Compte rendu de la mission effectuée par M. Alain Barrau,
Président de la délégation pour l’Union européenne de l’Assemblée nationale,
en République Tchèque, du 4 au 6 mai 2000

Le Président de la Délégation a effectué du 4 au 6 mai 2000 une visite officielle en République tchèque à l’invitation de son homologue Jaroslav Zverina qui préside la Commission pour l’intégration européenne de la Chambre des députés. Grâce à l’appui très actif des services de l’Assemblée tchèque et de l’ambassade de France, ce déplacement aura permis d’avoir des contacts auprès de :

– la Présidence de la République (M. Pavel Fisher, conseiller du Président Havel) ;

– du Gouvernement (M. Pavel Telicka, Secrétaire d’État chargé des affaires européennes) ;

– du Parlement (Jaroslav Zverina et ses collègues membres de la Commission pour l’intégration européenne ; Mme Petra Buzkova, Vice-présidente de la Chambre des députés) ;

– et de la Commission européenne (M. Ralf Preyer, Conseiller de la Représentation de la Commission à Prague) ;

Un déjeuner avait été en outre organisé par l’ambassadeur de France à Prague avec des hommes d’affaires français travaillant en République tchèque : les échanges de vues avec ces banquiers et chefs d'entreprise, qui sont en contact direct avec la réalité économique tchèque, ont été des plus enrichissants.

Les entretiens politiques avec les personnalités tchèques ont d’abord porté sur le programme de la présidence française – qui suscite manifestement de fortes attentes – et sur la question de l'Autriche. On sait que le Président Havel a fermement soutenu la position prise par les Quatorze. Il n’a pas hésité dans ses déclarations publiques à considérer que l'entrée du FPOe dans le gouvernement autrichien constituait un " grand défi pour l'Union européenne " et que l'Europe devait s'y opposer " radicalement et sans tarder ". Jorg Haïder a riposté en menaçant la République tchèque d’une fermeture des frontières à la libre circulation des personnes. Cette déclaration parfaitement inacceptable a été très mal ressentie du côté de Prague. Il ne faudrait pas que les pays candidats deviennent les otages de l’affaire autrichienne. Un débat existe toutefois à l’intérieur de la classe politique tchèque sur l’attitude à avoir vis–à–vis de l’Autriche : comme j’ai pu le constater lors des discussions avec des parlementaires tchèques, les sociaux–démocrates approuvent pleinement la fermeté des Quatorze – tandis que les partisans de Vaclav Klaus semblent plus réservés.

Mais c'est évidemment la perspective de l'entrée de la République tchèque dans l'Union européenne qui a constitué le sujet essentiel des discussions. Le Gouvernement tchèque estime avoir accompli des efforts considérables pour mettre le pays en situation d'adhérer à l'Union : un plan national d'adoption de l'acquis communautaire (PNAA) a été adopté le 31 mai 1999 ; soixante lois transposant plus de quatre cents directives sont déjà entrées en vigueur. L'objectif clairement affiché est d'une adhésion rapide à la date du 1er janvier 2003.

Ce point de vue n’est pas tout à fait celui de la Commission qui n'a pas hésité, dans ses deux derniers rapports sur les progrès réalisés par la République tchèque dans sa préparation à l'adhésion (rapports d’octobre 1998 et de novembre 1999), à mettre en exergue les difficultés rencontrées par ce pays pour intégrer l’acquis communautaire et moderniser ses structures économiques et administratives. La République tchèque manque d'appareil d'État capable de faire appliquer les nouvelles règles législatives et administratives.

