EDF
Question de :
M. François Brottes
Isère (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 2 décembre 2009
NOMINATION DE M. HENRI PROGLIO
À LA PRÉSIDENCE D'EDF
M. François Brottes. Monsieur le Premier ministre, nous auriez-vous caché un remaniement ministériel ? (" Ah ! " sur les bancs du groupe SRC.) Il semble que votre gouvernement se soit doté d'un nouveau ministre de l'énergie. Comment expliquer autrement la teneur très politique des déclarations du nouveau président d'EDF sur la restructuration de la filière nucléaire - nous venons d'en parler - , la remise en cause de la régulation du secteur de l'énergie, la remise en cause du rôle de l'État en matière de tarifs réglementés, la mise en oeuvre de nouvelles alliances capitalistiques avec Veolia.
Votre gouvernement a fait le choix, il y a deux ans, rappelons-le, de privatiser Gaz de France, qui livre désormais, avec Suez, une bataille sans merci à EDF.
M. Jean Michel. Ce sont des voyous !
M. François Brottes. Votre gouvernement a lancé le démantèlement d'Areva, au détriment de sa rentabilité et de ses salariés - même votre majorité est inquiète ! - mais pour le plus grand plaisir de Martin Bouygues, qui va bénéficier de la vente de la filiale d'Areva T & D. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Guéant, sorte de Premier ministre bis, réorganise actuellement le tour de table de l'offre française pour la construction de centrales nucléaires à Abou Dhabi. Tout cela, avouez-le, donne le sentiment que l'on navigue à vue, dans un moment où l'énergie est au coeur des négociations de Copenhague et où l'on prévoit que, si l'hiver est trop froid, nous manquerons d'électricité en France.
Depuis plusieurs semaines, notre groupe vous dit que le président d'EDF ne peut pas avoir une autre fonction exécutive dans un groupe privé en parallèle de celle qu'il exerce à EDF. Le choix doit être clair.
Après votre décision, monsieur le Premier ministre, de vous payer un Proglio pour le prix de deux Gadonneix, nous savons depuis quelques jours que vous êtes d'accord pour doubler les rémunérations dans le secteur public. C'est sûrement une bonne nouvelle pour le dialogue social. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Depuis des semaines, nous demandons à cor et à cri que l'État vienne expliquer au Parlement la stratégie du Gouvernement pour le secteur de l'énergie : privatiser EDF, nationaliser Veolia - pourquoi pas ? -, dissoudre Areva, mettre fin aux tarifs publics. D'où ma question : quel mandat avez-vous donné à M. Henri Proglio, nouveau président d'EDF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Patrick Roy. Et des cadeaux à Bouygues !
M. le président. Monsieur Roy, vous recevez un avertissement qui sera, la prochaine fois, formellement inscrit au compte rendu. (Protestations et claquements de pupitres sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur Brottes, je ne ferai pas insulte à votre excellente connaissance du secteur de l'énergie et de la situation des sociétés que vous venez d'évoquer en vous faisant un mauvais procès.
Je voudrais appeler votre attention sur le fait qu'EDF, une des plus belles sociétés françaises, est absolument déterminante pour l'approvisionnement en énergie de notre pays, mais aussi pour le rayonnement de la France et son commerce extérieur.
C'est dans ces conditions que le Gouvernement, sous l'autorité de M. le Premier ministre, a souhaité la désignation d'un des meilleurs des industriels de notre pays, M. Henri Proglio.
Premièrement, j'y insiste, c'est un excellent industriel. Deuxièmement, il a pris l'engagement, puisque vous avez émis l'idée qu'il pourrait se dupliquer, de consacrer l'intégralité de son temps, de son énergie et de ses qualités à la direction exécutive du groupe EDF. Il a souhaité conserver la présidence du conseil d'administration au sein du groupe Veolia, dont il s'est occupé pendant plus de trente ans. Nous lui avons donné notre accord. Cela nécessitera qu'il se consacre au conseil d'administration durant trois ou quatre réunions.
M. Christian Bataille. Vous vous moquez du monde !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. J'ajoute qu'il était préalablement membre du conseil d'administration d'EDF, dont il exerçait la présidence du comité stratégique.
Le choix auquel nous avons procédé n'est donc pas d'avoir " un Proglio pour le prix de deux Gadonneix ", mais de confier à un excellent industriel une société stratégique pour la France.
Qu'il ait par ailleurs quelques idées sur la façon dont on doit valoriser EDF, mieux l'organiser pour qu'elle soit au service de nos concitoyens, afin que nous puissions bénéficier de la rente constituée par l'ensemble des investissements réalisés durant les dernières années est parfaitement légitime. Mais de telles orientations sont soumises à l'accord préalable du Premier ministre et de moi-même. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. François Brottes
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi
Ministère répondant : Économie, industrie et emploi
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 2 décembre 2009