Yémen
Question de :
M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - Nouveau Centre
Question posée en séance, et publiée le 9 novembre 2011
YÉMEN
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe Nouveau Centre.M. Jean-Christophe Lagarde. Hier soir, avec un certain nombre de nos collègues, et en votre nom, monsieur le président, nous recevions à l'Assemblée nationale le nouveau prix Nobel de la paix 2011, Mme Tawakkul Karman, qui est également la coordinatrice des jeunes de la révolution au Yémen.
Le Yémen, pays peu connu en France, est dirigé par M. Saleh depuis trente-trois ans - excusez du peu ! -, et son appareil répressif est aux mains de toute sa famille. Ce pays connaît des difficultés importantes puisqu'il est l'un des plus pauvres de la région, mais aussi l'un des plus peuplés avec 24 millions d'habitants.
Depuis des mois, il connaît une révolution pacifiste par de nombreuses manifestations, et les pays du Golfe, à trois reprises, ont amené M. Saleh à s'engager dans un processus qui devait conduire à sa démission, à son retrait du pouvoir. Il s'est toujours dédit au dernier moment.
Notre pays soutient les résolutions de l'ONU qui visent justement à ce que ce plan de retrait du pouvoir de M. Saleh soit respecté. Malgré tout, depuis le début de cette révolution, 861 morts et près de 25 000 blessés, d'après l'ONU, sont à déplorer.
Les révoltés poursuivent leur mouvement, la répression s'accentue, les armes sont achetées par le pouvoir pour réprimer sa propre population sur ses deniers personnels.
Mme Tawakkul Karman transmet la demande du peuple yéménite, à la fois à la représentation nationale et au Gouvernement - vous l'avez reçue, monsieur le ministre des affaires étrangères, hier matin -, que soit accentuée la pression sur la famille Saleh, et le Président en particulier, en gelant les avoirs qu'ils peuvent posséder en France et dans les pays européens, mais également en transférant à la Cour pénale internationale le dossier de M. Saleh et de sa famille pour les crimes commis contre le peuple yéménite.
M. Jean-Paul Lecoq. Ce n'est pas encore fait ?
M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre des affaires étrangères, la France va-t-elle participer à accentuer cette pression ? S'engagera-t-elle et engagera-t-elle ses partenaires européens à geler les avoirs de la famille et à transmettre le dossier à la Cour pénale internationale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Roland Muzeau. L'adjoint de BHL !
M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le député, j'ai reçu comme vous, hier, Mme Tawakkul Karman, qui est le nouveau prix Nobel de la paix. Sa personnalité, le rayonnement qui émane d'elle, sa détermination à poursuivre son combat, la clarté de son expression et de sa pensée m'ont fortement impressionné. J'ai même été ému lorsque, évoquant les valeurs qui inspirent son combat, elle m'a tout simplement cité la devise de notre république : " Liberté, Égalité, Fraternité ".
Elle m'a dit aussi combien la jeunesse yéménite attendait de nous, attendait de la solidarité des démocraties.
Notre politique à l'égard du Yémen est très claire : nous avons soutenu, dès le départ, le plan élaboré par le conseil de coopération des États arabes du Golfe qui préconise la transition du pouvoir. Le président Saleh doit passer la main, il doit quitter le pouvoir.
Nous avons également soutenu la résolution 2014 du Conseil de sécurité, qui institue une commission d'enquête chargée de se prononcer sur la poursuite des auteurs d'actes criminels.
Enfin, j'ai assuré Mme Karman que nous examinions avec nos partenaires européens la possibilité de prendre des sanctions, comme le gel des avoirs de certaines personnalités yéménites qui cautionnent cette répression.
Je peux vous assurer que nous continuerons à écouter attentivement la voix de Mme Karman qui nous dit, tout simplement, que le pari que nous avons pris vis-à-vis des printemps arabes est raisonnable. Il ne saurait y avoir d'incompatibilité entre l'islam et la démocratie. C'est ce qui inspire aujourd'hui la diplomatie française. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 9 novembre 2011