Fabrication de la liasse
Non soutenu
(jeudi 15 novembre 2018)
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I. – Les articles 199 ter B, 220 B et 244 quater B du code général des impôts sont abrogés.

II. – Les dispositions du I s’appliquent à compter du 1er janvier 2020.

Exposé sommaire

La France insoumise soutient la recherche. Cependant, loin d’être un outil au service de la recherche, le crédit impôt recherche (CIR) est un dispositif dit « d’attractivité fiscale » vanté en tant que tel à l’extérieur de nos frontières.

Plafonné au niveau d’une filiale mais pas au niveau du groupe, il est souvent utilisé dans des montages d’évasion fiscale : les groupes l’utilisent, puis cèdent leurs brevets à une de leurs filiales établie dans un paradis fiscal et déduisent des redevances de leur bénéfice imposable en France. Inefficace et utilisé de manière abusive selon un rapport de la Cour des comptes datant de 2013, c’est donc une double peine pour les finances publiques.

Si nous sommes évidemment favorables au développement de la recherche, elle doit se faire toujours avec un sens aigu de l'intérêt général. Or, les entreprises, et notamment les laboratoires, (voire les banques, qui en bénéficient aussi pour le développement de modèles en mathématiques appliquées) ne semblent pas nécessairement avoir le bien commun en tête. Un exemple : chaque année depuis dix ans, l’entreprise pharmaceutique Sanofi percevrait entre 110 et 150 millions d’euros via le Crédit impôt recherche. Une subvention publique importante, qui ne se traduit pourtant pas, bien au contraire, par un effort supplémentaire en matière de recherche. En dix ans, Sanofi a ainsi supprimé deux mille postes de chercheurs en France, et quatre mille dans le monde. Sanofi a également détruit début 2018, à Montpellier, un bâtiment neuf, le DI50, parce qu’il ne correspondait plus à la stratégie du groupe. Ce bâtiment, qui n’avait jamais servi et venait d’être achevé, avait coûté 107 millions d’euros. Soit un peu moins que ce que touche chaque année Sanofi au titre du CIR. En 2015, Emmanuel Macron s'exprimait ainsi pour défendre le crédit impôt recherche : "si on n’avait pas ce Crédit d’impôt recherche plébiscité par toutes les entreprises, petites et grandes, Sanofi aurait mis depuis des années toute sa recherche, et sans doute même ses quartiers généraux, hors de France".  Le manque de clairvoyance de l'actuel Président de la République ne nous étonne pas. Mais l'entêtement dans une voie qui ne bénéficie clairement pas au pays nous indigne. 

En outre, le coût pour les finances publiques de ce crédit d'impôt a explosé, comme le relève le dernier rapport sur l’application des dispositions fiscales rédigé par le rapporteur général de la commission des finances Joël Giraud et publié en juillet 2018. Celui-ci aurait été de 6,27 milliards en 2017, soit 560 millions de plus que ce qui était inscrit dans le budget. Ce rapport précise également que les prévisions pour 2018 (5,8 milliards) risquent d’être dépassées. Tout cela alors que les estimations prévoyaient un coût de 2,8 milliards pour ce crédit d’impôt lors de sa mise en place.

Cela est à mettre au regard des 2 milliards que coûterait une rénovation des universités et un plan massif de construction de logements étudiants ( 15 000 par ans ).

De plus, ce dispositif souffre d’une répartition trop inégale : en 2012 les grands groupes s’accaparent près de 34% de la créance du CIR, soit près d’1,8 milliard d’euros.

Le rapport de la Cour des comptes pointait également les failles du dispositif et la prolifération de montages frauduleux destinés à capter le CIR : multiplication de sociétés de conseil proposant aux entreprises de se procurer de faux dossiers clés en main, plagiat d’articles existant en anglais ayant un lien avec le champ d’activité de l’entreprise, documents protégés par le secret des affaires et travestis en « notes internes ».

Ces mêmes cabinets de conseil se rémunèrent en exigeant en contrepartie un pourcentage du crédit d’impôt décroché par l’entreprise, un dévoiement manifeste de l’esprit et du but initial du CIR.

Ainsi, selon l’économiste Dominique Plihon, professeur à l’Université Paris XIII : « 40% des dépenses déclarées par les entreprises pour être exonérées et profiter du CIR n’ont pas de rapport direct avec la recherche et le développement. Ce sont plutôt des dépenses commerciales et administratives. »

Et tout cela en l’absence de contrôles réguliers de la part de l’administration fiscale : le fisc n’est en capacité de contrôler, faute de moyens humains et financiers suffisant, que 4% du total des entreprises bénéficiant du CIR.

Néanmoins, le CIR concernant un nombre important d’entreprises (près de 22 200) il nous semble opportun de compenser son abrogation en investissant massivement dans la Recherche et Développement afin de soutenir l’innovation et d’accompagner nos entreprises en ce sens.

Cet amendement propose donc de mettre fin à ce dispositif. Cela permettra d’augmenter le budget alloué à l’Enseignement Supérieur et la Recherche, comme prévu dans notre programme l’Avenir en Commun.