous ne faisons pas les efforts nécessaires en matière de recyclage, le développement de la filière bois-énergie fera peser une demande trop importante sur la forêt.

D’une manière générale, comme l’a rappelé monsieur Krabal, nous sommes soucieux de ne pas opposer les filières les unes aux autres. Nous souhaitons au contraire fournir à toutes les filières des outils qui leur permettent d’améliorer leur performance, soit au niveau local, soit dans la compétition internationale, en fonction des produits ou du mode d’organisation retenu. Nous devons ainsi faire preuve d’ouverture d’esprit.

Beaucoup d’entre vous ont évoqué les SAFER. Le monde agricole souhaite vivement préserver cet outil important de contrôle des structures, afin de favoriser l’installation des jeunes agriculteurs. Nous y reviendrons au cours de nos débats.

Dans ce projet de loi, nous ne devons traiter que des matières qui relèvent du domaine de la loi et nous garder, en dépit des tentations, de descendre dans un niveau de détail qui est celui du règlement. À défaut, nous aboutirons à une loi lourde, bavarde, pesante. Or nous avons besoin au contraire d’une loi dynamique, qui encourage l’action. Malgré les doutes exprimés par certains, nous partageons tous les mêmes objectifs de compétitivité et de double performance, économique et environnementale.

Vous avez parlé, monsieur Favennec, d’un texte « prophétique ». J’espère qu’il ne s’agit pas d’en minorer la portée. S’il est réellement prophétique, gageons qu’il annonce des lendemains qui chantent ! (Sourires)

Je rappelle enfin, à l’attention des sceptiques, que l’agriculture et la forêt françaises sont le produit non pas des lois, mais du travail des agriculteurs et des forestiers. Ne considérons pas ces agents économiques essentiels comme de simples sujets d’un pouvoir qui déterminerait, par la loi, ce que doivent être la production et la transformation dans l’ensemble des filières !

Je vous renvoie aux discours récents du président de la République et de M. Xavier Beulin, président de la FNSEA. Un nouvel élan se manifeste en faveur de l’agriculture et de la forêt. J’espère que ce projet de loi lui donnera tout son sens.

*

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous ai répondu un peu vivement tout à l’heure, monsieur Heinrich, et vous prie de m’en excuser.

Prenons l’exemple de la journée d’hier. Nous avons appris tardivement que trois scrutins solennels se tiendraient dans l’hémicycle. Nous n’avons pas pu remettre l’audition des représentants du forum parlementaire « Globe international » que nous avions prévue à seize heures, car ils venaient du Royaume-Uni. Nous les avons donc reçus devant une salle presque vide.

Plusieurs députés. Nous étions là, monsieur le Président !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Cet après-midi, un autre vote solennel se tiendra dans l’hémicycle, alors que ces scrutins sont en principe organisés le mardi. Nous avons donc prévu de réunir la Commission à dix-sept heures, afin d’examiner ce projet de loi dans les meilleures conditions possibles.

Les votes solennels se multiplient, - je le souligne - à la demande des groupes politiques. L’organisation de nos travaux en commission devient ingérable.

M. Jacques Alain Bénisti. Il faut le dire au président Claude Bartolone !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous faisons passer régulièrement ce message. Pourrons-nous longtemps faire tenir, en moins de quarante-huit heures, des travaux qui devraient se dérouler sur trois ou quatre jours ? À mon avis, non. Cette situation n’est pas tenable et nous en sommes collectivement responsables. (Approbations sur divers bancs)

La séance est suspendue. Elle reprendra cet après-midi à 17 heures.

II. EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PRÉLIMINAIRE
OBJECTIFS DE LA POLITIQUE EN FAVEUR DE L’AGRICULTURE,
DE L’ALIMENTATION, DE LA PÊCHE MARITIME ET DE LA FORÊT

L’un des objectifs principaux du présent projet de loi est de définir des orientations de long terme pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, et de les assortir d’outils de gestion, de régulation et d’organisation qu’il s’agit, selon les cas, de créer ou de conforter. Il s’agit également de favoriser la construction conjointe des performances économique et environnementale des exploitations. Il s’agit, en troisième lieu, que l’agriculture, l’alimentation et la forêt soient désormais reconnues comme une composante économique, sociale et territoriale essentielle à l’équilibre de notre pays.

Article 1er
(articles L. 1 à L. 3 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime, article 1er de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d’orientation agricole)

Principes généraux de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation

Cet article, qui comprend trois paragraphes, actualise les principes généraux de la politique agricole, alimentaire et sylvicole définis par la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d’orientation agricole et les codifie dans le code rural et de la pêche maritime.

● Le paragraphe I (alinéas 1 à 21) insère un livre préliminaire avant le livre Ier du code rural et de la pêche maritime, consacré aux objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche maritime et comprenant deux articles nouveaux. L’article L. 1 est ainsi structuré en cinq paragraphes traitant successivement :

– des finalités de la politique agricole : assurer à la population, dans des conditions économiquement acceptables par tous et en quantité suffisante, l’accès à une alimentation sûre, diversifiée et de bonne qualité, renforcer la compétitivité des différentes filières de production, de transformation et de commercialisation, veiller au bien-être et à la santé des animaux et participer au développement des territoires de façon équilibrée, diversifiée et durable, en métropole comme dans les outre-mer ;

– de la politique conduite par l’État en vue d’atteindre ces objectifs, visant notamment à favoriser le développement de filières alliant performances économique, sociale et environnementale – ce qui suppose notamment le soutien aux actions de recherche et développement, l’organisation collective des acteurs, le développement des dispositifs de prévention et de gestion des risques en agriculture ainsi que l’équilibre des relations commerciales ;

– du programme national pour l’alimentation : objectifs, instruments, élaboration et suivi ;

– de la politique d’installation et de transmission en agriculture, qui a notamment pour objectifs de favoriser la création, l’adaptation et la transmission des exploitations agricoles et de promouvoir la diversité des systèmes de production sur les territoires  – en particulier, ceux qui sont générateurs d’emplois et de valeur ajoutée et ceux qui permettent l’association des performances économique et environnementale ;

– de la prise en compte, dans les domaines de l’agriculture et de l’alimentation, des spécificités des outre-mer ainsi que de l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux propres à ces territoires ;

Le nouvel article L. 2 du code rural et de la pêche maritime traite, quant à lui, de la politique des pêches maritimes, de l’aquaculture et des activités halioalimentaires. Celle-ci doit concourir à la politique de l’alimentation et au développement des régions littorales, en favorisant la compétitivité de la filière et la mise sur le marché de produits de qualité, dans le cadre d’une exploitation durable de la ressource.

● Le paragraphe II (alinéas 22 à 32) modifie la rédaction de l’article L. 121-1 du code forestier, qui traite des objectifs de la politique forestière.

La nouvelle rédaction proposée tend à préciser les conditions d’exercice de cette politique régalienne. Dans ce cadre, l’État doit ainsi se donner pour objectifs non seulement le maintien de l’équilibre et de la diversité biologiques, l’adaptation des forêts au changement climatique ou la régénération des peuplements forestiers dans des conditions d’équilibre sylvo-cynégétique satisfaisantes, mais également l’optimisation du stockage de carbone dans les bois et forêts, la satisfaction des besoins des industries du bois, le renforcement de la compétitivité des filières d’utilisation du bois ou encore le développement des territoires.

● Le paragraphe III (alinéa 33) abroge l’article 1er de la loi du 9 juillet 1999 précitée, dont les dispositions sont remplacées par le nouveau dispositif mentionné aux paragraphes I et II ci-dessus.

*

Votre rapporteur pour avis estime que l’ensemble de ces dispositions viendront heureusement se substituer à la longue énumération figurant à l’article 1er de la loi d’orientation agricole de 1999, qui aboutissait à assigner à la politique agricole un périmètre probablement étendu à l’excès (renforcement de la protection sociale des agriculteurs tendant à la parité avec le régime général, revalorisation progressive et garantie de retraites minimum aux agriculteurs, développement de l’aide alimentaire et lutte contre la faim dans le monde, poursuite d’actions d’intérêt général au profit de tous les usagers de l’espace rural, etc.).

Le projet de loi définit, au contraire, un périmètre de la politique agricole à la fois simplifié et resserré, appelée à se déployer autour de ces trois axes structurants et consensuels que sont l’accès à une alimentation sûre, diversifiée et de bonne qualité, la compétitivité des filières et le développement équilibré des territoires.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD148 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Nous proposons de remplacer, à l’alinéa 5, l’adjectif « sûre » par celui de « saine », qui est plus précis. Cela permettrait d’englober, dans les finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, la lutte contre les substances néfastes – antibiotiques, perturbateurs endocriniens, pesticides – trop souvent contenues dans les produits alimentaires que nous consommons.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation, mais pas votre analyse : je considère que l’adjectif « sûre » a un sens plus large que celui de « saine ». Avis défavorable, donc.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD149, du même auteur.

Mme Laurence Abeille. Nous souhaiterions que le texte souligne l’importance de l’agriculture biologique, qui doit constituer la référence en matière d’agriculture de qualité.

M. le rapporteur pour avis. L’objectif du projet de loi est d’unifier, dans la recherche de la double performance économique et environnementale, l’ensemble des systèmes de production agricole, et non de donner la prééminence à l’un d’entre eux. Avis défavorable – même si je partage votre volonté de promouvoir l’agriculture biologique.

Mme Laurence Abeille. S’il semble en effet difficile de réaliser, dans un délai rapide, la conversion de l’ensemble des terrains agricoles français en agriculture biologique, celle-ci doit demeurer l’objectif vers lequel il faut tendre, en termes de santé publique comme de biodiversité. Si le texte ne la mentionne pas, il est à craindre que l’agroécologie, qui s’apparente à de l’agriculture raisonnée, ne trouve pas sa juste place – alors qu’il ne doit s’agir que d’une étape dans un processus plus vaste.

M. le rapporteur pour avis. L’agriculture biologique remplit assurément l’objectif fixé par l’alinéa 5 – « assurer à la population, dans des conditions économiquement acceptables par tous et en quantité suffisante, l’accès à une alimentation sûre, diversifiée et de bonne qualité, produite dans des conditions favorisant la protection de l’environnement et des paysages et contribuant à la lutte contre le changement climatique » –, mais elle n’est pas le seul modèle susceptible de le faire. En outre, le projet de loi n’empêche nullement la mise en œuvre de politiques de conversion.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD150 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. La dimension sociale du titre préliminaire devrait être renforcée. L’une des finalités de la politique agricole est de rémunérer correctement les agriculteurs. Renforcer la compétitivité des filières n’est qu’un moyen pour y parvenir. C’est pourquoi nous proposons de rédiger ainsi l’alinéa 6 : « 2° de rémunérer correctement les agriculteurs et les salariés et de soutenir l’emploi, en renforçant la durabilité des différentes filières de production, de transformation et de commercialisation, notamment des circuits courts, créateurs de valeur ajoutée. ».

M. le rapporteur pour avis. Il serait en effet utile de préciser que la dimension sociale est un des piliers du développement durable. Avis favorable, sous réserve que vous acceptiez de supprimer la dernière partie de l’amendement, après « l’emploi », car il ne me semble pas approprié de restreindre un objectif général à l’utilisation de certaines modalités de production.

Mme Brigitte Allain. C’est entendu.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En conséquence, l’amendement CD151 de Mme Danielle Auroi n’a plus d’objet.

La Commission en vient à l’amendement CD192 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à renforcer le bien-être et la santé des animaux, condition nécessaire si l’on veut réduire l’impact environnemental de l’agriculture et développer des filières de qualité économiquement viables.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. L’objectif de veiller au bien-être et à la santé des animaux est inscrit dans le projet de loi. Il serait superfétatoire de préciser « en tant qu’êtres sensibles », puisque le code rural définit déjà les animaux comme tels.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD152 de Mme Danielle Auroi.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à ce que l’on prenne en considération les situations spécifiques à chaque région, notamment aux zones de montagne, aux zones humides, aux zones défavorisées et aux départements d’outre-mer.

M. le rapporteur pour avis. Je partage la préoccupation des auteurs de l’amendement. Toutefois, comme il me semble délicat de constituer une liste, même non restrictive, des espaces et territoires concernés, je vous suggère de supprimer la fin de la première phrase du 5°, et de vous en tenir à la rédaction suivante : « 5° de prendre en compte les situations spécifiques à chaque région. Elle valorise en particulier les aménités environnementales apportées par ces territoires. »

Mme Laurence Abeille. Nous sommes d’accord. Toutefois, permettez-moi de signaler qu’il s’agissait aussi de répondre au souhait des représentants de l’outre-mer, qui préfèrent que ce dernier soit explicitement mentionné dans les textes de loi, plutôt que de faire l’objet d’un titre ou d’un article particulier.

M. le rapporteur pour avis. Dans ce cas, voulez-vous conserver la mention : « notamment aux départements d’outre-mer » ?

Mme Laurence Abeille. Non : il n’y a pas de raison de faire une exception !

La Commission adopte l’amendement CD152 ainsi rectifié.

Elle examine l’amendement CD51 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement tend à ajouter, parmi les objectifs généraux, la recherche de circuits d’approvisionnement ancrés territorialement. Cela permettrait de faire référence aux circuits courts, sans être enfermé dans une logique d’extrême proximité.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD153 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Il convient d’être plus affirmatif dans la rédaction de l’alinéa 19 et de mettre en avant la nécessaire protection des terres agricoles.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CD7 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cette partie de l’article précisant les missions de l’État, l’objectif du présent amendement est de caractériser plus précisément l’intérêt général dans le domaine forestier, en tenant compte, en amont, de la gestion dynamique de la forêt et, en aval, de l’utilisation des ressources forestières.

Dans cette optique, il convient de justifier le lien qui peut exister entre la lutte contre le réchauffement climatique et la promotion d’une gestion dynamique de la forêt. Cela implique une utilisation accrue du matériau bois, notamment pour la construction et l’ameublement.

M. le rapporteur pour avis. Je partage votre point de vue pour ce qui est de la nécessité de renforcer la compétitivité des filières d’utilisation du bois au moyen de mesures d’incitation et de promotion de l’utilisation des ressources forestières nationales : cela permettrait de préciser que l’on ne cherche pas à favoriser le matériau en lui-même, hors considération d’origine.

Toutefois, je suis réservé sur le reste de l’amendement. Comme je vais bientôt présenter un amendement sur la ressource forestière nationale, je suggère que vous retiriez le vôtre et que vous associiez au CD126.

M. Bertrand Pancher. C’est entendu.

L’amendement est retiré.

Puis, suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement CD154 de précision rédactionnelle de Mme Danielle Auroi.

Elle passe ensuite à l’amendement CD126 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement tend à préciser que le renforcement de la compétitivité des filières d’utilisation du bois passe par la valorisation des ressources forestières présentes sur le territoire national, et non par des importations massives. Comme convenu, j’y associe M. Bertrand Pancher.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er ainsi modifié.

Après l’article 1er

La Commission est saisie de l’amendement CD6 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement tend à demander au Gouvernement de présenter un état des lieux sur l’enjeu économique, social et environnemental que constitue le gaspillage alimentaire.

Le Parlement européen ayant adopté une résolution visant à réduire de moitié le gâchis de denrées d’ici à 2025, le Gouvernement a retenu en juin 2013 cet objectif, qui fait l’objet d’un « pacte national ». Or, nous ne disposons d’aucun diagnostic de la situation actuelle. Afin de définir avec de plus précision les politiques à mener, il serait nécessaire d’identifier les postes gaspilleurs, grâce à un état des lieux par type d’activité et par filière de produits.

M. le rapporteur pour avis. C’est un souhait que je partage, mais il me paraît inopportun d’introduire une telle obligation dans la loi, d’autant que le Gouvernement a mis en place un pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire qui associe l’État, les collectivités territoriales, les producteurs, l’industrie, la grande distribution, la restauration, les associations de consommateurs, etc. Le 16 octobre dernier a été organisée la première journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire : on ne peut donc pas soupçonner le Gouvernement de mésestimer cet objectif. L’obliger à rendre un rapport dans deux ans n’apporterait pas grand-chose et alourdirait la loi. Il existe d’autres outils, d’origine parlementaire ou gouvernementale, pour faire ce genre de bilan. Je vous suggère donc de retirer votre amendement ; à défaut, j’y serais défavorable.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement, inspiré par France Nature Environnement, vise à indiquer avec une plus grande précision l’engagement de l’État dans ce domaine. Demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement ne me semble pas alourdir la loi outre mesure ! Je le maintiens donc.

La Commission rejette l’amendement.

TITRE IER
PERFORMANCE ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES

Le titre Ier du projet de loi vise à établir un cadre législatif propre à favoriser le développement de filières agricoles et agroalimentaires conciliant une double performance économique et environnementale.

Article 2
(articles L. 611-1, L. 621-2, L. 621-5, L. 621-8 du code rural et de la pêche maritime)

Adaptation de la composition et des missions du conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire et de FranceAgriMer

Cet article adapte les missions, les compétences et l’organisation du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO) et de l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer), afin de favoriser la recherche de synergies et de cohérences entre l’ensemble des acteurs intéressés.

● Le paragraphe I (alinéas 1 à 11) réécrit assez substantiellement l’article L. 611-1 du code rural et de la pêche maritime, qui détaille la composition et les compétences du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO) :

– la composition du CSO est modifiée afin d’y prévoir la nomination de représentants des régions et de FranceAgriMer (al. 2) ;

– une clause générale de compétence du CSO « pour l’ensemble des productions agricoles, agro-alimentaires, halio-alimentaires, agro-industrielles et halio-industrielles » est introduite, assortie de mécanismes permettant la consultation du Conseil supérieur de la forêt et du bois et l’Institut national de l’origine et de la qualité lorsque les questions débattues devant le CSO les concernent (al. 4) ;

–  le rôle du CSO est conforté, comme institution de mise en cohérence de la politique d’adaptation des structures d’exploitation et des actions en faveur du développement rural avec la politique d’orientation des productions issue de la concertation au sein de FranceAgriMer, d’une part, et des actions économiques sectorielles conduites par cet établissement avec celles conduites par les organisations interprofessionnelles, d’autre part (al. 8 à 11).

● Le paragraphe II (alinéas 12 à 21) modifie trois articles du titre II du livre VI du code rural et de la pêche maritime, à savoir :

– l’article L. 621-2, afin de rappeler que FranceAgriMer exerce ses compétences conformément aux orientations des politiques de l’État et qu’il lui appartient de veiller à l’articulation des actions qu’il met en œuvre avec celles mises en œuvre par les régions, en prenant en compte l’objectif de double performance économique et environnementale des filières de production (al. 14) ;

– l’article L. 621-5, afin d’assurer la représentation des régions au conseil d’administration et aux conseils spécialisés de FranceAgriMer – à compter de 2014, celles-ci deviendront en effet autorités de gestion des crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ;

– l’article L. 621-8, afin d’en alléger la rédaction et de prévoir que les obligations déclaratives pesant sur les opérateurs de production, de transformation ou de commercialisation de produits agricoles pourront viser à alimenter les travaux de l’observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CD1 de M. Bertrand Pancher et CD 155 de Mme Brigitte Allain.

M. Bertrand Pancher. L’amendement que je défends tend à modifier la composition du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO), pour retenir un système de gouvernance proche de celui préconisé lors du Grenelle de l’environnement, de sorte que chaque acteur dispose d’un poids égal. Alors que les pouvoirs du Conseil supérieur vont être renforcés, il convient en effet d’accroître la représentation des acteurs de l’environnement en son sein. Il importe en outre de renforcer les liens entre le monde agricole et le reste de la société.

Mme Brigitte Allain. L’existence de quatre collèges de poids égal au sein du CSO permettrait en effet de mieux intégrer la société civile dans le débat agricole et de préserver l’activité agricole, notamment face à l’urbanisation.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable à ces deux amendements. Ne nous méprenons pas sur le rôle du CSO, qui n’a pas de pouvoir décisionnel. En outre, l’article L. 611-1 du code rural précise qu’il est composé, non seulement des représentants des ministres intéressés – et demain, des régions –, mais également des représentants de la production agricole, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, de l’artisanat et du commerce indépendant de l’alimentation, des consommateurs et des associations agréées pour la protection de l’environnement, de la propriété agricole, des syndicats représentatifs des salariés des filières agricoles et alimentaires. On ne peut pas lui reprocher d’être fermé !

