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le 3 novembre 1999

N° 1861

    ______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    ONZIÈME LÉGISLATURE

    Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999

RAPPORT

FAIT

    AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
    LE PROJET DE
    loi de finances pour 2000 (n°1805),

PAR M. DIDIER MIGAUD,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 35


JUSTICE


Rapporteur spécial : M. Patrick DEVEDJIAN

Député

____

    (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Lois de finances.

    La commission des finances, de l’économie générale et du plan est composée de :

    M. Augustin Bonrepaux, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jégou, Michel Suchod, secrétaires ; MM. Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Eric Besson, Alain Bocquet, Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Arthur Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, Maurice Ligot, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Jean Rigal, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

INTRODUCTION 7

CHAPITRE PREMIER : L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET L'INFORMATIQUE 17

I.– L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE 17

A.– LE MAINTIEN DES MOYENS 17

B.– DES FONCTIONS DE GESTION DISPERSÉES 18

II.– L’INFORMATIQUE 18

A.– LES PROGRAMMES D’ÉQUIPEMENT INFORMATIQUE DE LA JUSTICE 19

B.– UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DOTATIONS 20

CHAPITRE II : LES SERVICES JUDICIAIRES 23

I.– L’ACTIVITÉ JUDICIAIRE EN 1998 24

A.– LES JURIDICTIONS CIVILES 24

B.– LES JURIDICTIONS PÉNALES 28

II.– LES RESSOURCES HUMAINES 29

A.– LES EFFECTIFS 29

    1.– Les magistrats 29

    a) Des magistrats plus nombreux 29

    b) Des magistrats mieux formés 34

    c) Des effectifs mieux gérés 35

    d) Des assistants de justice en nombre 36

    2.– Le personnel des greffes judiciaires 38

    a) Les effectifs de fonctionnaires et d’agents de justice 38

    b) La réforme du corps des greffiers 40

B.– LES RÉMUNÉRATIONS 41

III.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT 42

A.– LE FONCTIONNEMENT MATÉRIEL DES SERVICES JUDICIAIRES 42

    1.– La réforme de la gestion 42

    2.– Une progression des moyens 45

    3.– L’organisation d’une justice économique et financière spécialisée 46

B.– LES CHAPITRES ÉVALUATIFS DES FRAIS DE JUSTICE ET DES RÉPARATIONS CIVILES : UNE NOUVELLE PROGRESSION SUBSTANTIELLE DES CRÉDITS 51

    1.– Les frais de justice 51

    a) Une forte croissance jusqu’en 1998 51

    b) L’amorce d’un ralentissement ? 53

    2.– Les réparations civiles 55

C.– LE DÉVELOPPEMENT DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE ET DE L’ACCÈS AU DROIT 55

    1.– Un système réformé 55

    2.– Un coût important 58

IV.– L’ÉQUIPEMENT JUDICIAIRE 60

A.– LE PROGRAMME PLURIANNUEL D’ÉQUIPEMENT 62

B.– LE PROGRAMME DÉCONCENTRÉ 63

C.– LE PALAIS DE JUSTICE DE PARIS 66

V.– LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE 69

CHAPITRE III : L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE 72

I.– LA PRISE EN CHARGE DE LA POPULATION PÉNALE 73

A.– L’INFLATION CARCÉRALE 73

B.– LA RÉFORME DU DISPOSITIF DES MESURES ALTERNATIVES À L’INCARCÉRATION 80

    1.– Une réorganisation progressive 80

    2.– Des moyens accrus 83

III.– LES PERSONNELS PÉNITENTIAIRES 84

A.– L’AUGMENTATION DES MOYENS 84

    1.– Les objectifs de la loi de programme 86

    2.– Les personnels de surveillance 86

    a) Les effectifs 86

    b) Les rémunérations et avantages statutaires 88

    3.– Les autres catégories de personnel 90

    a) Les personnels de direction et les personnels administratifs 90

    b) Les personnels d'insertion et de probation 91

B.– UNE RÉORGANISATION DE LA GESTION DES PERSONNELS 93

III.– LES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES 94

A.– L’ÉQUIPEMENT PÉNITENTIAIRE : UN SYSTÈME À DEUX VITESSES 94

    1.– Un parc pénitentiaire en mouvement 94

    2.– Des établissements vétustes, dégradés, inadaptés 94

    3.– Un vaste programme de modernisation 95

B.– LA MAINTENANCE ET LA GESTION DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES 98

    1.– La maintenance du parc classique 98

    2.– La maintenance du « parc 13.000 » 99

CHAPITRE IV : LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 102

I.– LA PRISE EN CHARGE DES JEUNES 103

A.– LA POPULATION PRISE EN CHARGE 103

    1.– Les mineurs incarcérés 103

    2.– Les mineurs en difficulté 104

B.– LES MODES D'ACTION DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 105

    1.– Les mesures d'investigation 105

    2.– Les modalités de la prise en charge des jeunes en difficulté 106

II.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT 109

A.– LES MOYENS HUMAINS 109

    1.– Les effectifs 109

    2.– Les mesures indemnitaires et statutaires 111

B.– LES MOYENS MATÉRIELS DE FONCTIONNEMENT 111

III.– LES INVESTISSEMENTS 112

CHAPITRE V : LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES 114

I.– UNE ACTIVITÉ EN AUGMENTATION CONSTANTE 115

A.– LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS 118

B.– LES COURS ADMINISTRATIVES D’APPEL 119

C.– LE CONSEIL D’ÉTAT 120

II.– DES MOYENS DE FONCTIONNEMENT RENFORCÉS 121

A.– LES RESSOURCES HUMAINES : UNE PROGRESSION FORTE DES EFFECTIFS, CONFIRMÉE EN 2000 121

    1.– Les effectifs 122

    a) Les magistrats 122

    b) Le personnel des greffes 126

    2.– Statut et rémunérations 128

    a) La réforme du statut des magistrats 128

    b) Les rémunérations 129

B.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT MATÉRIEL 130

III.– LES INVESTISSEMENTS 132

A.– LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS ET LES COURS ADMINISTRATIVES D’APPEL 133

B.– LE CONSEIL D’ÉTAT 134

EXAMEN EN COMMISSION 136

ARTICLE 71 : Revalorisation du montant de l’unité de valeur de référence pour l’aide juridictionnelle 138

INTRODUCTION

    Avec 3,91 % d’augmentation par rapport au budget voté de 1999 et 27,29 milliards de francs de crédits, le budget de la Justice pour 2000 s’inscrit dans une tendance longue d’augmentation constante des crédits accordés à ce secteur.

    L’accroissement des crédits pour 2000 s’accompagne d’un nombre substantiel de créations d’emplois : 1.237 au lieu de 930 en 1999 et de 762 en 1998. S’ajouteront à ces créations d’emplois budgétaires des crédits de vacations pour l’engagement de 100 assistants de justice supplémentaires, ainsi que pour le recrutement de 2.000 agents de justice pour un coût total de près de 50 millions de francs.

    Face à ces chiffres, il convient de se garder à la fois d’un irénisme béat et de tout pyrrhonisme de mauvaise foi. En effet, ces résultats, s’ils ne peuvent être négligés, méritent d’être tempérés sur deux points au moins.

    D’une part, au-delà des réels efforts budgétaires obtenus par les Gardes des Sceaux successifs, une part non négligeable des 84 % de progression en francs constants enregistrée depuis 1988 () reste imputable à la structure même de ce budget, c’est-à-dire à la part importante que représentent les dépenses légales, telles que les dépenses de personnel, les frais de justice, la prise en charge des détenus, ou encore l’aide juridictionnelle. Cette évolution s’est souvent inscrite dans des cadres pluriannuels, le dernier en date étant fixé par la loi de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 relative à la Justice. L’année 2000 sera la dernière année d’application de cette loi.

    D’autre part, l’évolution des crédits au cours des différents exercices a souvent été moins favorable que celle qui était affichée dans le budget voté.

    – Des charges légales lourdes

    Dominé par les dépenses de fonctionnement, le budget de la Justice est un budget traditionnellement contraint. Il est soumis aux exigences de prise en charge de la population carcérale et des mineurs en difficulté. Il doit répondre aux variations du contentieux, dont le volume ne cesse de croître. L’exemple de l’augmentation continue des dépenses liées aux frais de justice et à l’aide juridique en témoigne.

    Les besoins en personnel sont considérables. Ainsi, la part prise par les crédits du titre III consacrés aux dépenses de personnel ne cesse de croître pour atteindre en 1998 plus de 51,63 % des crédits ouverts (). Dans le projet de loi de finances pour 2000, cette proportion atteint 56,96 %.

    Le renouvellement et l’extension des équipements judiciaires et pénitentiaires se sont avérés plus que nécessaires. Ces opérations impliquent, chaque année, l’ouverture de masses importantes de crédits.

    – Des ouvertures de crédit en gestion systématiquement inférieures aux ouvertures autorisées par les lois de finances

    Les crédits ouverts en gestion ont constamment été inférieurs aux crédits ouverts dans la loi de finances initiale et l’exercice 1998 n’échappe pas à la règle. Cependant, il convient de relever que l’écart négatif entre le budget voté et les crédits ouverts tend à se réduire : 1,6 milliard de francs en 1995, 1,9 milliard de francs en 1996, 1 milliard de francs en 1997, mais seulement 0,7 milliard de francs en 1998 (voir graphique infra). En effet, alors que les crédits inscrits dans le budget voté progressaient, entre 1993 et 1998, de 21,95 %, ceux effectivement ouverts augmentaient de 26,66 % sur la même période.

DÉPENSES ORDINAIRES ET CRÉDITS DE PAIEMENTS DE 1993 À 1998

DOTATIONS EN LOIS DE FINANCES INITIALES ET CRÉDITS OUVERTS
(en milliards de francs)

    Source : Rapport du contrôleur financier

    Ces dernières années, l’exécution du budget s’est également caractérisée par l’importance des reports de crédits de paiement d’un exercice l’autre. Ce phénomène explique l’écart positif très important qui subsiste entre le montant des crédits de paiement adoptés en loi de finances initiale et celui des crédits réellement disponibles. À titre d’exemple, 1,8 milliard de francs de crédits de paiement ont été ouverts effectivement sur les titres V et VI en 1998, alors que le budget voté ne prévoyait que 1,4 milliard de francs de crédits sur ces mêmes titres.

    Il faut regretter que l’augmentation des crédits disponibles ne se soit pas accompagnée d’un maintien du taux de consommation à un niveau satisfaisant. En effet, si le taux de consommation des crédits pour dépenses ordinaires a régressé seulement de 98 % en 1996 à 96 % en 1998, celui des crédits de paiement pour dépenses en capital a chuté de 79 % à 64 % et celui des autorisations de programme de 81 % à 51 %.

    Enfin, il convient de relever que l’exercice 1998 a été marqué par relativement peu de mesures de régulation. En effet, les annulations n’ont représenté que 56,6 millions de francs en 1998, au lieu de 33 millions de francs en 1997, mais 375 millions de francs en 1996. Elles ont constitué, d’une part, une contrepartie à l’ouverture de crédits décidée en début d’année pour financer l’aide aux chômeurs, et d’autre part, par une contrepartie partielle aux ouvertures de crédits demandées dans la loi de finances rectificative du 30 décembre 1998.

    — Dans un contexte de nombreuses réformes, l’effort budgétaire engagé en 1999 se poursuit, dans une moindre mesure, en 2000

    La réforme de la justice, lancée en janvier 1997 par le Président de la République, présentée en Conseil des ministres le 29 octobre 1997, s’inscrit dans un calendrier de trois ans. Le projet de loi de finances pour 2000 constitue donc le dernier budget destiné à financer les modifications annoncées en 1997.

    Parmi les principaux textes marquant cette réforme, il convient de relever :

· le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) adopté en termes identiques par les deux assemblées en 1998, et qui devrait être prolongé par deux projets de loi organique, sur la composition et les attributions du CSM d’une part, sur le statut de la magistrature d’autre part ;

· la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits ;

· la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 relative aux alternatives aux poursuites et renforçant l’efficacité de la procédure pénale ;

· le projet de loi relatif à la présomption d’innocence et aux droits des victimes, adopté en première lecture par chaque assemblée ;

· le projet de loi relatif à l’action publique en matière pénale et modifiant le code de procédure pénale, portant notamment sur les rôles respectifs du Parquet et de la Chancellerie, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale ;

· l’ensemble des textes portant réforme des juridictions commerciales, réforme « consommatrice » de postes de magistrats () ;

    Par ailleurs, une série de textes réglementaires ont été publiés afin d’assouplir et d’aménager certaines procédures, à l’exemple du décret n° 98-1231 du 28 décembre 1998 modifiant le code de l’organisation judiciaire et le nouveau code de procédure civile.

    Quant à la réforme de la juridiction criminelle, elle a marqué le pas, faute des moyens. Une série d’amendements tendant à instituer un recours contre les décisions des cours d’assises avait été proposée par le Sénat, en juin 1999, lors de l’examen en première lecture du projet de loi relatif à la présomption d’innocence et aux droits des victimes. Le Gouvernement s’y est opposé, mais il faudra un jour, de nouveau, aborder cette question.

    Les crédits de la Justice exprimés en dépenses ordinaires-crédits de paiement atteindront, en 2000, 27.291 millions de francs. Ils augmentent de 3,91 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999, après une progression entre budgets votés de 5,61 % en 1999, de 4,04 % en 1998, de 1,82 % en 1997, mais de 6,07 % en 1996. Ils représentaient 1,55 % du budget général de l’État en 1997, 1,56 % en 1998, 1,57 % en 1999 et en représenteront 1,62 % en 2000. Mais les autorisations de programme baissent de 9,27 % à 1.571,5 millions de francs.

    Comme l’année dernière, votre Rapporteur prend acte de l'effort budgétaire réalisé pour 2000 en faveur de la justice. Il se situe dans la tendance à l’augmentation des crédits de la Justice constatée ces dernières années, dans un contexte marqué par l’adoption en 1995 d’une loi de programme.

    Il reste que l’œcuménisme budgétaire n’est pas bon conseiller ; des chiffres en augmentation ne peuvent suffire à rassembler tout le monde : il est bon, en effet, pour tout parlementaire d’exercer une lecture critique des propositions gouvernementales. Et ce principe doit s’appliquer particulièrement au domaine de la justice, où les critères qualitatifs, plus qu’ailleurs, doivent l’emporter sur les résultats quantitatifs. Néanmoins, la part ridiculement faible des crédits de la Justice dans le budget de l’État, le caractère toujours démesurément long des délais de jugement, la surpopulation carcérale, la mauvaise répartition des charges de travail entre juridictions liée aux fantaisies de la carte judiciaire, sont autant d’indicateurs qui révèlent que la mise à niveau nécessaire n’est pas atteinte. Si certaines réformes sont audacieuses – et l’on peut n’être pas d’accord avec elles –, leurs conséquences en termes de moyens paraissent, en tout état de cause, souvent mal évaluées.

    La loi de programme de 1995 arrive à son terme. C’est l’occasion de préparer une nouvelle programmation qui remette à niveau l’ensemble du secteur. Le Président de la République a eu l’occasion de le réaffirmer lors du quarantième anniversaire de l’École nationale de la magistrature (ENM), le 1er octobre 1999, à Bordeaux : « Notre appareil judiciaire doit sortir de la misère et de la vétusté qui ont été trop longtemps les siennes. Des efforts réels ont été faits par le Gouvernement, qu’il s’agisse du montant des crédits, des créations d’emplois ou du recrutement exceptionnel de magistrats. Ils doivent être poursuivis. »

    Ce projet ne devra pas seulement inclure une augmentation des moyens, mais également leur réorganisation générale, et cela passe inévitablement par un topique : la réforme de la carte judiciaire ; mais également par la réforme de la gestion du ministère.

    Cette réforme de la gestion des grandes directions du ministère de la Justice a commencé de se traduire, dans le budget, par une simplification régulière de la nomenclature. Des changements importants de nomenclature étaient intervenus dans la loi de finances pour 1998. Aucun n’a eu lieu dans la loi de finances pour 1999. Pour 2000, deux changements interviennent :

    · les crédits pour indemnités et allocations diverses inscrits autrefois sur les chapitres 31-03, 31-12, 31-22 et 31-32 correspondant à l’administration centrale, aux services judiciaires, à l’administration pénitentiaire et à la protection judiciaire de la jeunesse sont regroupés sur un chapitre unique 31-92 – Indemnités et allocations diverses ; cette mesure devrait permettre des ajustements d’un service à l’autre et éviter ainsi des tensions inutiles en fin d’année ;

    · les crédits inscrits dans la quatrième partie du titre III et correspondant aux dépenses de santé des détenus et au remboursement des prestations effectuées par le secteur habilité ou conventionné par les services de la protection judiciaire de la jeunesse ont été transférés sur les chapitres 37-23 et 37-33 nouveaux dans la septième partie ; cette dernière modification permet de réserver la quatrième partie aux strictes dépenses de fonctionnement des services du ministère.

    Votre Rapporteur s’interroge sur les raisons qui font échapper les crédits de rémunération des personnels des juridictions administratives aux mouvements de regroupement et de globalisation. Il s’agit là encore de la démonstration de l’exception dont bénéficie, sans justification réelle, la justice administrative.

    Par ailleurs, les critiques relatives à certaines imputations faites par la Cour des comptes dans son rapport sur l’exécution des lois de finances pour 1997 demeurent valables : « le titre III comporte toujours des parties au contenu peu cohérent : la septième partie Dépenses diverses, qui regroupe des chapitres dotés de crédits évaluatifs (...), mais aussi des chapitres globalisés par services du ministère (...), voire des services simplement rattachés comme la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (...) est totalement hétérogène. Ces chapitres devraient soit réintégrer la quatrième partie du titre III (...), soit réintégrer la première partie du titre III, dès lors qu’ils regroupent des crédits affectés aux rémunérations » ().

— L’application de la loi de programme de 1995

    Il convient de relever les avancées réalisées ces dernières années. Une loi de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 relative à la Justice a été adoptée, les investissements demeurent importants, l’aide juridique nouvelle continue son développement, la prise en charge sanitaire des détenus a été réformée, les effectifs de magistrats ont été augmentés. Le renforcement du milieu ouvert doit se poursuivre. Toute peine alternative à l’incarcération, lorsqu’il s’agit de délits mineurs, doit être encouragée. La création, cette année, de plus d’une centaine d’emplois pour la diversification des prises en charge et le suivi médico-social des mineurs en danger va dans le bon sens.

    L’exécution de la loi de programme a été repoussée d’un an dans la loi de finances initiale pour 1997 et s'achèvera donc en 2000. Les objectifs fixés en matière d’autorisations de programme ont été atteints. Les objectifs en termes d’emplois n’ont pas été respectés si l’on ne prend en compte que les créations de postes qui correspondent strictement aux dispositions de la loi de programme.

    Il convient de souligner que les nombreuses créations d’emplois intervenues par ailleurs permettent de rejoindre, au moins en termes d’augmentation des moyens de la justice, la philosophie de la loi de programme.

    L’exemple de la ville d’Avignon est archétypique des avancées permises par la loi de programme, associée à une volonté politique : un nouveau palais de justice a été construit, pour un coût total de 212 millions de francs ; il rassemblera l’ensemble des services du tribunal de grande instance, du tribunal d’instance, du tribunal de commerce et du conseil de prud’hommes ; dans le cadre du « programme 4.000 » un centre pénitentiaire de 610 places est en cours d’édification pour un montant de 270 millions de francs ; cette construction nécessitera la création de 122 emplois ; enfin, les locaux du centre d’action éducative ont été réhabilités, et le service d’insertion professionnelle de la protection judiciaire de la jeunesse a été installé dans de nouveaux locaux, sur la base d’une enveloppe de 3,7 millions de francs.

    Par ailleurs, le tribunal de grande d’instance de la ville a vu ses effectifs de magistrats augmenter d’un juge des enfants en 1998 et d’un vice-président non spécialisé en 1999, dans le cadre de la réforme relative à la mise en détention. Trois créations de postes de fonctionnaires de greffe sont parallèlement intervenus. Cependant, malgré le fait que le département du Vaucluse ait été classé « département très sensible » par le conseil de sécurité intérieure, aucune création de postes n’est intervenue dans les services de la protection judiciaire de la jeunesse.

APPLICATION DE LA LOI DE PROGRAMME RELATIVE À LA JUSTICE
EMPLOIS NETS

(1995-2000) (1)

 

Total loi de programme

1995

1996

1997

1998

1999 (2)

2000

Services judiciaires

1.400

284

544

108

316

132

    (dont créations budgétaires)

(1.135)

(83)

(528)

(108)

(300)

(116)

– magistrats (créations budgétaires)

300

60

60

30

70

80

– fonctionnaires (créations budgétaires)

850

23

468

78

230

36

– fonctionnaires (levée de gel)

185

185

– magistrats temporaires

80

16

16

16

16

Administration pénitentiaire

3.920

550

494

114

300

344

286

Protection judiciaire de la jeunesse

400

90

107

35

100

68

Juridictions administratives

380

82

70

57

76

76

15

    (dont créations budgétaires)

(305)

(67)

(55)

(46)

(61)

(61)

(15)

    – magistrats

105

22

20

16

21

21

5

    – magistrats temporaires

75

15

15

11

15

15

 

    – fonctionnaires

200

45

35

30

40

40

10

Total

6.100

1.006

1.215

314

792

620

401

(dont créations budgétaires)

(5.760)

(790)

(1.184)

(303)

(761)

(589)

(401)

Taux de réalisation (en %)

(dont créations budgétaires)

16,5

(13,7)

36,4

(34,3)

41,6

(39,5)

54,5

(52,7)

64,7

(63)

71,28

(69,93) (3)

Taux de réalisation théorique (en %) (4)

16,7

33,3

50

66,7

83,3

100

(1) Les créations inscrites de 1995 à 1999 correspondent aux créations brutes obtenues au titre du programme pluriannuel pour la justice, plus les 300 emplois de catégorie C de 1996 dans les services judiciaires et les 34 emplois inscrits en 1997 pour les unités à encadrement éducatif renforcé et déduction faite des emplois supprimés au titre des économies (145 entre 1995 et 1999).

(2) Ces chiffres ne représentent que les créations de la loi de finances pour1999 qui ont permis d’atteindre l’objectif assigné par la loi de programme de 1995. Se sont ajoutés dans cette loi de finances des emplois supplémentaires qui ont permis de dépasser les objectifs de la loi de programme.

(3) Ce taux s'élève à 99 % hors les futurs établissements pénitentiaires et les centres de semi-liberté : la loi de programme prévoit pour ces futures constructions 1.750 emplois qu'il n'y avait pas lieu, pour l'essentiel, d'inscrire dès les lois de finances initiales 1995 à 2000 puisque les bâtiments ne sont pas encore en service.

(4) compte tenu du report de l'échéance du programme jusqu'en 2000.

Source : d’après ministère de la Justice.

APPLICATION DE LA LOI DE PROGRAMME
AUTORISATIONS DE PROGRAMME
(1995-2000)
(1)

(en millions de francs)

 

Total
Loi de
programme


1995


1996


1997


1998


1999


2000

Services judiciaires

4.500

1.192

1.154

904

572

678

Administration pénitentiaire (titre V)

3.000

270

317

325

1.024

912

150

Protection judiciaire de la jeunesse

400

80

80

80

76

84

Juridictions administratives

200

40

40

42

40

58

Total

8.100

1.582

1.591

1.351

1.712

1.732

1.495

Taux de réalisation (en %)

19,4

39,15

55,9

77

98,4

100

Taux de réalisation théorique (en %) (2)

16,7

33,3

50

66,7

83,3

100

(1) Sont mentionnées les autorisations de programme liées à l’application de la loi de programme
telles qu’inscrites en brut dans les lois de finances successives. S’il est tenu compte des
annulations intervenues en cours de gestion (394 millions de franc), le taux d’exécution devient
au titre de 2000 de 95 % (7.724 millions de francs).

(2) compte tenu du report de l'échéance du programme jusqu'en 2000.

Source : d’après ministère de la Justice.

ÉVOLUTION ET PART RELATIVE DES CRÉDITS DE PAIEMENT PAR SERVICES DEPUIS 1997

(en millions de francs)

 

Crédits de paiement

LFI 1997

Part relative (en %)

Variation

1997/1996 (en %)

Crédits de paiement LFI 1998

Part relative (en %)

Variation

1998/1997 (en %)

Crédits de PaiementLFI 1999

Part relative (en %)

Variation

1999/1998 (en %)

Crédits de Paiement PLF 2000

Part relative (en %)

Variation 2000/1999 (en %)

Services judiciaires

10.542,4

44,10

4,52

11.038,8

44,39

4,71

11.667,9

44,42

5,70

11.742,2

43

0,63

Services pénitentiaires

6.777,2

28,35

– 1,83

7.015,5

28,21

3,52

7.421,9

28,26

5,79

7.856,1

28,79

5,85

Administration centrale et services communs

3.239,3

13,55

0,35

3.320,8

13,35

2,52

3.439,4

13,1

3,57

3.514,5

12,88

2,18

Protection judiciaire de la jeunesse

2.500,2

10,46

1,47

2.603,8

10,47

4,14

2770,9

8,65

10,55

3.179,4

11,65

14,74

Conseil d’État et juridictions administratives

682,1

2,85

8,73

735,3

2,96

7,80

810

3,08

7,53

841,7

3,08

3,91

Autres (1)

162,3

0,68

– 0,55

154,4

0,62

– 4,87

154,7

0,59

0,19

157,3

0,58

1,71

Total Justice

23.903,5

100

1,79

24.868,6

100

4,03

26.264,8

100

5,61

27.291,15

100

3,91

(1) Ordre de la Libération, Ordre de la Légion d’honneur, Commission nationale de l’informatique et des libertés, Commission nationale des comptes de
campagne et des financements politiques, Budget civil de recherche et développement
.

Source : ministère de la Justice.

CHAPITRE PREMIER :

L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET L’INFORMATIQUE

Pour 2000, l’administration générale et l’informatique () représentent 13,45 % du budget du ministère au lieu de 13,69 % du budget voté en 1999, de 13,97 % en 1998 et de 14,23 % pour 1997. Les crédits consacrés à ces actions s’élèveront ainsi à 3.671 millions de francs. Ce montant intègre la subvention aux Ordres de la Légion d’honneur et de la Libération, ainsi que les crédits destinés à la Commission nationale de l’informatique et des libertés et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

I.– L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE

      A.– LE MAINTIEN DES MOYENS

    L’administration générale intègre les moyens de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) dont le budget devrait s’élever à 31,5 millions de francs pour 2000 (+ 4,3 % par rapport à 1999) et de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) dont le budget devrait atteindre 9,52 millions de francs (– 0,26 % par rapport à 1999). Les crédits de recherche (5,6 millions de francs pour 2000) ainsi que la participation aux charges de pension font partie de cet ensemble.

    Ces crédits d’administration générale s’élèvent à 3,7 milliards de francs pour 2000 au lieu de 3,6 milliards de francs inscrits dans la loi de finances initiale pour 1999, soit une très légère progression de 2,2 % après une augmentation de 2,85 % l’an dernier.

    Au 31 décembre 1997, les effectifs réels en fonction à l’administration centrale et répartis dans les différentes directions de la Chancellerie s’élevaient à 2.271 agents, dont 477 agents de services déconcentrés en poste à l’administration centrale. Les effectifs budgétaires sont fixés dans le projet de loi de finances pour 2000 à 1.780 agents, soit une légère augmentation des emplois par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Sont créés 4 emplois de magistrats inspecteurs pour l’inspection générale des services judiciaires et 1 emploi de chef de service, tandis que sont transférés 5 autres postes de directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse. En outre, 9 emplois d’agents administratifs de deuxième classe seront transformés en un emploi d’administrateur civil de deuxième classe, 3 de substituts, un d’attaché principal de première classe, un d’attaché et 3 de contractuels.

      B.– DES FONCTIONS DE GESTION DISPERSÉES

Votre Rapporteur souhaite rappeler que l’organisation de l’administration centrale se caractérise par une relative dispersion des responsabilités de gestion, résultat d’un héritage fondé sur une séparation entre les services judiciaires d’un côté, l’administration pénitentiaire de l’autre, et les services de la protection judiciaire de la jeunesse (ex-éducation surveillée). Ainsi, chacune des directions dites « opérationnelles » dispose de fonctions de gestion. Par ailleurs, le budget, l’informatique et l’équipement relèvent de la direction de l’administration générale et de l’équipement.

En 1994, à la suite des recommandations du rapport () de M. Jean-François Carrez, magistrat à la Cour des comptes, était intervenu un transfert intégral à la direction des services judiciaires des compétences de gestion des crédits de fonctionnement des juridictions, antérieurement partagées entre la direction de l’administration générale et de l’équipement et la direction des services judiciaires. La même année était créé le service de l’information et de la communication, tandis que la direction des affaires criminelles et des grâces et la direction des affaires civiles et du Sceau étaient réorganisées. 

En 1996, c’était au tour du service des affaires européennes et internationales d’être réorganisé. Un bureau de l’entraide judiciaire en matière civile et commerciale était créé au sein de la direction des affaires civiles et du Sceau.

En 1997 se poursuivait la déconcentration de la gestion des personnels de l’administration pénitentiaire, la direction de l’administration pénitentiaire étant elle-même réorganisée en 1998.

II.– L’INFORMATIQUE

Les crédits informatiques tels qu’inscrits dans le chapitre 34-05 ne concernent que l’administration centrale, les services judiciaires, les services pénitentiaires, la protection judiciaire de la jeunesse et les juridictions administratives. Le présent rapport réservera à ces dernières un traitement particulier dans le chapitre V. Les crédits informatiques déconcentrés des juridictions ont été inscrits dans le chapitre 37-92 – Fonctionnement des juridictions. La même opération a eu lieu, en 1998, pour les crédits déconcentrés de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse.

      A.– LES PROGRAMMES D’ÉQUIPEMENT INFORMATIQUE DE LA JUSTICE

En mars 1993, la Chancellerie a décidé l’abandon pur et simple du schéma directeur informatique 1990-1994 du ministère de la Justice, à la suite de dérapages financiers et de comportements dont il avait déjà été fait écho dans la presse, dans le rapport spécial d’octobre 1993 et plus récemment dans le rapport 1994 de la Cour des comptes.

    La préparation des applications au passage à la monnaie unique et l’adaptation des systèmes à l’an 2000 prennent progressivement une importance croissante dans les enjeux des prochains mois. Enfin, les travaux engagés depuis près de deux ans sur le schéma directeur informatique du ministère devraient s’inscrire dans la réalisation d’un plan quinquennal 1998-2002. Ce schéma directeur a été approuvé par la ministre en juillet 1998 et par le comité technique interministériel chargé de l’examen des schémas directeurs des administrations en mars 1999.

    Cinq orientations ont guidé la politique informatique de l’administration centrale  : l’application de gestion des personnels du ministère adaptée à la mise en œuvre de la déconcentration, l’achèvement pour fin 1998 de l’informatisation du bureau de l’entraide répressive internationale et des conventions pénales, la gestion du parc informatique du ministère, le programme d’action gouvernemental pour la société de l’information (PAGSI), le casier judiciaire national pour lequel sont développés des dispositifs de télétransmission des demandes de bulletins formulées par les administrations et les particuliers.

    Le mouvement de déconcentration observé au début des années 1990, avec le développement de l’informatique judiciaire d’initiative locale, a conduit à des aberrations, chaque unité menant sa politique informatique, sans tenir compte de la notion de réseau. Face à cette situation, il a fallu recentrer l’initiative en matière informatique et créer une véritable structure centrale, capable de conduire une politique à l’échelle nationale.

    L’informatique pénale est encore fragmentaire. En effet, trois systèmes informatiques sont en service dans les juridictions : la nouvelle chaîne pénale en région parisienne, la chaîne micro-pénale et la chaîne mini-pénale en province selon la dimension des tribunaux de grande instance. Un renouvellement régulier des équipements est en cours. Au plan fonctionnel, le logiciel développé par un éditeur privé pour le suivi de l’exécution des peines a été acquis par le ministère et commence à être déployé dans les premiers tribunaux de grande instance. Il en est de même pour le logiciel de traitement des ordonnances pénales, déjà utilisé par près de 340 tribunaux de police, qui fait l’objet, d’une part, d’une évolution permettant de dématérialiser les échanges d’informations avec les services de la comptabilité publique, d’autre part, d’une extension d’une implantation dans les tribunaux non encore équipés. Le logiciel d’instruction assistée par ordinateur, qui repose sur des techniques de numérisation des documents papier et qui est expérimenté avec succès par quelques magistrats en charge de dossiers sensibles ou volumineux, est mis à la disposition des nouveaux magistrats parisiens (cf. chapitre II).

    L’informatique civile est en retard. Le secteur civil des cours d’appel, tribunaux de grande instance et des conseils de prud’hommes relevait jusqu’au début de 1998 de l’informatique d’initiative locale. L’appel d’offre lancé en 1997 en vue de l’acquisition de logiciels destinés à ce secteur a abouti en avril 1998. Le programme d’implantation des logiciels retenus privilégie les juridictions en difficulté du fait de la défaillance de certains éditeurs de logiciels. Les logiciels acquis par le ministère sont désormais pris en charge au plan central pour ce qui concerne la maintenance et le développement des nouvelles fonctionnalités. Les nouveaux logiciels seront utilisés dans 26 cours d’appel à la fin de 1999, ainsi que 97 tribunaux de grande instance et 124 conseils de prud’hommes. Enfin, il faut noter que l’implantation du logiciel civil au tribunal de grande instance de Paris, prévue au début de 2000, remplacera dix applications indépendantes. Il fonctionnera en liaison avec l’automatisation du traitement de décisions judiciaires (successions, ventes sur saisies immobilières, inscriptions au répertoire civil, etc.).

    Le projet majeur du ministère de gestion informatisée des détenus en établissement (GIDE) fonctionne, dans son intégralité, depuis le début de 1998 sur les sites pilotes de Fresnes et de Rouen de manière satisfaisante. Son extension à deux nouveaux centres, Val-de-Reuil et Bapaume, a été réalisée. Un audit conjoint du ministère de la Justice et du ministère de l’Économie a eu lieu au cours du premier semestre 1998. Ses conclusions ont été très satisfaisantes, ce qui a permis de décider le démarrage du déploiement de ce système à partir du début de 1999. Les services concernés de la direction de l’administration pénitentiaire et de la direction de l’administration générale et de l’équipement mettent actuellement en place les structures nécessaires à la montée en charge et à la gestion de ce nouveau système. Aujourd’hui, le système GIDE fonctionne dans vingt-sept sites. Une vingtaine de sites supplémentaires devrait le faire d’ici la fin de 1999. Le système devrait être généralisé en 2002.

      B.– UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DOTATIONS

    Entre 1993 et 1997, les dotations consacrées aux opérations informatiques du ministère (hors juridictions administratives) n’ont cessé de diminuer, passant de 484,1 millions de francs dans la loi de finances initiale pour 1993 à 313 millions de francs dans la loi de finances initiale pour 1997.

