droits de l'Homme
Question de :
M. François Loncle
Eure (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 5 décembre 2007
ÉLECTIONS EN RUSSIE ;
VISITE DU COLONEL KADHAFI EN FRANCE
M. François Loncle. Monsieur le Premier ministre, au lendemain des élections législatives russes, les constats et les accusations de fraude massive, de pressions et de malhonnêteté se sont multipliées en Russie et dans le monde, et voilà que le Président de la République française ne trouve rien de mieux que de se précipiter au téléphone pour féliciter chaleureusement M. Poutine,...
M. Lucien Degauchy. Et alors ?
M. François Loncle. ...tandis que les dirigeants de l'Espagne, de l'Italie, de la Grande-Bretagne, des États-Unis et le gouvernement allemand, Mme Angela Merkel en tête, soulignent que ces élections n'étaient ni équitables, ni libres, ni démocratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Pourquoi ce coup de téléphone pour le moins hâtif et imprudent ? Pourquoi cette caution supplémentaire à un régime de plus en plus autoritaire ? Voilà qui contredit totalement les propos de campagne, les engagements de M. Sarkozy, qui déclarait en mai dernier : " Ce n'est pas parce que la Chine et la Russie sont de très grandes puissances que l'on doit s'interdire de dénoncer les violations des droits de l'homme. " Et il fixait ainsi le grand objectif de sa politique étrangère : " promouvoir les droits de l'homme partout dans le monde ".
Alors, monsieur le Premier ministre, au moment où la Realpolitik semble céder la place à une dose de cynisme difficilement supportable, au moment où le Président Sarkozy s'apprête, lundi prochain, à accueillir le colonel Khadafi pour une visite d'État en France, seul de tous les pays de l'Union européenne à le faire (" Quelle honte ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.), quelle est votre appréciation sur ces manquements et ces dérives ? Allez-vous défendre la vocation universelle de la France, ses valeurs, les principes républicains, auxquels nous devrions ici être tous attachés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. En ce qui concerne la Russie, monsieur François Loncle, nous avons demandé à ce que toute la lumière soit faite sur les allégations relatives aux contestations électorales.
Mme Marylise Lebranchu. Après tout le monde !
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Un grand pays comme la Russie ne doit avoir peur ni de la démocratie, ni des exigences de transparence qu'elle emporte.
M. Jean Glavany. Alors pourquoi féliciter Poutine ?
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Nous devions le dire : nous l'avons dit ! (" Non ! C'est faux ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est le cadre du dialogue exigeant qui doit être mené entre l'Union européenne et la Russie. Le Président de la République l'a fait savoir au Président Poutine lors de son dernier déplacement.
En ce qui concerne la visite de M. Kadhafi, c'est le prolongement de celle du Président de la République en Libye en juillet dernier. Elle marque le retour de la Libye dans la communauté internationale, qui a été engagé avec le renoncement au terrorisme, l'abandon de tout programme nucléaire contraire aux engagements internationaux, l'arrêt des programmes d'armes de destruction massive,...
M. Albert Facon. La fin de l'utilisation de chiens dans les interrogatoires ?
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. ...et enfin la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien.
M. François Hollande. C'est bien le moins !
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. La France doit accompagner la Libye dans cette évolution.
Cette visite sera aussi l'occasion de conclure un certain nombre d'accords utiles au développement de ce pays et au mieux-être de sa population dans le domaine sanitaire, de l'eau, des télécommunications et de l'énergie.
M. Patrick Roy. Tartuffe !
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. La Libye est un partenaire méditerranéen. Elle doit prendre toute sa place dans ce cadre et nous souhaitons avoir avec ce pays, comme avec les autres,...
M. François Hollande. Avec la Corée de Kim Jong Il ?
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes ...un dialogue sans tabou, un dialogue franc, bref un dialogue politique.
Enfin, monsieur François Loncle, je souhaitais vous dire très clairement qu'il n'y a pas de contradiction entre la volonté de faire entendre partout la voix de la France en ce qui concerne la défense des droits de l'homme, et celle d'assurer notre développement économique et de sauvegarder nos emplois. (" Scandaleux ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Patrick Roy. Ce n'est donc pas seulement pour le bien-être des Libyens ?
M. Christian Bataille. Risible !
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. C'est d'ailleurs l'honneur de toutes les grandes démocraties. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - " Béni oui oui ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Christian Bataille. Leur honneur, c'est de ne pas être prêtes à tout pour de l'argent !
Auteur : M. François Loncle
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2007