La mission effectuée à Prague a permis de confirmer cet état de fait mais aussi de constater que, si ce pays, souvent présenté comme un des plus aptes à adhérer, rencontre d’incontestables difficultés à accomplir les efforts demandés pour devenir membre à part entière de l'Union, il n'en reste pas moins une des " valeurs sures " du groupe des pays candidats. Quels que soient les retards pris pour intégrer l'acquis communautaire, et pour le faire appliquer, la République tchèque a de grandes chances de faire partie de la première vague des pays qui rejoindront l’Union. Il faut d'ailleurs noter que les critiques stimulantes qui ont pu être adressées aux responsables tchèques ont eu pour effet de les inciter à relancer un certain nombre de réforme structurelles qui étaient jusqu’ici " au point mort ". Cet effet de rattrapage a déjà eu de bons résultats et le prochain rapport de la Commission, attendu pour juillet 2000, devrait être plus positif.

A – Les points faibles de la République tchèque dans sa route vers l’adhésion

1) Une reprise encore imparfaite de l'acquis communautaire

Il s’agit tout d’abord de la mise en place du marché intérieur. Si les conditions de la libre circulation des marchandises ont été réglées de manière favorable, de nombreuses incertitudes demeurent en ce qui concerne les services et les capitaux. Les efforts entrepris pour aligner la législation nationale sur le droit communautaire restent ainsi insuffisants dans des domaines comme :

– la protection des droits de la propriété intellectuelle. Des vides juridiques importants demeurent (dans le secteur informatique notamment) tandis que la mise en œuvre de la législation existante souffre des capacités limitées de la police et des procureurs ;

– l’audiovisuel qui relève d'un cadre législatif non compatible avec la directive " télévision sans frontières ". La République tchèque a d'ailleurs demandé une période transitoire – jusqu’au 1er janvier 2005 – pour appliquer aux chaînes de télévision les quotas de diffusion d’œuvres européennes et d’œuvres de producteurs indépendants.

Comme beaucoup d’autres pays candidats, la République tchèque peine à aligner ses règles protectrices de l’environnement. Pendant que j’étais à Prague, la commissaire européenne en charge de l’environnement, Mme Margot Walström effectuait en République tchèque une visite officielle au cours de laquelle elle a ouvertement critiqué le retard pris pour intégrer les normes communautaires. Ce constat ne saurait être contesté : il est indéniable que dans des domaines aussi importants que la qualité de l’eau et la gestion des déchets, la République tchèque n’a pas adopté de législation-cadre de même qu’elle n’a pas élaboré de plan d’investissements. Le Gouvernement tchèque a d’ailleurs déposé pas moins de sept périodes transitoires pour la mise en œuvre de directives environnementales importantes ! Il faut toutefois être conscient de l’importance de la tâche exigée de ces pays : avec ses 260 actes législatifs, l’environnement constitue un des chapitres les plus exigeants de l’acquis communautaire. L’intégration de ce corpus juridique foisonnant dans le droit interne des pays candidats n’est pas un exercice aisé : il exige une adaptation de certains processus industriels (hérités de la période communiste) et une mobilisation de moyens financiers importants.

S’agissant du chapitre Justice et affaires intérieures, la République tchèque est le seul des pays de la première vague à demander une période transitoire (jusqu’en 2005) pour appliquer les normes de Schengen relatives aux aéroports. La Commission considère cette demande comme non justifiée dans la mesure où une distinction claire doit être, selon elle, établie entre l’acceptation de l’acquis de Schengen – qui doit intervenir dès l’adhésion – et sa pleine application (levée des contrôles aux frontières) – qui est subordonnée à une décision du Conseil ultérieure à la date de l’adhésion.

L’énergie constitue une autre source de difficultés. La législation tchèque n’est pas conforme à l’acquis communautaire en ce qui concerne :

– la gestion des crises d’approvisionnement en pétrole. Le Gouvernement tchèque refuse de porter le niveau des stocks de pétrole de sécurité à 90 jours de consommation, comme le prévoit une directive communautaire, le coût financier de cette mesure – évalué à 28 millions d’euros par an – lui semblant trop élevé ;

– la libéralisation du marché du gaz et de l’électricité.

Dans ces deux domaines, la République tchèque a demandé à bénéficier de périodes transitoires pour intégrer les normes communautaires.

