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Communiqué du Président de la commission des Finances : Recapitalisation des banques :des modalités qui interrogent et des garanties insuffisantes

En annonçant hier soir que l'Etat apportait 10,5 milliards d'euros à six banques françaises, le Gouvernement a procédé à la première application du plan de sauvetage adopté par le Parlement la semaine dernière.

Compte tenu de son coût et de ses conséquences possibles pour les finances publiques, il est légitime que des explications soient fournies sur les modalités de cette recapitalisation et que des garanties très fortes soient données en contrepartie par les banques qui en bénéficient.

Or trois questions lourdent restent encore sans réponse claire à ce jour.

Tout d'abord, ce mécanisme a été adopté parce qu'il était présenté comme permettant de « faire face à toute situation de défaut de solvabilité » et non comme une mesure visant à conforter la compétitivité des banques françaises.

Or les déclarations du Gouverneur de la Banque de France selon lesquelles les banques n'ont "absolument pas besoin de fonds propres" ni "d'être recapitalisées" donnent à penser que cette recapitalisation s'écarte des justifications mises en avant par le Président de la République. Qu'en est-il exactement ?

2) Ensuite, et quoi qu'il en soit des motivations, les modalités de cette recapitalisation laissent sceptique.

Pourquoi choisir, plutôt que des actions, des titres subordonnés qui privent ainsi l'Etat de tout bénéfice lié à l'amélioration de la situation financière de la banque consécutive à son intervention : versement de dividendes ou progression du cours de bourse ?

Ce choix se fait au détriment de l'intérêt patrimonial de l'Etat et au bénéfice des actionnaires, qui ne subiront aucune dilution ni aucune conséquence sur la distribution de dividendes comme l'a d'ailleurs rappelé le président de BNP Paribas.

3) Enfin, l'Etat, en apportant aux banques une ressource moins chère que ce que le marché leur propose actuellement, est en droit d'exiger non seulement une rémunération mais aussi des contreparties. Sont-elles présentes et satisfaisantes ?

La signature d'une convention faisant référence au code de déontologie du MEDEF sur les rémunérations des dirigeants et au suivi de la politique de crédit est très insuffisante.

A ce stade, l'absence de droits de vote et de représentant de l'Etat au sein des conseils d'administration des banques prive l'Etat de tout moyen de peser réellement sur leur stratégie et leur politique de distribution de crédits.

Enfin, aucun engagement n'est pris par les banques qui bénéficient des fonds de l'Etat par rapport à leur présence dans les paradis fiscaux. Or comme l'a affirmé le Président de la République lors du dernier conseil européen à Bruxelles : « Il ne serait pas normal qu'une banque à qui nous octroierions des fonds propres (...) continue à travailler dans des paradis fiscaux ».

Il est donc souhaitable que les banques qui reçoivent les fonds de l'Etat s'engagent à fermer leurs activités dans les paradis fiscaux dans les meilleurs délais. Les banques françaises doivent cesser leurs activités occultes et/ou spéculatives et se recentrer sur leur métier : le financement de l'activité en France.

J'insiste sur la nécessaire implication du Parlement dans le suivi et la surveillance de ce dispositif.

Je souhaite que toutes ces questions soient abordées lors de l'audition de la Ministre de l'Economie mercredi matin par la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

Didier MIGAUD
Député de l’Isère
Président de la commission des Finances