durée du travail
Question de :
M. Christophe Sirugue
Saône-et-Loire (5e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 12 juin 2008
TEMPS DE TRAVAIL
M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Christophe Sirugue. Les organisations syndicales européennes ont qualifié l'accord de l'Union européenne sur le temps de travail de jour sombre pour le droit social européen et de régression sociale.
M. Jean-Marc Roubaud. C'est faux !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est vrai !
M. Christophe Sirugue. En effet, la durée maximale du travail est ainsi portée à 60 ou 65 heures pour les salariés, qui pourront être conduits à accepter, à titre individuel, de déroger aux 48 heures réglementaires : c'est l'opt out britannique.
La France s'est désolidarisée de nombreux pays, et votre ministre du travail a procédé à un revirement complet, permettant l'adoption de ce texte d'accord à la majorité qualifiée.
M. Patrick Roy. Scandaleux !
M. Christophe Sirugue. Comble de tout, M. Bertrand a exprimé son autosatisfaction, annonçant que l'heure était à la relance de l'Europe sociale. Volontiers rassurant, il a également déclaré que la dérogation à la durée légale du travail ne s'appliquerait pas en France, où se sont les conventions collectives qui priment.
Monsieur le Premier ministre, comment le ministre du travail peut-il affirmer à Bruxelles que la France n'est pas concernée, alors que dans le projet de loi qu'il soumet cet après-midi aux partenaires sociaux, il est inscrit en toutes lettres que la durée du travail de tout salarié peut être fixée sans accord collectif préalable par une convention individuelle de forfait-heures sur la semaine ou sur le mois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Cette possibilité concerne donc bien tous les salariés, qu'ils soient cadres ou employés.
Monsieur le Premier ministre, comment le Gouvernement de la France peut-il tenir un tel double langage ? Comment peut-on accepter que la tromperie soit érigée en modèle de démocratie sociale ? Comment pouvez-vous affirmer que " les accords trouvés offrent plus de garantie pour les travailleurs " ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Monsieur Sirugue, d'ici à quelques semaines vous aurez à débattre de ce sujet dans l'hémicycle. Vous constaterez alors que les forfaits-heures dont il est question dans le document transmis aux partenaires sociaux ne concernent pas l'ensemble des salariés.
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Alors lesquels concernent-ils ?
M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Sans doute avez-vous été mal informé, du moins veux-je le croire. Vous devez savoir que rien ne changera en France s'agissant de la durée maximale du travail.
M. Jean-Paul Lecoq. Mensonge !
M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Rien ne changera non plus concernant la rémunération des heures supplémentaires ou les repos, qu'ils soient quotidiens ou hebdomadaires. La directive, en effet, ne fait que proposer une faculté, et j'ai d'ores et déjà indiqué dans la nuit de lundi à mardi à Luxembourg qu'en ce qui concerne la France nous ne changerions strictement rien.
M. Jérôme Lambert. Pour le moment !
M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Il ne faut pas non plus oublier que sans cette directive - pourquoi ne l'avez-vous pas précisé ? - il serait possible en Europe de travailler 78 heures par semaine, tandis qu'aujourd'hui le texte permet de rester à 48 heures et offre des garanties aux salariés.
Pourquoi ne dites-vous pas non plus que, grâce à l'adoption de la directive sur le travail intérimaire, des millions de travailleurs européens bénéficient de l'égalité de traitement au premier jour ? Préférez-vous une Europe en panne, comme c'était le cas depuis 2002 sur la question de l'intérim ou depuis 2004 sur celle du temps de travail, ou une Europe qui avance ?
Nous devons certes penser à nous et empêcher que les Français perdent leurs garanties, mais nous avons aussi le devoir de nous mobiliser pour l'ensemble des travailleurs européens. C'est le sens de cet accord historique. Il est temps que l'Europe sociale entre dans une phase de relance, et cela devrait normalement faire plaisir à tout le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Christophe Sirugue
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Travail, relations sociales, famille et solidarité
Ministère répondant : Travail, relations sociales, famille et solidarité
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 12 juin 2008