Question écrite n° 64519 :
juridictions civiles

13e Législature

Question de : Mme Michèle Delaunay
Gironde (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Michèle Delaunay attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les délais de la justice civile et les procédures qui pourraient éventuellement permettre de les raccourcir. La Commission européenne pour l'efficacité de la justice (Cepej), dans son troisième rapport, rappelle que, s'agissant du traitement des affaires civiles, la France se situe parmi les pays les plus lents d'Europe. En matière de divorce contentieux, les délais sont les plus longs : 477 jours en France, soit la moins bonne performance enregistrée par la Cepej après l'Italie (634 jours). Cette défaillance du système judiciaire français constitue une violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'Homme, selon laquelle toute personne a droit à un jugement « dans un délai raisonnable ». Elle peut également être à l'origine d'importants préjudices financiers pour les justiciables. C'est le cas notamment lorsqu'un jugement en première instance est faussé en raison d'une erreur sur les faits (exemple : calcul d'une pension alimentaire). L'appel en procédure civile n'a pas d'effet suspensif, et les délais actuels sont tels que la partie lésée ne pourra obtenir de rééquilibrage que plusieurs mois, voire plusieurs années après. Elle l'interroge donc sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour remédier à cette situation, en particulier en matière de renforcement des moyens et des effectifs des juridictions civiles.

Réponse publiée le 21 décembre 2010

Le quatrième rapport de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) rendu le 25 octobre 2010 et qui concerne les données 2008 des États membres, souligne la capacité du système judiciaire français à traiter les affaires nouvelles sans augmenter le stock des affaires en cours : notre système judiciaire est ainsi en capacité de terminer autant d'affaires qu'il en reçoit de nouvelles. La CEPEJ note qu'en France le délai nécessaire pour résoudre la totalité des affaires civiles contentieuses devant les tribunaux de première instance est de 286 jours. Par ailleurs, au cours de l'année 2009, la durée moyenne de la procédure de divorce était d'un an, et la durée moyenne de la procédure de divorce par consentement mutuel de moins de 4 mois (contre plus de 9 mois avant la réforme de 2005). Devant les cours d'appel, le délai de traitement moyen des affaires civiles est passé de 15,3 mois en 2004 à 11,9 en 2008 alors que le nombre de procédures terminées a augmenté de 8,3 %. Néanmoins, conscient des enjeux majeurs qui entourent ces questions de délais de traitement des affaires civiles conjuguées à celle de la qualité des décisions rendues, le ministre de la justice et des libertés a déposé au Sénat le 3 mars 2010 un projet de loi allégeant certaines procédures judiciaires qui concernent la vie quotidienne des français, et visant notamment à : une simplification de la procédure de divorce par consentement mutuel en dispensant les époux qui n'ont pas d'enfants communs de comparaître personnellement et systématiquement devant le juge aux affaires familiales. En pratique, le projet de loi prévoit la présentation de la demande en divorce par les avocats respectifs des parties ou par l'avocat choisi d'un commun accord, par requête unique adressée au juge aux affaires familiales, accompagnée d'une convention réglant les conséquences du divorce. Le juge examinera la requête et les pièces fournies afin de s'assurer que l'intérêt des époux est préservé et que ceux-ci ont donné librement leur consentement. Si le juge constate que ces conditions de fond sont remplies, il rendra un jugement homologuant la convention et prononçant le divorce. Ce dispositif est équilibré puisqu'il rétablit la comparution des époux si l'un d'eux en fait la demande, si le juge l'estime nécessaire ou s'il refuse d'homologuer la convention ; un accroissement du recours à la médiation familiale, par le biais de deux mesures mises en place à titre expérimental. La première, contenue dans le projet de loi sus évoqué, vise à imposer une médiation préalablement à la saisine du juge aux affaires familiales pour les demandes relatives à la modification des décisions fixant les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ou la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ainsi que des dispositions contenues dans la convention de divorce par consentement mutuel homologuée. Cette mesure vise à favoriser les accords entre les parents séparés, en leur permettant de renouer le dialogue. La seconde vise à permettre au juge aux affaires familiales dès qu'il est saisi d'un litige, d'enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur familial. Un décret en Conseil d'État va être publié afin de mettre en place une expérimentation sur une durée de deux ans. Le temps qui précèdera l'audience sera mis à profit pour tenter de mettre d'accord les parties ou, à défaut, de progresser dans la résolution du litige par l'échange que permet le processus de médiation. Par ailleurs, la direction des services judiciaires du ministère de la justice et des libertés s'est engagée à titre expérimental dans une démarche « LEAN excellence opérationnelle » en partenariat avec la direction générale de la modernisation de l'État (DGME), portant sur l'analyse de la chaîne civile en première instance et en appel. L'application de cette méthodologie aux processus judiciaires est susceptible de générer des gains importants en terme de délais de traitement des procédures. En outre, une réflexion de grande ampleur a été initiée aux fins d'intégrer la communication électronique dans le traitement du procès civil. Il a ainsi été développé, à partir de la chaîne civile informatique des tribunaux de grande instance, un module dénommé « COMCITGI » permettant l'échange, de manière sécurisée, d'un certain nombre de données et de documents, entre les greffes des chambres civiles et les cabinets d'avocats d'un même barreau. Ainsi, la procédure civile ordinaire peut être dématérialisée. L'optimisation de l'utilisation de COMCI conduit inévitablement à une amélioration des délais de traitement des affaires civiles. Enfin, la direction des services judiciaires procède à l'analyse des indicateurs d'activité civile des juridictions de première instance ; notamment celles excédentaires, aux fins d'adapter la localisation des emplois de magistrats et de greffe et ce dans la limite de son plafond d'autorisations d'emplois.

Données clés

Auteur : Mme Michèle Delaunay

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice et libertés (garde des sceaux)

Ministère répondant : Justice et libertés

Dates :
Question publiée le 24 novembre 2009
Réponse publiée le 21 décembre 2010

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