Composer le CSO de quatre collèges de poids égal reviendrait à le transformer en une instance du type « Grenelle de l’environnement », où serait garantie la parité des votes. Ce n’est pas la nature de ce Conseil, dont la mission est de rendre des avis et d’encadrer les décisions de l’État en matière de politique agricole et alimentaire. Il faut lui laisser la possibilité d’être composé en fonction des nécessités.

M. Bertrand Pancher. Il s’agit pourtant d’une demande de la quasi-totalité des représentants de la société civile. Dans son avis rendu le 12 novembre dernier, le Conseil économique social et environnemental (CESE) précisait d’ailleurs que « tous les acteurs concernés (agriculteurs, sylviculteurs, coopératives, transformateurs, distributeurs, salariés, collectivités territoriales, structures associatives – consommateurs, environnementalistes…) [devaient] être associés, dans le cadre d’une représentation équilibrée au sein des organismes consultatifs participant à la définition et à la concrétisation des objectifs fixés, pour une véritable concertation ». Une telle modification ne changerait rien à l’efficacité du CSO ; au contraire, elle renforcerait considérablement sa légitimité.

Je regrette la position du rapporteur pour avis, que j’ai connu plus ouvert. Le ministère de l’agriculture veillerait-il scrupuleusement sur ce texte ?

Mme Brigitte Allain. Le CSO n’a certes pas de pouvoir décisionnel, mais, comme son nom l’indique, il établit les grandes orientations de la politique agricole, qui sont ensuite répercutées jusqu’au plus bas niveau. Il joue donc un rôle extrêmement important. Vous avez cité différentes organisations qui peuvent y être représentées, mais c’est oublier que quelques commissions spécialisées, dans lesquelles le syndicat agricole majoritaire est très présent, pèsent particulièrement lourd. Ce déséquilibre se traduit sur le terrain par des orientations peu favorables à l’agroécologie.

M. le rapporteur pour avis. L’orientation en faveur de l’agroécologie et de la double performance, économique et environnementale, de l’agriculture est une décision politique, prise par le Gouvernement avec le soutien de la majorité. L’avis d’un conseil, aussi autorisé soit-il, ne saurait en aucun cas s’y substituer.

Le CSO est ouvert. Il appartient au Gouvernement, qui prend les décisions, de suivre ou non l’avis de ses membres. Aucune pondération visant à transformer le CSO en un outil paritaire où seraient mesurés les rapports de force ne pourra changer cet état de fait. Il est même mensonger de faire croire aux personnes qui y siègent que, si elles étaient plus nombreuses, elles auraient plus d’influence.

La Commission rejette les amendements CD1 et CD155.

Elle examine ensuite l’amendement CD2 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Le CSO doit concilier l’objectif de double performance économique et environnementale et celui du bien-être animal.

M. le rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation, mais votre amendement est mal placé. S’il était adopté, nous donnerions l’impression d’encadrer les réflexions du CSO sur un thème particulier.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 sans modification.

Article 3
(articles L.311-4 à L. 311-7 [nouveaux], L. 666-1 du code rural et de la pêche maritime)

Création des groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) et définition des conditions de leur reconnaissance

Cet article vise à reconnaître les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) et à en faire les instruments d’une transition de l’agriculture vers des systèmes agro-écologiques, reposant sur des projets collectifs portés par des agriculteurs et ancrés dans les territoires.

L’ambition de ces groupements est en effet d’offrir un cadre institutionnel propre à encourager les innovations s’inscrivant dans une problématique de conciliation de la performance environnementale et de la performance économique au sein des systèmes de production. Ils auront donc vocation à valoriser et accompagner des agriculteurs qui s’engagent collectivement à mettre en œuvre un projet pluriannuel de modification des pratiques qu’ils emploient pour la gestion de leurs systèmes de production, en visant une telle double performance.

Pour l’essentiel, cet article complète le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code rural et de la pêche maritime par un ensemble de quatre articles nouveaux.

● L’article L. 311-4 indique que peut être reconnu comme groupement d’intérêt économique et environnemental tout groupement, doté ou non de la personnalité morale, comprenant plusieurs exploitants agricoles et, le cas échéant, d’autres personnes, « dont les membres s’engagent collectivement à mettre en œuvre un projet pluriannuel de modification durable de leurs systèmes de production en visant une double performance économique et environnementale. »

L’option de la création obligatoire d’une nouvelle personne morale est donc écartée, car source d’une complexité non nécessaire, et le groupement pourra revêtir un caractère purement informel. Par ailleurs, la reconnaissance du GIEE aura vocation à être opérée au niveau régional ou local, sans grille de critères préétablis afin de ne pas en faire un dispositif rigide et de pouvoir apprécier la pertinence du projet au regard des enjeux locaux.

● L’article L. 311-5 vient préciser les conditions qu’un projet pluriannuel devra satisfaire pour qu’un groupement puisse se voir reconnaître la qualité de « groupement d’intérêt économique et environnemental ». Outre la nécessité d’associer plusieurs exploitations agricoles, le projet devra proposer des actions permettant d’améliorer la double performance de ces exploitations et répondre aux enjeux économiques et environnementaux propres au territoire auquel appartiennent les exploitations agricoles concernées – notamment, ceux identifiés dans le plan régional de l’agriculture durable mentionné à l’article L. 111-2-1 du même code.

La loi une fois promulguée, il appartiendra à un décret de préciser les conditions de sélection des groupements susceptibles d’être reconnus en tant que GIEE, les conditions de présentation à l’autorité administrative du projet pluriannuel du groupement, la procédure de reconnaissance de la qualité de GIEE, les modalités de suivi et d’évaluation du projet pluriannuel ainsi que les conditions dans lesquelles la qualité de GIEE pourra être retirée.

● Afin de faciliter les actions en commun, l’article L. 311-6 prévoit que les actions menées dans le cadre de leur projet pluriannuel par les agriculteurs membres d’un GIEE au bénéfice des autres agriculteurs membres sont présumées relever de l’entraide agricole au sens de l’article L. 325-1 du code rural et de la pêche maritime – et non d’une relation commerciale ou salariale.

● Quant à l’article L. 311-7, il ouvre la voie à une majoration des aides publiques pour tout ou partie des actions entreprises dans le cadre du projet pluriannuel précité. (1)

Une disposition supplémentaire permet aux producteurs de céréales associés dans un GIEE de commercialiser leurs propres céréales au sein de ce groupement, dans le cadre de la mise en œuvre de son projet pluriannuel (alinéa 12).

*

Votre rapporteur pour avis estime que la mise en place des groupements d’intérêt économique et environnemental constitue une réelle avancée, qu’il soutient pleinement. Alors que la diversité des modes d’organisation et l’enchevêtrement des normes sont sources d’une complexité excessive et souvent dénoncée, l’option consistant à ne pas imposer la création d’une structure supplémentaire doit être saluée.

Cette formule doit permettre la construction d’une meilleure autonomie du développement agricole et la flexibilité d’organisation qui est reconnue apparaît de nature à garantir que la réponse collective que les agriculteurs entendront proposer à certaines problématiques environnementales se situera bien au plus près des réalités et des enjeux territoriaux.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD91 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Cet amendement vise à mettre l’accent sur l’unité de production plutôt que sur le producteur. J’admets que son adoption imposerait de revoir la rédaction de l’ensemble de l’alinéa 3.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable, en raison des problèmes rédactionnels que l’amendement pose. Il faudrait y retravailler avec la commission saisie au fond.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen CD93 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Cet amendement vise à renforcer la lisibilité des engagements qu’implique la création d’un GIEE. Il permet de faire apparaître des changements autres que ceux des systèmes de production.

M. le rapporteur pour avis. La précision peut avoir son utilité, même si le mot « systèmes » est très général. Avis de sagesse.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD156 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Les plans régionaux d’agriculture biologique (PRAB) me semblent devoir être mentionnés au même titre que les plans régionaux d’agriculture durable (PRAD). Cela n’enlèverait rien aux GIEE, bien au contraire.

M. le rapporteur pour avis. Cela n’ajouterait rien non plus, car l’agriculture biologique est par définition durable. De plus, les dispositions visant les PRAD faisant explicitement référence à la production biologique, cette précision supplémentaire serait incohérente. Avis défavorable.

Mme Brigitte Allain. La définition des différents types d’agriculture est toujours épineuse. La précision me semble intéressante, car les PRAB sont des plans reconnus.

M. le rapporteur pour avis. Les GIEE peuvent être des outils de mise en œuvre des PRAB, j’en suis d’accord : mon objection est strictement rédactionnelle.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD95 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Il serait intéressant de pouvoir associer aux GIEE des structures existantes, telles que les groupements d’agriculteurs formés sous le régime associatif, les coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA) ou les centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (CIVAM).

M. le rapporteur pour avis. Vérification faite auprès du ministère, le GIEE sera un label : n’importe quelle structure existante pourra le solliciter. Votre amendement est donc satisfait : je vous invite à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD98 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. La labellisation des groupements s’effectue sur la base de critères de qualité préalablement définis. L’amendement permettrait de confirmer la qualité de ces groupements et de prévoir des aides publiques majorées en faveur des bénéficiaires.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD157 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Il s’agit de conditionner l’octroi des aides publiques versées aux GIEE à vocation environnementale ou territoriale à des projets qui visent à augmenter l’autonomie des exploitations et à valoriser les ressources locales : l’histoire nous a enseigné qu’un cadrage était souvent nécessaire pour éviter le dévoiement de certains objectifs.

M. le rapporteur pour avis. L’amendement est sans doute satisfait par l’alinéa 3, mais une précision peut avoir son utilité. Je m’en remets donc à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD158 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Bien que les échanges de semences ne soient pas interdits par la loi, leur statut juridique reste incertain. Je propose donc de les consacrer juridiquement, dans la mesure où ils contribuent à la lutte contre le changement climatique.

M. le rapporteur pour avis. La cause est noble, mais le sujet est complexe et requiert une expertise juridique approfondie. J’émets cependant un avis favorable, car l’amendement est un appel au Gouvernement à travailler en ce sens.

Mme Brigitte Allain. C’est précisément son objet.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 ainsi modifié.

Article 4
(articles L. 211-3 du code de l’environnement, L. 411-27, L. 820-1 du code rural et de la pêche maritime)

Déclaration de l’azote commercialisé et extension du bail environnemental

Cet article traite d’un ensemble de sujets assez différents, à savoir l’information sur les flux d’azote à l’intérieur de certaines zones, l’inclusion de clauses environnementales dans les baux d’exploitation et la définition des objectifs du développement agricole.

● Le paragraphe I (alinéas 1 à 6) modifie la rédaction de l’article L. 211-3, afin d’autoriser l’autorité administrative à rendre obligatoire la déclaration annuelle des quantités d’azote à usage agricole produites, utilisées, traitées ou échangées dans des zones déterminées. (2)

Afin de permettre aux entreprises de s’adapter à ces nouvelles exigences déclaratives, l’alinéa 6 de l’article 39 du projet de loi prévoit néanmoins une entrée en vigueur différée au 1er octobre 2014.

● Le paragraphe II (alinéa 7 à 11) élargit le champ d’application de l’article L. 411-27 du code rural et de la pêche maritime, afin de permettre à tout bailleur, lors de la conclusion ou du renouvellement d’un bail, d’y inclure des clauses visant au respect par le preneur de pratiques culturales vertueuses, c’est-à-dire ayant pour objet, par exemple, la préservation de la ressource en eau, de la biodiversité, des paysages ou de la qualité des produits, des sols et de l’air.

La possibilité d’inclure de telles clauses, dont la liste est limitativement fixée par décret (article R. 411-9-11-1 du même code), est en effet aujourd’hui limitée à certaines hypothèses tenant à la qualité du bailleur ou à la situation géographique, qui apparaissent désormais trop restrictives. (3)

● Le paragraphe III (alinéa 12 à 15) intègre, parmi les objectifs du développement agricole défini à l’article L. 820-1 code rural et de la pêche maritime et mis en œuvre notamment par les chambres d’agriculture, les établissements d’enseignement et de formation professionnelle agricole et divers organismes professionnels, l’accompagnement des démarches collectives vers des pratiques et des systèmes permettant de combiner performance économique et environnementale.

*

Votre rapporteur pour avis soutient, dans leur principe, l’ensemble de ces dispositions, qu’il s’agisse de la traçabilité des quantités d’azote utilisées dans des périmètres déterminés, de la possibilité d’inclure des clauses environnementales dans des baux ruraux ou des objectifs poursuivis par le développement agricole.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CD5 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Aux termes du projet de loi, l’autorité administrative peut mettre en place un système de déclaration des matières fertilisantes azotées. L’amendement tend à transformer cette possibilité en obligation : il importe de connaître les flux d’azote – notamment minéral – entre régions, afin d’en réduire la consommation, conformément aux exigences communautaires en matière de nitrates.

On a déjà relevé le hiatus entre les coûts de la pollution azotée et la faible ambition du texte pour lutter contre ce phénomène. Nous ne proposons pas d’interdire ces épandages au-delà d’un certain niveau, mais de permettre aux collectivités, qui en répercutent les coûts sur le prix de l’eau, de mettre en œuvre, avec les agriculteurs, des actions visant à les réduire.

Une telle déclaration ne serait pas source de complication administrative, car elle incomberait aux personnes physiques et morales qui distribuent les matières concernées. Rappelons que les produits phytosanitaires, eux, sont déjà soumis à une législation lourde.

M. le rapporteur pour avis. Les épandages de phosphore posent des problèmes comparables.

On a évoqué la lourdeur de certaines procédures administratives pour le monde agricole ; or l’amendement ne contient aucune précision quantifiée, ce qui risque de créer des difficultés, car on sait que l’administration peut se montrer tatillonne. Si je partage l’objectif d’expertiser les flux d’azote, une telle obligation me semble trop lourde, du fait de son caractère systématique. Avis défavorable.

M. Bertrand Pancher. Si cet amendement est rejeté, comme je le pressens, j’en défendrai plusieurs autres de repli en séance. Je ne doute pas, monsieur le rapporteur pour avis, qu’ils recueilleront votre assentiment.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD159 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Dans le même esprit, je propose de rendre la déclaration des flux d’azote obligatoire au sein des zones vulnérables.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement poursuit en effet les mêmes objectifs que le précédent, même s’il vise spécifiquement les zones vulnérables. Cependant, la possibilité à laquelle vous faites allusion signifie seulement que l’autorité administrative édictera des règles quand elle le jugera nécessaire – en d’autres termes, lorsque les activités le justifieront et ce, à tout moment. L’obliger à le faire me semble donc superflu. Avis défavorable.

Mme Brigitte Allain. Quand prendra-t-on enfin à bras-le-corps le problème des pollutions aux nitrates dans les zones vulnérables ? Il me semble que l’on est dans le déni.

M. Bertrand Pancher. En ce domaine, il faut souligner l’engagement croissant des collectivités et des agences de l’eau, en lien étroit, bien entendu, avec les agriculteurs. Ceux-ci consentent à de nouveaux efforts, pourvu qu’ils soient partagés. Les collectivités y sont prêtes et les agences de l’eau soutiennent des mesures incitatives, mais des référentiels sont nécessaires ; aussi, l’argument de la complexité me paraît-il bien faible au regard de l’avantage qu’il y aurait à bénéficier de ce type d’informations. Je soutiens donc cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD47 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD50 rectifié du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Par cet amendement d’appel, je propose que tout PRAD établisse « une liste des clauses environnementales susceptibles d’être incluses dans les baux relevant de son périmètre ». Il s’agit de marquer que le bailleur ne peut proposer n’importe quelle clause, afin notamment d’éviter un rapport déséquilibré avec le preneur, et de tenir compte des spécificités locales.

M. Guillaume Chevrollier. A-t-on mesuré l’impact d’une telle contrainte quant à la surface qui pourrait être soustraite au foncier agricole, déjà en situation tendue compte tenu de l’étalement urbain ?

M. le rapporteur pour avis. On ne peut, dans le cadre de la reconduction d’un bail, imposer des clauses supplémentaires – c’est pourquoi j’ai retiré mon amendement CD47. En revanche, bailleur et preneur peuvent s’entendre sur n’importe quelle clause en contractant pour la première fois ; d’où le cadrage que je propose. Dans ces conditions, l’étendue des surfaces concernées est difficilement prévisible.

La Commission adopte l’amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En conséquence de l’adoption de l’amendement CD50 rectifié, l’amendement CD103 de M. Serge Bardy tombe.

La Commission examine l’amendement CD101 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. L’inclusion du registre parcellaire de la déclaration PAC au bail environnemental permettrait de faire apparaître clairement les infrastructures d’intérêt écologique dans le contrat signé entre le propriétaire et l’exploitant.

M. le rapporteur pour avis. Si je comprends la logique de transparence qui préside à cet amendement, je le crois source d’une complexité excessive. Je vous invite donc, monsieur Bardy, à le retirer pour en revoir la rédaction.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD105 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Je propose que la Commission consultative paritaire départementale puisse être saisie par l’une ou l’autre des parties prenantes au contrat de bail, en cas de désaccord entre elles et afin d’arriver à une conciliation.

M. le rapporteur pour avis. Avis favorable, sous réserve que soient substitués aux mots : « les clauses environnementales » les mots : « la mise en œuvre des clauses environnementales » : par définition, le désaccord ne peut en effet intervenir qu’après la signature du bail.

M. Serge Bardy. Je consens à cette rectification.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Puis elle en vient à l’amendement CD160 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Il est nécessaire de rappeler que le respect du bien-être animal est un objectif, au même titre que le développement durable, la qualité des produits, la protection de l’environnement, l’aménagement du territoire et le maintien de l’emploi en milieu rural.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 4 ainsi modifié.

Après l’article 10

La Commission examine l’amendement CD189 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Je propose que les aides publiques soient attribuées en priorité aux méthaniseurs collectifs. Cela permettrait de pérenniser l’investissement, même au cas où une exploitation arrête sa production, et d’éviter que la méthanisation soit réservée aux grands élevages.

M. le rapporteur pour avis. Si je comprends l’esprit de cet amendement, je m’interroge sur sa portée : la méthanisation n’étant pas l’apanage du secteur agricole, cette question me semble avoir vocation à être posée plutôt dans le cadre du futur débat sur la transition énergétique. De plus, les GIEE sont par nature des projets collectifs. Avis défavorable.

Mme Brigitte Allain. Sans doute faut-il revoir la rédaction de l’amendement – ou, à tout le moins, son exposé sommaire –, car son esprit est bien de viser les aides publiques versées aux méthaniseurs agricoles.

L’amendement est retiré.

TITRE II
PROTECTION DES TERRES AGRICOLES ET RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS

La question foncière constitue un élément central de la politique agricole et les pouvoirs publics ont, depuis longtemps, entrepris de réguler et d’encadrer l’exercice du droit de propriété afin de préserver la réalisation des objectifs d’intérêt général que sont le renouvellement des générations d’exploitants et la conservation de la vocation agricole des terres exploitées. Depuis plus de cinquante ans, la politique de contrôle des structures des exploitations, l’intervention des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) et les aides à l’installation concourent à ces objectifs. Plus récemment, la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche a créé un observatoire de la consommation des espaces agricoles et des commissions départementales chargées de veiller à limiter la régression des surfaces agricoles.

Le titre II du projet de loi comprend plusieurs dispositions destinées à accroître l’efficacité du dispositif de préservation des terres agricoles et à améliorer la gouvernance et le fonctionnement des SAFER, ainsi qu’un ensemble d’articles portant sur des thématiques plus spécifiques, dont la Commission du développement durable ne s’est pas saisie (installation progressive de nouveaux chefs d’exploitation agricole, efficience du contrôle des structures, modernisation des critères d’assujettissement au régime de protection sociale des non-salariés agricoles, etc.).

*

* *

La Commission examine l’amendement CD85 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Je propose de substituer, dans l’intitulé du titre II, aux mots : « terres agricoles », les mots : « espaces naturels, agricoles et forestiers ». Même si la notion de « terre agricole » inclut parfois, dans le code rural, les notions d’espaces « naturels » et « forestiers », ce n’est pas toujours le cas.

La Commission adopte l’amendement.

Avant l’article 11

Puis elle en vient à l’amendement CD3 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à donner une traduction législative à l’engagement du Gouvernement en matière de lutte contre l’artificialisation des sols ; il devrait aussi convenir au secteur agricole comme aux grandes organisations de défense de l’environnement.

La feuille de route issue de la conférence environnementale de 2012 indique que « le Gouvernement s’engage à freiner au niveau national l’artificialisation nette des espaces agricoles et naturels. Le calendrier sera fixé dans le projet de loi sur le logement, l’urbanisme et la ville préparé par la ministre de l’égalité des territoires et du logement pour le début de l’année 2013 ».

