Question au Gouvernement n° 1157 :
armée

13e Législature

Question de : Mme Christiane Taubira
Guyane (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 1er avril 2009

VICTIMES DES ESSAIS NUCLÉAIRES

M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme Christiane Taubira. Monsieur le ministre de la défense, vous avez fait la semaine dernière une communication relative à l'indemnisation des personnels civils et militaires et des populations exposés aux rayonnements ionisants lors des essais nucléaires dans le Sahara et le Pacifique de 1960 à 1996. Il s'agit de la cinquième version, au bas mot, d'un projet de loi auquel vous vous étiez engagé devant la représentation nationale le 27 novembre dernier lors du débat public organisé à l'initiative du groupe SRC. Ce débat avait permis de prendre en considération les propositions de loi de nombreux sénateurs ou députés, toutes sensibilités confondues, propositions qui relayaient les initiatives d'associations de vétérans en France, en Polynésie et en Algérie, sur fond de procédures judiciaires pénibles, aléatoires et, osons le dire, honteuses. Le prochain jugement en appel, pour douze vétérans, sera prononcé le 22 mai prochain.
Le 24 mars dernier vous avez réitéré, monsieur le ministre, des déclarations de principe que le projet de loi ne satisfait pas totalement. Vous avez fort heureusement renoncé à la fixation d'un seuil d'irradiation, ce qui eût été une régression par rapport à la législation sociale, laquelle, depuis 1919, prévoit un tel seuil pour les politiques préventives, mais non pour l'estimation des préjudices. Vous avez accepté une liste unique de maladies pour toutes les victimes, mettant ainsi un terme à la disparité des régimes ; il faudra néanmoins élargir cette liste.
Cependant, vous ne reconnaissez ni le droit des représentants des victimes à siéger au comité d'indemnisation, alors que cet usage a fait ses preuves, ni le droit à la retraite anticipée, bien qu'il soit établi que les maladies " radio-induites " peuvent survenir plusieurs dizaines d'années après l'exposition aux radiations. Vous ne reconnaissez pas non plus la nécessité d'un fonds spécifique d'indemnisation, et ne répondez pas aux contestations relatives aux zones géographiques.
Je vous demande de tenir compte des propositions du Médiateur de la République, et de nous dire si vous restez ouvert à la discussion sur ces points litigieux. Quel est par ailleurs le calendrier prévu pour les consultations institutionnelles et le débat parlementaire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, ministre de la défense.
M. Hervé Morin, ministre de la défense. Le débat qui s'est tenu à l'Assemblée nationale au mois de novembre dernier a été particulièrement fructueux et consensuel. Je m'étais alors engagé à présenter au Parlement un projet de loi avant l'été, ce qui sera chose faite, puisque le Premier ministre vient de soumettre au Conseil d'État un texte qui sera également transmis dans les prochains jours à l'assemblée de la Polynésie française.
Ce projet de loi permettra à la France d'être en conscience avec elle-même. Il repose sur deux principes simples : la justice et la rigueur. La justice consiste à traiter de la même façon les personnels militaires et civils, ainsi que les populations locales, et à dresser une liste des maladies qui soit celle reconnue par les Nations unies et non celle de la sécurité sociale. La rigueur, elle, consiste à faire examiner les dossiers par un comité médical présidé par un magistrat, afin d'établir, pour chaque personne, un lien de causalité entre la présence sur les lieux des essais et la maladie, à charge pour l'État de contester éventuellement ce lien. La rigueur suppose également la transparence, d'où l'étude épidémiologique en cours sur 30 000 vétérans, et celle que nous menons avec deux grands experts pour analyser chaque essai et en déterminer les éléments dosimétriques, de façon que chaque décision soit fondée.
Vous devriez vous féliciter de ce texte, madame Taubira. Toutes les majorités et deux Républiques ont participé à cet immense effort scientifique et technologique qu'ont été les essais nucléaires.
M. le président. Merci.
M. Hervé Morin, ministre de la défense. La France a décidé, en s'inspirant de ce qui existe déjà aux États-Unis et au Royaume-Uni, d'être en conscience avec elle-même. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : Mme Christiane Taubira

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Défense

Ministère interrogé : Défense

Ministère répondant : Défense

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 1er avril 2009

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