Fabrication de la liasse
Rejeté
(jeudi 19 avril 2018)
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Supprimer les alinéas 4 et 5.

Exposé sommaire

Cet amendement vise à éviter le dévoiement complet de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, qui permet de procéder à des enquêtes administratives sur des personnes, et qui n’était initialement prévu que pour une catégorie particulièrement limitée de personnes (celles voulant exercer des fonctions pouvant être particulièrement sensibles pour l’Etat).

(agents de la SNCF, gardiennage, garde du corps, fonctionnaires, agents des douanes, etc… « soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses, soit l'accès à des zones protégées en raison de l'activité qui s'y exerce, soit l'utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux, »).

Or étendre ces enquêtes administratives aux publics visés par les articles L. 711-6 (demandeurs d’asile ou personnes ayant obtenu le statut de réfugié), L. 712-2 et -3 (demandeurs de protection subsidiaire et ceux à l’encontre desquels une procédure de retrait de cette qualité a été mise en œuvre), impliquerait que l’OFPRA et l’autorité administrative puissent procéder à de telles enquêtes sur tous ces publics, sans aucun ciblage précis (puisque comme vu ci-dessus l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure concerne bien des publics limités et des secteurs sensibles).

Il s’agit là de la consécration d’un « soupçon » institutionnalisé à l’encontre des demandeurs d’asile et ceux ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire. Pourquoi ces publics-ci devraient ainsi faire l’objet de tels contrôles et par extension fichages ?

Concrètement, les agents de l’OFPRA et les agents des préfectures auront désormais accès à de nombreux « fichiers » (traitements de données) dont l’accès est normalement restreint : STIC (Système de Traitement des Infractions Constatées) et JUDEX (Système judiciaire de documentation et d’exploitation) de la police et de la gendarmerie nationales, et le fichier TAJ (Traitement d’Antécédents Judiciaires). Or, ces fichiers sont en particulier connus pour avoir des problèmes de mise à jour de données (fausses informations, informations datées non effacées, etc…). Une simple recherche sur Internet rappelle toutes les failles et l’arbitraire qui peut découler de l’utilisation de tels fichiers (http://www.europe1.fr/france/la-cnil-allume-les-fichiers-de-police-1552251 ; …) sachant que la France a même été condamnée sur ce point précis par la Cour européenne des droits de l’homme en 2014 (https://www.francetvinfo.fr/societe/justice/fichier-stic-la-france-condamnee-par-la-justice-europeenne-pour-l-inscription-d-infractions-classees-sans-suite_697059.html ; https://hudoc.echr.coe.int/app/conversion/pdf/?library=ECHR&id=003-4872407-5953855&filename=003-4872407-5953855.pdf).

De plus, le Conseil d’Etat a, dans son avis, cherché à attirer l’attention du Gouvernement sur l’élargissement constant des destinataires des informations de ces fichiers et des motifs de leur consultation qui remet en cause les finalités plus étroites conçues lors de leur création (Considérant 17 http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/projets/pl0714-ace.pdf).
Dans le même esprit, la CNIL a souligné dans son avis (https://www.legifrance.gouv.fr/affichCnil.do?oldAction=rechExpCnil&id=CNILTEXT000036634706&fastReqId=1054990578&fastPos=29) que le cumul d’enquêtes administratives portant notamment sur des données d’infraction, avec la communication directe et moins encadrée de données collectées dans le cadre de procédures judiciaires civiles ou pénales, y compris en cas de non-lieu, est susceptible de nuire à la proportionnalité du dispositif de collecte mis en œuvre pour l’exercice par l’OFPRA de ses missions. Outre le fait qu’elle juge insuffisamment précise la mention selon laquelle les enquêtes doivent être réalisées pour l’application des articles L. 711-6, L. 712-2 et L. 712-3 du CESEDA, la Commission rappelle qu’elle devra être « consultée (…) pour garantir que, (…) aucune décision ne puisse être prise sur le seul fondement d’un traitement automatisé ».

Par cet amendement, nous proposons donc de ne pas recourir à une extension particulièrement problématique de l’accès aux traitements de données.