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Commission des affaires européennes

mardi 10 juin 2014

18 h

Compte rendu n° 137

Présidence de Mme Danielle Auroi Présidente

I. Examen du rapport d’information de Mme Audrey Linkenheld sur la protection des marques (COM(2013) 161 – E 8200 et COM(2013) 162 - E 8201)

II. Examen du rapport d’information de la présidente Danielle Auroi, de Mme Chantal Guittet et de M. Jean- Louis Roumegas sur les accords d’association avec l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie (COM(2013) 289 final – E 8350, COM(2013) 290 final – E 8368 et COM(2013) 653 final – E 8682), (COM(2014) 156 final – E 9191, COM(2014) 148 final – E 9278 et COM(2014) 149 final – E 9279) (COM(2014) 147 final – E 9190, COM(2014) 146 final – E 9277 et COM(2014) 157 final – E 9280)

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

I. Examen du rapport d’information de Mme Audrey Linkenheld sur la protection des marques (COM(2013) 161 – E 8200 et COM(2013) 162 - E 8201) 2

II. Examen du rapport d’information de la présidente Danielle Auroi, de Mme Chantal Guittet et de M. Jean- Louis Roumégas sur les accords d’association avec l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie (COM(2013) 289 final – E 8350, COM(2013) 290 final – E 8368 et COM(2013) 653 final – E 8682), (COM(2014) 156 final – E 9191, COM(2014) 148 final – E 9278 et COM(2014) 149 final – E 9279) (COM(2014) 147 final – E 9190, COM(2014) 146 final – E 9277 et COM(2014) 157 final – E 9280) 9

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution 25

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mardi 10 juin 2014

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 18 heures

I. Examen du rapport d’information de Mme Audrey Linkenheld sur la protection des marques (COM(2013) 161 – E 8200 et COM(2013) 162 - E 8201)

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Une marque est un signe utilisé dans les échanges commerciaux pour identifier un produit ou un service et ainsi faciliter sa reconnaissance par la clientèle en le distinguant de la concurrence. Une entreprise peut protéger sa propriété intellectuelle sur une marque ainsi que l’exploitation commerciale de cette dernière en la faisant enregistrer par l’un des organismes spécialisés existants, en fonction du périmètre géographique sur lequel elle souhaite assurer cette protection. Si elle ne le fait pas, elle s’expose à voir la concurrence utiliser sa marque voire acquérir les droits y afférents.

Deux systèmes alternatifs et complémentaires coexistent en Europe : l’enregistrement national et l’enregistrement communautaire, qui obéissent à des règles grandement concordantes. À l’heure de l’économie mondialisée, l’enjeu est particulièrement important pour l’Union européenne, dont les produits vendus sous des marques renommées voire prestigieuses représentent 34 % de la production de richesse et même 48 % des exportations.

Les législations des États membres sur les marques ont été partiellement harmonisées par une directive de 1988, codifiée en 2008.

Sont depuis lors refusés à l’enregistrement ou susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés, dans tous les États membres : les signes qui ne peuvent constituer une marque ; les marques dépourvues de caractères distinctifs ; les marques risquant de prêter à confusion ; les marques contraires à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ; les marques de nature à tromper le public ; les marques identiques ou similaires à une marque enregistrée antérieurement pour des produits ou des services identiques ou similaires.

La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif : il est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, d’en faire usage dans la vie des affaires.

Si le titulaire d’une marque a toléré, pendant cinq années consécutives, l’usage d’une marque postérieure enregistrée, il ne pourra plus demander sa nullité ni s’opposer à son usage. De même, le titulaire d’une marque peut être déchu de ses droits si sa marque ne fait pas l’objet d’un usage sérieux pendant une période ininterrompue de cinq ans.

En France, l’organisme chargé de cette mission est l’Institut national de la propriété industrielle, ou INPI, établissement public entièrement autofinancé, placé sous la tutelle du ministère de l’économie, du redressement productif et du numérique.

Parallèlement aux systèmes de marques nationaux et en liaison avec eux, un règlement de 1993, codifié en 2009, a créé un système autonome d’enregistrement de droits unitaires qui produit les mêmes effets dans toute l’Union européenne. L’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur, ou OHMI, a été fondé dans ce contexte, afin d’assurer l’enregistrement et la gestion des marques communautaires.

Pour protéger une marque sur l’intégralité du marché intérieur, deux procédures distinctes peuvent être suivies : par demande déposée directement auprès l’OHMI ; par l’intermédiaire de l’Institut national de la propriété intellectuelle, qui la transfère à l’OHMI.

Titre unitaire, la marque communautaire s’obtient par une procédure de dépôt et d’examen unique et s’applique automatiquement aux vingt-huit États membres de l’Union européenne. Elle est renouvelable tous les dix ans.

Le record du nombre de demandes de marques communautaires déposées est battu chaque année et l’OHMI a reçu, en 2011, sa millionième demande depuis le début de ses activités, en 1996.

La coexistence entre ces deux régimes est fondamentale pour assurer une gestion efficiente des marques, en fonction des besoins des entreprises, de leur taille, des spécificités des marchés sur lesquels elles opèrent et de leur déploiement géographique. Cette dualité du système – à l’instar de celui des dépôts de brevets – offre aux utilisateurs un choix utile pour optimiser leur stratégie.

La demande de protection de la marque est forte, comme en témoignent les statistiques de dépôt auprès des offices nationaux et de l’OHMI, ainsi que le nombre de marques consignées dans leurs registres.

S’agissant des demandes de marques, 540 000 dossiers ont été déposés en 2011, dont : 105 000 auprès de l’OHMI ; 435 000 auprès des offices des États membres, dont 85 000 auprès de l’INPI.

S’agissant du stock de marques consignées, 9,8 millions figuraient dans les registres européens en mars 2013, dont : 10 % de marques communautaires ; 90 % de marques nationales.

L’enregistrement national des marques par les États membres de l’Union européenne a donc été harmonisé il y a vingt-cinq ans et la marque communautaire unitaire a été créée il y a vingt ans. Le système européen des marques repose donc sur des bases solides. Pourtant, l’environnement des entreprises a connu des modifications substantielles qui justifient un effort supplémentaire de convergences entre les législations et les pratiques en matière de marques.

C’est pourquoi la Commission européenne a présenté, le 27 mars 2013, un paquet de deux textes tendant à réviser la réglementation en la matière. Ceux-ci se caractérisent par de nombreuses mesures concordantes, afin que l’enregistrement, qu’il soit effectué au niveau national ou communautaire, obéisse à des règles plus harmonisées encore qu’elles ne le sont aujourd’hui.

Premièrement, une proposition de directive tend à refondre la directive de 2008 en répondant à trois objectifs : modernisation des dispositions du texte en vigueur ; rapprochement des législations et des procédures nationales, en vue de les aligner davantage sur le système de la marque communautaire ; facilitation de la coopération entre les offices nationaux des États membres et l’OHMI.

Deuxièmement, une proposition de règlement vise à modifier le règlement de 2009 en impulsant une modernisation très ciblée des dispositions existantes, essentiellement dans les directions suivantes : adaptation de la terminologie du règlement au traité de Lisbonne et de ses dispositions à l’approche commune sur les agences décentralisées ; rationalisation des procédures de demande et d’enregistrement des marques européennes ; renforcement de la sécurité juridique ; institution d’un cadre de coopération approprié entre l’OHMI et les offices nationaux.

Le 25 février 2014, le Parlement européen a adopté à une large majorité deux résolutions législatives sur ces deux propositions de textes.

L’économie générale du paquet est donc maintenant fixée. S’il ne constitue pas une révolution dans le paysage de la propriété intellectuelle en Europe, il est porteur d’améliorations attendues par les pouvoirs publics et les acteurs économiques français.

Mais il reste à trouver une majorité au Conseil et un consensus interinstitutionnel sur plusieurs points techniques sensibles. Lors de la réunion du dernier conseil Compétitivité, le 26 mai 2014, la présidence grecque, constatant qu’aucune des trois propositions de compromis soumises au cours des mois précédents n’avait reçu l’aval de l’ensemble des parties, a dû se contenter d’un nouveau rapport d’étape.

