perspectives
Question de :
M. François Hollande
Corrèze (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 23 janvier 2008
CRISE BOURSIÈRE
M. le président. La parole est à M. François Hollande, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. François Hollande. Monsieur le président, mes chers collègues, je m'associe à mon tour à l'hommage qui a été rendu par le président Poniatowski aux infirmières bulgares, mais je condamne le régime qui les a détenues pendant huit ans et leur a fait supporter des violences et brutalités indignes des rapports entre États. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicain, et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les autres bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Claude Lenoir. Mitterrand est allé voir Kadhafi en Crète !
M. Yves Nicolin. Vieux crocodile !
M. François Hollande. Tenez-vous correctement : c'est la meilleure image que vous puissiez donner aux infirmières bulgares !
M. le président. Mes chers collègues, donnons l'image de la démocratie que nous sommes !
Monsieur Hollande, vous avez la parole.
M. François Hollande. Je vous remercie, monsieur le président : je vais la reprendre tranquillement.
Ma question s'adresse au Gouvernement et, en l'absence du Premier ministre, je demande que quelqu'un me réponde. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les turbulences boursières qui affectent l'économie mondiale ne sont pas un simple mouvement d'humeur des marchés : elles révèlent une crise profonde, qui touche l'ensemble du financement de l'économie, et pas simplement de l'économie américaine. Nous l'avions dit en août dernier, au moment de la crise des subprimes : vous avez, madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, construit un budget pour 2008 qui, déjà, ne tenait pas compte des inquiétudes qui pouvaient naître à la suite de cette crise.
M. Michel Lefait. C'est vrai !
M. François Hollande. Vous avez bâti des paramètres, des hypothèses, qui étaient déjà décalés par rapport à la réalité de l'économie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Au milieu de l'année 2007, vous annonciez une croissance de 2,5 % : elle sera d'à peine 1,5 %.
M. Jean-Michel Fourgous. Elle est où, votre compétence ?
M. le président. Monsieur Fourgous, allons !
M. François Hollande. L'inflation ne devait pas dépasser 1,6 % : elle sera de 3 %. Les déficits budgétaires devaient être maîtrisés : ils ne le seront pas. Le déficit du commerce extérieur devait être inférieur à 30 milliards d'euros : on annonce déjà 40 milliards. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avec l'onde de choc qui traverse l'économie mondiale, avec la crise boursière, comment vos hypothèses pourraient-elles encore être valides ?
Ma question sera simple...
M. Yves Nicolin. À l'instar de son auteur !
M. François Hollande. Dès lors que toutes les hypothèses de croissance, fondements sur lesquels vous aviez bâti votre budget, sont infirmées, dès lors que l'inflation dans notre pays atteint déjà le double de ce que vous annonciez, dès lors que rien ne tient dans vos prévisions (" Ça suffit ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), je demande qu'un débat soit organisé à l'Assemblée nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), à la fois sur la réalité de l'économie française et sur l'ajustement que vous préparez. (" Arrêtez-le ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Merci, mon cher collègue !
M. François Hollande. Le rapport Attali - dont vous avez dit que vous le reprendriez en totalité - préconise une augmentation de la TVA de 1,6 % et une augmentation de la CSG. Les Français veulent savoir. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Nous avons compris votre question !
M. François Hollande. Un débat doit être organisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) S'il n'a pas lieu avant les élections municipales, c'est qu'un plan de rigueur se prépare. Nous avons le droit d'en connaître la teneur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Hollande, dans une situation économique internationale caractérisée par de brutales corrections sur les marchés, deux réponses s'imposent : le sang-froid et l'esprit d'équipe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Roland Muzeau. À bas le capitalisme !
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. En effet, des corrections brutales sont intervenues, en Asie d'abord, puis sur un certain nombre de marchés européens, au moment où le président Bush présentait un plan de relance de l'économie mobilisant 145 milliards de dollars, mais dont les modalités de mise en oeuvre restent empreintes d'un certain flou.
M. François Hollande. Autrement dit, c'est la faute à Bush maintenant...
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. La France, elle, a pris, plus tôt, diverses précautions et nous sommes plutôt bien placés pour relancer la machine économique, ne serait-ce que sur le marché intérieur.
M. Jean-Marc Ayrault. Quinze milliards d'euros gaspillés pour rien !
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Il ne faut pas se laisser gagner par un pessimisme qui tient essentiellement à l'analyse comparée de deux marchés.
M. Roland Muzeau. Tout va très bien, madame la marquise !
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Nous avons, d'un côté, le marché américain et, de l'autre, le marché européen. Le marché américain se présente sous un angle très différent.
M. Henri Emmanuelli. Et la France ?
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Ainsi, en France et, plus généralement, en Europe, l'immobilier tient, alors que, aux États-Unis, le marché immobilier n'est pas en bonne situation. De même, lorsque l'on compare la situation des ménages français et celle des ménages américains, on s'aperçoit que les seconds sont largement endettés, et à des taux variables, ce qui n'est pas le cas en France.
M. Henri Emmanuelli. Incroyable !
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Mais le plus important, c'est la situation de nos économies. Un critère fondamental nous distingue des Américains, nous les Européens, nous les Français : nos économies sont créatrices d'emploi.
M. Maxime Gremetz. Langue de bois !
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. En 2007, 312 000 emplois et plus de 320 000 entreprises ont été créés.
M. Henri Emmanuelli. Mais oui...
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Ces chiffres sont la traduction d'une activité économique. C'est cela qui est fondamental, et non l'écume des jours. Ce n'est pas le mouvement boursier au quotidien qui guide notre effort. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. le président. Merci, madame la ministre.
M. Jean-Marc Ayrault. Et qu'en est-il du débat ?
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. La deuxième réponse, c'est l'esprit d'équipe : c'est entre Européens que nous examinons les situations, que nous confrontons nos analyses et que nous proposons des solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et le débat ?
Auteur : M. François Hollande
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : Économie, finances et emploi
Ministère répondant : Économie, finances et emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2008