armée
Question de :
M. Bertrand Pancher
Meuse (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 28 mai 2009
INDEMNISATION DES VICTIMES DES ESSAIS NUCLÉAIRES
M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.M. Bertrand Pancher. Monsieur le ministre de la défense, la Cour d'appel de Paris a rejeté, vendredi dernier, les demandes d'indemnisation de douze anciens militaires atteints de maladies mortelles causées par les essais nucléaires de la France au Sahara et en Polynésie. Ces soldats ont participé à certains des deux cent dix essais nucléaires effectués entre 1960 et 1966 au Sahara algérien, ainsi qu'en Polynésie à partir de 1967.
Pendant trop longtemps, notre pays s'est abrité derrière le secret défense pour masquer son évidente responsabilité dans ce drame humain qui a concerné plus de 150 000 travailleurs civils et militaires. La France, au lieu de reconnaître cette catastrophe sanitaire et d'en tirer les enseignements en termes de soins et d'indemnisations, l'a niée. Elle a, par voie de conséquence, contribué à alimenter les peurs et ainsi renforcé les oppositions au nucléaire.
Aujourd'hui même, vous avez présenté en Conseil des ministres un projet de loi afin de réparer les conséquences sanitaires de ces essais. C'est une grande avancée à mettre à l'actif du Président de la République et du Premier ministre. Je salue également le travail de nos collègues, MM. Colombier, Ménard et Favennec. Une enveloppe de 10 millions d'euros est affichée sur le budget du ministère de la défense. Cependant, le président de l'Association des vétérans des essais nucléaires craint qu'un grand nombre de victimes, et notamment celles concernées par la Cour d'appel de Paris, soient exclues de cette loi.
M. Christian Eckert. Ce serait scandaleux !
M. Bertrand Pancher. Je souhaite par conséquent savoir, en premier lieu, si les sommes prévues seront suffisantes à l'indemnisation de ces victimes. Tous les militaires et tous les civils touchés seront-ils bien indemnisés ? J'aimerais également avoir des précisions sur les conditions de transparence des procédures de reconnaissance des victimes, ainsi que sur la question de l'indépendance du cabinet travaillant sur la situation sanitaire. Enfin, face à la spécificité de la prise en charge des victimes, ne pourrait-on pas envisager, monsieur le ministre, la création d'une structure d'indemnisation indépendante, comme ce fut le cas dans le cadre de la gestion du dossier de l'amiante ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et NC.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, ministre de la défense.
M. Hervé Morin, ministre de la défense. Permettez-moi d'abord, monsieur le député, de dire un mot sur le projet de loi que j'ai eu l'honneur de présenter ce matin en conseil des ministres. Je crois comme vous qu'il était temps que la France mette en place un régime d'indemnisation pour les personnes ayant été exposées à des retombées radiologiques à la suite d'essais nucléaires.
M. Christian Eckert. Il aura fallu sept ans !
M. Patrick Roy. Sept ans de malheur !
M. Hervé Morin, ministre de la défense. La Grande-Bretagne et les États-Unis l'ont fait ; il était temps que la France le fasse à son tour, treize ans après la fin des essais nucléaires.
Le projet de loi prévoit la reconnaissance d'une présomption de responsabilité pour les maladies liées à des retombées radiologiques déclarées par des personnes présentes sur les lieux. Cette présomption inversera la charge de la preuve : le requérant n'aura plus, désormais, à l'établir trente ou quarante ans après ; c'est l'État qui, le cas échéant, devra contester le lien entre les essais et la maladie.
Par ailleurs, une commission d'indemnisation, présidée par un magistrat et composée de médecins et de scientifiques, présentera au ministre une proposition d'indemnisation et de réparation totale du préjudice.
Vous m'avez également interrogé sur le fait de savoir si les personnes déboutées par la justice à l'issue de procédures longues, souvent aléatoires et parfois injustes, pourraient de nouveau déposer un dossier : la réponse est oui ; elles le pourront au même titre que les personnes qui le feront dans le cadre de la nouvelle procédure.
Enfin, les 10 millions d'euros inscrits dans le budget de mon ministère seront-ils suffisants ? Probablement pas ; mais il ne s'agit que d'une provision pour la fin de l'année 2009. Les textes n'entreront en vigueur que lorsque le Parlement les aura votés, à savoir au cours du dernier trimestre de cette année ; d'autres dotations seront alors inscrites. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
Auteur : M. Bertrand Pancher
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Défense
Ministère répondant : Défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 mai 2009