Dans ce contexte, je vous propose que nous appelions les négociateurs français à défendre vigoureusement plusieurs positions importantes pour la protection des intérêts des titulaires de droits sur des marques.

Il convient tout d’abord de se féliciter des avancées, désormais acquises, en matière de reconnaissance des marques de renommée et des indications géographiques, ainsi que de l’obligation faire à chaque État membre de mettre en place des procédures de règlement administratif des contentieux en déchéance ou en nullité, parallèlement à la voie du traitement judiciaire, qui restera ouverte en cas de besoin.

La Commission européenne avait imaginé de créer un échelon administratif, au sein de l’Agence européenne, entre le conseil d’administration et le président. Le Conseil a évacué cette idée d’échelon, qui me semblait en effet superflue.

J’en viens aux quelques points délicats restant en débat et appelant la plus grande vigilance de la part des autorités françaises.

Un arrêt de la Cour de justice de 2011 interdit aux douanes nationales d’intercepter les marchandises présentées comme étant en transit ou en transbordement sur leur territoire de compétence pour vérifier auprès des titulaires de droits s’il s’agit ou non de contrefaçons. Cette rupture jurisprudentielle, censée cibler des produits qui ne sont pas destinés à un achat dans le marché intérieur, a entraîné une chute de 65 % des retenues douanières dans l’Union européenne : les agents des douanes doivent dorénavant laisser passer des marchandises qu’ils identifient pourtant comme contrefaites. La Commission européenne, dans son texte initial, rétablissait le contrôle douanier sur les marchandises en transit ou en transbordement. Alors que la rapporteure du Parlement européen, une libérale suédoise, préconisait l’abandon de cette mesure, celle-ci a heureusement été réintroduite, grâce à un amendement soutenu par les groupes PPE et S&D. L’enjeu primordial est en effet celui de la lutte contre le pillage de la propriété intellectuelle, qui constitue un motif d’exception à la libre circulation des marchandises.

Par ailleurs, la Commission européenne a proposé une nouvelle structure tarifaire pour l’Agence européenne : le montant de la redevance de base ne couvrirait plus qu’une classe de produits et services, au lieu de trois actuellement ; une redevance par classe additionnelle, facultative, pourrait être réglée en fonction des besoins de protection de l’entreprise. Ce nouveau système sur-mesure bénéficiera clairement aux petites et moyennes entreprises, qui ne seront plus contraintes de payer pour des classes de biens et de services sur lesquelles elles n’ont pas besoin de protection.

Il reste aux États membres à se mettre d’accord sur les montants des taxes exigibles. La proposition française me paraît équilibrée : pour les trois premières classes, la hausse de la taxe de dépôt serait limitée et, pour une quatrième classe, le niveau de prélèvement actuel serait maintenu ; quant à la taxe de renouvellement, elle serait significativement abaissée.

Non seulement l’OHMI s’autofinance complètement mais il a même cumulé des volumes considérables d’excédents budgétaires depuis sa création : 450 millions d’euros au 31 décembre 2012. La Commission européenne a donc proposé de faire basculer automatiquement ses surplus vers le budget général de l’Union européenne. Puisque cet argent provient de la rémunération de services rendus au titre de l’Union européenne, je pense qu’il convient de le rétrocéder au budget communautaire mais de mettre en place un système de subvention aux États membres menant des actions efficaces de lutte contre la contrefaçon, sous la forme d’une réduction de leurs contributions nationales.

Une fois la proposition de règlement adoptée, il conviendrait que l’Agence européenne soit associée à l’écriture des actes délégués qui en découleront.

Il serait judicieux que les États membres s’accordent rapidement sur la rédaction des deux actes législatifs en discussion afin de ne pas reporter leur adoption au-delà de la présidence du second semestre 2014, en dépit du contexte de renouvellement de la composition du Parlement européen et de la Commission européenne.

Enfin, l’examen de ce paquet législatif européen pourrait être l’occasion d’appeler l’attention des autorités françaises sur l’interprétation qui risquerait d’être donnée à la suppression de la troisième chambre du tribunal de grande instance de Paris quant à l’intérêt porté par la France à la défense de la propriété intellectuelle.

La proposition de conclusions que je vous suggère d’adopter reprend l’ensemble de ces points.

M. Jean-Louis Roumégas. J’ai une question de néophyte : pour les entreprises qui déposent leur marque au niveau européen, quel est l’intérêt de passer par l’INPI ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Le fait de s’adresser à un office national soulève deux questions.

Tout d’abord, pourquoi certaines entreprises s’adressent-elles à un office national plutôt qu’à l’office européen pour demander à déposer une marque européenne ? Certaines entreprises françaises, par exemple, préfèrent passer par l’INPI pour des raisons de proximité, de langue ou de de savoir-faire.

Ensuite, quel intérêt une entreprise a-t-elle à bénéficier d’une protection nationale plutôt que d’une protection européenne ? Pour une entreprise française, il peut s’avérer plus difficile de faire reconnaître sa légitimité au niveau européen.

M. Jean-Louis Roumégas. Une marque peut-elle être protégée au niveau mondial ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Oui, certainement, selon un système analogue. L’important est le pays dans lequel est enregistrée la marque, pas le pays où est fabriqué le produit. Cette considération rejoint la question des transits et transbordements. Des entreprises font transiter des marchandises contrefaites par la France uniquement pour que le tampon « aéroport Charles-de-Gaulle » y soit apposé, afin de faire croire que leur conformité au droit de la propriété intellectuelle a été contrôlée sur notre territoire.

La Présidente Danielle Auroi. L’exemple des couteaux de Laguiole – village situé dans une région qui m’est chère – nous montre combien la question du dépôt de marque est sensible : faute d’être protégés par une marque enregistrée, ils ont fait l’objet de contrefaçons pendant des années.

Le système des marques laisse toutefois de côté la question des conditions de fabrication des produits. Ce sujet ne mériterait-il pas une réflexion ?

M. William Dumas. Des critères géographiques peuvent tout de même être pris en compte : les indications géographiques protégées.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Les propositions de la Commission européenne sécurisent en effet la dénomination des marques collectives.

La Présidente Danielle Auroi. Mais celles-ci n’offrent aucune garantie en termes de conditions de fabrication.

M. William Dumas. Combien coûte un dépôt de marque au niveau national ?

La marque ombrelle « Sud de France », destinée aux produits du Languedoc-Roussillon, est-elle marque européenne ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Un dépôt de marque auprès de l’INPI coûte entre 200 et 250 euros.

L’objectif des textes qui nous sont proposés est d’harmoniser davantage, dans tout le marché intérieur, les règles applicables aux marques. La marque collective, qui sera affermie, peut recouvrir un label environnemental, social ou géographique. « Sud de France » est-elle une marque protégée ? Si elle a été enregistrée par l’INPI ou l’OHMI, elle entre dans le système européen des marques.

M. Jean-Louis Roumégas. J’ai bien compris que, pour une marque commercialisée uniquement en France, il n’y a pas d’intérêt à effectuer un dépôt au niveau européen. Mais à partir de combien de pays de commercialisation cela devient-il intéressant ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Il ne revient pas aux offices spécialisés d’émettre des avis sur l’opportunité du périmètre à couvrir. C’est à chaque entreprise de déterminer s’il est plus intéressant pour elle de déposer une marque au niveau européen ou dans plusieurs pays, en tenant notamment compte du coût. Les entreprises françaises passent souvent par l’INPI car elles estiment y être bien conseillées.

M. Jean-Louis Roumégas. J’insiste sur la sensibilité de la question des marques : dans l’affaire de Laguiole, la commune a été déboutée.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Cette question relève plutôt de la loi relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, qui vient d’être adoptée.