Mais c’est l’énergie nucléaire qui constitue la question la plus sensible. Elle a d’ailleurs constitué un des sujets importants des discussions que j’ai eues avec les parlementaires tchèques et les hommes d’affaires français. La République tchèque dispose en effet d’une centrale comprenant quatre réacteurs de conception soviétique (VVER 440 1213) qui sont en service depuis une quinzaine d’années. Un vaste programme de modernisation est en cours afin de mettre ces réacteurs aux normes internationales de sûreté.

Une autre centrale est en cours de construction : il s’agit de la centrale de Temelin (deux réacteurs de type VVER 1000). Bien qu’il ait connu de nombreux retards et dépassements budgétaires, le programme de modernisation de cette centrale devrait s’achever en 2000 et 2001.

La République tchèque est donc non sans mal en passe de se doter d’équipements nucléaires conformes aux normes internationales de sûreté et susceptibles de fournir une part appréciable de la production d’électricité du pays (cette part est actuellement de 20 %). Mais ce programme de mise aux normes aura une conséquence sur laquelle mes interlocuteurs ont attiré mon attention : celle de provoquer une hausse du prix de l’électricité et donc, de rendre plus difficile l’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence exigée par ailleurs par les textes communautaires.

Enfin, dans le domaine agricole, la République tchèque fait face à deux problèmes :

– les mécanismes de contrôle vétérinaire et phytosanitaire ne sont pas conformes à l’acquis communautaire. Ce point a été mis en valeur dans le dernier rapport de la Commission qui s’inquiète notamment de la faiblesse des postes d’inspection aux frontières et du dispositif de contrôle des exportations ;

– surtout, la mise en place des organisations communes de marché suppose un certain nombre de moyens qui font encore défaut : cadre légal des organisations professionnelles non conforme aux règles communautaires, absence de système d’intervention ou de collecte des données…

La République tchèque, comme les autres pays candidats, doit comprendre que la PAC n’est pas un simple dispositif de soutien financier aux agriculteurs mais qu'il s’agit aussi d’un dispositif complexe de régulation des marchés dont la mise en œuvre suppose d’importantes capacités administratives.

2 – Les difficultés du système administratif et judiciaire pour faire appliquer les nouvelles règles de droit

Mais c’est la capacité de l’appareil d’État à faire appliquer et respecter ces nouvelles règles communautaires qui soulève le plus d’interrogations. Il s’agit même, aux dires du conseiller de la représentation de la Commission européenne, du principal point faible de la République tchèque.

·  C’est ainsi qu'aucun effort réel n'a encore été entrepris pour moderniser l’administration. Malgré la nomination fin 1998 d’un vice-ministre chargé de la réforme administrative, il n’existe toujours pas de statut de la fonction publique. L’administration tchèque souffre du faible niveau des rémunérations et d’un manque d’experts juridiques qualifiés. Il en est de même en ce qui concerne l’administration régionale. Une ambitieuse loi de décentralisation a permis la création de quatorze régions mais ces nouvelles structures territoriales manquent cruellement de moyens administratifs : elles ne sont notamment pas en mesure de gérer de manière efficace les fonds structurels et les aides de pré-adhésion octroyées par l’Union.

·  La situation est encore plus critique dans le domaine de la justice. Comme l’indique le dernier rapport de la Commission, le système judiciaire tchèque souffre de conditions de travail précaires (absence d’équipements modernes) et d’un niveau général de rémunération plus faible que dans d’autres secteurs de la vie économique. De nombreux postes de juges et de procureurs restent vacants, ce qui a pour effet d’allonger la durée des procédures et de provoquer des retards accrus dans le traitement des dossiers. Par ailleurs, les magistrats tchèques manquent de formation en droit communautaire ; comme ils ne peuvent se fonder sur une jurisprudence existante, ils ne sont pas en mesure de bien faire appliquer les nouvelles lois intégrant l’acquis communautaire. La réforme de la justice constitue donc un défi majeur pour le Gouvernement tchèque. Il est à noter que la France a depuis le 8 mars 2000 détaché auprès du ministère tchèque de la justice un magistrat de liaison.

