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Amendements  sur le projet ou la proposition


N
° 2093

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public (n° 1940),

PAR M. Christophe CASTANER,

Député.

____

Voir les numéros :

Sénat : 481, 515, 516 et T.A. 111 (2013-2014).

Assemblée nationale : 1940.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LES DÉCISIONS SUCCESSIVES DES TGI DE NANTERRE ET DE PARIS, EN FÉVRIER 2013 ET EN MARS 2014, FONT PESER SUR LES FINANCES DE L’ÉTAT UN RISQUE HORS DE PROPORTION 7

1. Des produits innovants mal maîtrisés 7

2. Le contentieux engagé par les collectivités 12

3. En l’absence de loi de validation, la confirmation des décisions de première instance ferait peser un risque majeur sur les finances publiques, qui est évalué par le Gouvernement à 17 milliards d’euros 16

II. L’ÉTAT A ENGAGÉ SES RESSOURCES, DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE DIFFICILE, AFIN D’ACCOMPAGNER LES COLLECTIVITÉS ET LES HÔPITAUX 19

1. Le fonds de soutien créé par l’article 92 de la LFI pour 2014 20

2. Le dispositif d’accompagnement des hôpitaux 21

III. CONTREPARTIE À CET ENGAGEMENT, LE PROJET DE LOI DE VALIDATION EST CIBLÉ ET IL POURSUIT UN OBJECTIF D’INTÉRÊT GÉNÉRAL IMPÉRIEUX 22

1. Les deux validations auxquelles procède le projet de loi sont strictement proportionnées à l’objectif poursuivi 22

2. Cette validation satisfait aux critères dégagés par la jurisprudence constitutionnelle 23

EXAMEN EN COMMISSION 27

Article 1er :Validation législative des contrats de prêt aux personnes morales de droit public en cas de défaut de mention du taux effectif global (TEG) :, du taux de période ou de la durée de période 40

Article 2 : Validation législative des contrats de prêt aux personnes morales de droit public en cas d’erreur dans le taux effectif global (TEG) : ou ses corollaires et introduction d’une formule substitutive de calcul du taux pour les nouveaux contrats 45

Article 3 : Exclusion des contrats de prêt simples du champ de la loi de validation 48

Article 4 : Rapport sur la réforme du taux effectif global (TEG) : 49

TABLEAU COMPARATIF 51

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS MENÉES PAR LE RAPPORTEUR 53

INTRODUCTION

Dix-sept milliards d’euros. Voilà la menace que les emprunts structurés font aujourd’hui peser sur les finances publiques françaises.

Les collectivités territoriales, qui les ont souscrits dans les années 2000, sont les premières victimes depuis que ces instruments financiers
– mélangeant un financement et des produits dérivés – se sont révélés toxiques.

Des banques, comme le groupe Dexia et plusieurs de ses concurrentes françaises ou étrangères, ont en effet développé une offre commerciale inadaptée aux besoins des acteurs locaux, mais lucrative dans une décennie marquée par le développement de la concurrence sur le marché du crédit et la contraction des marges bancaires.

Ces produits sur mesure, conçus au départ pour les besoins spécifiques de quelques grandes collectivités, ont ainsi été diffusés à grande échelle auprès d’acteurs de toutes tailles et de toutes sortes : communes de moins de 10 000 habitants, service départemental d’incendie et de secours, hôpitaux, bailleurs sociaux, etc.

Certains exécutifs locaux ont néanmoins fait preuve de légèreté coupable, en souscrivant des produits dont ils ne maîtrisaient à l’évidence pas les ressorts. Trop limité sur le terrain et peu vigilant en administration centrale, le contrôle des services de l’État s’est révélé impuissant à prévenir le danger.

Il y a trois ans, notre Assemblée avait constitué une commission d’enquête, présidée par Claude Bartolone et rapportée par Jean-Pierre Gorges (1), pour opérer ce partage des responsabilités.

Fait nouveau, le risque s’est déplacé avec la multiplication des contentieux.

Confrontées au coût prohibitif de la « désensibilisation » de leurs encours toxiques, les collectivités ne sont pas restées inactives et beaucoup ont choisi d’assigner les établissements prêteurs.

Les décisions successives des tribunaux de grande instance (TGI) de Nanterre et de Paris, en février 2013 et en mars 2014, ont retenu certains motifs de forme pour annuler les stipulations d’intérêts des contrats et les remplacer par le taux d’intérêt légal, quasi nul.

Or, c’est l’État qui désormais, par le biais de la SFIL, au premier chef, et de Dexia résiduelle, dans une moindre mesure, risque de devoir en supporter le coût. Si ces décisions devaient être confirmées en appel, elles feraient donc peser sur les finances de l’État un risque hors de proportions.

Afin d’éviter ce scénario noir, le texte de l’article 92 de la loi de finances pour 2014 voté par notre Assemblée prévoyait de valider certains de ces contrats de prêt afin de les mettre à l’abri d’une annulation par le juge civil. Ces dispositions, même si elles ciblaient un ensemble limité de contrats, ont été jugées trop larges par le Conseil constitutionnel.

Comme le Gouvernement l’avait annoncé dès le mois de janvier, le présent projet de loi propose de revenir sur les dispositions censurées. Il a déjà été adopté par le Sénat, qui assure la représentation des collectivités territoriales.

Grâce à la réécriture opérée sur le fondement de la décision du Conseil constitutionnel, le champ des actes concernés par cette validation législative est plus ciblé que dans le dispositif censuré en décembre dernier. Cette nouvelle rédaction tient également compte de la variété des moyens soulevés devant les juges civils, en intégrant les conséquences des décisions intervenues les 7 et 25 mars derniers.

Strictement proportionné à l’objectif poursuivi, ce projet de loi de validation satisfait également aux autres critères dégagés par la jurisprudence constitutionnelle. En particulier, il poursuit incontestablement un but d’intérêt général impérieux au regard des conséquences financières colossales
– 17 milliards d’euros sont en jeu, soit 0,9 point de PIB – pour l’État
.

C’est pourquoi, le Rapporteur a recommandé à la commission des Finances d’adopter le présent projet de loi.

I. LES DÉCISIONS SUCCESSIVES DES TGI DE NANTERRE ET DE PARIS, EN FÉVRIER 2013 ET EN MARS 2014, FONT PESER SUR LES FINANCES DE L’ÉTAT UN RISQUE HORS DE PROPORTION

Ce projet de loi de validation permettra de neutraliser l’essentiel du risque que font peser sur la SFIL et Dexia, et donc sur les finances publiques, les décisions des TGI de Nanterre et de Paris relatives aux emprunts structurés souscrits par les acteurs publics locaux.

1. Des produits innovants mal maîtrisés

● Les emprunts structurés se décrivent plus commodément qu’ils ne se rangent dans une classification ; c’est pourquoi l’on met souvent en avant leur caractère mixte pour les distinguer. Ils intègrent en effet, dans un seul et même contrat, deux éléments :

– un financement initial, sous la forme d’une opération de crédit au sens de l’article L. 313-1 du code monétaire et financier ;

– et une ou plusieurs opérations sur produits dérivés (notamment, les contrats à terme, les options et les swaps), qui constituent autant d’instruments financiers.

S’ils peuvent former l’une des composantes d’un emprunt structuré, les swaps et les contre-swaps peuvent aussi faire l’objet de contrats autonomes. Initialement conçus comme des instruments de couverture, ils n’ont pas échappé à la sophistication croissante des produits financiers ; sont ainsi apparues des possibilités de modulation du taux du swap versé à la contrepartie en fonction de la réalisation d’une condition de marché. Cette possibilité de bonifier le taux du swap a pour corollaire un accroissement du risque encouru, comme pour les produits structurés.

Grâce aux combinaisons permises par ces instruments dérivés, et à la variété des indices sous-jacents, la multiplication et la sophistication des formules à la base des emprunts structurés et des swaps sont virtuellement illimitées. 

Quelques exemples d’emprunts structurés

Les emprunts structurés combinent, de manière étroite, trois catégories de produits dérivés :

● Les swaps désignent des échanges de flux financiers, calculés à partir d’un montant théorique de référence appelé notionnel, entre deux entités pendant une certaine période de temps : en matière d’emprunts, les swaps de taux d’intérêt permettent d’échanger par exemple un taux fixe contre un taux variable.

Ces produits sont à la base des structures dans lesquelles, avant ou après la phase d’amortissement où le taux dépend de l’évolution d’un indice sous-jacent, l’emprunteur bénéficie d’une phase bonifiée – généralement de deux à cinq ans, parfois davantage – avec un taux très faible voire nul.

Ainsi le contrat TOFIX OVERTEC proposé par Dexia comportait-il deux phases :

– la première, assez courte (onze mois pour l’emprunt contracté par la commune de Compiègne en 2006), avec un taux fixe (3,20 % l’an) ;

– la seconde (dix ans) avec un taux calculé suivant la formule [2 x Euribor12M
– TEC10 + constante] (fixée à 0,85 %, en l’espèce).

Ce type d’emprunt était classé 3D dans la « charte Gissler ».

● Les contrats d’option par lesquels une partie accorde à une autre le droit (mais non l’obligation) de lui acheter ou de lui vendre un actif, durant une période ou à une date précise, moyennant le versement d’une prime ; grâce à ces instruments – le plus simple est le cap qui permet de faire face à une hausse excessive des taux – l’acquéreur peut se couvrir de manière conditionnelle contre un risque.

Ce sont les produits dans lesquels la formule correspondant au taux d’intérêt est construite avec une condition – ils se reconnaissent aisément par la présence de la conjonction « si » dans les contrats.

Le groupe Dexia a, par exemple, proposé à ses clients des financements à taux fixe (ou indexé sur l’EURIBOR) annulable pour lesquels, après une première phase en taux fixe (ou variable), la banque pouvait à une date donnée décider de basculer définitivement le taux fixe en taux variable (ou le taux variable en taux fixe). En dépit de l’imprévisibilité de leurs modalités d’indexation, ces emprunts structurés peu volatils sont considérés comme faiblement risqués et cotés 1C.

Comme leurs concurrents, les caisses d’épargne ont également commercialisé un contrat-type HELVETIX dont les annuités reposaient, après une phase bonifiée (quatre années au taux fixe de 2,74 %, dans le cas du contrat souscrit par Melun en 2007), sur la formule suivante :

– si la parité entre l’euro et le franc suisse est supérieure ou égale à 1,44 alors le taux d’intérêt applicable sera un taux fixe de 2,74 % ;

– sinon, le taux d’intérêt est égal à [2,74 % + 0,6 x (EUR/CHF au jour de souscription – EUR/CHF)/(EUR/CHF)].

De tels contrats, basés sur des indices hors zone euro, sont exclus de la « charte Gissler » (classés « hors charte » ou 6F).

● Les contrats à terme, de type forwards (gré à gré) et futures (sur un marché réglementé), sont des engagements fermes d’acheter ou de vendre une quantité convenue d’un actif à un prix et à une date future convenus : les forward rate agreements permettent ainsi de fixer à l’avance le taux d’intérêt pour un montant nominal donné.

Dans certains produits, ce n’est pas la formule sur laquelle est basé le taux d’intérêt mais l’indice sous-jacent lui-même qui dépend des anticipations des marchés. La formule utilisée fera, par exemple, référence à un écart entre deux points plus ou moins éloignés sur la courbe des taux – ce que l’on nomme spread entre les taux longs et les taux moyens. Beaucoup de contrats sont ainsi basés sur des CMS (constant maturity swaps) ; il s’agit d’opérations d’échanges périodiques d’intérêt entre un taux long glissant et un taux court, sur une maturité donnée.

À titre d’illustration, on peut rappeler que Dexia a commercialisé un contrat « TOFIX FIXMS » comportant trois phases :

– une première phase (deux ans pour la commune de Gourdon – 4 858 habitants – dans le Lot), pendant laquelle le taux appliqué est fixe (3,84 %) ;

– une deuxième phase (pendant quinze ans), où le taux est égal à [5,21 % – 5x (CMS EUR 30 ans – CMS EUR 2 ans)] si la différence entre le CMS EUR 10/30 ans et le CMS EUR 2 ans est négative et à 3,84 % sinon ;

– une troisième phase (pendant les sept dernières années), avec un taux à nouveau fixé à 3,84 %.

Du fait de son multiplicateur, une telle formule était cotée 3E sur le fondement de la « charte Gissler ».

Source : Rapport de la commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux, Assemblée nationale, décembre 2011.

● Si les tout premiers emprunts sophistiqués sont apparus à la fin des années 1990 pour répondre aux besoins spécifiques d’organismes de logement social, d’hôpitaux ou de grandes collectivités, la diffusion des emprunts structurés a réellement débuté à compter de 2003, correspondant à un effort d’investissement concomitant à l’acte II de la décentralisation. Elle a franchi une nouvelle étape en 2007 avec une forte poussée de l’investissement local, au sein des grandes comme des petites collectivités, dans un contexte marqué par une forte remontée des taux d’intérêt.

La volatilité des indices sous-jacents sur lesquels étaient bâtis les emprunts structurés, accrue par la crise financière mondiale ouverte en 2008, a favorisé le franchissement de barrières et l’activation des formules de calcul les plus défavorables. C’est finalement à l’automne 2008 que la présence « d’emprunts toxiques » a été dénoncée, à travers la presse généraliste, par quelques exécutifs locaux inquiets de l’envolée des taux d’intérêt d’emprunts qui commençaient à sortir de leur phase bonifiée.

