Question orale n° 1072 :
métallurgie

12e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Nicolas
Eure (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Pierre Nicolas attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation du site « Alcan Péchiney » à Rugles, devenu Novelis depuis le 1er février 2005. Il le remercie de lui avoir apporté par courrier du 18 août 2004, d'utiles précisions sur la stratégie industrielle d'Alcan après son OPA réussie sur Péchiney au cours de laquelle il avait eu plusieurs entretiens avec des représentants d'Alcan qui déclaraient que la prise de contrôle du groupe Péchiney ne prévoyait pas de fermetures de site de production, ni de changements significatifs des effectifs industriels de Péchiney en France. Il était également acquis qu'Alcan devait céder une part importante, sinon la totalité des entreprises de produits laminés pour satisfaire les règles de la concurrence du marché commun. C'est désormais chose faite avec la création de la société Novelis cotée en bourse à New-York et à Toronto où se trouve le siège social duquel dépend maintenant le site de Rugles. Malgré la compétence et la détermination de la direction locale cette nouvelle situation inquiète légitimement le personnel et les élus locaux eu égard à l'endettement de la société Novelis. En effet bien que des investissements de production lourds aient été réalisés sur le site qui produit annuellement 42 000 tonnes de feuilles d'Aluminium, pour une capacité de 47 000, une réorganisation en cours semble conduire vers une diminution des emplois, 400 actuellement. À cet égard, des mouvements sociaux inhabituels sur ce site ont déjà eu lieu. En outre, la stratégie industrielle de Novelis, leader mondial dans les produits laminés semble pour l'instant assez ténue. Or, la pérennité du site de Rugles dans sa dimension actuelle est vitale pour cette région du Sud de l'Eure au sein de laquelle l'usine « Péchiney Alcan Novelis » fait figure de véritable poumon économique et social. Une fermeture, voire une diminution d'activité générerait de véritables drames sociaux tant pour le personnel dont la compétence et le sens des responsabilités sont reconnus que parmi les sous-traitants dont l'activité est directement et intimement liée à celle de l'usine. En conséquence, il sollicite de sa part une attention particulière voire une intervention auprès de Novelis afin que le site de Rugles soit maintenu dans son entité actuelle.

