heures supplémentaires
Question de :
M. Jean Mallot
Allier (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 9 juin 2010
DÉFISCALISATION DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean Mallot. Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement a fait voter en 2007 le " paquet fiscal ", censé mettre en application le célèbre miroir aux alouettes : " travailler plus pour gagner plus ". (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)
Très coûteux pour les finances publiques, ce paquet fiscal comporte une mesure consistant à exonérer d'impôts et de cotisations les heures supplémentaires, lesquelles sont devenues moins chères que les heures normales pour les entreprises. Une première évaluation de cette mesure est maintenant disponible. Elle montre que les critiques que nous avions formulées dès l'origine étaient fondées.
Vous prétendiez que les salariés demanderaient à faire des heures supplémentaires pour gagner plus : c'est faux ! L'étude du ministère du travail montre que si les entreprises n'ont pas accru le nombre des heures supplémentaires, c'est à 82 % parce que l'évolution de leur activité ne l'a pas justifié. Celles qui y ont eu davantage recours l'ont fait à 65 % en raison de l'augmentation de l'activité et seulement à 40 % à la demande des salariés. Elles disent également avoir, de ce fait, moins recouru à l'intérim et moins recruté.
L'augmentation du recours aux heures supplémentaires n'a concerné qu'une minorité d'entreprises, soit un cinquième des salariés. Qui plus est, le dispositif ne s'est appliqué qu'à une petite partie d'entre eux. Il n'a même pas bénéficié aux salariés à temps partiel. En réalité votre mesure d'un coût, rappelons-le, de 3 milliards d'euros en 2008, a constitué une aubaine pour ceux qui, de toute façon, aurait fait des heures supplémentaires et pour leurs entreprises.
Dans certaines entreprises, elle a eu des effets pervers car la baisse du salaire de référence a été compensée par des heures supplémentaires non réalisées. Elle a accéléré les effets de la crise sur la montée du chômage et retardé sa décrue. En avril, malgré les annonces du Président de la République, qui manifestement ne commande pas tout, le chômage est reparti à la hausse.
Alors, je vous le demande, monsieur le Premier ministre, quand allez-vous réparer votre erreur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le député, s'agissant de la défiscalisation des heures supplémentaires, les derniers chifffres, qui portent sur le quatrième trimestre 2009, montrent que le nombre d'heures supplémentaires en moyenne par salarié est reparti à la hausse, ce qui est une bonne nouvelle car cela montre que l'activité reprend. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Et la hausse du chômage !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Par ailleurs, à travers votre question, vous semblez sous-entendre que les heures supplémentaires qui bénéficient à des salariés modestes se feraient au détriment de l'emploi. C'est une vision totalement décalée par rapport aux faits. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Première réalité : le nombre d'heures supplémentaires n'a jamais été aussi élevé qu'entre mars et octobre 2008, période pendant laquelle notre économie a créé le plus d'emplois.
Deuxième réalité, que vous ne contestez d'ailleurs pas dans votre question : lorsque le marché d'emploi va moins bien, les heures supplémentaires vont moins bien.
Troisième réalité, que vous cachez : les heures supplémentaires permettent de soutenir les salaires. Ce faisant, elles représentent des gains qui sont loin d'être négligeables, monsieur Mallot. Pour un salarié dont le revenu mensuel est de 1 400 euros, quatre heures supplémentaires par semaine constituent un gain de plus de 100 euros nets par mois. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Peut-être certains d'entre vous considèrent-ils cela comme négligeable ? Peut-être souhaitez-vous revenir sur ces mesures ? Alors, allez jusqu'au bout de votre logique, et dites aux Français que vous vous apprêtez à revenir sur plus de 3 milliards d'euros de soutien à leurs salaires et que le projet que vous portez est celui-ci, monsieur Mallot.
En vérité, ce qui a plombé l'emploi dans notre pays, ce ne sont pas les heures supplémentaires mais les 35 heures ! (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
En vérité, ce qui a coûté 40 milliards d'euros à notre pays, ce ne sont pas les heures supplémentaires mais les 35 heures !
En vérité, ceux qui persistent dans l'erreur sont du côté de l'hémicycle où vous siégez, monsieur Mallot ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : M. Jean Mallot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Emploi
Ministère répondant : Emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 juin 2010