Aujourd’hui encore, il demeure difficile d’évaluer précisément l’ampleur du risque financier lié aux emprunts structurés. En dépit des tentatives de l’Inspection générale des finances en 2009 ou des juridictions financières en 2011, opérées par sondages, l’État n’appréhende qu’imparfaitement les encours. La tentative de recensement menée en 2012 par la Direction générale des collectivités locales (DGCL) et la Direction générale des finances publiques (DGFiP) a fait long feu, tant l’exploitation des nouvelles annexes comptables, introduites à cet effet, s’est révélée difficile. Parce que le secret bancaire n’était pas opposable à son rapporteur, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale est la seule à avoir pu évaluer à 32,1 milliards d’euros l’encours total des emprunts structurés, en s’appuyant sur les données exhaustives des établissements bancaires qui avaient commercialisé ces produits. Mais cette analyse remonte au troisième trimestre 2011 et elle ne reflète pas les efforts récents de désensibilisation des encours.

ENCOURS DES EMPRUNTS STRUCTURÉS EN 2011 (TOUTES BANQUES)

(en millions d’euros et en pourcentage de l’encours total)

Emprunteurs

Nombre de contrats

Encours total des emprunts structurés

Encours à risque faible

Encours à risque
(5B, 5C, 5D, 2E, 3E, 4E, 5E, HC*)

Dont encours très risqué
(3E, 4E, 5E, HC*)

Collectivités territoriales

8 968

23 323

9 675

41,5 %

13 648

58,5 %

11 641

49,9 %

Communes

6 230

11 190

4 279

37,0 %

6 912

61,8 %

5 721

51,1 %

dont -10 000 hab.

3 804

3 049

1 341

44,0 %

1 708

56,0 %

1 394

45,7 %

dont 10 000 à 100 000 hab.

2 237

6 568

2 182

33,2 %

4 387

66,8 %

3 627

55,2 %

dont +100 000 hab.

189

1 573

756

48,1 %

817

51,9 %

700

44,5 %

EPCI et autres structures (CCAS, SDIS, syndicats…)

2 135

5 818

2 454

42,2 %

3 364

57,8 %

2 847

48,9 %

Départements

402

4 205

1 744

41,5 %

2 461

58,5 %

2 282

54,3 %

Régions

201

2 110

1 198

56,8 %

911

43,2 %

791

37,5 %

Hôpitaux et établissements de santé

1 180

5 964

2 664

44,7 %

3 300

55,3 %

2 689

45,1 %

Organismes de logement social

540

2 838

959

33,8 %

1 879

66,2 %

1 457

51,3 %

TOTAUX

10 688

32 125

13 298

41,4 %

18 807

58,6 %

15 787

49,2 %

*HC=hors charte.

Source : Commission d’enquête, encours au 28 octobre 2011 (sauf Dexia : 31 août 2011). Les cotations utilisées sont celles de la « charte Gissler ».

● La crise financière, ouverte en 2008, n’a pas seulement fait exploser les taux d’intérêt de certains emprunts structurés, adossés par exemple à la parité entre l’euro et le franc suisse. Elle a également fait vaciller le groupe franco-belge Dexia, confronté à une crise de liquidités, qui a fait l’objet d’un plan de sauvetage – élaboré dans l’urgence par la précédente majorité.

Créée en janvier 2013, la société de financement local (SFIL) est un établissement de crédit qui porte les encours de Dexia Municipal Agency (DMA), société de crédit foncier, acquis fin janvier 2013 pour 1 euro.

La SFIL est détenue à 75 % par l’État, 5 % par La Banque Postale (LBP) et 20 % par la CDC en actions de préférence.

La SFIL portait à fin décembre 2013 7,7 milliards d’euros de prêts structurés dit « sensibles ». Ces encours sont détaillés dans le tableau ci-dessous.

ENCOURS DES EMPRUNTS STRUCTURÉS EN 2013 (SFIL UNIQUEMENT)

(en millions d’euros)

 

Tous emprunts sensibles

(S1, S2, S3, S4, S5 (2) )

Emprunts très sensibles

(S1, S2, S3)

Capital restant dû

Indemnité de remboursement anticipé

Nombre

Capital restant dû

Indemnité de remboursement anticipé

Nombre

Communes de <10 000 habitants

627

514

181

237

386

74

Communes de >10 000 habitants

2 728

1 642

296

1 264

1 213

149

EPCI <10 000 habitants

30

24

8

13

15

3

EPCI >10 000 habitants

773

487

91

339

370

42

Départements

1 303

849

32

790

722

19

Régions

345

227

8

208

194

7

Total collectivités

5 807

3 743

616

2 851

2 901

294

(dont -10 000 habitants)

657

538

189

250

401

77

Autres groupements

756

589

71

427

496

38

Établissements publics de santé

1 254

869

132

611

688

52

Organismes du logement social

465

192

40

104

95

10

TOTAL

8 282

5 392

859

3 993

4 180

394

Source : SFIL, juin 2013.

L’État est également devenu actionnaire à 44 % du groupe Dexia Crédit local via la holding Dexia SA. Il est donc aujourd’hui doublement engagé, comme actionnaire de la SFIL et de Dexia SA, mais également comme garant de Dexia Crédit local.

2. Le contentieux engagé par les collectivités

a.  Les décisions de première instance déjà intervenues

En dépit des très nombreuses assignations déposées, les emprunts structurés et les swaps souscrits par les acteurs publics locaux n’ont pour l’heure donné lieu qu’à un nombre limité de décisions, rendues uniquement en première instance.

i.  Département de la Seine-Saint-Denis contre DCL (décisions du 8 février 2013)

Le TGI de Nanterre a rendu trois jugements le 8 février 2013 concernant le même contrat de prêt litigieux. Il a notamment considéré que le fax de confirmation matérialisait la rencontre des volontés des deux parties sur les éléments essentiels du contrat et constituait ainsi un contrat de prêt valablement formé. C’est là l’aspect réellement innovant de la décision. Le tribunal en a déduit, dans la ligne de la jurisprudence classique de la Cour de cassation, que, puisque le taux effectif global (TEG) ne figurait pas sur le fax de confirmation, la stipulation du taux d’intérêt conventionnel était nulle et le taux légal devait lui être substitué.

Le tribunal ne s’est, en revanche, pas prononcé sur les autres demandes car elles n’étaient pas formulées à titre principal.

ii.  Lille Métropole Communauté Urbaine contre The Royal Bank of Scotland (décision du 28 janvier 2014)

Le TGI de Paris a condamné la banque RBS sur le fondement de manquement à ses obligations d’information et de conseil à l’égard de l’emprunteur. C’est le premier arrêt établi sur ce fondement, même si l’espèce portait sur un contrat financier (un swap) et non sur un emprunt.

Le Rapporteur souligne qu’il existe des obligations d’information, de conseil et de mise en garde spécifiques à ce type de contrats, auxquels la législation en matière de TEG n’est en revanche pas applicable.

iii.  Commune de Saint-Maur-des-Fossés contre Dexia Crédit Local (décision du 7 mars 2014)

C’est la deuxième décision la plus marquante. Le TGI de Nanterre a statué par jugement du 7 mars 2014 sur deux points. Il a d’abord accepté l’intervention volontaire de la SFIL-CAFFIL à l’instance, en constatant qu’il existait un lien suffisant entre l’intervention volontaire et le litige.

Le tribunal a considéré que le fax de confirmation daté du 1er juin 2007 matérialisait un contrat de prêt valablement formé ; il a, toutefois, rejeté la demande de nullité de la stipulation d’intérêt tirée d’un TEG erroné car celle-ci était prescrite.

En revanche, il a suivi la demande de nullité de la stipulation d’intérêts, fondée sur l’absence de taux de période et de durée de période, dans le contrat de prêt daté du 15 juin 2007 et faisant suite au fax de confirmation. Il a, par conséquent, substitué le taux d’intérêt légal au taux conventionnel.

iv.  Commune de Saint-Maur-des-Fossés contre Dexia Crédit Local (décision du 30 mars 2014)

Le TGI de Nanterre a statué sur un second litige opposant la commune à Dexia. Il a d’abord accepté l’intervention volontaire de la SFIL-CAFFIL à l’instance.

Comme dans la première affaire, il a ensuite considéré que le fax de confirmation matérialisait la rencontre des volontés des deux parties sur les éléments essentiels du contrat et constituait ainsi un contrat de prêt valablement formé. Constatant l’absence du TEG sur le fax de confirmation, il a substitué au taux d’intérêt conventionnel le taux légal.

v.  Département de la Seine-Saint-Denis contre Depfa (décision du 25 mars 2014)

Le TGI de Paris a récemment rappelé, dans une affaire opposant le département de la Seine-Saint-Denis à la banque Depfa, que le TEG devait être indiqué dans tous les contrats de prêt, y compris à taux variable, « même si, en raison même de l’aléa inhérent à ce type de prêt, la fonction informative de la mention est moins complète en cette hypothèse ».

Il a, pour le reste, appliqué au cas d’espèce la jurisprudence dégagée par le TGI de Nanterre.

vi.  Commune de Saint-Leu-la-Forêt contre DCL (décision du 6 juin 2014)

Dans ce jugement plus récent, le TGI de Nanterre a repris la solution dégagée en février 2013 : le TEG ne figurant pas sur le fax de confirmation, la stipulation du taux d’intérêt conventionnel est nulle et le taux légal doit lui être substitué.

Toutefois, la commune réclamait, en sus de la substitution du taux légal à la stipulation d’intérêts, la condamnation des défenderesses à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice que lui a causé le comportement de la banque, et notamment la perte de chance de ne pas souscrire un prêt risqué ayant entraîné un coût excessif d’intérêts spéculatifs et la mise en place d’une indemnité de remboursement anticipé exorbitante.

Le tribunal rejette la demande, estimant que la commune de Saint-Leu « ne fournit aucun élément chiffré permettant de connaître l’évolution du taux d’intérêt du prêt critiqué, ni le montant de l’indemnité de remboursement anticipé » et ne rapporte pas la preuve du caractère sérieux et probable de la conclusion d’un contrat plus avantageux que le contrat litigieux.

Le Rapporteur souligne que, à l’exception de la décision Lille Métropole Communauté Urbaine contre The Royal Bank of Scotland (point ii), toutes les autres espèces sont dans le champ des validations législatives auxquelles procèdent les articles 1er et 2.

b.  Encouragées par la jurisprudence ainsi esquissée, les nouvelles assignations ont eu tendance à augmenter au cours des derniers mois

Selon le dernier pointage communiqué au Rapporteur :

–  205 emprunteurs avaient assigné la SFIL au 31 décembre 2013, 139 de ces assignations soulevant le motif de l’absence de TEG (dont 113 déposées à compter de février 2013) et 50 soulevant le motif de l’absence du taux de période et/ou de durée de période ;

–  s’agissant de DCL : 50 contrats de prêt avaient fait l’objet d’assignation pour absence de TEG au 31 décembre 2013 (contre 19 contrats au 31 mars 2013) et 23 assignations soulevaient le motif de l’absence de taux de période et/ou de durée de période.

LES RÈGLES DE LA PRESCRIPTION

Le droit de la prescription civile a été réformé par l’article 1er de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, qui a modifié les articles 2222 et 2224 du code civil.

Il n’y a pas de prescription générale s’agissant des emprunts structurés souscrits par les acteurs publics locaux au cours de la décennie 2000. Il faut apprécier au cas par cas la prescription des actions offertes.

● s’agissant des actions en nullité des contrats, fondées sur les vices du consentement (dol, erreur…), la réforme de 2008 n’a eu aucun impact. Ces actions continuent à se prescrire par cinq années, à compter de la découverte de la cause de nullité.

● s’agissant des actions en responsabilité contractuelle, un nouveau délai de 5 ans a été instauré par la réforme de 2008 qui court à compter de la découverte des faits donnant droit à action.

Ainsi, une collectivité qui aurait conclu en 2002 un contrat de prêt et aurait appris seulement en 2009 que la banque l’avait trompée, mal informée, méconnu ses obligations légales et contractuelles, et lui avait causé un préjudice, aurait 5 ans pour agir à compter de cette découverte. Elle aurait donc jusqu’en 2014, au minimum, pour assigner l’établissement prêteur.

● s’agissant du cas particulier des actions fondées sur l’omission ou le caractère erroné du TEG, la jurisprudence tend à considérer que la découverte des faits donnant droit à action remonte au jour de la conclusion du contrat ; lorsque le fax de confirmation présentait les caractéristiques d’un contrat mais que la prescription était applicable, le juge a accepté de retenir le contrat formel lorsque celui-ci échappait à la prescription.

La commercialisation des emprunts toxiques ayant à peu près cessé à compter de 2008, les actions fondées sur l’omission ou l’erreur du TEG sont désormais prescrites pour la quasi-totalité des contrats.

Sources : commission des Finances ; Tribune de M. Bruno Wertenschlag, février 2013.

3. En l’absence de loi de validation, la confirmation des décisions de première instance ferait peser un risque majeur sur les finances publiques, qui est évalué par le Gouvernement à 17 milliards d’euros

Comme le détaille l’étude d’impact jointe au présent projet de loi, ce risque aurait deux composantes :

– un risque financier direct, lié aux pertes subies par la SFIL et par Dexia en cas de généralisation de la jurisprudence des TGI de Nanterre et de Paris à l’ensemble des encours susceptibles de faire l’objet d’un contentieux ;

– un risque financier indirect, qui correspond au surcoût occasionné par la mise en extinction de la SFIL.

a.  À quelle hauteur les risques financiers liés à la généralisation de cette jurisprudence doivent-ils être provisionnés ?

● Du point de vue des normes comptables (3), une provision doit être constatée si trois conditions sont réunies simultanément : l’existence d’une obligation actuelle résultant d’un événement passé, la probabilité d’une sortie de ressources et une estimation fiable du montant de l’obligation.

Le principe de prudence impose donc, sous le contrôle des commissaires aux comptes, d’anticiper la généralisation de la jurisprudence des TGI de Nanterre et de Paris à l’ensemble des contrats de la SFIL ou de Dexia faisant l’objet d’une assignation fondée sur l’absence ou l’erreur de TEG, de taux de période ou de durée de période. Cela suppose :

– d’une part, que la SFIL et Dexia enregistrent en résultat la déchéance du taux d’intérêt (substitution du taux légal au taux conventionnel) en application des décisions existantes,

– d’autre part, que la SFIL et Dexia « débouclent » les instruments de couverture souscrits par la banque pour se protéger des fluctuations liées à la formule de taux.

