Question au Gouvernement n° 1600 :
politique fiscale

13e Législature

Question de : M. Michel Sapin
Indre (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 21 octobre 2009

BOUCLIER FISCAL

M. le président. La parole est à M. Michel Sapin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Michel Sapin. Monsieur le Premier ministre, dans quelques heures commencera l'examen du projet de loi de finances pour 2010. Avant même que le débat ne s'engage, je souhaite vous interroger une nouvelle fois sur la légitimité - ou plutôt l'illégitimité - du bouclier fiscal.
M. Richard Mallié. Réservez donc cette question à la discussion du texte, il s'agit ici des questions d'actualité !
M. Michel Sapin. Tous les Français doivent savoir ce qu'est le bouclier fiscal. Ce n'est pas un outil qui protégerait les revenus du travail : il n'y a pas de revenus du travail qui puisse être imposé à plus de 40 %. Ce n'est pas non plus un outil qui protège les revenus des épargnants puisque, comme tout revenu, ceux-ci ne peuvent pas être imposés à plus de 40 %.
C'est en fait un outil qui protège les plus fortunés des Français contre le paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune ; non pas ceux qui sont très peu ou moyennement imposés au titre de l'ISF, mais les très grosses fortunes qui, grâce à ce dispositif, ne paient plus l'ISF.
M. Michel Lefait. C'est scandaleux !
M. Michel Sapin. Pire encore, le bouclier fiscal concerne la CRDS et la CSG, c'est-à-dire les cotisations de solidarité payées par tous, sauf par les plus fortunés des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce dispositif est devenu si inadmissible, si injuste, que nous demandons son abrogation non seulement à gauche, mais aussi à droite où des voix - et non des moindres - se sont autorisées à vous demander de modifier ce bouclier fiscal. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : quand renoncerez-vous à ce qui s'est révélé d'abord une erreur et qui est devenu une faute politique, une faute sociale et une faute morale, et quand rétablirez-vous la solidarité en France ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Monsieur Sapin, le bouclier fiscal tire sa légitimité de l'élection présidentielle puisqu'il figurait au programme du candidat élu. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Albert Facon. C'est une honte !
M. Éric Woerth, ministre du budget. Ensuite, contrairement à ce que vous avancez, le bouclier fiscal est efficace.
M. Albert Facon. Et la baisse du pouvoir d'achat ?
M. Éric Woerth, ministre du budget. Il permet de limiter la pression fiscale...
M. Albert Facon. Sur les riches qui sont si malheureux !
M. Éric Woerth, ministre du budget. ...à 50 % du revenu et donc de faire en sorte que l'on ne travaille pas plus de six mois par an pour l'État - c'est une question d'équité élémentaire. (" Scandaleux ! " sur les bancs du groupe SRC.)
M. Albert Facon. D'équité pour Dassault ?
M. Éric Woerth, ministre du budget. Dans de nombreux autres États, le niveau de prélèvement fiscal est très nettement inférieur au nôtre. Nous avons choisi des niveaux de prélèvements importants, il est donc naturel qu'ils soient plafonnés. Ainsi, de nombreux Français qui quittaient la France ne partent plus. La France doit se montrer compétitive sur le plan fiscal.
Mme Françoise Hostalier. Il a raison !
M. Éric Woerth, ministre du budget. Car le départ de contribuables français, c'est le départ d'investissements et la suppression d'emplois.
Nous ne reviendrons pas sur le bouclier fiscal, ce qui reviendrait à augmenter les impôts,...
M. Roland Muzeau. Et alors ?
M. Éric Woerth, ministre du budget. ... et c'est exactement ce à quoi vous nous appelez. Or nous n'augmenterons pas les impôts en France, cinquième pays en termes de prélèvements fiscaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous sommes en effet déjà l'un des pays où l'on taxe le plus les entreprises et les ménages. Votre solution n'en est donc pas une et faire accroire que le bouclier fiscal ne concernerait que quelques riches - richesse que vous êtes, du reste, incapables de définir -, c'est tromper les Français.
M. Michel Lefait. Non !
M. Éric Woerth, ministre du budget. Nous n'augmenterons pas les impôts et nous ne toucherons pas au bouclier fiscal. Nous ne bougerons pas ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Michel Sapin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'Etat

Ministère répondant : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'Etat

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 21 octobre 2009

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