Colombie
Question de :
M. André Vallini
Isère (9e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. André Vallini appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme sur la crise alimentaire qui frappe la population du Chocó en Colombie. Les enfants sont les premières victimes de cette crise due au blocus mis en place par le gouvernement colombien qui accuse les populations indigènes de la région de venir en aide aux guérillas. Les associations qui soutiennent ces populations soulignent que ces nouvelles privations s'inscrivent dans une politique gouvernementale de marginalisation des minorités ethniques victimes de déplacements forcés et de nombreuses violences de la part des forces militaires et paramilitaires. Il souhaite donc connaître les initiatives diplomatiques qui peuvent être prises par la France auprès des autorités colombiennes dans l'objectif de mettre fin à ces pratiques.
Réponse publiée le 16 juin 2009
La région colombienne du Choco, frontalière avec le Panama et qui borde les océans Pacifique et Atlantique, connaît depuis plusieurs années une situation sécuritaire et sociale difficile, due notamment à la présence de plusieurs fronts de la guérilla des FARC, de groupes paramilitaires (officiellement démobilisés entre 2005 et 2006) et de réseaux de narcotrafiquants. Cette région a été et reste profondément marquée par les violences que connaît la Colombie dans le cadre du conflit interne. Dans cette vaste zone, qui manque d'infrastructures d'éducation et de santé et demeure difficile d'accès, de nombreuses communautés paysannes, indigènes ou afro-colombiennes ont souffert des violences et des déplacements forcés de population. Plusieurs de ces groupes ont entrepris, avec l'appui de diverses organisations de la société civile et de l'Église, des actions auprès de la justice colombienne, afin de récupérer les terres desquelles ils avaient été chassés par la force (et qui sont exploitées, dans le cadre d'une économie d'enclave, par de grands propriétaires ou entreprises, qui y cultivent principalement du palmier à huile). Des sentences rendant la propriété collective de ces terres aux paysans ont été rendues. Toutefois, si leur application a débuté, elle se heurte à des difficultés. Dans la région Pacifique du Choco, des combats ont opposé récemment des groupes de la guérilla à des organisations criminelles : du fait de la configuration géographique du terrain, plusieurs centaines d'indigènes de l'ethnie Embéra ont été déplacés. Il ne semble pas approprié de parler d'un « blocus » du gouvernement colombien : les autorités exercent des contrôles très étroits sur certaines voies d'accès (notamment fluviales), mais ces derniers sont avant tout destinés à lutter contre le narcotrafic et les groupes armés illégaux. En revanche, plusieurs indications confirment l'existence de « barrages » illégaux, aléatoires et mobiles, qui sont mis en place par divers groupes armés et qui seraient à l'origine de difficultés d'approvisionnement en essence, médicaments ou denrées alimentaires (prélèvement d'une taxe sur les produits, interdiction de passage sous la menace notamment). Devant la situation humanitaire et sociale du Choco plusieurs initiatives ont été prises, au cours des derniers mois, par le ministère des affaires étrangères et européennes : en août et septembre 2008, à la suite de menaces, précises et répétées contre plusieurs membres des zones humanitaires du bassin de la rivière Curvarado et des membres de la commission inter-ecclésiale justice et paix (qui soutiennent ces communautés), la France, au titre de la présidence de l'Union européenne, a entrepris plusieurs démarches auprès du Gouvernement colombien pour faire part de sa préoccupation et appeler à ce que toutes les mesures soient prises pour faire cesser les menaces et attaques contre ces populations ; en octobre 2008, la France a organisé une visite des États membres de l'Union européenne au siège de la commission inter-ecclésiale justice et paix à Bogota ; du 26 au 29 novembre 2008, également au titre de la présidence de l'UE, la France a organisé une visite dans le Choco, ainsi que dans la région d'Apartado (golfe d'Uraba), afin de rencontrer les membres (paysans, afrocolombiens, indigènes) de plusieurs communautés (zone humanitaire Camelias ; communauté de paix de San José de Apartado) qui ont fait l'objet de menaces et d'intimidations. Au cours de ce déplacement, les représentants français et européens (qui étaient accompagnés par le bureau du Haut Commissariat au droits de l'homme des Nations unies) ont eu de nombreux entretiens avec le « Défenseur du peuple » ainsi que les officiers de l'armée et de la police nationale responsables du secteur. Cette visite et ces entretiens ont eu, selon les représentants des communautés sur place et de l'Église, des effets positifs : les menaces ont cessé ; la situation sécuritaire des populations s'est améliorée ; la Commission européenne, à la demande de plusieurs États membres, dont la France, a développé ses actions dans cette région. Elle intervient sous diverses formes (construction de maisons collectives et d'une école ; amélioration des infrastructures sanitaires) ; le 16 avril 2009, une nouvelle rencontre a été organisée avec les représentants de la communauté de paix de San José de Apartado ; plusieurs ONG françaises sont présentes dans le Choco, où elles travaillent au bénéfice des populations en difficulté. Elles ont des contacts réguliers avec notre ambassade à Bogota ; la situation des indigène Embéra est suivie avec une attention toute particulière. Notre pays est en contact très régulier avec le bureau du HCR sur place, avec lequel sont entretenues des relations étroites et de confiance. La France a ainsi confirmé un financement exceptionnel de 200 000 euros au HCR Colombie. En outre, le Sénat, au titre de la réserve parlementaire, a annoncé très récemment un financement de 11 000 euros, également pour des projets conduits par le HCR au profit de populations déplacées colombiennes. La France, de manière constante et répétée, appuie et soutient les efforts qui sont réalisés, en Colombie, en faveur des populations marginalisées : dans les différentes enceintes, à titre bilatéral, au sein de l'Union européenne et au travers de notre présence dans la troïka du G24 (dont nous assurerons la présidence au second semestre 2009), nous défendons une approche de genre et différenciée qui permette une meilleure prise en compte des populations en difficulté, notamment les femmes, les enfants et les indigènes - qui sont les principales victimes des déplacements forcés de populations.
Auteur : M. André Vallini
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et droits de l'homme
Ministère répondant : Affaires étrangères et droits de l'homme
Dates :
Question publiée le 7 avril 2009
Réponse publiée le 16 juin 2009