La Commission a ensuite adopté, à l’unanimité, la proposition de résolution suivante :

« L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment ses article 114, paragraphe 1, et 118, paragraphe 1,

Vu la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques,

Vu le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire,

Vu le règlement (UE) no 608/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 concernant le contrôle, par les autorités douanières, du respect des droits de propriété intellectuelle et abrogeant le règlement (CE) no 1383/2003 du Conseil,

Considérant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire [COM(2013) 161 – E 8200],

Considérant la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil rapprochant les législations des États membres sur les marques (refonte) [COM(2013) 162 – E 8201],

Considérant que le dispositif européen de protection des marques, fondé sur un système dual distinguant marque communautaire et marque nationale, fonctionne bien,

Considérant qu’il doit toutefois être modernisé et homogénéisé pour renforcer la protection de la propriété intellectuelle dans le marché intérieur,

1. Approuve les deux propositions d’actes législatifs concomitantes de la Commission européenne ;

2. Se félicite des avancées qu’elles contiennent, notamment en matière de marques de renommée et d’indications géographiques ;

3. Est favorable à ce que chaque État membre soit contraint de mettre en place des procédures administratives de déchéance et de nullité devant son office national de protection des marques ;

4. Abonde dans le sens de la présidence du Conseil, qui, dans son texte de compromis, abandonne l’idée de la création d’un comité exécutif de l’Agence de l’Union européenne pour les marques et les dessins et modèles ;

5. Estime indispensable de rétablir par voie législative le contrôle douanier des marchandises en transit ou transbordement, soit sous la forme de la rédaction initiale de la Commission européenne, soit sous celle de l’amendement adopté par la Parlement européen ;

6. S’agissant des dépôts et des renouvellements de dossiers d’enregistrement de marque auprès de l’Agence de l’Union européenne pour les marques et les dessins et modèles :

a) Soutient l’idée d’une taxe « mono-classe » ;

b) Juge pertinents et équilibrés les tarifs proposés par la France ;

7. Recommande :

a) Que l’excédent budgétaire actuel de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur puis, à chaque clôture d’exercice annuel, ceux de l’Agence de l’Union européenne pour les marques et les dessins et modèles, soient rétrocédés au budget de l’Union européenne ;

b) Que la Commission européenne affecte cette ressource à des subventions aux États membres menant des actions efficaces de lutte contre la contrefaçon, sous la forme d’une réduction de leurs contributions nationales ;

8. Encourage les États membres à s’accorder rapidement sur la rédaction des deux actes législatifs en discussion afin de ne pas reporter leur adoption, en dépit du contexte de renouvellement de la composition du Parlement européen et de la Commission européenne ;

9. Préconise que l’Agence de l’Union européenne pour les marques et les dessins et modèles soit associée à l’écriture des actes délégués qui découleront de l’adoption de la proposition de règlement no 207/2009 ;

10. Appelle l’attention des autorités françaises sur l’interprétation qui pourrait être donnée à la suppression de la troisième chambre du tribunal de grande instance de Paris quant à l’intérêt porté par la France à la défense de la propriété intellectuelle. »

II. Examen du rapport d’information de la présidente Danielle Auroi, de Mme Chantal Guittet et de M. Jean- Louis Roumegas sur les accords d’association avec l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie (COM(2013) 289 final – E 8350, COM(2013) 290 final – E 8368 et COM(2013) 653 final – E 8682), (COM(2014) 156 final – E 9191, COM(2014) 148 final – E 9278 et COM(2014) 149 final – E 9279) (COM(2014) 147 final – E 9190, COM(2014) 146 final – E 9277 et COM(2014) 157 final – E 9280)

La Présidente Danielle Auroi, co-rapporteure. Nous voici aujourd’hui réunis pour évoquer le Partenariat oriental et les accords d’association que l’Union européenne souhaite mettre en œuvre avec trois des pays concernés : Ukraine, Géorgie et Moldavie.

Avant de vous présenter une communication faisant le point sur l’accord d’association avec l’Ukraine, et de laisser à mes collègues Chantal Guittet et Jean-Louis Roumegas le soin de présenter respectivement celles concernant les accords avec la Géorgie et avec la Moldavie, il me semble utile de vous rappeler brièvement dans quel cadre s’inscrivent ces accords d’association, dont la signature devrait être annoncée lors du Conseil européen des 26 et 27 juin.

Le Partenariat oriental est une politique encore jeune, puisqu’elle n’a que cinq ans d’existence : elle a été lancée en 2009, sur initiative de la Pologne et de la Suède, pour renforcer à l’Est la politique européenne de voisinage. Six pays sont concernés : l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine.

L’objectif principal de cette politique est de donner une nouvelle impulsion à ces voisins orientaux en les rapprochant de l’Union européenne.

Ce rapprochement passe par des accords de libre-échange approfondis et complets, ce qui suppose une harmonisation législative importante, et par un assouplissement de la politique des visas, en échange de garanties des pays partenaires.

Il est important de souligner que pour la France, le Partenariat oriental n’a pas vocation à constituer une étape préliminaire à une future adhésion à l’Union.

Cette politique est dans une large mesure en train de se construire, de s’affirmer. Son bilan est encore mitigé : au total, elle n’a pas, jusqu’à présent, connu de grands développements.

Le Sommet de Vilnius des 27 et 28 novembre 2013 devait être un rendez-vous décisif : il devait montrer la capacité de l’Union européenne à influencer les ex-pays soviétiques, et permettre d’ouvrir sur l’avenir la politique du Partenariat oriental. En effet, sur les six pays concernés, quatre étaient à l’origine prêts à parapher ou signer des accords d’association.

Or l’Arménie a effectué un revirement au cours de l’été 2013 et a préféré se tourner vers l’Union eurasienne proposée par la Russie.

En ce qui concerne l’Ukraine, une semaine avant le Sommet, le Président Viktor Ianoukovitch a préféré renoncer à la signature de l’accord d’association, pourtant déjà paraphé plusieurs mois avant, déclenchant les événements tragiques qui ont suivi. Néanmoins, pour des raisons politiques, et pour ne pas rester sur l’échec de Vilnius, l’Union européenne a signé, en mars 2014, le « volet politique » de l’accord d’association avec les dirigeants intérimaires de l’Ukraine. Elle a exprimé le souhait de signer l’ensemble de l’accord après les élections présidentielles du 25 mai.

Finalement seules la Géorgie et la Moldavie ont lors de ce Sommet de Vilnius paraphé les accords, étape préalable à leur signature initialement envisagée fin 2014, mais que l’Union européenne souhaite aujourd’hui, pour des raisons politiques également, avancer à fin juin. L’attitude de la Russie vis-à-vis de l’Ukraine suscite des inquiétudes dans ces États. La signature rapide de ces accords est perçue par eux comme une garantie.

La procédure de signature et conclusion des accords d’association est complexe et longue. Sans rentrer dans les détails, je vous précise que nous ne sommes pas saisis, en application de l’article 88-4, des textes mêmes des accords, mais d’instruments juridiques préparatoires : en particulier les propositions de décision du Conseil relatives à la signature et à l’application provisoire des accords, et celles relatives à la conclusion des accords. Le texte même des accords est l’objet d’annexes qui ne sont pas nécessairement transmises en même temps.

Ainsi, pour l’Ukraine, notre Commission des affaires européennes avait déjà, le 19 juin 2013, approuvé, en l’état des informations dont elle disposait alors (elle n’avait pas encore eu transmission du texte très volumineux de l’accord) les deux propositions de décision du Conseil relatives à la signature et à la conclusion de l’accord d’association.

Le texte complet de l’accord d’association Union européenne/Ukraine a été transmis en octobre 2013 et, dans ses conclusions adoptées le 5 novembre dernier, notre commission a réitéré son approbation de principe à sa signature, souhaitant alors qu’elle intervienne si possible dès le Sommet de Vilnius, ce qui hélas n’a pu se réaliser.

Pour la Géorgie et la Moldavie, il en va différemment : nous disposons déjà des annexes, c’est-à-dire des textes mêmes des accords, qui vont nous permettre de nous prononcer de façon plus éclairée, au titre de l’article 88-4, sur les propositions d’actes communautaires auxquelles ils sont rattachés... C’est là le résultat de contacts du secrétariat de notre commission avec le SGAE et le cabinet du ministre des affaires étrangères, qui attache une importance particulière à ces accords et à la bonne information du Parlement dans la procédure les concernant.