Dans ces conditions, le montant minimum – au titre des seuls encours faisant l’objet de procédures contentieuses – des provisions à constituer atteindrait 3,3 milliards d’euros pour la SFIL et 300 millions d’euros pour Dexia, dont respectivement 780 millions d’euros et 70 millions d’euros correspondant à l’impact de la substitution du taux légal. Ces provisions devraient être passées au premier semestre 2014.

Compte tenu de la censure par le Conseil constitutionnel du dispositif voté en fin d’année dernière, le Rapporteur s’est interrogé sur la manière dont la SFIL et Dexia étaient parvenues à arrêter leurs comptes pour l’exercice 2013 sans provisionner l’intégralité du risque lié au TEG 4.

Il apparaît que les commissaires aux comptes de SFIL n’ont accepté de certifier les comptes 2013 que sous une importante réserve. Les documents comptables sont en effet assortis de la mention suivante : « Les comptes au 31 décembre 2013 ont été établis à partir des informations disponibles à la date de préparation. Ils tiennent compte, notamment, de l’hypothèse selon laquelle les dispositions législatives visant à la sécurisation juridique des contrats de prêts en cours avec les personnes morales de droit public (loi de validation), qui figuraient dans le projet de loi de finances pour 2014 et qui ont été rejetées par le Conseil constitutionnel le 29 décembre 2013, seront votées en 2014 et que leur mise en œuvre permettra de lever les risques juridiques et financiers correspondants. Cette hypothèse repose sur l’engagement du Gouvernement de trouver une solution pérenne et globale au problème des emprunts structurés contractés par les personnes morales de droit public, et notamment dans son communiqué publié dès le 29 décembre 2013 qui précisait qu’« un dispositif législatif tenant compte des arguments soulevés par le Conseil constitutionnel sera préparé dans les meilleurs délais. »

La situation de Dexia posait moins de difficultés et des provisions ont pu être constituées, eu égard à la modicité des encours résiduels. Le rapport annuel pour 2013 de Dexia Crédit Local précise ainsi (page 114) : « Au 31 décembre 2013, Dexia Crédit Local avait été assigné par 219 clients, dont 41 sur lesquels la banque a un encours, l’encours résiduel étant sur le bilan de la SFIL. Dexia Crédit Local n’a donné aucune assertion ni garantie sur les prêts de CAFFIL au moment de la cession de SFIL, en janvier 2013. Néanmoins DCL, en tant que représentant légal de CAFFIL jusqu’au moment de la vente, demeure responsable des dommages accordés à un emprunteur en raison du non-respect de ses obligations contractuelles ou réglementaires au moment de l’origination ou la commercialisation des crédits structurés détenus par CAFFIL au moment de sa cession. Une provision pour litiges sur crédits structurés en France faisant l’objet d’une assignation en justice a été comptabilisée pour EUR 63 millions en 2013. »

Au-delà de ce provisionnement initial sur 2013 et 2014, le Rapporteur souligne que le montant des provisions devra être ajusté au rythme des nouvelles assignations, qui ont eu tendance à augmenter au cours des derniers mois. Dans l’hypothèse où l’ensemble des contentieux potentiels devraient être provisionné à 100 %, l’évaluation préalable du projet de loi évalue les provisions cumulées à 10,6 milliards d’euros, dont 7,5 milliards d’euros pour la SFIL et 3,1 milliards pour Dexia.

● Compte tenu de la faiblesse des fonds propres de la SFIL, qui s’élèvent à 1,5 milliard d’euros soit 500 millions d’euros de marge au-dessus du plancher réglementaire, ces obligations de provisionnement pourraient se traduire à leur tour par une recapitalisation par l’État et la Caisse des dépôts, actionnaires de la SFIL.

L’étude d’impact évalue le besoin en capital à au moins 2 milliards d’euros, dans l’hypothèse d’un provisionnement à 75 % des seuls encours en contentieux, et à 10 milliards d’euros en cas de provisionnement intégral de l’ensemble des encours susceptibles de faire l’objet de contentieux. Le Rapporteur souligne qu’une recapitalisation aussi importante aurait probablement un impact immédiat sur le déficit budgétaire et la dette maastrichtienne (5).

Dans le cas de Dexia, structure gérée en extinction, le besoin de capital serait égal au montant des provisions nouvelles constatées sur les encours structurés en cas de progression des contentieux.

Dans ces conditions, le risque financier direct pour l’État en l’absence de loi de validation serait compris entre 1,5 milliard et 10 milliards d’euros, en fonction de plusieurs facteurs tels que l’évolution du contentieux, le niveau de provisionnement ou encore le partage de la recapitalisation avec la Caisse des dépôts et La Banque Postale – coactionnaires à hauteur, respectivement, de 20 % et 5 % de la SFIL.

b.  Le risque de mise en extinction de la SFIL en cas d’absence de validation est-il avéré ?

S’agissant du risque financier indirect pour l’État, il peut être estimé à 7 milliards d’euros. Ce montant correspond au coût de la mise en extinction de la SFIL, laquelle deviendrait très probable si le risque direct se matérialisait dans les proportions indiquées précédemment. En effet, comme indiqué ci-dessus, compte tenu de l’absence de marge de sécurité sur les fonds propres et conformément aux engagements pris par l’État auprès de la Commission européenne et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’État n’aurait alors d’autre choix que de recapitaliser la SFIL à hauteur des pertes potentielles.

Une éventuelle recapitalisation de la SFIL devrait être notifiée à la Commission européenne, qui imposerait certainement, compte tenu du montant en jeu, sa mise en extinction.

Les contreparties qui seraient exigées par la Commission européenne à l’autorisation de la recapitalisation ne seraient en effet certainement pas compatibles avec la viabilité de la SFIL, dont l’activité est déjà fortement contrainte par la décision de la Commission européenne du 28 décembre 2012.

Or, en cas de mise en extinction, la SFIL subirait un risque financier additionnel correspondant :

– d’une part, au manque à gagner lié à l’impossibilité pour SFIL-CAFFIL de refinancer la production nouvelle générée aujourd’hui par La Banque Postale et donc de capter une partie de la marge liée à cette production nouvelle ;

– d’autre part à l’accroissement du coût de financement de SFIL-CAFFIL (hors émission d’obligations foncières) qui résulterait notamment de la dégradation de sa notation, certaine en cas de mise en extinction.

Afin d’éviter que la dette de la structure de défaisance – soit environ 30 milliards d’euros – que deviendrait alors la SFIL ne soit comptabilisée dans le périmètre de la dette publique, il pourrait être nécessaire de capitaliser ab initio la SFIL de telle manière que le montant de capital couvre toutes les pertes attendues au cours de la durée du plan de résolution, soit jusqu’en 2030. Ces pertes sont estimées, dans l’étude d’impact, à environ 7 milliards d’euros ; dans un tel scénario ce coût serait probablement assumé seul par l’État, en tant qu’actionnaire de référence de la SFIL.

Au total, le risque financier pour l’État (direct et indirect) en cas d’absence de loi de validation peut donc être estimé, au maximum, à 17 milliards d’euros.

II. L’ÉTAT A ENGAGÉ SES RESSOURCES, DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE DIFFICILE, AFIN D’ACCOMPAGNER LES COLLECTIVITÉS ET LES HÔPITAUX

Beaucoup a déjà été fait pour tirer les leçons des errements du passé : l’article 32 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a permis de mieux encadrer – pour l’avenir – les conditions d’emprunt des collectivités ; les articles 92 à 94 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles ont renforcé le contrôle du flux des nouveaux emprunts, en prévoyant :

– la caducité des délégations consenties par les assemblées délibérantes dès l’ouverture de la campagne électorale ;

– l’élargissement du champ des débats d’orientation budgétaire dans nos collectivités ;

– ou encore, l’obligation de provisionner les risques liés à la souscription des produits financiers.

En dépit de ces avancées, il restait encore à traiter le « stock » des emprunts structurés, ou du moins des plus toxiques d’entre eux. L’actuelle majorité s’y est attelée, dans un contexte budgétaire pourtant difficile.

1. Le fonds de soutien créé par l’article 92 de la LFI pour 2014

● Le I de l’article 92 de la LFI pour 2014 a créé un fonds de soutien, doté de 100 millions d’euros par année pendant quinze ans, afin d’accompagner les communes, les départements, les régions et leurs groupements (y compris les établissements publics locaux et les services départementaux d’incendie et de secours) qui ont souscrit auprès de banques des emprunts structurés devenus « toxiques ».

Le coût pour le budget général est compensé par le relèvement du taux de la taxe sur les risques systémiques. Ainsi, le financement du fonds sera assuré, pour moitié, par le secteur bancaire et précisément par une vingtaine d’établissements de crédit situés en France, qui représentent 96 % des exigences en capitaux propres du secteur.

Les aides du fonds prendront la forme d’une subvention annuelle correspondant à une fraction de l’indemnité de remboursement anticipé (IRA).

Le dispositif impose toutefois une contrepartie rigoureuse aux collectivités sollicitant l’aide du fonds en prévoyant que le bénéfice de l’aide au titre d’un contrat de prêt souscrit auprès d’un établissement de crédit est subordonné à la conclusion d’une transaction, au sens de l’article 2044 du code civil. Concrètement, une collectivité sollicitant une subvention pour un emprunt structuré devra, pour bénéficier de l’aide, renoncer à contester devant les juridictions civiles l’ensemble des autres contrats de prêt conclus avec cette banque, dès lors qu’ils font effectivement l’objet du versement d’une aide par le fonds de soutien.

● Le dispositif a été largement réaménagé par l’Assemblée nationale.

À l’initiative de la commission des Finances, ce fonds a été doté d’un comité d’orientation et de suivi, chargé d’élaborer la doctrine d’intervention du fonds, en émettant des recommandations et avis consultatifs. Un plafond de prise en charge par le fonds est également fixé à 45 % du montant des indemnités pour chaque contrat tandis que les modalités de calcul des aides individuelles sont renvoyées à un décret, après avis du comité d’orientation.

Dans les mêmes conditions, a été portée à trois ans à compter du dépôt de la demande la durée pendant laquelle l’aide peut être versée sous forme de simple bonification destinée à alléger la charge financière des collectivités. Cet allongement devait permettre aux collectivités d’attendre des conditions de marché plus favorables pour procéder au remboursement anticipé des emprunts souscrits. Au terme de cette phase initiale, la poursuite du versement de la bonification sera appréciée au cas par cas en fonction des conditions de marché.

À l’initiative du Rapporteur général, il a été prévu d’autoriser les collectivités, au cas par cas, à continuer après la phase initiale à percevoir l’aide du fonds de soutien sous forme d’une bonification destinée à alléger les charges financières et à permettre d’attendre des conditions de marché plus favorables pour procéder au remboursement anticipé. Cette dérogation sera toutefois limitée à certaines catégories de produits déterminées par le comité d’orientation et de suivi ; elle prendrait la forme d’une clause de revoyure tous les trois ans. Le remboursement anticipé demeurera la solution privilégiée pour le plus grand nombre de produits conformément à l’esprit du Pacte de confiance et de responsabilité.

Les textes d’application ont été soit publiés (décret en Conseil d’État, le 2 mai 2014), soit sont sur le point de l’être (décret simple). En revanche, le dispositif ne pourra être pleinement opérationnel que lorsque le service à compétence nationale gestionnaire du fonds et le comité d’orientation et de suivi auront élaboré une doctrine d’emploi pour le traitement des dossiers. La constitution de ce comité est en cours, le ministre ayant déjà saisi les autorités compétentes pour désigner les membres de ce comité.

En tout état de cause, les collectivités locales pourront voir leur dossier examiné avant fin 2014.

2. Le dispositif d’accompagnement des hôpitaux

Lors de la présentation du présent projet de loi en conseil des ministres, le 23 avril 2014, le Gouvernement a annoncé la mise en place d’un dispositif ad hoc d’accompagnement des hôpitaux les plus exposés aux emprunts structurés.

● En effet, comme l’avait souligné en son temps la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, les hôpitaux publics qui ont contracté ces emprunts devenus toxiques se trouvent dans une situation proche de celle des collectivités territoriales. Alors qu’un fonds de soutien, abondé pour partie par les banques, a été créé dans la LFI pour 2014, aucun dispositif ne concernait jusqu’à présent les hôpitaux.

Les emprunts toxiques représentaient, pour ces derniers, un encours de 1,1 milliard d’euros, soit 4 % de leur encours total, au 31 décembre 2012. Les indemnités de remboursement anticipé (IRA) correspondant à ces prêts s’élevaient, quant à elles, à 1,4 milliard d’euros. Une centaine d’hôpitaux seraient concernés, mais l’exposition au risque paraît très variable (6).

● Le montant des aides accordées par ce nouveau dispositif d’accompagnement atteindra 100 millions d’euros, soit un calibrage comparable à celui du fonds de soutien proportionnellement à l’encours toxique. La durée du dispositif devrait être comprise entre 3 et 7 ans. Selon les informations transmises au Rapporteur, ce dispositif serait financé par un abondement volontaire des banques les plus concernées – la SFIL et Dexia – à hauteur de 25 millions d’euros et pour partie par l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) à hauteur de 75 millions d’euros.

Les aides accordées abonderont le Fonds d’intervention régional (FIR) par des crédits nationaux délégués aux agences régionales de santé (ARS). L’abondement du FIR par les deux établissements bancaires supposera la création d’un fonds de concours dédié, par arrêté du ministre du budget. Le Rapporteur souligne que l’utilisation d’un fonds existant a été préférée afin de gagner du temps et de permettre, dès 2014, des versements aux hôpitaux les plus exposés.