    Cette baisse résultait en grande partie de l’achèvement du plan intérimaire de 1992 et impliquait le recentrage sur un seul grand projet, le projet de gestion informatique des détenus en établissement (GIDE).

    S’agissant de la loi de finances pour 1998, trois mesures de redéploiement avec d’autres chapitres budgétaires du ministère ont été opérées. La première a concerné le transfert de 7 millions de francs du chapitre 37-92 – Services judiciaires – Moyens de fonctionnement sur le chapitre 34-05. Ce transfert traduisait la prise en charge par l’administration centrale des applications civiles d’initiative locale des cours d’appel, des tribunaux de grande instance et des conseils de prud’hommes. Les deux autres ont été le résultat du regroupement des crédits informatiques déconcentrés sur des chapitres budgétaires spécifiques. Elles concernaient, d’une part, les services pénitentiaires (transfert de 22,03 millions de francs sur le chapitre 37-98), d’autre part, la protection judiciaire de la jeunesse (transfert de 8,4 millions de francs sur le chapitre 34-34).

    En 1999 comme en 1998, les dotations informatiques sont en augmentation sensible, atteignant 370,8 millions de francs au lieu de 337,5 millions de francs. Si les dotations déconcentrées de la protection judiciaire de la jeunesse et des services judiciaires restent stables, en revanche, l’informatique centralisée et l’informatique déconcentrée des services pénitentiaires bénéficient de hausses appréciables.

    En 2000, les moyens informatiques vont encore augmenter, puisque la dotation inscrite dans le projet de loi de finances passe à environ 390 millions de francs, l’essentiel, soit 263 millions de francs, étant géré directement par la Chancellerie. 46 millions de francs seront consacrés au système GIDE, 44 millions de francs au remplacement des systèmes informatiques des juridictions de province, et 13 millions de francs à la nouvelle chaîne pénale.

ÉVOLUTION DES BUDGETS INFORMATIQUES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

(en millions de francs)

Chapitres

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000 (1)

34-05 – Chancellerie (2)

318,5

316

277,1

260

236

250,4

262,6

37-92 – Services judiciaires (3)

143,7

119,2

98,3

118

70,5

88

88

37-98 – Services pénitentiaires (4)

22,6

22

25

34-34 – Protection de la jeunesse (5)

8,4

10,38

14,38

Total

462,2

435,2

375,4

313

337,5

370,77

389,98

(1) présentation dans le projet de loi de finances.

(2) dotation gérée par la sous-direction de l’informatique hors Conseil d’État et Commission
nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

(3) dotation déconcentrée des services judiciaires.

(4) dotation déconcentrée des services pénitentiaires.

(5) dotation déconcentrée de la protection judiciaire de la jeunesse.

Source : ministère de la Justice.

CHAPITRE II : 

LES SERVICES JUDICIAIRES

    Les crédits des services judiciaires financent le fonctionnement et l’équipement de près de 1.200 juridictions, du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), ainsi que des écoles nationales de la magistrature et des greffes (ENM et ENG). Ils couvrent les frais de justice, le coût des réparations civiles, et le financement de l’aide juridique.

    Pour 2000, les crédits des services judiciaires devraient atteindre 11.742,2 millions de francs. Ils sont en progression de 0,6 % après une progression de 4,7 % entre 1997 et 1998 et de 5,7 % entre 1998 et 1999. Ils représentent 43 % des crédits du ministère en 2000. Cette relativement faible progression s’explique, notamment, par une hausse importante des dépenses ordinaires (+ 4,2 %) qui est masquée par une réduction substantielle des crédits de paiement pour dépenses en capital (– 39,1 %).

    En outre, les services judiciaires disposeront en 2000 de 26.290 postes budgétaires, soit 41,7 % de l’effectif théorique total du ministère. Les parts de l’aide juridique, qui mobilise 1.543,6 millions de francs, et des frais de justice qui atteignent 1.885,8 millions de francs, restent élevées puisqu’elles constituent près de 12,6 % des crédits du ministère et 29,2 % des crédits des services judiciaires.

    Il convient de relever qu’aucune création d’emplois correspondant aux dispositions de la loi de programme n’interviendra pour 2000. Néanmoins, le nombre très important des postes de magistrats et de fonctionnaires créé dans le projet de loi de finances suffit à souligner l’application satisfaisante de cette loi.

EXÉCUTION DE LA LOI DE PROGRAMME

SERVICES JUDICIAIRES

(1995-2000)

 

Mesures prévues

Loi de finances initiale 1995

Loi de finances initiale 1996

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Loi de finances initiale 1999

Projet de loi de finances 2000

Total sur 6 ans

Mesures relatives aux emplois

               

    – magistrats

300

60

60

30

70

80

300

    – fonctionnaires

               

    · créations budgétaires (1)

835

23

468

78

230

36

835

    · levée de gel

185

185

185

    – magistrats à titre temporaire

80

16

16

16

16

64

Total emplois

1.400

284

544

108

316

132

1.384

(dont créations budgétaires nettes)

(1.135)

(83)

(528)

(108)

(300)

(116)

(1.135)

Taux de réalisation (en %)

100

20,29

59,14

66,86

89,43

98,86

98,86

Autorisations de programme
(en millions de francs) (2)

4.500

1.192

1.154

904

572

678

4.500

Taux de réalisation (en %)

100

26,49

52,13

72,22

84,93

100

100

(1) en net des 101 suppressions d’emplois de fonctionnaires inscrites au titre des économies par révision des services votés en 1995 (– 10), 1996 (– 22) et 1997 (– 69).

(2) autorisations de programmes inscrites en lois de finances initiales au titre de la loi de programme ; services judiciaires et administration centrale, traditionnellement inscrits au même chapitre.

Source : ministère de la Justice.

I.– L’ACTIVITÉ JUDICIAIRE EN 1998

      A.– LES JURIDICTIONS CIVILES

    Le nombre d’affaires nouvelles civiles portées devant la Cour de cassation est en hausse par rapport à 1997, retrouvant ainsi son niveau record depuis 1990 (environ 22.000 affaires). L’évolution est inverse pour les cours d’appel qui connaissent un nombre d’affaires nouvelles (209.790) moindre par rapport l’année précédente, ce qui confirme le caractère durable du retournement de tendance observé depuis 1996, après la croissance interrompue des affaires nouvelles pendant dix ans.

    En 1997, la situation devant les tribunaux de grande instance était inédite : le nombre d’affaires nouvelles (645.000) diminuait pour la première fois depuis 1986. Cette situation nouvelle résultait en grande partie de la réduction de 39 % des procédures contentieuses de l’exécution. Cette nouvelle tendance à la baisse se confirme en 1998, et ce d’autant plus que, pour la première fois depuis des années, les contentieux soumis au juge aux affaires familiales ont régressé.

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LA COUR DE CASSATION (1)

(1991-1998)

 
   

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998 (2)

 

Affaires nouvelles

19.386

18.841

19.962

19.115

19.969

20.275

19.987

21.928

Cour de

Affaires terminées

18.427

18.049

18.569

18.456

21.499

20.420

20.103

19.815

Cassation

Affaires en cours

30.047

30.945

32.452

33.279

31.949

31.804

34.620

36.733

 

Délai moyen (3)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

(n.d.)

 

Affaires nouvelles

173.177

182.794

204.935

218.880

220.066

219.271

214.197

209.790

Cours d’appel

Affaires terminées

168.011

171.082

179.585

187.246

198.754

203.740

202.724

207.125

 

Affaires en cours

201.632

213.344

238.694

270.328

291.640

307.171

318.644

321.309

 

Délai moyen (3)

13,9

13,8

13,5

13,9

14,7

15,8

16,6

17,4

Tribunaux de

Affaires nouvelles

492.391

523.026

566.723

658.042

660.189

676.282

644.939

632.604

grande

Affaires terminées

462.326.

474.775

532.494

610.234

645.319

659.153

642.319

631.728

instance

Affaires en cours

414.592

461.843

496.072

543.880

558.750

575.879

578.499

579.374

 

Délai moyen (3)

10

9,5

9,6

8,9

8,9

8,9

9,1

9,3

 

Affaires nouvelles

552.456

614.795

567.078

517.154

487.523

483.593

472.963

467.488

Tribunaux

Affaires terminées

523.322

594.168

559.875

509.410

494.828

460.146

453.259

453.060

d’instance

Affaires en cours

268.359

288.986

296.189

303.933

296.628

320.075

339.779

354.207

 

Délai moyen (3)

4,5

4,4

4,9

5,2

5,1

5,0

5,0

5,1

 

Affaires nouvelles

156.298

172.883

172.001

167.809

157.542

167.894

171.799

190.973

Conseils de

Affaires terminées

148.547

161.128

163.073

168.250

166.593

160.536

167.820

165.235

prud’hommes

Affaires en cours

123.684

135.439

144.369

143.949

123.898

142.256

146.235

171.973

 

Délai moyen (3)

9,2

9,7

9,5

9,7

10,1

9,4

9,6

9,7

 

Affaires nouvelles

1.393.708

1.512.339

1.530.699

1.581.000

1.545.289

15.67.315

1.523.885

1.522.783

Total

Affaires terminées

1.322.624

1.419.202

1.453.596

1.493.596

1.526.993

1.503.995

1.486.225

1.476.963

 

Affaires en cours

1.038.314

1.130.557

1.207.776

1.295.369

1.302.865

1.377.185

1.417.777

1.463.596

(1) Ces statistiques ne tiennent pas compte des ordonnances de référés, sur requêtes, des injonctions de payer, des saisies sur rémunérations, du contentieux électoral, des procédures de conciliation, des certificats et déclarations de nationalité, des manifestations de volonté.

(2) données provisoires.

(3) en mois.

Source : ministère de la Justice.

    Il est particulièrement regrettable que la Cour de cassation ne fournisse aucune statistique sur son délai moyen de jugement, et ce d’autant plus que le nombre d’affaires devant elle croît de manière considérable.

    Si le nombre d’affaires nouvelles baisse, en revanche, les durées moyennes des affaires terminées augmentent en 1998 comme en 1997. Les délais de solution passent à 17,4 mois devant les cours d’appel et à 9,3 mois devant les tribunaux de grande instance, alors même que le programme pluriannuel pour la justice avait fixé des objectifs, respectivement, de 12 et de 6 mois. Le même décalage entre les objectifs (3 mois) et la réalité (5,1 mois) doit être constaté pour les affaires traitées devant les tribunaux d’instance.

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LA COUR DE CASSATION

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LES COURS D’APPEL

      Source : ministère de la Justice.

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LES TRIBUNAUX DE GRANDE INSTANCE

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LES TRIBUNAUX D’INSTANCE

      Source : ministère de la Justice.

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX DEVANT LE CONSEIL DE PRUD’HOMMES

      Source : ministère de la Justice.

      B.– LES JURIDICTIONS PÉNALES

    S’agissant des juridictions pénales, le nombre d’affaires nouvelles transmises (6.700) à la Cour de cassation avait diminué en 1997, pour la première fois depuis 1994. En 1998, la tendance à l’augmentation a repris avec force, puisqu’elle atteint 22 % par rapport à l’année précédente, portant le nombre d’affaires nouvelles à 8.180.

    Un ralentissement de la croissance continue de l’activité (32.400 arrêts) des chambres d’accusation près les cours d’appel était constaté en 1997. Mais avec 34.206 arrêts en 1998, la tendance à la hausse a repris.

    Le nombre de plaintes, dénonciations et procès-verbaux (4,96 millions) parvenus aux parquets des tribunaux de grande instance a été relativement stable en 1998 par rapport à 1997. Une tendance à la baisse marque le nombre de procédures classées sans suite (taux de 83 %), tandis que le nombre d’affaires poursuivies (613.000) était en légère progression. 40.000 affaires ont fait l’objet d’une ouverture d’information devant un juge d’instruction, ce qui confirme la tendance à la baisse constante depuis dix ans. Plus de 378.000 affaires ont été poursuivies devant les tribunaux correctionnels, soit à peu près autant qu’en 1997. Enfin, près de 144.500 affaires ont été poursuivies devant les tribunaux de police, en progression de 6,2 % par rapport à 1997.

II.– LES RESSOURCES HUMAINES

    La loi de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 avait prévu d’augmenter les effectifs disponibles de 300 magistrats, de 80 magistrats exerçant à titre temporaire (en équivalent temps plein) et de 1.020 fonctionnaires, dont 185 par levée de mise en réserve.

    Les recrutements inscrits dans la loi de finances depuis 1995 doivent être ainsi appréciés dans le cadre de l’exécution de la loi de programme en tenant compte des gels d’emplois budgétaires.

      A.– LES EFFECTIFS

      1.– Les magistrats

        a) Des magistrats plus nombreux

    La loi de programme du 6 janvier 1995 relative à la justice avait prévu d’augmenter les effectifs disponibles de 300 magistrats et de 80 magistrats exerçant à titre temporaire (en équivalent temps plein).

    Sur la période 1995-1999, le renforcement des effectifs de magistrats devait s’effectuer de façon régulière avec un effort plus soutenu sur la première année. L’objectif annoncé était de renforcer les effectifs des cours d’appel pour leur permettre d’absorber leur retard, de créer des emplois de magistrats du parquet afin de faire face à de nouvelles activités ou à de nouvelles procédures, telles la médiation et la transaction, de créer des emplois de juge de l’application des peines afin de limiter la récidive, de favoriser les mesures alternatives à l’incarcération et de créer des emplois de juge des enfants pour augmenter le nombre des mesures préventives d’assistance éducative et mieux suivre l’évolution des jeunes délinquants.

    60 postes de magistrats ont été créés en 1995 et 1996, puis 30 en 1997 et 70 en 1998. Pour 1999, ce sont près de 80 postes qui seront créés, soit sur cinq ans la création de 300 emplois budgétaires de magistrats, ce qui correspond exactement aux dispositions de la loi de programme. En outre, 36 autres postes de magistrats seront créés en 1999. Le projet de loi pour 2000 prévoit la création de 212 postes de magistrats supplémentaires :

    · 48 postes de juges de la détention provisoire ;

    · 100 postes pour l’introduction de la mixité dans les tribunaux de commerce ;

    · 25 postes dans les tribunaux pour enfants ;

    · 4 emplois de magistrats pour la réforme du Conseil supérieur de la magistrature ;

    · 1 emploi pour la réforme de l’état civil à Mayotte ;

    · et 34 emplois de magistrats pour le renforcement des services.

    S’agissant des postes de magistrats temporaires, seuls 64 ont été créés sur les 80 prévus initialement. Le projet de loi de finances pour 2000 ne prévoit aucune création de postes de magistrats temporaires.

    La loi organique n° 98-105 du 24 février 1998 portant recrutement exceptionnel de magistrats de l’ordre judiciaire et modifiant les conditions de recrutement des conseillers de cour d’appel en service extraordinaire a autorisé le recrutement de 100 magistrats supplémentaires, dans la limite de 50 postes en 1998 et de 50 postes en 1999. Le recrutement exceptionnel de 90 magistrats exerçant les fonctions de conseiller de cour d’appel a été autorisé en 1998 et, pour le même nombre, en 1999.

    En 1998, parmi les cent lauréats, ont été recrutés des avocats, des professeurs, des ingénieurs ou encore des directeurs d’hôpitaux. L’ouverture des concours exceptionnels devait permettrait de combler les 200 postes vacants de magistrats dans les juridictions.

ÉTAT PRÉVISIONNEL DES ENTRÉES
ET SORTIES DU CORPS DES MAGISTRATS

Années

Sorties prévisibles

Entrées prévisibles

1997

75

123

1998

63

185

1999

67

337 (1)

2000

47

300

2001

56

(1) dont 100 par concours exceptionnel, 37 conseillers de cour d’appel en service extraordinaire, 25 détachements judiciaires et 30 recrutements latéraux.

    Si la progression du nombre des postes budgétaires est satisfaisante, il convient de la mettre en rapport avec les effectifs réels de magistrats et préciser que, si des efforts plus significatifs ne sont pas réalisés dans les années à venir, l’évolution défavorable de la pyramide des âges ne sera pas inversée.

ÉTAT DES EFFECTIFS DE MAGISTRATS (1)

(au 1er septembre 1999)

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999

A. Magistrats occupant un poste budgétaire :

6.383

6.414

6.423

6.441

6.510

6.790

B – Magistrats en détachement

224

231

223

240

232

266

C – Magistrats en congé de longue durée

7

18

9

4

7

9

D – Magistrats en congé parental

24

19

23

25

22

17

E – Magistrats en disponibilité

70

71

73

80

70

77

F – Magistrats en activité

6.058

6.075

6.095

6.062

6.179

6.421

G. Magistrats maintenus en activité en surnombre

139

110

91

110

92

82

H. Effectifs réels des magistrats en activité (F+G)

6.197

6.185

6.186

6.202

6.271

6.503

Effectifs budgétaires

6.138

6.198

6.258

6.287

6.357

6.502

Postes vacants (2)

80

133

187

195

215

147

(1) y compris les magistrats d’administration centrale et inspecteurs des services judiciaires.

(2) postes vacants = effectifs budgétaires – magistrats en activité + ajustements liés aux emplois à temps partiel.

Source : d’après ministère de la Justice.

    Votre Rapporteur est favorable à l’augmentation du recours au recrutement latéral avec intégration directe (cf. encadré ci-après) afin de conforter les effectifs de magistrats et d’ouvrir cette profession sur davantage de diversité sociale.

    Si les créations supplémentaires de postes de magistrats apparaissent salvatrices, il convient de ne pas sous-estimer l’étendue des besoins actuels et à venir. Le développement des procédures de médiation, telles que proposées par exemple par les membres du groupe de travail sur le droit de la famille, dirigé par Mme Françoise Dekeuwer-Defossez, a des incidences fortes sur le facteur « temps » ; si elles sont souples, ces catégories de « procédures » sont souvent chronophages pour les magistrats qui les conduisent ; les expériences menées dans le cadre des juridictions commerciales l’ont largement montré. L’extension du recours à des procédures souples mais longues obligera nécessairement la Chancellerie à dégager des effectifs de magistrats ; au-delà des gains de productivité toujours possibles, sans augmentation supplémentaire de postes dans les prochaines années, cette évolution risque de conduire à réduire les effectifs disponibles pour des procédures « classiques », qui s’avèrent déjà pourtant elles-mêmes trop longues.

    De la même manière, la nouvelle politique de traitement immédiat des cas de délinquance juvénile nécessiterait, dans le cadre de la multiplication des procédures de comparution immédiate, un renforcement significatif du nombre de postes de procureurs.

    Alors que le nombre de magistrats est passé de 5.000 en 1975 à 6.000 aujourd’hui, ils ne sont guère plus nombreux aujourd’hui qu’au milieu du XIXème siècle.

    LES MODES DE RECRUTEMENT DANS LA MAGISTRATURE

    L’École nationale de la magistrature (ENM) constitue la voie principale de recrutement des magistrats. Plusieurs modes de sélections sur titres permettent cependant un accès direct à la magistrature. Certaines voies donnent accès à l’exercice permanent des fonctions de magistrat, d’autres à leur exercice temporaire.

    · Recruter des magistrats à titre permanent

    – L’École nationale de la magistrature

    Le recrutement à l’ENM s’effectue principalement par voie de concours. Le premier est ouvert aux étudiants titulaires d’une maîtrise et âgés de moins de 27 ans. Le deuxième est réservé aux fonctionnaires âgés de moins de 40 ans et justifiant de 4 ans de services. Le troisième est ouvert aux personnes n’ayant pas la qualité de fonctionnaires et justifiant de 8 années d’exercice professionnel (article 16 et 17 de l’ordonnance du 22 décembre 1958). En outre, un recrutement sur titre est ouvert aux titulaires d’une maîtrise en droit, âgés de 27 à 40 ans, que quatre années d’activités dans le domaine juridique, économique ou social qualifient pour l’exercice des fonctions judiciaires (articles 18-1 et 18-2 de l’ordonnance précitée).

    – L’intégration directe

    Les articles 22, 23, 24 et 40 de l’ordonnance précitée ouvrent la possibilité d’une intégration directe dans les fonctions des différents niveaux hiérarchiques du corps judiciaire aux personnes titulaires d’un diplôme du niveau de la maîtrise et justifiant d’une certaine durée d’exercice professionnel les qualifiant particulièrement pour exercer les fonctions de magistrats. Ces nominations interviennent après avis conforme de la commission d’avancement et si celle-ci le décide après accomplissement d’un stage probatoire.

    – Les concours exceptionnels

    Ils sont autorisés par loi spéciale à l’exemple de la loi n° 98-105 du 24 février 1998 qui autorise pour chacune des années 1998 et 1999 le recrutement exceptionnel de 100 magistrats.

    · Recruter des magistrats à titre temporaire

    – Le détachement judiciaire

    Les articles 41 à 41-9 de l’ordonnance précitée permettent d’obtenir un détachement judiciaire pour exercer des fonctions des premiers ou second grade aux membres des corps recrutés par la voie de l’École nationale d’administration et aux professeurs et maîtres de conférence des universités, justifiant selon le niveau hiérarchique de détachement de 4, 10, ou 12 ans de services en cette qualité. Ce détachement est prononcé après avis conforme de la commission d’avancement, pour une durée de 5 ans non renouvelable. Préalablement à leur prise de fonctions, les détachés judiciaires accomplissent un stage de formation d’une durée de 6 mois. La loi organique détermine également les conditions dans lesquelles les détachés judiciaires, à l’issue de leur détachement, soit réintègrent leur corps d’origine, soit peuvent solliciter leur intégration dans la magistrature.

    – Les conseillers de cour d’appel en service extraordinaire

    La loi organique n° 95-64 du 19 janvier 1995 modifiée prévoit la possibilité, jusqu’au 31 décembre 1999, de recruter pour exercer en service extraordinaire les fonctions de conseiller de cour d’appel, des personnes âgées de 50 à 60 ans, titulaires d’un diplôme de niveau maîtrise, justifiant d’au moins 15 ans d’activité professionnelle les qualifiant pour exercer ces fonctions. Ils sont nommés après avis conforme de la commission d’avancement, pour une durée de 10 ans non renouvelable.

    – Les magistrats exerçant à titre temporaire

    La loi organique précitée a introduit des dispositions (articles 41-10 à 41-16 de l’ordonnance précitée) permettant ce mode de recrutement a été instauré pour favoriser l’exercice de certaines fonctions judiciaires par des magistrats non professionnels, sans notion de carrière, afin de rapprocher la justice du citoyen, participant ainsi du fonctionnement de l’institution judiciaire. Ces magistrats, qui peuvent exercer les fonctions de juge d’instance ou d’assesseur dans les formations collégiales des tribunaux de grande instance, présentent la particularité de pouvoir continuer l’exercice d’une activité professionnelle concomitamment à l’exercice de fonctions judiciaires. Ce recrutement s’adresse aux personnes âgées de moins de 65 ans, justifiant de 7 années au moins d’expérience professionnelle les qualifiant pour exercer des fonctions judiciaires. Les magistrats recrutés dans ce cadre sont nommés pour une durée de 7 ans non renouvelable. Ces magistrats n’occupent pas un poste budgétaire, ils sont rémunérés sur la base de vacations.

    Accroître les recrutements extérieurs permet d’injecter des compétences dans le corps des magistrats. Si la question des rémunérations est réglée – le magistrat recruté à l’extérieur voit son expérience passée traduite en matière de rémunération –, reste celle de l’avancement. En effet, les magistrats recrutés à l’extérieur commencent leur nouvelle carrière comme simples auditeurs de justice. Ils accèdent plus difficilement aux postes de responsabilité. Tant que ce problème ne trouvera pas de solution adaptée, les meilleures compétences ne pourront être attirées dans le corps de la magistrature par les recrutements extérieurs.

    Par ailleurs, alors que les contentieux deviennent de plus en plus complexes, le besoin de magistrats spécialisés se fait de plus en plus sentir. L’exemple des pôles financiers (voir infra) le montre suffisamment. Cependant, cette spécialisation n’est pas valorisée par le système d’avancement actuel. En effet, pour avancer dans sa carrière, le magistrat spécialisé d’une section financière sera souvent appelé à exercer des fonctions dans d’autres sections, dans un autre tribunal, ce qui a pour conséquence, d’une part, une perte de compétence pour la section considérée et d’autre part, un sentiment de gâchis pour le magistrat lui-même, qui a consacré plusieurs années à se former dans des matières très pointues. Les mouvements de la carrière interdisent le plus souvent une rentabilisation du temps de formation. Par conséquent, s’investir dans des dossiers implique de renoncer à certains avancements.

    La réforme du statut de la magistrature en cours devrait permettre d’améliorer la situation. À ce titre, une provision de 20 millions de francs a été inscrite dans le projet de loi de finances pour 2000, s’ajoutant à celle de 18 millions de francs inscrite dans la loi de finances pour 1999.

        b) Des magistrats mieux formés

    La formation, en particulier la formation continue, est une question primordiale. Le Président de la République l’a souligné, à l’occasion de son discours prononcé pour le quarantième anniversaire de l’École nationale de la magistrature, le 1er octobre 1999, à Bordeaux : « Il convient (…) d’adapter votre formation à l’élargissement de vos missions. Les fonctions qu’un magistrat peut être appelé à exercer au cours de sa carrière sont nombreuses et multiformes. Au-delà de la distinction entre siège et parquet, coexistent en effet, au sein du même corps, des catégories de magistrats très différentes. Quoi de commun, à première vue, entre le juge des enfants, le magistrat affecté dans des sections financières ou anti-terroristes, le juge aux affaires familiales ou le juge d’application des peines ? (…) La formation initiale des futurs magistrats doit être aussi complète que possible, associant théorie et pratique et ouverte aux évolutions de la société. Je sais que des efforts importants ont déjà été accomplis dans ce domaine. Ainsi figurent désormais parmi les cours dispensés à l’École Nationale de la Magistrature des enseignements d’économie, de comptabilité ou de droit européen. Les magistrats du XXIème siècle devront, en effet, être ouverts sur le monde, au fait des expériences étrangères, être à même de suivre les problèmes économiques et sociaux sur le plan européen et international.

    « Mais, aussi complète soit-elle, la formation initiale n’est pas tout. Il faut encore que les magistrats aient la possibilité, tout au long d’une carrière souvent longue, de perfectionner et de compléter leurs connaissances. Aussi est-il indispensable de développer la formation continue des magistrats. Des progrès sensibles ont été réalisés au cours des dernières années. Il faut encore amplifier nos efforts pour permettre à l’ensemble du corps judiciaire français d’avancer au même rythme que la société tout entière. »

    La question de la formation des magistrats aux questions économiques et financières revêt une importance particulière, parce que, d’une part, le contentieux lié à ces questions a explosé ces dernières années, et d’autre part, les magistrats vont entrer massivement dans les tribunaux de commerce. La création des pôles économiques et financier (voir infra) va dans le même sens. C’est pourquoi, l’École nationale de la magistrature a mis en place, parallèlement à un cycle de conférences transversales consacrées au rôle du droit dans le fonctionnement de l’économie, aux risques dans l’entreprise ou encore au juge face aux circuits financiers, des ateliers spécifiques relatifs à la gestion de l’entreprise, ainsi qu’un cycle de spécialisation dans ces matières.

    Enfin, on peut noter que le projet de loi de finances pour 2000 accroît les moyens de l’École nationale de la magistrature (13 millions de francs), en particulier pour financer l’incidence de l’accord salarial du 10 février 1998 sur les rémunérations des auditeurs de justice.

        c) Des effectifs mieux gérés

    La politique de recrutements accrus doit s’accompagner d’une amélioration de la gestion des effectifs. En effet, il ne faut pas se contenter d’augmenter les moyens, il faut, d’abord, améliorer la productivité. Dans le discours précité, le Chef de l’État relevait cette nécessité : « Il est souhaitable que se généralise dans toutes les juridictions un suivi de l’activité des magistrats, sur la base d’indicateurs transparents et fiables, tenant compte, bien sûr, de l’évolution des moyens mis à votre disposition. Des objectifs doivent être définis. Des échéances fixées. Comme d’autres services publics, la justice doit entrer à son tour dans une logique d’évaluation. »

    La mise en place de magistrats placés auprès des chefs de cour, depuis 1987, pour remédier aux vacances d’emplois et aux divers congés, est un autre moyen de donner de la souplesse dans les affectations de magistrats, entre les juridictions en fonction de leur charge de travail réelle. Leur nombre, passé de 109 en 1995 à 139 en 1998, s’ajoute à celui des magistrats maintenus en surnombre. En 1999, le nombre de magistrats placés a été porté à 154. Il convient de relever que le coût des magistrats en surnombre s’est élevé à environ 34,4 millions de francs en 1999.

    La mise en place des magistrats exerçant à titre temporaire prévue par la loi organique n° 95-64 du 19 janvier 1995 relative au statut de la magistrature et la loi de programme n° 95-6 du 6 janvier 1995, est également destinée à assouplir la gestion des effectifs de magistrats. Entre 1995 et 1998, 48 postes de magistrats à titre temporaire ont été ouverts par les lois de finances. 16 nouveaux postes ont été ouverts par la loi de finances pour 1999. 4 candidats sont en cours de nomination, tandis que 24 autres dossiers sont en cours d’instruction.

        d) Des assistants de justice en nombre

    La loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions, en son article 20, avait prévu le recrutement d’assistants de justice afin de donner aux juges les moyens de se consacrer aux tâches essentielles qui ressortissent directement de leur compétence, en leur apportant le concours de collaborateurs de haut niveau pour assurer les travaux préparatoires à la décision, effectuer des recherches et rédiger des notes juridiques dans les tribunaux d’instance, les tribunaux de grande instance et les cours d’appel.

    Les assistants de justice sont recrutés pour une durée de deux ans renouvelable une fois, parmi les personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant quatre années d’études supérieures en matière juridique et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions.

    203 assistants de justice ont été recrutés pour 7,2 millions de francs en 1996. 100 assistants supplémentaires ont été engagés en 1997 et 220 en 1998. En 1999, un effort particulier pour le recrutement de 400 assistants de justice supplémentaires (15,6 millions de francs) était inscrit dans la loi de finances initiale. Le projet de loi de finances pour 2000 développe cette mesure avec la création de 100 postes d’assistants de justice supplémentaire pour un coût marginal de 4 millions de francs.

    Les fonctions des assistants se sont diversifiées : recherche de documentation et de jurisprudence, rédaction de notes de synthèse des dossiers, rédaction de projets de décisions ou de réquisitoires, prétraitement du courrier pénal général, tri des dossiers audiencés après loi d’amnistie, proposition de recours aux procédures de médiation-réparation, gestion de la médiation pénale, réalisation des bibles de doctrines ou des jurisprudences, tenue de statistiques, tenue et gestion des bibliothèques et des fonds documentaires...

    Une évaluation de la manière dont sont utilisés les assistants de justice dont la gestion est déconcentrée au niveau des chefs des cours d’appel est menée. Ces travaux sur l’évolution des métiers de greffe constituent une première étape pour la mise en place d’une gestion qualitative des ressources humaines.

    Il apparaît que l’utilisation des assistants n’est pas homogène sur tout le territoire. Pour le juge d’instruction, les obligations de contradictoire impliquent des contraintes particulières, ce qui n’emporte pas la même problématique que pour les magistrats du parquet. Le recours aux assistants de justice est particulièrement bien adapté au travail du parquet. Le magistrat, quotidiennement, doit faire face à un important travail matériel (exemple du recensement des nombreuses victimes dans les affaires d’escroquerie).

    À terme, un statut d’assistant de justice, et des perspectives éventuelles d’intégration dans la fonction publique, devront sans doute être créés. Mais il semble prématuré de définir aujourd’hui un cadre rigide pour l’exercice de cette fonction. La souplesse du système permet d’adapter les moyens aux besoins. L’existence des greffiers placés n’est pas aujourd’hui suffisante.

    Si votre Rapporteur se félicite de l’assistance apportée par ce nouveau type d’emploi au service public de la justice, il s’interroge sur les garanties qu’il présente au regard de la réalisation de certains actes. En effet, ces emplois ne sont pas permanents et pourraient apparaître comme un « pis-aller budgétaire » au regard du travail, accompli en principe, par les agents de greffe.

      2.– Le personnel des greffes judiciaires

        a) Les effectifs de fonctionnaires et d’agents de justice

    L’effectif du personnel des greffes judiciaires s’élevait en 1998 à 19.403 personnes, soit 32 % du total des effectifs du ministère comme en 1997. En 1999, il a atteint 19.589 postes et il atteindra 19.751 postes en 2000, soit une augmentation de 3,4 % depuis 1996.

EFFECTIFS DES FONCTIONNAIRES DES SERVICES JUDICIAIRES

(au 1er juillet 1999)

Catégories

Effectif budgétaire

Effectif réel (1)

(en nombre d’agents)

Catégorie A

1.637

1.613

Catégorie B

6.395

6.581

Catégorie C

11.509

11.526

Contractuels

38

37

Autres administrations

10

10

Total

19.589

19.767

(1) soit en équivalent temps plein 19.140,12 personnes.

Source : ministère de la Justice.

    Une bonne administration de la justice exige un renforcement des effectifs des greffes judiciaires. La pénurie des moyens de secrétariat et de documentation aboutit à des situations humiliantes et appauvrit la motivation des jugements, ce qui a souvent pour conséquence la multiplication des pourvois en cassation. Le recours aux assistants de justice ne saurait suffire.

    Il convient de relever que le nombre de fonctionnaires des greffes par magistrat, hors personnel technique de catégorie C, est relativement stable sur la décennie : il était de 2,81 fonctionnaires pour 1 magistrat en 1989 ; en 1999, ce ratio s’élève à 2,82.

    La loi de programme avait prévu la création de 835 emplois de fonctionnaires auxquels devait s’ajouter la levée de mise en réserve de 185 emplois de personnels de greffe.

    Entre 1995 et 1998, 185 emplois soumis à un gel ont été « réactivés », et 799 postes ont été créés, dont 300 emplois de catégorie C en 1996 ouverts sans avoir été prévus dans la loi de programme. Pour 1999, 36 nouveaux postes ont été créés, ce qui portera le total sur cinq ans à 835 postes.

    Au-delà de la loi de programme, 194 autres postes ont été ouverts en 1999. Ces ouvertures font suite au plan exceptionnel de recrutement mis en place en 1998 et qui portait sur 44 emplois de greffiers en chef, 240 greffiers, 475 personnels de bureau et 70 fonctionnaires des filières techniques.

    Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit la création de 170 postes de fonctionnaires de greffe supplémentaires (dont 15 postes d’agents contractuels). 8 seront affectés dans les services pénitentiaires dans le cadre de la réforme des services d’insertion et de probation. Il y a eu 44 transferts de ce type en 1999. Une importante partie de ces créations accompagne la création de postes de magistrats (juge de la détention provisoire et juge des enfants) et le renforcement des services administratifs régionaux (SAR). Enfin, elles combleront les besoins en greffiers en chef dans le cadre du développement des conseils départementaux d’accès au droit (CDAD), appelés à remplacer les conseils départementaux de l’aide juridique (CDAJ).