Le paraphe des accords intervenu en mars 2012 pour l’Ukraine, puis à Vilnius fin novembre 2013 pour la Géorgie et la Moldavie, n’était donc qu’une première étape vers leur éventuelle signature définitive et leur conclusion.

Dans une étape ultérieure, la Commission présente au Conseil des propositions d’actes. Elle présente une proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l’Union européenne, de l’accord d’association. Elle peut prévoir en outre l’application provisoire de l’accord, comme c’est le cas en l’espèce, pour chacun des trois États concernés. Une proposition de décision du Conseil portant conclusion proprement dite de l’accord , ce qui vaut ratification de cet accord au niveau européen.

C’est donc sur ces propositions d’actes que nous sommes appelés à nous prononcer aujourd’hui pour la Moldavie et la Géorgie.

Ensuite, le Conseil doit adopter ces décisions. En principe, la décision portant conclusion de l’accord est adoptée à la majorité qualifiée des voix, sauf dans certains cas où l’unanimité est requise, dont précisément les accords d’association.

De même, alors que le Parlement européen est simplement consulté pour certains accords, son approbation est requise pour les accords d’association.

Enfin, il est important de rappeler que l’adoption de ces accords au niveau européen est accompagnée d’une procédure de ratification au sein de chaque État membre, selon les règles institutionnelles qui lui sont propres.

En France, le Parlement sera donc appelé à examiner le texte des accords d’association, dans leur version définitive et le cas échéant corrigée, et à exercer ses prérogatives de contrôle démocratique, au moment de sa saisine en vue de l’autorisation de ratification, en application de l’article 53 de notre Constitution.

Rappelons cependant qu’à ce stade, certaines dispositions des accords pourront logiquement être déjà entrées en application, à titre provisoire.

Selon les informations qui nous ont été communiquées, la saisine du Parlement français serait actuellement envisagée pour fin 2014 ou début 2015.

Venons-en maintenant à nos communications faisant le point pour chacun des trois États, l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie.

Pour ce qui concerne l’Ukraine, le processus de signature de l’accord d’association a déjà été enclenché, puisque les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne ont signé avec le nouveau Premier ministre ukrainien, le 21 mars 2014, ses chapitres politiques. Ce volet politique est loin d’être le plus volumineux de l’accord, qui comporte 275 pages, et plus de 1 200 pages avec toutes les annexes. Les chefs d’État et de gouvernement de l’Union se sont engagés à signer ultérieurement le reste de l’accord, après les élections présidentielles du 25 mai.

Récemment, le président nouvellement élu, M. Petro Porochenko, a affirmé son souhait de voir l’ensemble de l’ensemble de l’accord d’association signé le plus rapidement possible.

Il n’est pas question aujourd’hui de revenir sur notre approbation de principe donnée le 19 juin 2013 mais plutôt de la conforter, afin de réaffirmer notre solidarité vis à vis de l’Ukraine, tout en reconnaissant les difficultés présentes et la vigilance nécessaire. Certains d’entre vous ayant exprimé le souhait d’en savoir un peu plus sur le contenu de l’accord, il m’a semblé utile d’en rappeler pour mémoire les principaux aspects.

L'accord tend vers l'association politique et l'intégration économique. Il n’est cependant jamais question d’adhésion à l’Union. L’association a pour objectifs principaux de favoriser un rapprochement graduel entre les parties sur la base de valeurs communes et de créer les conditions propices au renforcement des relations économiques et commerciales.

Parmi les principes généraux de l'accord figurent plusieurs « éléments essentiels » particuliers. Il s'agit notamment du respect des principes démocratiques, des droits humains et des libertés fondamentales.

L'accord définit les objectifs d'un dialogue politique approfondi et renforcé tendant à promouvoir une convergence graduelle sur les questions de politique étrangère et de sécurité. Il établit plusieurs forums de dialogue politique. À cela s'ajoutent des dispositions visant à favoriser des efforts communs pour promouvoir la stabilité régionale, la prévention des conflits, la gestion des crises.

Dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité, l'accord met l'accent sur l'État de droit et le renforcement des institutions et des pratiques judiciaires. Il établit un cadre de coopération en matière de migration, d'asile et de gestion des frontières. Il comporte des dispositions sur la circulation des personnes, y compris sur la réadmission, l'assouplissement de la procédure de délivrance des visas et la mise en place progressive et en temps utile d'un régime de déplacement sans obligation de visa.

L'accord prévoit des espaces de coopération et de dialogue à tous les niveaux, la mise en place de forums pour la société civile et une coopération parlementaire. Il envisage de nombreuses possibilités de coopération sectorielle dans plus de trente domaines, tels que l'énergie, les transports, la protection de l'environnement, la politique industrielle et en matière de petites et moyennes entreprises, le développement social et la protection sociale, l'égalité des droits, la protection des consommateurs, l'éducation, la formation et la jeunesse ainsi que la coopération culturelle.

Enfin, l’intégration économique accrue, grâce à la zone de libre-échange approfondi et complet, devrait être un puissant vecteur de croissance pour le pays. La méthode employée consistera à rapprocher les législations, les règles et les normes de l'Ukraine de celles de l'Union. L’établissement de cette zone de libre-échange complet et approfondi est le pilier de l’accord, la majorité des articles y étant consacrée. Rappelons que l’Union européenne est le premier partenaire commercial de l’Ukraine : elle représente 31% de ses échanges extérieurs, devant la Russie – 20 % des échanges.

Les négociations pour la mise en place de cette zone de libre-échange ont fait suite à l’adhésion de l’Ukraine à l’OMC en 2008.

Il s’agit d’un accord de libre-échange dit de « nouvelle génération », en ce sens qu’il ne traite pas seulement des barrières tarifaires mais de l’ensemble des obstacles au commerce. Cet accord vise à supprimer les barrières entre l’Union et l’Ukraine et à favoriser la reprise de l’acquis communautaire par celle-ci.

Sur le volet tarifaire, je rappelle que notre Commission s’est déjà prononcée favorablement, le 9 avril dernier, sur une proposition d’acte communautaire visant à accorder, de façon anticipée, des réductions de droits de douane à l’Ukraine, dans l’attente de la signature de l’accord de libre-échange.

Cet accord prévoit une annulation de tous les droits de douane, après une période de transition maximale de quinze ans et des mesures de sauvegarde. Ainsi l’ensemble des produits industriels sera libéralisé.

La libéralisation tarifaire des produits agricoles est prévue, mais sous une forme limitée pour les produits agricoles sensibles, tels que produits laitiers, huile.

L’accord prévoit une protection complète de toutes les indications géographiques agricoles, pas seulement en ce qui concerne les vins et spiritueux, sur une période de dix ans. Cette question des indications géographiques intéresse particulièrement la France car il est produit en Ukraine des boissons dénommées Cognac, Champagne ou Cahors.

L’accord comprend un chapitre ambitieux en matière d’énergie et de sécurité énergétique, un des objectifs étant de garantir la sécurité du réseau ukrainien de transit du gaz naturel. . En effet 20 % du gaz consommé dans l'Union européenne passe par l’Ukraine.

Les prestations de services seront libéralisées.

S’agissant des obstacles techniques au commerce, l’accord prévoit un alignement de l’Ukraine sur les règlements et standards techniques européens, notamment en matière de normes sanitaires et phytosanitaires. L’ouverture et la transparence des marchés publics sont prévues, ainsi qu’un alignement du droit ukrainien de la concurrence. L’Ukraine s’engage à adopter un système interne de contrôle des aides d’État.

Dans le chapitre « Commerce et développement durable », sont inscrits des engagements concernant le respect des normes multilatérales en matière de travail et d’environnement, selon les principes directeurs de l’OCDE et normes de l’Organisation internationale du Travail.

Des procédures, inspirées de l’accord de l’OMC sur le règlement des différends, devraient permettre de résoudre les différends commerciaux.

En conclusion, on peut dire qu’en tant que pilier de l'accord d'association, la zone de libre-échange approfondi et complet devrait créer des perspectives commerciales aussi bien dans l'Union qu'en Ukraine, et favoriser une véritable modernisation de l'économie et une intégration réelle dans l'Union. Ce processus devrait permettre de mettre au point des produits répondant à des normes plus rigoureuses, d’améliorer les services aux citoyens et de faire de l’Ukraine un concurrent efficace sur les marchés internationaux.