Réponse en séance, et publiée le 9 février 2005

SITUATION DE L'USINE " PECHINEY ALCAN NOVELIS " À RUGLES DANS L'EURE

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, pour exposer sa question, n° 1072, relative à la situation de l'usine " Pechiney Alcan Novelis " à Rugles dans l'Eure.
M. Jean-Pierre Nicolas. Monsieur le président, monsieur le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation, mes chers collègues, je souhaiterais, en partant d'un cas précis, attirer l'attention de M. le ministre de l'industrie sur la vigilance collective que nous devons exercer à l'égard des conséquences que peuvent avoir, sur notre territoire, les restructurations des grands groupes industriels mondiaux.
J'ai déjà eu l'occasion d'interroger M. Francis Mer, alors ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et, plus récemment, M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie, sur la situation du site Alcan Pechiney à Rugles, devenu Novelis depuis le 1er février 2005. Dans une lettre du 18 août 2004, M. le ministre avait bien voulu m'apporter d'utiles précisions sur la stratégie industrielle d'Alcan, après son OPA réussie sur Pechiney : en cette occasion, j'avais eu plusieurs entretiens avec les représentants d'Alcan, qui déclaraient que la prise de contrôle du groupe Pechiney ne prévoyait la fermeture d'aucun site de production et aucun changement significatif des effectifs industriels de Pechiney en France.
Il était également acquis qu'Alcan devait céder une part importante, sinon la totalité des entreprises de produits laminés pour satisfaire aux règles de la concurrence du marché commun. C'est désormais chose faite avec la création de la société Novelis, cotée en bourse à New York et à Toronto où se trouve le siège social duquel dépend maintenant le site de Rugles.
Malgré la compétence et la détermination de la direction locale, cette nouvelle situation inquiète légitimement le personnel et les élus locaux, eu égard à l'endettement de la société Novelis. En effet, bien que des investissements de production lourds aient été réalisés sur le site qui produit annuellement 42 000 tonnes de feuilles d'aluminium, pour une capacité de 47 000, une réorganisation en cours semble conduire vers une diminution des emplois, qui sont actuellement de 400. À cet égard, des mouvements sociaux inhabituels sur ce site ont déjà eu lieu.
En outre, la stratégie industrielle de Novelis, leader mondial dans les produits laminés, semble pour l'instant assez ténue. Or la pérennité du site de Rugles dans sa dimension actuelle est vitale pour cette région du sud de l'Eure au sein de laquelle l'usine Pechiney Alcan Novelis fait figure de véritable poumon économique et social. Une fermeture, voire une diminution d'activité générerait de véritables drames sociaux, tant pour le personnel, dont la compétence et le sens des responsabilités sont reconnus, que parmi les sous-traitants, dont l'activité est directement et intimement liée à celle de l'usine.
En conséquence, je me permets de solliciter de la part de M. le ministre une attention particulière, voire une intervention auprès de Novelis afin que le site de Rugles soit maintenu dans son entité actuelle. Cette affaire présente une évidente dimension sociale, et la dimension économique, que je ne mésestime pas, ne doit pas, me semble-t-il, être traitée uniquement en termes de valeurs boursières.
M. le président. La parole est à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation.
M. Christian Jacob, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation. Monsieur le député, je voudrais renouveler les excuses de mon collègue Hervé Gaymard qui, retenu à Bercy, m'a chargé de vous transmettre les éléments de réponse suivants.
Comme vous le savez, la séparation de l'usine de Rugles du reste du groupe Alcan est au moins partiellement le résultat des obligations imposées par les autorités européennes de la concurrence lors de l'OPA d'Alcan sur Pechiney en 2003.
Pour éviter une situation de monopole et satisfaire aux règles de concurrence du marché commun, Alcan s'était en effet engagé, dans un délai de un an, soit à céder la totalité de ses participations détenues en Allemagne dans le laminoir de Norf, ainsi que dans deux autres usines, soit à céder en France le laminoir de Neuf-Brisach et les usines de Rugles et d'Annecy.
Confronté à cette alternative, Alcan a décidé de créer Novelis, la plus grande société mondiale dans le domaine des produits laminés d'aluminium, avec un chiffre d'affaires de plus de 6 milliards de dollars. Pour sa part, Alcan continuera de se concentrer sur l'extension de ses activités liées à l'extraction de la bauxite, à la production d'alumine et d'aluminium de première fusion, aux emballages de spécialité, à l'aéronautique et aux produits usinés.
Si la création de deux entreprises distinctes respecte les exigences imposées par les autorités de la concurrence de la Commission européenne, elle répond également à une logique industrielle : cette nouvelle orientation stratégique permet à chacune des deux entités de bénéficier d'un fort potentiel de développement à grande valeur ajoutée. Cette solution est sans doute celle qui, compte tenu des contraintes européennes, donne les meilleures perspectives aux sites français inclus dans Novelis, et en particulier à celui de Rugles.
C'est ainsi que des investissements importants sont prévus dans l'usine de Rugles, pour doubler la capacité de la fonderie et pouvoir fondre directement des lingots d'aluminium. D'une part, l'usine pourra réduire ses émissions de composés organiques volatils ; d'autre part, l'entreprise a prévu de consacrer 15 millions d'euros à ces travaux, qui inscrivent le site dans la durée.
Cependant, la direction de l'entreprise a indiqué que des difficultés conjoncturelles, liées notamment à la baisse du dollar, rendaient indispensables des adaptations qui vont faire passer les effectifs du site de 480 à 404 personnes. Cette réduction devrait se faire sans licenciements, au travers de départs en retraite, de mutations et de la non-reconduction de vingt-cinq contrats intérimaires.
La direction de l'entreprise a indiqué qu'elle portera une attention particulière au reclassement de ces derniers. Une augmentation des salaires, de 2,1 %, et des primes, de 13 %, est par ailleurs prévue pour compenser l'adaptation des postes de travail.
Monsieur le député, le Gouvernement est bien conscient de l'importance économique du site de Rugles pour le bassin d'emploi. Il sera très attentif à la stratégie que Novelis adoptera pour cette usine et pour tous les autres sites français. De manière générale, l'évolution des anciens sites de Pechiney est particulièrement suivie au regard, notamment, des engagements souscrits par Alcan.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, pour une brève intervention.
M. Jean-Pierre Nicolas. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.
Je note, d'abord, que le Gouvernement sera particulièrement attentif à l'évolution des anciens sites Pechiney. C'est vital pour notre pays.
Je relève, ensuite, concernant l'usine de Rugles, que des investissements lourds y seront effectués mais que, malheureusement, les effectifs diminueront en raison de la conjoncture. On peut donc espérer, si d'aventure la conjoncture et donc le carnet de commandes se redressaient, que l'effectif suivra.
J'observe enfin, pour m'en réjouir, que le pouvoir d'achat des salariés sera vraisemblablement revalorisé.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Nicolas

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 8 février 2005

partager