Question au Gouvernement n° 1682 :
carburants

12e Législature

Question de : M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 18 novembre 2004

FISCALITÉ DES PRODUITS PÉTROLIERS

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
M. Didier Migaud. Monsieur le ministre d'État, la suppression de la TIPP flottante représente un supplément de recette fiscale de l'ordre de 700 millions d'euros en année pleine, oui, 700 millions d'impôts indirects supplémentaires. Ce chiffre, qui émane du ministère de l'économie, est reproduit dans un rapport de la commission des finances. C'est donc un fait incontestable, reconnu par le ministère : la flambée des prix du pétrole provoque une ponction fiscale supplémentaire sur les consommateurs de produits pétroliers, particulièrement ressentie par les ménages les plus modestes.
Qui pourrait croire un instant qu'un baril à cinquante dollars au lieu de vingt-cinq ou trente-six soit sans incidence sur les recettes fiscales de l'État ? 19,6 % de cinquante dollars, c'est plus de 19,6 % de vingt-cinq ou de trente-six dollars. (" Bravo ! " sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Comme votre gouvernement refuse par principe de restituer cette ponction fiscale aux ménages à travers la TIPP flottante, vous avez inventé la commission " pirouette cacahuète " : pirouette, parce qu'elle ressemble à une manoeuvre dilatoire, cacahuète, parce que, au final, on lui fera dire qu'il n'y a rien à rendre aux Français.
Pour cela, le Gouvernement mélange les choux et les carottes. Les choux, ce sont les surplus de recettes au titre de la TVA, qu'il est impossible de ne pas reconnaître ; les carottes, ce sont les moins-values, constatées au titre de la TIPP, qui sont la cause d'une tendance lourde, qui mérite qu'on s'y attarde.
M. Richard Mallié. Quelle caricature !
M. Didier Migaud. En effet, la consommation de produits pétroliers n'est pas dynamique. De 1991 à 2001, elle a augmenté moins vite que la croissance française. La conséquence, ce sont des recettes fiscales qui diminuent en proportion de la richesse nationale. Le strict respect des limitations de vitesse ne fait qu'accentuer ce phénomène, qui n'a strictement rien à voir avec l'explosion du prix du pétrole et ses conséquences négatives sur le pouvoir d'achat.
En mettant en avant cette tendance lourde, vous reconnaissez que vous avez menti aux élus locaux (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) en leur faisant croire que vous leur transfériez une ressource dynamique et l'on peut comprendre leur colère légitime. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) D'autant que l'échange entre M. Méhaignerie et M. Copé montre que vous persistez dans le mensonge. (" Non ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Marc Roubaud. Et la question ?
M. Didier Migaud. Mais persister dans un mensonge n'implique pas qu'il devienne vérité.
Ma question est très simple : la commission que vous mettez en place, monsieur le ministre d'État, sert-elle à quelque chose ? Tout n'est-il pas ficelé d'avance ? Allez-vous oui ou non restituer aux Français la totalité de la ponction fiscale supplémentaire que vous leur avez fait subir par votre refus de la TIPP flottante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, il n'y a vraiment pas de quoi polémiquer ! En tout et pour tout, il y a trois questions à examiner et un homme de votre compétence va les comprendre facilement.
M. Yves Durand. Oui !
M. Patrick Lemasle. Merci pour les autres !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Première question : y a-t-il des recettes en plus liées à la TIPP et à la TVA ? (" Oui ! " sur les bancs du groupe socialiste.) À ce sujet, je me permets de vous signaler que, si quelqu'un a fait une confusion, ce qui peut arriver à tout le monde, c'est vous, car lorsque vous avez cité le taux de 19,6 %, vous ne parliez naturellement pas de la TIPP, mais de la TVA.
Une commission se réunira demain pour le dire. Elle comprendra des parlementaires de tous les groupes, sera présidée par un magistrat de la Cour des comptes et déterminera les recettes en plus ou en moins, issues de la TIPP et de la TVA. Il n'y a pas lieu de polémiquer. C'est une procédure rapide.
M. Patrick Lemasle. C'est un peu rapide, en effet !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le groupe de l'UMP comme le groupe UDF nous l'avaient demandé.
Deuxième question : l'Europe nous autorise-t-elle à restituer d'éventuels surplus ? (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste.) À votre place, je serais plus prudent ! J'ai assisté hier au conseil Ecofin.
M. Jacques Desallangre. Vous ne l'aviez pas dit !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai le plaisir d'indiquer à l'Assemblée nationale que l'Europe nous a donné son autorisation (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste),...
M. Maxime Gremetz. Quelle chance !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...même si j'ai eu à affronter l'opposition déterminée des socialistes allemands et espagnols. Les Français doivent savoir que, alors que les socialistes français faisaient pression pour leur promettre la redistribution des surplus de recettes, leurs amis allemands et espagnols se mobilisaient au contraire pour empêcher la France d'honorer les fausses promesses des socialistes français. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Troisième question : à qui redonner ces éventuels surplus ? J'ai souhaité que ce soit à ceux de nos compatriotes pour qui la facture de fuel pour le chauffage est la plus douloureuse, c'est-à-dire ceux qui ont une petite retraite. J'ai donc proposé une prime exceptionnelle pour ceux qui touchent le minimum vieillesse.
Si les socialistes ne veulent pas la voter, nous proposerons à la majorité d'assumer cette décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Didier Migaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 novembre 2004

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