Puis, la Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 217 et 218 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu les propositions de décision du Conseil du 23 mai 2013 relatives à la signature et la conclusion de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine (COM(2013) 290 final / E 8350 et COM(2013) 290 final / E 8368)

Vu sa précédente approbation de principe de ces propositions de décision le 19 juin 2013,

Vu le texte de l’accord d’association (COM(2013) 290 final Annexe I) transmis le 8 octobre 2013,

Vu ses précédentes conclusions du 5 novembre 2013,

1. Prend acte de la signature du volet politique de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine le 21 mars 2014 ;

2. Souligne la nécessité de maintenir le soutien financier apporté par l’Union à l’Ukraine, sous réserve de la poursuite des efforts conduits par l’Ukraine, notamment en matière de lutte contre la corruption et de transparence ;

3. Souligne la nécessité de poursuivre une politique de facilitation de la mobilité des citoyens ukrainiens en Europe, y compris pour les étudiants, hormis pour les personnes visées par la politique des sanctions ciblées ;

4. Réaffirme, dans ces conditions et en l’état des informations dont elle dispose, son soutien de principe à la signature et à la conclusion de l’ensemble de l’accord d’association dès le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014, et souhaite que cet accord puisse être ensuite soumis à ratification, en maintenant une vigilance nécessaire vis-à-vis de la poursuite des réformes en Ukraine ;

5. Insiste sur la nécessité du dialogue diplomatique pour une résolution pacifique de la crise ukrainienne. »

Mme Chantal Guittet, co-rapporteure. Les relations bilatérales entre l’Union européenne et la Géorgie datent de l’accession à l’indépendance de ce pays après la disparition de l’Union soviétique. Fondées sur l’accord de partenariat et d’association entré en vigueur en 1999, ces relations se sont intensifiées après la « révolution des roses » de 2003 après laquelle la Géorgie a entamé une politique ambitieuse de réformes structurelles qui ont été jugées positives par ses partenaires européens.

En 2006, un plan d’action a renforcé ce partenariat et a resserré la coopération entre les deux parties. L’épisode douloureux de la guerre avec la Russie en 2008 a rapproché la Géorgie et son partenaire européen . On peut ainsi faire le parallèle entre cette guerre survenue à propos des régions séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie et les événements se déroulant actuellement en Ukraine. Le conflit de 2008 s’inscrivait dans une logique de tensions récurrentes entre la Géorgie et la Russie qui avait culminé lors de l’embargo décidé par la Russie en 2006, qui avait déstabilisé l’économie géorgienne. La guerre de 2008 est un de ces conflits qui se poursuivent de façon larvée, avec des différends territoriaux et surtout la déclaration d’indépendance de l’Ossétie du Sud . Il faut noter que la guerre de 2008 était la première fois que la Russie intervenait directement et militairement depuis l’invasion de l’Afghanistan. Ce conflit a été l’occasion pour l’Union européenne de se poser comme médiateur et la présidence française a largement contribué à trouver une solution pacifique.

L’accession au pouvoir en octobre 2012 du milliardaire Bidzina Ivanichvili à la tête de la coalition « Rêve géorgien » , présenté comme un partisan de la Russie, a fait naître quelques inquiétudes au sein de l’Union européenne. Mais finalement, la politique de rapprochement avec l’Europe et la consolidation des liens n’ont pas été remises en question, même si le gouvernement actuel est favorable à des relations plus apaisées avec la Russie .

Comme cela l’a été souligné, le partenariat oriental n’a pas vocation à amorcer le processus d’adhésion de ces pays à l’Union européenne. Par ailleurs, il ne doit pas être présenté comme une occasion de confrontation entre la Russie et l’Europe, alors que cela a parfois été vécu comme tel. Le partenariat oriental a sans doute été mal présenté sur ce point et il faudrait redire qu’ il vise à donner à ces pays plus de moyens pour assurer leur développement démocratique et économique et à permettre à leurs citoyens d’avoir de meilleures conditions de vie. En aucun cas, le partenariat oriental n’empêche ces pays d’avoir des relations avec la Russie dans le cadre plus général d’un partenariat eurasien.

Depuis son indépendance, le rapprochement avec l’Union européenne est une position géostratégique permanente et consensuelle de la Géorgie. Elle souhaite adhérer à l’Alliance atlantique dans laquelle elle voit la garantie de sa sécurité face à la Russie et les événements survenus en Crimée ont renforcé cette position. La Géorgie est membre du partenariat pour la paix depuis 1998. Le soutien de ce pays aux opérations dirigées par l’OTAN constitue un domaine de coopération important. La Géorgie est actuellement , parmi les pays ne faisant pas partie de l’OTAN, le plus important fournisseur de troupes à la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan. Elle participe aussi aux opérations en Centre Afrique. Cependant, même si lors du sommet de l’OTAN en 2012, les alliés se sont félicités des progrès accomplis par la Géorgie pour répondre aux critères de l’Alliance atlantique, cette adhésion n’est pas encore actée.

Sur le plan économique, la Géorgie a, très tôt et très clairement, adopté une économie de marché. Membre de l’Organisation mondiale du commerce depuis 2000, le gouvernement géorgien a mené une série de réformes de lutte contre la corruption , de protection des investisseurs et de simplification fiscale. L’objectif affiché est d’attirer les investisseurs étrangers. Ces efforts paient puisque d’après le classement « Ease of doing bussiness indicator » de la Banque mondiale, la Géorgie se situe à la neuvième place des pays où il est le plus facile d’entreprendre, avant la France ou le Luxembourg. En trois jours, il est possible d’y créer une entreprise. Le pays connait une forte croissance même la crise mondiale de 2008 et l’embargo russe ont eu des répercussions sur son rythme. Le taux de croissance était de plus de 6 % en 2012 et il a encore été de 2,5 % en 2013. Cependant, la sortie de crise a été largement soutenue par l’aide financière internationale et le taux de chômage est élevé – de l’ordre de 15 %- . Par ailleurs, la dynamique de croissance repose largement sur les investissements étrangers et le secteur des services , au détriment des secteurs industriel et agricole. L’accord d’association et l’accord de libre-échange sur lequel notre commission doit se prononcer permettra de soutenir l’économie géorgienne. Ils visent ainsi à accélérer l’approfondissement des relations politiques et économiques entre la Géorgie et l’Union européenne débutées dès 1992 par la signature d’un accord de partenariat et de coopération (APC).Pour accompagner les accords d’association avec la Moldavie et la Géorgie, l’Union européenne a annoncé en mai dernier un plan de soutien de 60 millions d’euros, répartis également entre les deux pays. L’aide à la Géorgie portera davantage sur la modernisation des institutions publiques, la compétitivité des entreprises rurales et les occasions commerciales avec l’Union européenne ainsi que la protection des droits des minorités et des groupes vulnérables.

L’accord d’association comprend des clauses classiques, trois points étant particulièrement accentués. D’abord, s’agissant des conflits territoriaux, l’accent est mis sur l’attachement de la Géorgie à la réconciliation et sur les efforts pour rétablir son intégrité territoriale, en vue d’un règlement durable des conflits. Par ailleurs, est souligné la nécessité d’améliorer la sécurité de l’approvisionnement énergétique. Sur ce point , rappelons que la Géorgie se situe sur la route des hydrocarbures et qu’elle a, dès 2006, affirmé sa volonté de ne pas être dépendante de l’approvisionnement en gaz russe se tournant également vers l’Azerbaïdjan. Enfin, en matière de migration, d’asile et de gestion des frontières, est affirmée l’importance d’une gestion conjointe des flux migratoires et de la mise en œuvre de l’accord signé en décembre 2008 entre l’agence européenne Frontex et le ministre de l’intérieur géorgien. En effet, il existe une certain nombre de problèmes liés aux bandes organisées géorgiennes qui viennent sur le territoire des États européens, notamment en France . Un accord a d’ailleurs été signé entre la France et la Géorgie sur la coopération en matière de sécurité intérieure.

