Question au Gouvernement n° 653 :
immigration clandestine

13e Législature

Question de : M. Serge Blisko
Paris (10e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 26 juin 2008

DIRECTIVE " RETOUR "

M. le président. La parole est à M. Serge Blisko, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Serge Blisko. Monsieur le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, je le regrette pour nos hôtes, mais mercredi dernier, le Parlement européen a adopté une directive permettant aux pays de l'Union européenne d'enfermer en rétention des étrangers pour une durée maximale de dix-huit mois ou de les bannir pendant cinq ans du territoire européen. (" Scandaleux ! " sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Cette directive qualifiée par toutes les organisations non gouvernementales et les associations concernées de " directive de la honte " permet aussi la rétention de mineurs isolés.
Le lendemain, monsieur le ministre, vous vous vantiez de la hausse du nombre d'immigrés expulsés. Considérer les hommes, les femmes et les enfants comme des objectifs chiffrés est effrayant ! Pour atteindre vos objectifs, vous traquez les parents et grands-parents à la sortie des écoles (" Scandaleux ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), les salariés sur leur lieu de travail, les malades dans les hôpitaux ! Vous organisez des souricières dans les préfectures ! (Mêmes mouvements.)
Dimanche dernier, un incendie a ravagé le centre de rétention de Vincennes, provoquant la panique chez les personnes en attente d'expulsion. Son bilan aurait pu être plus lourd.
M. Philippe Meunier. Il faut respecter la loi !
M. Serge Blisko. Cet incendie est lié à une mutinerie suscitée par le décès non élucidé d'une personne retenue dans le centre de rétention. En réalité, cette révolte trouve son origine dans l'acharnement que vous mettez dans la chasse aux sans papiers.
Le centre de rétention de Vincennes, que, comme de nombreux parlementaires, j'ai visité à plusieurs reprises, est le plus grand de France. Les incidents y sont fréquents et le malaise y est patent, y compris parmi les fonctionnaires de police, qui souhaiteraient plutôt se consacrer à leur véritable mission, qui est de sécuriser les personnes et les biens, que garder des personnes qui n'ont commis aucun délit. Cet incident dramatique donne de la France, patrie des droits de l'homme, une image déplorable, au moment même où l'Europe se barricade sans voir que cette politique suscite colère et réprobation en Amérique latine comme en Afrique.
Monsieur le ministre, votre politique était peu humaine ; elle devient dangereuse. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Lucien Degauchy. C'est vous qui êtes dangereux !
M. Serge Blisko. Au lieu d'accuser les associations, quelles mesures allez-vous prendre pour éviter la répétition d'un tel drame ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Monsieur le député Serge Blisko, je rappellerai tout d'abord que la " directive retour " est une initiative de la Commission européenne qui remonte à 2005, et donc pas une initiative française. Elle a été approuvée par la totalité des gouvernements des Vingt-sept et, la semaine dernière, le 18 juin, par le Parlement européen, et cela non pas à une majorité étriquée, mais par une vraie majorité, notamment par la majorité des députés socialistes allemands et espagnols. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pour ce qui est, en deuxième lieu, de ce qui s'est déroulé dans le centre de rétention de Vincennes, il est vrai qu'il y a eu mort d'homme,...
M. Lucien Degauchy. Il n'avait qu'à rester chez lui !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. ...et une mort est par définition tragique. Il s'agissait d'un homme qui se trouvait là vraisemblablement dans la perspective d'être reconduit dans son pays d'origine après avoir été condamné à huit reprises pour des faits de trafic de stupéfiants et de violences.
M. Pierre Gosnat. Cela n'a rien à voir !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. La vérité est très simple et il faut poser quelques questions qui appellent des réponses précises. Premier élément : la France est-elle le seul pays qui ait des centres de rétention ? La vérité est que tous les pays d'Europe construisent aujourd'hui des centres de rétention. Deuxième élément : existe-t-il une alternative aux centres de rétention ? Oui : c'est la prison - c'est ce qui se pratique aujourd'hui dans certains Länder allemands ou sur le territoire irlandais. En 1982, la majorité de l'époque a pris l'initiative d'imaginer ces centres de rétention, de les construire et de les inaugurer. C'était une bonne idée, parce que c'était plus juste. Je le répète : l'alternative au centre de rétention, c'est la prison.
Que s'est-il passé au centre de rétention de Vincennes, où se sont d'ailleurs rendus certains parlementaires - MM. Brard, Gosnat, Mariani et Bénisti ? Il y a eu un incendie criminel, c'est-à-dire un incendie volontaire, qui aurait pu blesser et tuer.
M. Lucien Degauchy. Qui va payer les dégâts ?
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Une enquête judiciaire a été ouverte et il appartient désormais à la justice de faire toute la lumière et de préciser les responsabilités directes et indirectes.
Enfin, monsieur Blisko, si vous parlez de politique du chiffre, je parle, quant à moi, de politique des résultats : résultats de la lutte contre les filières, résultats contre ces pirates des temps modernes, résultats contre le travail clandestin, résultats contre les patrons fraudeurs, résultats contre tous ceux qui ne respectent pas la loi de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le problème n'est pas l'immigration, mais l'absence de politique d'immigration. J'ai la chance d'appartenir à un gouvernement qui, sous l'autorité de François Fillon, mène une politique cohérente, juste, équilibrée et efficace. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. Serge Blisko

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

Ministère répondant : Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 juin 2008

partager