Question au Gouvernement n° 1552 :
conditions de travail

13e Législature

Question de : Mme Aurélie Filippetti
Moselle (8e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 16 septembre 2009

SUICIDES À FRANCE TÉLÉCOM

M. le président. La parole est à Mme Aurélie Filippetti, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme Aurélie Filippetti. Monsieur le ministre du travail, le cinéaste Jean-Michel Carré a réalisé il y a quelques années un documentaire intitulé J'ai mal au travail. En France, aujourd'hui, on meurt du " mal au travail ". Contrairement à ce que vous avez dit, il ne s'agit pas simplement de mieux communiquer sur les mutations à France Télécom, mais de repenser l'organisation du travail dans cette entreprise. Il ne s'agit pas simplement de situations personnelles, mais d'un drame social.
Hier encore, à Metz, une salariée de France Télécom a fait une tentative de suicide. Après vingt-trois décès en dix-huit mois, il y a urgence sanitaire, monsieur le ministre. L'État est l'actionnaire principal de cette entreprise. Nous attendons donc des décisions immédiates.
Au-delà de France Télécom, le nombre de suicides liés au stress n'est pas connu en France : c'est, en soi, un scandale. On parle pourtant de trois cents, de six cents, voire de mille cas par an ! Le rapport Stiglitz, rendu hier, montre que la richesse d'un pays ne s'estime pas à l'aune de son seul PIB, mais aussi au regard du bien-être de sa population. Nous devons considérer le suicide au travail comme un problème social majeur, comme le symptôme d'une société qui dysfonctionne.
Le 12 mars 2008, après des suicides chez Renault, PSA, IBM et EDF, le rapport Nasse-Légeron a été remis au ministre du travail de l'époque, M. Xavier Bertrand. Ce rapport préconisait le recensement des suicides au travail, la pratique d'autopsies psychologiques et le lancement d'une campagne publique d'information sur le stress au travail. Or, rien n'a suivi.
Nous vous demandons de redonner toute sa place à la médecine du travail, qui perd ses effectifs, et d'encourager les travaux de l'Institut de veille sanitaire en ce domaine. À chaque suicide dans une entreprise, une enquête doit être réalisée par un médecin du travail, et ses recommandations impérativement mises en oeuvre. Monsieur le ministre, nous vous demandons de faire de la santé au travail une priorité de politique publique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Comme vous l'avez suggéré dans votre question, madame la députée, l'heure n'est pas à dénoncer ou à chercher des responsables à tout prix et à créer un climat plus tendu encore au sein de France Télécom. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Maxime Gremetz. Il y a pourtant bien des responsables !
M. Xavier Darcos, ministre du travail. En revanche, nous devons nous demander pourquoi le stress au travail et les maladies psychosociales pèsent aujourd'hui si lourd dans beaucoup de nos entreprises. Sur ce point, nous sommes d'accord.
Cependant, je ne peux pas vous laisser dire que la question n'a pas été prise à bras-le-corps par le ministère du travail, et ce bien avant mon arrivée. À la suite du rapport Nasse-Légeron, nous avons demandé un bilan du premier plan de santé au travail. Le deuxième plan de santé au travail, qui sera lancé dans quelques semaines, privilégie précisément le domaine des maladies psychosociales et du stress au travail dans le cadre de l'aide aux salariés.
Sans m'ingérer aucunement dans l'entreprise France Télécom, je vous accorde que toutes les grandes entreprises doivent à tout prix transcrire dans leurs règlements l'accord interprofessionnel sur le stress au travail. De même, je suis d'accord sur le fait que l'État doit être vigilant.
Voilà pourquoi, en accord avec Mme Lagarde, le représentant de l'État au sein du conseil d'administration de France Télécom, M. Bruno Bézard, suivra la situation avec la plus grande attention. Voilà pourquoi le directeur général du travail, M. Jean-Denis Combrexelle, me rendra régulièrement compte de la situation du travail à France Télécom. Enfin, je vous le répète, madame Filippetti, voilà pourquoi nous allons prendre très au sérieux la question du stress et des suicides au travail. Ce sera l'objet principal du deuxième plan de santé au travail qui sera lancé dès le mois de décembre.

Données clés

Auteur : Mme Aurélie Filippetti

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

Ministère répondant : Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 septembre 2009

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