Japon
Question de :
M. François Sauvadet
Côte-d'Or (4e circonscription) - Nouveau Centre
Question posée en séance, et publiée le 16 mars 2011
CATASTROPHE NATURELLE AU JAPON
M. le président.La parole est à M. François Sauvadet, pour le groupe Nouveau Centre.M. François Sauvadet. Monsieur le président, sur les bancs de cette assemblée, nous partageons tous l'émotion que vous venez d'exprimer, à la suite du drame qui a frappé le Japon.
Vendredi, ce pays a vécu un drame sans précédent dans son histoire : des milliers de morts, plus de 40 000 personnes dont nous sommes actuellement sans nouvelles, plus de 600 villages et villes balayés par la vague meurtrière du tsunami.
Depuis quelques heures, le Japon est aussi frappé par un accident nucléaire consécutif au tsunami, qualifié de très grave par les autorités et dont on ne connaît pas encore toute l'ampleur ni les conséquences sur la zone concernée.
Avant toute chose et comme vous l'avez fait, monsieur le président et monsieur le Premier ministre, je veux saluer la dignité des Japonais qui vivent des heures particulièrement difficiles. Avec Philippe Folliot, vice-président du groupe d'amitié France-Japon - mais je crois que c'est un sentiment partagé par tous -, je souhaite aussi les assurer de notre solidarité.
Face à cette catastrophe, monsieur le Premier ministre, la première urgence est bien d'apporter notre soutien humanitaire et de participer à la mobilisation internationale pour apporter des solutions concrètes, notamment face à ce risque sanitaire lié au problème du nucléaire.
À tous nos collègues je dis qu'il faut éviter de jouer sur les peurs (" Très bien ! " sur les bancs du groupe UMP) et les craintes légitimes que peut susciter la situation au Japon, pour alimenter des questions dont nous aurons le temps de débattre dans notre pays (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes NC et UMP.)
Le temps du débat sur l'avenir du nucléaire français viendra. Pour l'instant nous avons une urgence : faire face à la situation au Japon. Nous devons tous être solidaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
L'heure est à la solidarité, à l'action de terrain.
Avec le Président de la République, vous avez suivi heure par heure la situation et ses conséquences, monsieur le Premier ministre. Vous avez réuni ce matin, à douze heures trente, tous les ministres concernés. Comme tous mes collègues, membres de la représentation nationale, je souhaite que vous nous fassiez part de votre analyse. Pourriez-vous nous indiquer les conditions dans lesquelles nous allons nous engager ?
J'ai une pensée pour les hommes et les femmes qui sont déjà arrivés de France pour apporter leur concours au Japon. Monsieur le Premier ministre, j'aimerais connaître les décisions que vous avez d'ores et déjà prises au nom de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, messieurs les présidents de groupe, le Japon vient de subir l'un des quatre plus puissants tremblements de terre de l'histoire humaine, suivi d'un tsunami d'une violence extrême, qui a sans doute causé des dizaines de milliers de morts. Cinq cent mille personnes vivent actuellement dans des refuges provisoires, manquent d'eau, de nourriture, de médicaments. C'est tout un pays qui tente de surmonter la pire tragédie de son histoire depuis 1945.
Je veux d'abord adresser, au nom de la France tout entière, un message de solidarité, d'affection et de fraternité à la nation japonaise. (Applaudissements sur tous les bancs.) La France salue le courage du peuple japonais, qui se tient debout avec une dignité et un sang-froid qui forcent notre respect.
L'urgence est d'abord humanitaire. Cent quatorze personnels de la sécurité civile française sont sur place pour appuyer les secours. À la demande des autorités japonaises, nous préparons, depuis ce matin, l'envoi des équipements nécessaires à l'assistance aux personnes sans abri. La France, qui préside le G20, prendra, dans les prochaines heures, sous l'autorité du Président de la République, des initiatives pour venir en aide au Japon.