    De la même façon que pour les magistrats, quand bien même les effectifs budgétaires de greffe progressent, il conviendrait de réduire le taux de vacance des emplois.

    Il faut ajouter à ces créations celle de 1.050 agents de justice, à l’instar de ce qui existe pour le recrutement d’adjoints de sécurité par le ministère de l’Intérieur. Ce dispositif a été créé par l’article 29 de la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale. Affectés dans les juridictions, ces agents, recrutés pour cinq ans, devront assurer des activités répondant à des besoins non satisfaits en matière d’accès au droit de publics fragiles au sein des juridictions et des maisons de justice et du droit : assistance et accueil des mineurs et des majeurs en difficultés ainsi que de leur famille, assistance des publics fragiles, illettrés, étrangers maîtrisant difficilement la langue française, assistance à l’accueil et à l’animation des maisons de justice, etc. Ainsi, le dispositif « emplois-jeunes » du ministère de la Justice comporte désormais deux volets :

    · un volet associatif dans le cadre de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d’activités pour l’emploi des jeunes ;

    · un volet public avec le recrutement direct, sous contrats de droit public, dans le cadre de l’article 29 de la loi du 23 juin 1999 précitée.

        b) La réforme du corps des greffiers

    Une réflexion sur l’évolution des métiers des greffes a été engagée au cours de l’année 1997 par une commission composée de magistrats et de fonctionnaires de toutes les catégories, qui a dégagé des premières orientations. Le rapport de cette commission a été adressé en septembre 1998 à toutes les juridictions pour consultation. Devant les inquiétudes soulevées par ce rapport, tant chez les magistrats que chez les fonctionnaires, le 28 mai 1999, a été réunie une commission permanente d’études, instance de consultation élargie à l’ensemble des organisations syndicales de magistrats et de fonctionnaires.

    Certains axes ont été dégagés, notamment sur les besoins de professionnalisation et sur la nécessité de clarifier les attributions de chacun tant dans le domaine de la gestion que dans le domaine du traitement des contentieux. Ainsi, de par leur statut particulier, les greffiers en chef ont-ils vocation à exercer des fonctions de direction, d’administration et de gestion dans les juridictions sous l’autorité des chefs de cour ou des chefs de juridiction. Ils peuvent être assistés d’adjoints, greffiers spécialisés dans les différents métiers de la gestion. Dans le domaine du traitement des procédures, les magistrats ont besoin d’être assistés par des personnels mieux formés et expérimentés travaillant au sein d’équipes de professionnels, aux fonctions identifiées et bénéficiant de l’apport des nouvelles technologies afin de sortir le juge et l’institution judiciaire de l’artisanat. La fonction traditionnelle du greffier est d’assister le magistrat. C’est le fondement même de la particularité du statut du greffier, outre des textes de procédure qui disposent que le juge doit être assisté du greffier dans les actes de la juridiction. Ainsi le greffier est-il le collaborateur naturel du juge. Authentificateur des actes juridiques et garant du respect des règles de procédures civile et pénale, sa présence au côté du juge est obligatoire et indispensable. Technicien de la procédure, le greffier doit participer à la préparation et à la mise en forme de la décision juridictionnelle sous l’autorité fonctionnelle du juge qui en a la responsabilité. Grâce à un très bon niveau de recrutement et à une solide formation initiale dispensée par l’École nationale des greffes, les greffiers sont devenus de véritables professionnels disposant d’un haut niveau de compétences. Ils suppléent souvent le juge.

    Dès le début de l’année 2000 sera engagée l’élaboration d’un référentiel des métiers de greffe. Cet outil indispensable à la mise en œuvre de formations adaptées aux nouveaux besoins de l’institution sera aussi l’outil de la mise en place d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Il s’agira de formaliser les missions et les activités de l’ensemble des personnels des greffes au sein de fonctions identifiées par domaine. Outil de gestion mais aussi outil de référence pour chaque agent, ce référentiel permettra de satisfaire les besoins de l’institution en compétences nouvelles et de mieux utiliser les compétences actuelles pour accompagner l’évolution et la modernisation du service public de la justice.

    Une réflexion est en cours sur l’opportunité de déléguer aux greffiers les attributions initialement confiées aux magistrats et transférées aux greffiers en chef dans le but d’assouplir la loi n° 95-25 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative.

      B.– LES RÉMUNÉRATIONS

    Les créations d’emplois en 1999 ont entraîné une ouverture de crédits nouveaux à hauteur de 89,2 millions de francs. Par ailleurs, plus de 116,8 millions de francs correspondront au coût en 1999 de l’accord salarial conclu dans la fonction publique sur les bas salaires, sur la revalorisation du point Fonction publique et sur des mesures de pyramidages.

    Une provision de 18 millions de francs a été inscrite au titre de la réforme du statut de la magistrature. Les travaux interministériels se poursuivent sur cette réforme destinée à accroître les garanties d’indépendance, améliorer le déroulement de carrière et permettre une plus grande mobilité des magistrats. Par ailleurs, une mesure de 9,6 millions de francs est destinée à majorer les indemnités des greffiers et greffiers en chef.

    Le régime indemnitaire des greffiers et greffiers en chef est revalorisé de 0,5 point, portant le taux moyen des indemnités et primes à 20,25 % du traitement brut. Les agents de catégorie C bénéficieront quant à eux d’une revalorisation de leur régime indemnitaire de 1 point, portant le taux moyen d’indemnités à 17 % du traitement brut.

    Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit lui aussi une revalorisation des indemnités versées à l’ensemble des fonctionnaires des services judiciaires grâce à une mesure nouvelle de 17,2 millions de francs.

III.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT

    Les services judiciaires continuent de connaître un nombre d’affaires nouvelles important. L’activité des juridictions civiles comme des juridictions pénales est maintenue à un niveau élevé, compte tenu des affaires restant à juger, ce qui exige des moyens de fonctionnement importants.

      A.– LE FONCTIONNEMENT MATÉRIEL DES SERVICES JUDICIAIRES

    La loi de finances initiale pour 1998 a regroupé sur le seul chapitre 37-92 les dotations des chapitres 35-10 – Travaux d’entretien immobilier ancien et 37-92 – Fonctionnement des juridictions.

      1.– La réforme de la gestion

    Engagée dès 1987, la réforme de la gestion des moyens des services judiciaires a connu une phase expérimentale entre 1992 et 1994, avant de se stabiliser autour de l’échelon fonctionnel de la cour d’appel.

    Le développement de l’échelon d’administration implanté dans les cours d’appel a été accompagné par les créations successives de fonctions spécialisées : délégué à la gestion budgétaire, délégué à la formation informatique, formateur régional, magistrat chargé de la formation ou délégué à l’équipement, relevant parfois auparavant d’autorités différentes ou concurrentes. L’accroissement des tâches d’administration, l’augmentation des volumes délégués, et le nombre de personnels à gérer nécessitent que les chefs de cour bénéficient de renforts en personnel et en moyens, et que soient réorganisées les diverses structures existantes.

    Ce dispositif de gestion a été mis en place à partir de 1995. Les services de gestion chargés d’assister les chefs de cour d’appel ont été réorganisés (création d’un service administratif régional, le SAR, dirigé par un coordonnateur). Dans ce cadre, les juridictions ont été invitées à présenter leurs demandes budgétaires dans une optique de budget zéro (élaboration d’un budget de base et d’un budget de programme).

    Cette réorganisation de l’échelon déconcentré s’est traduite par la création à la direction des services judiciaires d’une mission de contrôle de l’exécution des budgets, qui est opérationnelle depuis la fin de l’année 1996. Elle est dirigée par un magistrat, assisté de greffiers en chef et ponctuellement d’un administrateur civil. Elle a vocation à intervenir dans l’ensemble des 1.200 juridictions, réparties sur 900 sites immobiliers dans 600 communes. Elle établira une typologie des juridictions en fonction de la nature et de l’évolution de leurs charges, organisera un contrôle de gestion et fournira une assistance technique aux gestionnaires des cours d’appel.

    Par ailleurs, en 1997, a été mis en place un dispositif de contrôle de gestion ayant pour finalité d’aider les chefs de cours d’appel dans leurs arbitrages budgétaires tant au niveau de l’élaboration des demandes que de la répartition entre les juridictions du premier degré de la ressource notifiée en permettant un meilleur suivi des dépenses de fonctionnement des juridictions.

    Les circuits financiers régissant les services judiciaires demeurent, malgré ces réformes, complexes. La lettre de l’arrêté du 31 décembre 1993 modifié portant règlement de comptabilité pour la désignation des ordonnateurs secondaires du budget du ministère de la Justice et de leurs délégués est, à cet égard, éloquente.

    Ainsi le préfet du département siège de la cour d’appel est ordonnateur secondaire des dépenses relatives à l’activité des services judiciaires en matière de dépenses informatiques gérées par les cours d’appel, en matière de rémunérations des personnels titulaires et des agents non titulaires de droit public et en matière de subventions aux organismes privés ou publics contribuant au contrôle judiciaire. Le préfet de région est, quant à lui, ordonnateur secondaire du budget du ministère concernant les recettes et les dépenses relatives à l’activité de la cour d’appel de Paris. Le système de délégation rend le système encore plus complexe, puisque le préfet du département peut donner délégation de signature à un magistrat ou à un fonctionnaire de catégorie A délégué auprès des chefs de la cour d’appel de Paris pour l’exécution des recettes et dépenses relatives à l’activité des juridictions du premier degré de ce département.

    Dans tous les cas, une juridiction du premier degré ne peut avoir d’autonomie comptable et en aucun cas un chef de juridiction ne peut se voir déléguer la compétence d’ordonnateur secondaire, délégué ou subdélégué, pour les dépenses d’équipement, alors que les directeurs régionaux de l’administration pénitentiaires peuvent être ordonnateurs délégués, y compris pour les dépenses d’investissement, et subdéléguer leur compétence aux chefs d’établissements pénitentiaires dotés de l’autonomie comptable en application de l’article 9 du décret n° 57-1409 du 31 décembre 1957 portant organisation comptable des établissements pénitentiaires.

    Face à cette complexité, une réforme de la procédure d’exécution a été initiée par la Chancellerie à titre expérimental dans les ressorts des cours d’appel d’Amiens, de Rouen, d’Angers, Bordeaux, Bourges et Nîmes, ainsi que dans le ressort du tribunal de grande instance de Bobigny dans un objectif de généralisation du dispositif à l’ensemble des cours d’appel d’ici le 1er janvier 2000. Cette réforme vise à permettre aux chefs de cours d’exercer pleinement leurs responsabilités tant en termes de conduite d’une politique dynamique de l’achat public qu’en termes de contrôle de gestion. Les circuits actuels de la dépense seront modifiés : seront centralisées au niveau de la cour d’appel les informations concernant les dépenses de l’ensemble des juridictions du ressort, dont jusque là seuls étaient destinataires les ordonnateurs secondaires pour les juridictions de leur département.

    Dans ce schéma, le service administratif régional constitue l’unique interlocuteur des préfets, ordonnateurs secondaires, en matière d’engagement comptable et de mandatement des dépenses des juridictions des départements composant le ressort de la cour d’appel. L’ensemble des juridictions du premier degré du ressort d’un tribunal de grande instance (arrondissement judiciaire) est fédéré en centre dépensier disposant d’une cellule de gestion budgétaire, laquelle est chargée de tenir la comptabilité des juridictions du premier degré relevant du centre dépensier et constitue l’unique interlocuteur du SAR.

    Les juridictions conservent l’initiative de leurs dépenses de fonctionnement, sous réserve de la politique d’achat commune déterminée, après concertation, par les chefs de cours.

    Chaque niveau – administration centrale, service administratif régional, cellule de gestion – dispose d’un outil informatique de gestion. Cette réforme en cours de validation sur les sept sites expérimentaux, sera étendue courant 1998 à une dizaine d’autres cours d’appel et aux autres cours en 1999.

    Les SAR ont vu leurs moyens matériels progressivement se renforcer. En 1999, ils bénéficiaient de 685 emplois budgétaires, dont 148 postes de greffiers en chef et 163 emplois de greffiers.

    Enfin, l’expérimentation de guichet universel de greffe, où le citoyen peut déposer les pièces de la procédure, accomplir diverses formalités administratives ou divers actes de procédure, même si le contentieux n’est pas jugé sur le lieu où se trouve physiquement implanté ce guichet et où il peut être informé sur l’état d’avancement de sa procédure en cours devant l’une des juridictions concernées, impose aux juridictions une réorganisation de leur fonctionnement et une amélioration de la circulation de l’information qui pourraient être, à terme, source d’amélioration de la productivité. Cette expérimentation, débutée début mars 1998 à Angoulême, Compiègne et Nîmes, sera étendue en octobre 1999 à Rennes et Limoges.

    Votre Rapporteur souhaite appeler votre attention sur l’importance qu’il convient d’accorder à la formation des magistrats à la gestion, tant que les chefs de juridiction seront chargés de l’organisation et du fonctionnement courant, humain et matériel des tribunaux.

      2.– Une progression des moyens

    Cette déconcentration raisonnée s’est accompagnée d’un mouvement constant de globalisation se traduisant par des modifications substantielles de la nomenclature budgétaire, et en particulier par le regroupement progressif des crédits de fonctionnement au sein du chapitre 37-92.

MOYENS MATÉRIELS DES JURIDICTIONS

(en millions de francs)

 

Loi de finances 1998

Loi de finances 1999

Projet de loi de finances 2000

Variation 2000/1999
(en %)

Chapitre 37-92 : Fonctionnement des juridictions

1.244,57

1.308,98

1.334,97

1,99

Source : documents budgétaires

    La progression des moyens des juridictions est en constante augmentation. Ils atteignaient 1.106,18 millions de francs en 1994, ils atteindront 1.334,97 millions de francs pour 2000, soit une augmentation de 20,68 %. Par rapport à la loi de finances initiale pour 1999, la croissance atteint 1,99 %.

    Les mesures nouvelles proposées pour 1999 ont permis d’assurer :

    · le développement des conseils départementaux d’aide juridique et la poursuite du programme de maisons de justice et du droit (6 millions de francs) ;

    · la modernisation des juridictions et la mise en service des nouveaux bâtiments (32,1 millions de francs) ;

    · la consolidation des pôles de lutte contre la délinquance financière à Paris, en Corse, à Marseille et à Lyon pour 15,7 millions de francs ;

    · et l’accompagnement des premières réformes de la carte judiciaire (5 millions de francs).

    Dans le projet de loi de finances pour 2000, 26 millions de francs de mesures nouvelles serviront à améliorer les conditions de fonctionnement des juridictions, y compris l’informatique déconcentrée.

      3.– L’organisation d’une justice économique et financière spécialisée

    Votre Rapporteur souhaite attirer l’attention sur la création de structures originales au sein des juridictions : les pôles économiques et financiers. Leur organisation n’est pas inédite ; elle répond aux dispositions de l’article 704 du code de procédure pénale, qui prévoit que dans chaque ressort de cour d’appel, un ou plusieurs tribunaux de grande instance sont compétents pour traiter la délinquance économique et financière : elle comprend ainsi plusieurs sections du parquet spécialisées et, pour le siège, des cabinets d’instruction, également spécialisés dans la lutte contre la délinquance économique et financière. La nouveauté réside dans le rapprochement géographique de ces deux services au sein d’un même lieu, associé à une concentration des moyens. Ces pôles de compétences et de ressources constituent, indéniablement, le paradigme d’une justice moderne qui a les moyens des ses missions.

    Ceux qui considèrent la création des pôles financiers comme la naissance d’une justice luxueusement installée et privilégiée se fourvoient. En effet, ce serait admettre comme norme une justice dans laquelle le respect de délais raisonnables s’apparente à une question de spéculation métaphysique, où disposer d’un bureau pour un magistrat relève du miracle ou, au mieux, d’une position hiérarchique très favorable, où l’informatique est synonyme de perdition technologique, où les locaux dans lesquels attendent les personnes devant être interrogées constituent à eux seuls une punition.

    – Le contexte de la création des pôles économiques et financiers

    En octobre 1996, sept magistrats européens lançaient l’« appel de Genève » et en appelaient à la création d’un espace judiciaire commun pour lutter contre l’Europe des paradis fiscaux et l’argent « sale ». La question de la lutte contre la délinquance financière était mise au cœur des débats intéressant l’institution judiciaire.

    En France, depuis plusieurs années, le manque de moyens des juges chargés des dossiers économiques et financiers a été dénoncé, notamment par les magistrats eux-mêmes, comme en témoigne la lettre adressée au Garde des Sceaux par le procureur et le président du tribunal de grande instance de Paris en octobre 1997. Le contentieux concerné a explosé, et la juridiction de Paris a dû traiter, de plus en plus, des affaires de niveau national qu’il s’agisse « de problèmes de santé publique (dossiers de l’amiante, de la vache folle…), d’affaires de bourse (délit d’initié à propos de la Société Générale, affaire Saint-Laurent…), de financement des partis politiques (PC, PR, CDS…), d’attribution des marchés publics (marchés d’investissement de la région Île-de-France), de pratiques frauduleuses touchant l’ensemble d’un secteur économique (malversation des syndics de copropriété de l’Île-de-France, réseaux de financement des entreprises textiles parisiennes…), des détournements à l’échelle internationale au préjudice d’Elf-Aquitaine, de la GMF, de l’ARC, de sinistres affectant le secteur bancaire : affaire Pallas Stern, mais surtout dossier du Crédit Lyonnais » ().

    L’exigence de transparence et d’équité dans la vie économique et financière appelait une réponse efficace.

    Rétablissant l’article 706 du code de procédure pénal, l’article 91 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier modifiant ce code a créé la fonction d’assistant spécialisé. Leur statut a été précisé par le décret n° 99-75 du 5 février 1999 pris pour l’application de l’article 706 de ce code.

    Il s’agit de fonctionnaires détachés ou mis à disposition contre remboursement par leur administration (douanes, impôts, concurrence et répression des fraudes, Banque de France...), spécialistes des matières économiques et financières. Ils assistent les magistrats sans pouvoir cependant effectuer le moindre acte de procédure. Ils peuvent ainsi analyser des documents comptables, apprécier un budget, analyser les conditions de dévolution d’un marché public, décrypter des montages financiers destinés à permettre la dissimulation de mouvements de fonds d’origine frauduleux, analyser des états périodiques adressés au parquet par les mandataires de justice, des rapports établis au cours de l’exécution du plan de redressement ou des opérations de liquidation judiciaire. Ils sont nommés pour trois ans renouvelables. Ils sont soumis au secret professionnel.

    La mise en place des premiers pôles financiers entre dans la logique de l’approfondissement de la coopération judiciaire internationale, tel qu’affirmé, le 16 octobre 1998, par les ministres de l’Union européenne.

    Une circulaire du Garde des Sceaux en date du 19 février 1999, est venue préciser les conditions de mise en place des pôles économiques financiers dans certaines juridictions spécialisées ().

    – L’exemple parisien

    Annoncée dans son principe en décembre 1997, la création d’un pôle de magistrats économiques et financiers installé hors du palais de justice de Paris, rue des Italiens, a été confirmée par le Garde des Sceaux, le 25 mai 1998. Le pôle a été inauguré dès le 4 mai 1999. Votre Rapporteur s’y est rendu le 29 septembre dernier.

    Au total, près de 250 personnes, dont 60 magistrats, pour moitié des magistrats du parquet et pour moitié des magistrats d’instruction, ont été regroupées dans les mêmes locaux. Sous l’autorité du procureur de la République du tribunal de grande instance de Paris, la division économique et financière du parquet est divisée en quatre sections : lutte contre la délinquance astucieuse, affaires financières, affaires économiques et sociales, cellule commerciale. La section du parquet chargée du contentieux des moyens de paiement, souvent lié aux flagrants délits, est restée au Palais. Seuls les personnels qui étaient volontaires ont déménagé rue des Italiens. Ceux qui voulaient rester au palais de justice ont pu le faire.

    Côté instruction, un vice-président exerce également les fonctions de juge délégué chargé de désigner les juges d’instruction. Il est habilité à recevoir les plaintes avec constitution de partie civile, ainsi que les consignations. Le service est organisé autour d’un vice-doyen et de trente cabinets d’instruction répartis entre économie financière et délinquance astucieuse.

    Les différentes sections du parquet et de l’instruction se sont vues adjoindre des « assistants spécialisés ». Sur les neuf en fonction aujourd’hui, cinq travaillent pour le parquet, et quatre pour le siège. Trois sont des inspecteurs de la Banque de France, trois des inspecteurs des services de vérification de la direction générale des impôts, deux sont des inspecteurs principaux de la direction générale des douanes, et un vient de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Les magistrats bénéficient ainsi d’une aide considérable. Ils servent d’interface entre le judiciaire et leur administration d’origine par la connaissance qu’ils ont de cette dernière. Ils apportent des compétences extérieures. Inversement, de retour dans leur administration, ils mettront leurs connaissances du système judiciaire au service de leur ministère d’origine, notamment dans la mise en œuvre de l’article 40 du code de procédure pénale.

    Il est probable que le recours aux assistants spécialisés diminue celui qui est fait aux experts. Par ailleurs, les commissions rogatoires adressées à la police judiciaire par les juges d’instruction, qui ne seront pas obligatoirement moins nombreuses, mais seront, dans tous les cas, mieux ciblées, en raison du travail préparatoire effectué par les assistants spécialisés. Cette action se traduira, à terme, par des délais moins longs et une efficacité accrue dans le résultat des poursuites.

    La loi de finances initiale pour 1999 avait prévu des crédits de vacations pour la création de 19 postes d’assistants spécialisés. Le projet de loi de finances ouvre 34 postes. Une régie a été instituée dans les nouveaux locaux. En matière économique et financière, près des trois quarts des dossiers sont déclenchés sur plainte avec constitution de partie civile (aboutissant à environ 85 %) de décision de non-lieu, le solde étant engagé sur la demande du parquet, d’où l’intérêt pour le justiciable de pouvoir s’adresser indifféremment au Palais ou au pôle des Italiens. En revanche, aucune audience ne se déroule rue des Italiens.

    Les bâtiments sont spacieux. Ils occupent une surface utile de 7.000 mètres carrés, à comparer avec les 1.200 mètres carrés de l’ancienne galerie financière du palais de justice. Ils sont également fonctionnels. La discrétion de la circulation des personnes est assurée. L’équipement informatique est de bon niveau. L’aménagement de locaux de garde à vue est exemplaire, surtout lorsqu’on les compare à ce qui existe au palais de justice de l’île de la Cité.

    Le montant des frais d’installation et d’équipement a été chiffré à environ 15 millions de francs, dont 7,6 millions de francs pour le mobilier, 1,6 million de francs pour la téléphonie et 4,7 millions de francs pour l’informatique. Les dépenses annuelles de fonctionnement représentent 24 millions de francs, dont 21,5 millions de francs pour la location de l’immeuble. L’aménagement de celui-ci a été pris en charge par le propriétaire pour un total de 18 millions de francs. Si la sécurité intérieure des locaux est assurée (système de caméra, gardiennage permanent, chambres fortes, etc.), contrairement à ce qu’on peut constater pour le palais de justice, en revanche, la sécurité extérieure est moins bien garantie : en effet, les bureaux sont largement exposés aux risques de surveillance extérieure.

    Des moyens informatiques importants ont été déployés dans le bâtiment des Italiens. Les postes sont notamment équipés du logiciel d’instruction assistée par ordinateurs (IAO), qui permet de faire des recherches par mots-clefs à l’intérieur d’un dossier coté, numérisé et copié sur un cédérom. Une liaison informatique permet de pallier certains inconvénients de la disjonction des locaux du pôle d’avec le palais de justice. Cette rationalisation et ce renforcement des moyens ont permis des gains de productivité qui limitent les risques d’une « justice au carbone 14 ».

    L’expérience du pôle financier, récente dans le temps, paraît aujourd’hui satisfaisante. Les affaires traitées sont plus nombreuses que les affaires entrées. En conséquence, le stock devrait diminuer. Inévitablement, la productivité augmente ; la qualité de l’instruction sera améliorée.

    Les difficultés liées aux communications avec le palais de justice (transport des dossiers, temps de transport pour assister aux audiences, etc.) montrent cependant combien la dissémination des implantations judiciaires à Paris peut poser problème. Cette constatation milite pour la construction d’une nouvelle cité judiciaire à Paris, qui permettrait de réunir l’ensemble des services du tribunal de grande instance et des tribunaux d’instance d’arrondissement.

    Il est prévu de créer trois autres pôles, à Bastia, Marseille, Lyon. En outre, les tribunaux de Nanterre, Bordeaux et Fort-de-France, qui ne bénéficient pas de l’ensemble des mesures qui caractérisent la constitution des pôles économiques et financiers proprement dits, ont bénéficié de l’affectation d’assistants spécialisés.

    Les administrations regroupent leurs services financiers au sein d’un pôle spécialisé, à l’exemple du service de traitement du renseignement et d’action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) au ministère chargé de l’économie. Seule l’institution judiciaire échappe au phénomène, chaque cour d’appel, voire chaque tribunal ayant une section compétente. Mais l’exemple de l’organisation de la lutte judiciaire contre le terrorisme est exemplaire de ce point de vue : la compétence est à la fois nationale et spécialisée. Les pôles financiers mériteraient d’être mis en réseau sur ce modèle. En tout état de cause, ces dernières structures peuvent apparaître comme l’archétype de l’adaptation de l’appareil judiciaire aux évolutions sociales. Les moyens matériels et humains nécessaires ont été apportés. Tous les secteurs de la justice mériteraient un tel traitement.

      B.– LES CHAPITRES ÉVALUATIFS DES FRAIS DE JUSTICE ET DES RÉPARATIONS CIVILES : UNE NOUVELLE PROGRESSION SUBSTANTIELLE DES CRÉDITS

    Les chapitres 37-11 – Frais de justice et 37-91 – Réparations civiles sont évaluatifs au sens de l’article 9 de l’ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances. Les derniers exercices avaient témoigné d’une aggravation des taux de dépassement des crédits ouverts dans les lois de finances.

      1.– Les frais de justice

ÉVOLUTION DES DOTATIONS DU CHAPITRE 37-11 – FRAIS DE JUSTICE

(hors justice administrative – article 40)

(1995-2000)

(en millions de francs)

 

1995

1996

1997

1998

1999 (1)

2000 (2)

A.– Dotation en loi de finances initiale

1.304,8

1.404,8

1.498,5

1.627,5

1.748,5

1.857,8

B.– Dépenses constatées

1.306,2

1.420,2

1.536,9

1.620,6

1.711,4

1.857,8

    - Justice criminelle (article 10)

923,1

941,5

1.050,5

1.126,4

1.208,6

1.312,7

    - Justice civile (article 20)

220,4

270,6

284,1

280,9

285,1

295,9

    - Justice commerciale (article 30)

147,4

189,6

179,2

189,6

193,4

197,3

    - Autres (articles 61 à 70)

15,26

18,57

23,1

23,7

24,3

51,9

C.– Dotation finale

1.379,8

1.468,5 (3)

1.498,5

1.627,5

Rapport B/A (en %)

100,1

101,2

102,6

99,6

97,9

100

(1) prévisions au 30 juin 1999.

(2) projet de loi de finances.

(3) après transfert de 63,3 millions de francs au titre de la franchise postale.

Source : ministère de la Justice.

    La situation du chapitre 37-11, sur lequel s’imputent les frais de justice semble connaître une nouvelle croissance des dépenses. Mais, désormais, les dotations initiales couvrent les besoins.

        a) Une forte croissance jusqu’en 1998

    Les dotations initiales inscrites en loi de finances ont connu une progression moyenne de 8,4 % entre 1995 et 1998.

    Le chapitre a été régulièrement abondé en cours d’année : 20 millions de francs en 1992, 140 millions en 1993, 50 millions en 1994, 75 millions en 1995, et 63,6 millions de francs en 1996. En 1995 et 1996, les dotations initiales ont été abondées au cours de l’année en raison des événements intervenus en cours de gestion : apurement des impayés relatifs aux réquisitions à France Télécom prévu par la convention en novembre 1995 entre l’entreprise et le ministère (1995), transfert de crédits lié à la suppression de la franchise postale (1996).

    En 1997 et 1998, aucun abondement n’est intervenu en cours d’exercice. En 1998 et pour la première fois depuis des années, la dotation initiale a couvert les besoins.

    Les frais de justice pénale représentent 69 % de la dotation, les frais de justice civile 17 % et les frais de justice commerciale 12 %. Les différences d’évolution entre les différents types de frais sont importantes.

    Les frais pénaux sont passés de 923 millions de francs en 1995 à 1.126 millions de francs en 1998, soit une progression de 22 %. L’augmentation des frais pénaux résulte principalement de quatre sources : les dépenses d’expertise et d’examens médicaux (353 millions de francs) ; les frais de saisie, mise sous séquestre, de fourrière et scellés (91 millions de francs) ; les réquisitions aux opérateurs de télécommunications (130 millions de francs) ; les frais d’enquête, de contrôle judiciaire et de médiation (81 millions de francs). La hausse de ces derniers résulte en grande partie du développement des alternatives à la détention et de celui de la médiation pénale ().

    Les frais de justice civile, sur la période 1995-1998, ont progressé de 27,5 %, passant de 220 millions de francs à 281 millions de francs. Ils sont principalement composés des frais postaux (170 millions de francs), des frais de procédures suivies en application de la législation en matière de tutelle des mineurs, de tutelle et de curatelle des majeurs et de sauvegarde de justice et des frais d’enquêtes ordonnées en matière d’exercice de l’autorité parentale.

    Les frais de justice commerciale sont constitués des frais de procédure avancés par l’État (émoluments des huissiers, redevance de greffe, frais d’insertion et d’impression des jugements) dans les procédures de redressement et de liquidation judiciaire en cas d’insuffisance de fonds immédiatement disponibles. Ils progressé de manière très contrastée au cours des dernières années, augmentant globalement de 29 % entre 1995 et 1998, année où ils atteignent 190 millions de francs.

        b) L’amorce d’un ralentissement ?

    – Un effort de maîtrise des dépenses

    Devant la croissance continue et considérable des frais de justice, un contrôle a été mis en place. La circulaire du 16 avril 1996 a institué un suivi de la dépense par tribunal de grande instance et par cour d’appel. Les cours d’appel ont adressé semestriellement à la Chancellerie un rapport présentant l’évolution de la dépense de frais de justice pénale dans leur ressort.

    À la suite des dérives constatées, le Garde des Sceaux a engagé une adaptation des mécanismes en cours. La circulaire du 14 octobre 1997 a renforcé le dispositif de suivi des frais de justice. La circulaire du 2 mars 1998 a diffusé des informations sur l’évolution de la dépense au niveau national en 1997 et a fixé un objectif indicatif d’évolution de la dépense de 4 %. Dans la circulaire aux cours d’appel du 27 octobre 1998, plusieurs mesures précises ont été mises en place : extension du dispositif de contrôle des frais de justice par les juridictions aux frais de justice civile et commerciale, organisation par les cours d’appel des conditions d’une mise en concurrence des prestataires de service dans les domaines non tarifés, rappel du champ des frais de justice commerciale et de leurs modalités de contrôle, établissement par la Chancellerie d’un tableau de bord mensuel national communiqué aux juridictions avec une analyse de la dépense tous les trimestres, etc.

    Le décret n° 99-203 du 18 mars 1999 modifiant le code de procédure pénale et relatif aux frais de justice, accompagné de sa circulaire de présentation en date du 5 juillet 1999, a mis en œuvre cette volonté. Un certain nombre d’actes ont été ainsi revalorisés : expertise psychiatrique, expertises psychologiques et médico-psychologiques, traduction et interprétation, tandis que certaines catégories de frais étaient tarifées (photocopie, cryptologie). La tarification du gardiennage des véhicules a été modifiée en vue de mieux maîtriser la dépense, tandis que les procédures de contrôle étaient renforcées. Par ailleurs, une certaine simplification a été introduite dans divers domaines : frais de diffusion des décisions de justice, frais d’immobilisation, indemnité supplémentaire de comparution des jurés, témoins et experts, frais de déplacement des magistrats, etc.

    Par ailleurs, les articles 21 à 23 de la loi n° 99-515 23 juin 1999 relative aux alternatives aux poursuites et renforçant l’efficacité de la procédure pénale, qui simplifient les règles de conservation des objets, permettront sans doute d’obtenir une réduction importante de la durée du gardiennage et des frais correspondants. Cette loi a également facilité l’usage de la télécopie pour les notifications en matière pénale.

    Enfin dans le cadre de la réforme de la justice commerciale, à la suite du dépôt des rapports de la commission d’enquête parlementaire et de la mission conjointe des inspections des finances et des services judiciaires, il est prévu de réformer le mécanisme d’avances des frais par le Trésor, en cas d’insuffisance de fonds immédiatement disponibles.

    – Un bilan provisoire

    En 1999, au regard de la dépense prévisible, il n’est pas prévu d’abonder la dotation initiale. En effet, les comptes de l’Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) font apparaître pour le premier trimestre 1999 une stagnation de la dépense par rapport à la même période de 1998 (+ 1 %), alors même que la dotation budgétaire avait été augmentée de 7,4 %.

    Il semble que le ralentissement résulte en partie des efforts de maîtrise des dépenses.

    Ce ralentissement est confirmé pour 2000, puisque la dotation augmentera de 6,2 %, de 1.748,5 millions de francs à 1.857,8 millions de francs. Néanmoins, la progression de près de 110 millions de francs devrait répondre aux besoins nouveaux. Ce montant résulte :

· de mesures de maîtrise de la dépense, d’économies et de transferts engagées et mises en œuvre en 1999 et 2000 (économie de 22,62 millions de francs dans le projet de loi de finances) ;

· d’un ajustement de 32 millions de francs correspondant à l’évolution tendancielle des frais ;

· d’une mesure nouvelle de 41,03 millions de francs pour financer l’impact de l’affiliation au régime général de la sécurité sociale des collaborateurs du service public de la justice, en vertu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;

    · d’une mesure nouvelle de 58,81 millions de francs afin de financer, d’une part, conformément à la décision du conseil de sécurité intérieure du 27 janvier 1999, le développement de missions confiées aux délégués du procureur (10 millions de francs), d’autre part, l’impact du projet de loi relatif à la présomption d’innocence et aux droits des victimes et prévoyant l’indemnisation des personnes relaxées, acquittées ou bénéficiant d’un non-lieu (30 millions de francs) et enfin l’impact de la loi n° 99-105 du 18 juin 1999 relative à la sécurité routière (mise en place d’un dépistage toxicologique systématique des conducteurs impliqués dans un accident mortel).