Enfin, la doctrine d’attribution sera proche de celle du fonds de soutien aux collectivités territoriales. Un suivi des situations individuelles des hôpitaux et des aides attribuées sera assuré par le Comité de performance et de modernisation (Copermo). Les aides versées seront ciblées sur les établissements les plus exposés, c’est-à-dire des hôpitaux locaux, de petite taille, dont les emprunts risqués forment une part importante de leur encours et pour lesquels les coûts de sortie du prêt sont hors d’atteinte de leur budget. L’attribution des aides sera conditionnée à une transaction globale sur l’ensemble des prêts souscrits et à la renonciation à tout recours contentieux. Le montant des aides versé à chaque établissement sera plafonné à 45 % des IRA, comme pour les collectivités.

III. CONTREPARTIE À CET ENGAGEMENT, LE PROJET DE LOI DE VALIDATION EST CIBLÉ ET IL POURSUIT UN OBJECTIF D’INTÉRÊT GÉNÉRAL IMPÉRIEUX

L’engagement des ressources du budget général pour traiter le stock des emprunts toxiques emporte une contrepartie : la sécurisation du risque qui pèse désormais sur l’État.

1. Les deux validations auxquelles procède le projet de loi sont strictement proportionnées à l’objectif poursuivi

● Afin de contenir les conséquences financières de cette jurisprudence, le présent projet de loi procède à la validation des contrats de prêt, ainsi que de leurs avenants, conclus entre un établissement de crédit, au sens de l’article L. 511-1 du code monétaire et financier, et une personne morale de droit public, en tant que la validité de la stipulation d’intérêts serait contestée par le moyen tiré :

– du défaut de mention du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de la période ;

– de la mention d’un taux effectif global, d’un taux de période ou d’une durée de la période erroné.

Sont visés la totalité des contrats conclus avant l’entrée en vigueur de la présente loi, ce qui englobe la totalité des prêts structurés à risque souscrits par les collectivités territoriales depuis les années 2000 sans se limiter aux produits à risques aidés par le nouveau fonds de soutien, c’est-à-dire ceux qui sont classés « hors charte » ou 3E, 4E et 5E. En revanche, les contrats de prêt à taux fixe ou à taux variable simple sont expressément exclus de ces deux validations.

● Le projet de loi de validation comprend ainsi quatre articles :

L’article 1er déclare valides les contrats de prêt conclus par les personnes morales de droit public, dont la légalité serait contestée pour défaut de certaines mentions, comme le TEG, prescrites par le code de la consommation.

L’article 2 procède à une seconde validation des contrats de prêt, dont la légalité serait contestée au motif que TEG mentionné, ou d’autres éléments prescrits par le code de la consommation, est erroné. Il prévoit également, pour l’avenir, de mieux proportionner les conséquences financières pour l’établissement de crédit d’une erreur dans le calcul de ces éléments.

Aux termes de l’article 3, les contrats de prêt les plus simples – à taux fixe, ou à taux variable reposant sur des formules peu sophistiquées – sont expressément écartés de l’application des deux validations prévues aux articles 1er et 2.

En dernier lieu, l’article 4, introduit par le rapporteur du Sénat, prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport sur la législation applicable au TEG.

2. Cette validation satisfait aux critères dégagés par la jurisprudence constitutionnelle

● Comme toute validation législative, le présent projet de loi soustrait rétroactivement des actes au risque d’annulation par le juge, ce qui le rend suspect de porter atteinte à la sécurité juridique. Sous l’influence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), la jurisprudence du juge constitutionnel, comme celles du Conseil d’État et de la Cour de cassation (7), ont évolué dans le sens d’une plus grande fermeté.

Le Rapporteur rappelle, à cet égard, que le Conseil constitutionnel a récemment jugé (8) qu’une validation législative devait être justifiée par « un motif impérieux d’intérêt général », et non plus « un motif d’intérêt général suffisant », reprenant en cela la formulation employée par la CEDH lorsqu’elle examine des validations législatives.

● Le juge constitutionnel a défini un ensemble de critères à l’aune desquels une mesure de validation est appréciée.

Il n’est pas porté atteinte aux droits nés de décisions devenues définitives. Les articles 1er et 2 préservent expressément les « décisions de justice passées en force de chose jugée » que la validation des contrats n’aboutira pas à remettre en cause. À cet égard, le Rapporteur rappelle que présente le caractère d’une décision passée en force de chose jugée la décision d’une juridiction qui a statué en dernier ressort, même si elle peut faire ou fait l’objet d’un pourvoi en cassation ; cela signifie que les espèces visées par les décisions des TGI de Nanterre et de Paris, pour lesquelles l’appel est encore pendant, ne seront pas à l’abri de la validation.

La validation ne fera pas obstacle à la contestation juridictionnelle des contrats validés par d’autres moyens. Les contrats de prêt ne sont mis à l’abri d’une annulation contentieuse que dans la mesure où leur validité serait contestée par le moyen tiré de l’absence de la mention du taux effectif global ; il restera possible aux personnes morales ayant souscrit ceux-ci d’en contester la légalité par d’autres moyens, comme le vice de consentement ou le manquement à l’obligation d’information.

En prévenant le développement de contestations pouvant entraîner des conséquences financières préjudiciables à la SFIL et à Dexia, ces validations poursuivent un but d’intérêt général impérieux. Si le juge constitutionnel n’admet pas que la seule considération d’un intérêt financier puisse constituer un motif d’intérêt général autorisant le législateur à faire obstacle aux effets d’une décision de justice déjà intervenue et, le cas échéant, d’autres à intervenir, il a admis la constitutionnalité de validations législatives similaires, par leur objet, à celle prévue par le présent article.

Ainsi, le Conseil constitutionnel a estimé que constituaient des buts d’intérêt général suffisants la nécessité d’éviter le développement d’un contentieux pouvant entraîner des conséquences financières préjudiciables à l’équilibre des régimes sociaux (CC n° 93-332 DC du 13 janvier 1994) ou encore celle de prévenir un contentieux pouvant entraîner des risques considérables pour l’équilibre du système bancaire et, par voie de conséquence, pour l’activité économique (CC n° 96-375 DC du 9 avril 1996).

Le Rapporteur estime qu’un risque pour les finances publiques pouvant atteindre 17 milliards d’euros constitue un motif impérieux d’intérêt général.

Le risque pour les finances publiques est d’autant plus susceptible d’être regardé comme un motif impérieux d’intérêt général qu’il intervient dans un contexte de forte tension sur les finances publiques. Au surplus, même si la jurisprudence de la CEDH n’a jamais reconnu le seul motif financier comme motif d’intérêt général, elle ne l’a jamais exclu et le Conseil d’État, statuant au contentieux, a eu l’occasion de préciser que cette exclusion devait s’apprécier in concreto.

Le Rapporteur souligne, en outre, que la remise en cause de la SFIL serait de nature à déstabiliser le financement du secteur local, compte tenu de l’importance de la société (près de 20 % de parts de marché en 2013) pour le financement des collectivités.

Au cours des auditions, les représentants de l’Association des acteurs publics contre les emprunts toxiques (APCET) ont fait valoir que l’intérêt général ne pouvait être invoqué s’agissant de transférer le coût de l’État vers les collectivités.

Le Rapporteur fait observer qu’il ne s’agit pas d’un jeu à somme nulle entre finances publiques nationales et finances publiques locales puisqu’il existe une composante indirecte du risque (jusqu’à 7 milliards d’euros) liée à la mise en extinction de la SFIL.

Par ailleurs, il faut souligner qu’il n’y a pas, non plus, une parfaite symétrie entre l’État et le secteur public local s’agissant du risque direct, car l’État serait amené à recapitaliser SFIL immédiatement (dès 2014) alors que les personnes morales de droit public faisant l’objet de la mesure pourraient étaler le remboursement de la charge sur toute la durée d’un prêt, réduisant d’autant l’impact et l’effort annuel à fournir. Cette différence est d’autant plus cruciale que les contraintes européennes qui pèsent sur notre pays s’apprécient à court terme.

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EXAMEN EN COMMISSION

La Commission examine le projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 2 juillet 2014 à 9 heures 30.

M. Christophe Castaner, rapporteur. Ce texte est à la fois très technique et d’intérêt majeur : la menace que les emprunts structurés font aujourd’hui peser sur nos finances publiques porte sur 17 milliards d’euros !

L’emprunt structuré, comme chacun le sait maintenant, est un produit financier qui mêle à un prêt bancaire classique une ou plusieurs opérations sur des produits dérivés, instruments financiers qui servent de référence pour le calcul des intérêts. Ces produits servent notamment à couvrir différents types de risques – risques de marché, de liquidité, de taux... Leurs inventeurs ayant fait preuve d’une imagination fertile, les résultats ont été très divers et les coûts parfois très importants pour les souscripteurs. Ainsi un hôpital, pour financer la restructuration totale de son système de chauffe, a pris comme indice de référence le cours du Brent – en 2008, tout investisseur aurait pourtant dû penser que le Brent risquait d’augmenter.

Les collectivités territoriales, qui les ont souscrits dans les années 2000, ont été les premières victimes de ces emprunts toxiques. Le maire que je suis n’oublie ni ceux qui venaient lui vendre ces produits, ni les sommes que certaines collectivités locales doivent aujourd’hui payer.

Mais un fait nouveau est survenu depuis février 2013 : le risque s’est déplacé avec la multiplication des contentieux et c’est désormais l’État qui, par le biais de la Société de financement local – SFIL – et de Dexia résiduelle, risque de devoir en supporter le coût. Or, nous savons tous ici qu’il n’en a pas les moyens.

Notre Commission connaît bien ces emprunts. Plusieurs d’entre nous ont pris part, il y a trois ans, aux travaux de la commission d’enquête dont le président était Claude Bartolone et le rapporteur Jean-Pierre Gorges. Les conclusions du rapport d’enquête, adopté en décembre 2011 à l’unanimité des trente membres de la commission, étaient sans ambiguïté. Tout d’abord, ces produits sur mesure, conçus au départ pour les besoins spécifiques de quelques grandes collectivités, ont été diffusés à grande échelle auprès d’acteurs publics locaux de toutes tailles et de toutes sortes – communes de moins de 10 000 habitants, services départementaux d’incendie et de secours – SDIS –, bailleurs sociaux, hôpitaux, même locaux, notamment dans le cadre du plan Hôpital 2007 qui exigeait de lourds investissements…

Autre conclusion du rapport : les responsabilités sont partagées, car certains exécutifs locaux ont fait preuve d’une légèreté coupable. On peut ainsi s’étonner qu’une banque ait été condamnée pour défaut de conseil quand son client était la communauté urbaine de Lille, qui dispose de services financiers aptes à analyser des contrats d’emprunt. Mais les banques sont également responsables : Dexia ainsi que plusieurs de ses concurrentes françaises ou étrangères ont développé une offre commerciale inadaptée aux besoins des acteurs locaux, mais lucrative dans une décennie marquée par la contraction des marges bancaires. On peut également penser à tous ces professionnels de la restructuration de dette venus voir les élus locaux en leur annonçant qu’ils allaient toucher le « jackpot ».

Enfin, le contrôle des services de l’État s’est révélé trop limité sur le terrain ; l’administration centrale a été trop peu vigilante et n’a jamais alerté les préfectures. Il faut toutefois préciser qu’un contrat de prêt est un contrat de droit privé et n’est donc pas soumis au contrôle de légalité – seule l’autorisation d’emprunter l’est, à condition qu’elle soit votée dans le cadre du budget.

Beaucoup a déjà été fait pour tirer les leçons de ces errements. La loi de séparation et de régulation des activités bancaires a permis de mieux encadrer – pour l’avenir – les conditions d’emprunt des collectivités : son article 32, dont le décret d’application est en cours d’examen au Conseil d’État, énumère strictement les indices et les structures auxquels les emprunts locaux devront dorénavant être adossés. Afin de mieux contrôler le flux des nouveaux emprunts, nous avons également adopté, à l’initiative de Christine Pires Beaune, plusieurs amendements, devenus les articles 92 à 94 de la loi de modernisation de l’action publique, qui prévoient la caducité des délégations consenties par les assemblées délibérantes dès l’ouverture de la campagne électorale, qui élargissent le champ des débats d’orientation budgétaire dans nos collectivités et qui obligent à provisionner les risques liés à la souscription de produits financiers.

Mais il restait à traiter les emprunts structurés existants, du moins les plus toxiques d’entre eux, puisque certains se sont révélés être de bonnes affaires pour les collectivités concernées. C’est l’honneur de notre majorité de s’être attelée à cette tâche dans un contexte budgétaire difficile.

Afin d’accompagner les collectivités territoriales, mais aussi leurs établissements publics, les syndicats locaux ou les SDIS dans la renégociation de ces emprunts, la dernière loi de finances a créé un fonds de soutien, doté de 1,5 milliard d’euros sur quinze ans. Les textes réglementaires nécessaires à la mise en place du dispositif ont commencé d’être publiés et le comité d’orientation du fonds devrait être mis en place cet été – la désignation des représentants des différentes institutions est en cours. Nous avions ici même débattu de l’opportunité de créer ce fonds de soutien, certains soulignant un risque de déresponsabilisation dont nous devons indéniablement tenir compte.

Le 23 avril dernier, le Gouvernement a annoncé un dispositif ad hoc d’accompagnement des hôpitaux, dont la situation est parfois proche de celle des collectivités. Ce fonds sera doté, selon mes informations, de 100 millions d’euros, l’encours concerné se montant à près de 1,5 milliard d’euros. D’autres acteurs encore sont concernés, notamment les bailleurs sociaux.

Cet engagement des ressources de l’État n’est pas sans contrepartie.

