Syrie
Question de :
Mme Élisabeth Guigou
Seine-Saint-Denis (9e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 18 mai 2011
RÉPRESSION EN SYRIE
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.Mme Élisabeth Guigou. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Depuis cinquante-neuf jours, en Syrie, les manifestants subissent une répression sanglante qui a eu pour conséquences des centaines de morts et des milliers d'arrestations. De Deraa à Baniyas en passant par Damas et Lattaquié, ce ne sont pas de dangereux terroristes qui descendent dans les rues, contrairement aux allégations du régime syrien ; ce sont des avocats, des militants des droits de l'homme, des étudiants, des hommes, des femmes, bref, toute une population qui aspire légitimement à des changements politiques et démocratiques.
En 2008, la France a réhabilité la Syrie sur la scène internationale en invitant M. Bachar al-Assad à Paris, au sommet de l'Union pour la Méditerranée. Notre commission des affaires étrangères, dans un rapport approuvé à l'unanimité avait noté les promesses de réformes formulées par le président syrien, mais aussi indiqué ses craintes, notamment quant au respect des droits de l'homme et des minorités. Nous avions d'ailleurs adopté comme titre de ce rapport : " Quel chemin pour Damas ? " Or nous constatons que Damas a choisi le plus mauvais chemin possible, celui d'une répression meurtrière et sanglante.
Dans leur projet, les socialistes demandent que la France soutienne les peuples qui ont le courage de se révolter contre les dictatures. Monsieur le Premier ministre, il est urgent d'agir.
Quelles pressions la France exerce-t-elle ou va-t-elle exercer pour mettre fin à ces massacres ? Qu'allez-vous faire pour convaincre nos partenaires européens, et notamment l'Italie, d'accepter que le président syrien subisse les mêmes sanctions que celles qui ont été prononcées par l'Union européenne à l'encontre des treize principaux dirigeants de ces pays, c'est-à-dire le gel des avoirs personnels de M. Al-Assad ?
Enfin, comment comptez-vous reprendre l'initiative au Conseil de sécurité de l'ONU, alors que le régime syrien a violé ses engagements et refuse l'entrée sur son territoire d'une mission humanitaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes. Sans ironie aucune, madame la députée, permettez-moi de vous remercier du soutien que vous apportez à la politique de la France, car c'est très exactement ce que nous faisons : nous ne pratiquons pas une politique de deux poids deux mesures.
Nous avons soutenu, partout, la grande aspiration des peuples à la démocratie et à la liberté, et nous le faisons, s'agissant de la Syrie, sans aucune espèce d'ambiguïté. Nous avons d'abord incité le président Bachar al-Assad à engager un programme de réformes pour tenir compte des aspirations de son peuple. Il ne nous a pas écoutés. Nous avons donc émis une condamnation sans appel de l'utilisation de la violence récurrente et sanglante qui a fait d'ores et déjà des centaines de morts en Syrie.
Nous avons agi, d'abord, au Conseil de sécurité. Car, madame la députée, nous ne sommes pas seuls : pour obtenir une résolution du Conseil de sécurité, il faut d'abord éviter le veto d'un membre permanent, puis réunir neuf voix. Nous nous battons, avec nos amis britanniques, depuis des jours, voire des semaines, pour arriver à ce résultat. Nous sommes encore menacés d'un veto russe et d'un veto chinois. Il semble qu'une majorité de neuf voix soit en train de se dessiner en ce moment même et nous continuons à travailler au Conseil. Cette nuit encore, des discussions ont eu lieu.
Nous avons agi au sein de l'Union européenne et nous avons obtenu qu'elle décide des sanctions personnelles contre un certain nombre de responsables syriens de façon à leur interdire de se déplacer en dehors de leur pays et à geler les avoirs financiers dont ils disposent en Europe.
Nous avons réussi à obtenir une liste de treize noms. Nous n'avons pas réussi à faire en sorte que, sur cette liste, figure le nom du président syrien. Nous ne renonçons pas et nous continuons à agir en ce sens, malgré les réticences, pour ne pas dire l'opposition, de certains de nos partenaires.
Comme vous le voyez, nous sommes pleinement engagés dans ce combat, parce que la situation en Syrie est dramatique et que les conséquences de la déstabilisation de ce pays sur l'ensemble de la zone nous préoccupent et nous font agir. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Auteur : Mme Élisabeth Guigou
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 mai 2011