      2.– Les réparations civiles

    Le chapitre 37-91 a connu en 1997 une hausse substantielle de 51,1 %. Cette progression a été rendue nécessaire par le dépassement systématique des dotations inscrites dans les lois de finances initiales. La situation au 31 août 1996 montrait déjà des signes de tension forts qu’il convenait d’absorber en 1997. La sincérité des dotations budgétaires est, depuis, améliorée. En 1998 et pour 1999, la dotation est stabilisée à 20,7 millions de francs et devrait permettre d’éviter des dépassements trop importants. En 2000, la dotation est reconduite au même niveau.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS DU CHAPITRE 37-91 – RÉPARATIONS CIVILES

(en millions de francs)

 

1995

1996

1997

1998

1999 (1)

2000 (2)

A.– Dotation en loi de finances initiale

13,7

13,7

20,7

20,7

20,7

20,7

B.– Consommation

26,5

19

20,9

15,2

15,5

Rapport B/A

193,4

138,7

100,1

73,4

74,9

(1) au 31 août 1999.

(2) projet de loi de finances.

Source : ministère de la Justice.

      C.– LE DÉVELOPPEMENT DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE ET DE L’ACCÈS AU DROIT

    Les crédits de l’aide juridique sont des crédits évaluatifs. En 1997, ils ont été transférés du titre III vers le titre IV (chapitre 46-12 nouveau). L’aide juridique constitue bien, en effet, une dépense d’intervention : l’État se substitue aux justiciables ayant des revenus modestes pour régler les honoraires des auxiliaires de justice, au premier rang desquels figurent les avocats. Votre Rapporteur axera essentiellement son propos sur l’évolution des crédits de l’aide juridictionnelle qui constitue l’essentiel des dépenses dans cette matière.

      1.– Un système réformé

    Le dispositif de l’aide juridique comprend trois volets :

    · l’aide juridictionnelle est mise en œuvre par les bureaux d’aide juridictionnelle qui octroient cette aide aux personnes qui la demandent, par les greffes qui attestent de l’exécution des missions effectuées par les avocats, par les caisses de règlements pécuniaires des avocats (CARPA) qui gèrent la rétribution des avocats et par le Trésor public qui assure directement, sans ordonnancement, la rétribution des autres auxiliaires de justice (avoués, huissiers) ;

· l’aide à l’accès au droit peut intervenir en dehors de tout procès pour faciliter l’information juridique des plus démunis et organiser l’assistance au cours de procédures non juridictionnelles. Cette aide relève de la compétence des conseils départementaux de l’aide juridique (CDAJ), qui ont été transformés par la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits en conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) ;

· l’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue, prévue pour la première fois par la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale et modifiée par le projet de loi relatif à la présomption d’innocence et aux droits des victimes, distincte de l’aide juridictionnelle, est cependant imputée sur le chapitre 46-12 – Aide juridique.

    Réformée par la loi n° 91-637 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l’aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, l’aide juridique a vu ses dépenses tripler depuis lors : elle représentait 1.201 millions de francs en 1997 au lieu de 401 millions de francs en 1991. La rémunération des avocats représente près de 85 % du total. Le nombre des admissions est passé de 579.856 en 1994 à 703.746 en 1998.

    Le bilan de la réforme réalisé en 1995 a conduit à engager plusieurs séries de modifications.

    La loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions, tenant compte des difficultés de recrutement des membres des bureaux d’aide juridictionnelle, a ouvert la présidence de ceux-ci à des magistrats honoraires ou des membres honoraires des juridictions administratives. Le décret n° 97-1221 du 26 décembre 1997 a permis de renouveler une seconde fois à titre exceptionnel la nomination ou la désignation des membres honoraires d’aide juridictionnelle établis près la Cour de cassation et le Conseil d’État.

    D’autres textes réglementaires ont consolidé les règles relatives à la gestion par les caisses de règlement pécuniaire des avocats des dotations versées par l’État au titre des missions d’aide juridictionnelle.

    L’article 82 de la loi n° 98-657 d’orientation relative à la lutte contre l’exclusion a prévu que les personnes sans domicile fixe peuvent adresser leur demande d’aide juridictionnelle au bureau établi au siège de la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve l’organisme d’accueil choisi par elle.

    La loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits a apporté, dans son chapitre premier, une réforme importante de la loi du 10 juillet 1991. Quatre séries de mesures ont été définies :

· le domaine de l’aide juridictionnelle est étendu à la transaction avant l’instance. Le système antérieur permettait une rétribution au titre de l’aide juridictionnelle de l’avocat qui était parvenu à une transaction au cours d’instance, ce qui supposait la saisine préalable d’une juridiction. Cette rétribution de l’avocat est prévue, même en cas d’échec des pourparlers transactionnels ;

· la condition de ressources est levée pour les personnes formulant une demande devant les juridictions des pensions militaires ;

· les dispositifs de retrait et de remboursement sont unifiés, tandis que l’avocat du bénéficiaire de l’aide doit désormais demander le versement de la part contributive de l’État dans un délai de six mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée ;

· les bureaux d’aide juridictionnelle sont réorganisés. Le président du bureau, statuant seul, ou un vice-président en qualité de délégataire, peuvent rejeter les demandes manifestement irrecevables ou dénuées de fondement, mais aussi accueillir la demande lorsqu’elle ne se heurte à aucune difficulté particulière. Ils peuvent également ordonner les mesures d’investigation nécessaires pour un contrôle plus rigoureux du respect des conditions de ressources.

    La décélération des demandes et des admissions à l’aide juridictionnelle observée en 1996 s’est confirmée en 1998. Les admissions ont augmenté pour les contentieux des mineurs et le contentieux administratif ; elles ont été stables pour les contentieux familiaux hors divorce, et ont régressé pour les divorces, les contentieux prud’homaux et les contentieux devant les tribunaux correctionnels.

    Les plafonds de ressources fixés à 4.400 francs et 6.600 francs en 1992 ont été revalorisés chaque année en fonction de l’évolution de la tranche la plus basse du barème de l’impôt sur le revenu. Au total, les plafonds pour 1999 de l’aide totale (4.940 francs) et de l’aide partielle (7.412 francs) ont progressé de 12 % depuis 1992, soit un taux supérieur à l’évolution des prix (10 %).

    En 2000, la revalorisation des plafonds sera calquée sur l’évolution de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

      2.– Un coût important

    En 1998, l’aide juridique a coûté 1.240,76 millions de francs. Elle représentait 726 millions en 1994, soit une progression de 70,9 %. Le principal poste de dépense est constitué par la rétribution des avocats : 1.038 millions de francs en 1998, soit une somme de 30.000 francs en moyenne par avocat.

    La dotation budgétaire de l’aide juridique est passée de 1.228,5 millions de francs dans la loi de finances initiale pour 1998 à 1.443,72 millions de francs dans la loi de finances pour 1999, soit une progression de 17,5 %. Un ajustement de 149 millions de francs a tenu compte de l’augmentation du volume des admissions. Une mesure d’économie de 31 millions de francs correspond à l’impact des mesures de contrôle de la dépense et d’amélioration du recouvrement des rétributions par l’État. 97,4 millions de francs ont accompagné la mise en œuvre du plan de la réforme de la justice et de la loi du 18 décembre 1998 précitée.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS D’AIDE JURIDIQUE

(Chapitre 37-12 ancien, Chapitre 46-12 nouveau)

(1994-2000)

(en millions de francs)

Année

1994

1995

1996

1997

1998 (1)

1999

2000

Dotations en loi de finances initiale

             

Ancien régime (loi de 1972)

60

250

(n.s.)

(n.s.)

(n.s.)

(n.s.)

(n.s.)

Nouveau régime (loi de 1991)

1.037,67

1.060,27

1.085,31

1.216,3

1.228,5

1.443,7

1.543,6

Total

1.097,67

1.085,28

1.085,31

1.216,3

1.228,5

1.443,7

1.543,6

Dépenses constatées

             

Ancien régime (loi de 1972)

61,86

23,98

10,61

6,2

4,1

(n.d.)

(n.s.)

Nouveau régime (loi de 1991)

663,76

840,68

1.061,51

1.201,8

1.236,6

(n.d.)

(n.s.)

Total

725,63

864,66

1.072,12

1.208,1

1.240,8

(n.d.)

(n.s.)

(1) La dotation finale et de 1.250,3 millions de francs après un ajustement de 21,85 millions de francs en loi de
finances rectificative.

Source : ministère de la Justice.

    Pour 2000, la dotation budgétaire consacrée à l’aide juridique passera de 1.444 millions de francs à 1.544 millions de francs, soit une croissance de 6,9 %. L’augmentation de 99,9 millions de francs résulte :

    · d’un ajustement technique de 12,4 millions de francs pour tenir compte de l’évolution prévisible des dépenses ;

    · d’une mesure nouvelle de 3,6 millions de francs destinée à financer l’impact de l’affiliation au régime de sécurité sociale des collaborateurs du service public de la justice, en vertu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;

    · d’une révision des services votés de 1,3 million de francs pour tenir compte de l’impact en 2000 des mesures de contrôle de la dépense engagée en 1998 et 1999 ;

    · d’un transfert de crédits de 2,6 millions de francs en provenance du chapitre 37-11 – Frais de justice afin de prendre en charge les frais d’assistance devant le tribunal des pensions militaires et la réforme des modalités de saisine du juge de l’exécution en matière d’expulsion ;

    · et, enfin, de moyens nouveaux à hauteur de 82,6 millions de francs liés au financement des mesures prévues par la loi du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits (12,8 millions de francs), par la loi du 23 juin 1999 juin 1999 relative aux alternatives aux poursuites et renforçant l’efficacité de la procédure pénale (4,1 millions de francs) et par le projet de loi renforçant la présomption d’innocence et prévoyant l’intervention d’un avocat dès la première heure de garde à vue (40 millions de francs). S’y ajoutent la revalorisation de la rétribution des avocats en matière d’aide juridictionnelle (17 millions de francs), celle des tarifs des missions d’aide à l’intervention au cours de la garde à vue (7 millions de francs), et l’alignement des plafonds de ressources pour l’admission à l’aide juridictionnelle dans les départements d’outre-mer sur ceux de métropole (1,6 million de francs).

    S’agissant de la seule réforme de la garde à vue, actuellement en discussion devant le Parlement, la dotation budgétaire y afférent passera de 30 millions de francs à 77 millions de francs. Cette somme permettra de financer une revalorisation de 10 % des rétributions des avocats pour ces missions, afin de prendre en compte les contraintes supplémentaires d’organisation des permanences des avocats.

    Le budget de l’accès au droit destiné à financer les conseils départementaux d’aide juridique (CDAJ) appelés à devenir des conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) s’est élevé à 6,2 millions de francs en 1997, le ministère de la Justice fournissant une dotation de 1,5 million de francs. En 1998, ces chiffres sont passés respectivement à 11,3 millions de francs et 2,8 millions de francs. Pour 1999, le ministère de la Justice a réservé 8,5 millions de francs au financement des conseils départementaux existants et à créer au cours de l’année. Le projet de loi de finances pour 2000 porte la subvention à 12,5 millions de francs soit une augmentation de 47 %. Ces crédits sont imputés sur le chapitre 46-01 – Subventions et interventions diverses, article 20 – Services judiciaires : crédits déconcentrés. Enfin, il convient de relever qu’une subvention de 6 millions de francs avait été décidée également en 1999 sur le chapitre 37-92 – Services judiciaires – Moyens de fonctionnement et de formation pour permettre l’acquisition du premier équipement en matériel informatique et en mobilier de bureau et pour réaliser des documents de communication sur l’accès au droit.

    Il faut rappeler que la loi du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits a consacré l’existence des maisons de justice et du droit en les insérant dans le code de l’organisation judiciaire, dans le livre VII, au titre XII. Leur organisation était fondée jusqu’alors sur une circulaire de la direction des affaires criminelles et des grâces en date du 19 mars 1996. Il existe à ce jour 38 maisons de justice. 15 sont en création et 55 dossiers sont en cours d’instruction pour l’année 2000.

    L’accès au droit, s’il doit être favorisé par l’État, doit être totalement pris en charge par lui. Ce domaine est au cœur de ses missions régaliennes. Il doit en assumer totalement la responsabilité, prendre appui sur les professions judiciaires associées si nécessaire, mais ne pas reporter sur ces dernières la charge financière qui en résulte.

IV.– L’ÉQUIPEMENT JUDICIAIRE

    L’équipement judiciaire fait l’objet de dotations budgétaires importantes (585,5 millions de francs de crédits de paiement pour 2000). Ces dotations budgétaires sont destinées à deux actions principales :

    · le programme pluriannuel d’équipement qui a intégré, pour une part, les objectifs de la loi de programme et qui absorbe la grande majorité des crédits ;

    · le programme déconcentré réservé aux opérations de moindre ampleur, mais qui intègre les opérations constantes qui ont lieu en faveur du palais de justice de Paris.

    L’analyse des crédits d’équipement judiciaire doit prendre en compte la succession de trois programmations correspondant à des dotations distinctes de crédits pour des travaux immobiliers de même nature, dotations imputées sur un même chapitre en 1996 (57-11 ancien), mais transféré à partir 1997 aux articles 20 et 30 du chapitre 57-60 – Équipement :

    · lancement en 1992 d’un programme pluriannuel d’équipement des juridictions (PPE) ;

    · dans le cadre du Plan de relance pour la Ville de 1993, transfert par répartition à partir du budget des charges communes d’autorisations de programme et de crédits de paiements ;

    · intégration de l’équipement judiciaire dans le cadre de la loi de programme du 6 janvier 1995, prévoyant 4.500 millions de francs d’autorisations de programme jusqu’en 2000.

    Compte tenu de l’entrée en vigueur de la loi de programme en 1995, les autorisations de programme ont augmenté fortement à cette période, avant de décroître significativement en 1997 en raison de la décision d’étalement de l’application de la programmation sur une année supplémentaire. Les crédits de paiement ont suivi la même évolution avec un certain décalage qui s’explique à la fois par un retard dans la programmation et par le mouvement naturel qui lie l’ouverture des autorisations de programme et les crédits de paiement.

CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT DES SERVICES JUDICIAIRES
(Chapitres 57-11 ancien et 57-60 nouveau, articles 20 et 30)
(1)

(en millions de francs)

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Crédits de paiement

659,6

731,1

754

901,3

976

961

585,5

Autorisations de programme

796,5

1.192

1.154

889

567

673

805

(1) budget voté, sauf 2000 (projet de loi de finances).

Source : d’après ministère de la Justice.

    S’agissant du programme pluriannuel d’équipement des services judiciaires, la consommation des autorisations, qui connaissait des problèmes importants avec des taux d’utilisation inférieurs à 60 % avant 1995, a connu une lente amélioration, alors même que le montant des autorisations de programme affectées ou notifiées augmentait de façon importante : ainsi le taux d’utilisation des autorisations de programme atteignait 64 % en 1995, 70 % en 1996 et 82 % en 1997.

    Cette amélioration s’imposait compte tenu de la cible privilégiée que constituaient, pour la régulation, les autorisations de programme et les crédits de paiement non consommés. Cette situation qui témoignait du retard pris dans le montage des différentes opérations se concluait, notamment, par le report pur et simple de la construction de nouveaux palais de justice. Les progrès entrepris à partir de 1998 ont été poursuivis en 1999, de telle sorte que les engagements pris dans la loi de programme ont été remplis cette année en termes d’autorisations de programme, alors même qu’un report d’application avait été décidé en 1997. 678 millions de francs d’autorisations de programme ont ainsi été ouverts au titre de la loi de programme entre 1995 et 1999.

    Pour 2000, les autorisations de programme augmenteront de 17 % et les crédits de paiement baisseront de 40 %. Il s’agit de rééquilibrer les deux éléments. En effet, depuis 1997, la baisse du niveau des autorisations de programme judiciaires, due à l’effort particulier consenti sur l’équipement pénitentiaire, a obligé le ministère à fractionner la mise en place des financements programmés, soit à différer le lancement d’opérations prêtes à entrer dans leur phase de travaux. La consommation des crédits de paiement n’était donc pas optimale, ce qui a impliqué d’importants reports de crédits. Ainsi près de 420 millions de francs de crédits de paiement devraient être reportés de l’exercice 1999 à l’exercice 2000. La baisse des crédits de paiement enregistrée dans le projet de loi de finances devrait donc être compensée par ces mouvements à venir.

      A.– LE PROGRAMME PLURIANNUEL D’ÉQUIPEMENT

    Le programme pluriannuel d’équipement (PPE), né en 1992 des vingt-six schémas directeurs départementaux d’opérations prioritaires, devait s’achever en 1998. Il est théoriquement financé sur le chapitre 57-60 – Équipement, article 30 – Programme pluriannuel d’équipement. Mais les frontières sont floues. En effet, le programme a pu fédérer des opérations en cours, financées parfois sur un autre article. De plus, l’intégralité des opérations n’est pas gérée par la délégation générale au programme pluriannuel d’équipement (DGPPE). L’engagement de certaines opérations prioritaires de taille plus modeste est décidé de façon déconcentrée.

    Les 20 principales opérations sont cependant gérées par la délégation. 9 ont été d’ores et déjà livrées : Aix, Béthune, Bordeaux, Caen, Lyon, Melun, Montpellier, Nanterre, Nice.

    À l’engagement de nombreux chantiers, il faut ajouter la prise en charge exceptionnelle de la reconstruction du Parlement de Bretagne à Rennes. Au total, l’opération devrait coûter 401,5 millions de francs, dont 384 millions de francs pris en charge par l’État, par le ministère de la Justice et par le ministère de la Culture. Après le financement de mesures d’urgence, l’opération de réhabilitation a été divisée en trois sous-opérations : la reconstruction du gros œuvre pour 163 millions de francs, le réaménagement fonctionnel de l’espace pour 78 millions de francs et la restauration des décors historiques du Parlement pour 140,5 millions de francs. L’opération s’est achevée en 1999.

    En 1999, 614 millions de francs de crédits de paiement et 348 millions de francs d’autorisations de programme ont été ouverts. Ces crédits permettront de poursuivre et d’ouvrir certaines opérations importantes : Nice (réhabilitation), Grasse (construction), Nantes (construction), Grenoble (construction), Fort-de-France (construction), Avignon (construction). D’autres opérations ont été placées en attente, notamment en raison du réexamen de la carte judiciaire (Avesnes-sur-Helpe, Thonon-les-Bains, Bourgoin-Jallieu, Moulins). Les crédits 1999 confirment la possibilité d’engager fin 1998 les travaux pour les opérations de Toulouse et Besançon. En revanche, l’opération de Pontoise devait être reportée au-delà de l’exercice 1999. Les opérations de Grasse, Rennes et Nice ont été achevées.

    Pour 2000, 170,5 millions de francs de crédits de paiement et 344 millions de francs d’autorisations de programme sont prévus. Les opérations d’Avignon (livraison en septembre 2000), Grenoble (livraison en décembre 2000), Fort-de-France, Besançon, Nantes (livraison au second semestre 2000) et Toulouse devraient se poursuivre, tandis que seront lancées les opérations de Pontoise et de Versailles. Le cas de Narbonne est en cours d’examen.

      B.– LE PROGRAMME DÉCONCENTRÉ

    Aux opérations prioritaires du programme pluriannuel, s’ajoutent celles du programme déconcentré d’une moindre ampleur. Elles concernent à la fois le palais de justice de Paris (voir C) et des opérations initiées par les cours d’appel. Il s’agit à la fois de remise à niveau technique et de gros entretiens des bâtiments judiciaires.

    Par son montant, l’enveloppe d’autorisations de programme inscrite dans la loi de finances pour 1999 correspond aux ressources obtenues en 1998. Ce maintien des dotations permettra la poursuite de la politique d’équipement mise en œuvre en 1998. Devaient être ainsi livrées en 1998 les opérations de Lille et Roubaix, et en 1999 celles d’Évreux, Laval, Nancy, et Toulon. En 1998 ont commencé les travaux de restructuration de Belfort et, en 1998 et 1999, les études se sont poursuivies pour les opérations de Laval, Béziers, Roanne, Rodez et Saint-Étienne.

    En hausse de 30 % par rapport à l’enveloppe budgétaire attribuée en 1999, la dotation pour 2000 (461 millions de francs) du programme déconcentré sera essentiellement consacrée à des opérations de sécurité et de rénovation. Par ailleurs, le début effectif des travaux sera engagé à Bordeaux et à Cahors. La poursuite des études engagées pour Bobigny et Laval est prévue, de même que le lancement des études pour le palais de justice de Niort.

    Le tableau suivant présente les principales opérations judiciaires réalisées depuis dix ans :

PRINCIPALES OPÉRATIONS JUDICIAIRES RÉALISÉES DEPUIS DIX ANS

Année de livraison

Ville

Juridictions (*)

Nature des travaux

1989

Dijon

TGI, TI, TC, CP’H

construction

1990

Le Mans

TGI, TI, TC, CP’H

construction

 

Orléans

TGI, TI, TC, CP’H

construction

 

Segré

TI

construction

 

Strasbourg

TI

construction

1991

Libourne

TC, CP’H

construction

 

Poissy

TI, CP’H

construction

 

Valenciennes

TI, CP’H

restructuration, extension

1992

Clermont-Ferrand

TGI, TI, TC, CP’H

construction

 

Montpellier

Palais de justice

surélévatiun

 

Villejuif

TI

construction

1993

Nice

TGI, TI

restructuration ancienne caserne Rusca

 

Boulogne-Billancourt

CP’H

construction

 

Douai

TI, TC

restructuration

 

Lille

TC

mise en sécurité

 

Saint-Denis

TI

construction

1994

Blois

TI, TC, CP’H

extension

 

Cambrai

TGI, TI, TC, CP’H

relogement

 

Tarbes

Palais de justice

restructuration, rénovation lourde

 

Saint-Pierre de la Réunion

CP’H

construction

1995

Saint-Pierre-et-Miquelon

Tribunal supérieur d’appel

construction

 

Cahors

TI

construction

 

Lyon

TGI, TI, TC, TDP

construction

1996

Asnières

TI

construction

 

Caen

CA, C Ass, TC, CP’H

construction

 

Evreux

TI, TC, CP’H

construction

 

Evry

TI, TC, CP’H

relogement

 

Montereau

TI, TC

construction

 

Montpellier

TGI, TI

construction

 

Nanterre

TC, CP’H

construction et extension TGI

 

Toulon

TI, TC, TE

construction

1997

Aix-en-Provence

CA, C Ass

restructuration ancienne maison d’arrêt

 

Saintes

TGI, TI, TC

extension

 

Vierzon

TI, CP’H

construction

1998

Angoulême

TGI, C Ass, CP’H

restructuration

 

Béthune

TGI

extension et restructuration

 

Bordeaux

TGI, ENM

construction, extension

 

Lille

TGI, TI

mise en conformité installations électriques

 

Melun

TGI, TI, TC, CP’H

construction, extension

 

Nice

TC

relogement

 

Roubaix

TI, CP’H

restructuration

1999

Evreux

TGI, C Ass

restructuration

 

Grasse

TGI, TI, TC, CP’H

construction

 

Laval

TGI, C Ass

relogement provisoire

 

Nancy

TGI, TI

rénovation

 

Nice

TGI

restructuration

 

Rennes

CA (Parlement de Bretagne)

reconstruction, réaménagement

 

Toulon

TI, TC, TE

restructuration

(*) CA  : cour d’appel.
C Ass : cour d’assises.
CP’H : conseil de prud’hommes.
ENM : école nationale de la magistrature.
TC : tribunal de commerce.
TDP : tribunal de police.
TE  : tribunal pour enfants.
TGI : tribunal de grande instance.
TI  : tribunal d’instance.
Source : ministère de la Justice.

      C.– LE PALAIS DE JUSTICE DE PARIS

    En raison de la taille du bâtiment et de sa sur-occupation et de ses carences en matière de sécurité et de fonctionnalité, le palais de justice de Paris fait l’objet de constantes opérations d’équipement.

    Au 1er juin 1998, les autorisations de programme mises en place auprès du service immobilier du palais de justice de Paris s’élèvent à 80,8 millions de francs sur un total annuel programmé de 94 millions de francs. Ces crédits sont destinés d’une part à compléter le financement des travaux de mise en sécurité d’urgence, de la rénovation des installations de chauffage et de la réfection entreprise au tribunal de commerce. Ils ont permis d’autre part de lancer de nouvelles opérations aux fins de sécuriser et de restructurer des locaux.

    En 1999 ont été poursuivis ou engagés la rénovation des installations de chauffage (30 millions de francs d’autorisations de programme), des interventions d’urgence sur le clos et le couvert, l’élimination des éléments de toitures et de façades dégradés, la rénovation des façades, toitures du tribunal de commerce, la restructuration et la mise en sécurité des caves des entreprises, l’aménagement de locaux, et l’aménagement du bâtiment d’archives de Vitry-sur-Seine (10,6 millions de francs en 1999).

    Pour 2000, le palais de justice de Paris bénéficiera de 50 millions de francs d’autorisations de programme. Une part importante de ces crédits sera consacrée aux travaux de mise en sécurité des différents sites du palais, mais également à des opérations d’aménagement et de restructuration des locaux.

    Votre Rapporteur se déclare favorable à la construction d’un nouveau palais de justice à Paris destiné à accueillir, notamment, le tribunal de grande instance. La très grande majorité des magistrats ne possèdent pas de bureaux. Les salles d’audience sont souvent trop exiguës. Il existe très peu de salles de réunion et les espaces publics sont encombrés.

    Un audit réalisé par un organisme externe au ministère de la Justice a conclu à l’existence d’une situation déplorable. Selon les estimations, il manque aujourd’hui près de 60.000 mètres carrés au palais de la Cité. En 1998, 223 agents dont plus de 200 magistrats étaient contraints, faute de bureaux, de travailler en dehors du palais. Les besoins de mise en sécurité et de restructuration du palais actuel sont estimés à près d’un milliard de francs. Aujourd’hui, le déficit de surface oblige à compter le parc immobilier des juridictions par des locations coûteuses. Ainsi, 60 millions de francs sont nécessaires pour loger le conseil de prud’hommes, le tribunal de police, le service de l’application des peines, le service administratif régional et le pôle de lutte contre la délinquance financière.

    Selon diverses estimations, la construction d’un nouveau palais permettrait de gagner 25 % de productivité. Les coûts de construction d’une nouvelle cité judiciaire sont évalués, selon les sources, à environ 2 milliards de francs. L’acquisition de 100.000 mètres carrés engagerait une dépense d’environ 1 milliard de francs, La même somme devrait être consacrée à la construction proprement dite des nouveaux locaux. La juridiction de Paris qui constitue la plus grosse juridiction européenne mériterait un tel investissement, et ce d’autant plus que la situation actuelle se caractérise par la multiplication des sites d’implantation, à l’exemple du pôle économique et financier, dont il faut assurer les loyers. Paris doit s’équiper d’un équipement judiciaire adapté à l’ampleur de ses activités.

    Votre Rapporteur souligne la nécessité impérieuse d’engager le plus rapidement possible les études nécessaires de programmation et de maîtrise d’œuvre, ce qui nécessite l’ouverture rapide de crédits, qui pourrait intervenir dès la loi de finances rectificative pour 1999.

ÉQUIPEMENT JUDICIAIRE 

(Chapitre 57-11 ancien, Chapitre 57-60 nouveau, articles 20 et 30)

(en francs)

 

Autorisations
de programme inscrites

Autorisations
de programme consommées

Crédits de paiement inscrits

Crédits de paiement consommés

1995

       

Programme pluriannuel d’équipement

1.015.542.688

982.336.705

650.087.000

424.694.572

Autres opérations

291.365.405

281.995.369

413.933.766

320.460.491

Total général

1.306.908.093

1.291.132.074

1.064.020.766

745.155.063

1996

       

Programme pluriannuel d’équipement

769.890.735

633.035.324

797.842.429

650.759.633

Autres opérations

288.990.684

263.196.135

313.161.674

237.096.393

Total général

1.058.881.419

896.231.459

1.111.004.103

887.856.026

1997

       

Programme pluriannuel d’équipement

624.927.128

562.073.822

796.121.513

703.623.674

Autres opérations

494.232.081

434.570.533

378.184.281

243.262.037

Total général

1.119.159.209

996.644.355

1.174.305.794

946.885.711

1998

       

Programme pluriannuel d’équipement

271.723.383

270.412.121

725.997.839

579.107.595

Autres opérations

392.832.728

339.500.202

474.145.274

254.207.484

Total général

664.556.111

609.912.323

1.200.143.113

833.315.079

Prévisions 1999 (1)

       

Programme pluriannuel d’équipement

       

Reliquats sur la gestion précédente

1.311.262

146.890.244

Loi de finances initiale

348.000.000

614.600.000

Fonds de concours

979.540

979.540

Autres mouvements

0

0

Total

350.290.802

762.469.784

Autres opérations

       

Reliquats sur la gestion précédente

53.332.526

219.937.790

Loi de finances initiale

325.000.000

347.000.000

Fonds de concours

962.271

962.271

Autres mouvements

– 12.000.000

– 12.000.000

Total

367.294.797

555.900.061

Total général

717.585.599

1.318.369.845

2000

(Projet de loi de finances)

       

Programme pluriannuel d’équipement

344.000.000

415.000.000

Autres opérations

461.000.000

170.500.000

Total général

805.000.000

585.500.000

(1) prévision au 15 juillet 1998. Le mouvement négatif de 12 millions de francs est un transfert opéré au bénéfice du ministère de la Culture dans le cadre de l’opération de restauration des décors du Parlement de Bretagne à Rennes.

Source : ministère de la Justice.

V.– LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE

    Votre Rapporteur a tenu à faire le point sur la réforme de la carte judiciaire qui reste un problème lancinant de la modernisation de la justice, inscrit en tant qu’objectif prioritaire dans la loi de programme du 6 janvier 1995 (article 5). C’est une question fondamentale pour faire gagner la Justice en productivité, en efficacité, en reconnaissance sociale.

    Le ministère de la Justice justifie ainsi la nécessité d’adapter en profondeur la carte judiciaire actuelle : « parce que les 1.200 juridictions () actuelles résultent d’une organisation judiciaire et administrative qui date de Napoléon Ier, qu’elles sont inégalement réparties sur le territoire métropolitain et présentent des niveaux d’activité peu homogènes, parce que depuis la réorganisation de la carte judiciaire en 1958, les mouvements de population, les techniques et les infrastructures de communication ont profondément redessiné le paysage de notre pays, parce que la complexité et l’inadéquation de la carte judiciaire aux réalités démographiques, sociales et économiques actuelles vont à l’encontre d’une justice rapide et accessible pour tous. »

    Les écarts entre les charges de travail individuelles des magistrats demeurent frappants : de 1993 à 1996, le nombre d’affaires civiles et pénales par magistrat varie de 229 à 396 dans les cours d’appel pour une moyenne nationale de 307 ; le nombre d’affaires pénales par magistrat dans les parquets généraux des cours d’appel varie de 201 à 527, pour une moyenne nationale de 335 ; la variation est de 353 à 1.264 affaires civiles et pénales nouvelles par magistrat dans les sièges non spécialisés des tribunaux de grande instance, pour une moyenne nationale de 676 ; pour les parquets, le nombre de procès-verbal poursuivi varie de 816 à 5.300 pour une moyenne nationale de 2.040.

    Depuis 1994, plusieurs décrets sont intervenus pour modifier ponctuellement la carte judiciaire (). Par ailleurs, en application de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, le décret n° 96-157 du 27 février 1996 a précisé les modalités d’organisation des audiences foraines et des chambres détachées des tribunaux de grande instance.

    Dans la ligne des orientations fixées par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997, le Garde des Sceaux a fait connaître son intention de moderniser le fonctionnement du service public de la Justice, dont l’évolution de la carte judiciaire constitue un élément essentiel.

    Dans cet esprit, par circulaire en date du 1er juillet 1997, il a été demandé aux chefs de cour et aux préfets de poursuivre la consultation sur la carte judiciaire qui avait été initiée par le précédent Garde des Sceaux puis suspendue pendant la période électorale, et d’ajouter aux interlocuteurs déjà rencontrés les représentants des associations directement concernées par le fonctionnement de la Justice.

    Dans le même esprit, une « mission carte judiciaire », placée auprès du directeur des services judiciaires et chargée de conduire des réflexions sur la réorganisation du réseau des juridictions dans le cadre des orientations définies par le Garde des Sceaux a été mise en place. Installée en avril 1998, cette mission, composée de cinq fonctionnaires dirigés par un membre de la délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (DATAR), a commencé de fonctionner pleinement à partir de septembre 1998. Elle a établi une méthodologie basée sur des études de terrain et a mis en œuvre des outils cartographiques élaborés. Par ailleurs, un comité ministériel de la réforme de la carte judiciaire présidé par le Garde des Sceaux, réunissant les directeurs et les chefs de service du ministère a été créé en septembre 1998. Le programme s’étalera sur cinq ans.

    Une priorité a été accordée à la carte des tribunaux de commerce. Les premières mesures devraient porter au total sur plusieurs dizaines de sites dans les six cours d’appel qui comptent le plus de juridictions consulaires (Caen, Rouen, Dijon, Montpellier, Poitiers et Riom). Des consultations avec les élus des régions concernées ont été organisées. Les décisions reposent notamment sur la prise en compte des bassins d’emploi, du cadre de vie et de l’importance des réseaux de communications. 5 millions de francs avaient été provisionnés dans le budget 1999 pour financer les premières mesures.

    Celles-ci sont intervenues avec le décret n° 99-659 du 30 juillet 1999 portant suppression de tribunaux de commerce et le décret n° 99-660 du 30 juillet 1999 modifiant le décret n° 91-692 du 18 juillet 1991 fixant le nombre des juges et le nombre des chambres des tribunaux de commerce, le nombre des assesseurs des chambres commerciale des tribunaux de grande instance du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et le nombre des juges élus des tribunaux mixtes de commerce des départements outre-mer.

    Le Président de la République l’a répété, lors du discours prononcé pour le quarantième anniversaire de l’École nationale de la magistrature, le 1er octobre 1999, à Bordeaux : la réforme de la carte judiciaire a été « trop longtemps repoussée » et reste « aujourd’hui plus que jamais nécessaire ». « Il faut que la justice adapte sa présence et ses moyens aux réalités nouvelles de notre territoire. C’est à ce prix qu’elle pourra œuvrer efficacement à la lutte contre les violences urbaines et l’insécurité. »

    Votre Rapporteur se déclare favorable à une méthode souple, agissant au cas par cas, progressivement, ressort de cour d’appel par ressort de cour d’appel, sous peine de perdre cette réforme, si nécessaire, dans les sables de l’institution judiciaire et des inerties locales, et de coaguler les conservatismes de tout bord.

CHAPITRE III :

L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

    Les crédits de l’administration pénitentiaire financent le fonctionnement et l’équipement de près de 190 établissements accueillant environ 60.000 détenus. Ils assurent également la prise en charge des condamnés en milieu ouvert. Les crédits des services pénitentiaires devraient dépasser 7.856 millions de francs en 2000, soit 28,79 % du budget du ministère. Ils sont en progression de 5,85 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999, après une hausse de 5,79 % l'an passé. Les dépenses de personnel et de fonctionnement continuent de croître de 3,85 %.

