commerce extracommunautaire
Question de :
M. Thierry Lazaro
Nord (6e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 27 janvier 2000
M. le président. La parole est à M. Thierry Lazaro.
M. Thierry Lazaro. Tout d'abord, merci de grignoter ainsi de plus en plus le temps de parole de l'opposition.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.
Bon nombre d'entreprises françaises sont frappées depuis plusieurs mois par une importante mesure de rétorsion de la part des Etats-Unis: la taxation supplémentaire de leurs produits à 100 % en représailles contre l'embargo sur le boeuf au hormones décidé par la Communauté européenne.
Dans le Nord, l'entreprise Leroux, leader mondial dans son domaine, la chicorée sous toutes ses formes, est touchée dans sa volonté de s'implanter sur le marché nord-américain.
Son chiffre d'affaires aux USA est de 10 millions de francs.
Depuis le 29 juillet dernier, date à laquelle cette société a appris qu'elle était frappée par cette surtaxation, alors que votre ministère savait qu'elle figurait sur une première liste dressée par les Etats-Unis dès le 22 mars, cette PME a dû, pour ne pas perdre le marché, opérer une baisse de prix compensant cette surtaxe. Cela représente une perte de 2 millions de francs pour les six derniers mois.
Dans l'hypothèse où cette mesure serait maintenue, l'entreprise ne pourrait poursuivre son activité nord-américaine en 2000, ce qui entraînerait inévitablement la suppression de nombreux emplois au sein de la filière chicorée, qui représente, dans la région Nord-Pas-de-Calais, plus de 2 000 emplois.
Monsieur le ministre, cette entreprise, comme bien d'autres, est sans nouvelle des mesures que vous entendez prendre. Comptez-vous exiger de la Communauté européenne qu'elle prenne en charge les différentiels de prix consécutifs à la surtaxation imposée par les Etats-Unis ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. D'abord, monsieur le député, je tiens à démentir très formellement votre allégation. Le ministre de l'agriculture n'était bien entendu pas du tout au courant de l'existence d'une liste avant tout le monde.
La meilleure preuve, c'est que cette rétorsion des Etats-Unis ne s'exerce pas à l'encontre du ministère de l'agriculture, et encore moins d'une entreprise du Nord, mais à l'encontre de la Communauté européenne tout entière, pour un certain nombre de productions qui sont aussi bien le porc danois, des productions allemandes, la chicorée...
M. Jacques Godfrain. Le roquefort !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. ... le roquefort, monsieur Godfrain, vous avez raison, le foie gras du Sud-Ouest, la moutarde de Dijon, et d'autres encore. Il est donc faux d'alléguer que le ministère de l'agriculture aurait été au courant avant les entreprises !
Ces mesures de rétorsion, je m'en suis déjà expliqué devant l'Assemblée nationale, ont été édictées par les Etats-Unis à la suite d'un arbitrage de l'OMC, à l'occasion d'une décision de la Communauté européenne de maintenir l'embargo sur le boeuf aux hormones américain. Fallait-il lever cet embargo alors que nous l'avons décidé pour des raisons de sécurité alimentaire ? Je ne le crois pas.
M. Pierre Lellouche. Qu'attendez-vous pour prendre des mesures de rétorsion contre de telles décisions ?
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Calmez-vous, monsieur Lellouche ! Laissez-moi répondre au lieu de vous énerver ainsi systématiquement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Nous sommes face à deux problèmes.
La négociation avec les Etats-Unis, pour essayer d'alléger ou de transférer ces mesures de rétorsion, avec éventuellement des compensations financières globales, relève de la Commission européenne. C'est à la Commission de le faire, et elle le fait.
M. Pierre Lellouche. C'est toujours la Commission !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Lellouche, calmez-vous ! Moi, je suis serein ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Un jour, vous aurez l'occasion de répondre !
M. Jean-Claude Lefort. Il se shoote aux hormones !
M. le président. Un peu de calme ! Poursuivez, monsieur le ministre !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Par ailleurs, il faut savoir ce que l'on peut faire pour aider les entreprises et les secteurs qui sont victimes de ces rétorsions. Le conseil de l'agriculture a posé ce problème à deux reprises à la Commission européenne. Dans l'état actuel des choses, il n'y a pas de moyens européens, aucune ligne budgétaire pour de telles actions. Nous faisons donc ce que nous pouvons, au niveau du ministère, pour apporter des aides ponctuelles. Nous l'avons fait pour le roquefort, et sommes prêts à le faire pour d'autres secteurs, en particulier celui de la chicorée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Thierry Lazaro
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Commerce extérieur
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 2000