armée
Question de :
M. Alain Moyne-Bressand
Isère (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Alain Moyne-Bressand attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur les conséquences sanitaires des essais nucléaires français de Polynésie ou du Sahara. Depuis plusieurs années l'Association des vétérans d'essais nucléaires (AVEN) se fait le relais des inquiétudes des personnes, civiles et militaires, qui ont été exposées à ces expériences et oeuvre pour que la vérité soit faite et que la justice soit rendue. Aujourd'hui un nombre important de vétérans sont décédés ou souffrent de maladies radio induites. Des descendants de vétérans sont également touchés par ces mêmes maladies et d'autres vont les déclarer dans un avenir proche. Á ce jour la France est le seul pays démocratique à ne pas avoir reconnu les effets des essais, contrairement aux États-Unis et à la Grande-Bretagne qui ont voté des lois indemnisant les victimes. Dans ce contexte il souhaiterait savoir quel est l'état d'avancement des études menées en France relatives à l'incidence des essais nucléaires sur la santé et quelles sont les mesures que le Gouvernement pourrait mettre en oeuvre pour assurer une indemnisation décente des victimes. - Question transmise à M. le ministre délégué aux anciens combattants.
Réponse publiée le 25 juillet 2006
Dans son rapport publié en février 2002, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a dressé l'historique des essais nucléaires français et étrangers et a analysé les études dosimétriques effectuées. Dans leurs conclusions, les auteurs de ce rapport indiquent qu'il n'y a pas lieu de transposer en France des mécanismes de prise en charge utilisés dans d'autres États. En effet, chaque citoyen français bénéficie d'une couverture sociale par l'assurance maladie de la Sécurité sociale qui prend en charge les coûts afférents à la pathologie qu'il peut présenter et, dans le cas où cette pathologie est reconnue d'origine professionnelle, des mécanismes propres aux milieux civil et militaire permettent la prise en charge spécifique de la maladie. Par ailleurs, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'indemniser tout militaire qui, s'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité, a la possibilité d'utiliser la démarche d'imputabilité par preuve. Celle-ci peut être admise par tout moyen et à tout moment, sans condition de délai, sachant que la jurisprudence du Conseil d'État admet que la preuve peut être rapportée par un faisceau de présomptions. Ce dispositif permet, dans le cas d'exposition prolongée à certaines substances, d'admettre l'imputabilité au service des affections en cause dans le cadre des pathologies énumérées sur les listes de maladies professionnelles. Dans certains cas où des faits ou des circonstances particulières de service ont été rapportés et une relation de l'affection avec ceux-ci établie, un droit à pension militaire d'invalidité a ainsi été accordé. La législation actuelle autorise donc, même longtemps après les faits, une indemnisation équitable des dommages physiques subis, sans qu'il soit nécessaire de mettre en oeuvre un régime de présomption de causalité pour le seul risque nucléaire. Le ministre délégué aux anciens combattants souhaite ajouter que le suivi sanitaire des essais nucléaires français fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics. C'est ainsi qu'à l'initiative du Président de la République, les ministres en charge de la santé et de la défense ont confié, le 15 janvier 2004, au directeur général de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) et au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND) le pilotage conjoint d'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des essais nucléaires français (CSSEN), effectués au Sahara et en Polynésie française. Ce comité est composé de représentants des ministres en charge de la défense et de la santé, des instituts et agences concernés (Institut national de veille sanitaire, Centre international de recherche sur le cancer, Centre national de la recherche scientifique...), des responsables de la défense et du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en charge des essais nucléaires, qui peuvent s'entourer en tant que de besoin des personnes qu'ils jugent utiles. Il est ouvert, en effet, à toutes les contributions y compris d'ordre scientifique sur les conséquences éventuelles des essais nucléaires vis-à-vis de la population. Il a notamment pour mandat de définir et de décrire les pathologies susceptibles d'être radio-induites, de caractériser les catégories de personnes concernées par le suivi des essais nucléaires français et de dresser le bilan des données disponibles sur les expositions aux rayonnements ionisants durant les essais en cause. Dans le cadre de ce comité seront réexaminés tous les travaux et études relatifs aux éventuelles conséquences sanitaires de ces essais. Un premier rapport d'étape a été rendu public en avril 2005. Il est consultable sur le site Internet de l'Autorité de sûreté nucléaire : www.asn.gouv.fr. Par ailleurs, le ministre de la défense a demandé au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense de renforcer le dialogue engagé avec les responsables polynésiens pour répondre aux questions que se posent les populations directement concernées sur les effets des essais nucléaires effectués dans l'atmosphère entre 1966 et 1974 en Polynésie française. A cette fin, le délégué s'est rendu en Polynésie, du 6 au 10 février 2006, où il a rencontré notamment des membres du Gouvernement polynésien, des parlementaires, des élus locaux et des représentants de la société civile. Du 15 au 20 mai dernier, il a conduit une large opération d'information en Polynésie sur les essais nucléaires. Il a remis aux membres du Conseil d'orientation pour le suivi des conséquences des essais nucléaires, mis en place par le président du territoire, aux élus, aux médias et à des représentants de la population, des documents inédits qui répondent aux questions techniques soulevées par la commission d'enquête polynésienne. Seuls 6 essais ont fait l'objet de retombées « significatives » qui devront être analysées dans une nouvelle étude à caractère sanitaire. Enfin, le ministère de la défense et le CEA publieront, à l'automne 2006, un ouvrage sur l'ensemble des essais nucléaires français dans le Pacifique et leurs conséquences radiologiques, et le CSSEN adressera ses premières recommandations au Gouvernement français d'ici à la fin de l'année en cours.
Auteur : M. Alain Moyne-Bressand
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : défense
Ministère répondant : anciens combattants
Dates :
Question publiée le 23 mai 2006
Réponse publiée le 25 juillet 2006