    Les autorisations de programme baissent de 32,9 %, après un triplement entre 1997 et 1998. Comme l’an passé, la tendance est inverse pour les crédits de paiement destinés à couvrir les dépenses en capital, puisqu’ils augmentent de 36,3 %. L'administration pénitentiaire disposera, par ailleurs, de 25.868 postes budgétaires en 2000, au lieu de 25.574 en 1999.

    Le taux d'exécution du programme pluriannuel pour la justice, s'agissant des services pénitentiaires, est relativement faible en termes d’emplois, même si l'on tient compte du report d'un an de l'échéance du programme et des efforts réalisés dans les projets de loi de finances pour 1999 et pour 2000. Néanmoins, il convient de souligner que cette carence est largement due au fait que les établissements destinés à accueillir l’ensemble des créations d’emplois n’ont pas encore été construits.

EXÉCUTION DE LA LOI DE PROGRAMME

SERVICES PÉNITENTIAIRES

 

Mesures prévues

Loi de finances initiale 1995

Loi de finances initiale 1996

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Loi de finances initiale 1999

Projet de loi de finances 2000

Total sur 6 ans

Mesures relatives aux emplois (1)

               

    – ouverture de Remiré-Montjoly

61

61

    – encadrement des détenus dans le parc actuel

1.400

420

364

3

88

208

286

1.406

    – « 4.000 » places nouvelles et 2 MPCE s'ajoutant aux emplois nécessaires pour l'ouverture de 800 places nouvelles nettes outre-mer

1.450

12

58

70 (1)

    – 1.200 places nouvelles en CSL

300

(1)

    – doublement des effectifs en milieu ouvert

770

130

130

50

200

38

589

Total emplois (2)

3.920

550

494

114

300

344

286

2.088

Taux de réalisation (en %)

100

14,03

26,63

29,54

37,19

45,96

53,26

53,26

Autorisations de programme
(en millions de francs)

               

– rénovation du parc actuel

900

189

189

167

194

200

939

– programme spécial de construction (« 4.000 » places)

2.100

76

118

129

810

696

150

1.979

– construction et aménagement de 1.200 places en CSL

 

5

10

29

20

16

80

Total autorisations de programme (3)

3.000

270

317

325

1.024

912

150

2.998

Taux de réalisation (en %)

100

9

19,57

30,40

64,53

94,93

100

100

(1)  Les emplois correspondant à ces deux rubriques ne seront pas, pour l’essentiel, créés avant 2000/2001, puisque conditionnés à l’ouverture des établissements.

(2)  en net des 37 suppressions d'emplois inscrites au titre des économies en lois de finances initiales pour 1996 et pour 1997.

(3) Les autorisations de programme affectées aux grandes constructions pénitentiaires en Antilles/Guyane ne sont pas comptées dans les autorisations de programme de la loi de programme, non plus que les crédits du titre VI.

Source : ministère de la Justice.

I.– LA PRISE EN CHARGE DE LA POPULATION PÉNALE

      A.– L’INFLATION CARCÉRALE

    Après une augmentation continue du nombre de détenus interrompue seulement entre 1988 et 1990, le nombre de personnes incarcérées diminue pour la troisième fois en 1998 après la première baisse enregistrée en 1996. Ces baisses sont enregistrées au 1er janvier. Il faut rappeler que les fluctuations en cours d’année peuvent être extrêmement importantes. Les premiers mois de l’année sont traditionnellement une période de forte croissance, tandis qu’une décrue s’amorce dans la seconde partie de l’année sous l’effet, notamment, des grâces collectives. Compte tenu de ces éléments, il faut souligner que la progression globale de la population carcérale entre le mois de janvier et le mois de juillet 1999 a atteint près de 9,2 %, à comparer à l’augmentation de 6,2 % sur une période comparable l’année précédente. En flux d’entrées, le chiffre atteint 72.972 personnes en 1998.

    La tendance générale à la hausse constatée sur la dernière décennie s’est traduite par une surpopulation carcérale, qui reste inquiétante, et ce d’autant plus qu’elle se double d’un taux de prévenus important.

    Si le taux moyen d’occupation est de 118 % sur l’ensemble des établissements, nombre d’entre eux connaissent des taux d’occupation alarmants (). Le taux monte à 132 % en maison d’arrêt. 44 maisons d’arrêt ont une densité comprise entre 150 % et 200 % et pour 12 maisons d’arrêt, elle dépasse 200 %. Dans les établissements pour peine, la densité atteint 91 détenus pour 100 places.

    Au début de l’année 1999, c’est-à-dire à une période basse de l’année, on pouvait constater des taux de 258 % pour la maison d’arrêt de Meaux, de 230 % pour celle de Fontenay-le-Comte, de 174 % pour la maison d’arrêt de Montauban, de 158,7 % pour la maison d’arrêt de Béziers, plus de 194 % pour la maison d’arrêt de Laval et près de 209 % pour celle du Mans, 163 % pour la maison d’arrêt de la Roche-sur-Yon, 189 % pour la maison d’arrêt de Bayonne, 186 % pour la maison d’arrêt de Loos, 181 % pour la maison d’arrêt de Lyon Montluc, 164 % pour la maison d’arrêt de Foix et celle de Toulouse, 144 % pour la maison d’arrêt de Tarbes, 181 % pour la maison d’arrêt de Nice, 147 % pour la maison d’arrêt de Béthune.

    S’agissant des établissements pour peine, on enregistre des taux d’occupation également préoccupants : au 1er juillet 1998, c’est-à-dire à une période haute de l’année, les taux atteignaient :116,7 % pour le centre de détention de Perpignan, 110 % pour le centre de détention de Lorient, 105,5 % pour le centre de détention de Liancourt, 103 % pour le centre de détention de Draguignan, et 102,5 % pour le centre de détention de Bédenac.

    En outre-mer, les chiffres dépassent largement ceux enregistrés en métropole : au milieu de l’année 1998, le taux atteint 228,1 % pour la maison d’arrêt de Basse-Terre, 222,7 % pour celle de Saint-Pierre, 195,7 % pour la maison d’arrêt de Saint-Denis. Les établissements pour peine connaissent la même surpopulation avec des taux d’occupation de 280 % pour la maison centrale de Nouméa (345 % au 1er janvier 1999), de 174,1 % pour la maison centrale du Port, de 136,9 % pour le centre de détention de Faa’a et de 127,4 % pour le centre de détention de Ducos. Le taux moyen d’occupation atteint 125 % au 1er janvier 1999, dans les départements d’outre-mer et près 139 % dans les territoires d’outre-mer.

    Ce dernier constat traduit bien, malgré les efforts d’équipement réalisés ces dernières années en outre-mer, l’évolution constante du nombre de personnes incarcérées hors de métropole : l’augmentation est particulièrement importante en 1997, avec une progression supérieure à 18 %. Elle se prolonge en 1999, avec une croissance de 6,1 %, portant le nombre total de personnes incarcérées dans les départements d’outre-mer à 3.289. Elles n’étaient que 1.418 en 1986.

    Les explications de ce phénomène sont connues : importance croissante de population pénale, durée des procédures, aggravation des peines prononcées par les juridictions (développement de certaines infractions, notamment celles liées aux stupéfiants), allongement des durées de détention (de 4,6 mois en moyenne en 1980 à 8,3 mois en 1998), recours fréquent à la détention provisoire.

    Certaines conséquences de cette surpopulation pénale sont clairement soulignées par le ministère de la Justice : « la surpopulation pénale dans les maisons d’arrêt engendre une promiscuité qui rend les conditions de détention pénibles et désocialisantes. Cette situation est d’autant plus paradoxale que les maisons d’arrêt sont destinées à accueillir des prévenus bénéficiant de la présomption d’innocence et des condamnés à de très courtes peines d’emprisonnement, donc amenés à retourner à la vie libre rapidement. Elle n’est sans doute pas étrangère à la survenance d’actes d’auto-agressions (automutilations, tentatives de suicides et suicides) ou d’agressions à l’égard des personnels de surveillance. (…) Cette surpopulation peut aussi entraîner le non-respect de certaines dispositions relatives au régime de détention prévues par le code de procédure pénale, notamment en ce qui concerne la séparation des prévenus et des condamnés. (…) La surpopulation carcérale augmente la charge de travail des personnels, et notamment des personnels de surveillance, dans la mesure où l’organigramme d’un établissement est calculé en fonction de sa capacité d’accueil théorique et non pas en fonction de son taux d’occupation. » ()

    Face ces questions et pour mettre en place une veille permanente sur les conditions de détention, un groupe de travail sur l’amélioration du contrôle externe des établissements pénitentiaires a été mis en place sous la présidence du Premier président de la Cour de cassation, M. Guy Canivet.

ÉVOLUTION DE LA POPULATION INCARCÉRÉE EN FRANCE

 


Métropole

Taux de variation (en %)


DOM

Taux de variation (en %)


France

Taux de variation (en %)

Janvier 1987

47.698

11,9

1.418

0,4

49.116

11,6

Janvier 1988

49.330

3,4

1.547

9,1

50.877

3,6

Janvier 1989

44.997

– 8,8

1.534

– 0,8

46.531

– 8,5

Janvier 1990

43.912

– 2,4

1.507

– 1,8

45.419

– 2,4

Janvier 1991

47.175

7,4

1.930

28,1

49.105

8,1

Janvier 1992

48.119

2

2.003

3,8

50.122

2,1

Janvier 1993

48.166

0,1

2.186

9,1

50.352

0,5

Janvier 1994

50.240

4,3

2.311

5,7

52.551

4,3

Janvier 1995

51.263

2,8

2.312

0

53.935

2,6

Janvier 1996

52.658

2

2.404

4

55.062

2,1

Janvier 1997

51.640

– 1,9

2.629

9,4

54.269

– 1,5

Janvier 1998

50.744

– 1,7

3.101

18,1

53.845

– 0,8

Janvier 1999

49.672

– 2,1

3.289

6,1

52.961

– 1,6

Source : administration pénitentiaire, rapports annuels d’activité.

    76,9 % des condamnés (32.261) sont incarcérés pour accomplir une peine d'emprisonnement correctionnelle. Cette proportion a peu évolué depuis 1980. 3,2 % de cette population est condamnée à une peine criminelle d’une durée comprise entre cinq et dix ans, tandis que 18,2 % subissent une peine criminelle d’une durée de dix à trente ans. 1,8 % de la population condamnée effectue une peine à perpétuité.

    Le classement des infractions par ordre décroissant donne en premier le viol et autres agressions sexuelles (21 %), en deuxième les infractions liées aux stupéfiants (16,8 %), en troisième le vol simple (14,5 %), puis le vol qualifié (12,7 %). Ces postes regroupent à eux seuls 65 % des condamnations. Suivent les crimes de sang, la violence sur mineurs, le faux et usage de faux, le recel, l’escroquerie, l’abus de confiance, etc.

    Le taux de prévenus se maintient à un niveau trop élevé, compris depuis une décennie entre 40 et 45 %. Le nombre de prévenus s’est stabilisé autour de 20.000 personnes. Si le « stock » total de prévenus au 1er janvier 1999 s’établissait à 20.452 personnes, il convient de souligner que sur l’année 1998, 13.962 prévenus étaient incarcérés alors que l’instruction n’était pas terminée, 3.514 étaient en attente de comparution, 676 étaient en situation de comparution immédiate, et 2.057 étaient en position d’appel ou de pourvoi. 18.647 prévenus ont bénéficié, cette même année, d’une ordonnance de mise en liberté, d’un non-lieu et mainlevée, d’un acquittement ou d’une relaxe. 40 % des prévenus sont mis en examen.

    Le taux de mise en détention provisoire des mineurs est particulièrement important. Il atteint 77 % des mineurs incarcérés (63,9 % en 1990). Il faut noter que 90 % des mineurs sont incarcérés au titre d’une détention provisoire (80 % pour l’ensemble de la population détenue) et 70 % sont libérés suite à une ordonnance de mise en liberté (23 % dans l’ensemble de la population détenue). En outre, lors de la condamnation ultérieure à l’ordonnance de mise en liberté, on constate que plus de la moitié des mineurs soit n’ont pas été condamnés (pas d’inscription au casier judiciaire), soit ont fait l’objet d’une condamnation sans emprisonnement (mesure éducative, peine de substitution...). Moins de la moitié des mineurs sont condamnés à une peine d’emprisonnement ferme et, lorsque cette peine intervient, elle est le plus souvent couverte par la détention provisoire.

    Le nombre de mineurs détenus a sensiblement augmenté ces dernières années (975 au 1er juillet 1999, dont 123 âgés de moins de seize ans). Ce problème a été placé au centre des conclusions des conseils de sécurité intérieure des 8 juin 1998 et 27 janvier 1999.

    La diminution manifeste de la part des prévenus dans l'ensemble de la population pénale, 49,4 % en 1985 et 38,6 % en 1999, ne s'explique pas par une baisse du nombre des prévenus, mais par une forte augmentation du nombre total des détenus.

    La loi n° 96-1235 du 31 décembre 1996 relative à la détention provisoire et aux perquisitions de nuit en matière de terrorisme a assoupli les conditions d’indemnisation, puisqu’il n’est plus exigé que la détention ait causé un préjudice « manifestement anormal et d’une particulière gravité » pour donner droit à indemnisation ; la simple démonstration d’un préjudice est suffisante.

    La loi du 30 décembre 1996 est entrée en vigueur le 31 mars 1997 et certaines de ses dispositions visant à limiter la durée de la détention en matière correctionnelle ne s’appliquent que depuis le 1er juillet 1998. L’objectif de la loi est de limiter le recours à la détention provisoire en réduisant le nombre des placements et en diminuant la durée des détentions.

    Le juge d’instruction ne peut placer une personne en détention provisoire que lorsque cette mesure est l’unique moyen de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant de l’ordre public causé par l’infraction ; auparavant, le juge d’instruction pouvait placer une personne sous mandat de dépôt pour préserver l’ordre public.

    D’autre part, la loi tend à améliorer l’efficacité de la procédure de référé-liberté. Le président de la chambre d’accusation peut désormais examiner juridiquement l’appel et non plus seulement le déclarer suspensif. Par ailleurs, il exerce maintenant un contrôle au fond portant sur le respect des conditions prévues par la loi et non plus seulement sur leur méconnaissance manifeste. Ainsi, si le président de la chambre d’accusation infirme l’ordonnance du juge d’instruction, il peut ordonner la remise en liberté de la personne et éventuellement la placer sous contrôle judiciaire.

    Enfin, la loi introduit dans le code de procédure pénale la notion de délai raisonnable en obligeant le juge d’instruction à justifier, au-delà d’un délai de huit mois en matière correctionnelle et d’un an en matière criminelle, les raisons pour lesquelles son instruction est toujours en cours alors que l’intéressé demeure détenu et à indiquer le délai prévisible d’achèvement de la procédure. Enfin, la loi institue de nouveaux délais maximum de détention provisoire : un an pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans, lorsque la personne a déjà été condamnée, alors qu’auparavant cette durée était de deux ans, et deux ans pour les délits punis de plus de cinq ans mais de moins de dix ans, alors qu’il n’existait jusqu’alors aucun délai butoir dans cette hypothèse.

    Malgré la mise en œuvre de cette réforme introduite par la loi du 30 décembre 1996 relative à la détention provisoire et aux perquisitions de nuit en matière de terrorisme, il ne semble pas que la durée moyenne de détention provisoire diminue, au contraire : de 4,1 mois en 1995, elle atteignait 4,4 mois en 1997. Il reste que le nombre de prévenus a baissé de 4,1 % entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 1998. Une enquête relative à la mise en œuvre de la loi est actuellement en cours de réalisation auprès des directions régionales de l’administration pénitentiaire. En tout état de cause, l’impact des dispositions de la loi du 30 décembre 1996 sur le prononcé et la durée de la détention provisoire paraît particulièrement faible.

    Compte tenu du caractère massif et quasi « culturel » du placement en détention provisoire, votre Rapporteur s’interroge sur l’efficacité réelle sur le nombre et la durée des détentions provisoires des dispositions présentées par le Gouvernement dans son projet de loi renforçant la présomption d’innocence et le droit des victimes tendant à créer un juge de la détention provisoire et à limiter les conditions de placement en détention provisoire. La trop longue durée des procédures est sans doute une des causes importantes du nombre de personnes détenues de manière provisoire.

    Enfin, on peut relever de nouveau le fait que l’encombrement dont souffrent régulièrement un grand nombre de maisons d’arrêt ne permet pas de respecter systématiquement les dispositions légales relatives à la séparation des prévenus et des condamnés, et a fortiori celles concernant la protection des détenus primaires du contact avec les récidivistes.

    La réforme de la détention provisoire contenue dans le projet de loi relatif à la présomption d’innocence et aux droits des victimes, actuellement en discussion, ne permettra sans doute pas de réduire massivement le nombre de prévenus.

      B.– LA RÉFORME DU DISPOSITIF DES MESURES ALTERNATIVES À L’INCARCÉRATION

      1.– Une réorganisation progressive

    Sous la pression de l'inflation carcérale et sous l’influence des travaux de recherche relatifs à la réinsertion des personnes détenues, les autorités judiciaires ont développé des peines alternatives à l'enfermement total pour les personnes passibles de courtes peines, en recourant soit aux mesures de milieu ouvert, soit à la semi-liberté. L'augmentation du nombre de prévenus confirme le caractère nécessaire de cette orientation. Votre Rapporteur s’était, l’an passé, prononcé pour une accélération des réformes dans ce domaine. C’est pourquoi il se félicite de la volonté, exprimée par le Garde des Sceaux à l’occasion du Conseil des ministres du 8 avril 1998, de mettre en œuvre une politique globale d’amélioration des décisions de justice et d’inciter l’administration pénitentiaire à mieux adapter ses réponses pour favoriser les alternatives à la détention.

    Ont ainsi été préconisées la création d’emplois et la réforme des services pénitentiaires d’insertion et de probation, la prise en charge spécifique de la population toxicomane, les actions en faveur des plus démunis avec un renforcement des mesures d’insertion professionnelle, la prise en charge des auteurs de délits à caractère sexuel, la création de centres pour peines aménagées (CPA) et la relance des mesures de libération conditionnelle.

    La réforme de la libération conditionnelle a été lancée, le 21 septembre 1999, avec l’installation d’une commission de quinze membres présidée par M. Daniel Farge, conseiller à la Cour de cassation. Aujourd’hui, la libération conditionnelle dépend du juge d'application des peines (JAP) pour les peines inférieures à cinq ans, et du Garde des Sceaux pour les autres peines. Cette mesure est de moins en moins utilisée : en 1973, 30 % des condamnés proposables ont bénéficié d'une mesure de libération conditionnelle décidée par un juge d’application des peines, contre 14% en 1998, alors même que la longueur moyenne des peines s'est allongée de 4,1 mois en 1975 à 8,3 mois l'an passé. Or, le taux de récidive est quasiment deux fois moins important chez les condamnés qui ont bénéficié de cette mesure que chez les autres. L'un des enjeux du groupe de travail sera de réfléchir à une « judiciarisation » de la libération conditionnelle, à savoir la création d'une procédure contradictoire, au terme de laquelle serait rendue une décision motivée et susceptible de recours. La responsabilité incomberait « soit à un juge d’application des peines, soit à une formation juridictionnelle classique de trois juges, compétente dans son ressort, soit à une formation unique compétente sur le plan national ». Il convient de relever que cette commission est la sixième, depuis 1983, à se pencher sur le sujet.

    Toutes ces mesures impliquent un élargissement et approfondissement du recours au milieu ouvert. La population pénale prise en charge en milieu ouvert a constamment augmenté ces dernières années. S'agissant des seules personnes condamnées, le milieu ouvert couvre principalement les régimes du sursis à l'emprisonnement, du sursis avec mise à l'épreuve, du travail d'intérêt général (TIG) ou de la libération conditionnelle. Le milieu ouvert où interviennent les comités de probation et d'assistance aux libérés (CPAL) et associations habilitées, sous la responsabilité du juge de l'application des peines et d'un chef de service éducatif, qui est aussi chargé de la surveillance des mesures de contrôle judiciaire et des enquêtes rapides concernant les prévenus.

    109.349 sursis avec mise à l’épreuve (SME) étaient décidés au 1er janvier 1999 au lieu de 94.933 un an plus tôt. Les SME représentent 75 % des peines alternatives prises en charge par les CPAL. La même évolution peut être constatée pour les TIG (12.996 mesures en 1993, 23.952 en 1999) et les mesures de libération conditionnelle prises par le juge de l’application des peines ou par le Garde des Sceaux (4.591 décisions en 1993, 4.685 en 1999).

    Quant aux mesures de semi-liberté, elles sont passées de 6.045 au 1er janvier 1994 à 6.863 au 1er janvier 1999. Si les projets de semi-liberté sont encore peu nombreux, il faut souligner que l’utilisation de cette mesure nécessite des structures pénitentiaires indépendantes (les centres de semi-liberté) ou des quartiers spécifiques des maisons d’arrêt et des centres de détention qui ne disposent pas toujours de l’encadrement nécessaire pour prendre en charge le public concerné.

    La montée en charge des mesures de milieu ouvert a nécessité une réforme des CPAL, réforme engagée dès 1986. L’objectif était de mutualiser l’action des différents comités sur un plan départemental. Il s’agissait de rapprocher de façon significative, et ce jusqu’à la fusion des structures, des services socio-éducatifs du milieu ouvert et ceux du milieu fermé. La mise en œuvre de ce vaste mouvement débutera avant la fin de l’année 1998 et s’étendra progressivement à l’ensemble du territoire.

    Incluse dans la communication du Garde des Sceaux en date du 8 avril 1998 au Conseil des ministres, la réforme des CPAL est entrée dans une phase active avec le décret n° 99-276 du 13 avril 1999 modifiant le code de procédure pénale et portant création des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), qui marquent la mutualisation des comités de probation et des services sociaux des établissements pénitentiaires. Ces services ont une compétence départementale.

    Par ailleurs, une réflexion a été engagée sur la mise en place de centres pour peines aménagées (CPA), structure pénitentiaire dont la mission principale serait le traitement de la petite et de la moyenne délinquance en donnant la priorité à l’insertion, afin d’éviter l’incarcération pour courtes peines en maison d’arrêt. Les CPA constitueront un lieu de détention pour les condamnés faisant l’objet d’un placement extérieur ou d’une semi-liberté, mais aussi des condamnés avec une peine ou un reliquat de peine de moins d’un an provenant de liberté ou de maison d’arrêt, volontaires mais qui n’ont pas de projet d’insertion immédiat leur permettant de bénéficier des mesures d’aménagement de peine. Dès 1999, deux centres pour peines aménagées ont été créés à Metz-Barrès et à Marseille dans des structures existantes. 16 millions de francs ont financé cette action. Le programme de développement des CPA se poursuit en 2000, avec l’engagement de nouvelles études.

      2.– Des moyens accrus

    Ces réformes ont dû s’accompagner d’un renforcement des moyens. Or, si le nombre de peines globales prises en charge par les CPAL est passé de 109.303 en 1994 à 130.345 en 1997, les crédits du chapitre 46-01 alimentant ces structures et les associations agissant dans ce secteur ont été réduits sur la même période : ils atteignaient 15,3 millions de francs en 1994 et seulement 13,4 millions de francs en 1997. En 1999, les moyens des CPAL seront portés à 19,1 millions de francs, soit une augmentation de 19,5 % par rapport à 1998.

    L’année 1998 qui a vu, véritablement, le lancement de la réforme a été marquée par le recrutement de 200 travailleurs sociaux supplémentaires et par un renforcement des moyens de fonctionnement des CPAL, tandis que les crédits du chapitre 46-01 destinés à accompagner cette action connaissaient une progression de 24,2 % par rapport à 1997 (16,7 millions de francs).

    La loi de finances pour 1999 a poursuivi les efforts réalisés en matière de personnels d’insertion et de probation et d’assistants sociaux. Les effectifs consacrés au milieu ouvert sont passés de 1.481 personnes en 1993 à 1.720 personnes en 1998, soit une progression de 16,1 %. Le projet de loi de finances renforce ces moyens : création de 25 emplois pour les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) et 19 millions de francs de fonctionnement. Les CPA bénéficieront pour leur part de 30 emplois.

    Le développement des alternatives à l’incarcération, avec la mise en œuvre de la réforme des services pénitentiaires d’insertion et de probation engagée avec le décret du 13 avril 1999 alliée à un renforcement important des effectifs des personnels socio-éducatifs intervenant désormais indifféremment en milieu ouvert ou fermé, devrait permettre une diminution de la population incarcérée.

II.– LES PERSONNELS PÉNITENTIAIRES

    L’augmentation des moyens mis à la disposition de l’administration pénitentiaire, sous peine de ne pas produire son plein effet et de ne pas être à la mesure de l’accroissement des charges qu’elle supporte, doit s'accompagner d'une réforme de l'organisation des ressources humaines.

      A.– L’AUGMENTATION DES MOYENS

    Au 1er juillet 1999, l’administration pénitentiaire employait en effectifs réels 25.148 personnes, dont 20.014 au titre de la surveillance des établissements, pour un nombre de postes vacants de 326 (190 parmi le personnel socio-éducatif).

EFFECTIFS DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

 

1997

1998

1999 (1)

2000 (2)

Emplois budgétaires

       

      – Total

24.788

25.086

25.474

25.868

      – dont personnel de surveillance

19.727

19.771

19.991

20.277

Emplois réels

       

      – Total

24.447

24.656

25.148

      – dont personnel de surveillance

19.590

19.752

20.014

(1) au 1er juillet 1999.

(2) projet de loi de finances.

Source : administration pénitentiaire.

    En 1999, les effectifs budgétaires de l’administration pénitentiaire s’élevaient à 25.474 personnes, soit 41,22 % de l’effectif total du ministère, au lieu de 40,9 % en 1995. En 2000, la proportion passera à 41 %. La progression est de 20,9 % depuis 1990.

    Entre 1990 et 2000, les effectifs de l’administration pénitentiaire ont progressé de près de 21 %, alors que dans le même temps, l’évolution de la population pénale atteignait plus de 16,3 %. Le présent projet de loi de finances propose la création de 394 emplois, dont 8 emplois transférés en provenance des services judiciaires.

ÉVOLUTION DES CRÉATIONS NETTES D’EMPLOIS DANS L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

(1988-2000)

Années

Personnels

de

direction

Personnels

de

surveillance

Personnels d’insertion et de probation

Corps communs

(1)

Assistants sociaux

Infirmiers

Contractuels

Autres fonctionnaires

Total

Effectifs 1988

273

14.837

816

690

1.992

114

18.722

Créations nettes 1989

33

476

35

12

89

– 1

644

Effectifs 1989

306

15.313

851

702

2.081

113

19.366

Créations nettes 1990

– 2

1.652

23

30

332

– 6

2.029

Effectifs 1990

304

16.965

874

732

2.413

107

21.395

Créations nettes 1991

4

826

29

110

– 1

968

Effectifs 1991

308

17.791

903

732

2.523

106

22.363

Créations nettes 1992

 

344

– 4

22

– 33

– 11

318

Effectifs 1992

308

18.135

899

754

2.490

95

22.681

Créations nettes 1993

 

335

65

– 754

532

170

39

3

390

Effectifs 1993

308

18.470

964

0

532

170

2.529

98

23.071

Créations nettes 1994

– 2

325

– 46

123

5

405

Effectifs 1994

306

18.795

964

532

124

2.652

103

23.476

Créations nettes 1995

 

351

100

30

– 124

69

– 3

423

Effectifs 1995

306

19.146

1.064

562

2.721

100

23.899

Créations nettes 1996

5

476

135

– 4

99

9

720

Effectifs 1996

311

19.622

1.199

558

2.820

109

24.619

créations nettes 1997

3

105

40

0

19

0

167

Effectifs 1997

314

19.727

1.239

558

2.839

109

24.786

Créations nettes 1998

16

44

236

– 24

33

– 5

300

Effectifs 1998

330

19.771

1.475

534

2.872

104

25.086

Créations nettes 1999

12

216

67

10

70

13

388

Effectifs 1999

342

19.987

1.542

544

2.942

117

25.474

Créations nettes 2000

22

290

14

0

27

41

394

Effectifs 2000

364

20.277

1.556

544

2.969

158

25.868

(1) (1) Les « corps communs » d’infirmiers et d’assistants sociaux ont été transférés à l’administration pénitentiaire en 1993. Les emplois
d’infirmier ont été supprimés en 1994 (46) et 1995 (124), dans le cadre de la réforme hospitalière.

Source : ministère de la Justice.

      1.– Les objectifs de la loi de programme

    La loi de programme du 6 janvier 1995 avait prévu la création de 3.920 emplois au sein de l’administration pénitentiaire, dont 770 en milieu ouvert, 1.750 pour les constructions nouvelles et 1.400 emplois d’encadrement des détenus dans les structures existantes.

    Les 1.400 emplois d’encadrement des détenus devaient être répartis de la façon suivante :

· 160 emplois pour les maisons d’arrêt régionales ;

· 75 emplois pour les services médico-psychologiques régionaux ;

· 1.165 emplois au titre de la résorption des déficits d’emplois.

    Les échéanciers prévisibles étaient les suivants :

· 32 emplois par an sur les cinq années du plan seraient créés dans les maisons d’arrêt régionales ;

· 75 emplois étaient à créer sur les trois premières années du plan pour tenir compte dans les services médico-psychologiques régionaux des dispositions de la loi n° 94-89 du 1er février 1994 instituant une peine incompressible et relative au nouveau code pénal et à certaines dispositions de procédure pénale.

    La résorption des déficits d’emplois devait être favorisée par la création de 350 emplois en 1995, 408 en 1996 et 407 en 1997.

      2.– Les personnels de surveillance

        a) Les effectifs

    Les surveillants constituent la très grande majorité du personnel employé par l'administration pénitentiaire. Leurs effectifs augmentent régulièrement (+ 19,5 % depuis 1990).

    Il y avait 19.987 postes budgétaires de surveillants en 1999, soit une augmentation de 6,3 % depuis 1994. En 1999, ils représentent  près du tiers des effectifs du ministère.

    La loi de finances pour 1995 a créé 351 emplois de surveillance (301 surveillants, 38 premiers surveillants, 12 chefs de service pénitentiaire). Dans le cadre du programme pluriannuel, la loi de finances pour 1996 a ouvert les crédits nécessaires pour le recrutement de 334 personnels de surveillance (268 surveillants, 40 surveillants spécialisés, 26 chefs de service pénitentiaire). Par ailleurs, hors loi de programme, 142 emplois de surveillants ont été créés en surnombre, conformément au protocole d'accord du 18 janvier 1995 et afin de mettre en service les centres pénitentiaires de Ducos (Martinique) et de Baie-Mahault (Guadeloupe).

    La loi de finances pour 1997 a prévu la création nette de 167 emplois. 127 d’entre eux ont permis d’ouvrir le centre pénitentiaire de Remiré-Montjoly en Guyane. 105 de ces emplois étaient des emplois de surveillants. Par ailleurs, le ministère de la Justice a continué de bénéficier d’une autorisation de recrutements en surnombre de 150 emplois de surveillants qui, si elle est utile, est du point de vue légal hautement contestable.

    La loi de finances pour 1998 a créé 88 personnels de surveillance dont 50 pour les quartiers de mineurs détenus et les autres pour l'extension du projet d'exécution de peine, le renforcement administratif des directions régionales et la mise en place de la déconcentration. En outre, les services pénitentiaires devaient garder l'autorisation d'un surnombre de 150 emplois.

    Une autorisation supplémentaire de recrutement en surnombre d’environ 360 élèves surveillants, transmise par lettre du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie en date du 18 février 1998, a permis, par ailleurs, de réduire les vacances d’emplois et de rendre plus dynamique la gestion des effectifs. Ce surnombre autorisé complémentaire permet d’anticiper sur les départs à la retraite.

    La loi de finances pour 1999 a prévu la création de 220 postes de surveillance. Ces emplois ont servi à l’ouverture de nouveaux établissements et à l’amélioration de la prise en charge des détenus par un encadrement renforcé.

    Pour 2000, le projet de loi de finances prévoit la création de 386 emplois pénitentiaires, dont 269 emplois de surveillance, qui se répartissent comme suit :

· 122 emplois pour le renforcement de la sécurité, de l’hygiène et de l’action sanitaire ;

· 15 emplois pour la création d’unités de vie familiale dans les établissements pour longues peines ;

· 30 emplois destinés aux centres pour peines aménagées (CPA), pour une meilleure prise en charge de la petite et moyenne délinquance ;

· 118 emplois de surveillance pour améliorer le dispositif carcéral spécifique aux mineurs.

    S’ajoutent à ces emplois 21 transformations d’emplois (soit au total 290 nouveaux postes budgétaires de surveillants) et 350 postes d’agents de justice.

    Le taux d’encadrement était en 1999 de 1 gardien pour 2,6 détenus, soit l’un des plus bas d’Europe malgré une légère amélioration. Au 1er septembre 1997, il était de 2,3 en Autriche, de 2,2 en Angleterre, de 1,6 aux Pays-Bas, de 1,2 en Suède, de 1,1 en Irlande. Ce taux avait récemment baissé du fait de l’augmentation du nombre de détenus. Il a cependant légèrement augmenté depuis 1996.

        b) Les rémunérations et avantages statutaires

    Les personnels de surveillance des prisons bénéficient de revalorisations indemnitaires et statutaires considérables depuis de nombreuses années, la manne tombant plus fortement après les mouvements sociaux qui agitent cette profession.

La loi de finances pour 1996 avait traduit le protocole du 18 janvier 1995 après une inscription de 26,92 millions de francs au cours du collectif de printemps. À l’intérieur des 284,81 millions de francs de mesures nouvelles pour les dépenses ordinaires, on répertoriait :

    · 5,53 millions de francs au titre de l’application aux surveillants de la septième tranche du protocole sur la rénovation de la fonction publique ;

    · 38,59 millions de francs au titre de l’application du protocole du 18 janvier 1995 avec, notamment, la création de l’indemnité pour charges pénitentiaires ;

    · 0,35 million de francs pour la revalorisation de la prime de surveillance.

    Le protocole du 18 janvier 1995 comporte les mesures suivantes :

    · la nouvelle indemnité pour charges pénitentiaires (26 millions de francs) se substitue à l’ancienne indemnité pour charge de détention, avec un régime d’attribution élargie ;

    · l’indemnité forfaitaire créée pour le personnel d’insertion et de probation (6,9 millions de francs) assure l’équité de traitement avec les autres personnels sociaux de l’administration pénitentiaire ;

    · l’indemnité de responsabilité des chefs d’établissement et l’indemnité horaire pour travail du dimanche et jours fériés ont été revalorisées respectivement de 25 % (+ 1,2 million de francs) et de 15 % (+ 4,4 millions de francs).

