Question au Gouvernement n° 693 :
La Poste

13e Législature

Question de : Mme Sylvia Pinel
Tarn-et-Garonne (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 16 octobre 2008

CHANGEMENT DE STATUT DE LA POSTE

M. le président. La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme Sylvia Pinel. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre. Le Gouvernement veut changer le statut de La Poste, entreprise publique à laquelle tous les Français, sans exclusive, sont très attachés.
M. Patrick Roy. Ce projet est scandaleux !
M. le président. Monsieur Roy !
Mme Sylvia Pinel. C'est dans un contexte de crise financière mondiale, au moment où de nombreux établissements bancaires et financiers partout sur la planète s'en remettent à la protection des États, que le Gouvernement prépare la privatisation du service public postal.
Car l'ouverture du capital de La Poste en 2011 sera suivie de la prise de contrôle de cette entreprise par le secteur privé et les marchés financiers. Cette privatisation en gestation répond donc à un choix politique d'autant plus incompréhensible qu'aucune contrainte européenne ne s'exerce. Vous projetez délibérément de sacrifier l'un des plus anciens services publics français sur l'autel de la rentabilité financière, au moment même où le système financier mondial vacille.
De plus, cette privatisation s'accompagnera nécessairement, sur l'ensemble du territoire, d'une vaste opération de démantèlement du service public postal de proximité. D'ores et déjà, la direction du groupe a unilatéralement décidé de déléguer aux communes la gestion directe des bureaux de poste les moins rentables. Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, ce sont ainsi vingt-neuf bureaux de poste qui se trouvent menacés de transformation, soit un désengagement de La Poste sur 60 % du territoire. Ce processus est déjà engagé, sans aucune concertation avec les élus concernés, ce qui est tout à fait inacceptable.
C'est bien entendu une atteinte grave à la mission de service public de La Poste, mais c'est aussi un nouveau transfert de charges vers les collectivités, les contribuables, et les usagers.
Loin d'être un progrès, le texte que vous préparez sera un recul ; il aura un coût financier et un coût social. Comment la France compte-t-elle justifier, au regard du droit européen, le statut des agences postales communales ? Comment, une fois soumise aux intérêts financiers des actionnaires privés, La Poste pourra-t-elle remplir ses missions de service public sur l'ensemble du territoire de la République ? Pourquoi, en un mot, ne pas renoncer à cette privation du service public postal, et pourquoi ne pas aller dans le sens de l'Histoire, au moment où les États les plus libéraux de la planète redécouvrent les vertus de la nationalisation ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Madame la députée, vous vous interrogez, de manière légitime, sur l'avenir de La Poste. Je voudrai vous dire que mon collègue M. Hubert Falco sera ce soir dans votre département, et je sais que vous serez reçue avec vos collègues élus par Mme le préfet du département le 24 octobre prochain. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous avez raison de dire que La Poste n'est pas une entreprise comme les autres ! Elle incarne le service public de proximité sur l'ensemble du territoire et elle joue un rôle majeur de lien social entre les citoyens.
M. Maxime Gremetz. Elle n'est pas en faillite, elle !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Elle évolue aussi dans un environnement en pleine mutation ; elle doit relever deux défis : le premier est celui de l'ouverture à la concurrence le 1er janvier 2011, auquel il faut nous préparer, car la poste allemande ou la poste néerlandaise viendront proposer leurs services dans notre pays.
MM. Maxime Gremetz et André Chassaigne. Et alors ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le second défi est technologique : avec le développement d'internet, La Poste perd des parts de marché ; le volume d'activité baisse d'environ 0,5 % par an, et même de 3 % depuis le début de l'année. Il faudra donc moderniser La Poste.
MM. Maxime Gremetz et André Chassaigne. Et alors ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Il est donc légitime que l'État actionnaire s'en préoccupe, et le président de La Poste n'est pas le moins bien placé pour nous faire des propositions.
M. Maxime Gremetz. 360 milliards pour les banques, et rien pour La Poste !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. L'État a décidé, dans ce cadre, de lancer un grand débat public, en consultant à la fois les représentants des personnels, les élus de toutes sensibilités, mais aussi les clients de La Poste...
M. André Chassaigne. Allez donc voir les usagers !
M. Roland Muzeau. Vous voulez brader La Poste !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. ...pour répondre à ces questions : quels sont les métiers de La Poste ? Quel est l'avenir du fonctionnement de La Poste ? Cette commission est animée par M. François Ailleret, ancien directeur général d'EDF, qui préside le groupe des entreprises publiques au Conseil économique, social et environnemental.
M. le Premier ministre a d'ores et déjà indiqué qu'il y avait des choses qui n'étaient pas négociables. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. Roland Muzeau. Menteur !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. En effet, nous ne privatisons pas, comme vous l'avez entendu : le contrat de service public de La Poste, le prix unique du timbre sur l'ensemble du territoire, la distribution du courrier six jours sur sept dans les boîtes aux lettres, les points de présence sur l'ensemble du territoire, les dix-sept mille points de contact : rien de cela n'est négociable !
Nous réfléchissons à l'avenir du service public de La Poste, mais nous ne braderons pas le service public de La Poste ! (Protestations sur les bancs du groupe GDR. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Maxime Gremetz. Paroles, paroles !

Données clés

Auteur : Mme Sylvia Pinel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Postes

Ministère interrogé : Industrie et consommation

Ministère répondant : Industrie et consommation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 octobre 2008

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