Question au Gouvernement n° 252 :
DOM-ROM : Guyane

13e Législature

Question de : Mme Christiane Taubira
Guyane (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 13 décembre 2007

POLITIQUE MINIÈRE OUTRE-MER

M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme Christiane Taubira. Je souhaitais interroger M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, mais il est absent, n'est-ce pas ? Je ne veux pas croire qu'il soit en train de polluer la planète par des voyages intempestifs, cela lui ressemble si peu ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ma question concerne la politique minière du Gouvernement. Après la fermeture de la mine d'or de Salsigne, après celle des houillères, des mines de fer, et même d'uranium à faible teneur, il n'existe plus guère de grand territoire d'extraction et d'exploitation minière en dehors des outre-mers : le nickel en Nouvelle-Calédonie ; le pétrole à Saint-Pierre-et-Miquelon ; le pétrole, probablement, en Martinique ; l'or et le pétrole en Guyane. L'or et le nickel sont des ressources terrestres, le pétrole est off shore, c'est-à-dire qu'il se trouve en mer.
Or, dans l'article 31 du code minier figure une disposition, introduite par la loi de décembre 1993, excluant les gisements en mer de toute redevance due par les titulaires de concession. Votre gouvernement semble considérer le code minier comme un texte sacré, puisqu'il répugne à y introduire la moindre disposition de justice fiscale qui permettrait de faire en sorte que les multinationales, auxquelles sont attribuées ces concessions, contribuent aux charges communes. Le dernier refus du Gouvernement remonte au débat budgétaire sur la mission Outre-mer.
Et si d'aventure c'est le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer qui me répond, j'espère qu'il nous précisera la date de livraison de la énième étude d'impact qu'il nous a promise. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ces réticences sont aggravées par des pratiques dilatoires, qui consistent à contourner les dispositions de la loi Paul de décembre 2000, laquelle transfère aux régions la compétence d'attribution des titres miniers en mer. En six ans, et malgré plusieurs relances, vous n'avez pas trouvé le temps de publier le décret d'application qui aurait rendu opérationnel cet article de la loi.
En ce qui concerne l'exploitation des ressources terrestres, vous avez dépêché, ces derniers jours, une mission d'experts en Guyane, qui doit remettre son rapport en fin d'année. C'était un engagement du Grenelle de l'environnement, ce qui signifie que vous allez décider très vite. Quelles garanties nous apportez-vous quant à la transparence de la décision, quant au fait qu'elle ne sera pas seulement fondée sur le risque que l'entreprise réclame des dédommagements à l'État, comme elle en a le droit,...
M. le président. Votre question, madame Taubira ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mme Christiane Taubira. Tous les députés ne sont pas sous la même surveillance. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
...sur le risque que l'entreprise réclame des dédommagements à l'État, qui a trop tardé avant de trancher ? C'est une condition de cohérence.
M. le président. Votre question, madame Taubira ?
Mme Christiane Taubira. Allez-vous prendre en pleine considération les servitudes de la loi sur l'eau, ainsi que la préservation des écosystèmes fragiles ?
C'est une condition nécessaire pour que votre politique soit cohérente avec la création du parc amazonien, dont l'emprise sur les massifs intérieurs du territoire guyanais est de 40 %. Mais c'est aussi une condition nécessaire pour faire la part des bonnes pratiques artisanales et industrielles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.
M. Christian Estrosi, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. Madame la députée, vous persévérez, après l'examen de la loi de finances, et notamment des crédits de l'outre-mer. Je vous confirme que la loi de programme que je présenterai au cours du premier trimestre 2008 comportera des dispositions visant à la mise en place d'une taxe sur les gisements d'hydrocarbures, dont le produit irait aux collectivités d'outre-mer.
Mais vous m'offrez l'occasion, madame la députée, d'évoquer plus globalement quelques dispositions du plan d'action outre-mer issu du Grenelle de l'environnement. Pour la première fois, nous avons pris des décisions particulièrement déterminantes, qu'il s'agisse des énergies renouvelables ou du plan d'extraction minier.
À cet égard, vous savez parfaitement quelle est la situation, et notamment en Guyane, madame Taubira. D'un côté, un projet important pourrait voir le jour à Camp Caïman si les conclusions de la mission d'expertise vont dans ce sens. J'apporte toutes les garanties quant à la composition de cette mission, puisqu'elle comporte notamment des experts et des scientifiques membres d'ONG. Nous sommes ainsi assurés que son rapport nous permettra de prendre des décisions particulièrement équilibrées.
Mais en contrepartie, vous n'évoquez pas, madame Taubira, le fait qu'il y a toujours en Guyane, aujourd'hui, des exploitations d'orpaillage clandestin particulièrement nuisibles pour l'environnement, avec notamment les conséquences que cela entraîne pour la forêt amazonienne : le cyanure, le mercure et bien d'autres produits toxiques. Là où nos gendarmes, nos militaires, notre police sont engagés, ils sont menacés par des forces militarisées venant parfois du Brésil ou du Surinam.
Aujourd'hui, la politique de la France consiste à trouver un juste équilibre, pour mettre un terme à ces politiques inacceptables tout en organisant une activité minière parfaitement réglementée, respectueuse de l'environnement, dans le cadre du schéma de développement durable issu du Grenelle de l'environnement. Voilà quelle est aujourd'hui, madame Taubira, la vision équilibrée du Gouvernement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : Mme Christiane Taubira

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 décembre 2007

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