3 – Deux questions sensibles qui n’ont pas encore trouvé de solution pleine

·  Il s’agit d’abord de la lutte contre la corruption qui constitue, aux dires de la Commission, " un problème grave dont l’éradication est une priorité du gouvernement actuel " mais pour lequel aucune politique efficace n’a été élaborée. L’objectif doit être d’appliquer la législation en matière de la lutte contre le blanchiment – qui est pour l’essentiel conforme à l’acquis – et de renforcer les moyens de lutte contre la corruption dans le secteur public.

·  Autre problème en suspens, la situation des 250.000 à 300.000 tsiganes qui n’a pas connu d’amélioration notable. S’il a été possible ponctuellement de revenir sur certaines décisions particulièrement vexatoires à l'encontre de cette population (destruction du mur qui avait été construit dans une ville tchèque pour séparer les tsiganes du reste de la population), les tsiganes continuent à souffrir d’une situation d’exclusion sociale. A la demande de la Commission, un programme d’intégration des Roms est en cours d’élaboration.

B – La République tchèque continue cependant à bénéficier d'atouts incontestables pour faire partie de la première vague d’adhésion

·  Premier constat positif : en dépit d’une relative dégradation des indicateurs économiques depuis trois ans, la République tchèque dispose d’une économie de marché viable capable de résister à la pression concurrentielle de ses partenaires de l'Union européenne.

L’économie tchèque est en effet une économie très ouverte sur l’extérieur
– puisqu’elle exporte 60 % de son PNB – et largement gouvernée par les forces du marché (75 % du PIB émane du secteur privé).

Certes l’ère du " miracle économique tchèque " semble s’être achevée fin 1996. Le déficit du commerce extérieur se situe à un niveau élevé. Le taux de chômage devrait, compte tenu des restructurations entreprises dans différents secteurs industriels, augmenter, selon le FMI, passant de 10 % fin 1999 à 12-13 % de la population active fin 2000.

Mais si la République tchèque est confrontée depuis quelques années à une sorte de " crise économique rampante ", les résultats macro-économiques sont redevenus plus favorables depuis trois mois : après avoir été en recul en 1998 et en 1999, l’activité économique renoue avec la croissance (prévision de croissance de + 1,6 % en 2000) ; les investissements étrangers ont atteint en 1999 le niveau record de 4,9 milliards de dollars ; l’inflation reste maîtrisée.

Ces résultats économiques fluctuants confirment la nécessité de poursuivre les réformes structurelles pour améliorer la compétitivité de l’économie. Or après avoir été longtemps différées, ces réformes devraient être relancées : le Gouvernement a ainsi adopté un plan de revitalisation de l’industrie tchèque et programmé la privatisation des trois grandes banques du pays ; de nouvelles règles devraient être adoptées pour améliorer le fonctionnement et la transparence du marché financier ; des restructurations sont en cours dans les secteurs de la chimie, des mines et de la sidérurgie.

D'importantes réformes ont également été engagées ces derniers mois pour améliorer l'environnement économique. Une loi sur la concurrence a ainsi été adoptée qui prévoit la création d’un Office de la concurrence auquel l’ensemble des soutiens publics devront être notifiés. Ce dispositif répond aux demandes de la Commission européenne qui souhaitait la mise en place d'un dispositif de contrôle des aides d’État et des ententes. De même faut-il se féliciter de l’adoption récente d’une loi sur les faillites qui renforcera la sécurité juridique dont les investisseurs doivent bénéficier.

·  La perspective de l’adhésion bénéficie par ailleurs d’un très large consensus dans la population et parmi les principales forces politiques.

Le Gouvernement, dirigé depuis août 1998 par le social-démocrate Milos Zeman, bénéficie d'une remarquable stabilité en dépit de sa situation minoritaire au Parlement : les dernières élections législatives de juin 1998 n’ont en effet pas permis de dégager de coalition majoritaire ; les deux parties dominants, le parti social-démocrate (CSSD) et le parti démocratique civique (CODS) de l’ancien Premier ministre Vaclav Klaus, ont alors conclu un pacte qui reconnaît aux sociaux-démocrates le droit de former le Gouvernement et le garantit contre le vote de toute motion de censure.