La création d’une zone de libre-échange entre l’Union européenne et la Géorgie est un volet important de cette association. Cette zone de libre-échange doit être resituée dans un cadre plus général car la politique commerciale est une composante de la politique étrangère européenne. Il faut par ailleurs noter que l’Union européenne réalise 12 % de ses échanges avec les pays de la CEI (communauté des États indépendants) contre 3 % en 1992. La région Europe-CEI présente l’intégration régionale la plus poussée au monde avec une part de commerce intra zone de plus de 70 %. Même si la Géorgie ne fait plus partie de la CEI, cette régionalisation des échanges est un des aspects importants de la politique commerciale européenne. L’Union européenne est déjà le premier partenaire commercial de la Géorgie, représentant près de 27 % des échanges totaux du pays. Son intégration devrait constituer un vecteur de croissance pour la Géorgie et créer des perspectives des deux côtés. Pour pouvoir entamer les négociations avec l’Europe, la Géorgie a déjà largement entamé des réformes dans le domaine des réglementations techniques, des mesures sanitaires et phytosanitaires, des règles de propriété intellectuelle et de concurrence. Cet accord de libre-échange comprend des clauses relativement «  standards », avec une suppression des droits de douane sur la quasi-totalité des échanges et un processus de compatibilité entre les produits. Cet accord est d’application immédiate et comprend une protection spécifique des indications géographiques européennes .

La Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la recommandation de décision du Conseil portant approbation de la conclusion par la Commission, au nom de la Communauté européenne de l’énergie atomique, de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part COM(2014) 156 final – E 9191,

Vu la proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l’Union européenne, et à l’application provisoire de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part COM(2014) 148 final – E 9278,

Vu la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part COM(2014) 149 final – E 9279,

Considérant que l’approfondissement des relations entre l’Union européenne et la Géorgie répond au dessein européen de consolidation de la paix et de la prospérité sur tout le continent,

Considérant que la Géorgie a accompli des efforts louables et efficaces pour intégrer les standards politiques et économiques de l’Union européenne,

Considérant que la situation en Europe orientale et dans le Caucase doit inciter l’Union européenne à émettre, à l’attention de l’opinion publique géorgienne, des signaux concrets de sa volonté de rapprochement,

1. Approuve le projet d’accord d’association entre l’Union européenne et la République de Géorgie ;

2. Invite les autorités européennes à le signer dès le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014 et à le conclure ensuite au plus vite.

3. Souhaite que cet accord puisse ensuite être soumis à ratification par les États membres dans les meilleurs délais possibles. »

La Présidente Danielle Auroi. Je salue la présence parmi nous aujourd’hui de M. Frédéric Reiss, président du groupe d’amitié France-Moldavie de l’Assemblée nationale.

M. Jean-Louis Roumégas, co-rapporteur. Ancienne République soviétique, la Moldavie est un petit pays enclavé entre l’Ukraine et la Roumanie. En 2013, 3,6 millions d’habitants étaient recensés, dont plus d’un quart appartenant à des minorités nationales : Ukrainiens, Russes, Gagaouzes, Roms ou Bulgares. Mais le pays est frappé par un phénomène d’émigration économique massive : près du quart de la population a quitté le pays.

Fertile mais dépourvue de ressources naturelles et peu industrialisée, la Moldavie reste le pays le plus pauvre d’Europe : 30 % environ de la population vit encore sous le seuil de pauvreté. Une progression de près de 9 % du PIB a toutefois été enregistrée en 2013.

L’essentiel de la population ne ressent pas de progression significative de son niveau de vie, la grande masse des travailleurs et des retraités souffrant de prix à la consommation élevés au regard du niveau des salaires et des pensions. Le pays reste en outre sujet à une corruption généralisée, contre laquelle les pouvoirs publics affichent cependant une grande détermination.

La Moldavie a entrepris de nombreuses réformes structurelles pour renforcer la stabilité du secteur financier, diversifier la structure des exportations et soutenir le développement des investissements étrangers.

Le Président de la République est élu par le Parlement, à la majorité des trois cinquièmes, ce qui, pendant des années, a entraîné une grande instabilité politique. Après trois ans de vacance de la Présidence de la République, une coalition réunissant conservateurs, libéraux et sociaux-démocrates parvint finalement, le 16 mars 2012, à faire élire M. Nicolae Timofti, ancien président du Conseil supérieur de la magistrature.

La situation est plus délicate encore sur le plan territorial. La Transnistrie, région enclavée entre le reste de la Moldavie et l’Ukraine, qui représente 8 % du territoire national, a en effet proclamé son indépendance par référendum en 1991. S’en est suivi un conflit bref mais violent. Depuis 1992, la région est dirigée par des autorités de fait et se donne toutes les apparences d’un État constitué, mais dont l’indépendance n’est reconnue par aucun pays. Les forces russes sont toujours présentes avec environ 1 500 hommes.

Des négociations en vue du règlement du conflit ont lieu sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Malgré des évolutions positives, le problème du règlement politique du conflit reste entier, les autorités de Transnistrie maintenant leur objectif d’une indépendance complète.

Toutes les conditions sont malheureusement réunies aujourd’hui pour que cet équilibre instable soit remis en question par les troubles en Ukraine, compte tenu des similitudes frappantes entre la Transnistrie, d’une part, la Crimée et l’Est de l’Ukraine, d’autre part.

Une délégation du groupe d’amitié France-Moldavie de l’Assemblée nationale, conduite par son président Frédéric Reiss, que je salue, s’est rendue à Chisinau il y a un mois et demi. Sur place, nous avons pu prendre la mesure du dilemme qui s’est emparé du peuple moldave.

La minorité russe représente 6 % de la population et la communauté russophone de 22 à 30 %, selon les sources. De larges pans de la société moldave se sentent culturellement et psychologiquement proches de la Russie.

Si le roumain est en théorie la seule langue officielle, consacrée par la Constitution, le russe fait office de seconde langue nationale, d’autant qu’il est privilégié par toutes les minorités nationales et que son statut administratif reste flou. Les médias russes constituent un relais d’influence puissant en faveur des intérêts géopolitiques du grand voisin oriental et le Président Poutine est la personnalité politique la plus populaire du pays.

La Russie contrôle l’opérateur national Moldovagaz, à travers Gazprom, et la dette gazière représente plus de 4 milliards de dollars. Les exportations de vin et spiritueux moldave pèsent par ailleurs de manière importante dans la balance commerciale et la Russie en use régulièrement comme d’un moyen de pression : elle a prononcé, en septembre 2013, un embargo sur les importations de ces produits.

Les autorités moldaves, quoique clairement pro-européennes, s’efforcent, par réalisme, de maintenir des relations aussi bonnes que possible avec leur puissant voisin.

Après vingt années de tergiversations entre l’attraction de la Fédération de Russie et celle de l’Union européenne, la coalition au pouvoir estime toutefois que le pays doit désormais trancher en faveur de la seconde. Elle juge, d’une part, que la faible population du pays faciliterait son intégration rapide et, d’autre part, qu’il a pris de l’avance, par rapport à ses voisins du Partenariat oriental, dans ses réformes structurelles et sa consolidation de l’État de droit.

Le premier ministre, Iurie Leanca, a déclaré, le 29 avril, que la Moldavie était candidate à l’adhésion à l’Union européenne pour le second semestre de 2019, quand la Roumanie prendra la présidence tournante. Cette déclaration doit toutefois être prise comme un affichage politique, d’autant que la Moldavie n’a pas déposé de candidature officielle.

En 2011, 71 % des Moldaves se déclaraient favorables à l’adhésion à l’Union européenne ; aujourd’hui, l’opinion publique se partage manifestement à parts égales. Les doutes dont rend compte cette chute de la popularité européenne s’expliquent essentiellement par deux phénomènes : un mouvement de désaffection à l’égard du pouvoir en place, habituelle dans tous les pays démocratiques ; la crise économique traversée par l’Union européenne, qui peut laisser penser qu’un rapprochement avec elle sans espoir d’adhésion à court terme serait moins favorable qu’une entrée immédiate dans l’Union douanière eurasiatique.

