Question au Gouvernement n° 294 :
lois de finances

12e Législature

Question de : M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 15 janvier 2003

CHOIX BUDGÉTAIRES POUR 2003

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
M. Didier Migaud. Avant toute chose, permettez-moi de dire que nous souhaitons non seulement un débat de l'Assemblée nationale sur l'Irak, mais aussi un vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, je voudrais vous interroger sur le budget, qui a été voté en décembre et est dépassé avant même d'avoir été exécuté, tout le monde en convient, du président du MEDEF à la Commission européenne.
M. Richard Mallié. Vous n'avez pas de leçons à nous donner sur ce point !
M. Didier Migaud. Le Conseil constitutionnel lui-même a émis des réserves sur sa sincérité. Le décalage entre votre discours et la réalité est flagrant. Vous continuez à ne pas dire la vérité aux Français, vous continuez de tout promettre en pensant qu'une bonne communication peut suffire à les tromper. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Georges Tron. Votre déficit était de 300 milliards, il faut le rappeler !
M. le président. Monsieur Tron, laissez parler M. Migaud !
M. Didier Migaud. Pourtant, pour la grande majorité des Français, la réalité n'est pas une baisse de l'impôt, car celle-ci est ciblée sur le revenu et sur une petite minorité de foyers, mais des rafales d'augmentations des prélèvements et des impôts indirects : hausse de la fiscalité sur les carburants et le fioul domestique, hausse massive du prix des cigarettes, hausse des tarifs publics, SNCF, RATP, bientôt prix du timbre et sans doute de l'électricité, hausse des cotisations chômage...
M. Georges Tron. Vous souvenez-vous de votre pourcentage de prélèvements ?
M. Didier Migaud. En frappant le plus grand nombre au bénéfice d'un petit nombre, vous avez pris le risque de briser la consommation, moteur principal de la croissance. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Jacques Le Guen. Et l'effet des 35 heures ?
M. Didier Migaud. Ces augmentations sont d'autant moins acceptables qu'elles sont accompagnées d'un recul du service public et de l'Etat.
M. Georges Tron. C'est vous !
M. Yves Fromion. Irresponsables !
M. Yves Nicolin. Baratin !
M. Didier Migaud. La réalité, c'est aussi la suppression progressive des emplois jeunes, et de deux tiers des contrats emploi solidarité. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. Mes chers collègues, s'il vous plaît !
M. Didier Migaud. La réalité, c'est aussi des budgets civils sacrifiés : l'éducation nationale, la recherche. Et, à cet égard, la régulation massive que vous préparez nous fait craindre le pire.
M. Georges Tron. Vous oubliez vos propres échecs !
M. Jacques Desallangre. Vous criez parce que ça fait mal !
M. Didier Migaud. Il faut que cesse cette hypocrisie (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) dont a parlé Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, qui en un autre temps d'ailleurs a parlé de mensonge d'Etat. Ces termes s'appliquent bien à la présente situation. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. Laissez parler M. Migaud !
M. Didier Migaud. Ma question est double. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. Monsieur Migaud, posez-la !
M. Didier Migaud. Je constate que la vérité fait réagir. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Monsieur le Premier ministre, vous-même nous parlez beaucoup de vérité. Quand allez-vous enfin la dire aux Français ?
M. Georges Tron et M. Yves Fromion. Pas vous !
M. le président. Monsieur Tron, monsieur Fromion, s'il vous plaît : ne commençons pas l'année comme cela !
M. Didier Migaud. Quand présenterez-vous au Parlement une loi de finances rectificative ? Il ne sert à rien de parler d'héritage : vous avez aggravé la situation avec les mesures que vous avez prises. (Vives protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. Soyez un peu tolérants : laissez parler M. Migaud !
M. Didier Migaud. Merci, monsieur le président.
Quand allez-vous, je le répète, pour dire enfin la vérité aux Français, présenter au Parlement une loi de finances rectificative ? Face à l'envolée du prix de pétrole et à ses conséquences sur celui des carburants et du fioul domestique, quand allez-vous réactiver la TIPP flottante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
De nombreux députés du groupe socialiste. Le Premier ministre !
M. le président. S'il vous plaît, ne faites pas ce que vous reprochiez aux autres il y a trente secondes ! Ecoutez M. Mer.
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cher monsieur Migaud (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), un excès de critique tue la critique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jean-Claude Lefort. Et un excès d'harmonie tue l'harmonie !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons terminé l'année 2002 en ayant augmenté le pouvoir d'achat des Français de 3 %. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - « Ah bon ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et l'année 2003 sera une année que nous gérerons avec prudence et sagesse, en commençant par quelque chose qui a toujours existé mais que nous ferons plus intelligemment : la mise en réserve de certains crédits (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste)...
M. Bernard Roman. Lesquels ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... afin de créer les conditions permettant par exemple à Mme Roselyne Bachelot d'avoir un peu d'argent supplémentaire à dépenser pour la protection de nos côtes, ou éventuellement à M. Dominique de Villepin pour conserver une capacité d'intervention dans le domaine militaire si, comme nous le craignons, cela ne peut être évité. (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Vous l'avez dit !
M. le président. S'il vous plaît, écoutez la réponse !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous pouvons donc gérer notre politique de manière intelligente. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Il ne sert à rien de crier, mes chers collègues !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je me permets de vous rappeler, messieurs les députés, que nous menons actuellement un certain nombre d'opérations militaires en Côte-d'Ivoire, dans l'intérêt de ce pays et des Français qui y résident. Or ces dépenses doivent être financées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) La politique du Gouvernement sera prudente et sage. Elle consiste à regarder en face le monde incertain dans lequel nous sommes et à agir avec la prudence nécessaire pour que les décisions que vous avez entérinées à travers la loi de finances soient respectées. Elles le seront. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Bernard Roman. Ce n'est pas une réponse !
M. le président. Je vous en prie, soyez un peu dignes !

Données clés

Auteur : M. Didier Migaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Finances publiques

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 15 janvier 2003

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