Cependant, vous l'avez souligné, l'urgence est maintenant aussi nucléaire. L'Autorité de sûreté nucléaire française vient de classer l'accident de Fukushima au niveau 6 sur une échelle qui en compte sept. L'enceinte de confinement d'un des réacteurs de Fukushima semble bien avoir été endommagée. Les piscines de stockage de combustible usé sont également vulnérables. La radioactivité sur le site rend très difficiles et très dangereux les travaux nécessaires à la reprise en main de la situation. Le relâchement de gaz radioactifs dans l'atmosphère, jusqu'alors volontaire pour gérer les surpressions dans les réacteurs, pourrait prendre des proportions beaucoup plus importantes. Les vents soufflent désormais vers le sud, et Tokyo se trouve déjà exposé à une augmentation anormale de la radioactivité, même si les données ne sont pas encore inquiétantes.
Notre premier devoir est celui de la solidarité avec le Japon. Des spécialistes de radioprotection partiront pour Tokyo dans les heures qui viennent. Nous avons proposé au gouvernement japonais des matériels de secours et d'assistance, et des experts de la sécurité nucléaire sont disponibles pour apporter leur concours à leurs homologues japonais.
Notre deuxième obligation est envers nos compatriotes vivant au Japon. Il y en a, en temps normal, près de 5 000 dans l'agglomération de Tokyo, sans doute un peu plus de 2 000 aujourd'hui : 280 parmi les personnes prioritaires, notamment les enfants, vont rentrer avec l'avion qui transportait les agents de la sécurité civile et les 10 000 pastilles d'iode destinées à nos ressortissants au cas où la situation justifierait leur emploi.
Nous avons proposé à ceux de nos compatriotes qui ne sont pas astreints à rester à Tokyo de rentrer en France ou de partir vers le sud du Japon dès maintenant. Le Gouvernement a demandé à Air France de mobiliser des avions se trouvant en Asie pour répondre sans délai à la demande de nos ressortissants.
Enfin, nous avons renforcé la surveillance des retombées radioactives outre-mer et sur le territoire métropolitain. Toutes les balises de détection et de mesure de l'IRSN sont activées, et j'indique à nos concitoyens que les résultats en sont disponibles en continu sur le site internet de l'IRSN. Enfin, l'Agence internationale pour l'énergie atomique mutualisera les informations utiles.
La situation au Japon suscite un débat sur notre politique nucléaire. Alors que les Japonais se battent contre la catastrophe, j'en appelle à la responsabilité et à la retenue. Il y a un temps pour chaque chose : aujourd'hui, c'est le temps du soutien et de la solidarité avec le peuple japonais. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, et sur de nombreux bancs des groupes SRC et GDR.) Il y aura ensuite le temps du retour d'expérience. Nous devrons tirer tous les enseignements de cette catastrophe pour renforcer la sécurité de notre parc nucléaire. C'est l'un des plus sûrs, c'est l'un des plus vérifiés, c'est l'un des plus transparents.
M. Yves Cochet. Non !
M. François Fillon, Premier ministre. Il est tout aussi absurde d'affirmer que le nucléaire est condamné par cet accident que d'affirmer qu'il ne nous concerne pas. Nous n'éluderons aucune des questions posées par cette catastrophe. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, et sur quelques bancs des groupes SRC et GDR.)
Que s'est-il passé au Japon ? Deux catastrophes naturelles coup sur coup : un tremblement de terre d'une puissance inégalée, plus un tsunami. Si les centrales ont résisté au tremblement de terre, le tsunami a eu raison des systèmes de refroidissement. Nous devons tenir compte de ce qui s'est passé au Japon. À quelle force de tremblement de terre peut résister chacune de nos centrales ? À quel niveau d'inondation peuvent-elles faire face ? Nous allons contrôler tout cela et nous le ferons en toute transparence. Comme vous venez de le demander, les démonstrations de sûreté de chaque centrale en France seront contrôlées à la lumière des enseignements tirés de la catastrophe de Fukushima, et les résultats de ces contrôles seront rendus intégralement publics. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, et sur divers bancs des groupes SRC et GDR.)
Mesdames et messieurs les députés, la catastrophe de Fukushima nous rappelle à l'exigence d'une gestion toujours plus professionnelle de nos risques industriels et à celle d'une totale transparence dans leur gestion, mais elle nous rappelle aussi à une solidarité humaine qui transcende les frontières. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, NC, SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
Auteur : M. François Sauvadet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 mars 2011