La crise financière ouverte en 2008 n’a pas seulement fait exploser les taux d’intérêt de certains emprunts structurés, par exemple de ceux adossés à la parité entre l’euro et le franc suisse, voire à l’évolution de la parité entre l’euro et le franc suisse entre la quatrième et la douzième année… Elle a également fait vaciller le groupe franco-belge Dexia, confronté à une crise de liquidités, et qui a fait l’objet d’un plan de sauvetage élaboré dans l’urgence par la précédente majorité. L’État est donc aujourd’hui doublement engagé, comme actionnaire de Dexia et de la SFIL mais aussi comme garant.

Les collectivités ne sont pas restées inactives. Beaucoup ont choisi d’engager des actions contentieuses, lesquelles n’étaient pas exclusives de la poursuite de négociations. Il y a trois semaines a été rendu un quatrième jugement, venant après les décisions successives des tribunaux de grande instance – TGI – de Nanterre et de Paris qui, en février 2013 et en mars 2014, ont retenu certains motifs de forme pour annuler les stipulations d’intérêts des contrats et les remplacer par le taux d’intérêt légal, quasi nul. Reste que les prêteurs ont réemprunté ou se sont adossés et doivent donc rembourser, ce qui fait peser un risque énorme sur les finances de l’État garant.

D’après l’Agence des participations de l’État, que j’ai interrogée, le nombre de contentieux et les enjeux apparaissent bien plus importants pour la SFIL que pour Dexia. Pour la première, 395 emprunts font l’objet d’une assignation, pour un encours de 3,137 milliards d’euros ; pour la seconde, ce sont 51 emprunts, qui représentent un encours de 379 millions d’euros.

L’État est donc exposé à un risque direct : il a l’obligation de constituer une provision correspondant au minimum aux encours faisant déjà l’objet de procédures contentieuses, soit une provision de 3,5 milliards d’euros, qui devra être passée si ce texte n’est pas voté. Si l’ensemble des contentieux potentiels devait être provisionné à 100 %, la SFIL devrait constituer 7,5 milliards d’euros de provisions et Dexia 3,1 milliards, soit un total de 10,6 milliards d’euros ; comme ces deux établissements ne disposent pas des fonds propres suffisants, l’État se verrait obliger de les recapitaliser en conséquence.

À cela pourrait s’ajouter un coût indirect de quelque 7 milliards d’euros supplémentaires, lié à la mise en extinction de la SFIL que ne manquerait pas d’imposer la Commission européenne en cas de recapitalisation massive.

La loi de finances pour 2014 prévoyait de valider ces contrats de prêt afin de les mettre à l’abri d’une annulation par le juge civil. Il nous faut aujourd’hui nous conformer aux prescriptions du Conseil constitutionnel, qui a jugé ces dispositions trop larges même si elles ne concernaient qu’un ensemble limité de contrats.

Comme le Gouvernement l’avait annoncé dès le mois de janvier, le présent projet de loi, déjà adopté par nos collègues sénateurs, propose de revenir sur les dispositions censurées. L’article 1er déclare valides les contrats de prêt conclus par les personnes morales de droit public dont la légalité serait contestée pour défaut de certaines mentions prescrites par le code de la consommation, comme celle du taux effectif global – TEG. L’article 2 procède à une seconde validation : celle des contrats de prêt dont la légalité serait contestée au motif que ces mêmes mentions seraient erronées. Aux termes de l’article 3, les contrats de prêt les plus simples – à taux fixe, ou à taux variable reposant sur des formules peu sophistiquées – sont expressément écartés de l’application des deux validations prévues aux articles précédents. Enfin, l’article 4, introduit par le rapporteur du Sénat, prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport sur la législation applicable au TEG.

Grâce à la réécriture opérée à la suite de la décision du Conseil constitutionnel, le champ des actes concernés par cette validation législative est plus restreint que dans le dispositif censuré en décembre dernier. Cette nouvelle rédaction tient également compte de la variété des moyens soulevés devant les juges civils, en intégrant les conséquences des décisions intervenues
les 7 et 25 mars dernier.

Strictement proportionné à l’objectif poursuivi, le présent projet de loi satisfait également aux autres critères dégagés par la jurisprudence constitutionnelle. En particulier, il poursuit incontestablement un but d’intérêt général impérieux au regard des conséquences financières potentielles pour l’État, qui sont colossales : je le répète, ce sont 17 milliards d’euros qui sont en jeu, soit 0,9 point de PIB, sans compter que l’assèchement, voire la disparition de la SFIL rendrait bien plus difficile le financement des investissements des collectivités locales.

C’est pourquoi je vous engage à adopter ce texte sans modification, en sorte qu’il puisse être adopté définitivement avant le terme de cette session extraordinaire.

M. le président Gilles Carrez. Je vous remercie de cette présentation très équilibrée. Nous savons tous que de tels textes de validation législative sont très encadrés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et nous avions d’ailleurs perçu les risques encourus à cet égard par les mesures figurant dans l’article 60 du projet de loi de finances pour 2014, puisque Karine Berger et Valérie Rabault avaient souligné devant notre Commission combien il était curieux de mettre fin à des contentieux qui concernaient des personnes privées tout en limitant l’aide du fonds aux seules collectivités locales. De surcroît, le motif d’intérêt général était insuffisamment étayé et la définition du prêt structuré imprécise.

Le Gouvernement avait voulu viser large pour éviter toute rupture d’égalité, mais la décision du Conseil constitutionnel conduit au contraire à ne traiter le problème que pour les personnes morales de droit public. De ce point de vue, le présent projet s’inscrit, me semble-t-il, dans le cadre dessiné par le Conseil.

Il y a plus d’un an de cela, quelques-uns d’entre nous, dont j’étais, avaient proposé d’inscrire dans la loi bancaire une disposition de validation. En effet, plus on tardait, plus les risques grandissaient puisque le TGI de Nanterre avait, le premier, reconnu que les responsabilités étaient partagées dans ces affaires. Simplement, en pratique, il avait donné raison à l’emprunteur en imposant l’application du taux légal, au seul motif d’une l’absence de référence au TEG dans le contrat.

Le ministère des Finances a beaucoup insisté pour que le Gouvernement dépose ce texte. Je m’en étonne. Le risque est-il vraiment aussi important qu’on voudrait nous le faire croire ? Les faits sont peu à peu prescrits ; le risque de voir ester en justice a au moins dû diminuer. Le principal emprunteur étant une entreprise publique, le ministère ne cherche-t-il pas à se couvrir au maximum ?

Savons-nous, monsieur le rapporteur, si certaines décisions de justice sont déjà définitives ? La validation demandée couvre-t-elle bien tous les cas ?

M. Marc Le Fur. J’ai moi aussi apprécié l’analyse équilibrée de notre rapporteur, qui a souligné l’irresponsabilité des collectivités locales ayant souscrit de tels emprunts. Le conseil général des Côtes-d’Armor – qui s’était entouré de conseillers financiers qui venaient de Wall Street – en fait partie. M. Lebreton, son président, était tout fier d’avoir renégocié l’emprunt pour en arriver à un taux fixe de 16 % par an !

Il faudrait au moins distinguer entre les grandes collectivités, qui disposaient de moyens techniques d’analyse des contrats et qui devraient à mon sens assumer leurs responsabilités, et les plus petites, qui ont fait preuve d’une naïveté certainement coupable mais qui y ont quelques excuses.

Vous soulignez aussi, monsieur le rapporteur, la défaillance de l’État, mais elle n’est due ni aux préfets ni au réseau des percepteurs, tous mal armés en l’espèce dans la mesure où il s’agissait de contrats de droit privé. Il serait bon qu’à l’avenir le contrôle de légalité, au lieu de se perdre dans des détails comme les augmentations d’indice des agents des collectivités locales, s’intéresse aux affaires telles que celles dont nous traitons aujourd’hui, vu l’enjeu !

Enfin, avec ce projet de loi, nous protégeons Dexia et la SFIL, et in fine l’État, mais non les communes dont beaucoup sont, au vu de la jurisprudence en cours de formation, à peu près certaines de gagner leurs procès. Or, l’État choisit d’intervenir pour faire cesser ces contentieux ! Sur le principe, cela porte à conséquence et, en pratique, cela instaure une inégalité de fait, entre les communes dont les procès sont déjà jugés – mais y a-t-il des jugements définitifs ? – et les autres, mais aussi entre les collectivités et les débiteurs privés, qui pourront mener les procédures à leur terme.

Interrompre de cette façon des procédures en cours, n’est-ce pas scandaleux ? N’y a-t-il pas une rupture d’égalité entre les différents clients de ces banques ?

M. Alain Fauré. Il faudrait aussi s’interroger sur l’origine de ces montages ubuesques ! Certaines banques utilisent même le crédit d’impôt recherche pour les mettre au point…

M. le président Gilles Carrez. Il est vrai que dans la répartition du crédit d’impôt recherche entre les grandes catégories définies par l’INSEE, des montants très importants apparaissent dans la catégorie des organismes financiers. Mais c’est parce que le crédit d’impôt recherche de beaucoup d’entreprises industrielles est concentré sur leur holding. La part de la recherche de modèles mathématiques utilisés par les banques est tout à fait marginale.

M. Alain Fauré. J’entends vos propos, monsieur le président, mais je voudrais être tout à fait certain qu’il en est ainsi. En tout cas, on voit la situation dans laquelle nous sommes !

Qui protégeons-nous en définitive ? Les collectivités ? L’État ? C’est assez peu clair et j’aimerais mieux comprendre.

Comment des collectivités locales qui disposaient de services financiers ont-elles pu accepter de tels prêts ? Ont-elles été sciemment induites en erreur par les établissements financiers ? On comprend plus facilement que de plus petites collectivités, ne disposant pas de moyens importants, se soient laissé tromper, mais il n’était pas impossible de faire preuve de bon sens : le niveau extraordinairement bas des taux proposés aurait dû susciter la méfiance, sans parler de leur caractère variable.

Quel a été le rôle de la Banque de France ? Pourquoi ne surveille-t-elle pas ces produits financiers ? Ne faudrait-il pas l’obliger à le faire ? Tout particulier peut être fiché en cas d’incident de paiement, mais les banques, elles, peuvent impunément proposer aux collectivités des montages invraisemblables, y compris des prêts indexés sur le cours du café !

M. Jean-Pierre Gorges. J’ai été rapporteur de la commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux et, si j’approuve le diagnostic posé par Christophe Castaner, je n’approuve pas la solution choisie, qui n’est pas conforme aux préconisations que nous avions adoptées à l’unanimité au terme de nos travaux.

Les emprunts structurés, il faut le rappeler, ont permis une baisse importante des taux. N’était le problème très ponctuel posé par l’indexation sur la parité entre l’euro et le franc suisse, nous ne parlerions même pas aujourd’hui de ces produits, qui ont permis à certains de gagner beaucoup d’argent – je fais partie des élus locaux dans ce cas –, de sorte qu’ils ne parlent pas de remettre l’affaire sur la table.

La commission d’enquête avait avancé l’idée d’une coresponsabilité entre les collectivités locales, les banques et l’État. En attendant que les contentieux en cours soient définitivement jugés et sachant que nombre de collectivités ont su tirer leur épingle du jeu en conjuguant ces emprunts structurés avec d’autres types d’emprunts, nous avions aussi recommandé de se borner à extraire les mauvais fruits du marché. À ce propos, vous évaluez le risque à 17 milliards d’euros, mais c’est l’encours de la dette ! Ce qu’il faudrait prendre en compte et traiter, c’est la toxicité, qui n’est que marginale et ne se déclenche pas forcément tout de suite – il peut même y avoir des retournements de situation si demain le rapport entre franc suisse et euro s’inverse.

Je regrette que les propositions faites par notre commission d’enquête n’aient pas été mises en œuvre par le Premier ministre de l’époque ; quant à la solution avancée aujourd’hui, elle ne me semble pas équitable et je ne la cautionne donc pas.

M. Jean-Louis Gagnaire. Le propos liminaire de notre rapporteur était très clair quant aux responsabilités des uns et des autres. Il ne faut pas accabler les seuls élus locaux comme l’a fait notre collègue Marc Le Fur. De plus, les alternances consécutives aux élections municipales ont montré que les situations inextricables provoquées par ces emprunts étaient le fait d’équipes de gauche comme de droite. Il y a eu de l’imprudence, de l’inconscience, voire du cynisme – certains ont contracté de ces emprunts entre les deux tours des élections municipales, pour laisser une bombe à retardement à leurs successeurs…

La commission d’enquête n’est pas restée sans effet, puisque des mesures ont été prises afin de prévenir les dérives à l’avenir, notamment grâce à une meilleure information de tous les élus, à l’obligation d’obtenir l’approbation de l’assemblée délibérante et à l’obligation d’un provisionnement des risques – en effet, si les entreprises privées, elles, ont très peu souscrit ce type de prêts, c’est que leurs résultats auraient été fortement altérés par ces provisions.

M. le président Gilles Carrez. En respectant les règles de la comptabilité M14, on aurait dû provisionner. C’est sans doute là que le contrôle de légalité a été défaillant.

M. Jean-Louis Gagnaire. Les provisions auraient pu tendre vers l’infini, faute de savoir évaluer les risques.

Quoi qu’il en soit, si les problèmes sont résolus pour l’avenir, il nous revient de régler ceux qui se posent aujourd’hui. La bonne solution aurait consisté, comme l’a proposé Jean-Pierre Gorges, à extraire les prêts les plus toxiques et à les renégocier de façon collective. Mais une telle démarche se heurterait à l’« individualisme » des collectivités, dont chacune a essayé de se tirer d’affaire par elle-même, ainsi qu’au manque d’informations claires sur le stock précis de prêts toxiques en cours – les plus dangereux ont sans doute déjà été renégociés par les grandes collectivités, par les hôpitaux ou par les organismes HLM, et je constate que les nouvelles équipes municipales ne se sont pas pour l’instant plaintes de ceux dont elles ont hérité. Reste qu’il importe de légiférer pour régler les problèmes liés à Dexia, même si ce n’est pas la seule banque concernée : ne pas le faire ferait en effet peser un risque important sur les finances publiques.

