Question au Gouvernement n° 2761 :
suppression

13e Législature

Question de : M. Michel Sapin
Indre (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 8 décembre 2010

JUSTICE FISCALE

M. le président. La parole est à M. Michel Sapin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Michel Sapin. Monsieur le Premier ministre, depuis de nombreuses années, alors que vous étiez déjà ministre des gouvernements précédents, et tout particulièrement depuis l'élection du Président de la République et votre nomination comme Premier ministre, des réformes fiscales se sont accumulées.
Ces réformes ont eu deux conséquences principales : d'une part, de priver le budget de l'État de dizaines de milliards d'euros de recettes et donc de creuser le déficit, déficit sur lequel vous vous appuyez aujourd'hui pour mener une politique de rigueur qui, elle, pèsera sur les plus faibles des Français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC) ; d'autre part, d'alléger la charge d'impôt des plus aisés des Français. (" C'est faux ! " sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. Albert Facon. C'est scandaleux !
M. Michel Sapin. Avec le bouclier fiscal, vous avez supprimé l'impôt sur la fortune des plus grosses fortunes. Avec la réforme de l'impôt sur les successions, vous avez supprimé l'impôt sur les successions des plus grosses successions. Avec l'accumulation des niches, vous aboutissez à ce que les plus gros revenus paient une proportion d'impôts plus faible que celle acquittée par les revenus petits et moyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs sur les bancs du groupe GDR. - Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, oui, une réforme fiscale est nécessaire, nous sommes prêts à participer à ce débat et nous faisons des propositions. Mais que nous proposez-vous ? Ce que vous appelez une réforme fiscale est en réalité un tour de passe-passe ridicule : d'un côté, on supprimerait le bouclier fiscal et de l'autre côté, on supprimerait l'ISF. Un tel tour de bonneteau ne passera pas inaperçu : d'un côté, 700 millions d'euros de cadeaux, de l'autre côté, 4 milliards d'euros de cadeaux. Qui est gagnant ?
Ma question est simple : au lieu de ce débat, que je qualifierai de ridicule...
Mme Claude Greff. C'est vous qui êtes ridicule !
M. Michel Sapin. ...qui permettra simplement d'avantager les plus riches des Français, quand pourrons-nous parler d'une vraie réforme fiscale, qui remette de l'efficacité, de la transparence et de la justice dans notre système fiscal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, à quelques encablures de Noël, pour le Gouvernement, l'heure, en cette période d'économies, n'est pas aux cadeaux mais à la justice. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) À la justice sociale, à la justice fiscale, à l'équilibre des comptes et à l'équilibre d'une réforme qui vise un double objectif :
Le premier objectif est d'arriver dans les meilleurs délais vers une convergence fiscale au service de notre économie et au service de l'équilibre de la fiscalité enfin stabilisée dans notre pays pour ce qui est du patrimoine.
M. Christian Bataille. Pipeau !
M. François Baroin, ministre. Deuxième objectif, à travers la convergence fiscale qui trouvera sa traduction dans le rapport commandé par le Président de la République à la Cour des comptes : nous avons mis en oeuvre, sous l'autorité du Premier ministre, un groupe de travail chargé, pendant les semaines qui viennent et jusqu'à la fin du mois d'avril, de formuler des propositions afin de sortir de cette " alternative du diable " à laquelle nous sommes confrontés. Je veux parler de ce bouclier fiscal que vous vouez aux gémonies aujourd'hui alors qu'il n'est que l'arrière-petit-fils de ce que vous avez vous-même voté sous le gouvernement Rocard avec le plafonnement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Dans cet accès de lucidité que vous aviez encore à l'époque, vous aviez bien compris qu'en recréant un impôt de solidarité sur la fortune, vous réintroduisiez du même coup un élément confiscatoire et spoliateur.
M. Christian Eckert. Ce n'est pas vrai !
M. François Baroin, ministre. C'est la raison pour laquelle nous vous disons chiche, allez jusqu'au bout : puisque vous souhaitez remettre en cause le bouclier que vous avez vous-même enfanté, soyez équilibrés dans votre démarche et acceptez la suppression d'une fiscalité sur le patrimoine qui n'a aucune légitimité ailleurs en Europe - c'est la dernière anomalie française en la matière. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Nous allons faire des propositions. Nous n'avons pas voulu vous gêner : puisque vous avez dit oui à la suppression du bouclier, mais non à la suppression de l'ISF, nous n'avons pas voulu vous associer dans ce temps de débat, mais nous vous donnons rendez-vous en juin, à l'occasion de la loi de finances rectificative, pour aboutir à cette réforme juste et équilibrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Michel Sapin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôt de solidarité sur la fortune

Ministère interrogé : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État

Ministère répondant : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 8 décembre 2010

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