Question écrite n° 77412 :
immigration

13e Législature

Question de : M. Marc Goua
Maine-et-Loire (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Marc Goua attire l'attention de M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur le projet de loi relatif à l'immigration, l'intégration et la nationalité. Ce texte se concentre sur une gestion toujours plus sécuritaire du phénomène migratoire par l'édiction d'un nouveau droit de l'éloignement. Il constitue un fort recul des droits des étrangers et plus globalement représente une érosion des libertés individuelles préjudiciables à tous les citoyens français ou étrangers, en situation régulière ou non. En effet, en édictant un nouveau droit de l'éloignement, le Gouvernement semble poursuivre une politique du chiffre appliquée à la gestion des populations migrantes « indésirables » ainsi qu'une vision utilitariste de la migration. L'éloignement forcé et l'internement administratif des étrangers en situation irrégulière seront donc mis en oeuvre : la création d'une peine de bannissement et l'interdiction de retour sur le territoire français, applicable à tout étranger en situation irrégulière également. L'allongement de la durée de rétention à 45 jours, la diminution sans précédent des garanties procédurales et la refonte du contrôle des juges avec l'intervention tardive du juge des libertés et de la détention, la création à la discrétion de l'administration, de zones d'attente itinérantes et temporaires entravant la protection des réfugiés ainsi que la consécration des obligations à quitter le territoire français, assorties ou non d'un délai de départ volontaire, représentent un ensemble de dispositifs condamnables. Il lui demande donc s'il compte intervenir afin d'écarter cette loi qui modifierait durablement notre système juridique et administratif et conduirait à la violation des droits fondamentaux les plus élémentaires.

Réponse publiée le 23 novembre 2010

Le projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, adopté en première lecture le 12 octobre 2010 par l'Assemblée nationale, répond à l'obligation de la France de transposer trois directives européennes, à savoir la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite directive « retour », négociée et adoptée pendant la présidence française de l'Union européenne en 2008, la directive du 25 mai 2009 2009/50/CE, dite directive « carte bleue », établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'emploi hautement qualifié et la directive du 18 juin 2009 2009/52/CE prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite directive « sanctions employeurs ». De plus, il s'inspire du rapport, remis en 2008, de la commission présidée par M. Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, sur la charge du contentieux de l'éloignement et les imperfections de son organisation à la fois judiciaire et administrative. Enfin, certaines conclusions du séminaire gouvernemental sur l'identité nationale qui s'est déroulé le 8 février 2010 appelaient une traduction législative. Ainsi, pour une grande part, le projet de loi transpose les directives européennes, obligation constitutionnelle conformément à l'article 88-1 de la Constitution. À ce titre, le cadre fixé par la directive « retour » est très précis. Le projet de loi refond les dispositions du CESEDA relatives aux décisions d'éloignement, en énonçant, conformément à la directive « retour », le principe du départ volontaire pour l'étranger en séjour irrégulier. Par mesure de simplification, il supprime la distinction entre arrêté de reconduite à la frontière et obligation de quitter le territoire (OQTF), et fait désormais de l'OQTF la décision d'éloignement de droit commun. Nouveauté en France, l'interdiction de retour, prévue par la directive « retour », doit être créée. Loin d'être une peine de « bannissement », c'est une mesure visant à favoriser le départ volontaire des étrangers en séjour irrégulier, par la création d'un mécanisme d'abrogation automatique en cas de départ volontaire au terme du délai fixé par l'administration. Alors que la directive fixe un délai maximum de 6 mois, prolongeable à titre exceptionnel de 12 mois, pour la rétention administrative, le projet de loi allonge de 32 à 45 jours la durée maximale de rétention, au regard des délais nécessaires pour les autorités françaises pour organiser le départ forcé d'étrangers en situation irrégulière. Quant aux garanties procédurales, le projet de loi respecte les principes énoncés dans la directive « retour » et s'inspire étroitement des propositions formulées par le rapport Mazeaud, qui vise notamment à mieux assurer l'équilibre entre les droits des étrangers et les prérogatives de l'administration. S'agissant de l'articulation des interventions du juge administratif et du juge judiciaire, le texte permet de redonner davantage de cohérence à un contentieux complexe, dans le respect des compétences respectives des deux ordres de juridiction. En particulier, le placement en rétention administrative décidé par le préfet sera désormais soumis à un contrôle effectif par le tribunal administratif, à la différence de la situation actuelle, sans préjudice de l'intervention du juge des libertés et de la détention. S'agissant des zones d'attente, le projet de loi aménage les conditions de leur création, à la lumière de l'épisode du débarquement d'une centaine de migrants kurdes à proximité d'une plage de Corse du Sud le 22 janvier dernier. Loin de créer des zones « itinérantes », le projet de loi détermine les conditions de création d'une zone d'attente dans des hypothèses très précises. Ces nouvelles dispositions doivent être regardées comme une réponse aux velléités de certaines filières d'immigration de forcer les frontières françaises au mépris des règles relatives à l'entrée et au séjour en France. S'inscrivant dans une claire affirmation de la nécessité de lutter contre l'immigration irrégulière, le projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité comporte également d'autres dispositions répondant à un souci constant d'humanité, à travers notamment la modification des dispositions relatives à l'immunité pénale des actes humanitaires, la création d'une nouvelle voie d'accès au séjour pour les jeunes majeurs entrés en France comme mineurs isolés ou la facilitation de l'accès à la nationalité française pour ceux qui se sont distingués par une assimilation exceptionnelle dans la société française. Ce projet de loi s'inscrit dans le respect des droits fondamentaux et des libertés garantis par la Constitution française.

Données clés

Auteur : M. Marc Goua

Type de question : Question écrite

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

Ministère répondant : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

Dates :
Question publiée le 27 avril 2010
Réponse publiée le 23 novembre 2010

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