Libye
Question de :
M. Daniel Goldberg
Seine-Saint-Denis (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 28 septembre 2011
CONDITIONS DE LIBÉRATION DES INFIRMIÈRES BULGARES DÉTENUES EN LIBYE
M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Daniel Goldberg. Monsieur le ministre de l'intérieur, nous nous sommes réjouis de voir la démocratie avancer en Libye, notamment grâce à l'action de la France. Mais cette satisfaction ne saurait faire oublier les nombreuses années où vos liens avec le régime de Mouammar Kadhafi comportaient plus d'arrangements que d'oppositions. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Membre de la commission d'enquête sur les conditions de la libération des infirmières et du médecin bulgares, je vous ai entendu, le 13 décembre 2007, déclarer sous serment : " La France n'a pas conclu le moindre contrat pendant les discussions sur ces libérations. " Depuis, certains éléments laissent à penser que cette version omet une partie substantielle de la vérité.
En effet, un premier contrat entre la Libye et une société française aurait été signé dès le 10 avril 2007, en pleine campagne présidentielle, accompagné de commissions importantes pour l'intermédiaire Ziad Takieddine, et cela grâce à votre appui et à celui de Nicolas Sarkozy. Ce contrat portait sur la fourniture d'un système de brouillage des communications puis d'un 4x4 furtif, sûrement très utiles à Mouammar Kadhafi peut-être au moment même où nous parlons.
Mais il est vrai que, dès l'automne 2005, vous-même, alors directeur de cabinet du ministre de l'intérieur, puis Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux, alors ministre délégué aux collectivités territoriales auriez effectué plusieurs visites à Tripoli, toutes préparées par le même Ziad Takieddine. Il semblerait aussi que le Président de la République de l'époque ait freiné cette diplomatie en partie occulte, aux motifs pour le moins obscurs.
Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à nous expliquer précisément - pour reprendre l'expression du Premier ministre, ce serait " une faute morale " de ne pas le faire ici devant la représentation nationale - pourquoi Ziad Takieddine s'est imposé comme votre intermédiaire dans vos échanges avec la Libye alors que sa responsabilité était possiblement en jeu dans d'autres dossiers ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le député, puisque vous faites allusion à une séance de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les conditions de libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien détenus en Libye à laquelle j'ai eu l'honneur de participer, je rappelle qu'à la fin du mois du juillet 2007, la France a permis la libération des infirmières bulgares et d'un médecin palestinien qui étaient détenus depuis des années. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Richard Mallié et M. André Schneider. Eh oui !
M. Claude Guéant, ministre. La France a obtenu ces libérations alors que bien d'autres pays s'y étaient essayés sans y parvenir. Je dois dire que je suis toujours étonné, pour ne pas dire choqué, que l'on ait, sur certains bancs, tant de mal à admettre les succès de notre pays, à les assumer et à les reconnaître. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ce n'est pas parce que notre pays rencontre des succès qu'il y a quoi que ce soit de suspect. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Michel Lefait. Ce n'est pas une réponse !
M. Claude Bartolone. Répondez à la question !
M. Claude Guéant, ministre. Je veux répéter ce que j'ai dit sous serment devant la commission d'enquête : il n'y a eu aucune contrepartie. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) J'ai parfois eu M. Takieddine au téléphone...
M. François Loncle. Menteur !
M. Claude Guéant, ministre. Je ne permets pas que l'on dise que je mens : je sais la vérité. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie !
M. Claude Guéant, ministre. J'ai eu M. Takieddine au téléphone quelquefois car, effectivement, il me donnait des éléments d'ambiance sur ce qui se passait à Tripoli, mais les négociations ont eu lieu directement avec le colonel Kadhafi et son Premier ministre, M. Baghdadi. Il s'agit d'une réalité que chacun peut constater - il y avait notamment des fonctionnaires de l'Union européenne qui participaient.
Il n'y a eu dans cette affaire aucune négociation, aucun contact, sur des marchés quelconques. On a fait allusion à un véhicule furtif dont j'ai découvert l'existence : jamais nous ne nous sommes occupés d'un véhicule furtif. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il ne suffit pas que n'importe qui écrive n'importe quoi dans n'importe quel organe de presse pour que cela soit plus fiable que la parole d'un ministre de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je répète qu'il n'y a eu aucune négociation et aucune tractation commerciale avec la personne dont vous avez cité le nom. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Daniel Goldberg
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration
Ministère répondant : Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 septembre 2011