élections régionales
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 24 mars 2010
CHANGEMENT DE POLITIQUE APRÈS LES RÉGIONALES
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, votre majorité n'a plus le soutien que d'un Français sur trois. À un tel niveau de défiance, on n'est plus seulement dans le cadre d'un vote régional, mais devant une sanction nationale qui met en demeure le Président de la République de modifier tout le reste du cours de son quinquennat, sa politique, son style, sa méthode. Or, à ce désaveu massif, vous avez répondu par un mini-remaniement gouvernemental. Je viens de vous écouter : au-delà des mots, c'est le déni de la réalité !
M. Jean-François Copé. Mais non, ne dites pas ça !
M. Jean-Marc Ayrault. Vous ne tirez aucune leçon de vos échecs ! Rien ne change dans vos priorités, si ce n'est l'abandon de la taxe carbone. À chaque revers, vous vous défaussez de vos responsabilités. C'est toujours la faute à la crise, à l'opposition, aux Français qui ne voudraient pas comprendre l'importance et le courage de vos réformes.
Non, monsieur le Premier ministre, l'impopularité n'est pas une politique ! Le courage n'est pas de gouverner contre les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le vrai courage, c'est de revoir de fond en comble la hiérarchie de vos priorités,...
M. Claude Goasguen. Oh, monsieur Ayrault !
M. Jean-Marc Ayrault. ...c'est de reconstituer une politique de l'emploi après celle que vous avez détruite, d'en finir avec le système de privilèges institué par votre politique fiscale, d'arrêter ce grand plan de suppressions massives d'emplois publics, en particulier dans l'éducation nationale et la police. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le vrai courage, c'est aussi d'arrêter de passer partout en force, d'avoir la patience de négocier une réforme juste des retraites et d'abandonner les réformes partisanes qui divisent les Français, comme la réforme territoriale ou la suppression du juge d'instruction.
Monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez plus faire comme si rien ne s'était passé. Votre légitimité est atteinte. La confiance est partie. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour exiger du pays qu'il change, il faut d'abord que vous-même changiez ! Faire le choix de la continuité, c'est faire le choix de l'enlisement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre. (" C'est scandaleux ! " sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. Jean-Marc Ayrault. Je n'avais pas terminé, monsieur le président.
M. Henri Emmanuelli. Ça ne peut pas durer comme ça !
M. le président. Le temps de parole attribué a été le même que précédemment, mes chers collègues. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, vous avez la parole.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, vous me demandez si le Gouvernement va tenir compte du résultat des élections régionales. Je vous réponds que oui, nous allons tenir compte du succès des listes de gauche aux élections régionales.
M. Maxime Gremetz. Ça m'étonnerait !
M. François Fillon, Premier ministre. Votre parti présidera vingt-deux ou vingt-trois régions sur vingt-six. C'est une responsabilité considérable et je veux, dans un esprit républicain, saluer ceux et celles qui, demain, vont diriger les régions françaises. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Ils vont le faire dans un contexte de crise économique et sociale qui rend cette responsabilité d'autant plus importante. Il est essentiel, dans ce contexte, que nous coordonnions le mieux possible les politiques économiques locales et les politiques économiques nationales.
M. Jérôme Lambert. Et la politique gouvernementale ?
M. François Fillon, Premier ministre. J'espère que, dans un climat d'unité républicaine, nous pourrons y parvenir. Les régions ne sont pas des contre-pouvoirs. Ce sont des éléments constitutifs de la nation et de l'État. Je prendrai dans les prochaines semaines des initiatives pour voir, avec les présidents de région, comment nous pourrions mieux coordonner nos efforts face à la crise économique et sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais le vote de dimanche n'a rien changé aux défis que doit relever la France : il n'a rien changé aux problèmes de compétitivité de l'économie française, notamment au regard de son grand voisin allemand, il n'a rien changé à la question de l'endettement, question si cruciale dans un contexte de crise financière en Europe (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR),...
M. Henri Emmanuelli. Vous parlez d'endettement, mais à qui la faute ?
M. François Fillon, Premier ministre. ...pas plus qu'à la nécessité de protéger notre modèle social face à l'allongement de la durée de la vie. Oui, nous allons amplifier nos efforts pour relever ces défis et pour protéger les Français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Quant à vous, que proposez-vous ? Vous voulez que l'on arrête tout ce qui est mis en oeuvre ; et pour le remplacer par quelle politique ? Par l'immobilisme, qui conduirait évidemment à la destruction de notre système de retraite. (Mêmes mouvements.) Vous nous proposez de remplacer notre politique par un projet socialiste qui n'existe pas - en tout cas pas encore. Depuis 2007, la France a déjà beaucoup changé et, durant cette campagne, je n'ai pas entendu de Français me réclamer la suppression de l'autonomie des universités ou la suppression du revenu de solidarité active, ou encore me proposer le rétablissement des droits sur les petites et les moyennes successions ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Ayrault, si votre question signifiait : allez-vous faire demi-tour ? ma réponse est " non ". (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 mars 2010