Mal perçu par l’opinion publique, ce pacte a pourtant permis de créer les conditions d’une entente entre les principales forces politiques pour faire de la reprise de l’acquis communautaire une priorité du Gouvernement. C’est ainsi qu’un accord a été conclu entre le CSSD et l’ODS sur la préparation de la République tchèque à l’adhésion à l’Union cet accord prévoit des mécanismes pour faciliter l’intégration en droit interne des règles communautaires. Une procédure plus rapide a pu être ainsi mise en place pour l'examen parlementaire des projets de loi intégrant l’acquis communautaire : leur adoption ne requiert plus qu'un examen en une seule lecture. Cette réforme était réclamée par la Commission qui s’était inquiétée des lenteurs de la procédure législative. Il faut en effet savoir que la constitution tchèque ne connaît pas de distinction loi-règlement, ni de délégation de pouvoirs au profit du Gouvernement : la reprise de l’acquis communautaire exige donc une activité législative intense qui nécessitait une adaptation des procédures.

·  Les négociations d'adhésion progressent à un bon rythme.

On sait que la République tchèque fait partie des six pays candidats de la " première vague " avec lesquels des négociations d’adhésion ont été engagées en mars 1998. On sait également que le Conseil européen d’Helsinki (décembre 1999) est revenu sur cette distinction entre deux groupes de pays candidats et a défini une nouvelle stratégie d’élargissement qui a pour effet de placer l’ensemble des pays souhaitant adhérer à l’Union européenne sur un pied d’égalité.

C'est ainsi que des négociations d’adhésion ont été ouvertes en mars 2000 avec les six pays du deuxième groupe. En vertu du nouveau principe de différenciation, il existe désormais un lien étroit entre le respect des engagements de reprise et d’application de l’acquis et la conduite des négociations : les États pour lesquels les négociations ont été ouvertes ultérieurement peuvent envisager de rattraper leur retard sur les autres tandis que des chapitres provisoirement clos avec d’autres pays peuvent être rouverts en cas de manquement aux obligations.

Pour autant, les pays dits de la première vague n’en bénéficient pas moins d’un léger avantage sur les autres – comme en témoigne le fait qu’ils restent désignés sous le nom des " six de Luxembourg " – par opposition aux " six d’Helsinki ".

– le criblage (" screening ") des différents chapitres de l’acquis s’est achevé en juillet 1999 avec la République tchèque comme avec les cinq autres membres de la première vague ;

– l’ensemble des trente-et-un chapitres ont été ouverts à la négociation et onze ont pu être fermés avec la République tchèque (voir en annexe l’état des négociations d’adhésion).

– des périodes de transition ont été demandées par la partie tchèque mais elles restent en nombre limité.

Les secteurs qui ont pu être clos à la négociation sont :

– la science et de la recherche ;

– l’éducation et de la formation ;

– les petites et moyennes entreprises ;

– les statistiques ;

– la politique industrielle ;

– les télécommunications et des technologies de l’information. Une nouvelle loi sur les télécommunications conforme à l’acquis est en effet entrée en vigueur le 1er janvier 2000 ;

– la pêche et de la protection des consommateurs ;

– la PESC. Ce chapitre a pu être clos avec la République tchèque comme avec l’ensemble des " six de Luxembourg " en avril 2000 en raison du déblocage sur Chypre ;

– et la libre circulation des marchandises qui constitue la pierre angulaire du marché unique. La fermeture de ce chapitre constitue un fait remarquable puisque la République tchèque est le seul des pays candidats à avoir pu atteindre ce résultat. C’est ainsi que plus de 90 % des 7.700 normes européennes ont pu être intégrés en droit interne tchèque.

