livrets d'épargne
Question de :
M. Jean-Pierre Balligand
Aisne (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 20 décembre 2007
LIVRET A
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean-Pierre Balligand. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. (" Elle n'est pas là ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Les Français sont très attachés au livret A, pour une raison simple : depuis 190 ans, l'argent qu'ils y déposent est sécurisé grâce à sa centralisation auprès de la Caisse des dépôts. Mais les banques françaises ont déposé un recours devant la Commission européenne pour dénoncer le monopole de sa distribution. La Commission réclame donc la " banalisation " du livret A, ce qui signifie qu'il pourra être distribué par l'ensemble des banques.
On pourrait juger intéressante une telle mesure. Mais il est à craindre que les banques s'évertuent à proposer des produits de substitution à leurs clients - en particulier à ceux dont le livret est le mieux garni -, à des taux plus intéressants, ce qui les dissuadera de placer plus longtemps leur épargne dans les livrets A. Or ce que les Français savent peu, c'est que l'argent collecté par ce biais bénéficie au logement social, dont 70 % est financé par la Caisse des dépôts et consignations - de même que la rénovation des villes et des quartiers ou les transports collectifs en site propre. Tout cela grâce au livret A !
Si les épargnants les plus aisés se tournent vers d'autres types de placement, l'usage du livret A sera limité aux familles modestes, qui ont besoin d'une épargne liquide, c'est-à-dire d'un argent disponible à tout moment. Dès lors, la France ne pourra plus investir sur trente ou quarante ans comme le dispositif actuel permet de le faire. Or les investissements réalisés dans nos villes ont une rentabilité à très long terme.
Les membres du groupe socialiste, très attachés, comme certains de leurs collègues sur d'autres bancs, à la pérennité de ce dispositif, demandent donc au Gouvernement de dire quelles sont ses intentions réelles.
Vous avez déposé un recours contre la décision de la Commission, mais le Président de la République s'est prononcé pour la banalisation du livret A, en contradiction avec l'action du Gouvernement. Allez-vous maintenir ce recours ?
Deuxièmement, la Caisse des dépôts et consignations fait l'objet d'attaques incessantes. Allez-vous maintenir cet établissement dans son rôle d'investisseur à long terme ? De nombreuses places financières s'en féliciteraient, car travailler uniquement sur le court terme n'est pas une façon d'amortir les effets de la crise financière mondiale.
Répondez à ces questions, car toutes les organisations de logement social sont inquiètes. Ne touchez pas à notre livret A ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ainsi que sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
M. Jacques Myard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Dans le rapport sur le livret A qu'il a remis mardi au Premier ministre, Michel Camdessus présente une analyse simple. La Commission européenne, comme vous l'avez rappelé, a demandé à la France de mettre fin aux dispositions législatives qui réservent le livret A à la Banque postale, aux Caisses d'épargne et au Crédit mutuel. Il propose donc de faire de cette contrainte une chance pour le financement du logement social et l'accessibilité bancaire.
Le rapport souligne que le système actuel du livret A s'essouffle et ne permet plus d'offrir au logement social un financement bon marché.
Si le livret A participe à la bancarisation d'une partie des Français au revenu modeste, de nouveaux outils performants ont été mis en place, particulièrement par Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'économie et des finances (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) qu'il s'agisse du droit au compte bancaire ou du service bancaire de base que vous connaissez, mesdames, messieurs les députés ! Partant de ce constat, que nous dit M. Camdessus dans son rapport ? Il observe, bien sûr, que la généralisation de la distribution du livret A serait l'occasion de diffuser plus largement un produit d'épargne populaire auquel, vous l'avez rappelé, les Français sont attachés. Voilà qui serait donc bon pour nos concitoyens. Mais il remarque surtout que cela permettrait de réduire le coût de financement du logement social et de renforcer l'accessibilité bancaire pour tous les Français. Michel Camdessus affirme dans son rapport (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) que ces propositions permettraient de réduire de 1 à 2 milliards les coûts de financement du logement social.
M. Alain Néri. Cela ne veut rien dire !
M. Marcel Rogemont. Quelle est la position du Gouvernement ?
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Vous le savez, le Gouvernement est décidé à s'attaquer au problème de la pénurie de logements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Le Premier ministre et le Président de la République l'ont encore rappelé ces derniers jours.
Michel Camdessus estime également dans son rapport (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) qu'une telle réforme serait l'occasion de renforcer les outils de bancarisation des Français les plus modestes.
Nous devons donc faire preuve d'audace, monsieur le député, et examiner avec attention ces propositions qui peuvent être un outil puissant pour soutenir la politique du Gouvernement. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Maxime Gremetz. Répondez à la question !
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Le sens des responsabilités nous l'impose. La Caisse des dépôts est, quant à elle, un acteur pivot dans le financement du logement social. Le Gouvernement souhaite en préserver le rôle central.
Le rapport Camdessus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)...
M. Marcel Rogemont. On ne vous demande pas de résumer le rapport Camdessus, mais de donner la position du Gouvernement !
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. ...offre des pistes intéressantes pour renforcer les outils dont elle dispose. Nous l'examinerons avec attention. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Jean-Pierre Balligand
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Consommation et tourisme
Ministère répondant : Consommation et tourisme
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 20 décembre 2007