En outre, les gradés et surveillants ont bénéficié à compter du 1er août 1996 de la dernière revalorisation indiciaire prévue par le protocole d'accord du 9 février 1990 dont l'application se déroulait sur sept ans (1990-1996). De plus, un arrêté du 13 mars 1996 a revalorisé la prime de surveillance de nuit allouée aux surveillants à compter du 1er janvier 1996 (47,75 francs par nuit et par agent). Enfin la Chancellerie avait insisté particulièrement sur l'amélioration du régime de pension des surveillants, annoncée dans le courant du mois de septembre, en même temps que le budget du ministère. La « bonification du cinquième » était attendue par le personnel de surveillance depuis la loi n° 57-44 du 8 avril 1957, date à partir de laquelle les fonctionnaires de la police nationale ont bénéficié de cette amélioration de leur régime de retraite.

Cette mesure a été adoptée par l’article 24 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statuaire.

Elle s’articule en trois volets :

    · la limite d’âge des fonctionnaires appartenant aux corps du personnel de surveillance est ramenée de 60 à 55 ans. Ces fonctionnaires voient leur régime de retraite aligné sur celui des policiers en service actif par l’obtention de la bonification dite « du cinquième ». Celle-ci est égale à un cinquième de la durée accomplie en position d’activité, dans la limite de cinq annuités ;

    · l’amélioration du montant de la pension qui en résulte est complétée par un abaissement de l’âge minimal de départ en retraite. Les fonctionnaires des corps de surveillance admis à la retraite sur leur demande pourront prétendre à la jouissance immédiate de leur pension à condition de justifier de 25 années de services effectifs et de se trouver à moins de cinq ans de la limite d’âge de 55 ans ;

    · pour tenir compte des difficultés qu’aurait entraînées un abaissement brutal de 60 à 55 ans de la limite d’âge, un système transitoire a été mis en place : la limite d’âge sera abaissée d’une année par an à compter du 1er janvier 1996 jusqu’en 2000 ; sur cette période, le nombre maximal d’annuités gratuites susceptibles d’être attribuées au titre de la bonification sera porté, au même rythme, de un à cinq. En définitive, et de manière pratique, cela permettra aux surveillants ayant vingt-cinq ans d’activité de partir à la retraite à partir de cinquante ans.

Sur l’ensemble de la période transitoire 1996-1999, le coût total de la mesure prévue devrait atteindre près de 85 millions de francs, dont 62 millions de francs au titre du seul effet de l’abaissement de la limite d’âge et 23 millions de francs au titre de l’amélioration du montant des pensions liée à la bonification. Le coût de ce dispositif pour 1996 a été inscrit dans la loi de finances initiale (article 10 du chapitre 32-97), pour un montant de 2 millions de francs. En 1997, le coût est de 11 millions de francs, en 1998 de 19 millions de francs, en 1999 de 22,2 millions de francs et de 27,5 millions de francs en l'an 2000.

Pour 1999, une mesure nouvelle de 0,5 million de francs permettra une revalorisation de l’indemnité de surveillance de nuit, tandis que la revalorisation de l’indemnité pour charge pénitentiaire nécessitera l’ouverture de 3,4 millions de francs.

Pour 2000, 10 millions de francs de mesures nouvelles, notamment, viendront supporter la création d’un taux spécifique de la prime de nuit du personnel de surveillance, pour les nuits encadrant les dimanches et jours fériés. Le taux de cette indemnité forfaitaire est fixé à 100 francs par nuit, ce qui permet de rééquilibrer les services exercés encadrant les dimanches et jours fériés (actuellement 48,70 francs par nuit) avec les services des dimanches et jours fériés (actuellement fixés à 103 francs). En outre, 1 million de francs sont provisionnés pour un nouveau statut des chefs de services pénitentiaires (CSP), destiné à prendre en compte la revalorisation de la carrière des gradés et surveillants intervenue en 1993, sur la base d’un alignement de les corps homologues de la police nationale. Il s’agit de maintenir la cohérence entre la grille du corps d’exécution et celle du corps d’encadrement.

      3.– Les autres catégories de personnel

    Il convient de relever que les conseillers d’insertion et de probation, les personnels administratifs ont supporté des mesures de gel d’emplois auxquels les surveillants échappent traditionnellement.

        a) Les personnels de direction et les personnels administratifs

    Les personnels travaillant dans les greffes pénitentiaires ont des statuts très divers. Si des personnels administratifs y exercent leurs fonctions, on y rencontre également des personnels de surveillance, suivant l’importance de l’établissement et son organisation.

    Il n’y a pas, en effet, d’organigramme-type pour le fonctionnement des greffes. Certains établissements de petite capacité n’ont pas de personnel administratif et emploient partiellement à ces tâches du personnel de surveillance. D’autres établissements plus importants ont des personnels administratifs, auxquels s’ajoutent des personnels de surveillance appelés notamment à travailler en dehors des heures habituelles.

    Dans la loi de finances pour 1998 était prévue la création de 12 emplois de directeurs des services pénitentiaires permettant de former l'encadrement des trois premiers établissements du « programme 4.000 » à la fin de 1998. 1998 a également l'année de la réforme statutaire du personnel de direction, comprenant la création d'un statut d'emploi de directeur régional (14 emplois y compris ceux imputés sur l'administration centrale) et la transformation de 307 emplois de directeur de l'ancien en nouveau grade pour un coût de 5,1 millions de francs (cf. décret n° 98-655 du 29 juillet 1998 relatif au statut particulier du corps des directeurs). Par ailleurs, la loi de finances incluait une provision de 5 millions de francs pour la réforme des personnels techniques et de l'enseignement professionnel. Les pyramidages statutaires ont touché 106 emplois dont des emplois de surveillants et d'insertion et de probation. Enfin, la revalorisation indemnitaire du personnel administratif soumis au statut spécial était prévue pour un montant de 7,46 millions de francs.

    La loi de finances pour 1999 a proposé la création de 28 emplois nouveaux pour la restructuration des métiers de la formation, ainsi que la création de 4 directeurs et de 11 personnels administratifs pour la réforme des services pénitentiaires d’insertion et de probation. Deux provisions ont, par ailleurs, été inscrites pour la réforme des personnels techniques (3 millions de francs).

    Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit la création de 51 emplois qui contribueront à la modernisation de la gestion et au renforcement de l’encadrement (20 emplois), au déploiement de l’application GIDE (16 emplois) et à la réforme de l’enseignement à l’École nationale de l’administration pénitentiaire (15 emplois).

    Il convient également de noter par transformation la création de 90 emplois de directeur de service pénitentiaire d’insertion et de probation (DSPIP) chargés de diriger les nouvelles structures.

        b) Les personnels d'insertion et de probation

    Le développement des peines alternatives à l'incarcération et l'extension du milieu ouvert nécessitent une progression des personnels d'insertion et de probation.

    Depuis 1988, les effectifs des corps relevant des fonctions d'insertion et de probation ont augmenté de plus de 20 %. Cette évolution masque une longue période de stagnation, voire de réduction des effectifs (entre 1991 et 1995). L'adoption de la loi de programme en 1995 a de nouveau mis l'accent sur la progression des effectifs des CPAL.

    La réalisation du programme pluriannuel pour la justice a ainsi conduit à la création de 297 postes de conseillers d'insertion et de probation (130 en 1995, 130 en 1996 et 37 en 1997). La scolarité des conseillers ayant une durée de deux ans, ils entrent en fonction en n+2. C'est pourquoi la mise en œuvre de la loi de programme n'a fait sentir ses effets dans les services de milieu ouvert que depuis 1997.

    Une indemnité forfaitaire a été créée au profit des personnels d'insertion et de probation (décret du 3 janvier 1996). Cette mesure faisait partie des dispositions du protocole du 18 janvier 1995. En 1996, cette indemnité annuelle était de 11.025 francs pour les chefs de service et variait entre 5.500 et 8.200 francs pour les conseillers.

    La loi de finances pour 1998, outre la création de 40 emplois de chefs de service d'insertion et de probation et de 160 emplois de conseillers d'insertion et de probation, avait prévu une provision de 0,5 million de francs pour la création de l'emploi fonctionnel de chef de service d'insertion et de probation.

    Une provision a été également inscrite dans la loi de finances pour 1999 pour la création de l’emploi fonctionnel de chef de service d’insertion et de probation (2 millions de francs). Le budget pour 1999 prévoyait également la création 10 postes de chefs de services et de 43 conseillers.

    Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit la création de :

    · 10 emplois de psychologues pour le développement des projets d’exécution de peine ;

    · 5 postes de psychologues pour l’amélioration de la détention provisoire ;

    · 25 emplois administratifs pour la réforme des services d’insertion et de probation (qui recevront en outre 8 emplois transférés à partir des services judiciaires) ;

    · 10 emplois de conseillers d’insertion et de probation spécialement chargés des mineurs détenus.

      B.– UNE RÉORGANISATION DE LA GESTION DES PERSONNELS

    Les mesures du plan pluriannuel pour la justice s'inscrivent pour partie dans le prolongement de décisions antérieures. Deux axes ont été privilégiés : la déconcentration et la gestion prévisionnelle des emplois.

    La déconcentration a d'abord touché le domaine de la formation, avec la création de comités régionaux de formation. En 1992, des comités techniques paritaires déconcentrés et quatre comités d'hygiène et de sécurité locaux ont été mis en place.

    En 1995, la déconcentration a été étendue à la répartition des créations d'emplois de surveillants. Dans ce cadre, les directions régionales ont proposé une ventilation des créations d'emplois fondée sur les critères de répartition préalablement établis. Ces critères ont été fixés de manière à mettre en œuvre les politiques sectorielles prévues par la loi de programme du 6 janvier 1995 : projets de service relatif au projet d'exécution de peine dans dix établissements pilotes, renforcement de l'encadrement des services médico-psychologiques régionaux, des unités de consultations et de soins ambulatoires, des personnes détenues mineures par les personnels de surveillance.

    Le décret n° 97-3 du 7 janvier 1997 portant déconcentration a donné un cadre juridique à la déconcentration des actes de gestion individuelle.

    La création des commissions administratives paritaires régionales en métropole pour le corps des gradés et surveillants par arrêté du 17 décembre 1996 va permettre de doter les régions de compétences qui seront progressivement élargies.

    La question de la gestion prévisionnelle des emplois prend un nouveau relief avec la mise en œuvre de la « bonification du cinquième ». En effet, dans les cinq ans à venir le personnel de surveillance va être renouvelé à près de 20 % des effectifs actuels.

    L’ensemble de ces évolutions a trouvé sa traduction au niveau central par la réorganisation de la direction de l’administration pénitentiaire organisée par les arrêtés parus au Journal officiel du 28 juin 1998. Cette réorganisation était destinée à clarifier et à simplifier l’organigramme de la direction, d’améliorer les compétences dans le domaine social et de mieux piloter les services déconcentrés. Les quatre sous-directions ont été remplacées par trois sous-directions : la sous-direction des personnes placées sous main de justice, la sous-direction de l’organisation et du fonctionnement des services déconcentrés et la sous-direction des ressources humaines et des relations sociales.

III.– LES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

      A.– L’ÉQUIPEMENT PÉNITENTIAIRE : UN SYSTÈME À DEUX VITESSES

      1.– Un parc pénitentiaire en mouvement

Au 1er juin 1998, le parc pénitentiaire comprenait 187 établissements, pour 50.093 places. Ce chiffre doit être cependant corrigé par celui de la capacité opérationnelle qui était de 49.632 places à la même date pour 56.957 détenus, soit un taux moyen d’occupation de 114,8 %.

    En 1998, 461 places n’étaient pas opérationnelles, compte tenu des sous-effectifs à la maison d’arrêt de Borgo, des travaux importants de restructuration de la maison centrale de Poissy, de la fermeture de cellules à la maison centrale de Saint-Maur, et de la limitation pour des raisons de sécurité du nombre des détenus dans les maisons centrales de Moulins, Arles et Lannemezan.

Près de 41 établissements ont été mis en service depuis 1987 : les 25 établissements du « programme 13.000 », 8 établissements en métropole (Lannemezan, Épinal, Strasbourg, Val-de-Reuil et Borgo, centres de semi-liberté de Lyon et Montpellier) et 4 établissements outre-mer (La-Plaine-des-Galets à La Réunion, Ducos en Martinique, Baie-Mahault en Guadeloupe, Remiré-Montjoly en Guyane), tandis que 3 établissements ont été réouverts après leur complète restructuration et leur mise aux normes (maisons d’arrêt de Nantes et d’Arras, maison centrale de Riom). Enfin, un établissement a été créé dans une ancienne caserne entièrement réhabilitée (centre de détention de Montmédy). Pendant la même période, 30 établissements vétustes ou inadaptés ont été fermés.

      2.– Des établissements vétustes, dégradés, inadaptés

Il reste que, selon le ministère de la Justice, la situation des 146 autres établissements est caractérisée par la vétusté (), la dégradation et l’inadaptation fonctionnelle. Seulement 55 établissements, hors centres de semi-liberté, satisfont aux normes actuelles de détention, pour 52 % de la capacité totale du parc.

      3.– Un vaste programme de modernisation

Dans la suite du « programme 13.000 » (1987-1991), le programme pluriannuel fixé par la loi n° 95-9 du 6 janvier 1995 comportait trois volets pour un investissement prévu de 3.000 millions de francs :

    · il s’agit d’abord de la construction de deux maisons centrales à effectif réduit (120 places), d’un coût total d’environ 220 millions de francs, qui devaient être réalisées selon le calendrier prévisionnel suivant : études en 1995, engagement des travaux en 1996 et mise en service en 1998. Ces MCER sont destinées aux condamnés à de très longues peines, qui ne peuvent plus être gérés convenablement dans les seules cinq maisons centrales à haut niveau de sécurité (Clairvaux, Moulins, Lannemezan, Saint-Maur et Arles) qui ont connu des mutineries dangereuses pour l’ordre public et coûteuses pour les finances publiques (225 millions de francs). Il est probable que leur mise en service effective sera repoussée à l’an 2000 ;

    · la construction de 4.000 places de détention (1.630 millions de francs) correspond à celle de huit établissements répartis comme suit :

– 1 maison centrale de 200 places ;

– 5 maisons d’arrêt représentant au total 2.000 places ;

— 3 centres pénitentiaires représentant au total 1.800 places.

    Le lancement des études prévu pour 1997 devait être précédé d’une phase de recherche foncière et de définition des programmes pendant les années 1995 et 1996. Compte tenu de la durée des travaux, la livraison des établissements était envisagée à partir de 1999 pour s’achever en l’an 2000 ;

    · il s’agit enfin de la construction de 1.200 places de centre de semi-liberté, de petites dimensions, sur 40 sites à l’intérieur d’agglomérations urbaines. Ce programme augmenterait le parc actuel de places en semi-liberté de 80 %. D’un coût total de 200 millions de francs, cette réalisation devrait s’échelonner entre 1998 et 2000 à un rythme dépendant de celui des acquisitions des terrains ou des immeubles nécessaires à leur création.

    Le projet de loi de finances propose d’ouvrir 590 millions de francs d’autorisations de programme, après 912 millions de francs en 1999. Au total, sur six ans, ce seront 3.438 millions de francs d’autorisations de programme qui auront été inscrites dans le budget, soit près de 114,6 % de réalisation des objectifs fixés par la loi de programme, si l’on considère que toute autorisation de programme contribue à l’accroissement des équipements de l’administration pénitentiaire tel que voulu lors de l’adoption de la loi de programme de 1995. Une lecture à la lettre des dispositions de la loi de programme fait descendre ce taux de réalisation à 100 % (150 millions de francs d’autorisations de programme pour 2000).

    Les constructions nouvelles et la transformation des établissements sont assurées principalement sur le chapitre 57-20 du budget du ministère, devenu chapitre 57-60, articles 40 et 50, dans la loi de finances pour 1997.

CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT DES SERVICES PÉNITENTIAIRES

(Ancien chapitre 57-20, nouveau chapitre 57-60, articles 40 et 50)

(en millions de francs)

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (1)

2000

Crédits de paiement

Loi de finances initiale (2) Disponibles

Consommation

374,2

618,8

537,2

350

548

496,5

516

573

243,9

289

413

365,1

278

362,2

236,6

438

597,7

144,3

593

Autorisations de programme

Loi de finances initiale Disponibles

Consommation

348

493,5

484

310

330,7

280,7

340

375,1

293,4

329

426,6

214,3

1.024

1.293,5

369,3

912

1.853

116,2

590

(1) au 31 mai 1999.

(2)  budget voté, sauf 2000 (projet de loi de finances).

Source : ministère de la Justice.

    En 2000, comme nous l’avons vu supra, 150 millions de francs serviront à financer le solde des opérations prévues par la loi de programme.

    200 millions de francs sont demandés pour l’entretien des établissements pénitentiaires. Ils seront destinés à maintenir les bâtiments concernés en fonction. Le programme s’étalera sur cinq ans et devrait atteindre 1.000 millions de francs au total. Par ailleurs, 50 millions de francs seront consacrés à la rénovation des grands établissements : Fleury-Mérogis, Fresnes, La Santé, Les Baumettes, Loos, qui regroupent près de 19 % de la population pénale, avec un taux moyen d’occupation (au 1er janvier 1999) de 110,4 %. 70 millions de francs seront destinés à la rénovation des autres établissements du parc classique.

    70 millions de francs serviront à financer un nouveau programme de construction, qui comprendrait la réalisation de trois ou quatre nouveaux établissements dans le cadre d’un nouveau programme pluri-annuel. 2000 constituerait la première tranche. Le coût total du programme s’établirait à 1.000 millions de francs et entre 1.300  et 1.400 millions de francs si un quatrième établissement était édifié.

    30 millions de francs sont destinés à la rénovation des 53 quartiers pour mineurs existants et à la construction de quatre nouveaux quartiers, en vertu des décisions du conseil de sécurité intérieure.

    Enfin, 20 millions de francs sont demandés pour financer la construction d’un quatrième centre pour peines aménagées. Le coût total du programme, pour douze établissements, est estimé à 216 millions de francs.

    Par ailleurs, 21,5 millions de francs sont demandés sur le chapitre 66-20 – Subventions d’équipement pour établissements post-pénaux et sanitaires, afin de financer la sécurisation d’unités hospitalières interrégionales (18,5 millions de francs) et celle de chambres au sein des hôpitaux proches des établissements pénitentiaires (3 millions de francs).

      B.– LA MAINTENANCE ET LA GESTION DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

      1.– La maintenance du parc classique

    Comme l’a souligné la Cour des comptes, l’insuffisance de la maintenance liée au faible niveau des dotations du titre III réservé à ces dépenses est l’une des causes majeures de la dégradation rapide des structures et des installations. Il en résulte la nécessité de réaliser à une fréquence anormalement élevée de gros travaux d’entretien dont les dépenses sont supportées sur le titre V.

    Sur le titre III, les dépenses générales d’entretien immobilier du parc classique se sont élevées à 110,05 millions de francs en 1997, soit une augmentation de 19 % par rapport à l’exercice 1996 et de 4 % par rapport à l’année 1995. On constate que les travaux d’agencement et d’installation et la maintenance directe qui avaient connu une importante diminution en 1996, ont respectivement augmenté de 12,3 millions de francs et de 4,9 millions de francs en 1997. Le coût moyen est de 54 francs par mètre carré pour l’année 1997, soit une augmentation de 7 francs par mètre carré par rapport à 1996. La part moyenne consacrée aux contrats de maintenance s’élève à 24 %.

    Toujours sur le titre III, sont assurées les dépenses générales d’entretien immobilier des quatre établissements du « programme 13.000 » qui ont été repris en gestion publique (Laon, Arles, Saint-Quentin-Fallavier, Châteauroux), dont le coût moyen par mètre carré est de 110 francs.

    En ce qui concerne les dépenses assurées sur le titre V, il convient de noter qu’elles sont passées de 62,21 millions de francs en 1991 (28 % du budget d’équipement) à 112 millions de francs en 1997 (26 % du budget d’équipement). En moyenne, 25 à 30 % des investissements pénitentiaires sont consacrés à la maintenance immobilière, ce qui obère d’autant la réalisation de travaux de modernisation du parc. En 1998, le taux devrait cependant atteindre seulement 8 % (100 millions de francs), ce qui est dû à l’importance de l’augmentation très forte des crédits affectés au programme de constructions neuves. Les résultats sur les trois derniers exercices mettent en évidence que les dépenses de mise aux normes des installations sont cinq fois plus importantes que les dépenses relatives au clos et au couvert.

COÛT DE FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DU SECTEUR CLASSIQUE

(1988-1998)

Années

Fonctionnement
(en milliers de francs)(1)

Nombre de journées de détention

Coût net moyen total de la journée de détention
(en francs courants)

1988

3.325.045

18.354.825

181

1989

3.585.841

17.205.947

208

1990

3.631.746

18.232.669

199

1991

3.708.564

17.306.919

220

1992

3.720.189

16.276.913

229

1993

3.789.605

15.583.953

243

1994

4.179.205

16.672.439

251

1995

4.326.209

16.542.227

262

1996

4.661.393

16.639.810

280

1997

4.679.863

16.379.939

285

1998

4.873.298

16.177.000

301

(1) hors personnel des établissements du « programme 13.000 », centre de probation et d’assistance aux libérés, et centres de rétention.

Source : ministère de la Justice.

    En 1998, le coût quotidien de fonctionnement d’une place de prison, hors personnel, s’établissait à 59,26 francs dans une maison d’arrêt autonome et 68,68 francs dans une maison d’arrêt non autonome, à 73,12 francs dans un centre de détention, à 90,35 francs dans une maison centrale et à 69,75 francs dans un centre pénitentiaire.

      2.– La maintenance du « parc 13.000 »

    La mise en service des vingt-cinq établissements du « programme 13.000 » a bouleversé les critères habituels de gestion des établissements pénitentiaires. Vingt et un d’entre eux ont fait l’objet en 1989 de quatre marchés de fonctionnement, tandis que quatre autres étaient repris en gestion publique et organisés de manière à faciliter l’évaluation du niveau de performance des groupements privés par comparaison des différentes fonctions assurées dans les deux secteurs.

    La baisse constante jusqu’en 1996 du coût de la journée de détention dans les établissements du « programme 13.000 » s’explique par l’accroissement de la population pénale et par une meilleure répartition des frais fixes, lesquels sont rapportés à un nombre plus élevé de journées de détention. Cette baisse a atteint son terme en 1996 avec la mise à pleine capacité de l’ensemble des établissements du « programme 13.000 ». La variation du coût de journée ne dépendra plus, pour l’essentiel, que du rythme de l’inflation.

COÛT DE FONCTIONNEMENT – « PROGRAMME 13.000 »

(1990-1998)

(en francs)

 

Coût marché

Crédits d’accompagnement (1)

Nombre de journées de détention

Coût moyen d’un détenu par jour (2)

(en francs courants)

1990

136.782.533

215.069.725

476.566

738

1991

407.145.022

351.609.165

1.674.212

453

1992

541.903.069

405.935.535

2.618.968

362

1993

610.459.286

470.172.446

3.297.205

328

1994

655.480.254

549.264.080

3.555.131

333

1995

667.888.468

600.664.168

3.871.426

328

1996

689.214.882

649.899.056

4.018.571

330

1997

692.594.343

683.333.653

3.969.972

346

1998

707.908.000

708.969.976

4.047.662

350

(1) fonctions non déléguées, dépenses de santé non déléguées à partir de 1995, frais de personnel.

(2) coût par jour de détention, personnel inclus.

Source : ministère de la Justice.

    Il convient de relever que le coût des dépenses de santé non déléguées comprend le paiement des cotisations sociales, le ticket modérateur pour les dépenses d’hospitalisation et les dépenses de prévention et d’éducation pour la santé.

    Les coûts du marché des « établissements 13.000 » ne sauraient être comparés au coût de fonctionnement, hors personnels, des établissements classiques, puisqu’ils incluent les coûts du personnel privé affecté au fonctionnement de ces établissements (maintenance et transport, hôtellerie, santé, travail et formation professionnelle).

    Un surcoût de 8 % pour les établissements à gestion déléguée, peut être constaté, dès lors qu’outre les charges de personnel, on intègre la prise en compte de taux d’occupation inférieurs pour les établissements à gestion déléguée à ceux des établissements à gestion publique. Dans ce surcoût global sont pris en compte des charges non supportées par les établissements du parc classique (amortissement, frais de siège…), sans compter le résultat positif que laissent apparaître les comptes des groupements.

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CHAPITRE IV :

LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

    Les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse permettent de financer la prise en charge des mineurs en danger et des mineurs délinquants, que ce soit au travers du réseau public d’établissements ou bien au travers du secteur habilité.

    Le Garde des Sceaux avait indiqué, le 25 août 1997, lors de la visite d’un centre d’action éducative à Paris que la protection judiciaire de la jeunesse serait « la grande priorité » de son budget 1998. Cette déclaration s’était traduite par une augmentation des moyens des services de la protection judiciaire de la jeunesse de 4,14 % dans la loi de finances initiale pour 1998 par rapport à celle pour 1997, et par la mise en place d’une mission interministérielle sur la prévention et le traitement de la délinquance des mineurs dirigée par deux parlementaires en mission, Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduyck.

    Cette orientation a été confirmée par les conseils de sécurité intérieure de juin 1998 et de janvier 1999. Le 8 juin 1998, le conseil de sécurité intérieure, sous la présidence du Premier ministre, avait, notamment, arrêté un plan de lutte gouvernemental contre la délinquance des mineurs. Le présent projet de budget tient en partie compte des mesures décidées dans le cadre de ce plan.

    Pour 1999, les crédits des services de la protection judiciaire de la jeunesse ont progressé de 6,42 % pour s’établir à 2.770,9 millions de francs, soit 10,55 % des crédits du ministère. Il s’agit du secteur qui a bénéficié, hors des juridictions administratives, de la plus forte progression relative. La protection judiciaire de la jeunesse dispose d'un effectif théorique pour 1999 de 6.393 agents.

    Poursuivant cet effort, le présent projet de budget consacre une augmentation de 14,74 % des crédits alloués à la protection judiciaire de la jeunesse à 3,17 milliards de francs, soit une progression en valeur absolue de 468,5 millions de francs. Ce renforcement de ce secteur est marqué également par la création de 380 emplois, dont 258 emplois d’éducateurs et de chefs de service éducatif.

    Dès la loi de finances initiale pour 1999, les données de la loi de programme du 6 janvier 1995 ont été respectées tant en termes d’emplois qu’en termes d’autorisation de programme. Il convient cependant de noter que le nombre d’emplois créés prend en compte la création de 34 emplois inscrits en 1997 pour les ex-unités à encadrement éducatif renforcé (UEER), devenues centres éducatifs renforcés (CER).

EXÉCUTION DU PROGRAMME PLURIANNUEL
PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

 
 

Mesures prévues

Loi de finances

initiale

1995

Loi de finances

initiale

1996

Loi de finances

initiale

1997

Loi de finances

initiale

1998

Loi de

finances initiale

1999

Total obtenu sur 5 ans

Emplois nets

400

90

107

35

100

68

400

Équipement (en millions de francs)

400

80

80

80

76

84

400

Source : ministère de la Justice.

 

I.– LA PRISE EN CHARGE DES JEUNES

      A.– LA POPULATION PRISE EN CHARGE

    La population de jeunes en difficulté est répartie entre les mineurs incarcérés et les mineurs en difficulté pris en charge par le secteur public ou le secteur associatif en vue de leur réinsertion.

      1.– Les mineurs incarcérés

    Depuis 1945, la justice des mineurs repose sur l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante qui affirmait le primat de l'éducation sur la répression. La loi n° 87-1062 du 30 décembre 1987 relative aux garanties individuelles en matière de placement en détention provisoire et de contrôle judiciaire et portant modification du code de procédure pénale a supprimé la possibilité de placer en détention provisoire les mineurs de treize à seize ans en matière correctionnelle.

    La loi n° 96-585 du 1er juillet 1996 portant modification de l’ordonnance du 2 février 1945 précitée a introduit des nouveautés, telles que le principe de comparutions à délai rapproché. Depuis dix ans, l'incarcération des mineurs a été peu à peu limitée. Elle est aujourd'hui proscrite pour les mineurs de moins de treize ans, et limitée aux crimes pour les adolescents de treize à seize ans. La détention provisoire est plafonnée pour les jeunes de seize à dix-huit ans à deux ans en cas de crime.

    Le nombre de mineurs incarcérés en métropole est passé de 757 au 1er janvier 1980 à 622 au 1er janvier 1998, soit une baisse de 17,8 %. Après s'être stabilisé autour de 800 dans les années 1980, ce nombre est brusquement tombé à environ 600. Les mineurs qui représentaient 2 % de la population totale carcérale, n’en constituent plus aujourd'hui que 1 %. Les textes législatifs intervenus à partir de 1985 sont directement la cause de cet infléchissement. On observe néanmoins une légère remontée depuis 1997. Les prévenus représentent 80 % des mineurs incarcérés.

    Le 1er juillet 1999, 975 mineurs étaient incarcérés au lieu de 642 au 1er janvier. Cette augmentation a conduit la Chancellerie à mettre en place un groupe de travail qui devrait rendre ses travaux en 2000. Dans ce domaine de la justice comme dans de nombreux autres, à l’exemple des mesures annoncées après les grèves massives de magistrats et d’avocats en 1998, l’affirmation de priorités est arrivée après que les difficultés n’éclatent et bien avant que les moyens nécessaires pour y remédier ne soient mis en place. Or, être constamment à la remorque des besoins sociaux ne constitue pas un principe de bonne gestion.

      2.– Les mineurs en difficulté

    Ces mineurs ne font pas l'objet de mise en détention mais sont soumis à des mesures d'investigations, des mesures de placement ou d'actions éducatives en milieu ouvert.

    Tous secteurs confondus, plus de 140.000 jeunes sont pris en charge en permanence dans le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse, le secteur associatif assurant près des deux tiers des prises en charge et 95 % des mesures de placement. En outre, plus de 80.000 jeunes ou familles font l’objet d’une investigation. Compte tenu des mouvements intervenus en cours d’année (entrées et sorties) plus de 250.000 jeunes ont été suivis au cours de l’année par ces services.

    On peut constater qu’il existe, entre les deux secteurs chargés de la protection judiciaire de la jeunesse, de fortes différences tant au niveau des publics pris en charge que dans les prestations éducatives. Le secteur public intervient prioritairement pour les jeunes délinquants et pour les « grands adolescents ». Il en résulte une plus forte proportion de garçons. Les jeunes majeurs sont également relativement nombreux dans le secteur public au titre le plus souvent d’une poursuite de prise en charge. Le secteur associatif réalise l’essentiel de son activité en assistance éducative, les délinquants ne pouvant pas être suivis en milieu ouvert, hors du secteur public.

    Par ailleurs, le nombre des mesures qui obligent les mineurs à réparer les délits qu’ils ont commis progresse : il était de 5.029 en 1996, il est de 7.536 en 1998.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE JEUNES PRIS EN CHARGE HORS INVESTIGATION

(au 31 décembre)

 

1994

1995

1996

1997

1998

Secteur public

30.430

32.325

34.533

35.968

37.365

Secteur habilité

100.656

103.450

105.787

107.709

(n.d.)

Total

131.086

135.775

140.320

143.677

(n.d.)

Source : ministère de la Justice.

      B.– LES MODES D'ACTION DE LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

    Les mesures d’investigation sont les premières qui sont prises pour cerner les difficultés auxquelles sont soumis les mineurs pris en charge. Cette première phase peut être suivie d'une seconde consistant en des mesures exigeant un investissement des services de la protection judiciaire de la jeunesse plus important.

      1.– Les mesures d'investigation

    L'investigation est un terme générique qui désigne l'ensemble des mesures d'enquête ordonnées par le juge des enfants avant qu'il ne prenne sa décision. Elle doit être exécutée dans le délai de six mois et ne peut être prorogée qu'une fois. Depuis la décision du comité technique paritaire national du 27 septembre 1996, les catégories de mesures d'investigation sont au nombre de trois.

    · L'enquête sociale est réalisée par des assistants sociaux et peut concerner un ou plusieurs jeunes dans le cadre d'une même famille. Il y a entre 16.000 et 18.000 enquêtes sociales diligentées par an. En 1997, le secteur associatif a réalisé 78 % de ces enquêtes.

    · L'investigation du SEAT regroupe les recueils de renseignements sociaux qui se sont substitués aux enquêtes rapides, réalisées à la demande du juge des enfants. Elles sont obligatoires si le juge envisage l'incarcération d'un mineur. Ces enquêtes peuvent être spontanées ou réalisées à la demande d'un magistrat. Le nombre d’enquêtes rapides varie aux alentours de 35.000 par an (37.000 en 1997).

    · Les mesures d'investigation et d'orientation éducative (IOE) désignent l'ensemble des investigations autres que l'enquête sociale. Elles regroupent à la fois la consultation d’orientation éducative (COE) et l’observation en milieu ouvert (OMO). La consultation est pluridisciplinaire. Elle est obligatoirement réalisée par un éducateur et un psychologue auxquels peuvent s'adjoindre un psychiatre, un médecin généraliste ou tout autre professionnel. L'OMO est exclusivement réalisée par un éducateur et peut durer jusqu'à six mois. Le secteur public et le secteur associatif réalisent pour moitié chacun environ 25.000 investigations et orientations éducatives.

      2.– Les modalités de la prise en charge des jeunes en difficulté

    Outre l'action de l'administration pénitentiaire en direction des mineurs faisant l'objet d'une mesure de mise en détention provisoire ou de mesure d'incarcération à la suite d'une condamnation, la prise en charge des jeunes en difficulté est assurée soit par le secteur public, soit par le secteur associatif, dit « secteur habilité ».

