procédures
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Mme Chantal Robin-Rodrigo appelle l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'usage abusif des gardes à vue. Tout le monde s'accorde pour souligner le travail difficile des policiers à certains moments. Cependant dans une démocratie, tous les citoyens ont droit au respect de leur dignité. Le rapport fondé sur les conclusions d'une commission nationale citoyens-justice-police, créée en 2002 par la Ligue des droits de l'Homme (LDH), le Syndicat de la magistrature (SM) et le Syndicat des avocats de France (SAF), constate une dégradation continue des rapports entre les citoyens et leur police. Ce constat s'explique notamment, selon le document, par la disproportion, voire la démesure, entre les moyens nécessaires pour réaliser une interpellation et ceux qui sont réellement déployés, l'usage des menottes quasi-systématique, les fouilles corporelles intrusive ou encore les pratiques, en constante augmentation, qui consistent à placer un individu en garde à vue aux fins manifestes d'intimidation, des faits étayés par des témoignages contenus dans le rapport. Dernièrement, le président de la Ligue des droits de l'Homme souligne que les plaintes ne viennent plus seulement de quartiers sensibles, mais concernent de plus en plus de citoyens. Il constate la surdité des autorités. Selon ce rapport, l'État, la police et la justice refusent de prendre en compte les recommandations des associations ou des autorités indépendantes, que ce soit la Ligue des droits de l'Homme, la Halde, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, ou encore la CNIL. Dernièrement encore, le 14 mai 2009, 74 salariés de ERDF et GRDF accusés de dégradation ont été interpellés, mis en garde à vue et, pour certains, fouillés à nu pour finalement être relâchés sans qu'aucune charge n'ait été retenue contre eux. Il y a encore la garde à vue dans l'affaire dite de TARNAC. Cette banalisation des mises en garde à vue (qui devrait être l'exception) est inquiétante. Elle lui demande de lui donner son sentiment à ce sujet.
Réponse publiée le 10 novembre 2009
Le code de procédure pénale prévoit que peut être placée en garde à vue, dès lors que les nécessités de l'enquête l'exigent, toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit. La mesure de garde à vue est entourée d'importantes garanties. Elle ne peut être décidée que pour les nécessités de l'enquête, par un officier de police judiciaire et pour une durée déterminée. Elle n'est pas systématique et doit être adaptée aux circonstances de l'affaire et à la personnalité du mis en cause. Cette mesure ouvre des droits au profit des personnes concernées (droit à un avocat, droit à une visite médicale, droit de faire prévenir un proche ou son employeur, etc.). Elle est placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, qui en est informée dès le début et peut y mettre fin à tout moment. Une attention particulière est portée au respect de la dignité des personnes, qui fait l'objet d'instructions strictes fixées par une circulaire du 11 mars 2003 du ministre de l'intérieur, qui concernent également les conditions matérielles de la garde à vue. Le nombre des mesures de garde à vue augmente effectivement. Le travail d'initiative toujours plus important des forces de sécurité et l'efficacité accrue des enquêtes expliquent pour partie cette hausse, qui résulte de l'interpellation d'un nombre croissant de personnes suspectées de crimes ou de délits. Par ailleurs, plusieurs contraventions sont devenues des délits au cours des dernières années, ce qui permet le recours à la garde à vue dès lors que les faits en cause et les nécessités de l'enquête le justifient. Des mesures de sécurité peuvent accompagner le placement en garde à vue pour protéger la personne concernée, les membres des forces de l'ordre et les tiers. Il en est ainsi de là palpation de sécurité, opérée à chaque prise en charge et lors des différents transports de la personne gardée à vue. Pratiquée par une personne du même sexe et au travers de vêtements, elle a pour but de révéler le port de tout objet dangereux. La fouille de sécurité, d'autre part, peut être rendue nécessaire par la nature de l'affaire et le comportement de l'intéressé, ou lorsque celui-ci est susceptible de dissimuler des objets dangereux pour lui-même ou pour autrui ; elle ne peut être systématique. Ces mesures sont à distinguer de la fouille à corps, opérée pour les nécessités de l'enquête. Pratiquée par une personne du même sexe, elle consiste exclusivement en la recherche d'objets ou d'indices intéressant l'enquête. Elle ne doit pas être systématique. Assimilée à une perquisition, elle nécessite dans le cadre de l'enquête préliminaire l'assentiment de la personne. S'agissant des menottes, le code de procédure pénale dispose que nul ne peut être soumis au port de celles-ci ou des entraves que s'il est considéré comme dangereux pour autrui ou pour lui-même ou comme susceptible de prendre la fuite. Le policier ou le gendarme dispose donc d'un pouvoir d'appréciation et doit agir avec discernement, en considération des circonstances de l'affaire, de l'âge, des renseignements de personnalité recueillis sur la personne et du principe de proportionnalité fixé par le code de procédure pénale. Plus généralement, il y a lieu de souligner que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales attache la plus grande importance au caractère exemplaire du comportement adopté par les forces de sécurité. La déontologie, la maîtrise et le discernement dans l'action ont un rôle essentiel dans le lien de confiance entre la population et les forces de sécurité. Le ministre est donc particulièrement attentif aux avis et recommandations de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Nombreux sont d'ailleurs les cas où cette dernière est saisie et où elle n'observe, après examen des faits, aucun manquement à la déontologie. En revanche, lorsque des manquements sont avérés, les observations de la Commission ne font le plus souvent que confirmer les motivations des sanctions disciplinaires et/ou judiciaires qui avaient déjà été prises ou étaient sur le point de l'être. Le strict respect des principes déontologiques constitue ainsi pour l'ensemble des forces de sécurité une exigence absolue, que traduisent les dispositions du décret du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale. Le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, mène en outre de nombreuses actions de formation et de sensibilisation des fonctionnaires sur le sujet, accompagnées d'une politique disciplinaire particulièrement rigoureuse. Tout écart portant atteinte à la déontologie et à l'image de la police nationale est ainsi combattu avec fermeté, et tout manquement expose son auteur à des sanctions disciplinaires et, le cas échéant, à des poursuites pénales. Les fautes individuelles, heureusement rares et très sévèrement sanctionnées, ne sauraient toutefois faire oublier le comportement très majoritairement irréprochable des policiers et des gendarmes dans l'exercice de leur difficile mission. Pour autant, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, conscient qu'il s'agit d'un sujet important pour nos concitoyens, et alors que trop souvent les interrogations sur ce point proviennent moins d'expériences personnelles que de rumeurs propagées, a décidé d'aller plus loin encore dans la transparence. À cette fin, les rapports des inspections générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale sur l'activité disciplinaire des services seront rendus publics dès cette année. Le 16 juin, le directeur général de la police nationale a ainsi présenté à la presse le bilan d'activité 2008 de l'inspection générale de la police nationale, incluant les données de l'inspection générale des services de la préfecture de police. Par ailleurs, le ministre a décidé, afin de faciliter les démarches des citoyens qui s'estiment victimes d'un manquement à la déontologie, que leurs observations pourront désormais faire l'objet d'une saisine par message électronique. L'utilisation de caméras miniatures lors des interventions sera également développée, afin de dissuader les tentations de certains de mettre en cause systématiquement les forces de l'ordre et de protéger policiers et gendarmes des attaques injustes et injustifiées.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère répondant : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Dates :
Question publiée le 2 juin 2009
Réponse publiée le 10 novembre 2009