La Moldavie s’impose pourtant comme le principal bénéficiaire par habitant des aides financière accordées par l’Union européenne. À cela s’ajoute la suppression des visas de court séjour pour entrer dans l’Union européenne, entrée en vigueur le 28 avril. Mais cela suffira-t-il pour inverser la tendance dans l’opinion publique ?

Les relations entre l’Union européenne et la Moldavie sont actuellement fondées sur l’accord de partenariat et de coopération de juillet 1998. Les négociations relatives à l’accord d’association global, dont il est question cette après-midi, ont démarré en janvier 2010 et le texte a finalement été paraphé le 29 novembre 2013. Les deux parties ont prévu de le signer le 27 juin prochain, accompagnées des représentants des gouvernements des Vingt-huit.

Cet accord d’association vise à accélérer l’approfondissement des relations politiques et économiques ainsi qu’à faire progresser l’intégration économique graduelle de la Moldavie dans le marché intérieur, notamment grâce à la mise en place d’une zone de libre-échange approfondi et complet. Cette intégration accrue devrait constituer un puissant vecteur de croissance pour la Moldavie, mais aussi améliorer la qualité des produits commercialisés et des services rendus aux citoyens, et faire du pays un concurrent effectif sur les marchés internationaux.

Il est prévu d’appliquer certaines parties de l’accord à titre provisoire. Même si, eu égard à l’accélération de la procédure, elle n’aura vraisemblablement pas lieu d’être appliquée, cette mesure traduit la volonté commune des deux parties de commencer à mettre en œuvre et à appliquer les volets de l’accord qui s’y prêtent, afin que les effets des réformes sur certains aspects sectoriels produisent leurs effets au plus tôt.

L’accord obéit à des principes généraux, dont la violation par l’une ou l’autre des parties pourrait entraîner l’adoption de mesures spécifiques allant jusqu’à la suspension des droits et obligations, au premier rang desquels le respect de l’État de droit, de la démocratie, des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

L’accord d’association instaure un dialogue politique renforcé tendant à promouvoir une convergence graduelle sur les questions de politique étrangère, de sécurité et de défense, en vue de promouvoir la paix et la justice.

Les parties réaffirment leur volonté de trouver une solution durable au problème de la Transnistrie, en respectant pleinement la souveraineté et l’intégrité territoriale de la République de Moldavie, ainsi que de faciliter ensemble la réhabilitation de la région, une fois le conflit terminé.

Dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité, l’accord met l’accent sur le fonctionnement efficace des institutions. Il établit un cadre de coopération en matière de migration, d’asile et de gestion des frontières, de protection des données personnelles et de lutte contre le blanchiment de capitaux, le terrorisme et le trafic de drogue. Il comporte des dispositions relatives à la circulation des personnes, notamment à l’assouplissement du régime des visas. Il traite aussi de la volonté de lutter contre la criminalité, la corruption, les autres activités illégales et de continuer à développer la coopération judiciaire en matière civile et pénale.

Il prévoit de nombreuses possibilités de coopération sectorielle dans vingt-huit domaines, comme la réforme de l’administration publique, la gestion des finances publiques, l’énergie, les transports, la protection de l’environnement, la politique industrielle, le social, la protection des consommateurs, l’agriculture et le développement rural, la coopération transfrontière et régionale, l’éducation, la formation, la société civile, la jeunesse ou la culture.

L’accord définit également un cadre institutionnel actualisé incluant des espaces de coopération et de dialogue. Des fonctions décisionnelles précises seront attribuées à un conseil d’association et, par délégation, à un comité d’association.

La Commission européenne a atteint les objectifs fixés dans les directives de négociation en ce qui concerne la suppression des droits à l’importation sur la quasi-totalité des échanges commerciaux et la définition d’un cadre interdisant toutes les mesures arbitraires de restriction des échanges.

La partie de l’accord d’association consacrée à la zone de libre-échange approfondi et complet contient des dispositions spécifiques en ce qui concerne les produits et les questions sensibles, prévoyant notamment des périodes de transition, des contingents tarifaires et un mécanisme anti-contournement pour certains produits agricoles.

La Moldavie adaptera progressivement ses réglementations et normes techniques à celles de l’Union européenne pour les rendre plus rigoureuses. Il est aussi prévu d’aligner la législation moldave sanitaire, phytosanitaire et de bien-être animal sur celle de l’Union européenne.

Le protocole relatif à l’assistance administrative mutuelle en matière douanière offrira un cadre juridique plus solide.

En matière d’établissement, le traitement national et le traitement de la nation la plus favorisée seront accordées aux entreprises moldaves, moyennant certaines réserves.

Un large accès au marché européen des services sera ouvert aux entreprises moldaves, avec la possibilité, à terme, de le libéraliser encore davantage.

Toutes les indications géographiques agricoles de l’Union européenne bénéficieront d’un haut niveau de protection.

D’autres dispositions visent à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle conformément aux règles internes de l’Union européenne.

À l’issue d’une période de transition, la Moldavie pourra accéder aux marchés publics de l’Union européenne, à l’exclusion du secteur de la défense.

Elle devra adopter une législation complète en matière de concurrence et garantir l’application effective du principe de concurrence non faussée. Elle s’engage à adopter un système interne de contrôle des aides d’État similaire à celui de l’Union européenne.

Des dispositions contraignantes spécifiques portent sur la tarification de l’énergie.

Les parties expriment leur détermination à poursuivre l’objectif de développement durable en matière commerciale et à respecter les engagements multilatéraux à cet égard, tout en se reconnaissant le droit d’établir leurs propres niveaux intérieurs de protection de l’environnement et du travail.

Des procédures de règlement efficaces, inspirées de l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur le règlement des différends, permettront de résoudre plus rapidement les désaccords commerciaux bilatéraux.

Enfin, les parties ont approuvé des dispositions spéciales en matière de transparence et de dialogue avec la société civile et les parties prenantes, dans le but de garantir le caractère consultatif, l’ouverture et la prévisibilité de l’élaboration des politiques commerciales.

En conséquence, je vous propose : que nous approuvions le principe du projet d’accord d’association entre l’Union européenne et la République de Moldavie ; que nous saluions l’exhaustivité des dispositions qu’il contient, de nature à donner une impulsion décisive à la coopération entre les deux parties ; que nous nous félicitions de la programmation de sa signature par les deux parties et les gouvernements des vingt-huit États membres programmée pour le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014 et que nous invitions les autorités européennes à le conclure ensuite au plus vite ; que nous émettions le souhait de le voir par la suite ratifié par les États membres dans les meilleurs délais possibles.

Mme Chantal Guittet, co-rapporteur. La forte proximité, qui s’exprime notamment dans l’intense porosité des frontières, entre la Moldavie et la Roumanie, dont tant de Moldaves vont même jusqu’à disposer du passeport, ne joue-t-elle pas un rôle particulier, voire décisif, pour arrimer ce pays à l’Union ?

M. Jean-Louis Roumégas, co-rapporteur. La force des liens entre les deux pays, symbolisés aussi par une langue commune, est en effet un élément important de l’identité moldave.

Il importe toutefois de ne pas en exagérer les conséquences.

En premier lieu, très rares sont ceux en Moldavie qui aspirent, comme on l’entend trop souvent, à un rattachement leur voisin.

En second lieu, l’adhésion de la Roumanie n’a pas, comme il est parfois dit, ouvert en grand les portes de l’Union aux citoyens moldaves, même s’ils ont, il est vrai, la faculté d’obtenir facilement un passeport roumain. Il importe en effet de noter que, depuis le 28 avril 2014, les ressortissants moldaves peuvent bénéficier des visas touristiques dans les mêmes conditions que tous nos autres partenaires.