M. Marc Goua. Contrairement à ce qui a été dit, il n’y a pas de risque systémique…

M. le président Gilles Carrez. Je suis d’accord avec vous !

M. Marc Goua. Il n’est que de constater, sans faire de comparaison injustifiée, que, pour des montants comparables, l’amende infligée par un tribunal américain à BNP Paribas ne met pas en émoi le système bancaire français. Il ne faut pas confondre les encours des prêts et les risques.

Je crains que le vote du projet de loi n’incite les banques américaines auxquelles Dexia s’est adossée à se retirer des négociations déjà engagées avec cet établissement. Dans ce cas, la validation législative qui nous est proposée reviendrait, comble de l’effet pervers, à financer ces banques responsables du krach financier de 2008.

Votre texte introduit par ailleurs une inégalité entre privé et public alors que la jurisprudence relative au TEG, tout sauf nouvelle, a permis de sanctionner toutes les banques.

J’estime, comme les responsables de Dexia, que l’application du taux légal constitue une sanction trop sévère. La banque aurait été prête à accepter un taux raisonnable correspondant au taux du marché, à la limite du taux usuraire aujourd’hui fixé à 4,70 %. Cette solution aurait permis de limiter les dégâts pour les collectivités sans les déresponsabiliser.

Il est indispensable de nous mettre tous autour de la table et de faire preuve de pragmatisme. N’oublions pas que, sans cela, des recours seront formés sur d’autres points que le TEG ! Et ils risquent de coûter très cher. Je pense par exemple aux prêts de Dexia transférés à la SFIL pour l’euro symbolique. Comment le créancier réclamerait-il des encours qu’il ne possède pas ? Cette fois, ce ne sera plus une affaire de taux : on touchera au capital même !

M. le président Gilles Carrez. Il me semblait précisément qu’un terrain d’entente avait été trouvé lors des nombreuses discussions que nous avons eues sur le sujet. Malheureusement, le projet de loi qui nous est proposé ne tient pas compte des orientations unanimement retenues par notre commission.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Marc Goua n’a pas tort : Dexia n’a pas conçu les produits toxiques dont nous parlons, son rôle a plutôt été celui du « facteur ».

M. Alain Fauré. Elle les a tout de même vendus en jouant sur la relation de confiance qu’elle entretenait avec ses clients.

Mme la rapporteure générale. Je ne remets pas en cause la responsabilité de Dexia ; je dis seulement que les produits en question ont été conçus par des banques américaines.

Il est indéniable que l’enjeu financier est bien inférieur à 17 milliards, montant de l’encours des prêts, mais aussi que, en fonction du sous-jacent – taux de change euro/franc suisse ou cours du cacao –, les intérêts peuvent beaucoup varier. Disposons-nous d’une cartographie et d’une chronologie précises de l’ensemble de ces montants d’intérêts à régler ? Pour réduire les coûts pour l’État – qui reste payeur en dernier ressort puisque les dettes en question sont consolidées –, il faudra en effet veiller à ne casser ces prêts structurés qu’au moment où les taux d’intérêt qui leur sont appliqués seront les plus faibles. A-t-on calculé la valeur actualisée de ces prêts ou, sinon, peut-on demander aux banquiers de le faire ?

Monsieur le rapporteur, lors de votre travail préparatoire, avez-vous rencontré certaines des agences spécialisées dans le soutien en gestion active de dette auprès des collectivités locales ? N’est-ce pas là que se fabrique la prochaine crise ?

M. Sylvain Berrios. Le rapporteur a eu raison d’évoquer des responsabilités partagées dans la production de cette masse informe qui nous pose aujourd’hui problème, mais le projet de loi qui nous est soumis déplace en fait l’exposition au risque de l’État vers les collectivités, comme si la consolidation des comptes ne devait pas aboutir au final à faire jouer la responsabilité de ce même État – s’il devait y avoir provisions, il aurait d’ailleurs nécessairement à intervenir déjà, les collectivités n’étant pas en mesure d’en constituer de suffisantes.

Ce texte repose aussi sur le postulat d’un effet systémique qui reste à démontrer. Il met fin aux contentieux engagés par les seules collectivités et ne concerne que Dexia en négligeant les autres banques concernées, abandonnant ainsi les solutions de concertation proposées à la fin de l’année 2011 par la commission d’enquête de notre assemblée sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux. Il est dommage de renoncer ainsi à une négociation qui pourrait être fructueuse, menée au plus haut niveau.

M. le président Gilles Carrez. Existe-t-il aujourd’hui des contentieux entre des entreprises privées et des banques fondés sur l’absence de mention du TEG, et qui, n’étant pas concernés par le projet de loi, continueraient de prospérer ?

M. Jean-Pierre Gorges. En tant que rapporteur de la commission d’enquête de 2011, j’avoue que j’éprouve une certaine frustration. Nous nous étions à l’époque mis d’accord sur une solution qui avait fait l’unanimité. Contexte préélectoral aidant, ce travail n’a trouvé aucune traduction dans les faits alors que, comme Marc Goua vient de le dire, une négociation produit par produit aurait permis de limiter la toxicité des prêts concernés, tout le monde étant prêt à accepter un taux de 4 à 5 %. Peut-être pourrions-nous constituer un groupe de travail afin de trouver une solution, fondée sur des bases plus saines, qui tiendrait compte des conclusions de la commission d’enquête ? Si le fait que les contentieux ne sont pas définitivement tranchés nous ménage encore une possibilité de négociation, le temps nous est compté.

M. le rapporteur. L’enjeu minimal, compte tenu des assignations engagées, correspond pour la SFIL à un encours de 3,137 milliards d’euros et pour Dexia de 379 millions. La provision nécessaire porte sur le capital restant dû et sur les intérêts qui doivent être calculés compte tenu de la substitution du taux légal. Elle est aujourd’hui estimée au minimum à 3,5 milliards d’euros et concerne donc essentiellement la SFIL. Elle n’a pas été mise en œuvre sous la condition que l’État s’engage par la loi à stabiliser la situation.

À ce jour, seulement cinq contentieux invoquant un motif lié au TEG ou à ses corollaires ont été jugés en première instance – et n’ont donc pas été définitivement tranchés, de sorte que le vote de ce texte les « écrasera » aussi.

Le projet vise d’autant moins à protéger les banques américaines que l’obligation de mentionner le TEG ne s’applique pas à elles. N’oublions pas que la jurisprudence qui nous amène à légiférer trouve son origine dans le fax-type que Dexia a utilisé pour confirmer l’attribution des prêts ! Nous sommes donc confrontés à une jurisprudence parfaitement fondée et d’ailleurs constante, mais de fait disproportionnée parce que liée à une erreur matérielle. Nous sommes loin de protéger le grand capital américain des revendications des gentils responsables de petites collectivités mesurant mal la portée de leurs décisions.

Monsieur le président, nous ne couvrons pas tout. Qu’elle soit horizontale, comme celle pratiquée jusqu’à la fin de l’année 2012, ou verticale, telle qu’elle est prônée par la SFIL depuis 2013, la « désensibilisation » devra se poursuivre. En effet, le risque existe encore et de nombreux recours sont toujours susceptibles d’être déposés – j’ai déjà cité le cas de la communauté urbaine de Lille qui a gagné son procès pour défaut de conseil et Marc Goua a évoqué les conditions de reprise des contrats par la SFIL. Le fonds de soutien doit donc être géré de façon différenciée selon que les collectivités ou établissements concernés étaient ou non en mesure d’analyser les risques pris – pour simplifier, en distinguant entre les grandes collectivités et les petites. Le taux de l’aide pourra donc varier
entre 0 et 45 % et nous avons en outre prévu la possibilité d’une prise en charge des moyens de renégociation. En effet, il est des cas où il conviendra de maintenir les contrats – car la charge du risque peut parfois s’inverser – et d’autres où il s’imposera d’en sortir au plus vite.

Vous avez noté, monsieur Le Fur, que je n’exonère pas toutes les collectivités locales de leurs responsabilités. Si l’Assemblée me désigne pour siéger au sein du fonds de soutien, j’entends défendre cette approche différenciée. J’insisterai également pour que le Gouvernement fasse pression afin d’éviter tout risque de déresponsabilisation de Dexia et de la SFIL qui, à l’approche du vote de la loi, rechignent à négocier avec les collectivités locales – attitude particulièrement critiquable au moment où d’autres banques, y compris étrangères, jouent le jeu.

La question du contrôle de légalité adapté mérite d’être posée – mais je rappelle qu’un amendement de Christine Pires Beaune sur le sujet a été rejeté par notre assemblée. Monsieur Fauré, toujours en matière de contrôle, vous avez évoqué le rôle que pourrait ou qu’aurait dû jouer la Banque de France. Aujourd’hui, seule la Commission bancaire est compétente pour vérifier l’offre bancaire, mais elle ne l’était pas à l’époque où les contrats dont nous parlons ont été signés. Cela dit, je rappelle que nous sommes moins confrontés à une pratique illégale qu’à un problème de formalisme.

Vous nous demandez qui nous protégeons ? Avant tout l’État, qui a consenti des efforts considérables pour sauver Dexia et pour donner aux collectivités locales un accès au crédit. Il serait injuste qu’il se retrouve seul en première ligne pour régler des montants faramineux. Le risque global maximal de 17 milliards d’euros ne correspond pas aux seuls prêts. Il se décompose en 10 milliards, soit la totalité des encours et des intérêts des prêts pour lesquels un recours relatif au TEG peut être déposé – et seulement ceux-là –, et 7 milliards pour le coût d’extinction de la SFIL.

Madame la rapporteure générale, dans le rapport de la commission d’enquête de 2011 figure la cartographie des emprunts que vous demandez – elle comporte même une sous-classification du taux de risque en fonction du référentiel choisi pour le prêt.

Le fonds de soutien jouera un rôle primordial dans la procédure de « désensibilisation » – et non d’extinction – des emprunts. Il sera doté pendant quinze ans de 100 millions par an, provenant pour seulement 50 % de l’État et pour le reste de participations bancaires, et cette annualité peut de fait poser problème, des besoins supplémentaires pouvant se faire jour dès l’année prochaine.

Je rappelle que le risque dont nous parlons aujourd’hui est supérieur à celui que traitait le consortium de réalisation du Crédit lyonnais : les montants alors en cause se montaient « seulement » à 12,5 milliards d’euros et pourtant on en parlait beaucoup plus qu’on ne le fait aujourd’hui du problème qui nous occupe ! Concernant l’option d’une structure de défaisance, je me permets de renvoyer au rapport de la commission d’enquête de 2011, présidée par Claude Bartolone : « La commission d’enquête est arrivée à la conclusion qu’une telle structure serait à fois d’un coût insupportable pour la solidarité nationale et déresponsabilisant pour les élus et responsables locaux qui ont contracté ces emprunts. » Il me semble en conséquence logique que le ministère des Finances n’ait pas retenu cette solution.

Monsieur Goua, il est certainement possible de minorer le risque en négociant. La prévision de 3,5 milliards d’euros à inscrire dès 2014 dans le budget de l’État n’est en revanche ni minorée ni majorée. D’autre part, nous ne protégeons pas les banques américaines qui, de leur côté, ne s’encombrent pas de l’application stricte de la référence au TEG. Elles ont négocié avec Dexia sur des bases juridiques très différentes. Nous aurions peu de chances de voir une procédure aboutir favorablement si nous les attaquions aujourd’hui. Avec le fonds de soutien et l’engagement de l’État, il faut donc rendre possible la négociation. Mais la responsabilité de conduire celle-ci doit revenir, non à l’État, mais aux collectivités locales et à l’association constituée pour les accompagner.

La dette ne sera pas gérée par l’État. Monsieur Berrios, l’État est protégé, certes, mais le risque n’est pas transféré de l’État vers les collectivités locales pour la simple et bonne raison qu’il n’était pas partie au contrat d’origine. Le premier responsable reste le signataire, même si l’on peut s’interroger sur le degré de sa responsabilité.

Pour ce qui est du risque systémique, notons qu’il n’est plus évoqué par le ministère des Finances. Le seul risque de cet ordre semble être la difficulté que rencontreraient les collectivités locales pour emprunter si la SFIL se trouvait asphyxiée. D’une manière très générale, j’y insiste, nous ne nous trouvons pas dans la situation d’un risque systémique dans le secteur bancaire ; ainsi, pour le groupe BNP Paribas, sortir 6,5 milliards d’euros de son haut de bilan ne constituera pas une grande difficulté : son ratio de solvabilité s’en trouvera à peine modifié puisqu’il passera de 10,4 % à 10,1 %.

Pour ce qui est des entreprises, monsieur le président Carrez, nous avons interrogé le Trésor, qui n’a pas pu nous répondre, mais, comme l’essentiel de la difficulté tenant à la non-mention du TEG vient de Dexia, qui ne prêtait pas aux entreprises, le risque semble faible de ce côté.

M. Marc Goua. Un fonds de défaisance américain a isolé les dettes structurées en Allemagne où tous les problèmes ont dès lors été résolus. Dexia n’est peut-être pas en mesure de négocier avec les banques américaines, mais ce même fonds était prêt à mettre 15 milliards sur la table pour la France. Je ne comprends donc pas que nous n’ayons pas discuté avec ses responsables.

M. Dominique Lefebvre, président. Je tiens, au nom de tous, à féliciter le rapporteur pour sa maîtrise d’un dossier complexe et pour la lucidité de ses analyses et de ses préconisations.

L’intérêt général doit être notre boussole, mais quel est-il en l’espèce ?

