politique fiscale
Question de :
M. Olivier Dussopt
Ardèche (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 17 février 2011
CONFLITS D'INTÉRÊTS
M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Olivier Dussopt. Monsieur le Premier ministre, il y a quelques semaines, certains de mes collègues vous ont interrogé sur la question des conflits d'intérêts et sur les rapports entre le pouvoir et les grandes fortunes de notre pays ; Christian Eckert avait évoqué une réunion du " premier cercle ", ce club des généreux donateurs de l'UMP, (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) réunion au cours de laquelle le Président de la République avait promis la suppression de l'ISF. Cette promesse au moins, il semble vouloir la tenir, et même contre l'avis de certains collègues de la majorité puisqu'il a répété hier sa volonté de supprimer l'ISF.
Monsieur le Premier ministre, sur d'autres sujets, à propos des errements de votre ministre des affaires étrangères et de toutes les affaires qui les ont précédées, nous avons dit que nous sommes passés de la promesse d'une République irréprochable à une complaisance coupable vis-à-vis des puissants et des dictatures. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
M. André Wojciechowski. Oh la la !
M. Olivier Dussopt. Si vous nous confirmez aujourd'hui la suppression de l'impôt sur la fortune, vous ajouterez l'indécence à la complaisance.
Les Français souffrent et paient les erreurs de votre politique économique : erreurs dans la gestion de la crise, erreurs et injustices dans vos choix, avec un chômage au plus haut, 15 % des Français sous le seuil de pauvreté, des prix qui augmentent sans cesse - le gaz, l'électricité, les transports et j'en passe -, des aides sociales qui diminuent, des associations caritatives débordées, et le rapport de la fondation Abbé Pierre qui souligne la crise sociale que traverse notre pays.
M. André Wojciechowski. Vous n'avez pas fait mieux !
M. Olivier Dussopt. Alors que, dans le même temps, vous-même et votre gouvernement semblez vous complaire dans un décalage indécent entre voyages inopportuns et affairisme, entre nominations de complaisance à tous les étages de la République et provocation gratuite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Plutôt que de répondre aux attentes de nos concitoyens, le Président de la République, fidèle à son image de Président des riches, décrète que la priorité est de baisser l'impôt sur les grandes fortunes !
Vous renvoyez l'image d'un pouvoir sourd aux aspirations de justice sociale, obstiné dans la mise en oeuvre d'une politique injuste. Baisser l'impôt sur les grandes fortunes, est-ce vraiment votre priorité ? Ne nous dites pas que les socialistes allemands l'ont fait : c'est Helmut Kohl, Chancelier de droite, qui l'avait décidé en 1997.
Ma question est très simple : allez-vous faire encore un cadeau fiscal supplémentaire aux ménages les plus favorisés de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
M. Christian Paul. Excellente question !
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Dussopt, retenons ensemble que l'exemple de l'Allemagne et de Helmut Kohl n'est pas pertinent et prenons alors l'exemple espagnol : M. Zapatero est socialiste...
M. Jacques Desallangre. Mais oui, autant que moi !
M. François Baroin, ministre. ...et il a supprimé l'impôt sur les grandes fortunes. (" Eh oui ! " et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Assumez-le et reconnaissez que cette réflexion n'est ni de gauche ni de droite. C'est une réflexion qui doit être partagée pour atteindre le double objectif de cette réforme : celui de justice sociale, que nous partageons tous, et celui de compétitivité économique, dont je veux croire qu'une partie de l'opposition, qui a exercé les responsabilités, le poursuit également.
M. Philippe Plisson. Langue de bois !
M. François Baroin, ministre. Je vous remercie d'assurer ainsi, à travers votre question, la promotion des travaux que nous pilotons, sous l'autorité du Premier ministre, avec les membres de la majorité. Depuis plusieurs semaines en effet, nous travaillons sur une photographie précise de la constitution du patrimoine des Français, sur le droit comparé des fiscalités européennes, sur les éléments comparatifs de la fiscalité française et sur son évolution, ce qui dit beaucoup d'ailleurs sur la réalité d'un pays.
Ces travaux vont se poursuivre selon un calendrier qui est maîtrisé : le texte sera soumis au Conseil d'État à la fin du mois d'avril, et devrait être présenté en conseil des ministres dans la première quinzaine de mai. Le projet de loi devra alors être équilibré et ne pas s'éloigner de ce double objectif. Pour l'heure, aucun choix n'est privilégié par rapport à un autre : tous les scénarios sont toujours en discussion. Nous dirons, début mars, quelles sont les mesures que nous ne retenons pas. Ce qui nous laissera encore un mois et demi pour peaufiner le texte et s'adapter à l'équilibre du travail législatif. Cela nous permettra, comme le Président de la République s'y était engagé, comme le Premier ministre l'a réaffirmé à de nombreuses reprises, d'avoir, au mois de juin prochain, un débat utile pour notre économie et utile pour une certaine idée de la justice sociale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Olivier Dussopt
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôt de solidarité sur la fortune
Ministère interrogé : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État
Ministère répondant : Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 février 2011