Je propose, dans cette optique, de préciser que les actions des collectivités territoriales doivent contribuer à « l’atteinte d’un objectif de zéro artificialisation nette du territoire d’ici 2025 ».

M. le rapporteur pour avis. Je suis sceptique sur cet objectif chiffré et daté, qui risque, soit d’être opposé à des opérations utiles, soit de ne pas être respecté – et donc d’affaiblir la portée normative de la loi. Mieux vaut faire le pari de la dynamique inscrite à l’article L. 110 du code de l’urbanisme et s’en remettre aux documents d’urbanisme pour l’inscrire dans la réalité, PLU par PLU, SCoT par SCoT, suivant les régions et les objectifs. Il faut se garder de l’incantation.

M. Bertrand Pancher. Le délai est peut-être trop court, mais il faut se rendre à l’évidence : nous n’arrivons pas à enrayer l’artificialisation du territoire. La définition d’objectifs – qui pourraient être mesurés année après année – serait à mon sens une modification utile de notre arsenal législatif. Je maintiens donc l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Article 11
(article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime)

Renforcement des prérogatives du conseil régional dans l’élaboration du plan régional de l’agriculture durable

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime pose le principe selon lequel un « plan régional de l’agriculture durable » (PRAD) fixe les grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle de l’État dans la région en tenant compte des spécificités des territoires ainsi que de l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux. Il appartient au préfet de région de conduire la préparation de ce plan, en y associant les collectivités territoriales et les chambres d’agriculture concernées ainsi que l’ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives, avant de l’arrêter dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

L’article 11 du projet de loi s’inscrit dans le cadre de la démarche visant à renforcer le rôle des régions en matière agricole, c’est-à-dire d’en faire l’échelon de définition et de programmation des politiques agricoles, ainsi que de gestion des crédits européens. Les dispositions de l’article L. 111-2-1 précité sont ainsi modifiées, afin notamment de prévoir une élaboration du PRAD sous la direction conjointe du préfet de région et du président du conseil régional et l’approbation du plan par l’organe délibérant de la collectivité territoriale.

*

* *

La Commission examine les amendements CD106 de M. Serge Bardy et CD48 du rapporteur pour avis, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Serge Bardy. L’amendement CD106 vise à réécrire l’alinéa 6 de l’article 11, qui ne prend pas en compte la situation de nos concitoyens qui n’ont pas accès au numérique.

M. le rapporteur pour avis. Je remercie M. Serge Bardy de cette proposition, qui m’a inspiré l’amendement CD48 – auquel je lui suggère d’ailleurs de se rallier. Ma rédaction permet de structurer sous une forme normée la manière dont le projet de plan est ouvert au débat public. L’article L. 120-1 du code de l’environnement doit devenir une procédure usuelle.

M. Serge Bardy. Mon amendement visait à adopter une procédure d’information du public équivalente à celle qui prévaut pour les enquêtes d’utilité publique ; mais j’accepte de le retirer.

L’amendement CD106 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD48.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 11

La Commission est saisie de l’amendement CD4 de M. Bertrand Pancher créant un article additionnel après l’article 11.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement a pour objet d’intégrer dans les schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT) une cartographie des terres agricoles, afin qu’elles ne soient pas considérées comme une réserve foncière pour l’urbanisation future.

M. le rapporteur pour avis. Avis favorable. Toutefois, je souhaiterais que ce document recense aussi les terres forestières.

M. Guillaume Chevrollier. Et les espaces naturels ?

M. le rapporteur pour avis. Cela va de soi si l’on vise les terres agricoles et forestières, cher collègue ; mais nous pourrons en reparler ultérieurement.

M. Guillaume Chevrollier. En ce cas, pourquoi l’avoir précisé tout à l’heure dans l’intitulé du titre II ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je propose la rédaction suivante : « Il comporte un document cartographique recensant les espaces naturels, agricoles et forestiers. »

M. le rapporteur pour avis et M. Bertrand Pancher. D’accord !

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Article 12
(articles L. 112-1, L. 112-1-1, L. 112-2, L. 135-3 et L. 135-5 du code rural et de la pêche maritime et articles L. 122-1-5, L. 122-3, L. 123-1-2, L. 123-6, L. 124-2, L. 143-1, L. 145-3 du code de l’urbanisme)

Préservation du foncier agricole

L’article 12 du projet de loi modifie une série de dispositions du code rural et de la pêche maritime et du code de l’urbanisme, afin de mieux lutter contre l’artificialisation des terres.

On rappellera ici, pour mémoire, que les services du ministère chargé de l’agriculture estiment que les espaces métropolitains cultivés ou toujours en herbe ont diminué de 327 000 hectares entre 2006 et 2010, les espaces naturels (forêts, landes, roches, etc.) et artificialisés (constructions, routes, chantiers, etc.) ayant respectivement augmenté de 12 000 et 315 000 hectares entre ces deux dates. D’autres données, établies avec des méthodologies différentes, confirment cette tendance à la réduction des surfaces agricoles – l’évolution de la surface agricole utile (SAU) des exploitations a ainsi diminué de 3 % en métropole entre les deux recensements agricoles de 2000 et de 2010 – et soulignent que cette même dynamique opère outre-mer, quoique de manière encore plus prononcée.

● Le paragraphe I (alinéas 1 à 12) modifie la rédaction de l’article L. 112-1 du code rural et de la pêche maritime, qui dispose aujourd’hui que l’Observatoire de la consommation des espaces agricoles (ONCEA) « élabore des outils pertinents pour mesurer le changement de destination des espaces agricoles et homologue des indicateurs d’évolution » : d’une part, la compétence de l’ONCEA est désormais étendue aux espaces naturels et forestiers ; d’autre part et au titre de ses nouvelles missions, il lui appartiendra d’évaluer la consommation desdits espaces et d’apporter son appui méthodologique aux collectivités territoriales pour l’analyse de cette consommation.

Par ailleurs, les dispositions de l’article L. 112-1-1 du même code, relatif aux commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA), sont largement réécrites afin de conforter le rôle de ces commissions :

– rebaptisées « commissions départementales de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers » (CDPENAF), elles seront à l’avenir également compétentes en matière d’espaces naturels et forestiers ;

– lorsqu’un projet ou un document d’aménagement ou d’urbanisme aura pour conséquence une réduction de surfaces portant des productions bénéficiant d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine, un représentant de l’Institut national de l’origine et de la qualité participera, avec voix délibérative, à la réunion de la commission au cours de laquelle ce projet sera examiné ;

– lorsqu’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale aura pour conséquence une réduction substantielle des surfaces portant des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou portera une atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation, l’autorité compétente de l’État devra saisir la commission du projet et celui-ci ne pourra être adopté qu’après avis conforme de cette commission.

● Le paragraphe II (alinéas 13 à 15) supprime la disposition qui limite à cinq années la durée d’inclusion, dans le périmètre géré par une association foncière pastorale, des parcelles de propriétaires non retrouvés et il assouplit les conditions de majorité pour décider, au sein de telles associations, d’investissements à finalités autres qu’agricole ou forestière (articles L. 135-3 et L. 135-5 du code rural et de la pêche maritime).

Associations foncières pastorales et lutte contre la déprise agricole

Les zones de montagne sont particulièrement exposées au problème posé par un parcellaire très morcelé, appartenant à un grand nombre de propriétaires et dont certains ne sont pas connus. C’est à cette situation que la loi n° 72-12 du 3 janvier 1972 relative à la mise en valeur pastorale a voulu remédier en créant, en particulier, les associations foncières pastorales (AFP), qui jouent un rôle très important dans la lutte contre la déprise.

Les AFP ont pour objet de regrouper des terres dispersées entre de multiples propriétaires en une unité de gestion adaptée, permettant notamment l’exploitation extensive et les pratiques pastorales. A cette fin, elles réalisent et gèrent des ouvrages collectifs et font exécuter des travaux contribuant à la protection des sols ou à la desserte des parcelles. Elles n’assurent que rarement une exploitation directe, à laquelle elles tendent à préférer la concession de la jouissance des biens à des exploitants individuels ou à des groupements pastoraux. Elles sont autorisées par décision préfectorale lorsque la moitié au moins des propriétaires dont les terres situées dans le périmètre proposé, représentant la moitié au moins de la superficie des terres incluses, a adhéré à l’association.

Au cours des années récentes, deux difficultés sont apparues, qui limitent l’efficacité de l’intervention de ces associations dans la lutte contre la déprise agricole :

– d’une part, le fait que l’inclusion dans le périmètre géré par l’association des propriétés des propriétaires non retrouvés soit limitée à cinq ans : la coexistence de deux périmètres – l’un sans limite de longue durée, l’autre limité à cinq ans – a pour conséquence de freiner les investissements, les propriétaires associés au sein de l’AFP étant réticents à conduire des investissements sur des terres dont une partie pourrait, au terme des dispositions actuellement en vigueur, sortir de l’AFP au bout de cinq ans ;

– d’autre part, la difficulté à réunir les conditions de majorité (deux tiers des propriétaires possédant plus des deux tiers de la surface requise) pour réaliser des investissements à des fins autres qu’agricoles. Le projet de loi propose donc de les aligner sur celles prévues à l’article 14 de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires.

● Le paragraphe III (alinéas 16 à 31) comprend tout d’abord une série de dispositions de mise en cohérence du code de l’urbanisme avec les modifications ci-dessus évoquées.

Il prévoit en outre que les schémas de cohérence territoriale (SCoT) devront comporter, par secteur géographique, des objectifs chiffrés de consommation économe de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain et décrit pour chacun d’eux les enjeux qui lui sont propres (alinéas 18 et 19, modifiant l’article L. 122-1-5 du code de l’urbanisme).

Il étend également aux intercommunalités compétentes en matière d’urbanisme la faculté d’élaborer des périmètres de protection des espaces naturels et agricoles périurbains – une possibilité que l’article L. 143-1 du code de l’urbanisme réserve aujourd’hui aux seuls départements. Ces périmètres seront désormais assortis de programmes d’action destinés à faciliter leur mise en œuvre (alinéas 27 à 31).

*

* *

La Commission examine l’amendement CD52 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Il s’agit d’étendre le principe d’un avis conforme à toute terre agricole, au lieu de le limiter aux seules terres portant des productions qui bénéficient d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine. Cela permettrait de renforcer le rôle de la commission départementale de consommation des espaces agricoles (CDCEA) et d’endiguer le phénomène de l’urbanisation des terres agricoles.

M. le rapporteur pour avis. Je partage votre préoccupation, mais le risque est grand de voir se multiplier les demandes d’avis conforme d’organes consultatifs divers, qui pourraient finir par se contredire les uns les autres. La CDCEA est consultée et donne un avis, qui doit être écouté. Mais le rendre conforme, c’est donner un pouvoir de blocage à des structures où tous les intérêts ne sont pas nécessairement représentés.

Mme Catherine Quéré. Nous avons déposé en commission des affaires économiques un amendement dont les termes sont à peu près identiques : il s’agit de prévoir un avis conforme dans les zones d’appellation d’origine contrôlée (AOC). Il n’a pas été adopté et nous le regrettons. En l’état actuel de la législation, un maire peut très bien revenir sur l’avis de la CDCEA dans son PLU. Cela peut poser problème dans les zones d’AOC, notamment pour les vignobles.

M. Michel Heinrich. Pour ma part, je suis scandalisé par cet amendement : il signifie qu’une commission administrative devient co-décisionnaire dans l’établissement d’un PLU. Belle marque de confiance donnée aux élus !

Mme Sophie Errante. Un certain nombre de personnes publiques sont associées à l’élaboration du PLU. Je suis élue d’un territoire viticole classé en AOC. Jamais il n’a été question d’interdire toute discussion. Je suis donc surprise de cet amendement.

M. Bertrand Pancher. Il y a certes des élus responsables, monsieur Heinrich, et je ne doute pas que vous en fassiez partie. Mais, si nous ne mettons pas en place des systèmes un peu contraignants, l’urbanisation va se poursuivre. Je conviens que le texte de l’amendement est un peu abrupt, mais je tenais à soulever cette question.

Mme Sophie Errante. Votre propos démontre tout l’intérêt des SCoT, monsieur Pancher.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’attire votre attention sur un problème de rédaction : la référence aux alinéas 3 et 4 est sans doute inappropriée. Mieux vaudrait donc retirer cet amendement, pour le retravailler ensuite.

Mme Brigitte Allain. J’ai déposé un amendement qui a le même objet, mais porte sur l’alinéa 6 : il vise à rendre conforme l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, quelle que soit la nature de l’espace impliqué.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement mérite d’être revu, ne serait-ce que pour des raisons techniques. Permettez-moi de vous livrer une anecdote : la CDCEA de mon département a donné un avis défavorable à un PLU qui prévoyait une augmentation de la surface concédée à l’agriculture et une réduction des surfaces prévues pour l’urbanisation, au motif qu’ailleurs, il y avait eu des consommations, et qu’il fallait donc des compensations. Vous conviendrez que votre proposition peut s’avérer risquée pour des projets raisonnablement équilibrés !

M. Bertrand Pancher. Je suis convaincu par vos arguments, monsieur le rapporteur : je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD107 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Cet amendement vise à mettre l’accent sur l’importance du diagnostic de l’espace agricole. La démarche ici proposée complète la vocation de l’Observatoire.

M. le rapporteur pour avis. Il ne faut pas être trop prescriptif par rapport aux missions de l’Observatoire. Néanmoins, il me paraît si naturel de poser un diagnostic avant de faire des propositions que je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD161 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. J’ai déjà défendu cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD43 de M. Michel Heinrich.

M. Michel Heinrich. Cet amendement ne vise pas à reconnaître aux PLU ou aux cartes communales le droit de porter atteinte aux aires d’appellation d’origine protégée (AOP), mais vise à ne pas porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales en soumettant leurs décisions à l’accord d’une structure administrative dont le rôle doit rester consultatif. Il ne paraît pas souhaitable qu’une commission administrative dispose ainsi d’un pouvoir de codécision, même limité, en matière de documents d’urbanisme. Ce serait ouvrir la porte à des procédures de ce type dans d’autres textes. Il serait d’ailleurs intéressant d’avoir l’avis de Mme Cécile Duflot sur le sujet.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Nous parlions tout à l’heure d’une prescription générale, qui pouvait induire des situations controversées. Là, il s’agit de zones d’AOP, dont la commission départementale a parfaitement connaissance et qu’il me paraît judicieux de ne pas considérer comme des zones agricoles banalisées. Je souhaite donc conserver la rédaction actuelle, qui prévoit un avis conforme.

M. Michel Heinrich. Je le répète, nous ouvrons une porte : les exceptions vont se multiplier et les élus finiront par ne plus avoir la maîtrise de leur PLU.

M. Alain Calmette. Je suis assez sensible à cet argument. Admettre qu’une commission administrative puisse interférer dans les décisions des élus pourrait créer un fâcheux précédent. Nous devons y prendre garde.

M. Guillaume Chevrollier. La loi pose le principe de la préservation du foncier agricole. Un simple avis consultatif de la commission permet d’ouvrir le dialogue avec les élus locaux. Laissons à ces derniers le pouvoir de délibérer sur la planification urbaine, en dialoguant avec les acteurs locaux.

M. le rapporteur pour avis. Nous recherchons un équilibre. Quoi qu’il en soit, je rappelle que des élus siègent dans la commission. Compte tenu de la valeur patrimoniale – sur le long terme – d’un classement en AOP, on peut tout de même admettre des dispositions particulières, d’autant que, en matière d’AOP, il ne peut y avoir de compensation, ce qui autorise des atteintes irrémédiables à des systèmes agricoles. Tout à l’heure, j’étais défavorable à un avis conforme général ; mais, sur les AOP, il y a lieu de le maintenir.

M. Michel Heinrich. C’est présupposer que des élus peuvent choisir de consommer un territoire classé en AOP lorsqu’ils élaborent leur PLU.

Mme Catherine Quéré. Vous interprétez cette disposition comme l’expression d’une méfiance à l’endroit des élus. Mais vous vous montrez vous-même méfiant à l’égard de la CDCEA, où siègent des personnalités responsables – dont des professionnels et des élus. Il n’y a pas de raison de jeter la suspicion sur les uns plutôt que sur les autres.

M. Michel Heinrich. Mais l’élaboration d’un PLU est de la responsabilité des élus. Nous sommes tout de même dans un pays démocratique !

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CD45 de M. Michel Heinrich.

M. Michel Heinrich. Moins de trois ans après l’entrée en vigueur de la loi Grenelle II, il ne paraît pas opportun de changer à nouveau les règles et de transformer une possibilité de sectorisation en obligation. Depuis 2011, les SCoT ont l’obligation d’arrêter des objectifs chiffrés de consommation économe de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain. Ils peuvent aussi ventiler ces objectifs chiffrés par secteur géographique s’ils l’estiment nécessaire. Or, si tous les SCoT soumis aux obligations résultant de la loi Grenelle II ont arrêté des objectifs chiffrés, ils ne les ont pas systématiquement ventilés. La transformation de cette possibilité en obligation leur impose une nouvelle procédure de révision.

M. Bertrand Pancher. Je comprends l’intérêt des dispositions en question, mais je partage sans réserve les propos de Michel Heinrich. Je constate que nous n’arrivons pas à terminer les SCoT : ils sont à peine élaborés que des dispositifs nouveaux apparaissent. À un moment donné, il faut « siffler la fin de la partie » et laisser les élus locaux respirer !

M. le rapporteur pour avis. Le SCoT est justement le garde-fou qui va éviter que chaque PLU entende exprimer des orientations chiffrées. Certes, les changements de règle peuvent entraîner des difficultés, mais il me semble utile de bien situer le lieu où l’on fixe les objectifs généraux pour stabiliser l’ensemble du dispositif. L’objectif global est une bonne idée pour éviter qu’il revienne systématiquement au dernier document « d’éponger » les erreurs faites dans les autres. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

M. Michel Heinrich. J’attire votre attention sur le fait que, à partir du 1er janvier 2017, tout le territoire devrait être couvert par des SCoT. Ces derniers devront être revus pour être mis en conformité avec ce texte, alors que nombre d’entre eux viennent tout juste d’être réalisés.

Mme Sophie Errante. Mais non ! Cela se fera lors de la prochaine révision.

M. Michel Heinrich. Le texte ne le dit pas. Il y a là une instabilité juridique, qui peut se révéler une faille en cas de recours ou de contestation. La possibilité de sectoriser existe déjà. Vous la rendez obligatoire. L’instabilité juridique permanente sur les SCoT n’est plus possible.

Mme Sophie Errante. Il me semble que, une fois que le SCoT est validé, on n’a pas l’obligation de le rouvrir et de l’analyser chaque fois qu’une nouvelle règle s’applique. Ce n’est que lorsqu’on lance une révision que l’on doit tenir compte des nouvelles lois adoptées depuis sa validation. Le PLU de mon territoire a été approuvé juste avant l’application de la loi Grenelle II. Il n’applique que les dispositions de la loi Grenelle I. Mais, lorsque nous lancerons sa révision, ce sont celles de la loi Grenelle II qu’il mettra en œuvre.

M. le rapporteur pour avis. Il est évident que si les dispositions de l’article 12 venaient à rendre obligatoire une modification des SCoT qui viennent d’être arrêtés, je vous proposerais une autre rédaction. La suite du débat nous permettra peut-être d’obtenir des éclaircissements. Mais les SCoT qui sont établis le restent ; ceux qui ne le sont pas devront fixer des objectifs.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CD44 de M. Michel Heinrich.

M. Michel Heinrich. Il s’agit d’un amendement de repli. À supposer qu’il faille impérativement sectoriser, les objectifs chiffrés de consommation économe de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain et la description des enjeux propres à chaque secteur ne relèvent pas du document d’orientation et d’objectifs du SCoT. Ils devraient figurer dans le rapport de présentation.

M. le rapporteur pour avis. Cette description n’est pas normative ; elle n’emporte donc pas d’obligations particulières. Néanmoins, il me semble que c’est l’objectif même d’un SCoT que de justifier la norme qu’il établit. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD162 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement vise à préciser qu’un établissement public de coopération intercommunale peut, au même titre qu’un établissement public ou un syndicat mixte porteur d’un schéma de cohérence territoriale ou un département, être à l’initiative d’un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains. Il est donc plus pertinent de demander un avis simple – plutôt qu’un accord – aux communes et EPCI pour l’élaboration du périmètre.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD193 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement tend à substituer aux mots : « avec l’accord de la ou des communes concernées ou des établissements publics compétents en matière de plan local d’urbanisme » les mots : « après avis de la ou les communes concernées ou des établissements publics compétents en matière de documents d’urbanisme ».