Il n’y a aucune raison d’exonérer qui que ce soit ayant une part de responsabilité dans les sinistres évoqués ; cela vaut pour le système bancaire – et le texte tel qu’il est rédigé n’écarte pas les procédures de recours, notamment pour défaut de conseil – comme pour les collectivités locales et leurs élus. Il faut ensuite tenir compte des intérêts de l’État, surtout dans le contexte actuel : les enjeux financiers qui ont été précisément décrits doivent nous faire réfléchir. Enfin, il faut veiller à maintenir la capacité d’investissement des collectivités locales, et donc préserver la SFIL créée par le Gouvernement lorsque celles-ci se sont trouvées confrontées à des difficultés de financement.

Il ne sert à rien de refaire l’histoire ou de s’attarder à des combats d’arrière-garde. En 2013, l’Assemblée s’est prononcée en faveur d’un dispositif de validation législative, la discussion ne portant que sur la délimitation de son champ d’application. Le Conseil constitutionnel a invalidé le périmètre que nous avions choisi, mais pas le principe, qu’il ne serait donc pas logique de remettre aujourd’hui en cause.

Ensuite, la très large majorité avec laquelle le présent projet a été adopté au Sénat, réputé être le premier défenseur des collectivités locales, vaut réponse à la question de savoir si les intérêts de ces dernières sont correctement préservés et si les banques qui ont fauté ne sont pas indûment exonérées de leurs responsabilités.

Le texte reprend le principe de validation législative que nous avions adopté, en circonscrit légitimement le champ aux personnes morales de droit public et porte uniquement sur un point de forme même si j’entends bien qu’il renvoie à un problème de fond susceptible de concerner aussi les particuliers. J’en appelle donc au sens de la responsabilité de chacun et vous invite à un vote conforme.

Je le répète, il ne sert à rien de mener des débats d’arrière-garde. Disant cela, je ne vise aucunement ceux qui ont posé des questions et défendu les intérêts de collectivités locales trompées, mais il faut savoir en terminer et, comme je n’ai entendu aucune autre proposition, je vois dans le présent projet la seule réponse aux risques encourus par l’État et par le contribuable national. Il constitue en effet une solution raisonnable qui, d’une part, ne prive pas de possibilités de recours les collectivités locales qui estiment avoir été trompées ou avoir été mal conseillées, et qui, d’autre part, présente l’avantage de stabiliser le système.

M. Sylvain Berrios. Dès lors que l’État a repris Dexia avec ses faiblesses et se trouve ainsi exposé, nous nous trouvons bel et bien dans la situation d’un transfert du risque. La responsabilité de l’État via Dexia est donc réelle.

Ensuite, nous ne sommes pas seulement en train de corriger une jurisprudence fondée sur un élément de pure forme : nous tentons aussi de régler, sur le dos des collectivités territoriales, un problème qui porte sur plusieurs milliards d’euros.

Enfin, vous invoquez l’urgence alors que pas une seule des décisions que vous invoquez n’est définitive. Quand les appels interjetés seront-ils jugés, sachant que les récents jugements ont été prononcés au bout de plusieurs années ? L’urgence n’est vraiment pas démontrée.

La Commission en vient à l’examen des articles du projet de loi.

Article 1er
Validation législative des contrats de prêt aux personnes morales de droit public en cas de défaut de mention du taux effectif global (TEG), du taux de période ou de la durée de période

Observations et décisions de la Commission :

Le présent article déclare valides certains contrats de prêt, ou les avenants à ceux-ci, dont la légalité serait contestée pour défaut des mentions prescrites par le code de la consommation. Il met ainsi, rétroactivement, à l’abri de tout risque d’annulation par le juge celles des stipulations de ces contrats ou avenants relatives aux intérêts à payer par l’emprunteur.

I. LE CHAMP DES ACTES CONCERNÉS PAR CETTE VALIDATION LÉGISLATIVE EST PLUS CIBLÉ QUE DANS LE DISPOSITIF CENSURÉ PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL EN DÉCEMBRE 2013

La validation à laquelle procède le présent article possède un champ distinct de celui du texte voté au II de l’article 92 de la loi de finances (LFI) pour 2014.

Sont ainsi visés la totalité des contrats conclus avant l’entrée en vigueur de la présente loi, ce qui englobe tous les prêts structurés à risque souscrits par les collectivités territoriales depuis les années 2000 sans se limiter aux produits à risques éligibles au nouveau fonds de soutien, c’est-à-dire ceux qui sont classés « hors charte » Gissler ou 3E, 4E et 5E. Simultanément, tout autre contrat de prêt, à l’exception des prêts à taux fixe ou à taux variable simple expressément écartés par l’article 3, est également validé.

Toutefois, si les actes concernés sont potentiellement nombreux, la portée de la validation est très circonscrite.

● Seules les stipulations des contrats ou de leurs avenants, et non celles des documents précontractuels, sont visées

L’alinéa premier vise « tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant ». La rédaction retenue fait écho à la jurisprudence des tribunaux civils qui qualifie de contrat tout écrit constatant un accord des parties sur une chose et un prix ; elle n’est donc pas plus extensive que celle du texte voté à l’article 92 de la loi de finances pour 2014 qui visait « les contrats de prêt et les avenants à ces contrats ».

C’est en application de cette jurisprudence que s’est prononcé le TGI de Nanterre dans l’affaire opposant le département de la Seine-Saint-Denis à Dexia, le 8 février 2013, en estimant que les fax de confirmation de transaction constituaient des contrats et, par conséquent, devaient comporter les mentions obligatoires prévues par la loi. Le jugement précisait ainsi, à propos du fax : « Ce document, en ce qu’il opère la rencontre des volontés du prêteur et de l’emprunteur sur les conditions du prêt, et engage irrévocablement l’emprunteur envers le prêteur, constitue un véritable contrat de prêt, l’instrumentum qui a été établi neuf semaines plus tard ne faisant que confirmer ce contrat de prêt. »

En revanche, la rédaction de l’alinéa 1 de cet article n’inclut dans le champ de la validation législative aucun document précontractuel en tant qu’il serait effectivement distinct d’un contrat (c’est-à-dire qu’il ne matérialiserait pas l’accord des parties).

● La validation ne concerne plus que les contrats de prêt conclus par les personnes morales de droit public

Contrairement au texte voté en décembre dernier, la rédaction de l’alinéa premier limite expressément le champ de la validation aux seuls contrats de prêts ou avenants conclus entre un établissement de crédit, au sens du I de l’article L. 511-1 du code monétaire et financier, et une personne morale de droit public. Sont donc concernés : les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics nationaux – comme les hôpitaux ou les services départementaux d’incendie et de secours – ou locaux, les groupements d’intérêt public, mais également l’État ou les autorités indépendantes dotées de la personnalité morale.

La distinction désormais opérée entre personnes morales de droit privé et public est directement inspirée par le Conseil constitutionnel. Dans sa décision n° 2013-685 DC, et plus encore dans le commentaire aux Cahiers de celle-ci, le juge constitutionnel met en regard le périmètre du fonds de soutien créé par le I de l’article 92 de la LFI pour 2014 et le champ de la validation législative ; c’est parce que cette dernière concerne des personnes morales exclues du bénéfice du fonds qu’il estime ses critères « en [in]adéquation avec l’objectif poursuivi » et « sa portée très large ».

Si le resserrement opéré par le présent article entend se conformer à la distinction explicite opérée par le Conseil constitutionnel, le Rapporteur s’est interrogé sur le bien-fondé de cette différence de traitement au regard des exigences constitutionnelles. Il lui semble que deux éléments objectifs permettent de distinguer la situation des personnes morales de droit public de celle des autres personnes morales :

– d’une part, les personnes morales de droit public bénéficient toutes, quoique selon de modalités différentes, d’un dispositif d’accompagnement (fonds de soutien ou dispositif hôpital) au contraire des personnes morales de droit privé ;

– d’autre part, le calcul du TEG n’est pas techniquement identique pour les personnes morales de droit privé et public, et celui-ci revêt un caractère plus conventionnel pour ces dernières.

Dans le cas particulier des bailleurs sociaux, qui peuvent relever de l’une ou l’autre de ces deux catégories juridiques, il faut souligner que seuls les bailleurs publics ont accès au fonds de soutien. C’est, dès lors, le traitement homogène des bailleurs sociaux publics et privés au regard de la loi de validation, alors que ceux-ci sont traités de façon différenciée au regard du fonds, qui aurait pu induire une rupture d’égalité.

● Enfin, l’effet d’aubaine dont pourraient bénéficier certains établissements de crédit est nettement restreint.

Les contrats et avenants ne sont, aux termes des alinéas 2 et 3, validés qu’à condition que tous les autres éléments de l’amortissement du prêt (montant, périodicité et nombre des échéances) soient mentionnés. Cette condition, déjà prévue au II de l’article 92 de la LFI pour 2014, doit éviter de mettre à l’abri des contestations les contrats de prêts abusivement rédigés.

II. LA NOUVELLE RÉDACTION TIENT COMPTE DE LA VARIÉTÉ DES MOYENS SOULEVÉS DEVANT LES JUGES CIVILS

Les décisions rendues en février 2013 et mars 2014 (9) par les tribunaux de grande instance de Nanterre et de Paris illustrent l’importance des éléments de forme dans les actions en justice contre les contrats de prêts structurés.

Sur les seuls motifs de l’absence de mention du TEG, du taux de période et de la durée de période, ou d’erreur dans leur calcul, les tribunaux ont ainsi jugé nulles les stipulations d’intérêts et décidé la substitution du taux légal au taux contractuel depuis le début du contrat de prêt.

Pour sévères qu’elles puissent paraître, les conséquences tirées par le juge de l’annulation ne sont toutefois pas surprenantes. La Cour de cassation juge en effet, de longue date, que « l’exigence d’un écrit mentionnant le taux effectif global est une condition de la validité de la stipulation d’intérêt » et que « à défaut de validité de la stipulation conventionnelle d’intérêts, il convient de faire application du taux d’intérêt légal à compter de la date du prêt » (10).

● Le défaut de mention du taux effectif global (TEG), qui a fondé les premières annulations de stipulations d’intérêts en février 2013 par le TGI de Nanterre, est originellement visé par cette validation législative

Afin de contenir les conséquences financières de ces jurisprudences, l’alinéa 1 procède à la validation des contrats de prêt, ainsi que de leurs avenants, « en tant que la validité de la stipulation d’intérêts serait contestée par le moyen tiré du défaut de mention du taux effectif global » telle qu’elle est prévue par la sous-section 1 de la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de la consommation.

Toutefois, le dispositif vise par erreur l’article L. 313-1 du code, qui définit les modalités de calcul du TEG, et non l’article L. 313-2 qui prescrit la mention de ce taux dans les contrats. Le Rapporteur procédera, en séance publique, à la correction nécessaire.

Dans l’affaire opposant le département de la Seine-Saint-Denis à Dexia, le TGI de Nanterre avait en effet décidé, le 8 février 2013, la nullité de la clause d’intérêt de trois contrats pour défaut de mention du TEG dans le fax de confirmation des trois prêts ; pour le tribunal, « il était donc impératif que le TEG figure sur le fax adressé le 30 avril 2007 par la banque au conseil général ».

● La validation est étendue aux cas de défaut de mention du taux de période ou de la durée de période, alors qu’ils n’étaient pas visés par le II de l’article 92 de la LFI 2014

L’alinéa 1 du présent article ne se borne pas à viser le défaut de mention du TEG, mais énumère également d’autres moyens tirés de l’absence du taux de période ou de la durée de période.

Dans un récent jugement (11), le TGI de Nanterre a en effet considéré que l’obligation de communication du taux de période et de la durée de période prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation alors en vigueur s’appliquait à un contrat conclu entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, et a sanctionné ce défaut d’indication en substituant le taux d’intérêt légal à la stipulation conventionnelle d’intérêt.

TEG, durée de période et taux de période

Le II de l’article R.313-1 du code de la consommation était ainsi rédigé (jusqu’en 2011) : « Sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3° de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d'un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur. »

Le calcul doit donc déterminer d’abord le taux périodique, c’est-à-dire, celui applicable à la période de remboursement (par exemple : le mois). Le taux annuel est ensuite calculé en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année et celle de la période unitaire (soit pour une échéance mensuelle, une multiplication par douze), d’où le qualificatif de « proportionnel ».

Ce taux de période doit, lui-même, être rapporté à la durée de l’année civile, soit 365 jours (ou 366 jours).

La durée de période est le délai qui s’écoule entre deux remboursements. Par exemple, s’il y a 12 échéances par an, la période sera de un mois.

Le taux de période est le taux nominal annuel divisé par le nombre d’échéances par an. C’est ce taux de période qui, multiplié au capital restant dû après remboursement de l’échéance précédente, va permettre de calculer, à l’intérieur de l’échéance suivante, la part d’intérêt.

Exemple chiffré :

Caractéristiques du prêt :

Capital emprunté : 100 000 euros

Durée du prêt : 8 ans

Assurance par échéance : 300 euros

Taux annuel : 3 %

Durée de période : 6 mois (donc deux échéances par an)

Éléments à calculer :

Taux de période : 1,5 %

Montant d’une échéance, hors assurance : 7 076,51 euros

Montant d’une échéance, y compris l’assurance : 7 376,51 euros

Taux effectif global de période : 2,0197 %

TEG annuel (méthode proportionnelle) : 4,0394 %

Ce jugement – en singularisant le défaut de mention du taux de période et de la durée de période alors qu’ils permettent la détermination du TEG par un simple effet multiplicateur – élargit les motifs pouvant entraîner la substitution du taux d’intérêt légal à la stipulation conventionnelle d’intérêt. De ce point de vue, il accroît le risque financier direct pesant sur SFIL et Dexia, et donc sur les finances publiques. Le Rapporteur estime justifiée l’extension du champ de la validation ainsi opérée.

