Fabrication de la liasse
Adopté
(mardi 24 juillet 2018)
Photo de monsieur le député Joël Giraud

Après l’article L. 621‑10‑1 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 621‑10‑2 ainsi rédigé :

« Art. L. 621‑10‑2. – Pour la recherche des abus de marché définis par le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, les enquêteurs peuvent se faire communiquer les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunication, dans les conditions et sous les limites prévues à l’article L. 34‑1 du code des postes et des communications électroniques, et par les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique.

« La communication des données mentionnées au premier alinéa fait l’objet d’une autorisation préalable par un contrôleur des demandes de données de connexion.

« Le contrôleur des demandes de données de connexion est nommé par décret parmi les membres du Conseil d’État ou parmi les magistrats de la Cour de cassation, en activité ou honoraire, pour une durée de trois ans renouvelable une fois. Un suppléant est désigné dans les mêmes conditions.

« Il ne peut être mis fin aux fonctions du contrôleur des demandes de données de connexion que sur sa demande ou en cas d’empêchement constaté selon le cas par le vice-président du Conseil d’État ou par le premier président de la Cour de cassation ou le procureur général près ladite Cour, sur saisine du ministre chargé de l’économie.

« Le contrôleur des demandes de données de connexion ne peut recevoir ou solliciter aucune instruction de l’Autorité des marchés financiers ni d’aucune autre autorité dans l’exercice de sa mission. Il est tenu au secret professionnel dans les conditions prévues à l’article L. 621‑4.

« Il est saisi par demande motivée du secrétaire général ou du secrétaire général adjoint de l’Autorité des marchés financiers. Cette demande comporte les éléments de nature à en justifier le bien-fondé.

« L’autorisation est versée au dossier d’enquête.

« Les enquêteurs utilisent les données communiquées par les opérateurs de télécommunication et les prestataires mentionnés au premier alinéa exclusivement dans le cadre de l’enquête au titre de laquelle ils ont reçu l’autorisation.

« Les données de connexion relatives aux faits faisant l’objet de notifications de griefs par le collège de l’Autorité des marchés financiers sont détruites à l’expiration d’un délai de six mois à compter de la décision définitive de la commission des sanctions ou des juridictions de recours. En cas de composition administrative, le délai de six mois court à compter de l’exécution de l’accord.

« Les données de connexion relatives à des faits n’ayant pas fait l’objet d’une notification de griefs par le collège de l’Autorité des marchés financiers sont détruites à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la décision du collège.

« En cas de transmission du rapport d’enquête au procureur de la République financier ou en cas de mise en mouvement de l’action publique par le procureur de la République financier en application des III et IV de l’article L. 465‑3‑6, les données de connexion sont remises au procureur de la République financier et ne sont pas conservées par l’Autorité des marchés financiers.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

Exposé sommaire

Le présent amendement vise à transférer dans le présent projet de loi l’article 24 du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE).

Cet amendement vise à répondre à la décision d’inconstitutionnalité n° 2017‑646/647 QPC du 20 juillet 2017, dont le Conseil constitutionnel a reporté les effets au 31 décembre 2018.

Compte tenu du décalage de calendrier du projet de loi dit PACTE, il est peu probable que ce texte puisse répondre à temps à la décision d'inconstitutionnalité, pourtant reportée de près de dix-huit mois. Or, il apparaît indispensable de respecter la décision du Conseil constitutionnel, afin de sécuriser juridiquement la situation. Ainsi, le présent amendement vise à intégrer cet article au présent projet de loi, pour instaurer un dispositif susceptible de s'appliquer avant l'abrogation des dispositions actuellement en vigueur au 31 décembre prochain.

Sur le fond, le présent amendement introduit un nouvel article L. 612‑10‑2 au code monétaire et financier, afin d’établir une procédure d’autorisation d’accès aux données de connexion par l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Cette procédure prévoit que l’AMF peut, dans le cadre d’une enquête en matière d’abus de marché (opérations d’initié, manipulations de cours ou diffusion de fausse information), demander à une entité administrative indépendante unipersonnelle dénommé « contrôleur des demandes de données de connexion », l’autorisation d’accéder aux données techniques de téléphonie et de communication, à l’exclusion de celles relatives au contenu des communications.

Cet amendement vise à substituer cette nouvelle procédure, en l’assortissant des garanties nécessaires, à la procédure d’accès sans autorisation préalable, qui a fait l’objet de la décision d’inconstitutionnalité. Le Conseil constitutionnel a jugé que la procédure actuelle ne présentait pas les garanties propres à assurer une conciliation équilibrée entre, d’une part, le droit au respect de la vie privée et, d’autre part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche d’auteurs d’infractions.

Le Conseil d’État a estimé que l’article 24 du projet de loi dit PACTE, transcrit dans le présent amendement, instaurait « un régime présentant des garanties suffisantes, conformes aux exigences constitutionnelles ainsi qu’à celles relevant du droit de l’Union européenne en matière de respect du droit à la vie privée ».

Ainsi, le présent amendement prévoit d'intégrer cette disposition garantissant l'efficacité de l'action de l'AMF en matière de lutte contre les abus de marché au présent texte, pour permettre l'adoption en temps utile d'une réponse à la décision d'inconstitutionnalité précitée.