- Texte visé : Texte de la commission sur le projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière (n°3196)., n° 3382-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Le 4° du I de l’article 1649 AE du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le mot : « pénal », la fin du premier alinéa est ainsi rédigé : « notifie à tout autre intermédiaire l’obligation déclarative qui lui incombe. » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé.
La directive européenne (UE) 2018/822 du 25 mai 2018 (dite « DAC6 ») impose aux intermédiaires, qui conçoivent, commercialisent ou mettent en œuvre un dispositif transfrontière, de déclarer à l’administration fiscale « les opérations de planification fiscale présentant un caractère potentiellement agressif. »
Toutefois quand l’intermédiaire est un avocat, son secret professionnel lui interdit une telle déclaration.
La directive est déjà transposée par voie d’ordonnance depuis le 21 octobre 2019, pour une entrée en vigueur au 1er juillet 2020.
Il convient donc d’exclure les avocats de ce mécanisme de dénonciation, comme l’y invite d’ailleurs la directive, dans son considérant §8 qui dit que : « dans certains cas, l’obligation de déclaration ne serait pas applicable à un intermédiaire en raison du secret professionnel applicable en vertu du droit » ... « Il serait donc nécessaire que l‘obligation de déclaration incombe alors au contribuable qui bénéficie du dispositif ».
Contraindre l’avocat à révéler des informations relatives à son client serait parfaitement contraire aux principes cardinaux de la profession d’avocat et occasionnerait de nombreux contentieux. Lui imposer en outre d’alerter les « autres intermédiaires » constituerait une autre atteinte au secret professionnel que l’avocat doit à son client. Il deviendrait en effet le délateur auprès de tiers, d’informations dont personne ne sait l’usage qui en serait fait ultérieurement.
Enfin, le fait d’imposer, comme le prévoit l’ordonnance, à l’avocat d’informer son client au moyen d’un courrier ayant date certaine, lui enjoignant de se conformer à une obligation déclarative pourrait se retrouver dans un dossier de redressement fiscal, voire dans un dossier pénal. Les perquisitions sont usuelles en la matière, et l’avocat pourrait être amené à produire lui-même cette déclaration pour se défendre lui-même. Il deviendrait alors le dénonciateur de celui qu’il a conseillé, et qu’il doit défendre,une situation ubuesque et inconcevable.
Cette situation serait en parfaite contradiction avec les principes du « procès équitable », comme l’égalité des armes, l’interdiction de l’auto-incrimination, et le secret professionnel, que garantit la Cour européenne des droits de l’homme. Cette même Cour de Strasbourg a d’ailleurs jugé que même pour la lutte anti-blanchiment, l’avocat n’a « pas » à faire de déclaration de soupçon auprès TRACFIN, mais uniquement auprès de son bâtonnier. Cet amendement s’inspire d’une proposition du Barreau de Paris.