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* *

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2
Validation législative des contrats de prêt aux personnes morales de droit public en cas d’erreur dans le taux effectif global (TEG) ou ses corollaires et introduction d’une formule substitutive de calcul du taux pour les nouveaux contrats

Observations et décisions de la Commission :

Cet article comporte deux dispositions distinctes, mais complémentaires :

– il valide, rétroactivement, les stipulations d’intérêts de certains contrats de prêt ou avenants, dont la légalité serait contestée devant le juge au motif que le taux effectif global (TEG) mentionné, ou d’autres éléments prescrits par le code de la consommation, est erroné ;

– il prévoit, pour l’avenir, de mieux proportionner les conséquences financières pour l’établissement de crédit d’une erreur dans le calcul de ces éléments.

III. UNE SECONDE VALIDATION LÉGISLATIVE EST OPÉRÉE ALORS QU’ELLE N’ÉTAIT PAS PRÉVUE PAR L’ARTICLE 92 DE LA LFI POUR 2014 VOTÉ PAR L’ASSEMBLÉE

Par une décision du 7 mars 2014, commune de Saint-Maur-des-Fossés c. Dexia, le tribunal de grande instance de Nanterre a annulé la stipulation d’intérêts d’un contrat de prêt structuré et lui a substitué le taux d’intérêt légal, alors même que le fax de confirmation ne pouvait plus être remis en cause par l’effet des règles de la prescription quinquennale.

En revanche, la prescription ne s’appliquait pas au contrat écrit signé quinze jours plus tard ; le tribunal a relevé que, si le TEG était indiqué sur ce document, les dispositions du code de la consommation prévoyant que « le taux de période et la durée de période doivent être expressément communiquées à l’emprunteur » – n’avaient pas été respectées. Le jugement rappelle que « le TEG est l’un des éléments constitutifs de l’intérêt conventionnel tel que prévu par l’article 1907 du code civil. Dès lors, le défaut de mention comme l’erreur dans le calcul du TEG affectent directement l’intérêt conventionnel lui-même, le rendent inapplicable et justifient son annulation selon l’alternative imposée par la loi ».

● Strictement symétrique, le champ de la présente validation est limité aux stipulations des contrats, ou de leurs avenants, conclus par les personnes morales de droit public

La validation à laquelle procède le présent article constitue une mesure complémentaire de nature à limiter le risque contentieux, pour la SFIL et Dexia, né de la décision du 7 mars 2014 du TGI de Nanterre ; elle partage un champ identique avec le dispositif de l’article.

Là encore, la portée du dispositif est très circonscrite. Les contrats et avenants, conclus antérieurement à l’entrée en vigueur du projet de loi, ne sont validés qu’à deux conditions :

– aux termes de l’alinéa 1, la validité de la stipulation des intérêts doit avoir été contestée par le moyen tiré de la mention d’un taux effectif global, d’un taux de période ou d’une durée de période erroné, au regard des modalités de calcul prévues par l’article L. 313-1, dans le premier cas, et par l’article R. 313-1, dans les deux autres, du code de la consommation ;

– par ailleurs, tous les autres éléments de l’amortissement du prêt (montant, périodicité et nombre des échéances) doivent être mentionnés, conformément aux alinéas 2 à 4.

● Il se distingue, cependant, du dispositif prévu à l’article 1er, en visant les stipulations d’intérêts dont la légalité serait contestée par un moyen tiré de la mention d’un TEG, d’un taux de période ou d’une durée de période erroné.

IV. EN COMPLÉMENT, UNE SANCTION AD HOC EST SUBSTITUÉE À LA SANCTION ÉLABORÉE PAR LA JURISPRUDENCE DE LA COUR DE CASSATION EN CAS DE TAUX EFFECTIF GLOBAL ERRONÉ

● Le Gouvernement a fait le choix d’accompagner la validation d’une mesure pérenne, allant dans le même sens, compte tenu du caractère disproportionné de la jurisprudence ramenant le taux contractuel au taux d’intérêt légal.

L’alinéa 5 du présent article prévoit, pour les erreurs de calcul du seul TEG, de maintenir l’application du taux au contrat mais d’instituer une sanction civile expresse. Cette disposition n’est pas codifiée, alors que le III de l’article 92 de la LFI pour 2014 modifiait le code de la consommation.

Celle-ci ne concernerait que les contrats de prêt conclus par une personne morale de droit public ; les contrats visés par l’article 3 (prêt à taux fixe ou à taux variable simple) sont également exclus.

Une formule relativement complexe est proposée pour calculer le taux de substitution. En effet, il est prévu le versement d’une sanction égale, à chaque échéance, à la différence entre le taux erroné et le TEG calculé correctement appliquée au montant du capital restant dû ; la différence des échéances prévues au contrat et la sanction civile ainsi calculée aboutit à minorer les échéances de l’emprunteur à due proportion de l’erreur commise.

● La validation législative rend inutile l’application rétroactive de la sanction ad hoc

Contrairement au III de l’article 92 de la LFI pour 2014, l’alinéa 5, faute de mention expresse, ne s’applique pas aux contrats en cours mais seulement à ceux qui seraient signés après la promulgation de la loi.

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La Commission adopte l’article 2 sans modification.

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Article 3
Exclusion des contrats de prêt simples du champ de la loi de validation

Observations et décisions de la Commission :

Aux termes de cet alinéa unique, les contrats de prêt les plus simples
– à taux fixe, ou à taux variable reposant sur des formules peu sophistiquées – sont expressément écartés de l’application des deux validations prévues aux articles 1er et 2.

Le dispositif prévoit en effet l’exclusion du champ de la présente loi de tout contrat de prêt, ou avenant, « comportant un taux d’intérêt fixe ou un taux d’intérêt variable défini comme l’addition d’un indice et d’une marge exprimée en points de pourcentage ».

Si la définition par la négative du champ des validations est plus difficile à cerner, le Rapporteur estime que ce choix se justifie par l’extrême variété que revêtent les structures à la base des emprunts les plus toxiques. Il souligne également le parti pris qui se concentre sur la complexité des structures (et donc des formules de taux d’intérêt), et non sur la volatilité des indices à la base de celles-ci.

Deux exemples permettront de mieux appréhender les types de prêts concernés ou non par ces validations :

– un contrat de prêt indexé sur le Libor (London Interbank Offered Rate) JPY 3 mois plus 50 points de base, noté 4A dans la cotation Gissler, serait bien exclu du champ des validations, quand bien même il repose sur un indice de marché hors zone euro et concerne une devise asiatique (le yen japonais) ;

– en sens inverse, le contrat « TIP TOP », longtemps commercialisé par Dexia, dont le taux d’intérêt était égal à 5,45 % tant que l’Euribor (Euro Interbank Offered Rate) 12 mois était inférieur à 5,45 %, et à Euribor 12 mois + 8 points de base au-delà, est bien concerné par les deux validations parce qu’il s’agit d’une formule à barrière.

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La Commission adopte l’article 3 sans modification.

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Article 4
Rapport sur la réforme du taux effectif global (TEG)

Observations et décisions de la Commission :

Introduit par la commission des Finances du Sénat, à l’initiative du rapporteur Jean Germain, le présent article prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement « vis[ant] à faire le point sur la législation applicable au TEG » et à s’interroger sur une éventuelle réforme.

Son auteur pointe, dans l’exposé des motifs de son amendement, l’inadaptation croissante de cet « outil d’information – et donc de protection – des emprunteurs […] [qui] permettait de mesurer le coût réel du crédit et de comparer différentes offres sur des bases identiques ».

En effet, lorsque le crédit est à taux variable – et a fortiori en cas d’emprunts structurés pour lesquels les formules de taux d’intérêt sont très complexes – le TEG n’apporte que peu d’information à l’emprunteur et ne le renseigne nullement sur le taux d’intérêt maximum qu’il peut être amené à payer.

Si le délai prévu – huit mois à compter de la promulgation de la présente loi – semble au Rapporteur inutilement court, l’objet même de cette demande de rapport ne lui paraît pas dépourvu d’intérêt.

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La Commission adopte l’article 4 sans modification.

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Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi sans modification.

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TABLEAU COMPARATIF

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Texte du projet de loi

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Texte adopté par le Sénat
en première lecture

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Texte adopté par la Commission
en première lecture

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Projet de loi relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales
de droit public

Projet de loi relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales
de droit public

Projet de loi relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales
de droit public

Article 1er

Article 1er

Article 1er

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d’intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré du défaut de mention, prescrite en application de l’article L. 313-1 du code de la consommation, du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe :

(Sans modification)

(Sans modification)

1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ;

   

2° La périodicité de ces échéances ;

   

3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt.

   

Article 2

Article 2

Article 2

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d’intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que sa validité serait contestée par le moyen tiré de la mention d’un taux effectif global, d’un taux de période ou d’une durée de période qui ne sont pas déterminés conformément à l’article L. 313-1 du code de la consommation, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe :

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d’intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré de la mention d’un taux effectif global, d’un taux de période ou d’une durée de période qui ne sont pas déterminés conformément à l’article L. 313-1 du code de la consommation, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe :

(Sans modification)

1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ;

1° Sans modification.

 

2° La périodicité de ces échéances ;

2° Sans modification.

 

3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt.

3° Sans modification.

 

Lorsqu’un écrit tel que celui mentionné au premier alinéa mentionne un taux effectif global inférieur au taux effectif global déterminé conformément à l’article L. 313-1 du code de la consommation, l’emprunteur a droit au versement par le prêteur de la différence entre ces deux taux appliquée au capital restant dû à chaque échéance.

Alinéa sans modification.

 

Article 3

Article 3

Article 3

Sont exclus du champ de la présente loi les écrits constatant un contrat de prêt ou un avenant comportant un taux d’intérêt fixe ou un taux d’intérêt variable défini comme l’addition d’un indice et d’une marge fixe exprimée en points de pourcentage

(Sans modification)

(Sans modification)

 

Article 4 (nouveau)

Article 4

 

Dans un délai de huit mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur la réforme du taux effectif global.

(Sans modification)

 

Ce rapport s’attachera à proposer, au regard des jurisprudences récentes, des évolutions permettant de garantir l’information et la protection des emprunteurs professionnels ou personnes morales, en examinant notamment la possibilité d’obliger les prêteurs à indiquer le taux effectif global maximal que l’emprunteur pourrait être amené à payer.

 

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS MENÉES
PAR LE RAPPORTEUR

Association « Acteurs publics contre les emprunts toxiques »

– M. Christophe GREFFET, président, vice-président du conseil général de l’Ain

Ministère des Finances et des comptes publics

– M. Guillaume ROBERT, directeur du cabinet du secrétaire d’État chargé du Budget

– Mme Gabrielle D’ARAILH, conseillère en charge des services financiers au cabinet du ministre des Finances et des comptes publics

– M. Xavier GEOFFROY, conseiller parlementaire au cabinet du ministre des Finances et des comptes publics

Direction générale du Trésor

– M. Jérôme REBOUL, chef du bureau du financement du logement et des activités d’intérêt général

– M. Hubert GASZTOWTT, conseiller juridique

Agence des participations de l’État

– M. Bruno VINCENT, chef du bureau DC1 à la sous-direction services, finance, aéronautique, défense

Fédération hospitalière de France (FHF)

– M. Gérard VINCENT, délégué général

– M. Guy COLLET, conseiller du président et du délégué général, en charge de la stratégie

– M. Yves GAUBERT, responsable des finances

Par ailleurs, l’Association des maires de France (AMF), à la demande du Rapporteur, lui a fait parvenir une contribution écrite.

© Assemblée nationale

1 () Rapport n° 4030 de M. Jean-Pierre GORGES, Assemblée nationale, XIIIème législature. http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-enq/r4030.asp

2 () Le périmètre des emprunts très sensibles correspond aux catégories S1, S2 et S3 de la SFIL. Il comprend les emprunts hors charte Gissler (voir infra) et les emprunts classés 3E, 4E et 5E, dont la composante optionnelle est activée.

3 () Normes IAS n° 37 Provisions, passifs et actifs éventuels

4 () S’agissant des autres motifs d’assignation (notamment le défaut de conseil ou d’information), aucune provision n’est aujourd’hui constatée, compte tenu notamment de la conditionnalité introduite dans le dispositif du fonds de soutien (renonciation à tout contentieux préalable à l’aide du fonds de soutien) ; par ailleurs les décisions de justice récentes (RBS contre la communauté urbaine de Lille) montrent que les tribunaux ont tendance à considérer que les collectivités locales sont des emprunteurs avertis et aucune des condamnations de SFIL rendues à ce jour (département de la Seine-Saint-Denis, Saint-Maur-des-Fossés, Saint-Leu-la-Forêt) ne porte sur un motif autre que l’absence de TEG ou de taux de période.

5 () L’investissement pourrait être considéré par Eurostat comme une dépense budgétaire dans la mesure où la SFIL serait sans doute mise en extinction.

6 () Les hôpitaux ayant sollicité un accompagnement, via le dispositif de la « médiation Gissler », sont au nombre de 12, mais d’autres sont d’ores et déjà identifiés par les agences régionales de santé.

7 () La Cour admet les validations législatives lorsque celles-ci sont justifiées par un « impérieux motif d’intérêt général », arrêts Zielinski c/ France, 28 octobre 1999 et Lilly France C/ France, 25 novembre 2010.

8 () Décision n° 2013-366 QPC du 14 février 2014.

9 () TGI de Nanterre, 8 février 2013, département de la Seine-Saint-Denis c. Dexia ; TGI de Paris, 25 mars 2014, département de la Seine-Saint-Denis c. Depfa Bank ; TGI de Nanterre, 7 mars 2014, commune de Saint-Maur-des-Fossés c. Dexia.

10 () 1ère chambre civile, 5 juillet 1989.

11 () Décision du 7 mars 2014, dans le cadre d’une affaire qui opposait une collectivité territoriale à Dexia et SFIL sur un contrat de prêt structuré.