DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 51

Réunion du jeudi 24 septembre 1998 à 9 heures 30

Présidence de M. Henri Nallet, Président

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1er octobre 1998

I. Examen de propositions d'actes communautaires

Le Président Henri Nallet a indiqué que trois propositions d'actes communautaires avaient fait l'objet, au cours de l'été, de la procédure d'urgence : E 1123 (suspension des droits autonomes du tarif douanier commun pour certains produits de la pêche), E 1126 (interruption de certaines relations économiques avec l'Angola) et E 1138 (droit autonome et contingent tarifaire applicables à certaines importations des Etats Unis). Il a évoqué les conditions dans lesquelles il avait accepté, après analyse de ces textes et vérification de leur caractère d'urgence, la levée de la réserve d'examen parlementaire, ce qui a permis leur adoption par le Conseil respectivement le 30 juillet, le 28 juillet et le 14 août.

La Délégation a estimé que les textes suivants n'appelaient pas un examen plus approfondi, en l'état actuel de ses informations : E 1089 (accord avec le Canada sur les mesures sanitaires applicables au commerce d'animaux vivants et de produits animaux) ; E 1114 (contrôle des navires pour la conservation de la faune et de la flore marines de l'Antarctique) ; E 1120 (accord fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière avec Madagascar) ; E 1121 (cadre commun pour les signatures électroniques) ; E 1122 (TVA sur l'or d'investissement). Elle a demandé à M. Alain Barrau de préparer une communication sur le premier programme-cadre en faveur de la culture pour les années 2000-2004 (document E 1106).

S'agissant du document E 1105, le Président a indiqué qu'il s'agissait d'une proposition de directive visant à garantir un minimum d'imposition effective des revenus de l'épargne sous forme d'intérêts à l'intérieur de la Communauté. Ce texte tend à coordonner les politiques fiscales des Etats membres, afin d'introduire une imposition effective des revenus versés à des particuliers résidant dans un autre Etat membre de l'Union. Actuellement, seuls quatre Etats membres (Grèce, Italie, Portugal et Royaume-Uni) imposent les revenus de l'épargne versés à des non-résidents. M. Gérard Fuchs a salué le caractère novateur et la grande portée de cette mesure attendue depuis l'instauration de la libre circulation des capitaux en 1988. Estimant qu'elle appelait un examen plus approfondi, il a suggéré à la Délégation, qui l'a suivi, de lui consacrer un rapport d'information.

Présentant le document E 1118 (renforcement des initiatives communautaires RECHAR II et RESIDER II), le Président a indiqué que la Commission européenne demandait le transfert d'un montant maximum de 60 millions d'écus du budget opérationnel de la CECA au budget général de l'Union européenne en vue de renforcer deux initiatives communautaires financées par les fonds structurels et ayant pour objet de favoriser la reconversion économique des bassins sidérurgiques et charbonniers. M. Gérard Fuchs a souligné que le Traité CECA devait prendre fin en 2002 et qu'il convenait par conséquent de s'interroger sur les incidences financières de cette expiration. La Délégation a donc souhaité que le Gouvernement la tienne informée des réflexions relatives à la dévolution future des réserves de la CECA. Elle lui demande en outre de faire en sorte que les conditions de financement des actions de reconversion devant poursuivre leurs effets au delà de 2002 soient réexaminées dans la perspective de l'expiration du traité CECA.

S'agissant du document E 1124 relatif à l'assistance mutuelle en matière de recouvrement de créances et destiné à substituer un dispositif communautaire aux conventions fiscales bilatérales, le Président Henri Nallet a estimé que ce texte justifiait un réexamen ultérieur en fonction du déroulement des négociations.

Abordant le document E 1125 relatif à la coopération financière et technique avec les territoires occupés, il a souligné que ce texte visait à renouveler, pour une période de huit ans, l'assistance financière octroyée à l'autorité palestinienne, afin de marquer l'engagement de l'Europe en faveur du processus de paix. Après les observations de M. Pierre Lellouche, M. Gérard Fuchs et du Président, la Délégation a souhaité être informée de l'utilisation effective de ces fonds.

Abordant le document E 1135, le Président Henri Nallet a indiqué que ce texte tendait à incorporer dans la législation communautaire de nouvelles règles en matière de crédits à l'exportation définies par l'OCDE. Cette nouvelle réglementation garantira l'octroi des crédits en fonction de la qualité et du prix des produits, et non des avantages découlant de subsides. M. François Guillaume ayant émis des doutes sur la volonté des Etats-Unis de respecter cette nouvelle discipline commune, le Président a suggéré que cette question soit examinée dans le cadre du rapport de M. Jean-Claude Lefort sur les relations économiques entre les Etats-Unis et l'Europe.

La Délégation a considéré que les textes suivants n'appelaient pas un examen approfondi : E 1127, concernant le régime tarifaire applicable à l'importation de certains types de compléments alimentaires originaires de Suisse ; E 1130, relatif au statut des fonctionnaires des Communautés européennes ; E 1131, autorisant la République Portugaise à appliquer une mesure dérogatoire à la sixième directive TVA ; E 1136, concernant la conclusion, au nom de la Communauté européenne, des résultats des négociations de l'Organisation mondiale du commerce sur les services financiers.

Les documents E 1139 et E 1141, tendant à moderniser la réglementation applicable aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), feront l'objet d'un examen ultérieur, afin que la Délégation soit en mesure de vérifier que les assouplissements destinés à faciliter l'activité des sociétés de gestion s'accompagnent de garanties suffisantes pour les investisseurs et les épargnants.

