Fabrication de la liasse
Rejeté
(jeudi 31 octobre 2019)
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Le chapitre VII du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1617‑6‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1617‑6‑1. – I. – À partir de 2020, les fonctions d’ordonnateur et de comptable public sont compatibles.

« II. –  le comptable public local devient un commissaire des comptes publics locaux et ne conserve comme missions que celles visant à garantir le respect des textes. Il ne prend plus en charge ni les titres de recettes et les mandats de dépenses, ni la comptabilité de la collectivité et n’assume plus les fonctions de caissier. Son action est entièrement vouée à garantir la conformité aux règles budgétaires, à la réglementation financière, à la conformité aux principes généraux de la comptabilité d’exercice et aux normes ainsi qu’aux instructions comptables.

« III. – Un décret précise les conditions d’application du présent article. »

Exposé sommaire

À l’heure où l’argent public est de plus en plus rare, toute évolution des textes et toute optimisation des process visant à réduire les coûts de fonctionnement de l’État doivent être mobilisées.

Dans ce cadre, le principe de séparation des fonctions d’ordonnateur et de comptable, qui remonte à la révolution, apparaît comme obsolète et constitue un facteur de coûts de gestion inutiles qu’il convient de supprimer.

Par projection du nombre de collaborateurs dédiés à l’activité comptable afférente dans les collectivités territoriales de 45 000 habitants, l’économie annuelle potentielle pour le budget de l’État est de l’ordre de 10 000 postes, soit environ 210 000 000 euros si l’on considère que chacun est rémunéré au SMIC : on peut donc plutôt viser à une économie comprise entre 250 000 000 euros et 300 000 000 euros.

Deux raisons essentielles motivent jusqu’alors la séparation ordonnateur/comptable : la sécurité dans la gestion des fonds publics et une division rationnelle du travail.

Généralement, deux personnes interviennent dans les processus de la dépense et de la recette :

– l’ordonnateur qui prend la décision de la dépense et constate la naissance de la créance ;

– le comptable qui opère un certain nombre de contrôles et est chargé du paiement et du recouvrement.

Certes, il ne faut pas négliger le fait que le principe de séparation des fonctions fait partie du « patrimoine génétique » du droit financier français.

Mais si cette séparation n’a pas évolué depuis plus de deux siècles, malgré les évolutions techniques de plus en plus rapides, et la nécessité de gagner en productivité et en efficacité, c’est surtout par crainte de l’interprétation de cette évolution par une opinion publique déjà très méfiante à l’égard de ses institutions et de ses représentants, et particulièrement sourcilleuse quant à l’usage fait de ses impôts.

Pour autant, cette réforme est nécessaire et les arguments ne manquent pas : excès de formalisme, lourdeur des procédures, redondance des tâches et des contrôles, consommation inutile de personnel, inadaptation des solutions informatiques, etc.

Toutes ces critiques confortent la nécessité d’évolution, et ce d’autant plus que l’introduction de la comptabilité d’exercice est certainement l’élément qui rend le plus obsolète la séparation entre les ordonnateurs et les comptables : l’étanchéité qui a prévalu jusqu’à présent entre ces deux acteurs doit céder la place à la complémentarité car il leur faut désormais maîtriser des processus et non plus s’échanger des bordereaux de titres ou de mandats.

Par ailleurs, l’élément, aujourd’hui, le plus pénalisant dans la séparation de fonction réside certainement dans le fait qu’il conduit les ordonnateurs et leurs services à se désintéresser de la comptabilité, d’où les retards pris par les gestionnaires publics par rapport à leurs homologues privés dans l’utilisation des informations qu’ils peuvent en tirer.

La fin de la séparation entre l’ordonnateur et le comptable permettra également de réduire considérablement les retards de paiements auxquelles sont confrontées les entreprises travaillant pour les collectivités.

Dans cette hypothèse, et pour éviter le travers de l’autocontrôle, le comptable public local deviendra un commissaire des comptes publics locaux, ne conservant comme missions que celles visant à garantir le respect des textes : la réglementation financière comme les principes et les référentiels comptables.

Il cesserait donc de co-piloter la fonction financière avec l’ordonnateur : il ne prendrait plus en charge les titres de recettes et les mandats de dépenses, il ne tiendrait plus la comptabilité de la collectivité et n’assumerait plus les fonctions de caissier.

Son action serait entièrement vouée à garantir la conformité aux textes : conformité aux règles budgétaires et à la réglementation financière, conformité aux principes généraux de la comptabilité d’exercice, aux normes et aux instructions comptables.

Son travail se rapprocherait ainsi de celui d’un commissaire aux comptes. Il s’organiserait autour d’un dossier permanent (par collectivité ou groupement intercommunal) et s’exercerait, tout au long de l’année, au travers d’interventions qu’il conduirait sur place et sur pièces afin de s’assurer, notamment, de la qualité du contrôle interne budgétaire et comptable, de la fiabilité des procédures de recettes et de dépenses, éventuellement de la maîtrise des flux de trésorerie et de la façon dont les comptabilités des engagements, des mandatements et des titres, la comptabilité patrimoniale, etc., sont tenues.

En fin d’exercice, le comptable public local serait tenu de rédiger un rapport annuel dans lequel il émettrait notamment une opinion sur la conformité réglementaire des documents financiers (budgétaires et comptables) produits par l’ordonnateur à son assemblée délibérante. Ce rapport annuel ferait partie des documents obligatoires à transmettre au juge des comptes.

Tel est l’objet de cet amendement