M. Frédéric Reiss. La Moldavie, passée la douce euphorie de l’indépendance, a connu de redoutables difficultés, au sein desquelles pèsent de tout leur poids le conflit gelé en Transnistrie, une structure économique très défaillante et la vulnérabilité particulière du pays aux fléaux de la criminalité et de la corruption. Il n’est jusqu’à la légendaire francophonie de ses habitants qui n’ait essuyé les vents contraires d’une crise profonde. C’est bien pourquoi la perspective européenne, comme souvent gage d’apaisement et de probité politique et horizon de progrès économique et social, y demeure si importante – et si menacée, comme le montre notamment la force du parti communiste, plus spontanément proche de la Russie, dans les sondages en vue des prochaines élections à l’automne. Dans cet esprit, la mise en œuvre des visas touristiques et la négociation d’un accord d’association sont des étapes très importantes, objets de fierté pour une vaste majorité de Moldaves. Et, pour illustrer cet enthousiasme, je peux témoigner par exemple de la forte implication des parlementaires moldaves dans les organes de coopération européenne, avec notamment leur présidence de pas moins de deux commissions dans l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

M. Jean-Louis Roumégas, co-rapporteur. Cet enthousiasme européen, fort et réel, doit aussi tenir compte de la place absolument incontournable de la Russie. Cela impose un équilibre et une mesure dans les avancées dont nous peinons parfois, ici, à percevoir les subtilités. Je pense notamment à la question sensible de l’adhésion à l’OTAN, sur laquelle les sociaux-démocratiques font preuve d’une prudence révélatrice en nuance à l’impatience des libéraux.

M. William Dumas. Ce poids est d’ailleurs renforcé par l’ampleur de la dépendance énergétique de la Moldavie à l’égard de la Russie, illustrée notamment par une dette gigantesque de la première vis-à-vis de la seconde atteignant dès à présent quatre milliards d’euros.

Mme Chantal Guittet, co-rapporteure. Nous sommes en effet ici au cœur du sujet, face à une Russie à l’orgueil national blessé par tant d’années d’affaiblissement. Il me semble que nous devons sans cesse rappeler combien le partenariat avec l’Europe ne signifie pas l’accaparement de notre part de territoires traditionnellement situés dans la sphère d’influence de la Russie. Et, de manière plus décisive encore, il nous faudra bien trouver les voies d’une coopération loyale et fructueuse entre l’Europe et cette « Eurasie » que prétend unifier la Russie.

M. Jean-Luc Bleunven. De manière plus spécifique, de quelles armes nous dotent les accords d’association pour lutter contre la corruption, que vous mentionnez, à raison, comme l’un des défis les plus importants pour les États de notre voisinage immédiat ?

Mme Chantal Guittet, co-rapporteure. La question de la corruption obsède, à juste titre, les populations des États dont nous parlons aujourd’hui, fort mal situés dans les traditionnels « classements » des États effectués par quelques grandes ONG. Elle est l’un des plus violents fléaux auxquels sont confrontés les citoyens les plus vulnérables de ces nations.

M. Jean-Louis Roumégas, co-rapporteur. C’est en effet une préoccupation fondamentale, au cœur des débats publics dans les États dont nous parlons aujourd’hui. En Moldavie par exemple, la sensibilité de l’opinion publique est manifeste, dont témoigne par exemple la condamnation très médiatisée d’un juge corrompu au cours des derniers mois. De toute évidence, l’intégration des normes et bonnes pratiques européennes, en particulier s’agissant de l’affirmation de l’État de droit, qu’encouragent les accords d’association, jouera un rôle décisif pour faire avancer les choses.

La Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 217 et 218 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldavie, d’autre part [COM(2014) 146 – E 9277],

Vu la recommandation de décision du Conseil portant approbation de la conclusion par la Commission, au nom de la Communauté européenne de l’énergie atomique, de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldavie, d’autre part [COM(2014) 147 – E 9190],

Vu la proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l’Union européenne, et à l’application provisoire de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldavie, d’autre part [COM(2014) 157 – E 9280],

Considérant que l’approfondissement des relations entre l’Union européenne et la Moldavie répond au dessein européen de consolidation de la paix et de la prospérité sur tout le continent,

Considérant que la Moldavie a accompli des efforts louables et efficaces pour intégrer les standards politiques et économiques de l’Union européenne,

Considérant que la situation en Europe orientale doit inciter l’Union européenne à émettre, à l’attention de l’opinion publique moldave, des signaux concrets de sa volonté de rapprochement,

1. Approuve le projet d’accord d’association entre l’Union européenne et la République de Moldavie ;

2. Estime que l’exhaustivité des dispositions qu’il contient est de nature à donner une impulsion décisive à la coopération entre les deux parties ;

3. Se félicite que sa signature par les deux parties et les gouvernements des vingt-huit États membres soit programmée pour le Conseil européen des 26 et 27 juin 2014 et invite les autorités européennes à le conclure ensuite au plus vite ;

4. Souhaite que cet accord soit par la suite ratifié par les États membres dans les meilleurs délais possibles. ».

La Présidente Danielle Auroi. Les projets de conclusions qui nous sont soumis rappellent opportunément ce point fondamental, comme elles insistent avec pertinence sur l’importance des questions énergétiques. Je propose d’ailleurs, compte-tenu de l’intérêt remarquable de ces travaux dans la perspective du Conseil européen des 26 et 27 juin prochain, que nous publions ces communications dans un rapport d’information commun.

La commission a approuvé la publication du rapport d’information.

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), et 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d’ajustement à la mondialisation), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- Décision du Conseil portant nomination d’un membre du comité scientifique et technique (9487/14 – E 9381).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d’adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

Ø Commerce extérieur

- Recommandation de décision du Conseil autorisant l’ouverture de négociations en vue d’accords entre l’Union européenne et les pays tiers sur les échanges de produits biologiques (COM(2014) 178 final RESTREINT UE – E 9230).

Ø Fiscalité

- Proposition de décision du Conseil autorisant le Portugal à appliquer un taux d’accise réduit, dans la région autonome de Madère, au rhum et aux liqueurs qui y sont produits et consommés et, dans la région autonome des Açores, aux liqueurs et eaux-de-vie qui y sont produites et consommées (COM(2014) 117 final – E 9163) ;

- Proposition de décision du Conseil relative au régime de l’impôt AIEM applicable aux îles Canaries (COM(2014) 171 final – E 9217) ;

- Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 2004/162/CE relative au régime de l’octroi de mer dans les départements français d’outre-mer quant à sa durée d’application (COM(2014) 181 final – E 9231).

Ø Marché intérieur

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à adopter, au nom de l’Union européenne, au sein du Comité mixte de l’EEE, sur une modification du protocole 31 de l’accord EEE concernant la coopération dans des secteurs particuliers en dehors des quatre libertés (COM(2014) 250 final – E 9350).

Ø Pêche

- Recommandation de décision du Conseil visant à autoriser la Commission à ouvrir des négociations au nom de l’Union européenne en vue de la conclusion d’un accord de partenariat et d’un protocole dans le domaine de la pêche durable avec la République du Liberia (COM(2014) 264 final – E 9358).

Ø PESC – Relations extérieures

- Décision du Conseil modifiant la décision 2014/145/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (8944/14 – E 9367) ;

- Règlement d’exécution du Conseil mettant en œuvre le règlement (UE) no 269/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (8946/14 – E 9368) ;

- Décision du Conseil modifiant l’action commune 2008/124/PESC relative à la mission "État de droit" menée par l’Union européenne au Kosovo, EULEX KOSOVO (9573/14 – E 9378) ;

- Décision du Conseil modifiant la décision 2010/573/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre des dirigeants de la région de Transnistrie (République de Moldavie) (9830/14 – E 9379) ;

- Décision du Conseil modifiant la décision 2010/573/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre des dirigeants de la région de Transnistrie (République de Moldavie) (10080/14 – E 9380).

La séance est levée à 19 h 50

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mardi 10 juin 2014 à 18 heures

Présents. - Mme Danielle Auroi, M. Jean-Luc Bleunven, M. William Dumas, Mme Chantal Guittet, M. Laurent Kalinowski, M. Charles de La Verpillière, Mme Audrey Linkenheld, M. Jean-Louis Roumegas

Excusés. - Mme Seybah Dagoma, M. Jérôme Lambert, M. Lionnel Luca

Assistait également à la réunion. - M. Frédéric Reiss