    Détaillée dans la circulaire d’orientation du 24 février 1999, cette prise en charge tend à se diversifier. Elle peut, en effet, se faire selon quatre modes, qui peuvent se cumuler : 

    · l’hébergement permet de prendre en charge les jeunes, le soir et la nuit, parfois le week-end. Ces jeunes peuvent recevoir une formation de jour, suivre une activité dans l’établissement qui assure l’hébergement ou dans un autre établissement. L’hébergement peut être collectif : il est alors assuré dans des établissements d’une capacité moyenne de douze lits ; l’hébergement peut être individualisé : il s’agit de places dans des foyers de jeunes travailleurs ou dans des cités universitaires, ou parfois de chambres en ville, sous-louées aux jeunes par la structure ou mises gratuitement à disposition. Au-delà de cette distinction, on peut distinguer trois catégories d’hébergement :

      ù un accueil d’urgence a été récemment organisé. En effet, le 6 juillet 1998, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a demandé à ses services territoriaux de mettre en place dans les départements prioritaires une cellule de coordination de l’accueil d’urgence associant juridictions, secteur public et secteur associatif habilité et aide sociale à l’enfance. L’objectif est que, dans chacun des départements, soit assurée une permanence d’accueil pour tous les mineurs déférés au tribunal. En juillet 1999, quarante-sept départements avaient d’ores et déjà organisé une cellule de coordination, et neuf départements avaient créé un accueil d’urgence ;

      ù il peut être assuré dans des structures à encadrement renforcé. Dans un premier temps, à partir de 1996, avaient été créées des unités à encadrement éducatif renforcé (UEER) chargées d’accueillir des délinquants multi-récidivistes ou des mineurs en situation de grande marginalisation. 17 UEER ont été ouvertes entre septembre 1996 et septembre 1997. L’actuel Garde des Sceaux a suspendu les ouvertures d’UEER qui devaient intervenir en septembre 1997, ayant décidé de confier une mission d’évaluation de ces structures. Les structures ainsi évaluées par un cabinet d’ingénierie et par les inspections générales de l’administration, des affaires sanitaires et sociales, et des services judiciaires semblent être caractérisées par des difficultés financières, mais aussi par des difficultés liées à des projets pédagogiques insuffisamment élaborés et des équipes éducatives mal préparées. Dans la logique des UEER mais avec des adaptations non négligeables, vont donc être créés des centres éducatifs renforcés, qui permettent d’organiser des « séjours de rupture ». Le Gouvernement a décidé en janvier 1999 de porter à cent le nombre de ces centres d’ici fin 2000 ;

      ù face à ces problèmes, dans le cadre de la politique gouvernementale de lutte contre la délinquance des mineurs annoncée lors du conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998 et dont les orientations ont été confirmées par celui du 12 octobre 1998 et matérialisées dans deux circulaires du Premier ministre en date du 6 novembre 1998 (), il avait été annoncé la mise en place de 50 centres de placement immédiat (CPI). Leur mise en place pose problème. Les effectifs de la protection judiciaire de la jeunesse ne permettent pas d’assurer aujourd’hui, dans de bonnes conditions, l’ouverture de ces centres. Les créations d’emplois prévues dans le présent projet de budget ne vont pas se traduire par l’arrivée instantanée d’éducateurs dans les nouvelles structures. En attendant que leur formation soit assurée, les CPI ne pourront être pourvus en effectifs que par le biais de redéploiements, mouvements qui vont donc se faire au détriment des structures « classiques ».

    · les centres de jour (secteur public uniquement) ont vocation à recevoir en priorité des jeunes sous protection judiciaire. Ils bénéficient soit d’une formation ou d’un apprentissage élémentaire en vue d’une réintégration dans les dispositifs de droit commun de type Éducation nationale ou autre, soit d’une formation professionnelle directement dispensée au sein de l’établissement ou sur un chantier. L’établissement d’accueil peut être une entreprise d’insertion, géré par la protection judiciaire de la jeunesse. Dans ce cas, le jeune a le statut de salarié et bénéficie d’un contrat de travail. Les centres de jour sont amenés, dans le cadre du partenariat avec le ministère de l’Emploi et de la Solidarité à accueillir des jeunes issus du dispositif de droit commun hors mandat judiciaire (missions locales, permanences d’accueil, d’information et d’orientation, etc.) ;

    · le milieu ouvert regroupe les mesures de suivi du jeune dans son milieu naturel (ou « actuel » selon les termes juridiques), c’est-à-dire dans sa famille. Cette modalité de prise en charge peut être associée à une mesure de placement familial ou avec un suivi en centre de jour. Il peut s’appliquer à de jeunes délinquants suivis au titre d’une mesure provisoire (contrôle judiciaire, liberté surveillée préjudicielle) ou définitive (sursis avec mise à l’épreuve, travail d’intérêt général, liberté surveillée...). Ce suivi pénal en milieu ouvert ne peut être assuré que par un service du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse. Il peut également concerner des mineurs en danger ou des jeunes majeurs, on parle alors d’action éducative en milieu ouvert ;

    · le placement familial concerne les jeunes confiés à une famille de manière permanente et durable. Il est suivi principalement le secteur habilité et toujours accompagné d’une mesure de milieu ouvert.

    Au 1er janvier 1999, les jeunes relevant du secteur public étaient répartis entre 44 foyers d’action éducative (FAE) assurant une fonction unique d’hébergement collectif, et 234 centres d’action éducative (CAE) exerçant des fonctions multiples (hébergement et/ou actions de formation, investigations, milieu ouvert). S’ajoutent à ces structures 76 annexes de protection judiciaire de la jeunesse dans les quartiers éloignés des grands centres urbains et proches des milieux de vie des jeunes.

    Il convient d’évoquer également l’action des SEAT qui assurent, en amont de la décision judiciaire, une permanence éducative chargée d’éclairer le magistrat sur la situation personnelle et familiale du mineur. Ils assurent également, en aval de la décision judiciaire, le suivi éducatif d’un certain nombre de mineurs dans le cadre pénal. Les missions des éducateurs du SEAT ont été élargies par la loi n° 96-585 du 1er juillet 1996 portant réforme de l’ordonnance du 2 février 1945, puisqu’ils doivent désormais donner leur avis dans le cadre de nouvelles procédures. Au 1er janvier 1999, il y avait 98 SEAT.

    Enfin, même si elles ne constituent pas à proprement parler des mesures de prise en charge, les mesures d’investigation sont des interventions éducatives ou de spécialistes destinées à dresser un bilan de situation du jeune qui permettra d’éclairer la décision du magistrat. Entrent dans cette catégorie les consultations d’orientation éducative, les enquêtes sociales, les mesures d’observation en milieu ouvert, les enquêtes rapides du SEAT.

II.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT

      A.– LES MOYENS HUMAINS

      1.– Les effectifs

    La protection judiciaire de la jeunesse bénéficiait de 6.245 emplois budgétaires en 1998, soit 10,26 % des effectifs du ministère, au lieu de 6.145 emplois budgétaires en 1997. La loi de programme avait prévu la création de 400 emplois budgétaires à répartir sur les cinq années de son application, soit en moyenne 80 emplois par an. Ces objectifs ont été remplis en 1999 avec la création de 68 emplois au titre de la loi de programme. Au total ce sont 150 emplois qui ont été créés au bénéfice de la protection judiciaire de la jeunesse, 142 étant liés au renforcement de la mesure de réparation, des prises en charge diversifiées et du suivi médico-social et 8 au titre de l’adaptation de la gestion des ressources humaines pour accroître l’efficacité des services. Au total, le secteur bénéficiera de 6.393 postes budgétaires en 1999.

    Lors du conseil de sécurité intérieure du 27 janvier 1999, le Gouvernement a décidé d’augmenter les effectifs de la protection judiciaire de la jeunesse de 1.000 emplois, afin de mettre en œuvre le plan de lutte contre la délinquance des mineurs.

    Le décret n° 99-412 du 26 mai 1999 a fixé les modalités exceptionnelles de recrutement de 200 éducateurs. Le projet de loi de finances prévoit la création de 380 emplois, pour une somme de 68,4 millions de francs, répartis entre 40 postes de directeurs, 8 de chefs de service éducatif, 250 d’éducateurs, 18 de psychologues, 35 d’agents techniques d’éducation, 7 d’ouvriers professionnels et 22 de secrétaires administratifs.

    À ces emplois budgétaires, s’ajouteront 600 postes d’agents de justice.

    Le taux d’encadrement tend régulièrement à s’améliorer depuis 1990. Il y avait 16,4 jeunes pour un éducateur en 1990, le nombre est passé à 14,9 jeunes pour un éducateur en 1997, avant de remonter à 15,26 en 1998. Il convient de relever que ces données sont fixées au 31 décembre. Dans le cours de l’année, le taux oscille autour de 30 jeunes par éducateur ; il était de 31,7 en 1995, mais de 33,4 en 1998.

    Enfin, votre Rapporteur souhaite souligner les risques qui peuvent résulter d’un recours excessif aux délégués du procureur dans le domaine du traitement de la délinquance des mineurs. L’adjonction de délégués auprès du procureur est née d’une pratique purement prétorienne. Il s’agissait d’alléger la charge de travail du parquet pour des tâches qui n’emportaient pas de décision judiciaire. Ainsi, dans le cadre des maisons de justice et du droit, des retraités de la magistrature, notamment, étaient appelés à la rescousse pour effectuer auprès des mineurs et de leurs parents des rappels de la loi et pour organiser une mesure de réparation dans l’intérêt de la victime ou de la collectivité. Cette pratique a été entérinée par l’article 41-1 du code de procédure pénale tel que rédigé par l’article premier de la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale :

    « S'il lui apparaît qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits, le procureur de la République peut, préalablement à sa décision sur l'action publique, directement ou par délégation :

    « 1° Procéder au rappel auprès de l'auteur des faits des obligations résultant de la loi ;

    « 2° Orienter l'auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle ;

    « 3° Demander à l'auteur des faits de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements ;

    « 4° Demander à l'auteur des faits de réparer le dommage résultant de ceux-ci ;

    « 5° Faire procéder, avec l'accord des parties, à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime.

    « La procédure prévue au présent article suspend la prescription de l'action publique. »

    Au 1er juillet 1999, 91 délégués du procureur étaient spécialisés dans les affaires mettant en cause des mineurs. Jusqu’à ce jour, seuls les délégués de la région parisienne ont pu recevoir une formation. Un module spécialisé de formation est en voie de création à l’École nationale de la magistrature. Si ces délégués du procureur apportent de la souplesse au système judiciaire, ils lui apportent surtout des moyens supplémentaires à moindre coût, sans les garanties que peuvent apporter des professionnels de la justice. Là encore, comme dans le cas des assistants de justice, les juridictions, faute de pouvoir bénéficier de moyens suffisants et adaptés, ont recours à des supplétifs de magistrats ou de fonctionnaires de greffe.

      2.– Les mesures indemnitaires et statutaires

    Au-delà de la poursuite des revalorisations indemnitaires demandées et accordées en partie en 1998, la loi de finances pour 1999 a proposé la revalorisation de certaines indemnités et la mise en place d’une provision pour le régime indemnitaire des directeurs. Ainsi, ont été revalorisés le taux de l’indemnité horaire pour travaux du dimanche et des jours fériés allouée aux personnels des services déconcentrés et le taux de l’indemnité de surveillance de nuit allouée aux agents techniques d’éducation. Par ailleurs, le régime indemnitaire des éducateurs et chefs de service éducatif a été amélioré (3,7 millions de francs).

    Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit plusieurs mesures de pyramidages statutaires qui permettront de porter à 25 % de l’effectif budgétaire des éducateurs du premier grade, ainsi que les agents administratifs de première classe. L’accord salarial conclu dans la fonction publique en faveur des bas salaires permet la transformation de 32 emplois, tandis qu’une provision de 0,8 million de francs est inscrite pour la création d’emploi fonctionnel de chefs de services éducatifs.

    Par ailleurs, sont revalorisées les primes liées à l’hébergement et à des contraintes particulières (1,1 million de francs), tandis que le régime indemnitaire des directeurs est refondu (1,8 million de francs). L’ensemble des régimes indemnitaires des corps de la protection judiciaire de la jeunesse bénéficie d’une revalorisation (6,2 millions de francs).

      B.– LES MOYENS MATÉRIELS DE FONCTIONNEMENT

    L’ensemble des crédits de fonctionnement et d’intervention ouverts dans la loi de finances initiale pour 1998 au profit de la protection judiciaire de la jeunesse se sont élevés à 2.532,8 millions de francs. En 1999, ce montant s’est élevé à 2.673,9 millions de francs, soit une variation positive de 5,57 %. Pour 2000, les moyens seront portés à 3.102,4 millions de francs, soit une progression conséquente de 16 %.

    Ces crédits recouvraient, outre les dépenses en personnel, l'entretien et la rééducation des mineurs (chapitres 34-33 ancien, 37-33 nouveau), les moyens de fonctionnement des services du secteur public (chapitre 34-34), les dépenses informatiques (chapitre 34-05, article 50), ainsi que des subventions et interventions diverses (chapitre 46-01) qui bénéficient également de crédits du Fonds social européen (FSE).

    La progression enregistrée en 1999 résulte, notamment, de l’augmentation de 60,8 millions de francs des crédits destinés à la rémunération des prestations du secteur associatif habilité (58 millions de francs en mesures d’ajustement, 2,8 millions de francs au titre de la mesure de réparation) et de l’abondement à hauteur de 15 millions de francs pour le renforcement des prises en charge par le secteur public. Quant aux crédits du Centre national de formation et d’études de la protection judiciaire de la jeunesse, ils seront majorés de 3 millions de francs. Le développement de la politique de soutien aux associations œuvrant dans les activités de jour sera soutenu par une augmentation de 1,3 million de francs de la dotation inscrite sur le chapitre 46-01.

    En 2000, l’augmentation importante des moyens de fonctionnement provient, notamment, outre des nombreuses créations d’emplois, de la création de vingt centres éducatifs renforcés, de la mise en œuvre de vingt centres de placement immédiat (38 millions de francs).

III.– LES INVESTISSEMENTS

    Depuis 1980, l'évolution des méthodes pédagogiques a nécessité une transformation du patrimoine immobilier affecté à la protection judiciaire de la jeunesse. Les gros internats, dont les coûts d'entretien et de fonctionnement élevés ne se justifiaient plus, ont été progressivement remplacés par des structures de petites ou moyennes dimensions, insérées en milieu urbain et assurant le plus souvent une fonction unique (hébergement, milieu ouvert, formation professionnelle). À partir de 1989, après un inventaire des opérations d'équipement en cours ou projetées, des études ont été menées. Leurs résultats ont permis de planifier dans un cadre pluriannuel les nouvelles implantations du secteur public. Le redéploiement des activités des établissements inadaptés a contribué, depuis 1991, à recentrer progressivement les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse à proximité des secteurs urbains où sont présents les jeunes les plus en difficulté.

    Depuis 1995, les opérations d'équipement se situent dans le cadre fixé par la loi de programme relative à la justice qui a prévu d’affecter 400 millions de francs d’autorisations de programme à la protection judiciaire de la jeunesse pour l’ouverture de 500 places d’hébergement, une partie de ce montant devant servir, à hauteur d’une centaine de places, à l’achèvement des programmes déjà en cours. Le Gouvernement souhaitait également renforcer les possibilités de prise en charge des mineurs délinquants par les services de milieu ouvert et les centres de jours situés dans les quartiers les plus difficiles. C’est à ce deuxième objectif que devait être consacré le solde de ces dotations.

    Les crédits ouverts pour 1999 ont permis de réaliser la totalité des ouvertures d’autorisations de programme fixées par la loi du 6 janvier 1995. La loi de finances pour 1999 a, en effet, prévu l’ouverture de 84 millions de francs en autorisations de programme et de 97 millions de francs en crédits de paiement. Ont été construits 2 nouveaux foyers (Melun-Sénart et Mulhouse) de 18 places, tandis que plusieurs établissements anciens à Paris, dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais, des Bouches-du-Rhône et du Rhône ont bénéficié d’opérations de rénovation et de réhabilitation.

    Le projet de loi de finances pour 2000, outre l’achèvement de nouveaux hébergements programmés antérieurement, prévoit la création de deux hébergements et de trois centres de placement immédiat, ainsi que la poursuite de la rénovation et l’adaptation d’établissements anciens à Paris, dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais, du Rhône et des Bouches-du-Rhône. Pour ce faire, 100 millions de francs d’autorisations de programme et 77 millions de francs de crédits de paiement sont ouverts.

CHAPITRE V :

LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

Outre le Conseil d’État, les juridictions administratives sont organisées autour de sept cours d’appel () et de trente-cinq tribunaux administratifs.

    Les crédits du Conseil d’État, des cours administratives d’appel et des tribunaux administratifs progressent de 3,9 % (+ 9,21 % entre 1998 et 1999, mais moins de 5 % à structure constante ()), pour atteindre 841,7 millions de francs dans le présent projet de loi de finances. Cette progression résulte uniquement de l’augmentation des dépenses ordinaires (+ 4,48 %), puisque les crédits de paiement pour investissement sont en recul de 3,45 % à 56 millions de francs. Les ouvertures d’autorisations de programme sont également en réduction avec un taux de variation de - 13,79 % à 50 millions de francs. Les juridictions administratives disposeront de 2.267 postes budgétaires en 2000, dont 940 magistrats, au lieu de 2.184, dont 900 magistrats en 1999.

    Dès 1999, l'exécution de la loi de programme était satisfaisante tant au niveau des emplois créés qu'en matière d'autorisations de programme, puisque les taux de réalisation atteignaient respectivement 87 % et 106,5 % des mesures prévues, alors même que l'échéance de la loi de programme avait été reportée d'une année en 1997.

EXÉCUTION DU PROGRAMME PLURIANNUEL
JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

 

Mesures prévues

Loi de finances initiale 1995

Loi de finances initiale 1996

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Loi de finances initiale 1999

Projet de loi de finances 2000

Total obtenu sur 6 ans

Emplois nets

380

82

70

57

61

61

83

414

Équipement (en millions de francs)

200

40

40

42

40

58

50

270

Source : ministère de la Justice.

    En 2000, le taux de réalisation de la loi de programme s’élevait à 108,95 % en termes d’emplois et 135 % en termes d’autorisations de programme inscrite dans les lois de finances initiales.

    Dans son rapport sur les crédits pour 1999, votre Rapporteur avait insisté sur la nécessité d’accélérer la modernisation et de poursuivre l’adaptation de la juridictions administratives. Des phénomènes tels que l’impossibilité pour le Conseil d’État de faire face à l’afflux des recours nés de l’obligation récente faite aux consuls de motiver leur refus de délivrer des visas à certaines catégories de demandeurs () suffisent à montrer que des réformes doivent être entreprises. Ainsi, les déclarations faites par le Garde des Sceaux, le 20 septembre 1999, appelant à de nouvelles modalités d’organisation de la juridiction administrative en vue de remédier à l’allongement de ses délais de jugement, fondés notamment sur un recours plus important aux procédures de référé, vont dans le sens souhaité par votre Rapporteur.

I.– UNE ACTIVITÉ EN AUGMENTATION CONSTANTE

    Comme les années précédentes, le nombre d’affaires enregistrées en 1998 continue d’augmenter pour les cours administratives d'appel. Sur cinq ans, l’accroissement du volume des entrées nettes est de 32,7 % pour les seuls tribunaux administratifs. Même le Conseil d’État a connu de nouveau une augmentation des affaires enregistrées en 1998, après plusieurs années de pause.

    Les effets de la réforme de 1987, entrée en vigueur complètement en 1995, se sont traduits essentiellement par la libération partielle du Conseil d’État en transférant une partie de la charge sur les cours administratives d’appel. Mais cette « libération » n’a été que de courte durée.

De fait, comme le relève le Conseil d’État dans son dernier rapport public, « 1998 apparaît (…) comme une année au cours de laquelle le cycle de réformes, enclenché dès 1986, qui aura profondément modifié le visage de la juridiction administrative, tant dans ses aspects institutionnels, procéduraux que fonctionnels, aura été parachevé ; ce satisfecit global demeure cependant altéré par l’évolution statistique de l’évolution juridictionnelle toujours préoccupante. ()»

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX TRAITÉ PAR LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
(1991-1999)

Conseil d’État

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Affaires enregistrées brutes

10.828

11.106

10.927

9.197

12.447

8.091

8.314

10.232

Affaires enregistrées nettes

9.843

10.705

10.335

8.743

9.162

7.527

7.193

8.427

Affaires jugées (net)

9.907

9.976

10.395

11.314

10.598

11.684

11.228

9.450

Affaires en stock (net)

21.425

22.342

22.388

19.403

18.016

13.756

10.385

8.479

Affaires par magistrat (net)

119

130

122

135

120

150

142

128

Délai moyen de jugement

2 ans

2 ans 4 mois

2 ans 2 mois

1 an 6 mois

1 an 7 mois

1 an 4 mois

1 an 2 mois

1 an 2 mois

Cours administratives d’appel

Affaires enregistrées brutes

5.069

6.555

7.553

9.435

12.121

15.553

14.350

17.135

Affaires enregistrées nettes

Non connu

5.570

6.794

7.804

9.057

12.168

12.477

14.330

Affaires jugées (net)

Non connu

5.447

6.129

5.786

6.110

6.317

7.461

9.199

Affaires en stock (net)

Non connu

6.697

7.605

9.392

12.269

18.383

24.016

29.334

Affaires par magistrat (net)

Non connu

60

67

61

65

64

68

75

Délai moyen de jugement

1 an 2 mois

1 an 4 mois

1 an 2 mois

1 an 7 mois

1 an 7 mois

2 ans 11 mois

2 ans 11 mois

2 ans 11 mois

Tribunaux administratifs

Affaires enregistrées brutes

78.160

116.779

94.189

94.774

106.434

101.575

106.985

132.918

Affaires enregistrées nettes

73.922

84.082

88.078

88.949

97.025

95.246

101.590

123.834

Affaires jugées (net)

65.482

72.176

78.045

82.870

90.103

91.371

96.367

104.615

Affaires en stock (net)

148.243

156.554

166.928

171.311

179.874

183.641

188.653

207.920

Affaires par magistrat (net)

159

173

181

189

193

188

191

211

Délai moyen de jugement

2 ans 2 mois

2 ans

1 an 11 mois

1 an 11 mois

1 an 11 mois

1 an 11 mois

1 an 11mois

1 an 11 mois

Source : Conseil d’État.

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX TRAITÉ PAR LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
(1991-1998)
Affaires enregistrées nettes

ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX TRAITÉ PAR LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
(1991-1998)
Affaires en stock (net)

      A.– LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS

Le phénomène de pause dans l’accroissement du contentieux observé en 1993 (+ 4 %) et en 1994 (+ 1,5 % par rapport à 1993) s’était interrompu en 1995. Corrigées des séries, les entrées nettes augmentent de 9 % en 1995 (+ 12 % en données brutes). Mais après des années de progression interrompue (+ 72 % de 1987 à 1995), le nombre annuel d'affaires enregistrées a légèrement diminué en 1996 de 2 % en données nettes. Cette « accalmie » ne s’est pas confirmée en 1997, puisque cette année a enregistré un bon de 6,66 % du nombre des affaires nouvelles. Sur trois ans, l’accroissement du volume annuel des entrées atteint 14,2 %.

Il ne semble pas que l'institution d'un droit de timbre par l'article 44 de la loi de finances pour 1994 ait pu permettre d'avoir un effet dissuasif important sur les flux de contentieux répétitifs (les « recours-pétitions »). Le nombre de séries, qui avait baissé en 1996, a repris une pente ascendante en 1997 pour retomber en 1998. Le maintien du droit de timbre ne suffit pas à enrayer les phénomènes cycliques de croissance du contentieux. Cependant, sa suppression risquerait d’entraîner une augmentation marginale importante du contentieux, notamment devant les cours administratives d’appel. Une augmentation de son niveau pourrait être envisagée.

En 1997, les affaires jugées ont crû de 5,5 %, ce qui porte à 16 % le taux de croissance des affaires jugées depuis 1994. Cette augmentation est due pour l’essentiel au renforcement des effectifs tant en magistrats qu’en agents des greffes, car la productivité des magistrats qui avait fortement augmenté (+ 43 % de 1987 à 1993) semble avoir aujourd’hui atteint un palier. L'augmentation du nombre d'affaires traitées est plus forte que celle du nombre d'entrées et l'écart entre les deux chiffres se réduit ; le rapport affaires traitées sur affaires enregistrées est passé de 89 % en 1991 à 95 % en 1997.

    Les résultats pour 1998 confirment la dégradation de la situation, s’agissant des affaires enregistrées et du volume des stocks, puisque les premières augmentent fortement de 24,24 % en données brutes (non corrigées des séries), de 21,9 % en données nettes par rapport à 1997. Sur cinq ans, c’est-à-dire de 1993 à 1998, l’évolution des affaires enregistrées en données brutes a atteint 41,1 %. Parallèlement, la progression du stock est très importante. Elle atteint en 1998, en données nettes, 10,21 % par rapport à l’an passé et 24,56 % par rapport à 1993. Ainsi, en 1998, 207.920 affaires restaient à juger. Il convient de relever qu’une partie de l’augmentation des entrées est liée à l’apparition d’un contentieux conjoncturel, celui lié à la police des étrangers dans le droit fil de l’opération de régularisation des immigrés clandestins lancée par le Gouvernement.

    Malgré tout, ces difficultés n’ont pu être réduites par l’augmentation, également remarquable, du nombre d’affaires jugées. Ce dernier est passé de 78.045 en 1993 à 104.615 en 1998, soit une progression de 34,04 % en cinq ans. De fait, la productivité des magistrats a régulièrement augmenté : chaque magistrat traitait en effet environ 181 affaires par an en 1993 ; il en a traité 211 en 1999. Il est utile de noter que la progression de la productivité a particulièrement été sensible en 1997 et 1998, période qui correspond à la mise en œuvre d’un système informatique rénové permettant une recherche documentaire performante et à la mise en place d’assistants de justice dans un certain nombre de tribunaux.

    Après avoir été réduit de 2 ans et 2 mois en 1991 à 1 an et 10 mois en 1995, le délai moyen de jugement a de nouveau augmenté : il est de 1 an et 11 mois en 1998, et ce, depuis 1996, devant les tribunaux administratifs.

    La situation de certains tribunaux reste particulièrement préoccupante, à l’exemple de celui de Paris, pour lequel le stock en 1998 a atteint 50.575 affaires pour 16.561 affaires réglées, ou celui de Versailles, qui doit faire face à un stock de 17.625 affaires pour 8.649 affaires réglées. La création du tribunal administratif de Melun dans un premier temps, et d’un autre tribunal dans la région parisienne à moyen terme, devrait permettre de résorber certaines difficultés.

      B.– LES COURS ADMINISTRATIVES D’APPEL

Depuis 1992, les cours administratives d’appel connaissent, en raison du transfert échelonné de l’appel des recours pour excès de pouvoir, qui s’est achevé en 1995, une progression des entrées sans précédent : + 29 % en 1992, + 15 % en 1993, + 25 % en 1994, + 28 % en 1995, + 34,33 % en 1996. En 1997, la progression du nombre d’affaires enregistrées a été limitée à 2,56 % ce qui semble indiquer que les effets mécaniques des derniers transferts sont achevés. Mais la tendance à une augmentation forte s’est de nouveau engagée en 1998 avec 14,85 % d’augmentation par rapport à l’année précédente, ce qui ce traduit en données nettes, sur cinq ans, par une croissance de 110,92 %.

Le nombre d’affaires traitées augmente régulièrement. Cependant, le rapport affaires traitées/affaires enregistrées qui était de 97,79 % en 1992 est passé à 64,19 % en données nettes en 1998. Le nombre d’affaires traitées par magistrat a augmenté de 11,94 % en données nettes de 1993 à 1998.

Corrélativement, le stock d’affaires en instance n’a cessé de croître. Il a été multiplié par 4,8 en données nettes depuis 1993. Le délai moyen de jugement est passé de 1 an et 2 mois en 1993 à 2 ans et 11 mois en 1998.

En 1998, la situation aurait dû s’améliorer avec la création de la cour administrative d’appel de Marseille, inaugurée en septembre 1997. Mais cette juridiction n’a commencé à fonctionner « à plein régime » qu’un an plus tard, ce qui a amoindri son effet sur la résorption des stocks. L’évolution du délai théorique de résorption du stock a même augmenté, passant de 2 ans et 3 jours en 1997 à 3 ans 2 mois et 7 jours en 1998.

    En 1999, la situation pourrait se redresser, compte tenu de l’ouverture de la cour d’appel de Douai ().

      C.– LE CONSEIL D’ÉTAT

Le nombre d’affaires enregistrées au Conseil d’État, après avoir connu une baisse régulière depuis 1992, a connu en 1998 une forte augmentation : il est passé, en données nettes, de 10.705 en 1992 à 7.193 en 1997, pour remonter à 8.427 en 1998.

En revanche, le nombre d’affaires jugées après avoir connu une certaine stabilité (11.314 en 1994 et 11.228 en 1997), a baissé de manière importante, passant à 9.450 en 1998, soit une baisse de 15,83 % par rapport à l’année précédente. Parallèlement, la productivité a baissé fortement, passant de 150 affaires par magistrat en 1996 à 128 affaires en 1998. Nous retrouvons dans cette matière le niveau de 1992 (130 affaires par magistrat).

Le nombre des affaires réglées restant supérieur à celui des affaires enregistrées, le stock continue à baisser, malgré la baisse de productivité. Il est passé de 22.388 affaires restant en instance en 1993 à 8.479 affaires en 1999, soit une réduction de 62,13 % en cinq ans. Le délai moyen de jugement est resté stable, à 1 an et 2 mois en 1998. Il était de 2 ans et 2 mois, il y a cinq ans.

    Une partie importante de l’accroissement du nombre d’affaires enregistrées est liée au développement du contentieux des étrangers : appels de jugements de tribunal administratif statuant en matière de reconduite à la frontière, recours en cassation contre des décisions de la Commission de recours des réfugiés, et très forte augmentation en premier ressort des recours contre des décisions de refus de visas depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 98-389 du 11 mai 1998 sur l’entrée et le séjour des étrangers en France et au droit d’asile. Pour 1999, la tendance semble s’accentuer. Ainsi le nombre de recours concernant le contentieux en appel des décisions reconduites à la frontière est passé de 631 dossiers en 1997, à 885 dossiers en 1998 et à 1.028 dossiers sur les sept premiers mois de l’année 1999. Encore plus préoccupante est la progression des recours liés aux décisions de refus de visas : le nombre de dossiers enregistrés dans cette matière est passé ainsi de 125 en 1997 à 396 en 1998, et à 1.268 sur les sept premier mois de 1999.

    L’année 1998 a vu, par ailleurs, la mise en application du décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 relatif à la procédure d’admission des pourvois en cassation devant le Conseil d’État et modifiant le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 relatif à l’organisation et au fonctionnement du Conseil d’État, qui a supprimé la commission d’admission des pourvois en cassation et confié aux sous-sections de la section du contentieux du Conseil d’État la prise en charge de la procédure d’admission prévue à l’article 11 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif (), visant à diminuer la durée de la procédure d’admission d’un pourvoi en cassation.

II.– DES MOYENS DE FONCTIONNEMENT RENFORCÉS

Depuis 1990, le nombre de postes budgétaires de magistrats du corps des cours administratives d’appel et des tribunaux administratif a augmenté de près de 38,8 %, sans compter 71 postes de magistrats temporaires.

      A.– LES RESSOURCES HUMAINES : UNE PROGRESSION FORTE DES EFFECTIFS, CONFIRMÉE EN 2000

En 2000, les juridictions administratives bénéficieront de la création nette de 83 emplois : 40 postes magistrats, 45 postes de fonctionnaires moins 2 suppressions liées aux transformations d’emplois.

      1.– Les effectifs

        a) Les magistrats

    — Les voies de recrutement

Les magistrats des juridictions administratives sont recrutés de trois manières différentes : par le biais de l’École nationale d’administration, par le tour extérieur et par un concours complémentaire. Par ailleurs, un recrutement particulier destiné à pourvoir les cours administratives d’appel lors de leur constitution avait été organisé.

    L’article 7 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l’indépendance des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel prévoit que les magistrats administratifs sont recrutés parmi les anciens élèves de l’École nationale d’administration. Cette voie concerne moins du tiers des membres des tribunaux et cours administratifs.

Depuis 1986, un tour extérieur est prévu pour les conseillers de deuxième et de première classe. Il est ouvert à raison d’un poste sur trois pour les conseillers de deuxième classe et d’un poste sur sept pour les conseillers de première classe aux fonctionnaires de l’État et de la fonction publique territoriale appartenant à un corps de catégorie A justifiant de dix ans de service public et aux magistrats de l’ordre judiciaire. De nombreux fonctionnaires en détachement (une trentaine) sont venus, en outre, renforcer les effectifs des juridictions administratives.

Le législateur a régulièrement autorisé des recrutements exceptionnels afin de faire face à la croissance régulière du contentieux : loi n° 77-1356 du 10 décembre 1977, loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 prorogée par l’article 9 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986, puis par l’article 7 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 et par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative. La loi n° 97-276 du 25 mars 1997 portant dispositions statutaires relatives au corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel a adapté ces dispositions à la réforme du statut des magistrats des tribunaux et cours.

40 % des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel sont issus de ce recrutement extérieur.

    Enfin, signalons la possibilité d’accès des militaires à des emplois de magistrats administratifs en vertu de la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970 qui concerne l’ensemble de la fonction publique.

    Le tableau ci-dessous retrace l’évolution des modes de recrutements depuis 1994.

LES VOIES DE RECRUTEMENT DES CONSEILLERS DE COURS ADMINISTRATIVES D’APPEL
ET DE TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS

(1994-2000)

 

Année

École nationale d’administration

Tour extérieur

Recrutement complémentaire

Détachement (1)

Loi n°70-2

Total

    1994

9

5

14

10

0

38

    1995

10

7

18

19

2

56

    1996

10

6

17

17

2

52

    1997

9

6

19

16

2

52

    1998

12

6

20

22

2

63

    1999

12

7

19

21

2

61

    2000 (2)

12

6

20

12

2

52

(1)  De 1995 à 1999, les 71 magistrats recrutés à titre temporaire au titre de la loi de programme
relative à la justice figurent dans cette catégorie.

(2)  prévisions.

Source : Conseil d’État.

    Ainsi, il convient de relever que le nombre de recrutements demeure relativement élevé depuis 1994. L’essentiel de ces recrutements a été réalisé sur la base de recrutements complémentaires autorisés par des textes législatifs spéciaux ou par le biais de détachements. De fait, le principe selon lequel les magistrats sont recrutés parmi les élèves de l’École nationale d’administration a été mis à mal par les besoins des juridictions et par la stabilité de la taille des promotions de l’École.

— L’évolution des effectifs

    La loi de programme relative à la justice du 6 janvier 1995 prévoyait d’une part, la création de 105 emplois budgétaires de magistrats administratifs et d’autre part, le recrutement de 75 magistrats temporaires. Dans l’hypothèse où seraient créées quatre juridictions, 40 magistrats pourraient y être affectés. Le solde des créations d’emplois serait réparti dans les cours et tribunaux déjà en place.

Le recrutement des 75 magistrats temporaires se fait parmi les professeurs et maîtres de conférences détachés dans le corps des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel. Ce renfort utile est appréciable même s’il met à mal le principe selon lequel les conseillers sont recrutés par le biais de l’École nationale d’administration. Mais à l’heure actuelle, ces postes de magistrats temporaires sont principalement occupés par des administrateurs civils, des sous-préfets, des administrateurs de la Ville de Paris et des magistrats de l’ordre judiciaire.

    Les recrutements prévus par la loi de finances initiale pour 1995 et la loi de finances initiale pour 1996 sont conformes aux dispositions de la loi de programme. En 1996, les effectifs budgétaires étaient de 625, soit une création de 20 postes. Au 31 décembre 1996, les effectifs réels étaient portés à 624, grâce à l’autorisation de 30 recrutements temporaires mais compte tenu du gel de plusieurs emplois. 16 nouveaux emplois de magistrats étaient prévus par la loi de finances pour 1997, ainsi que le recrutement de 11 magistrats temporaires. Au 31 décembre 1997, l'effectif réel atteignait 669 magistrats, compte tenu du nombre de magistrats temporaires et de la levée du gel en juillet 1997. La loi de finances pour 1998 avait prévu la création de 21 emplois de magistrats (5 présidents, 12 premiers conseillers, 4 conseillers) et autorise un recrutement en surnombre temporaire de 15 nouveaux magistrats, conformément aux dispositions de la loi de programme pour la justice. Ces emplois ont été progressivement constitués durant les cinq ans initiaux de la loi quinquennale (1995-1999) et seront résorbés dans les cinq années suivantes (2000-2004).