M. le rapporteur pour avis. Il semble pourtant logique de requérir l’accord de la commune concernée. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD194 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Je retire cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission émet alors un avis favorable à l’adoption de l’article 12 ainsi modifié.

Article 13
(articles L. 141.1, L. 141-1-1 [nouveau], L. 141-6, L. 143-1, L. 143-2, L. 143-7 du code rural et de la pêche maritime)

Améliorer l’efficacité de l’intervention des SAFER

Les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) ont été créées en 1960 comme un outil d’amélioration des structures des exploitations agricoles et de régulation du marché foncier rural. Leurs missions d’intérêt général ont ensuite été progressivement élargies au développement local et à la préservation de l’environnement, à travers notamment leur contribution à la diversité des paysages, à la protection des ressources naturelles et au maintien de la diversité biologique.

L’article 13 du projet de loi, modifiant plusieurs articles du titre IV du livre Ier du code rural et de la pêche maritime, vise à faire évoluer leur gouvernance, à rationaliser leur fonctionnement, à conforter la sécurité juridique de leurs interventions et à améliorer leur connaissance du marché foncier.

● Les alinéas 1er à 11 modifient l’article L. 141-1 relatif aux missions des SAFER. La référence à une mission d’amélioration des structures foncières « par l’accroissement de la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières (…) et, éventuellement, par l’aménagement et le remaniement parcellaires » est supprimée, ainsi que la mission de communiquer à l’État « les informations qu’elles détiennent sur l’évolution des prix et l’ampleur des changements de destination des terres agricoles. »

La nouvelle liste de leurs missions se déploie selon quatre axes principaux, inspirés du souci de promouvoir une agriculture durable :

– à titre prioritaire, protéger les espaces agricoles et naturels. Il s’agit de favoriser l’installation, le maintien et la consolidation d’exploitations agricoles ou forestières afin que celles-ci atteignent une dimension économique viable. Leurs interventions devront « [concourir] à la diversité des systèmes de production notamment ceux permettant de combiner la double performance économique et environnementale et ceux relevant du mode de production biologique » ;

– contribuer à la diversité des paysages, à la protection des ressources naturelles et au maintien de la diversité biologique ;

– contribuer au développement durable des territoires ruraux ;

– assurer la transparence du marché foncier rural.

● Les alinéas 12 à 14 introduisent au même code un article L. 141-1-1 nouveau et comportant deux paragraphes.

Le paragraphe I prévoit que, afin de leur permettre d’exercer leur mission, les SAFER doivent être préalablement informées, par le notaire ou par le vendeur (vente de parts sociales), de toute cession à titre onéreux de biens ou de droits mobiliers ou immobiliers mentionnés au II de l’article L. 141-1 du même et situés dans leur ressort (biens ruraux, terres, exploitations agricoles ou forestières, parts de sociétés civiles à objet agricole donnant vocation à l’attribution en propriété ou en jouissance de biens agricoles ou forestiers, etc.).

Le paragraphe II traite de l’hypothèse où un immeuble sur lequel une SAFER était autorisée à exercer son droit de préemption est aliéné au profit d’un tiers, en violation de l’obligation d’information ci-dessus mentionnée : dans ce cas, la SAFER se voit reconnaître la possibilité, dans un délai de six mois à compter de la publication de l’acte de vente, de demander au tribunal de grande instance soit d’annuler la vente, soit de la déclarer acquéreur aux lieu et place du tiers.

● Les alinéas 15 à 25 portent sur la gouvernance des SAFER. Relativement succinctes, les dispositions actuelles de l’article L. 141-6 du code rural et de la pêche maritime se bornent aujourd’hui à poser les principes de l’agrément des SAFER par l’État, d’une part, et de la présence dans leur conseil d’administration de représentants des conseils régionaux, généraux et municipaux de leur zone d’action (un tiers au moins de leurs membres), d’autre part.

La nouvelle rédaction de cet article, proposée par le présent article 13, apparaît beaucoup plus claire et détaillée. Outre la réaffirmation du caractère régional ou interrégional des SAFER et de leur agrément par l’État, il est prévu que le conseil d’administration d’une SAFER sera désormais structuré en trois collèges : celui des chambres d’agriculture et des organisations professionnelles agricoles (en fonction de leur représentativité à l’échelle régionale), celui des collectivités territoriales et celui des autres partenaires (État, actionnaires, organisations agréées de protection de l’environnement). En outre, le conseil d’administration devra avoir une composition équilibrée entre les hommes et les femmes. Par ailleurs, un fonds de péréquation est institué, que chaque société abondera en fonction de ses moyens et dont la vocation est de rendre chacune d’entre elles moins tributaire de la situation du marché foncier qu’elle couvre. Ce fonds sera géré, au plan national, par une Fédération nationale des SAFER, selon des modalités à fixer par voie réglementaire.

● Les alinéas 26 à 32 modifient la rédaction de l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, relatif au droit de préemption reconnu au SAFER. Si l’économie générale du dispositif demeure inchangée, la nouvelle rédaction proposée modifie les dispositions existantes sur deux points :

– d’une part, la notion de « terrains à vocation agricole » est désormais explicitée : il s’agit des terrains situés dans une zone agricole protégée (article L. 112-2 du code rural et de la pêche maritime), des terrains situés à l’intérieur d’un périmètre spécifique (article L. 143-1 du code de l’urbanisme), des terrains situés dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière délimitée par un document d’urbanisme ou, en l’absence d’un document d’urbanisme, des terrains situés dans les secteurs ou parties non encore urbanisés des communes, à l’exclusion des bois et forêts ;

– d’autre part, alors que le droit de préemption pouvait jusqu’à présent s’exercer sur les bâtiments d’exploitation ayant conservé leur utilisation agricole, celui-ci est désormais étendu aux bâtiments d’exploitation qui ont été utilisés pour l’exercice d’une activité agricole au cours des cinq dernières années qui ont précédé l’aliénation. Inversement, il est précisé que le droit de préemption n’a alors vocation à être exercé que pour rendre un usage agricole à ces bâtiments.

En cas de méconnaissance des conditions d’exercice de son droit de préemption par une SAFER, celui-ci pourra lui être retiré pour une durée n’excédant pas trois ans.

● Les alinéas 33 à 38 opèrent des modifications de conséquence à l’article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime, relatif aux finalités susceptibles de justifier l’exercice de son droit de préemption par la SAFER. Ce droit pourra désormais être exercé au regard d’un objectif de consolidation des exploitations, afin de permettre à celles-ci d’atteindre une dimension économique viable, ou d’un objectif de protection de l’environnement, à travers notamment la mise en œuvre de pratiques agricoles adaptées.

● Les alinéas 39 à 41 aménagent le dispositif prévu à l’article L. 143-7 du code rural et de la pêche maritime. À l’heure actuelle, dans chaque département, lorsque la SAFER compétente a demandé l’attribution du droit de préemption, le préfet détermine les zones où se justifie l’octroi d’un droit de préemption et la superficie minimale à laquelle il est susceptible de s’appliquer ; dans les zones considérées, un décret vient ensuite autoriser l’exercice de ce droit et en fixe la durée.

La nouvelle rédaction proposée de l’article L. 143-7 précité simplifie les modalités d’octroi du droit de préemption. Ce dernier, au lieu d’être soumis à renouvellement tous les cinq ans, aurait un caractère permanent pour les SAFER agréées et seules les zones et la superficie des terrains sur lesquelles il s’exerce seront définies par décret, sur proposition du préfet de région. Toutefois, les modalités d’exercice de ce droit de préemption seront révisables à chaque renouvellement du plan pluriannuel d’activité de la SAFER.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CD49 du rapporteur pour avis et l’amendement CD163 de Mme Brigitte Allain.

M. le rapporteur pour avis. Mon amendement CD49 a pour objet d’intégrer les espaces forestiers dans le périmètre d’action des SAFER.

La Commission adopte l’amendement CD49.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En conséquence, l’amendement CD163 tombe.

La Commission examine l’amendement CD86 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) doivent rendre compte tous les deux ans au Conseil supérieur de la forêt et du bois de leurs activités spécifiques dans ce domaine.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD127 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de donner aux propriétaires forestiers voisins d’une parcelle forestière un droit de priorité lors de l’attribution de cette parcelle par les SAFER, afin de ne pas morceler encore le parcellaire forestier.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je soutiens cet excellent amendement.

La Commission adopte l’amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je regrette que l’absence de certains de nos collègues ne leur permette pas de soutenir leurs amendements. Ne sont ainsi pas défendus, à l’article 13 : les amendements CD20, CD24, CD25, CD37, CD38, CD26, CD8, CD27, CD28, CD61, CD165, CD166, CD29, CD167, CD30, CD168, CD79, CD31, CD169, CD33, CD34, CD32, CD62, CD71, CD67, CD63, CD73, CD64, CD81, CD70, CD171, CD174, CD69, CD172, CD77 et CD78.

La commission est ensuite saisie de l’amendement CD109 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Cet amendement vise à équilibrer la composition du conseil d’administration des SAFER.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable, car la question relève du droit des sociétés et il importe de préserver une certaine souplesse.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD110 de M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Dans la continuité de mon amendement CD109, cet amendement vise à faire en sorte que les représentants de l’État soient membres de droit du conseil d’administration.

M. le rapporteur pour avis. L’État siège dans le troisième collège au titre des parts qu’il détient par l’agence de paiement. Par ailleurs, il assiste aussi de droit au conseil, sans droit de vote. Cet amendement est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 ainsi modifié.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Les amendements CD76, CD174, CD176 et CD175 portant articles additionnels après l’article 13 ne sont pas défendus non plus.

TITRE III
POLITIQUE DE L’ALIMENTATION ET PERFORMANCE SANITAIRE

Dans un contexte de crise de confiance du consommateur quant à la qualité de son alimentation, mais également de crise économique qui fragilise certaines populations déjà vulnérables, le titre III regroupe une série de dispositions visant à mieux articuler la politique publique de l’alimentation et la performance sanitaire.

Article 17
(articles L. 111-5 et L. 230-1 du code rural et de la pêche maritime, L. 541-1 du code de la consommation et L. 3231-1 du code de la santé publique)

Renforcement et clarification de la politique de l’alimentation

Cet article ne comprend que des dispositions de cohérence, visant à adapter le code rural (articles L. 111-5 et L. 230-1) et de la pêche maritime, et le code de la consommation (article L. 541-1) aux objectifs et à l’organisation rénovés de la politique publique de l’alimentation, tels qu’ils résultent de l’article 1er du projet de loi.

Votre rapporteur pour avis estime qu’il n’appelle pas de commentaires particuliers.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 sans modification.

Article 18
(articles L. 201-2, L. 201-4, L. 201-7, L. 201-8, L. 221-5, L.223-4, L. 223-5, L. 223-6-2 [nouveau], et L. 223-8 du code rural et de la pêche maritime, L. 421-5, L. 425-1 et L. 425-2 du code de l’environnement)

Extension des mesures de police sanitaire aux animaux de la faune sauvage

Cet article comprend une série de dispositions modifiant le livre II du code rural et de la pêche maritime ainsi que le titre II du livre IV du code de l’environnement et qui sont relatives à la traçabilité des animaux et la gestion de la faune sauvage.

● Le paragraphe I (alinéas 1er à 29) introduit dans le code rural et de la pêche maritime des mesures particulières adaptées aux animaux de la faune sauvage et applicables, selon les cas, aux personnes exerçant ou organisant l’exercice du droit de chasse et aux titulaires du droit de chasser. Ainsi :

– l’article L. 201-2 est complété afin de soumettre les personnes qui exercent le droit de chasse ou qui en organisent l’exercice et les personnes titulaires du droit de chasser aux dispositions du livre II du code rural et de la pêche maritime, pour ce qui concerne la faune sauvage ;

–la rédaction de l’article L. 201-4, relatif aux mesures de prévention, de surveillance ou de lutte face aux dangers sanitaires, est modifiée, afin notamment de permettre à l’administration d’imposer des mesures particulières de contrôle adaptées à ces dangers et au caractère sauvage de certains animaux ;

–les dispositions des articles L. 201-7 et L. 201-8 font l’objet de modifications de cohérence ou de conséquence ;

–l’article L. 221-5 est complété afin d’habiliter les agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage à contrôler le respect des dispositions des chapitres Ier à V du titre II du livre II du code rural et de la pêche maritime intéressant la lutte contre les maladies des animaux de la faune sauvage, des textes réglementaires pris pour leur application et de la réglementation communautaire ayant le même objet ;

–l’article L. 223-4 est complété, afin d’imposer aux personnes qui exercent le droit de chasse ou qui en organisent l’exercice et aux personnes titulaires du droit de chasser, pour ce qui concerne la faune sauvage, de réaliser ou de faire réaliser les mesures destinées à la prévention, la surveillance et la lutte que la réglementation leur impose à l’égard des dangers sanitaires de première catégorie et des dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l’objet d’une réglementation – sous peine, en cas de carence ou de refus, d’une exécution d’office aux frais des intéressés par l’autorité administrative ;

–l’article L. 223-5 précise le détenteur de l’obligation d’informer le vétérinaire sanitaire, lorsqu’il est constaté qu’un animal sauvage est atteint – ou qu’il est soupçonné qu’il soit atteint – d’une maladie classée parmi les dangers sanitaires de première catégorie ou parmi les dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l’objet d’une réglementation ;

– l’article L. 223-6-2 nouveau dresse la liste des mesures prophylactiques susceptibles d’être décidées par l’administration pour prévenir les dangers sanitaires de première catégorie et les dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l’objet d’une réglementation : ordonner, sur toute propriété, des chasses et battues destinées à réduire des populations de la faune sauvage ; interdire, sur les territoires et pour la durée qu’elle détermine, le nourrissage d’animaux de la faune sauvage ; imposer à toute personne constatant la mort d’animaux de la faune sauvage, dans des conditions anormales laissant suspecter l’apparition de maladies, de le déclarer sans délai au maire ou à un vétérinaire sanitaire ;

–la rédaction de l’article L. 223-8, relatif à l’arrêté portant déclaration d’infection pris par le préfet après constatation de la présence d’une maladie classée parmi les dangers sanitaires de première catégorie ou parmi les dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l’objet d’une réglementation, est modifiée afin d’étendre la liste de ses mesures d’application. Il sera désormais possible au représentant de l’État d’imposer la limitation ou l’interdiction de la chasse, la modification des plans de chasse, de gestion cynégétique et de prélèvement maximal autorisé, la destruction ou le prélèvement d’animaux de la faune sauvage, ainsi que la désinfection, l’aménagement ou la mise en œuvre de modalités particulières d’entretien du couvert végétal et des zones fréquentées par la faune sauvage sensible.

● Le paragraphe II (alinéas 30 à 36) modifie, quant à lui, trois articles du code de l’environnement. C’est ainsi :

– que l’article L. 421-5 est complété, afin d’inclure dans les missions des fédérations départementales des chasseurs la surveillance et la prévention de la diffusion des dangers sanitaires impliquant la faune sauvage ;

– que l’article L. 425-1 est modifié, afin d’imposer au schéma départemental de gestion cynégétique mis en place dans chaque département de prendre en compte le schéma régional de maîtrise des risques sanitaires défini à l’article L. 201-12 du code rural et de la pêche maritime ;

– que l’article L. 425-2 est complété, afin de prévoir que le schéma départemental de gestion cynégétique comprendra obligatoirement des dispositions permettant de surveiller et de prévenir la diffusion de dangers sanitaires entre animaux sauvages, animaux domestiques et l’homme.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CD128 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le schéma départemental de gestion cynégétique devrait préciser les modes de calcul des minima des plans de chasse en tenant compte de la sensibilité des milieux concernés, alors que seule l’importance des populations d’animaux est aujourd’hui prise en compte. En effet, certains milieux peuvent supporter des populations plus importantes que d’autres.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il s’agit d’un très bon amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 18 ainsi modifié.

Article 20
(articles L. 5141-13-1, L. 5141-13-2, L. 5141-14-1 à L. 5141-14-5 [nouveaux], L. 5141-16, L. 5142-6, L. 5142-6-1, L. 5142-6-2, L. 5143-6, L. 5144-1, L. 5442-10, L. 5442-11 à L. 5442-14 [nouveaux] du code la santé publique)

Prévenir la consommation excessive d’antibiotiques

L’article 20 prévoit un ensemble de mesures destinées à limiter l’utilisation d’antibiotiques en médecine vétérinaire.

● Le paragraphe I (alinéas 1 à 50) modifie le livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique.

– Les articles L. 5141-13-1 et L. 5141-13-2 nouveaux visent à renforcer les obligations de transparence pesant sur les metteurs sur le marché de produits vétérinaires.

L’article L. 5141-13-1 interdit ainsi aux pharmaciens, aux vétérinaires, aux utilisateurs agréés, aux fabricants et aux distributeurs d’aliments médicamenteux de recevoir des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe, ou indirecte, procurés par les entreprises mentionnées à l’article L. 5142-1 (fabricants, importateurs, exportateurs et distributeurs en gros de médicaments vétérinaires). Des exceptions sont prévues pour le cas où ces avantages s’inscrivent dans le cadre de conventions de recherche ou de manifestations à caractère exclusivement scientifique et professionnel.

L’article L. 5141-13-2 impose, quant à lui, aux entreprises produisant ou commercialisant des médicaments vétérinaires ou assurant des prestations associées à ces produits de rendre publiques les conventions qu’elles concluent avec les principaux acteurs de la santé vétérinaire : vétérinaires, pharmaciens, groupements ou associations les représentant, établissements d’enseignement supérieur assurant la formation des vétérinaires et des pharmaciens, fondations, sociétés savantes, sociétés ou organismes de conseil, entreprises éditrices de presse, éditeurs de services de radio ou de télévision, éditeurs de logiciels d’aide à la prescription et à la délivrance du médicament, etc.

Par ailleurs, elles doivent informer le public bénéficiaire d’une formation ou d’un support de formation en application d’une telle convention de l’existence de cette convention et rendre publics, au-delà d’un seuil fixé par décret, tous les avantages en nature ou en espèces qu’elles procurent, directement ou indirectement.

– Les articles L. 5141-14-1 à L. 5141-14-5 nouveaux s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie de limitation de recours aux antibiotiques, en réponse au développement préoccupant des phénomènes d’antibiorésistance.

L’article L. 5141-14-1 prévoit que les metteurs sur le marché, les vétérinaires et les pharmaciens doivent déclarer à l’autorité administrative compétente les médicaments vétérinaires comportant une ou plusieurs substances antibiotiques qu’ils cèdent. Les fabricants et distributeurs d’aliments médicamenteux mentionnent en outre le vétérinaire prescripteur et les détenteurs d’animaux bénéficiaires.

L’article L. 5141-14-2 prohibe l’octroi de remises, rabais ou ristournes ou toute pratique équivalente à l’occasion de la vente de médicaments vétérinaires contenant une ou plusieurs substances antibiotiques. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution d’avantages sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces médicaments est également prohibée.

En vue de prévenir le développement des risques pour la santé humaine et animale liés à l’antibiorésistance, l’article L. 5141-14-3 prévoit que le recours en médecine vétérinaire à des médicaments contenant une ou plusieurs substances antibiotiques est effectué dans le respect de recommandations de bonne pratique d’emploi, établies sur proposition de l’Agence nationale de la sécurité de l’alimentation, de l’environnement et du travail et après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament par arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de la santé. Ces dispositions entrent en vigueur au plus tard le 31 décembre 2014.

L’article L. 5141-14-4 pose le principe d’interdiction de la délivrance, au détail, de médicaments vétérinaires comportant une ou plusieurs substances antibiotiques d’importance critique – médicaments dont l’efficacité doit être prioritairement préservée dans l’intérêt de la santé humaine et animale et dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de la santé – à un prix hors taxe supérieur à leur prix d’achat hors taxe augmenté d’un pourcentage défini par décret et égal au maximum à 15 %.

Quant à l’article L. 5141-14-5, il organise le régime des sanctions en cas de violation des interdictions mentionnées aux articles L. 5141-14-2 et L. 5141-14-4 présentés ci-dessus.

– L’article L. 5141-16 est modifié, afin de compléter la liste des dispositions qu’il appartiendra à un décret en Conseil d’État de préciser, le cas échéant ;

– L’article L. 5145-6 étend le pouvoir de sanction financière de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail au cas où des informations obligatoires sur les échanges de médicaments antibiotiques ne lui sont pas transmises ;

– Les articles L. 5142-6-1 et L. 5142-6-2 nouveaux visent à mieux encadrer les professions de démarcheur et de prospecteur pour des médicaments vétérinaires.

