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Communiqué du président de la commission des Finances : Paradis fiscaux : les pouvoirs publics doivent mettre en cohérence leurs paroles et leurs actes

Le décalage est grand entre les paroles et les actes sur la question centrale des paradis fiscaux. Faute d'être résolue, cette question ruinera l'essentiel des efforts qui pourront être faits en matière de meilleure régulation financière.

Je suis troublé par ce qui ressort du comportement du gouvernement et des pouvoirs publics sur deux dossiers récents.

Tout d'abord en matière de cessions immobilières de l'Etat, le rapport public annuel de la Cour des Comptes fait état d'un dispositif juridique insatisfaisant, notamment sur la surveillance de la transparence des opérations qui ont été effectuées avec des sociétés basées dans des « paradis fiscaux ». La Cour en appelle à une saisine plus systématique du service de lutte contre les infractions financières TRACFIN. Le gouvernement n'a pas jugé bon de répondre à la Cour sur ce point. J'interpelle de mon côté le Gouvernement sur ce point.

Le Premier Ministre a par ailleurs récemment déclaré que des « trous noirs » tels que les centres offshore ne devaient plus exister et que la disparition des paradis fiscaux devait préluder à une refondation du système financier international. Le Président de la République lui-même a affirmé, lors du dernier Conseil européen à Bruxelles, « qu'il ne serait pas normal qu'une banque à qui nous octroierions des fonds propres continue à travailler dans des paradis fiscaux ».

Constatant que les projets de conventions avec les banques aidées n'évoquaient pas ce point, j'avais interrogé le gouvernement le 22 octobre 2008. Le ministre des comptes publics avait répondu que « Quant aux banques françaises - et je parle sous le contrôle de Christine Lagarde -, elles auront, bien évidemment, à clarifier l'ensemble de leurs relations et de leurs opérations avec les paradis fiscaux », ajoutant que « le Président de la République l'a indiqué ce matin. Il est évident que l'ensemble du système bancaire bénéficiant de subventions, d'aides ou de recapitalisations publiques devra clarifier ses relations avec les paradis fiscaux ».

Pourtant, lors de l'audition par la commission des finances des 6 banques françaises ayant bénéficié d'une recapitalisation publique, il a été démontré que, contrairement aux déclarations officielles, aucune exigence n'a été posée concernant la remise en cause des opérations dans les paradis fiscaux. Interrogés sur ce point, les dirigeants de banques auditionnés ont confirmé que la question des paradis fiscaux « n’a jamais été abordée par les pouvoirs publics dans le cadre des contreparties exigées, que ce soit pour le renforcement des fonds propres ou le financement par l’État ».

Ainsi, les banques françaises qui ont reçu l'aide de l'Etat continuent d'exercer dans des pays ou territoires qui combinent fiscalité privilégiée et secret bancaire.

Ce décalage entre les discours et les actes est aussi incompréhensible qu'inacceptable.

La commission des finances de l'Assemblée nationale vient de créer une mission d'information sur les paradis fiscaux qui commencera ses travaux dès la semaine prochaine. Je souhaite que ces deux points fassent l'objet des travaux de notre mission.

Didier Migaud