croissance
Question de :
M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 24 mai 2001
M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
M. Didier Migaud. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Hervé Morin. Ah, ça y est, le téléphone !
M. Didier Migaud. L'INSEE a publié ce matin le chiffre de la croissance du premier trimestre 2001: 0,5 %. Ce pourcentage, bien que supérieur à celui de nos voisins, est en deçà de nos attentes et du chiffre de la croissance du quatrième trimestre 2000, ce malgré un niveau soutenu de consommation et de création d'emplois.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter une explication sur le ralentissement de la croissance ? Quelles conséquences en tirez-vous ? Cela remet-il en cause les hypothèses de croissance pour l'année 2001 ? Selon vous, quelle croissance pouvons-nous attendre l'année prochaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le rapporteur général, votre question est importante puisque, on le sait bien, la croissance détermine beaucoup de choses, en particulier en matière d'emplois. Le chiffre de 0,5 % que vous indiquez pour le 1er trimestre de cette année est provisoire, j'insiste sur ce mot.
D'où viennent ces 0,5 % ? D'une part, d'un chiffre de consommation très élevé, 1,3 %, lié à la fois à une bonne progression des revenus, à un chiffre d'emplois positif et à une baisse des impôts. D'autre part, le chiffre des exportations se réduit, comme c'est compréhensible compte tenu de la conjoncture internationale, et nous assistons à ce qu'on appelle un déstockage massif, c'est-à-dire que des entreprises, au lieu d'investir comme les spécialistes s'y attendaient, ont consommé leurs stocks. Le chiffre du déstockage est l'un des plus élevés dans les séries statistiques des dernières décennies.
Voilà les éléments qui expliquent ce chiffre provisoire, à la fois décevant et un peu surprenant. Décevant parce que, comme vous l'avez souligné, nous attendions quelque chose comme 0,7 %. Surprenant parce qu'il est en contradiction manifeste avec les 124 000 créations d'emplois enregistrées, chiffre considérable. On n'arrive pas à expliquer comment l'emploi peut progresser de près de 1 %, alors que la croissance elle-même progresse de 0,5 %.
Nous avons, dans le passé, l'exemple de chiffres provisoires qui ont été corrigés ultérieurement. Mais nous ne savons pas, pour le moment, si ce sera le cas. Toujours est-il que, par rapport à notre prévision de croissance qui se situe, pour l'année 2001, autour de 2,9 % - entre 2,7 et 3,1 % -, ce chiffre de 0,5 %, s'il était confirmé au cours des trimestres suivants, nous calerait légèrement en dessous.
Que faut-il faire ?
Il y a deux erreurs à ne pas commettre. La première serait de faire comme si ce résultat n'existait pas. Il faut donc le prendre comme une indication, peut-être même un certain avertissement. La seconde serait de sur-réagir, comme l'ont fait dans le passé pas mal de gouvernements,...
M. Jean-Paul Charié. C'est facile !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... ce qui aboutit aux conséquences exactement inverses de celles qu'on recherche.
En revanche, il y a, je crois, trois lignes très précises de politique économique à suivre. La première, c'est de maintenir notre politique concernant le pouvoir d'achat, les revenus, les créations d'emplois et les baisses d'impôts parce qu'elle constitue aujourd'hui le socle de la croissance. La deuxième, c'est de ne pas laisser déraper et de continuer à maîtriser les dépenses publiques, qu'elles soient sociales ou budgétaires. La troisième, compte tenu de ce que j'ai dit à propos des investissements, c'est de ne pas prendre de mesures susceptibles de déstabiliser les entrepreneurs mais d'essayer au contraire de toujours renforcer la confiance.
M. Pierre Lellouche. Avec le soutien du groupe communiste: demandez à Gremetz !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ainsi, monsieur le rapporteur général. nous devons prendre ce chiffre comme une légère déception et comme une indication, mais maintenir notre cap, en particulier pour ce qui concerne la consommation, tout en restant vigilants - vous le disiez vous-même il y a quelque temps - car certaines indications de conjoncture internationale ne sont pas bonnes et ont des répercussions en France. Néanmoins, il faut être confiant car le travail des Français a été excellent et il est normal que, tous ensemble, ils en recueillent les fruits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Didier Migaud
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 mai 2001