L’article L. 5142-6-1 impose aux personnes qui font de l’information par démarchage ou de la prospection pour des médicaments vétérinaires, y compris des aliments médicamenteux, de satisfaire à des conditions de qualification définies par décret, qui garantissent qu’elles possèdent des connaissances scientifiques suffisantes. Les employeurs de ces personnes sont tenus de veiller à l’actualisation des connaissances de celles-ci et de leur donner instruction de rapporter toutes les informations relatives à l’utilisation des médicaments vétérinaires, y compris des aliments médicamenteux, dont ils assurent la publicité.

Par dérogation aux dispositions ci-dessus, l’article L. 5142-6-2 autorise les professionnels actifs pendant au moins trois ans dans les dix années précédant la publication de la future loi à continuer cette activité, les autres professionnels en exercice devant opérer leur mise à niveau, le cas échéant, dans un délai de quatre ans.

– Les dispositions de l’article L. 5143-6 sont modifiées, afin d’exclure explicitement les substances antibiotiques de la liste des médicaments que les groupements reconnus de producteurs, les groupements professionnels agricoles et les groupements de défense sanitaire sont susceptibles d’acheter en gros et de détenir.

– Les modifications apportées à l’article L. 5144-1 visent à en préciser la rédaction.

● Le paragraphe II (alinéas 52 à 77) modifie plusieurs articles du livre IV de la cinquième partie du code de la santé publique, relatifs à la police d’une série d’infractions sanitaires.

– Dans le cadre d’une réécriture complète de l’article L. 5442-10, le régime des sanctions applicables est clarifié et unifié. C’est le cas pour ce qui concerne la prescription ou la délivrance de médicaments vétérinaires en méconnaissance des règles, le non-respect des obligations pesant sur un propriétaire ou un détenteur professionnel d’animaux ou la formation d’ententes (deux ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende). C’est le cas également en cas de violation des règles relatives à l’importation, la fabrication, l’acquisition, la détention, la délivrance, la vente ou la cession à titre gratuit des substances mentionnées à l’article L. 5144-1 (cinq ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende).

– L’article L. 5442-11 est remplacé par quatre articles nouveaux.

L’article L. 5442-11 définit le régime de sanction applicable en cas d’administration à un animal, dans des conditions irrégulières, d’un prémélange médicamenteux ou de délivrance d’un tel prémélange à une personne autre qu’un établissement autorisé ou un éleveur.

L’article L. 5442-12 prévoit la sanction des entreprises qui auraient proposé ou procuré des avantages, en nature ou en espèces, à des professionnels, à certains groupements, à des utilisateurs agréés, aux fabricants et aux distributeurs d’aliments médicamenteux ou aux associations qui les représentent. Il prévoit, de manière symétrique, la sanction des récipiendaires de tels avantages.

L’article L. 5442-13 soumet à une amende administrative le fait, pour les entreprises produisant ou commercialisant des médicaments vétérinaires ou assurant des prestations associées à ces produits, de ne pas rendre publiques les conventions mentionnées au I de l’article L. 5141-13-2 conclues avec les personnes, associations, établissements, fondations, sociétés et organismes mentionnés au I du même article, ainsi que les avantages qu’elles leur procurent.

Quant à l’article L. 5442-14, il prévoit les sanctions applicables en cas de fabrication, distribution, publicité, offre de vente, vente, importation ou exportation de médicaments falsifiés à usage vétérinaire.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CD22 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. L’article L. 5142-1 du code de la santé publique, qui crée un chapitre intitulé « Préparation industrielle et vente en gros », ne donne pas de liste des entreprises concernées. Cette liste est établie par un autre article du même code : on y retrouve quatorze types d’établissements pharmaceutiques, parmi lesquels les fabricants et les distributeurs d’aliments médicamenteux.

Le fait de contraindre les fabricants et les distributeurs d’aliments à mentionner le vétérinaire prescripteur les place dans un rôle qui n’est pas le leur, car ils ne sont responsables ni de la prescription ni du choix par l’éleveur du vétérinaire prescripteur, ce qui introduit une inégalité de traitement par rapport aux autres établissements pharmaceutiques vétérinaires et s’éloigne en outre du principe de co-construction défini par le plan Écoantibio 2017. L’amendement propose donc que les modalités pratiques de la déclaration prévue par cet article soient définies par arrêté du ministre chargé de l’agriculture en concertation avec les organisations professionnelles concernées.

M. le rapporteur pour avis. L’article 20, qui renforce l’antibiovigilance, est très sensible. Il n’y a pas lieu de supprimer le vétérinaire prescripteur, qui apporte une garantie en matière de prescription. Je suis donc très réservé sur cet amendement.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement est notamment défendu par les coopérateurs, qui font valoir que les contraintes de remontée d’information sur la consommation d’antibiotiques prévues par le projet de loi ne respectent pas les contraintes des professionnels, qu’il s’agisse des fabricants d’aliments ou des groupements de producteurs. Ces remontées d’information sont en outre déjà prévues dans le cadre du plan Écoantibio.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD23 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. La rédaction de l’article ne traduit pas le fait que, selon le plan Écoantibio, tout animal traité avec des antibiotiques est potentiellement vecteur d’antibiorésistance, qu’il soit ou non destiné à la consommation humaine. Elle ne reprend pas non plus l’engagement des parties prenantes pour la conception et la mise en œuvre du dispositif, prévu également par ce plan. Or seule une responsabilisation positive peut garantir l’efficacité du plan. L’amendement propose donc de préciser que les modalités pratiques de la déclaration soient définies par arrêté du ministre chargé de l’agriculture en concertation avec les organisations professionnelles concernées.

M. le rapporteur pour avis. Un décret est déjà prévu à cet effet. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD21 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement se situe lui aussi dans le contexte d’une utilisation raisonnée des antibiotiques et de la lutte contre l’antibiorésistance. La vente du médicament vétérinaire relève de trois ayants droit : les vétérinaires, les pharmaciens et les groupements de producteurs. Or le projet de loi interdit cette vente aux seuls groupements de producteurs. La mesure, qui se résume à un transfert de marché vers les vétérinaires et les pharmaciens, sans viser l’efficacité en matière d’antibiorésistance, semble injuste et contre-productive. La prescription relevant du vétérinaire, pourquoi écarter de la vente un acteur proche du terrain ? En outre, la vente est contrôlée, car le groupement ne peut vendre qu’à ses adhérents. L’amendement, porté par tout le secteur de la coopération agricole, propose donc de supprimer l’alinéa 48.

M. le rapporteur pour avis. Je confirme que le Gouvernement et moi-même sommes déterminés à lutter contre l’antibiorésistance en général. Les groupements de producteurs pourront continuer d’utiliser des médicaments dans le cadre des plans sanitaires d’élevage, mais pas les antibiotiques, car le risque est trop grand que leur usage trop large provoque des antibiorésistances. Du reste, ce risque existe déjà, car un antibiotique critique figure actuellement sur la liste des médicaments qui peuvent être diffusés par les groupements. Avis défavorable.

M. Guillaume Chevrollier. Les agriculteurs et les professionnels qui les entourent, notamment les vétérinaires, partagent le souci de lutter contre l’antibiorésistance. Une disposition interdisant aux vétérinaires de prescrire les antibiotiques critiques, qui figurait dans l’avant-projet de loi, a été retirée, ce qui est une bonne chose, car il faut faire confiance aux professionnels – les vétérinaires sont en effet bien formés et savent prescrire et vendre dans une démarche responsable.

M. le rapporteur pour avis. La suppression de la disposition que vous évoquez répond aux difficultés rencontrées en zone rurale, notamment dans les élevages bovins : en cas de césarienne pratiquée de nuit, par exemple, il serait irréaliste d’exiger d’aller chercher le médicament requis ailleurs que dans la trousse du vétérinaire qui peut à la fois le prescrire et l’administrer. Il n’en faut pas moins renforcer, même chez des vétérinaires très compétents, la préoccupation de l’antibiorésistance, qui met en danger les éleveurs eux-mêmes. Une même ligne pragmatique et efficace s’impose donc à tous pour éviter les catastrophes sanitaires.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

Article 21
(articles L. 251-8, L. 251-9, L. 253-5, L. 253-8-1 [nouveau], L. 253-14, L. 253-16 du code rural et de la pêche maritime, article 38 du code des douanes)

Prévention de la consommation excessive de produits phytosanitaires

L’article 21 du projet de loi s’attache à la lutte contre les organismes nuisibles à la santé des végétaux. Il contient diverses dispositions porteuses de simplification de la législation et d’une meilleure efficacité de l’action publique dans la gestion des risques dans ce domaine.

L’alinéa 3 supprime ainsi la double condition d’arrêté préfectoral suivi d’une validation par arrêté ministériel pour la mise en œuvre des mesures de lutte contre les organismes nuisibles.

Les alinéas 7 à 13 édifient un système de pharmacovigilance des produits phytosanitaires. Pour l’heure, l’innocuité des pesticides sur la santé humaine et sur l’environnement fait l’objet d’une étude ex ante dont les résultats fondent la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Or, une évaluation a posteriori s’impose : d’une part, avec le progrès des connaissances technologiques, de nouveaux tests pourraient conclure à la dangerosité d’un produit auparavant jugé sans danger et précipiter un retrait de son autorisation, et d’autre part, il est possible que des substances inoffensives à court terme produisent en réalité des effets gravement préjudiciables à long terme.

Deux types d’évaluation ex post coexistent pour l’heure dans le droit français. Le premier type regroupe les études demandées aux entreprises commercialisant les pesticides concernés afin de vérifier que les substances en cause satisfont toujours aux exigences de la puissance publique. L’article R. 235-5 du code rural et de la pêche maritime permet alors le retrait de l’autorisation, conformément aux dispositions du droit de l’Union européenne, qui prévoit également une communication immédiate aux autorités sanitaires de toute détection d’effet indésirable. Quant à la seconde forme de suivi post-AMM, elle est plus généraliste dans la mesure où elle résulte des réseaux de surveillance organisé autour d’une matière (eau, air) ou d’un écosystème (faune, flore, santé humaine)

Le suivi des AMM se heurte cependant à un écueil d’importance : aucune autorité administrative n’est chargée du système de pharmacovigilance, ouvrant la porte à des enchevêtrements de compétences entre différents départements ministériels et, le cas échéant, à une mise en commun insuffisante des informations sur les effets des produits phytopharmaceutiques autorisés.

Le projet de loi rectifie cette situation en préfigurant la désignation d’une autorité nationale de phytopharmacovigilance. Il prévoit également que les retours d’expérience sur l’usage des produits phytopharmaceutiques sont transmis par les titulaires des AMM ainsi que par tout maillon de la chaîne de commercialisation constatant une anomalie.

Les alinéas 5, 6 et 17 réduisent les possibilités d’une communication publicitaire autour des produits phytosanitaires pour limiter leur usage excessif et, partant, leurs effets sur l’environnement et sur la santé publique. La loi dite Grenelle II du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement avait déjà inscrit dans le code rural et de la pêche maritime l’interdiction de la publicité télévisée, radiodiffusée et affichée à destination du grand public hors des points de distribution (article L. 253-5).

Avec le projet de loi, toute communication publicitaire en direction du grand public, par quelque moyen que ce soit, sera sanctionnée. Seules demeurent autorisées les publicités dans les points de distribution et les publications de la presse professionnelle agricole, considérées par le Gouvernement comme une voie de diffusion des bonnes pratiques et des règles de l’art, ainsi que les messages en faveur des « agents et produits qui utilisent des dispositifs naturels dans le cadre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures », communément désignés sous le nom de produits de biocontrôle.

L’alinéa 18, enfin, insère les produits phytopharmaceutiques dans la liste figurant à l’article 38 du code des douanes, qui prescrit que « lorsque l’importation ou l’exportation n’est permise que sur présentation d’une autorisation, licence, certificat, etc., la marchandise est prohibée si elle n’est pas accompagnée d’un titre régulier ou si elle est présentée sous le couvert d’un titre non applicable ». Les agents des services douaniers seront habilités à contrôler l’importation des produits phytopharmaceutiques en France afin de prévenir l’introduction frauduleuse de substances phytopharmaceutiques interdites par la réglementation nationale.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 sans modification.

Article 22
(articles L. 1313-1, L. 1313-2 et L. 1313-5 du code de la santé publique)

Transfert à l’ANSES de la compétence de délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires et des matières fertilisantes

À l’instar du modèle d’autorisation du médicament vétérinaire et du médicament humain, l’article 22 confère à l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) la mission de délivrer les autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et des matières fertilisantes. L’octroi de ces autorisations est aujourd’hui une prérogative du ministère chargé de l’agriculture sur le fondement de l’article R. 253-1 du code rural et de la pêche maritime : « le ministre chargé de l’agriculture est, sauf disposition contraire, l’autorité compétente mentionnée au 1 de l’article 75 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/ CEE et 91/414/ CEE du Conseil, ainsi que l’autorité administrative mentionnée au chapitre III du titre V du livre II du présent code (partie législative). » Depuis 2004, le ministère chargé de l’agriculture bénéficie de l’expertise scientifique de l’ANSES dont il exerce la tutelle conjointement avec les ministères chargés de la consommation, de l’environnement, de la santé et du travail : l’avis scientifique est formulé sur la base du dossier constitué par le demandeur.

La compétence de gestion des ministères demeurera sur la définition des risques acceptables, sur l’approbation des substances actives au niveau communautaire, sur les contrôles réalisés en production primaire et chez les distributeurs et sur la politique publique de réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques – plan Écophyto. Par ailleurs, l’article L. 253-7 permet de prendre toute mesure d’interdiction ou de restriction d’usage d’un produit phytopharmaceutique en cas de risque pour l’environnement ou pour la santé publique. Outre l’évidente simplification qui résulterait du transfert de la compétence de délivrance des AMM, le Gouvernement a avancé divers arguments pour en justifier le principe.

En premier lieu, l’expérience montrerait le faible intérêt de l’architecture institutionnelle actuelle dès lors que le transfert de l’évaluation à l’ANSES, puis le renforcement des lignes directrices pour l’évaluation par l’Union européenne en 2009, ont réduit à la portion congrue la latitude de décision de l’autorité administrative. Bien que l’avis formulé par l’ANSES demeure indicatif, nul n’envisage que le ministère puisse s’en distancier sans susciter une action contentieuse du demandeur dans un cas, des associations environnementales de l’autre, alors même qu’il ne dispose pas des compétences scientifiques nécessaires à une lecture critique de l’expertise qui lui est apporté.

En second lieu, les auditions que votre rapporteur pour avis a menées ont révélé le coût significatif de l’architecture actuelle : si celui-ci reste modéré en termes budgétaires, comme moins de trois emplois temps-pleins sont affectés à la délivrance des AMM au sein du ministère, il se traduit par un retard systématique dans l’instruction administrative des dossiers et dans l’attribution du précieux sésame.

En troisième lieu, le Gouvernement a indiqué avoir sollicité une mission interministérielle pour examiner les modalités pratiques du transfert à l’ANSES des compétences en matière de délivrance des AMM. En effet, celui-ci ne doit pas remettre en cause la séparation stricte des activités d’expertise scientifique et de décision administrative, à peine de générer des conflits d’intérêts aux conséquences forcément néfastes sur la bonne marche de l’agriculture et de l’industrie. L’impartialité et la compétence de l’ANSES sont aujourd’hui reconnues ; elles doivent être préservées. Sans doute conviendra-t-il de dresser au sein même de l’Agence une ligne de partage entre les différentes missions exercées, par la constitution d’une commission ad hoc sur le modèle de l’agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV), qui fonctionne déjà au sein de l’ANSES. La question des moyens, alors, ne pourra être éludée.

Très critique dans sa première approche de cette disposition, votre rapporteur pour avis s’est néanmoins laissé convaincre de son bien-fondé dès lors qu’une nouvelle organisation de l’ANSES était décidée consécutivement au transfert de compétence. Il reste que la responsabilité politique doit appartenir aux dirigeants politiques, responsables de leurs choix devant la représentation nationale. Le rôle de la commission du développement durable dans la supervision et le contrôle des actions de l’ANSES devra s’en trouver singulièrement renforcé.

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La Commission est saisie de l’amendement CD54 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. L’article 22 vise à transférer à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) la compétence, actuellement dévolue au ministère de l’agriculture, de la délivrance des autorisations de mise sur le marché des phytopharmaceutiques, des matières fertilisantes et des supports de culture.

La majorité des représentants de la société civile ont manifesté leur vive opposition à ce projet, invoquant la remise en cause du principe de séparation entre l’évaluation et la gestion, qui avait été l’un des fondements de la création de l’ANSES et l’une des garanties de son indépendance. Trois ans après sa création par la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET), l’ANSES est aujourd’hui une institution qui a su se faire respecter. Toutefois, confrontée à une réduction de ses effectifs, elle ne dispose pas des compétences lui permettant la délivrance de ces autorisations et pourrait être suspectée d’être juge et partie. Une solution aurait pu consister à encadrer très clairement cette délivrance, notamment en y associant les acteurs de la société civile, afin d’éviter à la direction de l’ANSES des embarras qui pourraient aller jusqu’à des condamnations en cas d’autorisations non conformes à ses analyses.

On comprend que le ministère de l’agriculture, confronté à une diminution de ses moyens, soit tenté de transférer cette compétence à l’ANSES, mais ce transfert pose un vrai problème. Mieux vaudrait supprimer l’article 22. À défaut, il faut nous indiquer comment l’autorisation de mise sur le marché sera encadrée.

M. le rapporteur pour avis. Aujourd’hui, pour décider de la mise sur le marché d’un produit, l’administration se fonde sur un avis de l’ANSES qui n’est pas forcément prescriptif. Le Gouvernement propose donc de conférer à cet organisme la compétence de définir le risque d’une mise sur le marché.

Tout en m’opposant à la suppression de l’article 22, je suis sensible à l’idée qu’une décision pourrait relever de l’autorité de l’État. On pourrait ainsi envisager que l’ANSES formule, au terme d’une étude scientifique, un avis prescriptif sur la base duquel l’administration prendrait une décision en connaissance de cause et assumerait, le cas échéant, le risque politique d’aller à l’encontre de cet avis. Je suis néanmoins défavorable à l’amendement.

M. Bertrand Pancher. Je n’insisterais pas autant pour la suppression de cet article si n’avait pas été déclaré irrecevable un amendement que j’ai proposé en vue d’encadrer le fonctionnement de l’ANSES. Je m’étonne que le Gouvernement n’ait pas prévu de disposition en ce sens et je recommande vivement qu’il le fasse, car l’ANSES va rencontrer des difficultés considérables : on lui reprochera forcément d’être à la fois juge et partie.

M. le rapporteur pour avis. L’amendement auquel vous faites allusion a été déclaré irrecevable parce qu’il créait une nouvelle charge publique. Il s’agissait cependant d’un amendement d’appel qui ouvrait une piste intéressante. Je maintiens mon avis défavorable, tout en espérant que le débat au sein de la commission des affaires économiques permettra d’évoquer la délivrance des autorisations.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 sans modification.

Article 23
(articles L. 254-1, L. 254-3-1, L. 254-6, L. 254-6-1 [nouveau], L. 254-7, L. 254-10, L. 258-1 du code rural et de la pêche maritime)

Réglementation de l’activité de conseil et mise en place d’un suivi des produits phytopharmaceutiques

L’article 23 du projet de loi poursuit trois objectifs : faciliter la diffusion des produits de biocontrôle, instituer un mécanisme de suivi de la distribution des produits phytopharmaceutiques, élargir les conditions d’entrée sur le territoire de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux.

Les alinéas 2 à 4 mettent fin à l’obligation de détenir un agrément pour l’application des produits phytosanitaires en qualité de prestataire de services pour des produits de biocontrôle. Ils créent ainsi une dérogation aux prescriptions de l’article L. 254-1 du code rural et de la pêche maritime selon lesquelles cet agrément est impératif pour les activités de mise en vente, de vente ou de distribution à titre gratuit des produits phytopharmaceutiques, d’application de ces produits en qualité de prestataire de services et de de conseil à leur utilisation. Par ailleurs, l’alinéa 6 oblige professionnels agrémentés à concourir au respect des objectifs du plan Écophyto  pour une utilisation durable des produits phytopharmaceutiques, défini à l’article L. 253-6 du même code. Enfin, les alinéas 12 à 19 imposent qu’un conseil sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques accompagne leur vente ou leur distribution.