Un autre chapitre pourrait être prochainement fermé : il s’agit de celui des relations extérieures. La République tchèque a accepté l’ensemble de l’acquis communautaire pour la politique commerciale commune, l’alignement de la législation étant en cours. Les responsables tchèques ont cependant fait valoir une demande qui a pendant longtemps fait obstacle à la fermeture de ce chapitre : il s’agit du maintien de l’Union douanière avec la Slovaquie jusqu’à ce que cette dernière rejoigne à son tour l’Union. Cette revendication était inacceptable pour l’Union – et c’est ce qu’a répondu la Commission – car elle aboutirait à entraver l’application du tarif extérieur commun et à créer des distorsions de concurrence. Or le 12 avril 2000, le Gouvernement tchèque a annoncé son intention de retirer sa demande de maintien de l’Union douanière tchéquo-slovaque. Les discussions portant sur les relations extérieures pouvaient donc connaître rapidement une issue favorable.

Ce bilan favorable ne doit toutefois pas faire illusion. Les chapitres de l’acquis qui ont pu être refermés sont évidemment ceux qui soulevaient le moins de difficultés. Les négociations sont entrées depuis déjà plusieurs mois dans une phase plus difficile qui tient au caractère complexe et sensible des sujets en discussion.

C – Sans pour autant fixer une date butoir pour l’adhésion, l’Union doit avoir une attitude vigilante mais ouverte vis-à-vis du processus d’élargissement

Comme cela a été dit, la République tchèque s’est fixé comme objectif d'adhérer à l'union européenne le 1er janvier 2003. Si la pression n'est peut-être pas aussi forte qu'en Pologne pour obtenir des États membres une date butoir pour l'adhésion, la question m’a été posée, à de nombreuses reprises, de savoir si cette date du 1er janvier 2003 pouvait être considérée comme un objectif crédible pour l'Union européenne. Ma réponse a été de leur indiquer qu'il serait artificiel et démobilisateur de fixer dès maintenant une date d'adhésion ou même de clôture des négociations. Les négociations avec les " six d’Helsinki " viennent juste de s’engager. Nous manquons d’une vue d’ensemble des négociations pays par pays qui permettrait de dire dès maintenant quand les négociations d’adhésion pourraient être clôturée. Le seul engagement que l’Union peut prendre est celui d'achever en temps voulu la réforme institutionnelle afin d'être prête à accueillir de nouveaux membres fin 2002 en vue d’un premier élargissement. Cet engagement pris lors du Conseil européen d’Helsinki a été rappelé par le Premier ministre lors de sa visite officielle en Hongrie. Dés lors, la date d’élargissement ne peut dépendre que de la capacité de chaque État candidat de mener à bien les adaptations nécessaires pour intégrer l’acquis communautaire et être en mesure ainsi de remplir les obligations liées à l’appartenance à l’Union.

A ce titre, l’effort accompli par le Gouvernement tchèque pour accélérer les travaux de reprise des règles communautaires doit être salué : il devrait permettre à la République tchèque de combler le retard qui a été accumulé dans certains domaines et de participer le moment voulu à la première vague des pays adhérents.

Pour autant, il me semble nécessaire que des signaux clairs soient adressés aux pays candidats afin de les aider à mieux programmer les réformes qui leur restent à accomplir Les efforts demandés aux populations ne pourront être acceptés que s’ils s’inscrivent dans une perspective claire. Le Secrétaire d’État chargé des affaires européennes, M. Pavel Telicka, m’a ainsi fait part de son souhait que le processus d’élargissement bénéficie d’une impulsion politique nouvelle sous présidence française afin d’évacuer les points non litigieux et établir un calendrier précis pour régler les derniers obstacles dans le processus de négociation. Cette demande semble devoir être prise en compte par la présidence française qui envisage de définir d’ici la fin de l’année une sorte de " tableau de route " de l’élargissement. L’objectif est d’avoir une vision globale de l’ensemble des chapitres en négociation afin d’identifier les principaux paramètres qui domineront la phase finale des négociations. Il me semble important de rappeler que le processus d'élargissement est un processus politique sur lequel le Conseil doit exercer une fonction de " veille ".