Fabrication de la liasse
Rejeté
(samedi 21 avril 2018)
Photo de monsieur le député Éric Coquerel
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Photo de madame la députée Bénédicte Taurine

Supprimer cet article.

Exposé sommaire

Nous proposons de supprimer cet article (qui n’était par ailleurs pas présent dans le document de présentation transmis aux associations en janvier (http ://www.liberation.fr/france/2018/01/10/immigration-le-gouvernement-expose-les-grandes-lignes-de-son-projet_1621559), ni dans l’avant-projet de loi initialement transmis au Conseil d’État – mais à été ajouté ultérieurement… et on comprend pourquoi…).

En effet, il n’instaure rien de moins qu’une assignation à résidence pour les étrangers qui font l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) AVEC délai de départ volontaire. Ainsi, quand l’étranger bénéficie d’un délai de départ volontaire pour préparer dans de bonnes conditions sa sortie du territoire français, désormais il peut être contraint à l’assignation à résidence, … et ce dans un lieu que l’autorité administrative désigne.

Cette mesure particulièrement attentatoire à la liberté constitutionnelle d’aller et de venir est particulièrement grave. Actuellement le droit ne prévoit pas un dispositif pour les QOTF avec délai mais seulement pour les OQTF sans délai (L. 561‑2 du CESEDA). L’autorité administrative peut prendre une décision d’assignation à résidence à l’égard de l’étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l’éloignement demeure une perspective « raisonnable ».

Ces dispositions ne sont probablement pas constitutionnelles (et contraire avec l’idée même de départ volontaire) et sont le signe d’un basculement intellectuel et politique terrible, celui de la porosité assumée par le Gouvernement entre le droit anti-terroriste et le droit des étrangers. En effet, cette « assignation à résidence » résonne étrangement avec l’article L. 228‑2 du code de la sécurité intérieure créé par la loi du 30 octobre 2017 (qui fait entrer le droit de l’état d’urgence dans le droit commun).

Avec un tel article, le présupposé est particulièrement inquiétant : l’étranger est présumé vouloir s’échapper et frauder.

En outre, le lieu de l’assignation à résidence est fixé par l’autorité administrative et à sa discrétion. L’article ne parle même pas d’éventuelles contraintes personnelles et familiales (scolarisation, travail, santé). La rédaction impliquerait même que l’étranger pourrait donc être assigné à l’hôtel ou même dans un autre département ! Si on poursuit la même logique on pourrait même imaginer que l’autorité préfectorale décide d’assigner à résidence dans un même lieu toutes les personnes pour lesquelles elle a prononcé une OQTF avec délai, par exemple un hôtel qui aurait été réquisitionné. Cet article implique la possibilité pour le préfet de créer des de facto centres de rétention administrative (CRA) semi-ouverts, voire des camps où il parquerait (sans que cela soit formellement des centres de rétention), les personnes devant préparer leurs démarches pour quitter le territoire français.

Enfin, dans son avis (http ://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/projets/pl0714-ace.pdf), le Conseil d’État estime qu’une mesure d’assignation à résidence impliquant la possible mise en œuvre de l’ensemble des mesures envisagées par le titre VI du livre V qui ne serait justifiée ni par la nécessité de garantir la représentation de l’étranger soumis à une mesure d’éloignement, ni par un trouble à l’ordre public, constituerait une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir des étrangers visés.