Le dispositif institué par les alinéas 7 à 11 permet un suivi des produits phytopharmaceutiques sur l’ensemble de la chaîne de distribution. Le consommateur professionnel consigne dans un registre les produits utilisés et leur quantité, les numéros de lot et dates de fabrication. La même prescription s’applique aux vendeurs et aux détenteurs de l’AMM.

Les alinéas 21 et 22 étendent les conditions d’introduction de macro-organismes non indigènes utiles aux végétaux sur le territoire national définies par les articles L. 258-1 et L. 258-2 du code rural et de la pêche maritime. Le droit positif prévoit que les travaux réalisés à des fins scientifiques bénéficient d’une dérogation sous réserve du confinement des activités. Cette limitation aux seules activités scientifiques ne se justifie guère dès lors que ce sont les conditions dans lesquelles sont conduites les travaux – le confinement – qui garantissent l’innocuité et non le but poursuivi – fût-il particulièrement noble. Les entreprises désirant développer des macro-organismes préalablement à leur mise sur le marché seront donc autorisées à le faire sans formalité préalable.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 23 sans modification.

TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORÊT

Article 28
Ratification de l’ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012 relative à la partie législative du code forestier

L’article 28 ratifie l’ordonnance n° 2012-92, prise par le Gouvernement en application de l’habilitation délivrée par l’article 69 de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010. Par ailleurs, l’article 30 de la loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010 relative au département de Mayotte a autorisé le Gouvernement à étendre à Mayotte des dispositions de nature législative concernant la forêt, la départementalisation mettant un terme au régime spécifique applicable auparavant.

La structure du nouveau code forestier apparaît plus claire et plus ramassée – trois livres contre six dans la précédente version. Le livre Ier comprend les dispositions communes à tous les bois et forêts, sans préjudice de leur régime de propriété ; le livre II détaille les aspects spécifiques du régime forestier ; le livre III rassemble les prescriptions applicables à la forêt privée.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 28 sans modification.

Article 29
(article L. 112-1, L. 113-1, L. 113-2, L. 121-2, L. 125-1, L. 121-1 nouveau, L. 121-2-2 nouveau, L. 122-1, L. 122-2, L. 122-6, L. 312-1, L. 122-2, L. 123-2, L. 122-12, L. 122 13, L. 122-14, L. 122-15, L. 123-1, L. 125-1, L. 125-2, L. 133-3, L. 152-1, L. 153 1, L. 153-1-1 nouveau, L. 153-1-2 nouveau, L. 154-2, L. 156-4 nouveau du code forestier, art. L. 126-1, L. 632-1-2 du code rural et de la pêche maritime, art. L. 414-8, L. 425-1, L. 425-4 et L. 425-12 du code de l’environnement)

Objectifs, gouvernance et financement de la politique forestière

L’article 29 fait évoluer les objectifs, la gouvernance et le financement de la politique forestière nationale. La France connaît en effet un paradoxe inquiétant : troisième pays de l’Union européenne par sa superficie forestière (16 millions d’hectares sur le territoire métropolitain sans même évoquer l’immense forêt amazonienne de Guyane qui porte ce total à 24 millions d’hectares), elle ne parvient pas à convertir cette ressource naturelle en filière économique compétitive à l’échelle internationale.

La forêt française se heurte à un morcellement hérité de l’histoire, que les différents mécanismes incitatifs mis en œuvre au cours des dernières années ne sont pas parvenus à endiguer. Les surfaces boisées se répartissent entre 3,3 millions de propriétaires, 11 000 communes forestières et l’État. Les forêts domaniales (9,5 %) et des collectivités territoriales (15,5 %), gérées par l’Office national des forêts dans le cadre du régime forestier, représentent à peine un quart de la superficie métropolitaine. Les trois quarts restants appartiennent à des propriétaires privés, dont les deux tiers détiennent moins d’un hectare.

La forêt française produit chaque année 85 millions de m3 de bois « fort tige » alors que les prélèvements annuels estimés se limitent à moins de la moitié de cet accroissement - hors chablis liés aux tempêtes. La faiblesse du prélèvement s’explique par la difficulté d’accès et d’exploitation de certaines forêts tout autant que par une exploitation insuffisante liée à un investissement financier et pratique sous-dimensionné. Les entreprises de la filière peinent à mobiliser la matière première pour répondre à une demande pourtant croissante tant en bois matériau qu’en bois énergie. Le tiers de la demande en sciages pour le bâtiment est satisfait par des produits d’importation.

Les alinéas 1 à 6 redéfinissent les fonctions d’intérêt général accomplies par la forêt française. Si ces dispositions peuvent sembler déclaratives, elles expriment aussi la reconnaissance de la nation envers les propriétaires et les gestionnaires forestiers pour leur contribution au bien commun. Sans doute serait-il pertinent, à l’avenir, d’établir un lien entre ces fonctions d’intérêt général et les mécanismes de financement de l’intervention publique en matière forestière.

Les alinéas 14 à 30 instituent le programme national de la forêt et du bois et ses déclinaisons en région. Ce programme national décennal formera la base de la politique forestière dans le respect des engagements internationaux de la France, en définissant les objectifs d’évolution et les indicateurs permettant d’évaluer leur bon achèvement. Les programmes régionaux de la forêt et du bois (PRFB) se substituent aux orientations régionales forestières (ORF) et au plan pluriannuel régional de développement forestier (PPRDF), pour transcrire une stratégie de développement de l’ensemble de la filière forêt bois notamment par la fixation des critères relatifs à l’équilibre sylvo-cynégétique. La dénomination du Conseil supérieur et des commissions régionales est harmonisée avec l’intitulé du programme national de la forêt et du bois.

Les alinéas 31 à 40 sont relatifs à la conservation des ressources génétiques forestières, sujet qui est abordé dans l’actuel code forestier sous l’angle limité du commerce des matériels forestiers de reproduction. La transcription dans le droit national des stipulations du protocole de Nagoya, signé par la France en 2011, permet l’accès des chercheurs aux ressources génétiques forestières ainsi que le partage des avantages découlant de leur utilisation en recherche et développement.

Les alinéas 42 à 45 posent le principe de la création du Fonds stratégique de la forêt et du bois, dont ils déterminent l’objet en renvoyant à un décret la fixation des règles de gouvernance et d’éligibilité. Depuis la disparition du Fonds forestier national en 1999, la France ne dispose plus d’un instrument spécifique pour financer les investissements en forêt. Tant les interprofessions que votre rapporteur pour avis, dans l’étude qu’il a effectuée pour le compte du Gouvernement, ont réclamé la reconstitution d’un mécanisme propre à mobiliser des financements publics au bénéfice de la politique forestière. Cette disposition a été saluée tout au long des auditions préparatoires à l’examen du projet de loi. Conformément à la loi organique relative aux lois de finances, ses dotations seront précisées à l’occasion d’une prochaine loi de finances, mais l’étude d’impact fait mention d’une subvention de 13,7 millions d’euros pour 2014 et d’un budget total de 32 millions d’euros une fois affectées les indemnités de défrichement.

Enfin, les alinéas 46 à 53 procèdent à diverses coordinations entre le code de l’environnement et le code rural et de la pêche maritime.

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La Commission examine l’amendement CD9 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à ce que l’intérêt général relatif à la gestion des forêts et à l’utilisation des ressources forestières soit suffisamment explicité dans la loi. Sa rédaction est plus précise que celle du projet de loi.

M. le rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable, non pas sur le fond, mais parce que l’expression « gestion durable » s’entend clairement dans le code forestier comme une gestion cherchant à optimiser les différentes productions forestières. Je comprends votre intention, cher collègue, mais elle ne me paraît pas nécessaire, d’autant plus que nous avons déjà adopté un amendement sur l’utilisation des ressources nationales. Votre amendement s’avère donc satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD87 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de faire figurer, parmi les fonctions d’intérêt général de l’espace forestier, la protection de la ressource en eau dans le cadre d’une gestion durable. Si vous dressez les cartes de la qualité de l’eau, de son prix et des zones forestières, vous apercevrez de larges similitudes qui ne sont pas toutes dues au hasard.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD88 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit de reconnaître une aménité classique de la forêt : la protection des sols dans le cadre d’une gestion durable.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD129 du rapporteur pour avis et CD17 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. Le projet de loi confère une reconnaissance d’intérêt général à la fixation du dioxyde de carbone et au stockage du carbone dans les bois et les forêts ; cet amendement a pour objet d’ajouter les mots « contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique » afin de rendre plus claire l’intention du législateur. Comme le caractère d’intérêt général permettra le retour d’un certain nombre de produits du marché du carbone vers la forêt, il convient de préciser que c’est au motif de la lutte contre le changement climatique que cette fonction est reconnue.

M. Bertrand Pancher. Nous souhaitons expliciter dans la loi l’intérêt général relatif à la gestion des forêts et à l’utilisation des ressources forestières en insérant dans le texte les mots « contribuant ainsi à l’équilibre écologique du territoire ».

Mme Sophie Errante. Je souhaiterais rappeler que notre territoire comprend une forêt mondiale majeure, l’Amazonie, située en partie en Guyane.

M. le rapporteur pour avis. Le terme « territoire » présent dans l’amendement CD17 me semble malvenu dans la mesure où le changement climatique constitue un enjeu global. Je vous suggère de retirer votre proposition pour vous rallier à l’expression « lutte contre le changement climatique » qui concerne l’ensemble du territoire national, et au-delà.

L’amendement CD17 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD129.

Puis elle étudie l’amendement CD89 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Lorsqu’il se prononce sur des questions ayant une incidence sur les productions forestières, le CSO invite un représentant du Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSF) à se prononcer à titre consultatif. Cet amendement propose d’instituer une réciprocité : si le CSF est amené à traiter d’un sujet lié à l’espace agricole, il convie de même le CSO à participer à ses travaux à titre consultatif.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement CD124 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. La rédaction proposée par l’amendement permettrait d’asseoir la manière dont les différentes aménités peuvent constituer des ressources pour la forêt.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD90 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le projet de loi institue un programme national de la forêt et du bois (PNFB) qui fixe les grandes orientations de la politique forestière. Il m’est apparu nécessaire de fixer une durée maximale de dix ans à ce programme : sans limite temporelle, on le considère comme éternel alors qu’il pourrait devenir obsolète par rapport aux préoccupations économiques, sociales ou environnementales, et, avec une durée trop courte, il pourrait souffrir d’instabilité.

La Commission adopte l’amendement.

Elle étudie l’amendement CD142 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à compléter les informations dont le PNFB doit assurer le partage ; celles-ci ne doivent pas se limiter aux enjeux économiques associés à la forêt et à ses produits, mais aussi traiter ses implications écologiques et sociales. Il convient donc que le PNFB évoque la production d’aménités ainsi que l’évaluation des modalités de leur rémunération.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD92 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit de prévoir pour les programmes régionaux de la forêt et du bois (PRFB) la même durée maximale de dix ans que pour le PNFB.

La Commission adopte l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement CD143 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet d’indiquer que les priorités économiques, environnementales et sociales des PRFB sont déterminées par massif, car une même région peut abriter plusieurs massifs forestiers aux spécificités tout à fait différentes.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD94, CD96 et CD97 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les propriétaires forestiers publics et privés cherchent à bénéficier d’une sécurité dans leur document d’aménagement – aménagement forestier pour les premiers et plan simple de gestion pour les seconds. Ils se plaignent des contraintes réglementaires imprévues qui, dues au droit de l’urbanisme, ont un impact sur leur plan de gestion, dont l’équilibre est prévu pour une dizaine d’années. L’amendement CD94 dispose que, une fois en vigueur, les documents de gestion ne doivent plus être modifiés du fait d’évolutions réglementaires. Si vous êtes d’accord pour le retenir, je retire les amendements de repli CD96 et CD97 que je déposerai en nom propre devant la commission des affaires économiques.

Les amendements CD96 et CD97 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD94.

Puis elle étudie l’amendement CD144 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit d’indiquer que les associations impliquées dans l’élaboration et la mise en œuvre des objectifs poursuivis par les stratégies locales de développement forestier regroupent des usagers de la forêt et ont pour vocation la protection de l’environnement. Ces deux conditions doivent être nécessaires et non plus suffisantes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CD119 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement technique vise à lutter contre les occupations illégales du secteur forestier. Certains opérateurs font traverser des bois et des forêts par leurs ouvrages, en s’abstenant de demander les autorisations nécessaires ou d’obtenir une déclaration d’utilité publique. Une sanction sera prévue pour cette occupation sans titre, afin que ce passage soit justement indemnisé.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD10 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à bien définir les rôles du fonds stratégique de la forêt et du bois et à mentionner la nécessaire rémunération des services environnementaux rendus par la forêt et le bois ou, à défaut, la compensation par des contributions financières fléchées vers l’investissement dans la filière. Les représentants des propriétaires forestiers privés soutiennent cette proposition.

M. le rapporteur pour avis. Je suis favorable à l’esprit de l’amendement et je suggère à son auteur de s’associer à la rédaction que je propose à l’amendement CD130, très proche.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte alors l’amendement CD130 du rapporteur pour avis.

Puis elle aborde l’amendement CD118 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de préciser que les investissements dont il est question à l’alinéa 44 sont prioritairement réalisés en forêt. Dans la mesure où l’aval de la filière se trouve pris en compte par les stratégies industrielles et bénéficie de l’action de la Banque publique d’investissement (BPI) et des investissements d’avenir, il est logique que l’orientation du fonds stratégique de la forêt et du bois, tout au moins à sa naissance, soit tournée prioritairement – mais non exclusivement – vers les investissements en forêt.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD99 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est ainsi rédigé : « Les mécanismes d’abondement du fonds stratégique de la forêt et du bois intègrent les fonctions d’intérêt général de la forêt reconnues à l’article L. 112-1. » Je crois que chacun comprendra, à la lumière de mes précédentes interventions, la raison de cette rédaction.

La Commission adopte l’amendement.

Elle étudie ensuite l’amendement CD117 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit d’intégrer l’Office national des forêts (ONF) dans la liste des organismes institutionnels auxquels le code de l’environnement accorde le pouvoir d’obtenir réparation des préjudices subis du fait des infractions en matière environnementale portant atteinte aux intérêts qu’ils ont pour mission de défendre.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD121 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Même objectif, cette fois pour permettre à l’ONF de participer à l’action des pouvoirs publics en matière de protection de l’environnement ou de gestion de l’espace rural.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement CD120 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. La politique conduite envers la faune sauvage et les grands cervidés n’a pas pour unique objectif de gérer la population de ces animaux, mais également de s’occuper de la sensibilité des milieux, des habitats et de leurs évolutions.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CD141 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les dispositions du PLU qui déterminent le classement d’espaces boisés doivent définir les zones dans lesquelles les prescriptions sont celles de l’article L. 130-1 du code de l’urbanisme. Cet amendement permet une simplification bienvenue de la procédure.

La Commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 29 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 29
Caractère intégrateur des documents forestiers

Le conseil d’administration de l’ONF a demandé dans une résolution de juin 2013 « que l’aménagement forestier soit reconnu comme document unique, intégrant les enjeux environnementaux, dans le cadre des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement. » Les dispositions des articles L. 122-7 et L. 122-8 du code forestier seraient utilement rénovées en ce sens pour les forêts relevant du régime forestier. Actuellement, un aménagement peut être approuvé soit au titre du seul code forestier, soit au titre du code forestier et des législations pertinentes énumérées à l’article L. 122-8. Dans le premier cas, si une des législations listées s’applique dans la forêt aménagée, la procédure d’autorisation est à conduire  pour chaque coupe ou opération à réaliser : l’absence de réponse des services compétents vaut alors refus. Dans le second cas, seules de nouvelles dispositions intervenues après l’approbation de l’aménagement sont susceptibles de s’appliquer, ce qui réduit les procédures.

Le présent amendement vise à supprimer l’approbation explicite de différents services pour un aménagement forestier et à la remplacer par une approbation globale au titre de l’ensemble des législations énumérées à l’article L. 122-8 en créant un article L. 122-8-1 qui fait du document d’aménagement des forêts le seul règlement applicable pour cette forêt. Le préfet de région serait décisionnaire pour l’ensemble des administrations déconcentrées. Deux procédures séparées sont imaginées afin de respecter les droits de l’État, propriétaire des forêts domaniales, qui formulerait dans ce cas un avis conforme à travers le ministre chargé des forêts.

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La Commission examine l’amendement CD125 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement technique poursuit un objectif simple : quand on étudie un aménagement dans une forêt publique, il convient de prendre en compte l’ensemble des prescriptions relevant d’autres réglementations, afin de disposer d’un document unique, à l’image du PLU.

La Commission adopte l’amendement.

Article 30
(articles L. 122-2, L. 122-7, L. 124-3, L. 124-1, L. 124-2, L. 143-2, L. 213-1, L. 213-1-1, L. 214-13, L. 214-14, L. 332-7, L. 332-8, L. 313-3, L. 321-1, L. 331-19, L. 341-6 du code forestier)

Défrichements, groupements d’intérêt économique et environnemental forestier, diverses dispositions relatives à la forêt

L’article 30 du projet de loi procède à la refonte des documents d’aménagement forestier en supprimant les codes de bonnes pratiques sylvicoles destinés aux plus petites parcelles, et en créant une nouvelle modalité de gestion destinée à remédier aux effets de l’éclatement de la propriété forestière, le groupement d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF). Il revoit également les conditions de la compensation des défrichements.

● Les alinéas 1 à 6 suppriment du code forestier les dispositions relatives au code des bonnes pratiques sylvicoles (CBPS). Document élaboré par le CRPF en conformité avec le schéma régional de gestion sylvicole et approuvé par le préfet de région, il présente les recommandations générales qui permettent la gestion durable des peuplements forestiers. Les parcelles pour lesquelles l’adhésion au CBPS a été sollicitée bénéficient de la présomption de garantie de gestion durable : il en résulte des avantages fiscaux en termes de droits de succession et d’imposition sur la fortune alors même que la propriété boisée n’est pas assujettie à un plan simple de gestion – instrument plus contraignant mais réservé aux parcelles de plus de dix hectares.

Le Gouvernement considère que l’adhésion au CBPS, très favorable aux propriétaires et génératrices de peu d’obligations, a pour effet de dissuader ces derniers d’intégrer des organismes de gestion en commun et de mieux valoriser leurs parcelles. La suppression des CBPS serait alors la condition sine qua non du succès des GIEEF. Votre rapporteur pour avis ne partage cette opinion qu’à moitié : s’il est indéniable que le régime des CBPS apparaît aujourd’hui trop favorable, il est à craindre que le passage à une intégration beaucoup plus ambitieuse laisse au bord du chemin un grand nombre de petits propriétaires forestiers. Au lieu de supprimer les CBPS, il propose d’en durcir les conditions en les assortissant d’un programme de coupes et travaux : ces instruments deviendraient alors une étape dans la perspective d’un regroupement efficace qui seul, à terme, ouvrirait droit aux avantages fiscaux.

● Les alinéas 7 à 12 clarifient le régime de gestion des dunes côtières, écosystèmes fragiles pour lesquels un contrôle renforcé de la puissance publique se justifie.

● Les alinéas 13 à 18 puis 36 à 43 traitent des conditions du défrichement, c'est-à-dire de la coupe définitive d’un bois ou d’une forêt. Le défrichement est encadré par le code forestier et demeure soumis à une autorisation administrative préalable conditionnée à la réalisation d'un boisement compensateur. Ce dispositif de préservation permet de protéger la surface forestière en France alors même que l’artificialisation des terres semble devoir se poursuivre. Toutefois, les boisements compensateurs peuvent se traduire par la réduction des terres agricoles alors même que leur préservation est aussi un objectif d’intérêt général. En outre, la politique forestière doit désormais privilégier les investissements forestiers plutôt que la croissance sans fin de la superficie forestière.

L’objet principal du projet de loi à cet égard consiste à conserver le caractère obligatoire de la compensation du défrichement tout en ouvrant la voie à son exécution sous la forme de travaux d'amélioration sylvicole. Le propriétaire conserve la possibilité de s'acquitter de ses obligations par le versement d'une indemnité destinée à abonder le Fonds stratégique de la forêt et du bois.

● Les alinéas 19 à 31 créent le groupement d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF), dispositif de regroupement facilitant la gestion des forêts privées, qui pourra prendre toute sorte de formes juridiques –groupements forestiers, associations syndicales libres ou autorisées, coopératives. La reconnaissance par l’État des GIEEF sera liée à l’approbation d’un plan simple de gestion sur une surface d'au moins 300 hectares et à la formulation d’un diagnostic détaillé des enjeux sylvicoles locaux. Le GIEEF proposera à ses adhérents un mandat de gestion et des projets de commercialisation des bois pour dynamiser la production et générer un effet d’entraînement sur la filière. L'adhésion au GIEEF vaudra garantie de gestion durable pour les propriétés adhérentes et, par conséquent, éligibilité aux avantages fiscaux actuels et à venir.