Elle a également décidé de statuer ultérieurement, à un stade plus avancé des discussions communautaires, sur le document E 1140, qui tend à modifier la réglementation des transports combinés de marchandises.

La Délégation a pris acte de la transmission du document E 1143, portant prorogation d'une mesure dérogatoire temporaire de nature fiscale applicable à l'Allemagne et à l'Autriche.

M. Gérard Fuchs a présenté le document E 1145, relatif à trois recommandations de la Banque centrale européenne en vue de règlements du Conseil relatifs respectivement aux réserves obligatoires, à la collecte d'informations statistiques et aux sanctions que pourrait infliger la BCE en cas de violation de ces règlements.

Le premier texte, qui concerne l'application de réserves obligatoires, suscite des débats au sein des Etats membres, au sujet du niveau de ces réserves, dont le taux pourrait être fixé entre 1,5 % et 2,5 % des dépôts, et au sujet de leur rémunération. Le texte proposé est jugé acceptable pour la France, les pertes de revenus étant d'un niveau raisonnable.

La deuxième proposition de règlement établit un système de collecte d'informations qui permettra à la BCE de disposer de séries statistiques économiques et monétaires homogènes. Le troisième texte, qui donne à la BCE le pouvoir d'infliger des sanctions en cas de non-respect des obligations prévues par les deux premiers règlements, pose un double problème de caractère juridique et politique. Une analyse juridique approfondie est nécessaire pour vérifier que les procédures relatives aux sanctions et aux voies de recours offrent toutes les garanties nécessaires. La Banque de France, sans être hostile au texte, souhaite en examiner les dispositions plus en détail. Sur le plan politique, la question se pose de savoir quel rôle les quatre Etats membres de l'Union qui n'appartiennent pas à la zone euro sont autorisés à jouer dans le processus d'élaboration des textes relatifs à l'euro. Les mécanismes d'association prévus par le Traité et les statuts du SEBC présentent à cet égard d'importantes zones d'ombre. M. Gérard Fuchs a donc proposé à la Délégation de poursuivre son travail de réflexion sur ces projets de textes et sur les mécanismes d'association des quatre pays « out » à l'union monétaire (Danemark, Grande-Bretagne, Grèce, Suède).

M. Pierre Lellouche a soulevé, à propos de ces textes, la question de la subsidiarité. Tout en comprenant la nécessité d'harmoniser la gestion des réserves obligatoires et d'établir un système de collecte des statistiques, il a relevé que la mise en oeuvre de ces mesures aboutissait à une gestion « en direct » par la Banque centrale européenne et à la disparition du rôle « écran » des institutions financières nationales. Il a rappelé les garanties données par le Premier ministre, lors d'un débat à l'Assemblée nationale, sur la création d'un organe politique - dont on ne trouve pas trace dans le Traité d'Amsterdam - apte à constituer un contrepoids à la BCE et à permettre un exercice en commun de la souveraineté monétaire.

Après avoir indiqué, en réponse à une question de M. Yves Fromion, que les réserves obligatoires fixées par la BCE se substitueront aux réserves obligatoires nationales, M. Gérard Fuchs a rappelé que les trois propositions de règlements élaborées par la BCE seraient soumises à l'approbation du Conseil de l'Union européenne, selon les procédures communautaires habituelles. Il a distingué la décision relative à la sanction - qui relève de la BCE, selon le Traité - et son exécution, dont les modalités restent à déterminer. En ce domaine, il lui paraît souhaitable que les banques centrales nationales bénéficient d'une délégation de compétence.

M. François Guillaume a indiqué que, s'il est favorable à la création de la monnaie unique, il se prononce contre ses modalités de gestion : il lui paraît dangereux de confier celle-ci à une Banque centrale européenne indépendante ayant pour seul objectif la stabilité de l'euro, quelles qu'en soient les conséquences sur l'activité économique et sur l'emploi. Si certains considèrent le Conseil de l'euro comme l'embryon d'un pouvoir politique, il faut bien reconnaître que le traité en vigueur n'en fait pas mention, alors qu'il décrit en détail les attributions de la BCE. C'est pourquoi on devrait se préoccuper de donner un pouvoir de décision au Conseil de l'euro. La Délégation pourrait débattre de ces questions et s'interroger sur le point de savoir s'il y a lieu de modifier le Traité.

M. François Loncle a souhaité que les pays hors zone euro ne soient pas trop tenus à l'écart des dispositifs dont bénéficient les Onze, de telle sorte qu'ils soient en mesure de les rejoindre dans les meilleurs délais.

M. Gérard Fuchs a indiqué qu'il proposait à la Délégation d'approfondir ses travaux dans trois directions : les sanctions susceptibles d'être infligées par la BCE, en précisant les rôles respectifs de la BCE et des banques centrales nationales ; les procédures de recours contre les sanctions ; la répartition des attributions entre les Onze et les Quinze pour les affaires liées à l'euro.

A l'issue de ce débat, la Délégation a décidé de demander le maintien de la réserve d'examen parlementaire sur le document E 1145 et a chargé M. Gérard Fuchs d'élaborer une proposition de résolution.

II. Informations relatives à la Délégation

La Délégation a chargé M. Gérard Fuchs d'établir un rapport d'information sur la proposition de directive visant à garantir un minimum d'imposition effective des revenus de l'épargne sous forme d'intérêts (E 1105).

Elle a demandé à M. Alain Barrau de présenter une communication sur le premier programme-cadre de la Communauté européenne en faveur de la culture (E 1106).