politique de l'enfance
Question de :
Mme Claude Darciaux
Côte-d'Or (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 9 mars 2006
DÉTECTION PRÉCOCE DES TROUBLES COMPORTEMENTAUX
Mme la présidente. La parole est à Mme Claude Darciaux, pour le groupe socialiste.Mme Claude Darciaux. J'aurais aimé, monsieur Borloo, que vous répondiez à la question de Mme Robin-Rodrigo : vous auriez ainsi pu nous dire si vous êtes bien contre le CPE en public, et pour en privé ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Bernard Accoyer. C'est le contraire !
Mme Claude Darciaux. C'est le contraire, oui : chacun aura compris.
Monsieur le Premier ministre, suite au rapport de l'INSERM sur les troubles comportementaux chez l'enfant et l'adolescent et dans le cadre de la préparation du plan de prévention de la délinquance, vous envisagez une détection très précoce de ces troubles.
Cette proposition va à l'encontre du rapport de février 2006, intitulé L'enfant d'abord, produit par la mission parlementaire présidée par Patrick Bloche, et dont la rapporteure était Valérie Pecresse. Ce rapport a d'ailleurs été conforté par M. de Broissia, président du conseil général de Côte d'Or et Mme Claire Brisset, défenseure des enfants.
L'ensemble du volet concernant la protection de l'enfance de ce rapport a été voté à l'unanimité par les membres de la commission ; il met clairement en évidence la nécessité de privilégier la prévention des risques par la médiation et l'accompagnement global et médico-social de la famille, et ce, en renforçant le rôle pilote des conseils généraux.
Quant à vos propositions de dépister, dès le plus jeune âge, les enfants susceptibles d'avoir un parcours les conduisant à la délinquance, de créer des carnets de comportements, à remplir dès la naissance, et de demander aux professionnels de la petite enfance de devenir des auxiliaires de police, n'aboutiraient-elles pas au fichage des enfants et, plus globalement, n'attenteraient-elles pas à leurs droits ?
Mme la présidente. Veuillez poser votre question, ma chère collègue !
Mme Claude Darciaux. Avoir volé un cube à trois ans vous vaudra-t-il d'être considéré comme délinquant récidiviste à dix ans pour avoir volé une gomme ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Avec une telle approche, les premières bêtises d'enfant risquent d'être interprétées comme l'expression d'une personnalité pathologique.
Monsieur le Premier ministre, alors que la pétition " Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans " a déjà recueilli plus de 65 000 signatures, entendez-vous renoncer à cette inquiétante proposition et vous référer davantage aux cent préconisations du rapport parlementaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la députée, je vous réponds au nom de M. le Premier ministre et à la place de M. Nicolas Sarkozy (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste) qui est, en ce moment même, comme vous le savez, dans l'avion qui le conduit aux Antilles. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Votre question me donne, du reste, l'opportunité de rappeler que cela fait vingt-deux ans qu'aucun ministre de l'intérieur ne s'est rendu dans ces départements. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je précise, pour être tout à fait complet, que le Premier ministre s'y rendra lui-même prochainement.
Vous m'interrogez sur le rapport de l'INSERM, dont je vous rappelle qu'il s'agit d'un organisme créé en 1964 qui ne dépend, ni de près ni de loin, du ministère de l'intérieur, de ses directions et de ses services.
Que contient ce rapport ? Vous l'avez évoqué : que la colère, l'agressivité, les troubles de conduite chez l'enfant - c'est d'ailleurs son titre -, doivent inciter à observer ces enfants, à les accompagner et à les soigner mieux ; il y a unanimité sur ce point.
Face à ce constat, nous proposons simplement que la communauté éducative, les services de PMI et la médecine scolaire, agissent, d'abord, pour que les souffrances des enfants soient repérées et, ensuite, pour que les centres d'action médico-sociale précoce, les services médico-scolaires et les services pédo-psychiatriques les prennent en charge. Cela ne saurait heurter personne, madame la députée.
M. André Chassaigne. Si, justement !
M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Les Anglais, les Allemands, les Canadiens, beaucoup de nos voisins ont engagé des initiatives de ce genre. En France même, ponctuellement, trop ponctuellement, certains centres d'action médico-sociale mènent des actions remarquables en ce domaine.
Vous me posez des questions précises. Je vais y répondre clairement.
D'abord, il n'y a, de notre part, aucune velléité d'instrumentaliser les soignants. (" Si ! Si ! " sur les bancs du groupe socialiste.)
Ensuite, il n'est nullement envisagé de dresser un fichier d'enfants. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Enfin, il n'est pas question de repérer de potentiels futurs délinquants, pour la bonne raison qu'il n'y a pas, effectivement, d'unanimité dans la communauté scientifique.
Ce que nous proposons est simple, clair et net : généraliser ce qui a déjà marché ponctuellement, à savoir aider les enfants qui accumulent les difficultés, afin qu'ils puissent réussir ensuite leur vie. Cela signifie, et j'espère que nous nous retrouverons sur cet objectif, que, pour le Gouvernement, il vaut mieux prévenir que guérir ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Marie Le Guen. Commencez par soigner le CPE !
Auteur : Mme Claude Darciaux
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : collectivités territoriales
Ministère répondant : collectivités territoriales
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 9 mars 2006