Si le dispositif apparaît séduisant dans son principe, votre rapporteur pour avis juge nécessaire d’adapter ses modalités aux réalités de la sylviculture française, notamment en abaissant son seuil de constitution à une superficie plus accessible, et de régler les relations entre la nouvelle structure et ses membres si ceux-ci ne devaient pas être que des personnes physiques.

● Enfin, les alinéas 34 et 35 précisent l’exercice du droit de préférence des propriétaires de parcelles mitoyennes lors de la vente d’une forêt. Il est indiqué que ce droit de préférence ne fait pas obstacle aux différents droits de préemption susceptibles de s’appliquer, ce qui est bienvenu.

Votre rapporteur pour avis suggère d’élargir ce droit de préférence aux collectivités locales afin de doter celles-ci d’un outil supplémentaire dans la mise en œuvre de leur politique forestière. La constitution d’un régime juridique exorbitant au bénéfice des détenteurs de forêt publique se justifie, en effet, par le supplément de productivité que connaît celle-ci par rapport à une forêt privée fragmentée, donc faiblement mise en valeur.

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La Commission étudie les amendements identiques CD131 du rapporteur pour avis et CD11 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. Dans un souci de simplification et de dynamisation de la gestion forestière, le projet de loi envisage de supprimer le code des bonnes pratiques sylvicoles, considérant que, insuffisamment prescripteur, il ne garantit pas la bonne gestion des forêts. Cela me semble inopportun, et je souhaite donc le maintien de ce code. Un autre amendement proposera de renforcer cet instrument en instaurant un programme de coupes et travaux.

M. Bertrand Pancher. Je suis rassuré par l’engagement du rapporteur pour avis. La Fédération des forestiers privés de France soutient que le maintien de ce code des bonnes pratiques s’avère d’autant plus indispensable que plus de 900 000 propriétaires forestiers possèdent entre 1 et 10 hectares de forêt et peuvent être directement concernés par ses dispositions. Ainsi, près de 25 000 adhérents – propriétaires de 240 000 hectares – suivent les prescriptions de ce code, créé par la loi du 9 juillet 2001 d’orientation sur la forêt.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques CD132 du rapporteur pour avis et CD18 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit d’adjoindre au code des bonnes pratiques sylvicoles la mise en œuvre d’un programme de coupes et de travaux agréé, conformément aux recommandations de ce document de gestion.

M. Bertrand Pancher. Je n’aurais su mieux dire.

La Commission adopte les amendements.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD116 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement propose qu’il ne soit pas nécessaire de solliciter une nouvelle autorisation pour effectuer des travaux compris dans un aménagement déjà approuvé de dunes côtières relevant du régime forestier.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement CD122 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Après qu’une commune a adopté son plan pluriannuel d’aménagement, le conseil municipal doit approuver l’assiette des coupes annuelles. Pour des raisons conjoncturelles – prix des bois ou nature de la saison –, il peut ajourner ces coupes. Il s’avère que, au bout de quelques années, certaines communes ne mettent plus du tout en œuvre l’aménagement, ce qui pose des problèmes de mobilisation de la ressource en bois. Lorsque l’état d’assiette se trouve partiellement approuvé, je propose que l’ajournement des coupes fasse l’objet d’une notification motivée à l’État. La commune gardera ainsi sa prérogative, mais, si elle s’écarte trop de l’aménagement prévu, elle devra le justifier, ce qui permettra d’ouvrir un dialogue.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD145 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. La mission d’encouragement de la gestion durable forestière exercée par le Centre national de la propriété forestière (CNPF) doit prendre en compte la pluralité des fonctions d’intérêt général remplies par la forêt, et non sa seule fonction économique. Ainsi, la nouvelle rédaction de l’alinéa 19 de l’article 30 précisera que la gestion durable doit également être multifonctionnelle.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD136 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le projet de loi fixe le seuil de constitution d’un groupement d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF) à 300 hectares. Jean-Louis Bricout et moi-même proposons que le rassemblement de vingt propriétaires regroupant 100 hectares suffise à en constituer un, afin que le recours à cet instrument se répande. La mobilisation d’un grand nombre de propriétaires – même si leurs terrains ne forment pas un ensemble de 300 hectares – atteste en effet du développement d’une dynamique collective.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement l’amendement CD123 et l’amendement rédactionnel CD137 du rapporteur pour avis.

Elle aborde l’amendement CD108 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les GIEEF peuvent comprendre des forêts gérées par des coopératives. Cet amendement vise à préciser que, dans ce cas, les parcelles ne peuvent participer au groupement que dans leur totalité.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements de cohérence identiques CD133 du rapporteur pour avis et CD12 de M. Bertrand Pancher, et les amendements de cohérence identiques CD134 du rapporteur pour avis et CD13 de M. Bertrand Pancher.

Elle en vient à l’amendement CD135 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. L’exercice du droit de préférence en matière forestière se heurte souvent à la difficulté de retrouver la véritable adresse des propriétaires des parcelles boisées contiguës. Je propose de préciser que le vendeur adresse les courriers de notification à l’adresse enregistrée au cadastre. Dans le cas où celle-ci se révélerait inexacte, l’affichage en mairie constitue une garantie. Cela évitera les procédures qui traînent en longueur.

Mme Catherine Quéré. À qui reviendra in fine la parcelle ?

M. le rapporteur pour avis. Cette disposition n’a pas d’incidence sur le choix, par le vendeur, de la personne à laquelle il souhaite céder sa parcelle parmi les titulaires du droit de préférence qui se manifestent.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD102 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à instaurer trois dispositifs. Premièrement, un droit de préférence au profit des communes, en cas de vente d’une parcelle boisée se trouvant sur leur territoire. Il ne s’agira pas d’un droit de préemption : la commune sera simplement mise à égalité avec les propriétaires privés de parcelles boisées contiguës ; elle sera réputée être l’un de ces propriétaires.

Deuxièmement, un droit de préemption au bénéfice des communes, en cas de vente d’une parcelle boisée contiguë à la forêt communale. L’agrandissement de la forêt communale sera ainsi considéré comme relevant de l’intérêt général. La commune restera libre d’exercer ou non son droit de préemption.

Troisièmement, un droit de préemption au profit de l’État, en cas de vente d’une parcelle boisée contiguë à une forêt domaniale.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En cas de vente d’une parcelle boisée, les propriétaires privés de parcelles boisées contiguës et la commune bénéficieront donc d’un même droit de préférence.

M. le rapporteur pour avis. Oui.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Pourra-t-il s’agir de parcelles mises en vente par des SAFER ?

M. le rapporteur pour avis. Oui. Aux termes des dispositions que nous avons adoptées précédemment, lorsqu’une SAFER remettra en vente une parcelle boisée, les propriétaires de parcelles boisées contiguës bénéficieront d’un droit de préférence.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Dans ce cas, la commune bénéficiera-t-elle du même droit ?

M. le rapporteur pour avis. Oui, elle sera considérée comme l’un de ces propriétaires, à moins qu’elle possède une parcelle contiguë de forêt communale.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD112 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Actuellement, l’autorité administrative peut subordonner la délivrance d’une autorisation de défrichement à l’exécution, en compensation, de travaux de boisement ou de reboisement pour une surface correspondant à la surface défrichée, assortie le cas échéant d’un coefficient multiplicateur compris entre 2 et 5. Or ce coefficient apparaît trop faible lorsque le défrichement concerne des zones particulièrement sensibles ou lorsque la plus-value attendue du défrichement est très élevée. Je propose donc de porter à 10 la borne supérieure que peut atteindre ce coefficient.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD113 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Aux termes de cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, les programmes régionaux de la forêt et du bois pourront fixer une valeur minimale du coefficient multiplicateur dans les zones qu’ils délimiteront. Le préfet devra en tenir compte. Cela garantira une véritable compensation dans le cas où des défrichements seraient autorisés dans des zones très sensibles.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD114 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. La valeur foncière d’un terrain augmente parfois considérablement à la suite de son défrichement. La surface de reboisement ou l’indemnité équivalente doit donc être calculée en fonction, non pas de la valeur de la parcelle boisée, mais de celle qu’elle a acquise une fois défrichée. Aux termes de mon amendement, le montant des travaux de reboisement ou celui de l’indemnité compensatrice ne pourrait pas être inférieur à la moitié de la plus-value attendue du défrichement, estimée par l’autorité administrative. Cependant, la rédaction de l’amendement pose problème, cette prescription pouvant s’apparenter à la création d’une taxe. Je propose néanmoins de l’adopter comme amendement d’appel.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD147 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. En cas de non-respect des obligations de reboisement par un propriétaire, l’autorité administrative peut décider l’exécution d’office des travaux. Je propose qu’elle puisse également ordonner une consignation ou une astreinte. De telles mesures, généralement efficaces, sont déjà prévues dans le code de l’environnement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD146 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le code forestier prévoit des sanctions en cas de défrichement illégal. Cet amendement, de bon sens, vise à ce que ces sanctions soient également applicables lorsqu’un propriétaire poursuit des travaux de défrichement alors même que le juge administratif a ordonné la suspension ou le sursis à exécution de l’autorisation de défrichement. Ainsi, les arbres seront préservés dans l’attente de la décision au fond.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 30 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 30
Biens fonciers vacants et sans maître

Depuis son origine, le code civil prévoit que les biens immobiliers sans maître entrent dans la propriété des communes ou, à défaut, de l’État. Cette procédure est essentiellement conçue pour répondre à un éventuel péril en milieu urbain qui affecterait la sécurité des usagers de l’espace public : elle est donc confiée à la diligence du maire, considéré comme le plus au fait de ce qui se passe sur le territoire de la commune, qui peut incorporer au domaine communal toute propriété dont les taxes foncières n’ont pas été acquittées depuis trois ans et dont le propriétaire demeure introuvable.

Ce dispositif pose cependant problème hors du milieu urbain, qu’il s’agisse des massifs forestiers ou des terres agricoles laissées à l’abandon. On ne saurait exiger du maire qu’il arpente sans cesse le territoire communal dans son ensemble pour repérer les espaces mal entretenus, ni qu’il communique sans cesse avec les services fiscaux pour s’enquérir de la contribution des propriétaires aux finances publiques. En outre, les bonnes relations au sein de la commune s’opposent généralement à une action publique sur la propriété – légitime ou non – des individus. Les auditions ont montré que cette problématique pouvait être particulièrement prégnante outre-mer sur des terres en déprise.

Il apparaît donc opportun de scinder la procédure des biens sans maître en deux. Pour les espaces construits, assujettis à la taxe foncière bâtie, le maire demeurerait maître de la procédure et de l’opportunité de la déclencher. Pour les espaces non bâtis, en revanche, l’initiative reviendrait au préfet sur la base d’informations communiquées annuellement par les centres d’imposition foncière. En cas de silence du dernier propriétaire connu pendant plus de six mois, le bien serait incorporé au domaine de la commune à sa demande, au domaine de l’État dans le cas contraire.

En outre, afin de permettre un remembrement forestier efficace, les bois incorporés ne seraient assujettis au régime forestier qu’au terme d’un délai de cinq ans, permettant ainsi de réaliser les échanges que le gestionnaire forestier public jugerait opportuns.

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La Commission est saisie de l’amendement CD104 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rendre plus opérationnelle la procédure d’acquisition des biens vacants et sans maître. En effet, les communes hésitent souvent à la mettre en œuvre, notamment lorsque les parcelles concernées sont nombreuses et dispersées. Il reviendrait donc à l’État de recenser ces parcelles et de déclencher la procédure. Ensuite, la commune pourrait, comme aujourd’hui, marquer son intérêt pour ces biens et les incorporer dans le domaine communal.

Mon amendement vise à préciser, en outre, que les bois et forêts acquis dans ces conditions ne seraient soumis au régime forestier qu’à l’expiration d’un délai de cinq ans. Pendant cette période, ils demeureraient cessibles et échangeables, afin que la commune puisse procéder, le cas échéant, à un remembrement forestier. À défaut, la forêt communale risquerait de ressembler à une « peau de léopard ».

La Commission adopte l’amendement.

Article 31
(articles L. 131-7, L. 161-8, L. 161-21 du code forestier et articles 22 à 26, 34, 39, 45 et 546 du code de procédure pénale)

Harmonisation avec le code forestier des dispositions du code de procédure pénale relatives aux fonctionnaires et agents habilités à constater et rechercher les infractions forestières

L’article 31 modifie certaines dispositions du code forestier et du code de procédure pénale afin d’harmoniser les dispositions résultant de la recodification du code forestier et de corriger certaines erreurs de transcription. Ces dispositions avaient été adoptées à l’unanimité par le Sénat lors de son examen du projet de loi de ratification de l’ordonnance de codification, le 7 février 2013. Le choix du Gouvernement d’intégrer la ratification au présent projet de loi ne permettra pas la poursuite de la navette, aussi est-il opportun de valider les corrections déjà opérées par la haute assemblée lors de ses travaux.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 31 sans modification.

Article additionnel après l’article 31
Contrat d’objectifs et de performance entre l’État et l’Office national des forêts

Dans le cadre général de simplification de l’action publique, il est aberrant de constater que de multiples autorités publiques se trouvent habilitées à mettre en œuvre les politiques nationales de préservation de l’environnement dans un seul et même espace. Il serait plus cohérent de permettre la désignation d’un opérateur unique compétent pour édicter un ensemble de prescriptions à l’issue d’un examen unique.

Il est donc suggéré de permettre à l’État de déterminer contractuellement avec l’ONF les conditions dans lesquelles celui-ci met en œuvre, dans les bois et forêts soumis au régime forestier, l’ensemble des politiques publiques relatives à la gestion de la forêt et des milieux.

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La Commission est saisie de l’amendement CD115 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Aux termes de cet amendement, le contrat d’objectifs et de performance passé entre l’État et l’ONF déterminerait, en sus de ce que prévoit déjà le code forestier, « les conditions dans lesquelles l’ONF met en œuvre, dans les bois et forêts soumis au régime forestier, l’ensemble des politiques publiques relatives à la gestion de la forêt et des milieux ». Il convient d’éviter une multiplication des acteurs publics compétents en matière forestière.

La Commission adopte l’amendement.

Article 32
(article L. 4424-33-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)

Transfert de l’État vers la collectivité territoriale de Corse de la compétence en matière de production et de multiplication de plants forestiers et autres végétaux

La pépinière forestière administrative d'Ajaccio-Castelluccio est rattachée à la direction départementale des territoires et de la mer de Corse du Sud. Créée en 1969, sa production a été réorientée à partir de 1985 afin de satisfaire des besoins en plants forestiers des communes et propriétaires forestiers privés. Aussi sa gestion par l’État apparaît-elle désormais anachronique. L’article 32 permet son transfert à la collectivité territoriale de Corse ainsi que celui, plus général, de la compétence en matière de production et de multiplication de plants forestiers et autres végétaux. Là encore, il s’agit de dispositions précédemment approuvées par le Sénat lors de son examen du projet de loi de ratification de l’ordonnance de codification du code forestier.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 32 sans modification.

Article 33
Éviter la mise sur le marché de bois et de produits dérivés du bois issus d’une récolte illégale

L’article 33 édicte des mesures propres à limiter la mise sur le marché de bois et de produits issus d’une récolte illégale, conformément aux engagements européens de la France. Le règlement n° 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établit des obligations pour les opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché, en particulier pour favoriser les bois issus d’une récolte légale. Au nombre de ces obligations figure la « diligence raisonnée » – une assurance probable, acquise par une traçabilité de la chaîne d’approvisionnement, que les bois ne sont pas issus d’une récolte illégale. Si le règlement est d’application directe, il laisse aux États-membres le soin de fixer le régime des sanctions applicables.

Ainsi, l’article 33 institue une sanction administrative lorsqu’une mise en demeure de corriger les manquements aux obligations du règlement n’a pas été suivie d’effet : le préfet est autorisé à suspendre le fonctionnement de l’entreprise et à lui infliger une amende pouvant atteindre 15 000 euros et assortie d’une astreinte journalière de 1 500 euros. La méconnaissance du commandement préfectoral est punie de deux années d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende. Les agents habilités à constater les infractions sont déterminés.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 33 sans modification.

Article additionnel après l’article 33
Rapport sur les exportations de bois ronds et de grumes

La production française de bois ronds et de grumes connaît une croissance remarquable de ses exportations. Il y aurait lieu de se réjouir de cette performance si l'industrie nationale de transformation du bois ne s’en trouvait pas parallèlement affaiblie.

Le Parlement dispose d’une faible latitude d’action pour intervenir dans le domaine des échanges internationaux, très encadré par les accords de l’Organisation mondiale du commerce et par le droit de l’Union européenne. Aussi convient-il de solliciter un rapport gouvernemental pour disposer d’une étude complète et de propositions réalisables pour que le bois brut récolté en France alimente plus efficacement l’industrie et les emplois nationaux.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD196 du rapporteur pour avis et CD36 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. La croissance des exportations de bois non transformé nuit à la mise en valeur de la filière bois. Il conviendrait au contraire de conserver la valeur ajoutée et les coproduits énergétiques sur notre territoire. Je propose que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 30 juin 2015, un rapport sur les règles que nous pourrions renforcer afin de freiner les exportations de bois ronds et de grumes, sans aller toutefois jusqu’à les interdire comme le fait le Gabon.

M. Bertrand Pancher. Nous ne pouvons que déplorer les exportations massives de grumes, notamment vers la Chine. Nous perdons ainsi une partie du bois destiné à la production d’énergie. En outre, les métiers de transformation du bois – en particulier les scieurs – tendent à disparaître. Chez certains de nos voisins, notamment en Allemagne, il est obligatoire de réaliser une partie du sciage sur place. Toutefois, ces règles ne seraient pas conformes au droit communautaire. En outre, nous pourrions fixer des règles sanitaires, qui imposent une traçabilité et une analyse du bois exporté. Nous devons demander au Gouvernement de nous présenter un rapport sur toutes ces questions. À cet égard, la rédaction plus large proposée par le rapporteur pour avis me convient. Je retire l’amendement CD36.

L’amendement CD36 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD196.

TITRE VI
DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

Les titres I à V du projet de loi s’appliquent à la totalité du territoire national, et donc également à l’outre-mer, hormis lorsque les statuts des collectivités ultramarines y font partiellement ou complètement obstacle. Ce titre VI a pour objet d’aménager les dispositions précédentes aux spécificités des territoires d’outre-mer.

Si le titre VI contient quatre articles, la commission du développement durable ne s’est saisie pour avis que des trois premiers, soit les articles 34, 35 et 36. Elle a estimé que l’article 37 habilitant le Gouvernement à procéder par ordonnance à la refonte de la codification des dispositions relatives aux outre-mer au sein du code rural et de la pêche maritime n’entrait pas dans son domaine de compétence.

Article 34
(articles L. 111-2-1, L. 182-8, L. 182-9, L. 272-6, L. 272-7, L. 272-8, L. 272-9, L. 272-10, L. 272-13, L. 272-14, L. 272-15, L. 272-16 [abrogés] ; L. 180-1, L. 181-6-1, L. 181-25, L. 182-1-1, L. 182-13-1, L. 511-14 [nouveaux], L. 182-1, L. 272-11, L. 272-12, L. 372-1, L. 461-10, L. 571-1, L. 571-2, L. 681-1, L. 681-10, L. 762-6, L. 762-7 [modifiés] du code rural et de la pêche maritime ; article 6 de l’ordonnance n°2011-864 du 22 juillet 2011 relative à a protection et à la mise en valeur des terres agricoles dans les départements d’outre-mer, le département de Mayotte et à Saint-Martin ; article 4 de la loi n°2013-453 du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer)

Pilotage de la politique agricole et agro-alimentaire outre-mer

L’article 34 adapte le pilotage de la politique agricole et agro-alimentaire aux spécificités ultramarines. Il convient, en effet, de prendre en compte la complémentarité des instruments européens que sont le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSÉI) et le FEADER.

Le 1° du II prévoit l’élaboration de plans régionaux d’agriculture durable et d’orientation stratégique en matière d’enseignement, formation, recherche et développement. Leur contenu est conforme aux orientations définies à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction issue du projet de loi, tout en intégrant les nécessaires adaptations dues à la situation particulière des outre-mer.