    La loi de finances initiale pour 1998 a prévu la création de 21 emplois de magistrats, ce qui correspond aux dispositions de la loi de programme appliquée sur six ans. S’y ajoutait le recrutement de 56 magistrats recrutés de manière temporaire.

Pour 1999, 21 nouveaux postes budgétaires de magistrats ont été créés dans les cours et tribunaux. Dans le projet de loi de finances pour 2000, il est prévu de créer 40 emplois nouveaux de magistrats.

On peut observer qu’au 1er juillet 1999, près de 103 conseillers du corps des membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel étaient en situation de détachement, soit près de 14 % des effectifs réels.

S’agissant du Conseil d’État, le nombre de magistrats en détachement atteint, au 7 juillet 1999, le nombre de 68, soit plus de 31,3 % de l’effectif budgétaire. Par ailleurs, il peut être noté que 74 membres du Conseil d’État étaient exclusivement affectés au contentieux en 1998, au lieu de 88 en 1995.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS

(1991-2000)

 

Tribunaux administratifs et
cours administratives d’appel

Conseil d’État

 

Effectifs
budgétaires

Effectifs
réels
(1)

Effectifs
budgétaires
(2)

1991

549

504

218

1992

561

528

218

193

571

528

218

1994

583

566

218

1995

605

597

217

1996

625

624

217

1997

641

651

217

1998

662

716

217

1999 (3)

683

752

217

PLF 2000

723

217

    (1) Les effectifs réels prennent en compte à partir de 1995 les autorisations de recrutement de magistrats temporaires en surnombre (loi de programme).

(2) Les effectifs budgétaires prennent en compte les conseillers d’État maintenus en activité au-delà de l’âge de la retraite (article 8 du décret n° 63-667 du 30 juillet 1963).

(3) prévisions.

Source : Conseil d’État.

    Enfin, il convient de relever que l’article 8 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif a permis qu’à titre exceptionnel, et jusqu’au 31 décembre 1995, les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, lorsqu’ils atteignaient la limite d’âge résultant de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public, sont, sur leur demande, maintenus en activité, en surnombre pour exercer des fonctions de conseiller pendant une durée de trois ans, non renouvelable. L’article 18 de la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits, a prolongé cette possibilité jusqu’au 31 décembre 2004. En 1999, seuls trois magistrats se trouvaient dans cette position, pour un coût total d’environ 1 million de francs.

    Pour être pleinement efficace, l’accroissement du nombre de magistrats doit être accompagné d’un renforcement des greffes et des moyens de fonctionnement.

        b) Le personnel des greffes

En 1995, le ratio personnels de greffe/magistrat était de 1,3. Il est de 2,1 pour les chambres régionales des comptes et de 3 pour les juridictions judiciaires. La loi de programme de 1995 prévoyait de porter ce ratio à 1,5. Elle avait fixé à 200 les emplois supplémentaires d’agents de greffe dont la répartition était de 105 emplois dans les cours et tribunaux déjà en place, 55 dans les nouvelles juridictions et 40 au Conseil d’État.

    En 1991 et 1992, les effectifs budgétaires et réels d’agents de greffe résultaient du transfert d’agents avec les emplois correspondants, du ministère de l’Intérieur au ministère de la Justice, ce qui explique l’égalité entre effectifs budgétaires et effectifs réels. À partir de 1993, une partie de l’augmentation des effectifs budgétaires résultant de créations d’emploi, on observe, entre effectifs budgétaires et effectifs réels, un décalage, dû aux délais nécessaires à l’organisation de concours.

— Tribunaux administratifs et cours administratives d'appel

En 1995, les effectifs budgétaires d’agents de greffe ont été portés à 843 (36 créations d’emplois et 10 emplois transférés par le ministère de l’Intérieur pour accompagner le transfert des compétences en matière de taxation des commissaires enquêteurs). La loi de finances pour 1996 avait créé 28 emplois budgétaires d’agents de greffe pour les tribunaux et cours administratives d’appel. En 1997, 24 nouveaux emplois étaient prévus dans la loi de finances. Le ratio agents de greffe/magistrats, qui était passé à 1,4 en 1995, s’est maintenu en effectifs budgétaires, mais était un peu plus faible en effectifs réels, compte tenu des recrutements temporaires de magistrats. La loi de finances initiale pour 1998 a prévu la création de 32 nouveaux emplois (3 attachés de préfecture, 5 secrétaires administratifs, 10 adjoints administratifs, 11 agents administratifs, 2 conducteurs d'automobile, 1 agent des services techniques).

La loi de finances pour 1999 a pour sa part prévu, comme en 1998, la création de 32 agents de greffe dans les cours et tribunaux. Le projet de loi de finances pour 2000 porte le nombre de créations de postes à 38, ce qui fait passer le nombre de postes budgétaires de greffes pour les tribunaux et les cours d’appel administratifs de 959 à 997.

— Conseil d'État

S’agissant du Conseil d’État, on observe qu’en 1986 et en 1994, année qui précède l’entrée en vigueur de la loi de programme relative à la justice, les effectifs budgétaires se retrouvent à un niveau à peu près identique. Par ailleurs, le gel des emplois a affecté les effectifs réels, qui ont diminué de 7 agents sur la même période. Ce gel a été supprimé en 1994, mais en raison du décalage dû à l’organisation des recrutements, les effets de cette levée de mise en réserve ne se sont fait sentir qu’à partir de 1995.

En application de la loi de programme, ont été créés 9 postes en 1995 et 7 emplois en 1996. Ces emplois, comme ceux prévus par la loi de finances pour 1997 au nombre de 6, permettent de poursuivre les efforts entrepris et de mettre à profit la stabilisation probable des entrées, afin de réduire davantage le stock et ramener le délai de jugement au niveau fixé par la loi de programme, c’est-à-dire un an. 8 nouveaux emplois étaient inscrits dans la loi de loi de finances pour 1998.

La loi de finances pour 1999 a prévu, comme en 1998, la création de 8 postes d’agents de greffe au Conseil d’État. Pour 2000, le nombre de création a été limité à 5.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DES GREFFES DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES


Année

Tribunaux administratifs et cours administratives d’appel

Conseil d’État

 

Effectifs
budgétaires

Effectifs
réels

Effectifs
budgétaires

Effectifs
réels

    1991

    630

    630

    289

    268

    1992

    696

    696

    286

    258

    1993

    759

    709

    286

    256

    1994

    797

    760

    287

    253

    1995

    843

    824,5

    296

    270

    1996

    871

    829

    303

    285

    1997

    895

    853

    309

    289

    1998

    927

    864

    317

    304

    1999 (1)

    959

    950

    325

    310

    2000 (PLF)

    997

    330

(1) prévisions.

Source : Conseil d’État.

      2.– Statut et rémunérations

        a) La réforme du statut des magistrats

    Outre deux mesures, l'une qui complète le régime des incompatibilités et l'autre qui adapte les conditions de l'accès des magistrats aux cours administratives d'appel, la loi du 25 mars 1997 précitée comporte pour l'essentiel des mesures statutaires qui modifient les règles de la loi du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel.

La juridiction administrative s'est profondément transformée à un triple titre : création des cours administratives d'appel, réformes de procédure (extension du domaine des ordonnances, juge statuant seul), attributions nouvelles (injonctions adressées à l'administration, exécution des jugements).

La loi du 6 janvier 1986 a renforcé les garanties d'indépendance des magistrats administratifs, avec en particulier l'institution d'un Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel (CSTACAA), mais le statut des magistrats est resté, dans ses grandes lignes, celui des membres des tribunaux administratifs de 1953.

    Le déroulement des carrières prenait un net retard (atteignant parfois cinq ans selon le Conseil d'État) par rapport aux autres corps de même niveau de recrutement. C'est en grande partie la complexité de la structure des grades actuelle qui est à l'origine de cette situation ; elle a, en effet, été un obstacle au pyramidage régulier des emplois créés.

La loi du 25 mars 1997, entrée en application au 1er janvier 1998, a constitué une étape importante dans l’amélioration du statut des magistrats. Ses dispositions ont été complétées par une série de textes réglementaires :

    · décret n° 97-859 du 18 septembre 1997 portant statut particulier des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

    · décret n° 97-860 du 18 septembre 1997 relatif au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

    · décret n° 97-910 du 6 octobre 1997 portant reclassement des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

    · décret n° 97-1035 du 14 novembre 1997 portant modification du classement hiérarchique des grades et emplois des personnels civils et militaires de l’État relevant du régime général de retraite ;

    · les arrêtés du 14 novembre 1997 fixant l’échelonnement indiciaire applicable aux membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

Ce texte institue une succession de grades plus simple, en rapport avec l'organisation des juridictions et avec les activités d'un corps moins hiérarchisé que celui des administrateurs civils et qui s'apparente davantage aux corps d 'inspection et de contrôle. Le nombre de grades a ainsi été ramené de sept à trois : conseiller, premier conseiller, président.

Les fonctions de rapporteur et commissaire du gouvernement sont confiées aux magistrats des grades de conseiller et premier conseiller. Les fonctions d'encadrement sont regroupées dans le grade unique de président. Des échelons fonctionnels permettent, à l'intérieur de ce grade, de tenir compte de la variété et des caractères spécifiques des diverses responsabilités que l'on trouve à ce niveau. L'accès à certaines de ces fonctions est subordonné à l'inscription sur des listes d'aptitudes annuelles établies sur proposition du CSTACAA.

    La loi fait également évoluer les conditions du recrutement au tour extérieur. Si ce recrutement est maintenu dans sa forme actuelle pour l'accès au grade de conseiller et s'adresse toujours, à ce stade, aux fonctionnaires du niveau attaché ou équivalent, il sera ouvert, pour l'accès au grade de premier conseiller, à des fonctionnaires appartenant déjà à un corps recruté par la voix de l'École nationale d'administration ou assimilé (magistrats judiciaires). Ce type de recrutement sera, de plus, désormais accessible aux professeurs et maîtres de conférence titulaires des universités.

    Remédiant à une forte inégalité, un décret n° 99-601 du 15 juillet 1999 modifiant le décret n° 97-859 du 18 septembre 1997 portant statut particulier des membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel est venu, sur le modèle de ce qui existe pour les magistrats de l’ordre judiciaire recrutés par concours interne ou exceptionnel, assurer aux magistrats administratifs issus du concours interne de l’École nationale d’administration un niveau de traitement au moins égal à celui qu’ils avaient dans leur précédent corps. De la même façon, l’intégration des magistrats issus du troisième concours de l’École nationale d’administration a été améliorée par ce même texte.

        b) Les rémunérations

    Pour les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, un nouveau régime d’attribution des indemnités a été mis en place depuis le 1er janvier 1998. Les indemnités se décomposent désormais en deux parts : une part fixe forfaitaire calculée en fonction de l’indice réel du magistrat et non plus de l’indice moyen du grade comme auparavant, et une part modulable dont l’attribution est décidée par le chef de juridiction.

    Les membres de ce corps perçoivent par ailleurs des indemnités de caractère fonctionnel. C’est ainsi qu’en qualité de commissaire du Gouvernement, ils perçoivent une indemnité de 6.400 francs. En outre, les magistrats du corps des conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, chargés de la présidence des commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (article 1651 du code général des impôts) sont rémunérés en fonction de la durée des audiences.

    Les membres du corps bénéficient également d’une indemnité modulée en fonction des grades, qui se montait depuis 1992 à 10.000 francs annuels pour les conseillers de 2ème et de 1ère classe et à 20.000 francs pour les magistrats des grades supérieurs. Les montants de cette indemnité, versée jusqu’ici par les Services financiers (chapitre 31-94), rattachée par voie de fonds de concours au budget de la Justice, et liée à la prévention du contentieux fiscal qui représente 25 à 30 % du contentieux administratif, s’élèvent actuellement à 10.170 francs pour les conseillers et 21.420 francs pour les premiers conseillers et les présidents. La loi de finances pour 1999 a opéré l’inscription des crédits correspondant à cette dernière indemnité sur le budget du ministère de la Justice pour un montant de 13,92 millions de francs.

Le cumul des indemnités forfaitaires et modulables et des indemnités liées à la prévention du contentieux fiscal porte le taux moyen indemnitaire des magistrats concernés à 37 % en 1998. Il était d’environ 25 % en 1991.

S’agissant du Conseil d’État, il convient de souligner que les rémunérations de ses membres n’ont pas été modifiées depuis 1988.

L’indemnité particulière versée aux membres du Conseil d’État à partir du chapitre 31-92 des crédits des Services financiers repose sur des décisions ministérielles anciennes. La loi de finances pour 1999 a prévu l’inscription de ces crédits sur le budget du ministère de la Justice (chapitre 31-52, article 10) pour un montant de 18,1 millions de francs ; cette indemnité particulière a été intégrée dans le montant total des primes de rendement des membres du Conseil d’État (chapitre 31-52). Le projet de loi de finances voit l’abondement de ce chapitre à hauteur de 7 millions de francs, afin de permettre un alignement des indemnités des membres du Conseil d’État avec celles des membres de la Cour des comptes.

Selon la Cour des comptes () le coût moyen d’un agent des juridictions administratives s’élevait en 1995 à 230.000 francs, alors que le coût moyen d’un agent des juridictions judiciaires atteignait 193.000 francs. Cette différence tient plus à la composition de chaque catégorie de personnel qu’aux principes de rémunération. En effet, le personnel des juridictions administratives est beaucoup moins nombreux et composé d’une forte proportion d’agents de catégorie A.

      B.– LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT MATÉRIEL

Les crédits de fonctionnement ont dû être réajustés à la hausse à partir de 1996 pour faire face à l'augmentation des effectifs prévue par la loi de programme relative à la justice et à la création de trois nouvelles juridictions (tribunal administratif de Melun en 1996 et cour administrative d'appel de Marseille en septembre 1997, cour d’appel de Douai en septembre 1999). Cette tendance ne s’est pas confirmé en 1999, mais a repris pour 2000.

MOYENS MATÉRIELS DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

(Lois de finances) (1)

(en millions de francs)

 
 

1996

1997

1998

1999

PLF 2000

Informatique

Chapitre 34-05, article 31

32,72

29,37

29,70

26,97

28,91

Fonctionnement

Chapitre 34-51

80,52

81,70

83,20

83,70

84,68

Total

113,58

111,07

112,90

110,67

113,59

(1) hors commission pour la transparence financière de la vie politique et transfert consécutif à la suppression de la franchise postale.

Source : Conseil d'État.

 

Les moyens informatiques prévus par le projet de loi de finances pour 2000 sont de 28,91 millions de francs, soit une progression d’environ 7,2 %. Plus des trois quarts de crédits demandés (21,85 millions de francs), et près de 80 % des mesures nouvelles inscrites (13,83 millions de francs) sont consacrés au développement du projet SKIPPER, destiné à remplacer le système de gestion informatisé des requêtes « GUSTAVE ».

Ce système n’avait pas été installé dans les tribunaux administratifs de Paris, Besançon, Bordeaux, Limoges, Pau et Toulouse. Les études et audits techniques effectués sur l’environnement matériel de cette application ont mis en évidence les dysfonctionnements liés au manque de puissance des processeurs, à l’insuffisance des capacités de stockage et à l’obsolescence du matériel.

En 1993 et 1994, l’installation de SKIPPER s’est donc poursuivie avec, dans un premier temps, le remplacement des matériels, inauguré à la fin de 1994 par le tribunal administratif d’Orléans, puis celui de l’application GUSTAVE par SKIPPER. L’installation du site pilote (Versailles) a eu lieu en août 1996. Les travaux préparatoires à l'installation à Paris ont commencé en décembre 1996 et se sont achevés en mars 1997. Le déploiement dans les autres tribunaux a donc pu commencer. Les crédits demandés pour 1997 ont permis de déployer l’application SKIPPER dans quatorze tribunaux.

L’objectif, pour 1999, est de terminer l’opération de mise en place de SKIPPER dans les tribunaux : un tribunal métropolitain, les tribunaux des Antilles et les tribunaux de Nouméa et de Papeete restaient à équiper. Parmi les tribunaux d’outre-mer, seul celui de la Réunion a été équipé. La version de SKIPPER pour les cours administratives d’appel devrait être expérimentée avant la fin de l’année. Au Conseil d’État, l’application a été mise en place en février 1999. L’exploitation du logiciel GUSTAVE s’est définitivement arrêtée en mai 1999 avec l’implantation de SKIPPER au tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Les cours d’appel devraient bénéficier de la mise en service de l’application en 1999.

    En 2000, le déploiement de SKIPPER devra se poursuivre dans les départements et territoires d’outre-mer, ainsi que dans le futur tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

III.– LES INVESTISSEMENTS

    La loi de programme relative à la justice avait prévu l’ouverture de 200 millions de francs d’autorisations de programme pour les juridictions administratives entre 1995 et 1999 avec la mise en place de quatre nouvelles juridictions.

    La loi de finances pour 1995 a procédé à une ouverture de 40 millions de francs en autorisations de programme et 37 millions de francs en crédit de paiement ce qui est conforme à l’ordre de grandeur fixé par la loi de programme. En 1996, 40 millions de francs d’autorisation de programme et 25 millions de crédits de paiement ont été ouverts pour les juridictions administratives. Ces montants respectent également les dispositions de la loi de programme. Pour 1997, 42 millions de francs d’autorisation de programme et 43 millions de francs de crédits de paiement étaient prévus par le projet de loi de finances. En 1998, la loi de finances initiale a inscrit, au chapitre 57-51, 40 millions de francs d'autorisation de programme et 44 millions de francs de crédits de paiement.

La loi de finances pour 1999 a ouvert 51 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement. Entre 1995 et 1999, ce sont 213 millions de francs d’autorisations de programme qui auront été ouvertes, soit un taux de réalisation de la loi de programme de 106,5 %.

      A.– LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS ET LES COURS ADMINISTRATIVES D’APPEL

En 1995, les moyens dégagés ont représenté 26 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement. Les dotations en autorisations de programme ont été portées à 49 millions de francs et les crédits de paiement à 41 millions de francs. L’augmentation très nette des crédits disponibles n’a pas empêché l’amélioration du taux de consommation, qui se situait à un niveau faible en 1994.

En 1996, les dotations, plus faibles notamment pour les crédits de paiement, n’ont pas subi d’importantes baisses compte tenu de l’importance des reports de crédits, et ce malgré des mesures de régulation budgétaire qui ont atteint près de 25 % de la dotation initiale (au 1er août 1996). Le taux de consommation prévisible des crédits de paiement disponibles a très fortement augmenté. Les opérations principales concernaient les aménagements nécessaires à l’installation du tribunal administratif de l’Est parisien à Melun, ainsi que des travaux pour le tribunal administratif de Lille et l’acquisition d’un immeuble afin de reloger le tribunal administratif de Clermond-Ferrand.

    En 1997, les dotations initiales réservées par la loi de finances aux tribunaux administratifs et cours administratives d’appel se sont révélées plus importantes, puisque les autorisations de programme augmentaient de 52 % et les crédits de paiement progressaient de 300 %, notamment grâce à une diminution des crédits d’équipement attribués au Conseil d’État. Les reports d'autorisation de programme à hauteur de 24,8 millions de francs ont permis de la maintenir la dotation en crédits d'engagement à un niveau d'environ 67 millions de francs. Les principales opérations ont porté sur l’achat et l’aménagement de l’immeuble pour la cour administrative d’appel de Marseille et sur la deuxième tranche des travaux de réaménagement du tribunal administratif et de la cour administrative d’appel de Lyon. Le tribunal administratif de Lille, celui d'Amiens ont connu également des travaux d’aménagement.

    En 1998, la loi de finances avait prévu une dotation initiale de 32 millions de francs d'autorisation de programme et de 39 millions de crédits de paiement. Ces fonds ont permis de poursuivre les travaux d'aménagement du tribunal administratif de Lille, d'acquérir l'Hôtel de Bizien pour le relogement du tribunal administratif de Rennes, de financer les travaux de relogement du tribunal de Clermont-Ferrand, d'achever les travaux de la cour administrative d'appel de Lyon, d'entreprendre les études de maîtrise d'œuvre pour la cour administrative d'appel de Douai, de rénover le tribunal administratif de Limoges et de financer la poursuite l'installation de la cour administrative d'appel de Marseille.

En 1999, les 52 millions de francs d’autorisations de programme et les 74 millions de francs de crédits de paiement disponibles (dont 27,7 millions de mesures nouvelles) ont financé comme en 1998 les travaux d’aménagement au tribunal administratif de Lille, la réalisation des travaux nécessaires dans l’Hôtel de Bizien qui abritera le tribunal administratif de Rennes, et l’installation définitive du tribunal administratif de Melun dans l’ancien palais de justice. Enfin, dans cette enveloppe, 17,2 millions de francs ont été réservés à l’installation de la nouvelle cour administrative d’appel de Douai dans l’Hôtel d’Aoust.

    Pour 2000, les 42,2 millions de francs d’autorisations de programme et les 26,3 millions de francs de crédits de paiement, inscrits dans le projet de loi de finances, serviront en très grande partie (29,5 millions de francs d’autorisations de programme) à créer le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Le relogement du tribunal administratif de Rouen bénéficiera également d’une enveloppe importante (7,5 millions de francs).

      B.– LE CONSEIL D’ÉTAT

Le Conseil d’État a bénéficié en 1995 de dotations s’élevant à 14 millions de francs en autorisations de programme et de 11 millions de francs en crédits de paiement. La régulation budgétaire avait ponctionné une partie importante de ces crédits initiaux.

    Le volume des autorisations de programme et crédits de paiement voté pour 1996 était sensiblement le même qu’en 1995. Ces crédits auraient dû permettre le creusement de la cour de l’Horloge, afin d’aménager sur deux niveaux en sous-sol des salles d’archives et de réunions, ainsi que des ateliers.

La baisse sensible des autorisations de programme (4 millions de francs) et des crédits de paiement (3 millions de francs) pour 1997 n’a permis que de mener à bien quelques travaux de réaménagement. Le projet important de creusement de la cour de l’Horloge est par conséquent abandonné.

Pour 1998, les crédits demandés, en augmentation de 100 % pour les autorisations de programme (8 millions de francs) et de 67 % (5 millions de francs) pour les crédits de paiement, ont permis de restaurer et de moderniser le Palais Royal.

En 1999, la progression des crédits inscrits dans la loi de finances initiale (14,3 millions de francs d’autorisations de programme et 13,3 millions de francs de crédits de paiement) et l’importance des crédits reportés autoriseront des travaux d’infrastructures techniques substantiels et, à l’occasion de la célébration du deuxième centenaire du Conseil d’État, des travaux de rénovation de salles d’audiences ainsi que des voies d’accès à ces salles.

Pour 2000, la dotation inscrite dans le projet de loi est en baisse à 7,8 millions de francs d’autorisations de programme et à 7 millions de francs de crédits de paiement. Ces crédits serviront, notamment, au ravalement et à la restauration des façades.

ÉQUIPEMENT DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

(Chapitre 57-51)

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999 (1)

2000 (2)

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Tribunaux et cours d’appel

               

    – Loi de finances initiale

38

40

32

39

36,7

37,7

42,2

43,00

    – Crédits disponibles

79,04

73,24

33,25

58,24

52,11

73,89

    – Consommation

34,31
(43 %)

31,95
(44 %)

23,86

(72 %)

16,63

(29 %)

42,8

(82 %)

57

(77 %)

Conseil d’État

               

    – Loi de finances initiale

4

3

8

5

14,3

13,3

7,8

13

    – Crédits disponibles

10,17

14,03

12,27

10,42

22,55

22,03

    – Consommation

7,9

(78 %)

8,01

(264 %)

6,74

(55 %)

5,92

(57 %)

22,2

(98 %)

22

(100 %)

(1) au 1er septembre 1999.

(2) projet de loi de finances.

Source : Conseil d’État.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 27 octobre 1999, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Patrick Devedjian, rapporteur spécial, les crédits de la Justice.

M. Patrick Devedjian, rapporteur spécial, a tout d’abord jugé la nouvelle procédure d’examen des crédits utile, en ce qu’elle permettait de rassembler l’ensemble des acteurs dans un cadre plus transparent et plus ouvert. Admettant son caractère expérimental, il a estimé qu’elle ne simplifiait cependant pas l’ensemble des procédures puisqu’elle représente une phase supplémentaire d’examen des crédits et que la qualité des communications entre les participants à la commission élargie pouvait être améliorée.

    Appréciant les propos du Rapporteur spécial, le président Augustin Bonrepaux a relevé la nécessité de laisser à cette nouvelle procédure du temps pour s’installer et se perfectionner. Puis, il a regretté que certaines commissions, en organisant des réunions avant l’audition, en commission élargie, du ministre compétent, n’aient pas agi dans le sens de la simplification souhaitée par le bureau de l’Assemblée nationale. Il a souligné que la commission des Finances demeurait compétente au fond et devait donc examiner, fut-ce brièvement, les crédits, puis en débattre et les voter.

Après avoir rappelé qu’il avait largement présenté le budget lors de la réunion de la commission des Lois en date du 20 octobre 1999, le Rapporteur spécial a donc souligné que, malgré des taux de consommation des crédits dégradés ces dernières années, les chiffres des crédits de la Justice pour 2000, avec 3,91 % d’augmentation à 27,29 milliards de francs et avec 1.237 créations d’emplois, dont 212 emplois de magistrats judiciaires, formaient, d’un point de vue quantitatif, un bon budget. Mais, il a critiqué le manque de volonté politique nécessaire à une réforme de la réorganisation du ministère. Ainsi, la réforme de la carte des tribunaux de commerce s’est avérée la plus facile à réaliser, mais elle laisse entier le problème essentiel et lancinant de la carte des juridictions civiles et pénales. Or, ce n’est que par la réforme de cette carte que l’on parviendra à vaincre les inerties qui entraînent un allongement continu des délais de jugement, en particulier devant les cours d’appel et les tribunaux de grande instance. Il a conclu son exposé, d’une part, en demandant à la Commission de ne pas adopter les crédits de la Justice pour 2000, et, d’autre part, en proposant d’adopter l’article 71 augmentant l’unité de valeur de référence pour l’aide juridictionnelle de 132 francs à 134 francs.

Évoquant une situation digne d’être comparée aux descriptions contenues dans Les Misérables, M. Louis Mexandeau s’est dit choqué du constat qu’il a pu faire, lors d’une récente visite de la maison d’arrêt de Caen, de dégradation continue des conditions de détention, de manque patent d’entretien des locaux, et de restriction des espaces de promenade en liaison avec la montée des violences entre détenus.

Félicitant le Rapporteur spécial pour l’objectivité de son rapport relatif aux créations d’emplois de magistrats, tout à fait remarquables, M. Edmond Hervé lui a suggéré d’évoquer, lors du prochain budget, de manière plus précise, les conditions de détention des mineurs, qui s’avèrent aujourd’hui inacceptables, au regard notamment de la proximité avec leur famille. Il serait particulièrement intéressant de faire le point sur les actions de réinsertion par la culture menées par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.

La Commission a adopté, contre l’avis du Rapporteur spécial, les crédits de la Justice et vous demande d’émettre un vote favorable à leur adoption.

Article 71

Revalorisation du montant de l’unité de valeur de référence
pour l’aide juridictionnelle

Texte du projet de loi :

Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée de l’unité de valeur mentionnée au troisième alinéa de l’article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l’aide juridique est fixé, pour les missions achevées à compter du 1er janvier 2000 à 134 francs.

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article 27 dernier alinéa de la loi n° n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique prévoit que la loi de finances détermine annuellement le montant de l’unité de valeur servant à fixer le niveau de la dotation annuelle des barreaux pour les missions d’aide juridictionnelle.

Le montant de l’unité de référence, fixé à 125 francs en 1992, a été porté à 128 francs en 1993, à 130 francs en 1995 et 132 francs en 1998.

Il est proposé de porter l’unité de valeur à 134 francs en 2000, soit une hausse de 2 francs (+ 1,52 %), ce qui représente un coût pour le budget de l’État de 17 millions de francs.

Observations et décision de la Commission :

    Le montant de l’unité de valeur servant de base au calcul de la dotation allouée à chaque barreau en contrepartie des missions d’aide juridictionnelle accomplies pour les avocats du barreau et déterminé par la loi de finances a été fixé par la loi de finances pour 1998 à 132 francs.

    L’article 71 porte ce montant à 134 francs.

    En effet, l’article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 dispose que « l’État affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d’aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau.

    « Le montant de cette dotation résulte, d’une part, du nombre de missions d’aide juridictionnelle accomplies par des avocats du barreau, et d’autre part, du produit d’un coefficient par type de procédure et d’une unité de valeur de référence (...). La loi de finances détermine annuellement l’unité de valeur mentionnée au troisième alinéa du présent article. »

    L’économie du dispositif est donc la suivante :

    – l’unité de valeur est déterminée annuellement, sans indexation, par la loi de finances ;

    – un décret en Conseil d’État détermine les coefficients correspondant aux diverses procédures (décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié) ;

    – l’État détermine pour chaque barreau le nombre de missions d’aide juridictionnelle prévisibles et il verse une provision sur la base de ce nombre, des coefficients et de l’unité de valeur, à chaque barreau, en début d’année ; la liquidation est faite en fin d’année sur la base du nombre de missions achevées.

    La modulation entre barreaux, introduite pour l’aide juridique totale à compter du 1er janvier 1998 a eu pour effet de porter le montant prévisionnel moyen de l’unité de valeur à 142,2 francs.

    L’article 71 en proposant de revaloriser l’unité de valeur de 1,52 % devrait porter le montant prévisionnel moyen à 144,4 francs. Il s’agit du montant hors taxe sur la valeur ajoutée puisque les avocats sont imposables à la TVA pour les prestations réalisées dans le cadre de l’aide juridictionnelle au taux réduit de 5,5 % en vertu de l’article 279 f du code général des impôts (). Les versements aux barreaux comprennent la dotation de base, majorée de la TVA.

    Enfin, on peut rappeler en conclusion que le principal poste de dépense en matière d’aide juridique est précisément constitué par la rétribution des avocats : 1.038 millions de francs en 1998, soit une somme de 30.000 francs en moyenne par avocat.

    Puis, sur proposition du Rapporteur spécial, votre commission des Finances a adopté sans modification l’article 71 et vous demande d’émettre un avis favorable à son adoption.

*

* *

______________

N°1861-35. - Rapport de M. Patrick Devedjian, au nom de la commission des finances, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Justice.

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© Assemblée nationale

() Le budget de la Justice est passé de 14,8 milliards de francs en 1988 à 27,2 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 2000.

() Ce chiffre ne tient pas compte des crédits correspondant aux charges de pension qui sont inscrits dans le budget voté, mais qui sont transférés au début de chaque année sur le budget des Charges communes.

() Introduction de la mixité dans les tribunaux de commerce décidée le 31 mai 1999, décret n° 98-1232 du 29 décembre 1998 relatif au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises et le décret n° 85-1389 du 27 décembre 1985 relatif aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d’entreprise ; circulaire du 26 janvier 1999 portant mesures urgentes d’application du décret du 29 décembre 1998 relatif au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises et du décret du 27 décembre 1985 relatif aux administrateurs judiciaires, aux mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et aux experts en diagnostic d’entreprises ; décret n° 99-659 du 30 juillet 1999 portant suppression de tribunaux de commerce, décret n° 99-818 du 16 septembre 1999 modifiant le code de procédure pénale (deuxième partie : Décrets en Conseil d’État) et le nouveau code de procédure civile et relatif aux modalités de désignation et d’indemnisation des administrateurs ad hoc.

(1) Cour des comptes, Rapport sur l’exécution des lois de finances pour l’année 1997, page 366.

(1) Hors services judiciaires, administration pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse et juridictions administratives.

(1) Rapport du comité de réorganisation et de déconcentration du ministère de la Justice, février 1994.

(1) Lettre du le président et du procureur du tribunal de grande instance de Paris au Garde des Sceaux, ministre de la Justice en date du 6 octobre 1997.

(1) Cette circulaire a été publiée au Bulletin officiel du ministère de la Justice.

() Cf. circulaire de politique pénale du 15 juillet 1998 prise dans le cadre des mesures gouvernementales arrêtées par le conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998.

() Il existe sur le territoire métropolitain 30 cours d’appel, 175 tribunaux de grande instance, 462 tribunaux d’instance, 227 tribunaux de commerce et 264 conseils de prud’hommes.

(2) Décret n° 94-259 du 25 mars 1994, décret  n° 94-730 du 6 mai 1994, décret n° 94-378 du 9 mai 1994, décret n° 95-582 du 5 mai 1995, décret n° 96-1019 du 26 novembre 1996, décrets n° 97-96, 97-97 et 97-98 du 5 février 1997, décret n° 97-123 du 6 février 1997.

(1) Rapport entre le nombre de détenus et le nombre de places de détention mises en service au 1er juillet 1999.

() Ministère de la Justice, réponse au questionnaire parlementaire sur les crédits de la Justice pour 2000.

(1) 92 établissements sont installés dans des immeubles construits depuis un siècle ou plus et dont certains sont des anciens biens d’Église transformés en prison pendant la période révolutionnaire.

() Journal officiel du 8 novembre 1998.

() Bordeaux, Douai, Lyon, Marseille, Nancy, Nantes, Paris.

() La loi de finances par 1999 avait été marquée par le transfert à partir du budget des services financiers du ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de 32 millions de francs d’indemnités auparavant rattachés par voie de fonds de concours au budget de la Justice, ce qui avait expliqué une grande partie de la forte augmentation enregistrée l’an passé.

() Voir le rapport de notre collègue Yves Tavernier, Les services des visas, parents pauvres des Affaires
étrangères, XIème législature, document Assemblée nationale n° 1803, 1999.

() Conseil d’État, Rapport public 1999, jurisprudence et avis de 1998, Paris, La Documentation française,
Études et documents du Conseil d’État n° 50, 1999, page 175.

() Décret n° 99-435 du 1er septembre 1999 portant création d’une cour administrative d’appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

() Article 11 : « Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'État fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux. S'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'État peut, soit renvoyer l'affaire devant la même juridiction statuant, sauf impossibilité tenant à la nature de la juridiction, dans une autre formation, soit renvoyer l'affaire devant une autre juridiction de même nature, soit régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie. Lorsque l'affaire fait l'objet d'un deuxième pourvoi en cassation, le Conseil d'État statue définitivement sur cette affaire. »

(1) Cour des comptes, Rapport sur l’exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l’exercice 1995, page 492.

() Article 279 f du code général des impôts : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne… f. les prestations pour lesquelles les avocats, les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation et les avoués sont indemnisés totalement ou partiellement par l’État dans le cadre de l’aide juridictionnelle. »