Question au Gouvernement n° 2073 :
sécurité des biens et des personnes

13e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Dufau
Landes (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 25 mars 2010

UTILISATION DE LA VIDÉOSURVEILLANCE EN MATIÈRE D'INVESTIGATION POLICIÈRE

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jean-Pierre Dufau. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Je comprends l'émotion de notre collègue Jean-Claude Mignon. En effet, le 1er décembre 2007, deux policiers espagnols étaient abattus par ETA dans ma ville de Capbreton.
Hier, le Président de la République, au nom de la nation tout entière, a rendu hommage au policier Jean-Serge Nérin, tué par des membres présumés d'ETA en France.
Nous sommes unanimes pour condamner la violence et le terrorisme. Nous sommes unanimes pour exprimer à la famille du défunt notre profonde émotion et notre soutien. Nous tenons à souligner notre totale solidarité avec les forces de police frappées par cette fusillade.
Cependant, dans cette période électorale, le Gouvernement s'est précipité, pour des effets d'annonce erronés... (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) ayant même entraîné des excuses du Premier ministre. (" C'est lamentable ! " sur les bancs du groupe UMP.)
Confondre un groupe de pompiers catalans en congé avec de dangereux terroristes basques est consternant. Présenter aux médias ces pompiers comme les coupables de la fusillade, au prétexte qu'ils ont été filmés dans un supermarché par des caméras de surveillance, c'est une faute politique majeure. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ces faits méritent analyse. Une politique fondée sur la médiatisation ne peut remplacer une politique sérieuse et méthodique d'investigation en matière de sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le recours à une police scientifique et technique ne saurait justifier la réduction des effectifs de police et de gendarmerie. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Policiers et gendarmes font un métier difficile. Ils ont besoin de considération, de moyens humains et financiers, de proximité avec nos concitoyens. (" Cela n'a rien à voir ! " sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, quand allez-vous changer de politique pour faire de la sécurité publique, non pas une exploitation électorale, mais une action au service de nos concitoyens ? Quand allez-vous faire le choix du savoir-faire plutôt que du faire savoir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ainsi que sur certains bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le député, vous vous associez à l'hommage qui a été rendu de manière unanime et vous avez parfaitement raison, même si la fin de votre intervention nous ramenait à des contingences qui, honnêtement, ne sont pas dignes étant donné la nature de ce drame. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Henri Emmanuelli. Excusez-nous de vous importuner !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Votre intervention appelle trois remarques. Premièrement, je ne peux pas laisser dire que nous avons souhaité remplacer les enquêteurs par des moyens technologiques.
M. Patrick Roy. Mais si !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Vous avez raison : la police judiciaire, ce n'est pas simplement l'addition d'ordinateurs, d'analyses génétiques et d'images de vidéosurveillance ; c'est le travail de milliers d'hommes et de femmes qui, quotidiennement, recherchent la vérité et identifient les coupables.
M. Christian Bataille. Avouez que vous êtes allés un peu vite !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Deuxièmement, je vous le dis : non, nous n'allons pas nous excuser d'utiliser des images vidéos.
M. Jérôme Lambert. C'est ça le problème !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Ces images sont très souvent utiles. (" Bravo ! " sur les bancs du groupe UMP. - " Elles sont mal exploitées ! " sur les bancs du groupe SRC.)
C'était le cas il y a quelques mois, lorsque, à La Défense, un homme a poussé une personne sur la voie ferrée : les images ont permis d'identifier immédiatement le responsable.
M. Henri Emmanuelli. Mais pas en étant diffusées dans les journaux !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Ce fut encore le cas à Lille, il y a quelques semaines à peine, où un violeur a lui aussi été identifié immédiatement.
Troisièmement, en ce qui concerne le drame que vous évoquez, je ne comprends pas ce que vous nous reprochez. Pour qu'une enquête de police progresse, il faut étudier toutes les pistes. En l'espèce, il y avait des témoignages concordants ; il y avait, effectivement, des images vidéos ; il y avait des éléments donnés par la police espagnole, que nous avons vérifiés. Les suspects ont été entendus. Ils étaient effectivement innocents, et ont donc, très concrètement, été disculpés immédiatement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais je vous le dis, monsieur le député, si nous n'avions pas utilisé et diffusé ces images, nous aurions peut-être pris le risque de laisser échapper un commando. Et alors, vous-même vous seriez érigé en défenseur de ce qui, à vous en croire, n'aurait jamais dû être ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Alors ne prenez pas le risque de vous enferrer dans la contradiction.
Par ailleurs, l'enquête progresse. Un responsable a été identifié ; un portrait-robot sera très prochainement diffusé et je vous affirme que tous les responsables seront identifiés, interpellés, déférés et sanctionnés.
Enfin, conseil pour conseil, sur le savoir-faire et le faire savoir, faites donc un exercice de mémoire : vous n'exerciez ni l'un ni l'autre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Dufau

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

Ministère répondant : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 2010

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