Pour rééquilibrer le POSEI en direction de productions plus diversifiées, territorialiser la gouvernance du développement agricole et forestier, et garantir la cohérence entre les divers dispositifs de soutien, le 2° du II crée un comité d’orientation stratégique et de développement agricole (COSDA), co-présidé par le préfet de région et l’exécutif local, réunissant les parties prenantes autour d’un projet partagé de développement local. En outre, eu égard à l’importance de la question foncière dans des territoires où les terres arables sont limitées par la mer et par la forêt, le projet de loi abaisse aux deux tiers la proportion des indivisaires nécessaire à la conclusion et au renouvellement d’un bail d’exploitation agricole. Cette dérogation fait écho aux dispositions existantes du code rural et de la pêche maritime qui permettent de donner à bail des fonds agricoles en indivision à l’initiative du préfet – à condition toutefois que la terre soit inculte ou manifestement sous-exploitée, constat délicat à dresser qui explique la faible occurrence du mécanisme.

Le III prévoit que le bénéficiaire de la reprise justifie des conditions de capacité et d’expérience professionnelle requises et qu’il jouit d’une autorisation d’exploiter, alignant les conditions de validité de la reprise sur celles en vigueur en Europe. Cette mesure de sauvegarde permet de préserver les fermiers en place d’une reprise abusive qui nuirait à la bonne marche du monde agricole, de confier l’exploitation des terres à une agriculture professionnelle et de prévenir le démembrement d’exploitations viables.

Le IV prévoit de fixer par contrat les priorités d’action des chambres d’agriculture et l’affectation de leurs ressources propres, l’action des collectivités territoriales dans le sens de l’intérêt local et le rôle d’orientation de l’État en faveur du développement agricole.

Le V prévoit que les exploitants peuvent être assujettis au régime agricole de protection sociale sur la base du temps de travail consacré à l’exploitation lorsque la superficie de l’exploitation ne constitue pas une donnée pertinente. Cette disposition, que le droit positif réserve au département de Mayotte, se trouve étendu à l’ensemble de l’outre-mer.

Le VI abroge les dispositions transitoires qui écartaient l’application du droit européen à Mayotte. Édictées au moment de la départementalisation du territoire, quand la date à laquelle Mayotte était susceptible d’accéder au statut de région ultrapériphérique de l’Union européenne n’était pas encore déterminée, ces mesures spécifiques n’ont plus lieu d’être dès lors que le Conseil européen a fixé la date de cette accession au 1er janvier 2014.

Le VII reporte de 2016 à 2020 la date, prévue à l’article 6 de l’ordonnance n° 2011-864 du 22 juillet 2011 relative à la protection et à la mise en valeur des terres agricoles dans les départements d’outre-mer, dans le département de Mayotte et à Saint-Martin, à laquelle les chambres d’agriculture ultramarines se verront confier les missions d’accompagnement à l’installation, aujourd’hui exercées par l’Agence de services et de paiement. Les modifications opérées par le présent projet de loi ne permettraient pas d’effectuer cette transition dans des conditions raisonnables à la date initialement retenue.

Enfin, le VIII de l’article 34 complète l’article 4 de la loi du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire outre-mer, lequel indique que l’attribution des marchés publics de restauration collective prend en compte « les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture ». Cette exigence est étendue aux produits de l’industrie agroalimentaire et de la pêche afin d’accompagner le développement des activités de transformation locales.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 34 sans modification.

Article 35
(articles L. 175-4, L. 175-6, L. 175-7, L. 175-8, L. 176-2, L. 176-3, L. 176-6, L. 177-2, L. 177-4, L. 177-3, L. 178-3, L. 178-4, L. 371-1 [nouveau], L. 373-3 [nouveau], L. 374-10 [nouveau] du code forestier)

Adaptation des dispositions du code forestier aux outre-mer et exercice des missions du Conseil national de la propriété forestière en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion

L’article 35 constitue le pendant forestier de l’article 34, qui concerne les dispositions relatives à l’agriculture. Il vise donc à adapter le titre V du projet de loi sur la forêt aux spécificités des territoires ultramarins.

Les paragraphes 1° à 4° sont relatifs à Mayotte. Les objectifs d’intérêt général assignés à la forêt y sont identiques à ceux proclamés en Europe à l’article L. 112-2 du code forestier, même s’il s’y ajoute la volonté « d’assurer l’équilibre biologique et l’approvisionnement en eau douce de l’île de Mayotte, ainsi que la satisfaction des besoins en bois et autres produits forestiers ou agroforestiers ». Des adaptations terminologiques et des évolutions de cohérence sont effectuées.

Les paragraphes 5° et 6° sont relatifs à Saint-Barthélemy. Des adaptations de nature terminologique et des évolutions de cohérence sont effectuées. Les 7° et 8° agissent de même pour Saint-Martin ; les 9° et 10° pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Le 11° procède à des modifications de coordination à la fois pour Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le II organise l’exercice des missions du Centre national de la propriété forestière (CNPF) en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion. Il est précisé que les missions assignées par la loi au CNPF sont localement exercées par le préfet, après avis de la commission régionale de la forêt et du bois – comme c’est déjà le cas en Guyane et à Mayotte. La faiblesse de la propriété forestière privée n’a pas permis, pour l’heure, l’émergence de centres régionaux en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion. Le projet de loi en tire la conclusion que les compétences du CNPF ne sont donc pas exercées dans ces trois départements, et qu’il convient de les transférer au représentant de l’État.

Si cette évolution répond à la nécessité de circonvenir l’absence actuelle de CRPF, votre rapporteur pour avis ne juge pas pertinent de décider un transfert définitif de compétences tel que l’envisage le Gouvernement. Il juge plus opportun d’envisager un exercice par l’autorité préfectorale par défaut, et un retour au droit commun dès les CRPF locaux constitués. Des amendements ont été présentés en ce sens.

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La Commission examine les amendements CD138, CD139 et CD140 du rapporteur pour avis, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. le rapporteur pour avis. Le projet de loi prévoit que, en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion, les missions du CNPF sont exercées par le préfet. Certes, à ce stade, il n’existe de centre régional de la propriété foncière dans aucune de ces trois collectivités. Cependant, il convient de ne pas décourager les efforts locaux en faveur de la création de tels centres. Je propose donc la rédaction suivante : les missions du CNPF sont exercées « par le centre régional de la propriété foncière ou, lorsqu’il n’a pas été constitué, par le préfet ».

La Commission adopte successivement les amendements CD138, CD139 et CD140.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 35 ainsi modifié.

Article 36
(articles L. 181-1, L. 181-2, L. 181-3, L. 181-24, L. 181-26 [nouveau], L. 182-25, L. 274-11 [nouveau], L. 371-1, L. 371-2, L. 371-5-1 [nouveau], L. 461-2 du code rural et de la pêche maritime, article L. 150-1 du code de l’urbanisme)

Adaptation aux outre-mer les dispositions des titres Ier à IV du projet de loi d’avenir et homologation de peines

L’article 36 est composé de deux séries de dispositions très différentes : les I à VI adaptent aux collectivités d’outre-mer les dispositions des titres I à IV du projet de loi tandis que le VII prévoit l’homologation de peines d’emprisonnement prévues dans diverses lois du pays ou délibérations de la Polynésie française, en application de l’article 21 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.

Le I procède principalement à des changements de terminologie. Il adapte également les modalités de gouvernance de l’opérateur chargé de l’aménagement foncier agricole dans les départements d’outre-mer dépourvus de SAFER – soit la Guyane et Mayotte. En Guyane, l’Établissement public d’aménagement en Guyane (EPAG), créé en 1996, joue le rôle d’opérateur foncier. À Mayotte, la délégation locale de l’Agence de services et de paiement (ASP) procède aux interventions foncières et accompagne la collectivité territoriale dans la transition entre occupation coutumière des sols et constitution d’un cadastre assis sur des titres régulièrement délivrés.

Le II encadre juridiquement les pouvoirs d’investigation des agents assermentés et agréés de Polynésie française, habilités à constater les infractions pénales aux dispositions légales en vigueur dans leur juridiction en matière d’alimentation, de santé publique vétérinaire et de protection des végétaux.

Les III à VI opèrent des modifications de coordination en raison des différentes compétences exercées localement en vertu des statuts des diverses collectivités ultramarines.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 36 sans modification.

TITRE VII
DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET DIVERSES

Article 39
(articles L. 111-2-1, L. 141-6, L. 181-25, L. 181-26, L. 312-1, L. 371-5-1, L. 722-5-1 du code rural et de la pêche maritime, article L. 211-3 du code de l’environnement, L. 122-1, L. 122-3, L. 122-12, L. 122-13, L. 122-14, L. 122-15 du code forestier)

Dispositions transitoires

L’article 39 détermine les modalités d’application des différentes dispositions du projet de loi de façon à organiser une transition entre ancien et nouveau régimes. Il prévoit notamment des dates échelonnées d’entrée en vigueur.

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M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je précise que notre Commission ne s’est initialement pas saisie de cet article. Nous examinons exceptionnellement les amendements déposés pour être agréables à leur auteur.

La Commission examine l’amendement CD14 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement n’a plus lieu d’être du fait de nos précédents votes. J’invite donc son auteur à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 39 sans modification.

Après l’article 39

La Commission examine l’amendement CD16 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. L’article L. 130-1 du code de l’urbanisme soumet à une déclaration préalable en mairie les coupes ou abattages d’arbres réalisés dans les espaces boisés classés dans le cadre d’un plan local d’urbanisme. Cependant, aux termes du septième alinéa du même article, les coupes réalisées en application d’un plan simple de gestion agréé ou d’un règlement type de gestion approuvé par le centre régional de la propriété forestière sont dispensées d’une telle déclaration. En revanche, les coupes réalisées en application d’un code de bonnes pratiques sylvicoles ne bénéficient pas, à ce stade, de dispense, car elles ne sont pas définies de manière suffisamment précise dans ce document.

Or il est désormais prévu que les adhérents à un code de bonnes pratiques sylvicoles fassent agréer par le centre régional de la propriété forestière un programme de coupes et de travaux conforme aux recommandations dudit code. Dès lors, il serait logique que ces coupes soient elles aussi dispensées de déclaration préalable en mairie, comme je le propose avec cet amendement.

Cette simplification évitera qu’une même coupe soit soumise à deux autorisations administratives distinctes. Elle supprimera ainsi certains blocages administratifs à l’exploitation du bois sur pied produit par les forêts privées – actuellement, à peine 60 % de ce bois est exploité chaque année.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est satisfait par le 2° de l’amendement CD141.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD15 de M. Bertrand Pancher.

M. le rapporteur pour avis. Il est également satisfait par l’amendement CD141, par son 3° cette fois.

L’amendement est retiré.

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, ainsi modifiées.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Les amendements déposés en Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sont consultables sur le site internet de l’Assemblée nationale. (4)

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES)

– M. Marc Mortureux, directeur général

– M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint responsable ressources

– Mme Pascale Robineau, directrice produits réglementés

Agreenium

– Mme Marion Guillou, présidente

– M. Frédéric Lapeyrie, directeur général

Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA)

– M. Guy Vasseur, président

– M. Régis Dubourg, directeur

– M. Joseph Giroud, secrétaire général

– M. Guillaume Baugin, conseiller parlementaire

Association des industries agro-alimentaires (ANIA)

– M. Bruno Hot, vice-président en charge des questions agricoles

– Mme Elsa Chantereau, directeur de la communication et des affaires publiques

– Mme Diane Doré, directeur agriculture et échanges extérieurs

Association des maires ruraux de France (AMRF)

– M. Dominique Bidet, vice-président de l’AMRF, président des maires ruraux de l’Allier et maire de Bellenaves

Association nationale des élus de la montagne (ANEM)

– Mme Frédérique Massat, présidente

– M. Martial Saddier, ancien président

Association pour la reconnaissance des alternatives aux pesticides (ASPRO PNPP)

– M. Jean-François Lyphout, président

– M. Jean Sabench, administrateur

– M. Guy Kastler, représentant Les Amis de la Terre

– Mme Lucie Guichard, représentant la Confédération paysanne

Autorité de la concurrence

– Mme Virginie Beaumeunier, rapporteure générale

– Mme Liza Bellulo, chef du service du président

Carrefour

– M. Jérôme Bédier, secrétaire général du groupe

– M. Jean Richard de Latour, directeur des études, de l’innovation et des affaires publiques

– Mme Géraldine Etchepare, responsable affaires publiques France

Centre national de la propriété forestière

– M. Henri Plauche Gillon, président

– M. Thomas Formery, directeur général

CFTC-AGRI

– M. Pierre Jardon, délégué général,

– M. Jean-Louis Mahieu, secrétaire général

Confédération paysanne

– M. Laurent Pinatel, porte-parole

– Mme Marie-Noëlle Orain, secrétaire générale

– M. Mikel Hirribarren, secrétaire général

– Mme Sylvie François, animatrice

Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)

– M. Bertrand Hervieu, vice-président

Conseil national de l’enseignement agricole privé (CNEAP)

– M. François Paliard, président

– M. Philippe Poussin, secrétaire général

Coop de France

– M. Philippe Mangin, président

– M. Olivier de Bohan, président de la commission juridique et fiscale

– Mme Chantal Chomel, directrice des affaires juridiques et fiscales

– M. Jacques Poulet, directeur du pôle animal

– M. Vincent Magdelaine, directeur de Coop de France métiers du grain

– Mme Irène de Bretteville, chargée des relations parlementaires

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

– M. Jean-Louis Gérard, sous-directeur des produits alimentaires et marchés agricoles et alimentaires

EURODOM

– Mme Marina Feat, secrétaire générale de l'ARIBEV-ARIV (La Réunion)

– M. Erwan Brenaut, président de l'ARIBEV-ARIV

– M. David Giraud-Audine, animateur INTERVIG

– M. Philippe Aliane, directeur général de LPG (Guadeloupe)

– Mme Laetitia de La Maisonneuve, chargée des relations avec le Parlement

Fédération "Forestiers Privés de France"

– M. Luc Bouvarel, directeur général

Fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF)

– M. Benoit Assemat, président du FSVF

– M. Pierre Buisson, président du SNVEL

– M. Norbert Lucas, président du SNISPV

– M. Jean-Yves Gauchot, membre du SNVEL

Fédération du négoce agricole (FNA)

– M. Sébastien Picardat, directeur général

Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA)

– M. Stéphane Gin, président du Comité agricole

– M. Didier Vernhes, chargé de mission

– M. Christophe Delcamp, directeur adjoint des assurances de biens et de responsabilité

– M. Jean-Paul Laborde, directeur des affaires parlementaires

Fédération générale de l’agroalimentaire (FGA – CFDT)

– M. Frédéric Malterre, secrétaire national

– Mme Betty Hervé, secrétaire national

Fédération nationale agroalimentaire et forestière (FNAF – CGT)

– M. Jean Luc Bindel, secrétaire général

– Mme Jocelyne Hacquemand, secrétaire, vice-présidente de la section agriculture du Conseil économique et social

Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR)

– M. Jean-Claude Monin, président

– M. Alain Lesturgez, directeur

– M. Yves Lessard, conseiller politique du président

Fédération nationale des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (FNSAFER)

– M. Michel Heimann, directeur général

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA)

– M. Xavier Beulin, président

– Mme Catherine Lion, directeur général adjoint

– Mme Nadine Normand, attachée parlementaire

Fédération nationale du bois (FNB)

– M. Nicolas Douzain-Didier, délégué général

France AgriMer

– M. Éric Allain, directeur général

France bois forêt et France bois industrie entreprises (FBIE)

– M. Luc Charmasson, président

– Mme Emmanuelle Bour Poitrinal, déléguée générale

– M. Henri Plauche Gillon, président de Forestiers privés de France

France nature environnement (FNE)

– M. Jean-Claude Bevillard, pilote du réseau agriculture

– Mme Marie-Catherine Schulz, coordinatrice du réseau agriculture

– Mme Julie Marsaud coordinatrice du réseau forêt

– Mme Morgane Piederriere, chargée des relations institutionnelles

Institut national de la recherche agronomique (INRA)

– M. François Houllier, président-directeur général

– M. Hervé Guyomard, directeur scientifique « Agriculture »

– M. Jean-François Launay, directeur du cabinet du président 

– M. François Héquet, conseiller « affaires publiques » au cabinet du président

INTERFEL

– M. Bruno Dupont, président

Jeunes agriculteurs (JA)

– M. Jérôme Chapon, vice-président, responsable des dossiers économiques

– M. Joël Clergue, vice-président, responsable de l’installation

– M. Thomas Diemer, trésorier national, responsable du dossier foncier

– Mme Aurélie Charrier, conseillère nationale en charge de l’installation

– M. Romain Quesnel, juriste

– M. Axel Bigot, attaché parlementaire

Office pour le développement de l’économie agricole des départements d’Outre-Mer (ODEADOM)

– Mme Isabelle Chmitelin, directrice

Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS)

– M. Jean-Pierre Poly, directeur général

– M. Pierre Migot, directeur des études et de la recherche

– M. Hubert Géant, directeur de la police

Office national des forêts (ONF)

– M. Pascal Viné, directeur général

– Mme Geneviève Rey, directrice aux affaires communales

Section nationale des fermiers et métayers de la FNSEA (SNFM)

– Mme Sylvie Brun, présidente

– Mme Agnès Laplanche, juriste

Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL)

– M. Claude Andrillon, vice-président

– Mme Anne Daumas-Marchandet, directrice

– M. Éric Lejeau, trésorier-adjoint

Union de la coopération forestière française (UCFF)

– M. Cyril Le  Picard, président

– M. Pierre Ducray, directeur UCFF et du Groupe coopération forestière (GCF)

Union des industries de la protection des plantes (UIPP)

– M. Frank Garnier, président

– Mme Eugénia Pommaret, directrice générale

– Mme Stéphanie Lehay, responsable des affaires juridiques et réglementaires

Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (UNMFREO)

– M. Serge Cheval, directeur

Personnalités qualifiées :

M. Jean-Pierre Bastié, délégué ministériel pour les outre-mer au Ministère de l’agriculture, auteur du rapport du Gouvernement au Parlement déterminant les grandes orientations d’un projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche spécifique à l’outre-mer, juillet 2011

Mme Chantal Berthelot et M. Hervé Gaymard, députés, auteurs du rapport « Les agricultures des outre-mer : des réformes ambitieuses pour un secteur d’avenir », novembre 2013

M. Henri Nallet, ancien ministre, président de l’Observatoire national de l’enseignement agricole

© Assemblée nationale

1 () Une telle possibilité de modulation est, par exemple, d’ores et déjà prévue par le règlement de développement rural relatif à la gestion du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) qui, pour la période 2014-2020, encourage les démarches collectives des agriculteurs.

2 () En application du 8° du II de l’article L. 211-3 et des articles R. 211-81-1 et suivants du code de l’environnement, le préfet peut d’ores et déjà imposer la déclaration annuelle des quantités d’azote de toutes origines épandues ou cédées ainsi que des lieux d’épandage, sur les bassins connaissant d’importantes marées vertes sur les plages et sur certaines zones d’actions renforcées des zones vulnérables. Cette obligation vise tout utilisateur ou producteur d’azote, d’origine organique ou minérale, et notamment les exploitants agricoles.

Mais les distributeurs de matières fertilisantes azotées et les opérateurs spécialisés dans le traitement et le transport d’effluents d’élevage n’ayant pas, dans la réglementation actuelle, d’obligation de déclarer les flux d’azote liés à leur activité, il est impossible de vérifier la vraisemblance des déclarations des exploitants agricoles en comparant les quantités qu’ils déclarent épandues, traitées ou cédées d’une part, aux quantités vendues par les distributeurs (en particulier s’agissant des fertilisants minéraux) ou transportées ou traitées par des opérateurs spécialisés, d’autre part. Ce sont ces deux catégories que le projet de loi vise donc, plus particulièrement, à assujettir à l’obligation de déclaration.

3 () Cette faculté n’est en effet ouverte, à l’heure actuelle :

– s’agissant des bailleurs publics, des associations agréées de protection de l’environnement, des entreprises solidaires agréées et des fondations reconnues d’utilité publique, que si les pratiques retenues correspondent à des préoccupations environnementales localement pertinentes pour la parcelle louée ;

– s’agissant des autres bailleurs, que dans les espaces délimités par le code de l’environnement pour la préservation de l’eau et de la biodiversité, ainsi que pour la prévention des risques naturels liés à l’eau.

4 () http://recherche2.assemblee-nationale.fr/amendements/resultats.jsp?NUM_INIT=1548&LEGISLATURE=14&ORGANE=D%E9veloppement%20durable